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Mariage interethnique et production de l'ethnicité

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par Bogui Fernand Landry Niava
Université de cocody Abidjan - maitrise 2006
  

Disponible en mode multipage

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AVANT-PROPOS ET REMERCIEMENTS

La question des mariages interethnique soulève des problèmes réels de définition de l'appartenance ethnique des descendants au niveau des groupes ethniques dont sont issus les parents géniteurs. Mais cette situation conduit les acteurs à développer un reflexe de mobilité ethnique face à leur rejet souvent pour des questions de respect d'institution et de pérennisation des habitudes et coutumes des groupes ethniques. Les différentes sociétés touchée par le phénomène de mariage interethnique veulent toujours fonctionner comme si les échanges matrimoniaux n'avaient pas subit de transformation. Les phénomènes tels que le modernisme, les migrations, ont contribués à rendre effective les relations entre des groupes humains socialement et culturellement différent. En effet, au nom d'une cohésion nationale les autorités villageoise et étatique incitent les populations à développer des habitudes d'interpénétration ethnique. Mais ces mêmes autorités se tiennent à distance des phénomènes que créés ce genre de politique. Les sociétés ivoiriennes sont envahies par les problèmes de définition d'un statut identitaire ou d'une appartenance sans ambiguïté des descendants et mêmes de leur parent. Car pour avoir pris pour femme ou pour homme une personne différente de son groupe ethnique les conjoints subissent certains désagréments au sein de leur groupe d'origine et souvent aussi dans le groupe ethnique du conjoint. Toutes ces situations non exhaustives que nous présentons méritent qu'une étude soit menée sur la question des mariages interethnique. C'est dans ce contexte que nous avons entrepris d'engager une étude pour saisir les phénomènes d'ethnicité sous l'angle des mariages interethnique. En effet, les mariages interethniques constituent pour nous une porte d'entrée valable, pour cerner les questions d'ethnicité dans nos villages. Nous pensons que ces transformations au niveau des échanges matrimoniaux contribuent à une désorganisation profonde des habitudes et coutumes des peuples. Les sociologues sont donc attendu, afin d'apporter des éléments de compréhension de ce phénomènes. Afin, de proposer des mécanismes de prise en compte des nouvelles catégories d'acteurs dit métisse afin d'intégrer au plan macro, méso et micro cette composante sociale particulière dans les prises de décisions sur les questions des identités sociales. Ce travail de recherche se veut une contribution à l'explication de la problématique des questions d'ethnicité manifeste dans nos sociétés traditionnelles et modernes sous l'angle des mariages interethniques. Il s'inscrit dans le cadre de notre formation en sociologie et surtout passage obligé pour l'obtention d'une maîtrise de recherche en sociologie.

La réalisation de ce mémoire de maîtrise a été possible grâce au concours de plusieurs personnes qu'il importe ici de nommer et de remercier. Ainsi nous tenons à remercier Dr Roch Yao Gnabeli, maitre assistant à l'IES (Institut Ethno Sociologie) et chef de département du dit institut, pour ses conseils et orientations. Nous voulons témoigner aussi notre profonde reconnaissances aux étudiants en thèse de sociologie surtout à Droh Rusticot, à Bouaki Baya, Gacha Franck, et à tous les étudiants menant la recherche sur le mariage interethnique et la production de l'ethnicité dans les autres villages. Car les différentes rencontres formelles ou informelles nous ont permis de mieux appréhender les différents concepts structurant notre thème de recherche.

Nous n'oublions pas nos différents guides sur notre terrain d'étude à savoir Miessan Edmond chef de catégorie tchagba et son oncle tonton kouadio, le président des sages de Yaou en la personne Ekrassi Mathurin et son fils, sans oublier le collège des notables. Nous tenons à témoigner spécialement notre gratitude à notre mère, Gnagne Essime Clémentine, et à tous mes frères et soeurs. Nous n'oublions pas M. Dayoro doctorant à l'IES, Achi Okou Francis, Amian Robert pour la correction des fautes de grammaires, tous les membres de la classe méthodiste Bérée et tout le groupe de jeunes de l'église methodiste unie John Wesley de la palmeraire. Enfin merci à Bouberi Benita, à Kakou Yah Joelle, et à Guébo Hadassa pour leur soutien moral, financier, matériel et pour leurs prières.

TABLEAU DES SIGLES ET ABREVIATIONS

IRD

Institut de recherche et de développement

CCF

Centre Culturel Français

IES

Institut d'Ethno-Sociologie

INADES

Institut Africain pour le Développement Economique et Social

Google

Moteur de recherche sur INTERNET

Yahoo

Moteur de recherche et de messagerie sur INTERNET

INTRODUCTION

CONTEXTE DE L'ETUDE

La réflexion actuelle sur les rapports interethnique dans la structuration de la réalité sociale sous l'angle des mariages interethniques, nous ouvre une perspective de recherche sur une question que peut de sociologue ont analysé. En effet les concepts d'ethnie, d'ethnicité, et de mariage interethnique sont des réalités sociales en pleine mutation dans nos milieux ruraux. L'analyse d'un point de vue historique des échanges matrimoniaux décrit l'évolution des échanges matrimoniaux depuis la période coloniale jusqu'à nos jours.

Vu la floraison d'articles et d'ouvrages sur les rapports décrivant plusieurs tendances sur cette même question.

Un tel constat atteste de l'effort scientifique mené afin de mieux comprendre un phénomène aussi complexe, que les rapports interethniques.

Aussi, dans le cadre de cette activité conduite à plusieurs niveaux du système social, force est de constater que la plupart des travaux présente les relations interethniques, comme nécessairement conflictuelles.

De plus, ces travaux présentent le foncier comme la variable principale entraînant les autres variables, dans l'explication des rapports entre les groupes ethniques en interaction. Alors que d'autres aspects ou éléments sociaux permettent d'élucider les différents comportements des groupes ethniques en interaction perpétuelle, dans la structuration du système social. Il va s'en dire, que d'autres variables existent et sont valables pour décrire expliquer et analyser d'autres types de rapports interethniques, non nécessairement conflictuels.

Dans cette optique des études précédemment menées dans le cadre du laboratoire d'analyse des phénomènes interethniques depuis près de trois années au département de sociologie de l'université de Cocody sous la direction du docteur Roch Yao Gnabeli, conforte notre position selon laquelle le foncier n'est pas le seul élément de régulation des relation interethniques. Comme plusieurs journalistes et scientifiques semblent le faire croire. La nouvelle thématique qu'aborde ce laboratoire s'intitule : « mariage interethnique et production de l'ethnicité ».

Au vu des approches de réflexion qu'elle soulève nous pouvons dire qu'il existe plusieurs champs sociaux dans l'appréhension des logiques d'explication des limites aux frontières ethniques que semblent dessiner les groupes ethniques en interaction.

Ceci dit, les mariages interethniques constituent pour nous une porte d'entrée valable pour mener une analyse pertinente sur la question des relations interethniques.

PREMIERE PARTIE

CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE

I- CADRE THEORIQUE

I-1- PROBLEMATIQUE

L'analyse par les sciences sociales des relations interethniques ne peut plus aujourd'hui être négligée, ce qui explique la floraison d'article et d'ouvrage sur la dite question.

Le phénomène de l'ethnicité a été abordé sous plusieurs angles. Nous pouvons citer plusieurs écrits sur la question : l'analyse de l'ethnicité en rapport avec l'intégration des minorités1(*), ensuite l'ethnicité sous l'angle des conflits foncier2(*), de plus l'ethnicité traité en relations avec la citoyenneté3(*) , et l'ethnicité en rapport avec le multipartisme4(*), enfin l'ethnicité sous l'angle des frontières entre les groupes ethniques5(*). Il est important de notifier que cette liste n'est pas exhaustive.

Ces différents écris attestent que le phénomène de l'ethnicité structure à plusieurs niveaux les rapports entre les groupes en interaction.

Cependant, il est donné de constater que l'ethnicité n'a pas suffisamment été abordée sous l'angle des mariages interethniques en Cote d'Ivoire. Les écrits sur la question de l'ethnicité en rapport avec les mariages interethniques sont presque inexistants. Alors que l'un des modes de désignation le plus récurrent des groupes et des individus, dans le quotidien est l'ethnie. Dans cette perspective les mariages intra ethnique permettent sans difficulté de définir l'appartenance ethnique des descendants de ce type de mariage. Il ressort de ce qui précède que les mariages intra ethnique constituent une continuation dans le processus d'assignation des appartenances ethniques. Contrairement au mariage intra ethnique, le mariage interethnique fait naître une discontinuité au niveau du mode de désignation déjà répandu dans la société. En effet, dans un mariage interethnique les deux membres du couple ne partagent pas les mêmes codes culturels. Partant de là, nous voulons comprendre dans le cadre des mariages interethniques comment se fabrique l'appartenance ethnique des descendants de mariages interethnique ? Et également de quel groupe ethnique se réclamerons les descendants de ce type de mariage ?

Au regard de l'enjeu que révèle le mariage interethnique dans le mode de fabrication de l'ethnicité, nous avons réalisé une enquête exploratoire à Yaou. Cette enquête révèle une différenciation au niveau des descendants de mariage interethnique. Cette enquête nous a permis de saisir les manifestations concrètes des mariages interethniques dans le processus de fabrication de l'ethnicité.

Elle a permis également d'observer la société Abouré de Yaou sous l'angle des mariages interethnique.

En effet, une structuration ethnique se dégage de l'espace social. Chaque ethnie ou groupe ethnique en présence sur notre champ d'étude, exerce une activité précise dans l'organisation sociale et dans la production. De plus les autochtones (Abouré) ont matérialisé l'hiérarchisation ethnique du village, par des limites que les allogènes Ivoiriens et non Ivoiriens ne peuvent franchir. Ces limites se situent au niveau politique, économique et au niveau foncier, pour ne citer que ceux là. La composition de la communauté allogène et allochtone est la suivante à Yaou : Burkinabé, Attié, Malien, Ghanéen, Baoulé et Bété.

A propos des raisons de leur présence à Yaou, ils la justifient par une quête de conditions climatiques et végétales propice à l'activité agricole, la recherche de bien être économique et sociale et la fuite des travaux forcés pendant la période coloniale.

Ces différents éléments cités plus haut ajoutés à l'existence des mariages interethniques, contribuent à la sédentarisation de la communauté allogène dans le village de Yaou.

La sédentarisation contribue également à la naissance d'une nouvelle configuration ethnique et spatiale de Yaou antérieurement homogène. Ce constat conduit à l'hétérogénéité ethnique et spatiale du village de Yaou.

Dans le cas de Yaou, l'enquête exploratoire a permis d'identifier une composition de stratégies, que les acteurs sociaux allochtones déploient dans leur interaction avec les autochtones, pour contourner les restrictions érigées à leur encontre, afin d'accéder à un certain nombre de ressources, de privilèges qui structurent le mode de vie social à Yaou. Aussi constatons-nous un ensemble de mesures restrictives mise en place par l'organisation politique et sociale des Abourés de Yaou, à l'encontre des enfants issus des mariages interethniques entre un Abouré et les autres groupes ethniques. Les rôles des enfants, leur statut social et identitaire, leurs privilèges sociaux sont diversement appréciés en fonction de la spécificité du champ où se produit l'interaction. Au plan politique, les enfants issus des mariages interethniques sont soumis à des barrières sociales qui les empêchent d'accéder à certaines hiérarchies politiques du village et à certaines ressources, car ils sont qualifiés par un discours social les taxant de ne pas être « Abourés pur6(*) ».

Aussi constatons-nous, sur le champ des héritages, la production de différence sous les clichés suivant « Abouré pur » et « Abouré ». Ces clichés structurent les rapports entre les acteurs dans une logique conflictuelle au niveau de l'accession à l'héritage des enfants issus des mariages interethniques. Car ils sont souvent disqualifiés, alors que sur d'autres champs tels que le champ culturel et sur le champ de la modernisation du village, ces mêmes acteurs précédemment identifiés comme n'étant pas « Abouré pur » sont intégrés.

En plus, il a été constaté qu'aucune restriction n'était admise pour disqualifier les acteurs sociaux issus du mariage interethnique, pour leur participation à la fête de génération.

De même, aucune distinction n'est faite au niveau du lieu de sépulture entre les acteurs issus des mariages interethniques et ceux issus des mariages intra ethniques.

Aussi observons-nous, que dans le cadre des associations de développement, il n'y a pas de discrimination entre les acteurs sociaux issus du mariage interethnique et les autres catégories d'acteurs. De plus, ils peuvent sur ce champ précis prétendre aux différents niveaux de responsabilité dans les associations de développement du village.

Tous ces constats nous amène à soulever les interrogations suivantes:

Quels sont les mécanismes sociaux de différenciation des acteurs issus de mariage entre un Abouré ou une Abouré et les autres groupes ethniques présents à Yaou ?

Les idéologies et les institutions étant des modalités sociales fondamentales dans la fabrication des rapports sociaux. L'étude des idéologies et des instituions permet de situer les individus et les groupes dans le champ social, et l'élaboration d'une identité sociale et personnelle compatible avec des systèmes de valeurs socialement et historiquement déterminés.

Dans le contexte socio politique actuel l'ethnie apparaît comme une variable à enjeu important dans la fabrication de l'ethnicité. Car l'appartenance ethnique constitue dans certains cas un moyen de capter des ressources villageoises et un moyen de revendiquer dans des cas le statut d'autochtone .Ces raisons nous conduisent à nous demander : quels enjeux cachent l'appartenance à l'ethnie Abouré de Yaou ?

I-2- REVUE DE LA LITTERATURE

La littérature sur le mariage interethnique et la production de l'ethnicité n'est pas assez fournie en ce qui concerne les ouvrages édités. Toutefois, nous avons pu consulter différents documents se rapportant à notre thème de recherche et eu recours à des sites Internet pour la documentation en ligne. Au terme de nos lectures, nous avons répartis les documents consultés de façon suivante. La première partie traite de la question de l'ethnie, la seconde partie s'attarde sur la question de l'ethnicité et la troisième partie est structurée par les travaux abordant la question des frontières ethniques. Enfin la dernière partie renferme les écrits sur le mariage en général et en particulier sur le mariage interethnique.

- La question de l'ethnie

La consultation des écrits relatifs au concept d'ethnie, permet de constater deux tendances au niveau théorique dans la définition et dans l'appréhension du phénomène ethnique. L'une, saisissant l'ethnie d'un point de vue primordialiste et essentialiste. Comme tête liste de cette tendance, nous avons (Shils, 1957)7(*), (Kallen, pluralisme culturel, 1915)8(*), (Geertz, 1963)9(*). Tous ces auteurs ont en un commun d'appréhender le phénomène ethnie suivant deux qualités, dont la qualité primaire et la qualité fondamentale.

Le discours sur la qualité primaire s'illustre aisément dans l'ouvrage, (Philippe Poutignat, Jocelyne Streiff-Fenat, 1995 : 98)10(*) « puisque l'individu naît (ou acquiert dès la naissance) les éléments constitutifs de son identité ethnique : les caractéristiques physiques, le nom, l'affiliation tribale ou religieuse, tous ses éléments qui le relient à des ancêtres putatifs dont l'héritage se transmet de génération en génération ».

Quant au discours sur la qualité fondamentale, il se perçoit dans cet extrait « pour les primordialistes, l'appartenance au groupe ethnique ne représente pas en foyer possible parmi d'autres formes d'identification, mais l'identité de groupe, « base » pour tous les individus, celle à travers laquelle se transmettent les émotions les instincts, les souvenirs d'une façon que l'individu ne peut choisir et qui au-delà de la conscience » (Nourak, 1972)11(*) ; (Nicolas, 1973 : 96)12(*).

En somme l'ethnie sert donc à distinguer les groupes humains les uns des autres, comme s'ils avaient une différence essentielle et irréfutable de par leur naissance.

L'autre tendance, cerne le concept d'ethnie d'un point de vue historique et symbolique donc sous un angle dynamique. Comme précurseur de ce pôle de réflexion, nous avons Vacher De La Pouche13(*), qui présente l'ethnie en ces termes :

«Ce sont des groupes sociaux qu'il définit comme à la fois `'naturels et factices'' », (Philippes Poutignat, Jocelyne Streiff-Fenart, 1995 : 35) procède à une réfutation minutieuse des critères objectifs de l'appartenance nationale, au profit des critères subjectifs (le désir, la volonté, le consentement). En somme pour Renau14(*), l'ethnie est une forme d'appartenance symbolique. Hechter (1976)15(*) renchérit « le groupe ethnique est clairement pour Weber, une construction sociale, dont l'existence est toujours problématique », (Philippe Poutignat, Jocelyne Streiff-Fenart, 1995 : 41).

Une deuxième tendance est construite sur les limites de la première.

Aujourd'hui, d'un point de vue épistémologique, et pragmatique, le concept d'ethnie doit être débarrassé de son contenu naturel, pour se référer qu'aux relations et à la dimension symbolique. La plupart des ouvrages disponibles sur la question, mettent plus en exergue le caractère ou le trait naturel du concept d'ethnie. Alors que l'analyse de la réalité sociale montre que l'ethnie ou les ethnies ne sont pas des réalités statiques. Cette même analyse de la réalité ethnique atteste de l'apparition de nouvelles ethnies et de la disparition de celles existantes.

De nos différentes lectures, nous pouvons retenir que les définitions, qui excluent les variables historiques et symboliques ne sont pas à même d'expliquer la réalité ethnique à présent.

En somme nous pouvons affirmer que l'ethnie se définit comme un ensemble d'individu ou un groupe qui appartient historiquement et symboliquement à la même culture.

La question de l'ethnicité

La littérature sur l'ethnicité ne doit pas faire illusion, dans la majorité des cas, le terme d'ethnicité est davantage utilisé comme une catégorie descriptive permettant de traiter un problème d'une autre nature (l'intégration, l'immigration, les rapports interethniques) que comme un concept sociologiques. Les catégories de l'altérité qui nous occupe plus particulièrement ici sont celles qui visent à distinguer l'autre sur les critères qui se basent sur une « origine supposée commune ».

A l'instar de Philippe Poutignat, nous pensons réintroduire la question de l'ethnicité, non pas sous sa forme stéréotypée, mais relativement aux interrogations et aux débats d'un point de vue purement relationnel qui lui sont liés. Et ce afin de donner un élan nouveau à la sociologie des relations interethnique dans les pays africains.

Ceci dit Poutignat définit l'ethnicité comme « une forme d'organisation sociale basée sur une attribution catégorielle qui classe les personnes en fonction de leur origine supposée et qui se trouve validée dans l'interaction sociale par la mise en oeuvre de signes culturels socialement différenciateur » (Poutignat et Al, 1995 : 155). Le passage en revue des oeuvres sur la question, nous a permis d'identifier de multiples approches théoriques de l'ethnicité. Nous avons la conception qui considère l'ethnicité comme primordiale, qui est considérée comme dépassé par la plupart des acteurs (Poutignat et Al, 1995) mais elle reste le point de départ de toute réélaboration théorique de la notion. Cette approche, en particulier celle qui a été développée par Shils et Kallen dans leur essai sur le pluralisme culturel, postule « une spécificité des attachements ethniques basée sur le caractère ineffable, irrationnelle et profondément ressenti des sentiments qu'ils inspirent » (Poutignat et Al ; 1995 : 96).

Dans cette perspective, l'homme est guidé par « son implication dans des liens personnels dotés de qualités primordiales ».

Ces attachements primordiaux sont ceux qui lient par une relation à laquelle il accorde une qualité spéciale qui tient à la nature du lien indépendamment « de relations effectives », (1995 : 96). Ces liens sont dotés d'une signification égale à celle attribuée aux liens de parenté et se caractérisent par la solidarité qu'ils suscitent, par leur force coercitives et par les émotions et le sentiment du sacré qui leurs sont associés. Ici l'identité est une qualité essentielle qui est transmise dans et par le groupe, indépendamment des relations avec l'out-group.

- Après cette approche, nous avons celle dite sociobiologique. Elle peut être considérée comme une nouvelle variante des théories primordialistes classiques. Pierre Van Den Berghe16(*), son principal représentant a, avec la publication de The ethnic phenomenon (1981), suscité dans le milieu académique un embarras certain. (Poutignat et Al, 1995). Sa thèse principale postule que les humains sont programmés comme les autres animaux pour maximiser leur chance de succès dans la reproduction. Dans cette méthode l'ethnicité apparaît comme une méthode de sélection des « apparentés » par laquelle les individus maximisent leur propre aptitude à se reproduire. Dans le prolongement, de l'énumération des théories de l'ethnicité, nous avons mentionné les théories mobilisationistes et instrumentalistes; au sein de cette approche, on trouve la théorie du groupe d'intérêt, les théories du choix rationnels et la théorie du colonialisme interne. Toutes considèrent l'ethnicité comme ressource mobilisable dans la conquête du pouvoir politique et des biens économiques.

Glazer et Mognihan17(*) « la contribution de l'ethnicité à cette mobilisation de groupe est de fournir un idiome qui favorise la solidarité de groupe et qui, d'une certaine manière dissimule les intérêts spécifiques communs pour lesquels la bataille est menée ». (Poutignat, 1995 : 105).

Nous avons également, les théories néo-marxistes. Le centre d'intérêt de ces rapports est le rapport entre l'ethnicité et la classe au sein d'une théorie d'exploitation capitaliste du travail. Les divisions ethniques et raciales sont appréhendées à partir des fonctions qu'elles remplissent dans le système capitaliste. L'ethnicité constitue une forme d'application sociale en compétition avec la classe « dont la fonction idéologique est de masquer les intérêts de classes convergentes entre les groupes ethniquement dominés et la fraction exploitée du groupe ethniquement dominant » (Poutignat 1995 : 119).  

De plus nous avons, les approches néo-culturalistes, ces approches saisissent l'ethnicité comme un système culturel permettant aux individus de situer leur place dans un ordre social plus large. La dimension culturelle est vue comme le processus par lequel les gens, à travers les différences culturelles se communiquent des idées sur ce qui distingue les hommes et tentent de résoudre les problèmes de signification. (Poutignat et Al 1995 : 121).

Et enfin, l'ethnicité comme forme d'interaction sociale, cette approche met l'accent sur le fait que l'ethnicité est « un processus continu de dichotomisation entre membres et outsiders, demandant à être exprimé et validée dans l'interaction sociale » (Poutignat et Al 1995 : 123).

Cette approche englobe trois sous approches :

v Celle développée par Fredérik Barth18(*) met l'accent sur les aspects génératifs et processuels des groupes ethniques. Ces derniers ne sont pas considérés comme des groupes concrets mais comme des « types d'organisations basés sur l'assignation et l'auto attribution des individus à des catégories ethniques » (Poutignat 1995 : 123)19(*). Ici l'accent est mis sur l'analyse des processus d'attribution catégorielle et d'interaction.

v Quant à l'approche interactionnelle, elle comprend l'approche cognitiviste pour cette tendance, « l'ethnicité, les symboles et les labels ethniques sont des référents cognitifs manipulés dans des buts pragmatiques de compréhension de sens commun et mobilisés par les acteurs pour leurs comportements » (Poutignat et Al 1995 : 187).

v Et enfin la sous approche situationnelle, développée par Lyman et Douglas (1972), l'ethnicité comprise comme élément de définition de situation manipulée par les acteurs. Elle se présente comme un moyen de construction, de manipulation et de modification de la réalité et est un élément des négociations explicites ou implicites de l'ethnicité. (Poutignat et Al 1995 : 129).

Dans la littérature disponible sur l'ethnicité, ce phénomène est mis en rapport avec plusieurs aspects de la réalité sociale.

- L'ethnicité traitée en rapport avec l'identité sociale.

- L'ethnicité analysée en rapport avec la féminité (recherche féministe Vol 5 N°1 1992).

- L'ethnicité traité en rapport avec la religion et l'intégration (rapport religion /ethnicité et intégration d'une église africaine indépendante en France)

- L'ethnicité analysée sous l'angle de l'intégration des minorités (mémoire de maîtrise Université de Genève, Vincent Bracke sous la direction de Claudio Bobzman)

- L'ethnicité traitée sous l'angle des identités collectives.

Au terme de cette exploration, sur la littérature ayant trait à la question de l'ethnicité, il nous parait important de préciser quels éléments permettent d'apporter un éclairage pertinent pour notre étude. On peut considérer le caractère relationnel plutôt que essentiel de l'ethnicité. Cela signifie que le `'nous'' se construit en fonction et souvent en opposition d'un autre. C'est un aspect fondamental pour les théories interactionnistes mais aussi dans les approches mobilisationnistes qui étudient la compétition. On peut en conclure que les différences culturelles ne sont pas à l'origine de la formation des groupes ethniques mais que c'est la communication culturelle qui permet de tracer les frontières entre les groupes compréhensibles pour les insiders et les outsiders.

Une deuxième caractéristique tient au caractère dynamique plutôt que statique de l'ethnicité, qui ne se définit pas comme une propriété inhérente à un individu ou à un groupe. C'est plutôt une forme d'organisation, un principe de division du monde qui peut changer selon les lieux et les temps.

Le troisième élément qu'il faut retenir est que l'identité ethnique ne peut se définir par elle-même, elle est toujours un produit des actes d'autres groupes. « Elle se construit dans la relation entre catégorisation par les non membres et l'identification à un groupe ethnique » (Poutignat et Al 1995 : 155). Elle est donc liée à une définition sociale, à une interaction. Il faut donc être attentif aux deux processus à l'oeuvre, c'est-à-dire l'attribution et l'identification, même si les deux sont difficilement séparables dans une perspective analytique parce qu'ils sont dans une relation d'opposition dialectique.

Enfin la dernière caractéristique est la marge de liberté des groupes ou individus dans l'établissement des critères de définition d'eux même et des autres. La marge de liberté dépend des situations et des rapports entre groupes. Dans des situations de domination l'imposition d'une catégorie par le groupe dominant a comme nous l'avons déjà souligné, un pouvoir performatif.

La question des frontières ethniques

Dans le territoire du politique20(*), «la représentation de l'espace est celle d'un plan continu, d'un support, divisé par les frontières du maillage politico-administratif. Tout individu est très précisément situé dans l'espace. Il appartient à une entité et pas à une autre, repéré dans un espace clos, un polygone fermé par des frontières. Il est dedans ou dehors et presque malgré lui, inscrit dans une clarification binaire du monde. L'appartenance au territoire relève de la représentation, de l'identité culturelle et non plus de la position dans un polygone. Elle suppose des réseaux multiples, elle se réfère à des géosymboles plus qu'à des frontières, elle s'inscrit dans des lieux et des cheminements qui débordent les blocs d'espace homogène et continu de "l'idéologie géographique" (Sauter, 1985). Ces formes réticulées de l'espace seront peut-être la structuration dominante de l'espace de demain.» [...]

«Il s'ensuit que l'affrontement entre la logique de l'Etat-nation et celle de l'identité culturelle ne se réduit pas à un problème d'échelle différente ou de domination entre des parties de force inégale [...]. Plus profondément, il s'agit d'une contradiction entre des systèmes de valeur reflétant chacun des éthiques différentes du territoire.»

Dans la perspective culturelle, «le territoire est perçu comme un "espace culturel", un géosymbole garant de la vitalité des différences légitimes et par là, porteur de l'harmonie pluriculturelle de l'univers. [...] Le territoire est considéré comme le lieu-fondateur des identités locales et le ressort secret de leur survie.» (p. 9)

«Au-delà de la fonction qu'il assume, le territoire est d'abord une valeur. [...] La puissance du lien territorial révèle que l'espace est investi de valeurs non seulement matérielles mais aussi éthiques, spirituelles, symboliques et affectives. C'est ainsi que le territoire culturel précède le territoire politique et à plus forte raison qu'il précède le l'espace économique.» (p. 10)

«La territorialité humaine se définit beaucoup plus par la relation culturelle qu'un groupe ou une ethnie entretient avec [...] le maillage des lieux et le système d'itinéraires qui quadrillent son espace, que par la référence aux concepts biologiques fermés d'appropriation et de frontières. Le territoire dans cette perspective est véritablement un espace symbolique ou, si l'on préfère, un géosymbole, c'est-à-dire le support d'une écriture chargée de sens.»

La question du mariage interethnique

La question du mariage en général et en particulier celui du mariage interethnique, intéresse à plusieurs titres les différentes disciplines des sciences sociales. Dans le cadre de cette réflexion sociologique que nous menons et au vue de la littérature sur la question du mariage, il nous parait judicieux de présenter les différentes idées des auteurs selon la configuration suivante : nous présenterons l'historique du phénomène mariage et ses différentes formes, les objectifs ou ceux à quoi sert le mariage selon les sociétés qu'elles soient occidentales et non occidentales.

Claude Lewis Strauss, dans les structures élémentaires de la parenté met en exergue la théorie de l'alliance élaborée à partir de l'étude ethnographique des sociétés extra-européennes où se manifestaient des relations étroites entre consanguinité et affinité : cette théorie a comme fondement la prohibition de l'inceste : principe selon lequel, au sein d'une société donnée un parent ou une catégorie de parent est pour un individu interdit au mariage. « La prohibition de l'usage sexuel de la fille ou de la soeur contraint à la donner en mariage à un autre homme, et en même temps, elle crée un droit sur la fille ou sur la soeur de cet autre homme. Ainsi, toutes les stipulations négatives de la prohibition ont-elles une contrepartie positive. La défense équivaut à une obligation : et la renonciation ouvre la voie à une revendication.» (Claude Lewis Strauss, 1967 : 60)21(*). Selon la théorie, de l'alliance il existe deux formes différentes de structures d'échange de femmes :

· Soit les femmes de mon groupe sont données à un groupe explicitement défini par les institutions. On parle ici de structures élémentaires

· Soit la collectivité des conjoints possibles pour les femmes de mon groupe est indéterminée et toujours ouverte, à l'exclusion cependant de certains proches, comme c'est le cas dans la société occidentale. On parle ainsi de structures complexes.

A l'analyse du livre (d'Alfred Schwartz, 1971)22(*), les formes de mariage décrites par Claude Lewis Strauss cohabitent souvent dans les pays occidentaux et non occidentaux. Il n'existe donc pas une forme particulière de mariage pour une société donnée (d'Alfred Schwartz, 1971, p223). Dans cette partie il distingue les différentes formes de mariage en pays Guéré : « l'organisation matrimoniale Guéré distinguent cinq formes de mariage : le mariage ba-tê-ino ou `'achat par le père'' ; le mariage ple-ino ou `'rapt similé'' ; le mariage dju-we-siga ou `'échange directe'' ; le mariage o-dja-ino-io-tê, littéralement `'il (ou elle) m'apporte la femme pour que je l'achète'' et enfin le mariage tewa-ino ou `'l'héritage de la veuve'' ; mariage djugà-niino, littéralement `'femme du neveu utérin'' et enfin le mariage no-we-na-no `'homme qui suit un autre homme ».

Les cinq premières formes de mariages sont qualifiés par l'auteur `'de mariages classiques'' et les deux derniers de mariages d'exception''. Quant à (Maryse Duponchel, 1971)23(*), elle décèle dans son ouvrage deux types de mariages interethniques : les mariages entre deux ethnies d'aire culturel différent ; et les mariages entre ethnie d'un même aire culturel.

Concernant (Snjezana Mrdjen)24(*), il décrit le mariage inter-ethnique sous une autre forme. Il la présente comme une union entre deux personnes (homme et femme) de différentes nationalités. « Les mariages interethniques sont un excellent révélateur du niveau d'intégration et d'homogénéisation socio-culturelle des populations qui cohabitent depuis plusieurs siècles ou entre autochtones et immigrés ». (Snjezana Mrdjen, 2000, Vol I).

A ce stade de nos propos, force est de constater le caractère dynamique du phénomène mariage. Car après les travaux remarquables de Claude Lewis Strauss qui liait les différentes formes de mariages selon les sociétés, c'est-à-dire société extra-européenne et société Européenne. Car d'une société à une autre on retrouve souvent les mêmes formes de mariage, mais avec une légère différence locale. Maryse Duponchel révèle que le brassage culturel en milieu urbain est l'une des raisons du dynamisme du mariage.

(Maryse Duponchel, 1971) « Dans une ville d'Afrique la grande diversité ethnique entraîne un brassage culturel intense qui réduit les différences et les oppositions traditionnelles. Une appréciation de ce brassage, propre aux centres urbains, peut se faire à partir de la fréquence des mariages inter-ethniques qui sont une manifestation de cette intégration ».

Au niveau du but ou des objectifs du mariage Binet Jacques, (1961)25(*) résume son ouvrage intitulé Mariage en Afrique noire en ces termes « il semble se dégager deux caractères communs aux mariages africain : son but essentielle est la procréation des enfants, et il diffère donc du mariage européen où la vie du couple joue un rôle primordiale ; et la fréquence de l'union libre en découle directement. Les deux morales et les deux civilisations qui se heurtent en Afrique ont leur part dans cette désagrégation ».

A ce titre les travaux de (Norbert Robitaille et Erick Guimond, 2003, Vol.32, p295-314)26(*) attestent que la procréation comme but du mariage n'est pas particulière à l'Afrique. Car pour faire face au renouvellement des autochtones du Canada, le mariage sous sa forme exogamique a pour objectif la procréation afin d'accroître et de renouveler les autochtones du Canada.

« L'exogamie profite de plus en plus à la fécondité de tous groupes d'identités autochtone étant donné la diminution de la sur-fécondité des couples endogames ». (Norbert Robitaille et Erick Guimond, 2003, p304).

Si les sociologues et anthropologues expliquent le mariage sous sa forme interethnique par le brassage culturel, par l'immigration et l'émigration, il est important de modifier comme le dit (Binet Jaquet, 1961) dans le résumé de son ouvrage. La cohabitation des valeurs européennes et non-européennes a une part déterminante dans la désagrégation du mariage en Afrique noire. Cette désagrégation atteste de l'actualité de la réflexion que nous menons sur la place et le niveau d'intégration ou d'exclusion des acteurs issus des mariages interethniques dans nos sociétés. En effet, de nombreux écrits ont certes analysés le phénomène de l'ethnicité ou de l'ethnicisation27(*) en rapport avec certaines réalités sociales tel que la citoyenneté, l'identité sociale, l'intégration sociale. Mais le mariage interethnique n'a pas été analysé comme un élément social et idéologique permettant la catégorisation, l'intégration ou l'exclusion des acteurs issus de ce type de mariage. Au regard de cette analyse critique de la littérature, le mariage interethnique apparaît comme une contradiction dans le mode de désignation des acteurs sociaux. C'est à cette contradiction que notre étude veut apporter un démenti, en analysant le mariage interethnique comme un mode de désignation de l'altérité.

I-3- OBJECTIF DE L'ETUDE

I-3-1- Objectif général

Notre objectif vise à analyser les mécanismes sociaux de différenciation et d'intégration des acteurs sociaux issus de mariages interethniques.

I-3-2- Objectifs spécifiques

Cette activité de recherche vise également les objectifs suivants :

- Identifier les mécanismes idéologiques et institutionnels d'appartenance au groupe ethnique Abouré de Yaou.

- Identifier et analyser les rapports entre acteurs issus de mariages entre un Abouré et les autres groupes ethniques à Yaou.

- Déterminer les enjeux d'appartenance au groupe ethnique Abouré de Yaou.

I-4- MODELE D'ANALYSE

Par définition le model d'analyse est le lieu d'opérationnalisation des concepts clés de la recherche. Cette logique de recherche permet de faire la jonction entre la théorie et la pratique. Il s'agira dans cette rubrique de présenter notre hypothèse de recherche et de définir le concept clé de notre etude

I-4-1- Hypothèse de recherche

L'hypothèse est une présomption non gratuite portant sur le comportement des objets réels étudiés. Elle procure à la recherche un fil conducteur particulièrement efficace qui, à partir du moment ou elle est formulée remplace la question de recherche dans cette fonction, même si celle-ci doit rester présente à l'esprit. Il s'agit dans cette logique de la recherche de donner à titre provisoire la réponse à notre question de recherche. Dans un souci d'une structuration cohérente rappelons la question centrale que soulève notre étude avant de dévoiler l'hypothèse de recherche. Celle-ci se présente sous cette forme :

Comment les mécanismes idéologiques et institutionnels de différenciation entre les descendants de mariage interethnique fabriquent l'appartenance ethnique au groupe Abouré de Yaou. Notre réponse provisoire à cette question est la suivante : l'intégration et la différenciation des acteurs issus de mariage interethnique dont l'un des conjoints est Abouré de Yaou est lié à la représentation sociale de l'autochtonie.

I-4-2 Plan de vérification de l'hypothèse

Dans cette partie, il s'agira de définir le concept de représentation sociale. Mais avant compte tenu de la complexité du concept, il sera question d'élucider les concepts de représentations et d'autochtonie.

I-4-3 Représentation sociale

Représenter vient du latin repraesentare, rendre présent. Le dictionnaire Larousse précise qu'en philosophie, " la représentation est ce par quoi un objet est présent à l'esprit " et qu'en psychologie, " c'est une perception, une image mentale dont le contenu se rapporte à un objet, à une situation, à une scène (etc.) du monde dans lequel vit le sujet.

La représentation est " l'action de rendre sensible quelque chose au moyen d'une figure, d'un symbole, d'un signe.

Ces différentes définitions contiennent des mots clés qui permettent d'approcher la notion de représentation : sujet et objet, image, figure, symbole, signe, perception et action.

- Le sujet peut être un individu ou un groupe social.

- L'objet peut être aussi bien une personne, une chose, un événement matériel, psychique ou social, un phénomène naturel, une idée, une théorie, etc. ; il peut être aussi bien réel qu'imaginaire ou mythique, mais il est toujours requis.

- Le mot perception suggère le fait de se saisir d'un objet par les sens (visuel, auditif, tactile ...) ou par l'esprit (opération mentale).

- Le terme action renvoie à l'appropriation de l'objet perçu par le sujet.

- Image, figure, symbole, signe : ce sont des représentations de l'objet perçu et interprété.

D'après Jodelet, la représentation " est une forme de connaissance socialement élaborée et partagée ayant une visée pratique et concourant à la construction d'une réalité commune à un ensemble social.

Placées à la frontière du psychologique et du social, les représentations sociales permettent aux personnes et aux groupes de maîtriser leur environnement et d'agir sur celui-ci. Jean-Claude Abric définit la représentation " comme une vision fonctionnelle du monde, qui permet à l'individu ou au groupe de donner un sens à ses conduites, et de comprendre la réalité, à travers son propre système de références, donc de s'y adapter, de s'y définir une place.

Afin de mieux saisir ce concept des représentations sociales, nous allons préciser leurs caractéristiques et leurs fonctions.

Le concept de représentation sociale est si riche et si complexe qu'il n'est pas toujours évident de le définir. Pour arriver à cerner cette notion, il est nécessaire d'ordonner et de schématiser son contenu. Nous discernerons d'une part les caractères fondamentaux d'une représentation sociale et d'autre part ses fonctions principales.

Les cinq caractères fondamentaux d'une représentation sociale (d'après Jodelet)


· Elle est toujours représentation d'un objet :

Il n'existe pas de représentation sans objet. Sa nature peut être très variée mais il est toujours essentiel. Sans objet, il n'existe pas de représentation sociale. L'objet peut être de nature abstraite, comme la folie ou les médias, ou se référer à une catégorie de personnes (les enseignants ou les journalistes par exemple).

L'objet est en rapport avec le sujet : la représentation " est le processus par lequel s'établit leur relation. Le sujet et l'objet sont en en interaction et s'influencent l'un l'autre. Dans la préface du livre de Claudine Herzlich, Santé et maladie, Moscovici écrit : " il n'y a pas de coupure entre l'univers extérieur et l'univers intérieur de l'individu (ou du groupe). Le sujet et l'objet ne sont pas foncièrement distincts ... se représenter quelque chose, c'est se donner ensemble, indifférenciés le stimulus et la réponse. Celle-ci n'est pas une réaction à celui-là, mais, jusqu'à un certain point, son origine.

Dans l'étude des représentations, on s'intéressera donc au phénomène d'interaction entre un sujet et un objet. Herzlich définit son étude par le fait de tenter " de comprendre les attitudes et le comportement qu'elles (les représentations sociales) engendrent, le savoir qui circule à leur propos, dans la relation même qui se crée entre l'individu, la santé et la maladie.


· Elle a un caractère imageant et la propriété de rendre interchangeable le sensible et l'idée, le percept et le concept :

Le terme image ne signifie pas la simple reproduction de la réalité mais renvoie à l'imaginaire social et individuel. C'est la face figurative de la représentation : les scientifiques, par exemple, évoquent une ''soupe primitive'', composée de molécules diverses qui sont à l'origine de la vie sur la terre. De par son caractère imageant, la représentation sociale aide à la compréhension de notions abstraites. Elle relie les choses aux mots, elle matérialise les concepts. Jodelet cite l'exemple de la notion de poids, décrite par R. Roqueplo (1974) : " le sens commun utilise la notion de poids dont il y a une évidence sensible pour interpréter la notion de masse, concept abstrait défini scientifiquement depuis trois siècles et qui fait partie de notre bagage scolaire et de notre culture.


· Elle a un caractère symbolique et signifiant :

La représentation sociale a deux faces, l'une figurative, l'autre symbolique. Dans la figure, le sujet symbolise l'objet qu'il interprète en lui donnant un sens. Pour Rouquette28(*) et Rateau, c'est le sens qui est la qualité la plus évidente des représentations sociales.


· Elle a un caractère constructif :

La représentation construit la réalité sociale. Pour Abric, " toute réalité est représentée, c'est-à-dire appropriée par l'individu ou le groupe, reconstruite dans son système cognitif, intégrée dans son système de valeurs dépendant de son histoire et du contexte social et idéologique qui l'environne.

L'étude des représentations permet de mettre en évidence que la pensée sociale élabore la réalité selon différents modèles. Pour reprendre le domaine de la maladie, François Laplantine estime qu'elle peut être considérée d'après plusieurs modèles : maladie exogène / maladie endogène ; modèle épistémologique (biomédical, psychologique ou relationnel) ; modèle des systèmes thérapeutiques.


· Elle a un caractère autonome et créatif : Elle a une influence sur les attitudes et les comportements. C. Herzlich.. a bien montré comment les représentations de la maladie - destructrice ou libératrice - induisent des comportements : refus des soins et de recours au médecin dans le cas de la maladie destructrice ; rupture avec les contraintes sociales, enrichissement sur le plan personnel, lorsque la maladie est vécue sur le mode d'une libération.

- Les fonctions des représentations sociales


· Des fonctions cognitives :

Les représentations sociales permettent aux individus d'intégrer des données nouvelles à leurs cadres de pensée, c'est ce que Moscovici a mis en évidence à propos de la psychanalyse. Ces connaissances ou ces idées neuves sont diffusées plus particulièrement par certaines catégories sociales : les journalistes, les politiques, les médecins, les formateurs...


· Des fonctions d'interprétation et de construction de la réalité :

Elles sont une manière de penser et d'interpréter le monde et la vie quotidienne. Les valeurs et le contexte dans lequel elles s'élaborent ont une incidence sur la construction de la réalité. Il existe toujours une part de création individuelle ou collective dans les représentations. C'est pourquoi elles ne sont pas figées à jamais, même si elles évoluent lentement


· Des fonctions d'orientation des conduites et des comportements :

Les représentations sociales sont porteuses de sens, elles créent du lien ; en cela elles ont une fonction sociale. Elles aident les gens à communiquer, à se diriger dans leur environnement et à agir. Elles engendrent donc des attitudes, des opinions et des comportements.

La représentation sociale a aussi un aspect prescriptif : " Elle définit ce qui est licite, tolérable ou inacceptable dans un contexte social donné.


· Des fonctions identitaires :

" Les représentations ont aussi pour fonction de situer les individus et les groupes dans le champ social... (elles permettent) l'élaboration d'une identité sociale et personnelle gratifiante, c'est-à-dire compatible avec des systèmes de normes et de valeurs socialement et historiquement déterminés.

Jodelet parle d'affiliation sociale : " Partager une idée, un langage, c'est aussi affirmer un lien social et une identité.


· Des fonctions de justification des pratiques :

Elles nous semblent très liées aux fonctions précédentes. Elles concernent particulièrement les relations entre groupes et les représentations que chaque groupe va se faire de l'autre groupe, justifiant a posteriori des prises de position et des comportements.

Selon Abric, il s'agit d'un " nouveau rôle des représentations : celui du maintien ou du renforcement de la position sociale du groupe concerné.

Dans le contexte de notre étude, l'objet de la représentation s'identifie à une catégorie de personne, les descendants de mariage interethnique dont la mère n'est pas Abouré de Yaou .Quant au sujet, il renvoie à deux entités sociales sur notre champ d'étude : les institutions et les acteurs véhiculant les normes et les codes et valeurs qu'incarnent les institutions. Dans le cadre de notre étude, par représentation nous entendons l'ensemble des clichés qui renvoie et justifie soit l'intégration des acteurs issus de mariage interethnique, soit l'exclusion des acteurs issus de mariage interethnique. Ces clichés sont motivés par l'ensemble des normes que véhicule la filiation matrilinéaire et aussi par l'enjeu en jeu sur les différents champs. Les représentations se matérialisent au travers des discours sociaux suivant : « Abouré pur », « tu es mélangé », « tu n'es pas d'ici », « ta famille n'est pas d'ici ». Ce sont ces différentes représentations qui structurent les rapports entre les acteurs. Ce sont elles qui occasionnent les catégorisations entre les acteurs. Tel que « Abouré pur » et « Abouré non pur ».

I-4-4 Autochtonie

La notion d'autochtonie est une dialectique complexe et problématique qui est évoquée par plusieurs ouvrages et articles Avant d'aller plus loin dans la définition il semble judicieux de définir ce qui est entendu par autochtonie.

D'après le Petit Robert, un autochtone est originaire par voie ancestrale du pays qu'il habite. Cette définition ne met cependant pas en évidence les enjeux importants que la logique de l'autochtonie révèle dans l'interaction entre une unité géographique (ou territoire) et des groupes ethniques (ou peuples). Prenons les origines mythologiques de ce concept: chez les Grecs, un autochtone désigne un enfant né spontanément de la terre. A ce moment-là le principe a un poids incontournable: « les Athéniens n'habitent pas Athènes, ils sont Athènes ». Les mythes fondateurs leur enseignent qu'ils sont fils de la terre d'Attique et que c'est leur groupe humain, issu d'ancêtres communs qui constitue la cité.
Il est difficile de relier le principe de l'autochtonie avec des concepts politiques modernes si on prend en compte la notion originale: l'attachement à sa terre de naissance est un lien vital pour un Grec, aussi fort que celui qui le lie à sa famille. Cette acception pose les Grecs comme assimilables à une plante en tant que produit de sa terre. De cette conception découle à Athènes une conséquence politique : le pouvoir appartient à l'ensemble des citoyens et ne peuvent diriger le destin de la cité que ceux qui en sont issus, c'est-à-dire, les autochtones au sens accepté du terme, ceux qui sont nés tout à la fois de la terre même et de la même terre. Cette définition peut paraître plus pertinente pour analyser ce que l'autochtonie signifie dans la vie de certaines communautés d'aujourd'hui bien qu'il faille toutefois, souligner les déviances. En effet, l'autochtonie est utilisée dorénavant par certains comme une stratégie dont le but avouer est d'obtenir le pouvoir. Ce qui n'est pas sans poser problème. En effet, revendiquer une autochtonie c'est redéfinir une identité qui va dans le sens inverse du mouvement de mondialisation enclenché ces dernières années.

Le mouvement de globalisation auquel nous assistons tend à faire du monde un village où les flux, en particulier d'idées, permettent de rapprocher les hommes. De plus, la mondialisation accélère, même si c'est un mouvement qui lui est antérieur, le flux des migrants apportant, ainsi une dimension multiculturelle à un bon nombre d'Etats. Nonobstant, force est de constater la montée en puissance des extrêmes, notamment en Europe (Autriche succès de Heider, France Jean-Marie Le Pen au deuxième tour de l'élection présidentielle...). L'actualité mondiale offre des exemples quasi quotidiens du développement de la xénophobie à travers le monde. Cette méfiance vis-à-vis de l'altérité puise sa force dans une dialectique complexe qui est celle de l'autochtonie. L'objectif premier des articles est justement de démystifier le concept et de donner des éléments clefs pour l'appréhender.
A la lecture des textes, constat est fait d'une dichotomie dans les définitions due aux passés des nations qui permet d'établir deux axes majeurs: d'une part le cas européen, avec une histoire particulière qui l'empêche d'utiliser la définition traditionnelle de l'autochtonie. D'autre part, celui de l'Afrique où la problématique de l'autochtonie sert de terreau à la violence. Nous en volons pour preuve les conflits fonciers entre les peuples autochtones en Côte d'Ivoire et aux Cameroun.

L'invocation du clivage entre «autochtones» et «allogènes» est devenue récurrente dans la vie sociale camerounaise. La petite ville de Makénéné, sur la route Yaoundé-Bafoussam, a par exemple connu de graves affrontements entre « autochtones » Nyokon et« allogènes » bamiléké, en novembre 1998. En juillet 1999, des fidèles catholiques ont contesté en ces termes la nomination de Mgr André Wouking, Bamiléké, comme archevêque de la capitale, faisant écho à une bataille ecclésiale similaire à Douala, en 1987 : 51 prêtres « autochtones » de l'archidiocèse (sur 80) avaient alors adressé au Vatican un mémorandum dénonçant la « bamilékisation de la hiérarchie de l'Église » à la suite de la nomination de Mgr Gabriel Simo comme évêque auxiliaire - raisonnement contesté par l'Assemblée du clergé indigène du diocèse de Bafoussam1. Mais la problématique de l'autochtonie au Cameroun ne se limite pas à la stigmatisation de l'«ethnofascisme» bamiléké, à laquelle s'était livré un intellectuel organique du régime Biya en cette même année 1987 et dont le spectre hante en fait le système politique camerounais depuis les années cinquante. Elle se retrouve aussi bien dans le Nord : l'irruption des «broussards», «venants» et autres «populations flottantes» dans l'activité commerciale a remis en cause la « confiance » qui était à la base de la négociation des prix et de la fiabilité du crédit entre «originaires»2 ; et les combats entre Choa et Kotoko, or le Cameroun est loin de constituer un cas isolé au sud du Sahara. L'une des évolutions politiques les plus inquiétantes sur le continent tient précisément à la généralisation de l'opposition entre « autochtones » et «allogènes » et à la véhémence nouvelle qu'elle y revêt. Une telle dichotomie est de plus en plus souvent évoquée pour justifier des formes d'exclusion d'une brutalité croissante, voire des opérations de nettoyage ethnique qui peuvent prendre une dimension génocidaire comme au Rwanda en 1994. L'extermination des Tutsi par le Hutu Power, leur diabolisation par l'ethnonationalisme messianique qui s'est développé dans les camps de réfugiés hutu burundais en Tanzanie, la contestation de la nationalité et des droits économiques dans les provinces zaïroises/congolaises du Kivu depuis les années quatre-vingt croient trouver leur légitimation dans les origines prétendument «éthiopiennes» 1 J.-F. Bayart, A. Mbembe, «La bataille de l'archidiocèse de Douala», Politique africaine, 35, octobre 1989, pp. 77-104.

2 J. Roitman, «The Garrison-Entrepôt», Cahiers d'études africaines, 150-152, XXXVIII-2-4, 1998, pp. 297-329. des peuples hamitiques3. Au Kenya, les «autochtones» kalenjin de la Rift Valley s'en sont violemment pris aux «squatters» kikuyu en 1992, et des tensions comparables ont été enregistrées sur la côte en 19974. De même, au Shaba/Katanga, en 1993, des pogroms ont contraint à l'exode de nombreux Baluba d'origine kasaïenne. Dans des contextes très différents, la militarisation des conflits politiques ou sociaux dans la province du Natal, ou autour des hostels dans les townships, en République sud-africaine, à la fin des années quatre vingt et dans la première moitié des années quatre-vingt-dix, ou la guerre civile somalienne n'ont pas été étrangères à la problématique de l'autochtonie5. Enfin cette dernière n'épargne pas l'Afrique de l'Ouest. Au Nigeria, elle est au coeur de la mobilisation des peuples du Delta contre les compagnies pétrolières et, dans le Sud-Ouest, l'Ooduo Peoples Congress prétend défendre manu militari les droits des Yoruba contre les «allogènes» hausa ou ijaw.

I45 Représentation sociale de l'autochtonie

Ce concept désigne l'ensemble des règles et connaissances qui déterminent l'appartenance ethnique des acteurs. En effet, à Yaou, le concept d'autochtonie ne renvoie pas à la primauté du droit au sol se résumant dans les cas les plus rencontrés : «nous sommes arrivés ici les premiers ». A Yaou c'est une autre réalité, le concept d'autochtone à une double signification en fonction des acteurs en interaction. Quand on a en interaction un Abouré et un autre groupe ethnique, l'autochtonie se détermine en fonction du droit au sol. Tandis que, quand les descendants de mariage interethnique sont en interaction avec ces mêmes acteurs, ce n'est plus le droit au sol qui est mis en avant, c'est plutôt la règle de recrutement des membres de la famille qui est convoquée. Dans le cas d'espèce, c'est le système matrilinéaire qui est en vigueur, la conséquence donc est la suivante : les descendants de mariage interethnique dont la mère est Abouré de Yaou sont considérés comme autochtones et les descendants de mariage interethnique dont le père est autochtone sont considérés comme allochtone. Cette situation démontre que le concept d'autochtonie n'est pas une réalité immuable. La définition ou la détermination du statut d'autochtone est malléable. En un mot les questions d'identités sont malléables en fonction des acteurs en interaction et aussi en fonction des ressources misent en jeu.    

CONCEPTS

DIMENSIONS

COMPOSANTE

INDICATEURS

Représentation sociale de l'autochtonie

- Cognitive

- Normative

Opinion

Le système matrilinéaire

les vrais Abouré sont les descendants dont la mère est Abouré.

Abouré pur

Recrutement des membres de la famille du coté de la mère

II-CADRE METHODOLOGIQUE

II-1- DELIMITATION DU CHAMP DE L'ETUDE

II-1-1- Champ géographique

Pour mieux cerner la réalité que nous étudions, nous avons circonscrit le cadre de l'étude au village de Yaou, qui est situé dans la sous-préfecture de Bonoua. Le choix de ce village s'explique d'une part par le fait qu'il est situé en milieu rural, localisation géographique qui nous permet d'identifier sans trop de difficulté la totalité des acteurs ayants contractés un mariage interethnique. Et d'autre part, à cause de la présence des allochtones et des allogènes sédentarisés depuis les périodes coloniales, pour diverses raisons. Une étude dans ce village permettra de saisir l'évolution des mariages interethnique en rapport avec la production de l'ethnicité, dans un contexte sociopolitique hostile au brassage culturel. Afin, d'identifier et de comprendre les facteurs favorisants, ou limitant l'intégration et/ou l'exclusion des communautés allochtones et allogènes dans le contexte post-crise dans le village de Yaou en particulier et dans le pays en général.

II-1-2- Champ social

Pour la réalisation de notre enquête à Yaou, nous interrogerons l'ensemble des acteurs sociaux du village, capables de nous donner des informations, afin de consolider notre travail de recherche. A cet effet, nos différents instruments de collectes de données s'adressent aux acteurs ruraux suivants :

- Les notables du village, car depuis plus de huit ans, ce sont eux qui dirigent et gèrent les affaires courantes du village. Cette situation s'explique par le fait que les querelles internes rendent impossible la désignation du roi. Ce sont donc les seules autorités villageoises capables de nous donner les différents codes culturels et lois qui régissent la vie sociale à Yaou. De plus, ils peuvent nous renseigner sur les coutumes, les idéologies, l'histoire de peuplement des Abourés de Yaou, leurs organisations sociales et culturelles etc.

- Après les notables nous avons eu des entretiens avec les acteurs sociaux ayant contractés un mariage interethnique vivants à Yaou, parce que c'est auprès de ces acteurs que nous allons avoir les informations portant sur la production de l'ethnicité, aux modes de vie en vigueur dans ce type de couple et le sort réservé par la communauté autochtone aux acteurs Abourés ayant contractés un mariage avec un autre groupe ethnique présent à Yaou.

- Et enfin les personnes de 18 à 35 ans issues de mariage interethnique entre un Abouré et un autre groupe ethnique parce qu'elles constituent un maillon essentiel pour observer et comprendre les règles, les codes culturels et le mode de vie social que leurs imposent les institutions villageoises.

II-2- METHODE D'ANALYSE: l'analyse de contenu

L'analyse de contenu est une technique d'étude détaillée des contenus de documents. Elle a pour rôle d'en dégager les significations, les intentions non directement perceptibles à la simple lecture des documents. Il est donc de première importance de disposer d'une technique alliant rigueur et procédures simples pour analyser ces contextes d'actions et de situations que sont les mots agencés dans un discours signifiant. L'exégèse et la dissection interprétative ne suffisent pas à rendre tout le sous jacent, l'implicite, dans le sens d'un texte, sur des bases autres que seulement subjectives et approximatives. L'analyse de contenu sert à combler cette insuffisance .Nous retiendront la définition générale suivante : l'analyse de contenu est une « technique de recherche pour la description objective, systématique et quantitative du contenu manifeste des communications ayant pour but de les interpréter »

C'est en fait une étude de texte qui se veut :

Objective : tous les analystes poursuivant les mêmes objectifs de recherche devraient aboutir aux mêmes résultats en analysant les textes.

Systématique : tout le contenu doit être analysé, ordonné et intégrer. Toutes les possibilités signifiantes par rapport aux objectifs du chercheur doivent être recensées, répertoriées et explorées, ou du moins il s'agira d'omettre le moins possible d'unités de signification pertinentes.

Quantitative : on peut dénombrer les éléments significatifs, effectuer des calculs, des comparaisons statistiques des pondérations, des corrélations, des fréquences des moyennes. En résumé l'analyse nous de contenu nous permettra de mieux traiter : tout matériel de communication verbale tels que les livres, les journaux, les rapports, les documents administratifs et même des films, des discours etc. Et tout matériel spécialement créé par le chercheur, tel que les protocoles d'interview, discussion de groupe, test verbaux.

Selon OMAR Aktouf29(*), il existe en gros six types d'analyse de contenu selon le but visé et le genre de résultats escomptés par le chercheur.

Ce sont : l'analyse de contenu d'exploration, l'analyse de contenu de vérification, l'analyse de contenu qualitative, l'analyse de contenu quantitative, l'analyse de contenu directe, l'analyse de contenu indirecte. C'est précisément l'analyse de contenu directe et indirecte que nous utiliserons tout au long de notre analyse.

L'analyse de contenu directe consiste à ne se contenter de prendre au sens littéral la signification de ce qui est étudié. On ne cherche pas dans ce cas à dévoiler un éventuel sens latent des unités d'analyses. Quant à l'analyse indirecte, elle cherche inversement à dégager le contenu non directement perceptible, le latent qui se cacherait derrière le manifeste.

II-3- ENQUETE EXPLORATOIRE

L'enquête exploratoire est une opération importante dans le processus de la rédaction du mémoire. Elle consiste à effectuer une visite d'exploration sur le champ physique d'étude. Afin de mesurer la faisabilité de recherche du thème soumis à notre étude sur ce champ géographique précis. le chercheur sélectionnera quelque personnes directement concernées par le problème ou en tout cas très informées sur ce dont il traître pour avoir avec chacune une entrevue non directive centrée sur le sujet de recherche.

Cette étape de la recherche, a consisté à identifier approximativement le nombre de mariage interethnique existant dans le village. L'enquête exploratoire nous a également permis, de reconsidérer la posture épistémologique adoptée au préalable, pour ne retenir que les couples mixtes où l'un des conjoints est autochtones, c'est-à-dire Abouré de Yaou et l'autre allochtone ou allogènes vivant dans ce village. Cette opération de recherche, a permis d'adapter notre outil de recueil des données à la réalité du terrain. Ainsi, certaines questions ont été reformulées, complétées ou supprimées et d'autres ont été rajoutées pour faire la lumière sur certains points qui nous paraissaient confus pour les enquêtes. C'est à la fin de cette opération que nous sommes passés à l'enquête proprement dite.

II-4- LES TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNEES

Dans le cadre de notre étude, nous avons opté pour la méthode qualitative.

En effet, nous avons opté pour cette méthode pour mettre en exergue les croyances, les systèmes de représentations sociales, les logiques sociales qui interviennent dans la construction de l'appartenance ethnique et dans la production des différences au niveau des descendants du mariage interethnique. Dans une telle perspective, comme le relève Paul N'da (200130(*)), « l'approche qualitative d'investigation ambitionne de comprendre le phénomène et non de démontrer, de prouver, de contrôler quoi que ce soit ». Il s'agit donc pour nous de comprendre le pourquoi et le comment d'activation des mécanismes de production de différences entre les descendants du mariage interethnique.

II-4-1 La construction de l'échantillon des enquêtés

La détermination du nombre d'enquêtés s'est faite par la technique d'« échantillonnage en boule de neige » ou « par réseau », un échantillon non probabiliste obtenu sur la base d'un choix raisonné, donc de convenance. Cette technique consiste à choisir un noyau d'individus (des personnes considérées comme influentes par exemple) ; noyau auquel s'ajoute tous ceux qui sont en relation (de travail, d'affaire, d'amitié, etc.) avec eux et ainsi de suite. On se fonde donc sur des réseaux sociaux, d'où l'expression « par réseau ».

Dans le cadre de cette étude, nous sommes entrés en contact avec les chefs de génération les notables, les amis des couples mixtes, les jeunes du village, le chef de quartier de Koumassi. Ces différents acteurs nous ont permis d'identifier les couples de mariage interethnique qu'ils connaissaient. C'est grâce à cette technique que nous avons pu recenser les quarante couples mixtes pour la réalisation de notre étude.

Fiche de dénombrement des couples mixtes identifiés

N° COUPLE

NOM DU CONJOINT

AUTOCHTONE

NOM DU CONJOINT

ALLOGENE

DUREE DU MARIAGE

NOMBRE

D'ENFANT

1

Abouré

adjoukrou

5 ans

2

2

Abouré

Baoulé

30 ans

7

3

Abouré

Bété

25 ans

2

4

Abouré

Apolo

25 ans

9

5

Abouré

Ghanéenne

22 ans

5

6

Abouré

agni

22 ans

2

7

Abouré

agni

23 ans

10

8

Abouré

Baoulé

42 ans

3

9

Abouré

Attié

43 ans

5

10

Abpuré

Baoulé

4 ans

2

11

Abouré

Baoulé

8 mois

2

13

Abouré

Ebrié

3 ans

1

14

Abouré

Bété

29ans

1

15

Abouré

Agni

9ans

7

16

Abouré

Gagou

10 ans

3

17

Abouré

Apolo

19 ans

7

18

Abouré

Ghanéenne

26ans

5

19

Abouré

Ghanéenne

32ans

1

20

Abouré

Attié

25ans

7

21

Abouré

Alladjan

2ans

3

22

Abouré

Agni

12ans

11

23

Abouré

Tagbana

25ans

3

24

Abouré

Bété

6ans

1

25

Abouré

Baoulé

15ans

4

26

Abouré

Alladjan

2 ans

3

27

Abouré

Ghanéenne

6 ans

3

 
 
 
 
 

28

Abouré

Tagbana

4 ans

2

29

Abouré

Ebrié

20 ans

4

II-4-2- La recherche documentaire

Comme son nom l indique cette méthode de pré enquête consiste a répertorier et a consulter les documents les plus spécifiques et les plus spécialisés possibles sur le sujet de recherche, on utilisera donc les registres, les rapports les thèses, les mémoires et même si il en existe des documents audio visuels afin d'en savoir le plus que l'on peut à l avance connaître sur le problème traité ou sur des problèmes identiques.

Cette phase de l'étude nous a amené à faire des recherches dans plusieurs bibliothèques. Elle nous a conduits à la bibliothèque de l'IES, à la bibliothèque de l'INADES, à la bibliothèque du Centre Culturel Français et enfin à l'Institut de Recherche et de Développement (Petit Bassam/Marcory). Nous avons également fait la recherche en ligne sur les moteurs de recherche Google et Yahoo. Cette technique nous a permis de recueillir des documents traitants de notre thème de recherche. Ce qui nous a aidés à la rédaction de la problématique, il faut également noter que nous avons lu des ouvrages de méthodologie, des ouvrages et des mémoires. Tous ces documents nous ont permis de mieux préciser nos réflexions et de baliser notre voix de recherche.

II-4-3- L'entretien

Sous leurs différentes formes, les méthodes d'entretien se distinguent par la mise en oeuvre des processus fondamentaux de communication et d'interaction humaine. Correctement mis en valeur, ces processus permettent au chercheur de retirer de ses entretiens des informations et des éléments de réflexion très riches et nuancés. A l'inverse de l'enquête par questionnaire, les méthodes d'entretien se caractérisent par un contact direct entre le chercheur et ses interlocuteurs et par une faible directivité de sa part.

Ainsi, s'instaure en principe un véritable échange au cours duquel l'interlocuteur du chercheur exprime ses perceptions d'un événement ou d'une situation, ses interprétations ou ses expériences, tandis que, par ses questions ouvertes et ses réactions, le chercheur facilite cette expression, évite qu'elle s'éloigne des objectifs de la recherche.

II-4-3-1'Entretien semi directif

L'utilisation de l'entretien semi directif comme technique de recueil des informations a été pertinente. Nous avons choisi cette technique parce qu'elle permet au chercheur de recentrer l'entretien sur les objectifs. Chaque fois que le sujet s'en écarte, et permet également de détendre l'atmosphère pendant l'interview. Enfin, cette technique cadre mieux avec la perspective qualitative dans laquelle s'inscrit notre étude et de rendre au mieux les opinions, les perceptions en vue de restituer les significations, les idéologies que les acteurs sociaux donnent aux actions et pratiques humaines dans la société.

Les entretiens se sont déroulés individuellement afin d'éviter que les conjoints, les enfants ne soient influencés dans leurs réponses par la présence des autres.

Le support qui a servi à l'entretien est structuré de la façon suivante :

- L'identification des mécanismes d'appartenance

- La nature des rapports entre acteurs sociaux issus de mariages interethniques et les conjoints et les institutions du village.

- Les enjeux d'appartenance au groupe ethnique.

II-4-4- Le dépouillement

Deux types de dépouillement sont à la disposition du chercheur. Le dépouillement manuel et le dépouillement informatique. Nous avons pour notre part, utiliser le dépouillement manuel eu égard de la nature de l'enquête qui est essentiellement qualitative. Cette technique est généralement plus ou moins longue mais à l'avantage de permettre une meilleure appréciation des réponses recueillies et de procéder à leur catégorisation : ce qui facilite les analyses et les interprétations qui ont été faites. En effet, les entretiens avec les enquêtés on été réalisés à l'aide d'un enregistreur numérique. Par la suite, nous avons procédés à des transcriptions intégrales, puis à une catégorisation des idées. De façon pratique il s'est agit pour chaque question posée de dénombrer et de classer les réponses obtenues par groupe de reposes identiques.

II-4-5 Le séminaire de restitution

Dans le sens d'éprouver la théorie et le terrain dans le processus de la recherche. Nous avons participé à un séminaire de restitution de nos enquêtes exploratoires. Cette activité scientifique était sous la présidence du docteur SEKA aman représentant le directeur de recherche et sous la direction du doctorant DROH junior. Les impétrants étaient les étudiants menant la recherche sur la question des mariages interethnique et la production de l'ethnicité dans près treize villages de la Cote d'Ivoire. Pour les citer nous avons : Lopou (Dabou) , Ebimpé (Anyama) , Kouamekro ( Divo) , Sebia Yao ( Bingerville) , Samo ( Bonoua) , Yaou ( Bonoua) , Ono (Agboville) .

Etait présent à ce séminaire les différents chefs des villages ci-dessus cités.

Après les allocutions nous avons pris la parole pour présenter de façon synthétique les données de notre enquête exploratoire. Dans le prolongement de la réflexion sur le thème mariage interethnique et production de l'ethnicité, dans notre cas à Yaou. Nous avons identifié 30 couples de mariage interethnique ou l'un des conjoints est autochtone Abouré de Yaou. L'enquête exploratoire nous à permis de constater que les acteurs issus de ce type de mariage étaient construit comme étranger sur certain champs. Nous avons constaté que les acteurs issus de mariage interethnique ne pouvaient accéder au trône royal et d'autres types de pouvoirs : la notabilité, chef de quartier, chef de lignage. Ce constat nous a conduis à chercher à comprendre cette situation. A ce propos la question centrale de notre étude est la suivante. Quels sont les mécanismes sociaux de différenciation et d'intégration des acteurs sociaux issus du mariage interethnique ?

L'autre phase du séminaire à consister à un échange entre les jeunes chercheurs que nous sommes et les acteurs et autorités villageoises. Ce fut des échanges très intéressant pour nous. Ces échanges nous ont permis de savoir qu'à Yaou c'est le système matrilinéaire en vigueur qui disqualifie certains acteurs sociaux issus de mariage interethnique. Et de savoir que depuis 1997 un conflit au niveau de l'accession à la royauté secouait le village de Yaou. Et que la résolution de ce conflit influençait plusieurs aspects du système social.

Ces échanges ont également permis de rendre de restructurer nos objectifs de recherche afin de mieux cerner la réalité soumise à notre sagacité.

II-5- L'ENQUETE

Nous rappelons que l'enquête, c'est le travail qui consiste, pour le chercheur, à se déplacer sur le terrain et à recueillir auprès des personnes retenues dans l'échantillon les données qui constitueront, en fait, la véritable base de sa recherche, de ce qu'il démontrera ou découvrira. (Omar Aktouf, méthodologie des sciences sociales et approche...(1987)

Ceci dit le processus de la recherche est composé de plusieurs logiques de recherche à réaliser afin de parachever la recherche. Dans cette optique nous avons réalisé un mois semaines d'enquête après le séminaire de restitution. Elle s'est réalisée en trois phases. La première, a consisté à interroger les autorités du village, avec comme instrument de collecte, un guide d'entretien. La seconde phase, elle a permis de réaliser les entretiens avec les acteurs autochtones du mariage interethnique, à l'aide également d'un guide d'entretien particulier. Afin de saisir les croyances, les perceptions, les idéologies de cette catégorie d'acteur par rapport au mariage interethnique. La dernière phase, quant à elle a servi à interviewer les acteurs allochtones et allogènes de mariage interethnique.

Pendant l'enquête, il nous a été donné de constater que les hommes Abouré se maries plus avec des étrangers que les femmes Abouré. Car sur les trente cinq couples interethniques, trente trois sont des conjointes allochtones. L'enquête s'est réalisée sur un mois vu l'activité champêtre. En effet, avec la dépréciation du prix de l'ananas, les paysans Abouré de Yaou et leur famille, ont commencé à planter l'hévéa. Les plantations d'hévéa étant à leur début pour la plupart, elles demandent beaucoup de suivie de la part des cultivateurs et leur famille. En dehors des entretiens formels, nous avons pendant l'enquête été témoin d'un fait intéressant. En effet, au cour d'un match, un enfant issu de mariage interethnique dont la mère est allochtone a giflé un chef guerrier. La population du village par voix de leur représentant, a dit ceci « il faut qu'il parte chez lui, sa famille n'est pas d'ici, c'est pourquoi il ne respecte pas nos autorités». Cette situation a valu l'interruption de nos enquêtes. Et tout acteur issu de mariage interethnique dont la mère est allogène ou allochtone était méprisé. L'enquête sur notre champ d'étude, nous a permis en tant que jeune chercheur, d'observer un phénomène, et de développer notre capacité observation et d'analyse et de mieux comprendre la pertinence du terrain dans la recherche. Mais cette enquête ne s'est pas réalisée sans difficulté

II- 6 LES DIFFICULTES RENCONTREES ET LES IMPACTS

SUR LA METHODOLOGIE

Lors de la collecte des données, nous avons été confrontés à trois difficultés essentielles, à savoir la barrière linguistique, la perte des données liée à la communication non verbale et le contexte de conflit qui secoue le village depuis 1997 au sujet du trône royal à Yaou. Dans le cadre de l'observation directe, nous avons assisté à des jugements portant sur un descendant de mariage interethnique à la cour royale qui se déroulaient en Abouré, ce qui nous a empêché de cerner les mécanismes de sanctions qu'un acteur dont la mère n'est pas Abouré subit quand il commet des impaires. Pour surmonter cette difficulté, nous avons bénéficié des services d'un interprète avec tous les risques que cela comporte. En outre, au cours des entretiens approfondies avec les enquêtés la communication non verbale nous a échappé, par conséquent nous n'avons pas pu capter l'expression du visage, la gestuelle etc. selon les questions.

La dernière difficulté est liée au contexte de crise que vit le village de Yaou. Chaque partie au cours de notre enquête, nous soupçonnait d'être des espions de l'autre camp. La collecte des informations était donc très difficile, il nous a fallut expliquer la raison de notre présence à la cour royale en présence des deux parties en conflit. Après cette étape l'enquête exploratoire et l'enquête proprement dite se sont déroulées sans trop de difficultés. L'autre élément qui a permis la réussite de notre étude fut également le séminaire de restitution organisé par la cellule d'animation scientifique de l'IES.

En somme, les enseignements ou les leçons de méthodologie nous ont permis de dégager une orientation spécifique pour la présente étude.

CALENDRIER DE MATERALISATION DE LA RECHERCHE

 

ACTIVITES

PHASE I

27-06-07

Compréhension des concepts clés du thème de recherche

05-07-07

Lecture des ouvrages et textes relatifs à l'ethnicité

07-08- 2007

Délimitation des axes de la recherche par le Docteur ROCH

02-08-2007

Constructions du guide d'entretien de l'enquête exploratoire

PHASE II

15-08-07 Enquête exploratoire

PHASE III

07-09-07 Rapport d'enquête exploratoire suivi du séminaire de restitution et rédaction du cadre théorique du mémoire

PHASE IV

15-10-07

Construction du guide d'entretien de l'enquête

PHASE V

 08-03-08

Enquête +monture finale du mémoire

DEUXIEME PARTIE

ANALYSE ET INTERPRETATION DE DONNEES

I- REPRESENTATION DU MARIAGE INTERETHNIQUE ET ETHNICITE

A- DEFINITION DE LA REPRESENTATION

« Le concept de représentation sociale désigne une forme de connaissance spécifique, le savoir de sens commun, dont les contenus manifestent l'opération de processus génératifs et fonctionnels socialement marqués. Plus largement, il désigne une forme de pensée sociale. Les représentations sociales sont des modalités de pensée pratique orientées vers la communication, la compréhension et la maîtrise de l'environnement social, matériel et idéal. En tant que telles, elles présentent des caractères spécifiques au plan de l'organisation des contenus, des opérations mentales et de la logique. Le marquage social des contenus ou des processus de représentation est à référer aux conditions et aux contextes dans lesquels émergent les représentations, aux communications par lesquelles elles circulent, aux fonctions qu'elles servent dans l'interaction avec le monde et les autres. »31(*)

Après, la mise en évidence de la définition de la représentation, nous décrirons les représentations des acteurs sociaux selon leur catégorie. Nous exposerons dans un premier temps les perceptions et les représentations des allochtones sur la question du mariage interethnique et l'ethnicité, ensuite nous décrirons celles des autochtones et enfin les représentations des enfants.

B- REPRESENTATION DES ALLOCTHONES

L'analyse des réponses à la question générale qui ouvre le guide d'entretien des allochtones, permet de mettre en exergue trois formes de représentations du mariage. La première forme de représentation est la suivante : le mariage pour les acteurs procure le respect des autres acteurs sociaux. La deuxième, présente le mariage sous un angle religieux. Pour cette catégorie d'acteur se marier, c'est accomplir la volonté de Dieu. Quant à la troisième forme de représentation, le mariage est un facteur de consolidation de liens entre les deux ethnies et les familles auxquelles appartiennent les conjoints. Il se dégage de ces réponses que le mariage est pour les allochtones une stratégie intégration dans le tissu social à Yaou. Le mariage interethnique leur permet de se mettre au même niveau sur certains champs que le tuteur ou le patron. En effet, la plupart des acteurs dans cette posture, étaient des employés auparavant. L'autre élément que révèlent ces réponses, est le rôle dynamisant du modernisme dans les collectivités rurales. Ce rôle dynamisant prend son essence sur deux facteurs : l'école et les masse medias. En effet, ces deux facteurs dynamisant constituent des éléments de déstructurations des représentations des villageois. Autrefois il était difficile pour un Abouré de dépasser les limites territoriales des Abouré pour nouer des échanges matrimoniaux avec d'autres peuples. « Avant leurs parents disaient que la Cote d'Ivoire se limitait à Mossou ». Ce discours montre pourquoi les échanges matrimoniaux avec les autres peuples étaient rares. Ici la limite ethnique se matérialise territorialement. L'étranger c'est celui qui n'est pas de la même ère géographique que l'Abouré. « Gnangnouan » personne qui vient de loin, c'est le terme désignant l'étranger sous l'angle allogène et allochtone. Pour les allochtones et les allogènes le mariage interethnique permet de faire tomber la représentation, qui les construit comme des acteurs venant de très loin, donc des étrangers. Aussi est il un moyen permettant de mieux apprécier les valeurs sociales et coutumières du peuple Abouré. De plus, pour eux, le mariage interethnique constitue un moyen permettant de prouver que les préjugés sur eux ne sont pas fondés .Au regard du discours produit par les acteurs, le mariage interethnique est une médiation. Il permet, dans ce cas de figure, aux acteurs sociaux de connaître et comprendre les habitudes de vie, les coutumes, et le système de valeur des Abouré. Le mariage interethnique agit dans ce contexte comme, le début d'un processus de cohabitation objectif entre les Abouré et les autres groupes ethniques. Nous qualifions ces relations de cohabitation objectives, car les barrières idéologiques intériorisées dans le processus de socialisation se trouvent voilées. En effet, la fonction latente des barrières idéologique permet de formaliser l'interaction entre les Abouré et les autres groupes ethniques à Yaou. De plus, les effets du modernisme ont contribué à l'interpénétration matrimoniale entre les peuples, qui étaient autrefois considérés comme totem matrimonial. L'école et le modernisme ont également fissuré la structure d'échange au niveau matrimonial entre les groupes ethniques, et ont actionné le processus relationnel entre les groupes ethniques autrefois en conflit latent. Dans le prolongement de l'analyse, il est donné de constater que la plupart des mariages interethniques recensés, sont de type endogamique. En effet, nous avons des mariages entre deux ethnies d'un même grand groupe ethnique. Tandis que Seulement quatre parmi le nombre total de mariages interethniques sont des mariages exogamiques. C'est-à-dire que les conjoints n'appartiennent pas au même grand groupe ethnique.

C- REPRESENTATION DES AUTOCHTONES FACE

AU PHENOMENE DU MARIAGE INTERETHNIQUE

La question permettant de saisir les représentations des autochtones sur la question du mariage interethnique, décrit trois tendances.

le mariage est la consolidation des liens entre un homme et une femme et leur famille réciproque.

le mariage est l'union entre un homme et une femme en vue de procréer.

le mariage est le gage de respect.

L'analyse de ces tendances révèle que les acteurs perçoivent le phénomène du mariage en termes de rôle qu'il joue sur le système social. Ce qui nous amène à dire que l'institution mariage dans la société Abouré prône la procréation. Le mariage fonctionne ici comme une institution, parce qu'il structure les acteurs à un double niveau : symbolique et relationnel. Dans ce cas d'espèce le symbolique transparaît lorsqu'on oblige les acteurs à se conformer à la valeur procréative du mariage. Nous pouvons citer des auteurs comme DEDY Sery et TAPE Gozé pour qui le mariage a pour but de perpétuer l'espèce humaine. Car « l'enfant représente une valeur existentielle, un supplément d'âme32(*) »

Quand au niveau relationnel, il se manifeste à travers la séparation des conjoints par les familles. « On se marie pour faire des enfants s'il n y a pas d'enfants vos parents vous divorces »

Dans la société Abouré de Yaou, champ de notre étude, le mariage signifie procréation .Un mariage sans enfants durant une période convenable après le mariage doit être brisé. Le a pour sens mariage la reproduction de l'espèce humaine. Au niveau du sens que les acteurs donnent au mariage interethnique, nous le percevons mieux à travers ce discours social : « c'est un totem pour les sorciers parce que quand la famille maternelle veut tuer les enfants en sorcellerie, la famille paternelle dit que ce n'est pas votre enfant. Vis versa ». Ce discours contribue à mobiliser, les acteurs réfractaires au mariage interethnique. En réalité les parents ayant contracté ce type de mariage présente le mariage interethnique comme un antidote aux oeuvres de la sorcellerie. Cet argument consiste à faire disparaître la différenciation que les enfants issus du mariage interethnique subissent dans l'organisation sociale du village. En effet, les acteurs qui véhiculent cette idée sont les parents ayant contracté un mariage interethnique. En mobilisant les autres acteurs à opter pour le mariage interethnique, les parents des enfants issus de ce type de mariage veulent voir accroître le nombre de parent dans leur cas, afin de mieux défendre les statuts de leur enfant. Les données révèlent que la plupart des autochtones ayant contracté un mariage interethnique sont les hommes Abouré. Un autre élément d'explication se perçoit dans le fait qu'en pays Abouré, les femmes ont un pouvoir important, ce sont `elles qui choisissent les personnes qui doivent exercer un quelconque pouvoir dans le village. De ce fait, elles ont un caractère autoritaire que les acteurs Abouré hommes redoutent. Ils contractent donc ce type de mariage pour affaiblir les femmes. Il est nécessaire de noter que, c'est le matriarcat et le matrilinéaire qui sont en vigueur à Yaou.

En plus de l'idéologie du totem des sorciers, de l'impact du modernisme, le mariage interethnique constitue une stratégie de lutte contre le pouvoir des femmes dans la société Abouré de Yaou. Nous détaillerons mieux cette partie dans la rubrique genre et société Abouré de Yaou .

II- STRUCTURATION DE L'ORGANISATION SOCIALE A YAOU

Après l'exposition des représentations, nous présentons les différentes organisations du village afin de mieux percevoir les champs de production de différences entre les acteurs sociaux concernés par cette étude. En effet, la présentation de l'historique de peuplement, de l'organisation politique, économique, culturelle, sociale, de la parenté, de la famille

II-1 HISTORIQUE DE L'INSTALLATION DES ABOURE DE YAOU

Selon la tendance du clan Ovo Ehivet

Le nom porté par le village de Yaou, a une histoire et une signification particulière. En effet, « Oyo » est le nom d'une rivière du village, à laquelle l'on vouait un culte. C'est la déformation du nom de cette rivière qui est devenu Yaou. Le peuplement de ce village se situe vers le 17e siècle. C'est en provenance du Ghana que les Abourés sont arrivés en Côte d'Ivoire. Pendant leur exode, le premier arrêt qu'ils ont marqué était à Alouré, village qui existe jusqu'à présent dans la sous préfecture d'Aboisso. C'est arrivé à Alouré, que le roi M'BE a envoyé trois messagers en exploration, à la recherche de terre fertile pour s'y installer. Ces trois messagers étaient respectivement moulo opho responsable « fakoué », qui signifie chef de quartier. Boidi gnangué en sa qualité de chef de terre et un représentant du roi. C'est à l'issu de cette exploration que le site actuel a été choisi.

Initialement, le nombre de lignage était de sept. Mais les querelles au sein des lignages ont occasionné la division de quelques lignages en deux lignages distincts. Présentement, le nombre de lignage à la cour royale est de 18 lignages. Le nom des sept principaux lignages sont les suivants : Ovo Ehivet, Obou Ehivet, allié Ehivet , Fatouan Ehivet, Manmlé Ehivet , Sapié Ehivet, .

Selon le clan Agbessi Ehivet

C'est vers 1701 que les Abourés sont venus d'Egypte à la suite d'une crise avec d'autres peuples. Pendant leur fuite le peuple Abouré à reçu de nombreuses attaques. Ces nombreuses guerres ont causé la mort du roi d'alors et tous ces héritiers au trône, ne restant qu'une soeur du roi. C'est dans ce contexte que le lignage royale Ovo Ehivet a perdu la plupart des ses membres et a perdu par la même occasion le trône royal, au détriment du clan familial Agbissi Ehivet qui a conduit le peuple jusqu'au site de Yaou. Le premier site, lors de notre arrivée après notre fuite du Ghana était « mèlètchèkro », 33(*)quant `au deuxième site, c'était offouko sur la coline. Et le dernier site est Yaou. Le village porte le nom de Yaou parce qu'à notre arrivée les féticheurs ont interrogé les esprits de ce lieu, qui leur ont dit que leur nom est oyo, le génie de la rivière qui est juste à l'entrée du village en venant de Bonoua. Et que le totem de cette rivière est le canard, le porc et les femmes indisposées. Le respect de ces totems était la condition pour occuper les lieux .Mais aujourd'hui le non respect de ces totems a conduit à l'assèchement de la rivière. Dans le village nous vivons avec des étrangers, qui sont les Attié, les baoulé, les N'Zima, les Agni, les burkinabé. Ils sont là il y'a longtemps à cause de la culture d'ananas pour certains, et pour d'autres la fuite des travaux forcés. En principe il devait avoir 7 (sept) familles, mais à cause des problèmes intra familiaux, il y a des familles qui se sont éclatées. Sinon il y a réellement 7(sept) familles qui sont : Obou Ehivet, Allié Ehivet, Fatouan Ehivet, Manmlé, Sapié Ehivet, Agbessi Ehivet et Samanté Ehivet.

Après avoir présenté ces deux récits de peuplement du peuple de Yaou. Que revêt une telle situation ! Cette situation traduit un conflit qui secoue le village de Yaou depuis 1997. Ces deux récits dévoilent également les parties en conflit et leurs soutiens. C'est dans ce contexte que s'est réalisée notre étude, chaque partie au cours de notre enquête nous soupçonnait d'être des espions de l'autre camp. La collecte des informations était donc très difficile, il nous a fallut expliquer la raison de notre présence à la cour royale en présence des deux parties en conflit. Après cette étape l'enquête exploratoire et l'enquête proprement dite se sont déroulées sans trop de difficultés. L'autre élément qui a permis la réussite de notre étude fut également le séminaire de restitution organisé par la cellule d'animation scientifique de l'IES.

II- 2 STRUCTURATION POLITIQUE

? La royauté

La royauté, sa majesté le Roi symbolise le peuple Abouré de Yaou composé aussi bien des vivants que des morts. Depuis 1997 le village de Yaou n'est plus dirigé par un roi. La raison de cet état de fait s'explique par le conflit, qui existe entre les clans familiaux Ovo Ehivet et Agbessi Ehivet. D' après le chef de génération des Tchagba, ce conflit tire sa source de l'historique d'installation des Abouré de Yaou. Les acteurs dont la mère est Abouré peuvent prétendre à la royauté, s'ils font partis du lignage royal. Le roi règne entouré d'un conseil de notables qui sont les représentants des clans familiaux.  Leur présence à la cour royale est matérialisée par un siège clanique dont l'emplacement est bien identique et immuable. Actuellement, il y a dix huit (18) chaises à la cour royale. Mais il y a trois chaises qui ne portent pas le symbole des guerriers qui est le sabre. En effet, ces trois clans familiaux n'ont pas de guerriers dans leur lignage. Car ils ne font pas partie des sept clans familiaux qui ont créé ce royaume de Yaou.

? La notabilité ou « mlanté34(*) »

Les notables, compte tenu de leur nombre important, sont repartis en groupes de sept notables de justiciers qui siègent à tour de rôle six (6) jours dans la semaine. Chaque groupe est composé d'un président, de son adjoint et d'un porte-parole qui joue également le rôle de messager. Tous les notables assurent le tribunal permanent du roi. Ils appliquent les lois coutumières. Ils sont choisis par les femmes les plus âgées des lignages, parce que le notable représente la famille et en est le chef.

La désignation des notables, revient aux femmes les plus âgées de la famille. Le prétendant à ce poste doit être de mère abouré. Les acteurs qui ont pour père un abouré ne peuvent pas être notables. Lorsque le prétendant est choisi, il est présenté au roi au moment venu à la cour royale, pour son investiture et son intronisation. Il est très difficile de destituer un notable, mais il peut être suspendu momentanément de ses fonctions en cas de faute grave. Si le notable est malade, alors le groupe auquel il appartient prend contact avec la famille pour voir la possibilité de le remplacer. La responsabilité revient donc à la famille.

Le conseil des notables détient les pouvoirs exécutif et judiciaire.

? Les chefs de quartiers ou « fakoué35(*) »

Il existe deux quartiers à Yaou. Donc deux chefs quartiers dans le village. Les deux quartiers du village sont : Bégniri et Kumasi. Le chef du quartier est le représentant de la population qui vit dans le quartier. Leur rôle est très important dans l'administration des affaires du village. Le roi ne peut rien faire sans les chefs quartier. C'est dans le clan familial Alliet Ehivet qu'on recrute les chefs quartiers. Pour être chef de quartier, il faut être de mère Abouré de Yaou . Les acteurs dont le père est Abouré et la mère allochtone ou allogène sont disqualifiés pour l'accession à ce poste.

?Le chef de terre

Ce poste appartient à un clan familial obouon ehivet et ce depuis très longtemps. Son rôle est de faire les libations pendant les cérémonies, et les libations pour confier le roi aux ancêtres. Pendant la désignation du roi le chef de terre doit donner son point de vue.

?Les chefs de générations ou « orfouamanibé36(*) »

Pour être chef de génération, on hérite de son père. Ce qui signifie que le père devrait précédemment être chef de génération avant que le fils ne soit chef de génération. Ici, les deux catégories d'acteurs peuvent prétendre à cette fonction, à condition que le père lui-même ait déjà occupé ce poste.

Le chef de génération veille sur les membres de sa génération, il veille aussi à l'éducation de ses membres, il est le premier responsable des actes que les membres de sa génération posent dans le village.

?Le porte canne ou « kpamanpouè »

Le « pkamanpouè37(*) » est le porte parole de la cour royale. C'est lui qui dévoile les décisions du roi et des notables pendant une réunion ou une cérémonie. Comme le roi et les notables ne doivent pas parler en public.

Pour être porte canne, il faut appartenir à la génération atiblé ou bahoulé .

Les deux catégories d'acteurs issus du mariage interethnique peuvent prétendre à cette fonction.

?Les griots ou « orgbayèpouè38(*) »

Le rôle du griot en pays Abouré de Yaou est d'annoncer dans le village le communiqué de la cour royal.

La fonction de griot commence à disparaître avec l'arrivée de la radio de proximité de Bonoua. Quand il y a une manifestation on fait passer un communiqué à la radio pour informer la population.

Toute personne ayant une voix qui porte peut jouer le rôle de griot. Il n'existe pas une famille particulière dont ce poste est destiné. Et les descendants de mariage interethnique peuvent être retenus pour être « orgbayèpouè »

?La place des femmes

Dans la société Abouré de Yaou, les femmes jouent un rôle très important. Elles sont la mémoire de la société   . Leur place importante dans la société fait que les hommes les trouvent caractérielles. A ce propos un enquêté dit ceci « les femmes abouré ont un caractère de garçon, c'est pour cette raison que beaucoup d'abouré homme vont chercher leur femme dans les autres ethnies ». Les femmes dans la société Abouré de Yaou sont chargées de régler seulement toutes les questions liées à l'accession à l'héritage. Elles sont les dépositaires du système d'héritage dans la société Abouré de Yaou.

 

§ Organigramme de commandement du village

Chef de génération

Population

Chef de terre

Chefs de quartiers

NOTABLES

ROI

ROI

NOTABLES

Chefs de quartiers

Chef de terre

ROI

ROI

ROI

Chef de terre

NOTABLES

Chefs de quartiers

Chef de génération

Population

II-3 STRUCTURATION CULTURELLE

Il sera question dans cette rubrique de décrire et analyser les différents mécanismes de reproduction des coutumes et valeurs sociales attachées à la communauté abouré de Yaou. En d'autres termes de voir comment se construit l'appartenance au groupe ethnique abouré de Yaou.

Au niveau culturel la société abouré de Yaou est structurée par les classes d'âges, les générations et la fête de génération .Ces différents éléments sociologiques constituent des institutions dans la structuration du système social et sont déterminants dans le processus de socialisation pour un abouré. Ils permettent la reproduction des valeurs et coutumes à travers les initiations lors des fêtes de génération et dans le quotidien des abourés.

Les générations, les classes d'âges et la fête de génération

II-3-1- La génération

Elle est une unité sociologique d'individu mâle regroupé par tranche d'âge. On distingue trois générations A, B et C dont les promotions s'alternent de manière cyclique dans le sens A, B, C puis B, C, A enfin C, A, B.

En pays Abouré, précisément à Yaou, les générations se succèdent au pouvoir de manière automatique, en douceur et dans la joie. Cette alternance du pouvoir est inscrite depuis des siècles dans la conscience des Abourés de Yaou. Elle n'est pas une vague idée, mais un comportement respecté et vécu39(*).

Chez les Abourés de Yaou, il y a trois (3) générations qui sont :

· N'nowe

· Noudjou

· M'ploussoue

Chaque génération est subdivisée en quatre (4) classes et regroupe de deux à cinq cent personnes.

II-3-2- Les classes d'âges

La génération est subdivisée en quatre classes d'âge (D, E, F, G). On distingue :

D-les Aînés (Attible)

E-les Cadets (Bohoule)

F-les Puînés né après un frère ou une soeur (Tchagba)

G- les Benjamins (Djamian)

Les membres de la classe Attiblé sont des hommes dont la moyenne d'âge se situe autour de 60 ans.

En raison de leur âge, ces hommes ont pour mission de continuer à s'occuper des affaires du village et du pays en cas de conflit armé. En un mot, les Attiblé sont les décideurs du village. Ils réfléchissent et organisent.

Mais s'il y a une décision à prendre, ils convoquent les trois autres groupes pour délibérer. S'il n'y a pas de consensus, leur idée est rejetée.

Quant aux membres de la classe Bohoulé, ils sont en général des hommes âgés de 45 ans à 50 ans : ce sont ceux-là qui votent les lois. La classe Tchagba comprend les éléments masculins d'un quartier dont la moyenne d'âge varie entre 25 et 30 ans. Ils sont les guerriers, leur rôle est de veiller au bien être des populations vulnérables ; enfant, femme et vieux. Enfin la classe Djamian est la classe des benjamins ; les plus jeunes ont dix (10 ans), les plus âgés ont quinze ans. Ils sont entre ceux qui vont au front et ceux qui surveillent. Ils ravitaillent ensuite en vivres et évacuent les morts et les blessés au cours d'un conflit armé.

En définitive, une classe d'âge est « un ensemble d'individus » ayant approximativement le même âge de l'un ou de l'autre sexe et qui, sont organisées de manière cohérente en un groupe socialement reconnu, soumis au rythme de passage ayant le même statut dans la société globale et exerçant les mêmes activités »

Dans la plupart des sociétés, il existe des instances de socialisations qui échappent au contrôle familial ; ce sont les masques (Wê, Dan, Sénoufo, Gouro, Baoulé, etc.) et les classes d'âges chez les Abouré. A l'intérieur de ces structures, les initiés apprennent sous la direction spirituelle de leur maître, les secrets de la vie au sens large du terme, façonne leur psychologie pour devenir des hommes accomplis, courageux, généreux, honnêtes (Dedy S et Tapé G : 1994). La formation est le fait d'une autorité collective et s'appuie généralement sur des enseignements ésotériques. Il noter que l'initiation a un caractère obligatoire.

II-3-3- La fête de génération

La fête de génération est institué depuis la nuit des temps dans la société abouré de Yaou .Chaque quartier du village organise sa fête de génération et décide également l'intervalle entre deux fêtes. Mais la structure ne varie pas, les articulations sont les mêmes et les manières également ne sont pas spécifiques à chaque quartier. La spécificité se manifeste seulement au niveau du temps qui sépare deux fêtes.

Elle se déroule pendant une semaine, du lundi au samedi.

Les deux premiers jours servent au nettoyage du village et à la réflexion sur les préparatifs de la fête proprement dite. Le mercredi sert de quartier libre aux membres de la génération. Le jeudi est le début de la formation ou l'initiation proprement dite. Cette étape s'articule en deux phases, la première consiste à éprouver les membres de la génération sur le plan physique. Et l'autre phase sert à l'initiation des guerriers. En effet, les guerriers sont formés à part car ils sont les protecteurs de chaque catégorie ou ils seront affectés. La fête proprement dite est le samedi, jour ou les aînés rendent public le classement de chaque homme dans les différentes catégories. C'est-à-dire soit dans la catégorie attiblé ou bahoulé ou tchagba ou tchamian. Cette étape terminée tout le village passe à la phase festive de la fête de génération. Il nous ait apparut important de décrire la fête de génération, car c'est l'un des champs sur lequel les données ne relèvent pas de production de différenciation entre les descendants de mariage interethnique et même entre eux et les descendants de mariage intra ethnique.

II-4- STRUCTURATION ECONOMIQUE

A l'instar de la Côte d'Ivoire, le succès économique du village de Yaou repose sur l'agriculture, la pêche et la fabrication du  « koutoukou40(*) ». On note également d'autres secteurs tels que le commerce et le transport. La caractéristique de ce succès s'explique par le fait que les richesses sont produites et détenues essentiellement par les autochtones.

II-4-1 L'Agriculture

L'agriculture a permis à la population de Yaou de réussir son envol économique. Deux facteurs justifient cette réussite : d'une part, il y a l'esprit d'entreprise et de concurrence qui animent les populations autochtones, et d'autre part, il y a l'opportunité qui leur a été offerte de s'adonner très tôt aux cultures industrielles, comme, l'ananas, l'hévéa, le palmier à huile en plus du café et du cacao déjà pratiqués dans presque toutes les régions du pays.

La quasi-totalité de la population commence à pratiquer plus la culture d'hévéa au détriment de la culture d'ananas autrefois culture phare des abouré, dans la mesure où elle procure plus de bénéfices que l'ananas aujourd'hui. Ici donc, tout le monde s'essaie à cette culture. Même les salariés et les cadres livrent une concurrence aux paysans. Si l'ananas, le café et le cacao assurent des revenus périodiques annuels, l'hévéa et le palmier à huile permettent une mensualisation des revenus. De plus, avec la mévente de l'ananas, la culture du manioc a pris une place stratégique dans l'économie du village. La Plupart des femmes abourés ont aujourd'hui une plantation de manioc. La culture du manioc à outrance, a maintenant permis l'exportation de « l'atoupkou » et « kouman » vers la ville d'Abidjan.

II-4-2 La pêche

Avec la proximité du fleuve Comoé qui traverse le village de Yaou , la population de Yaou a développé un attrait pour la pêche. Les produits de la pêche sont convoyés à la sous préfecture pour être vendus. Dans chaque concession, chaque chef de famille a une pirogue et un filet. Pendant que les femmes modernisent la transformation du manioc, les hommes ne sont pas en reste, ils perfectionnent leur technique de pêche.

II -4-3 La fabrication du koutoukou

Le développement de la culture du palmier à huile a entraîné une activité intense de fabrication du « koutoukou » .En effet, le koutoukou est une boisson alcoolisée faite à partir du vin de palme. Cette boisson est considérée comme l'eau de l'abouré . Dans le jargon abouré cette boisson est communément appelée « pitèce »41(*). Chaque jour des femmes viennent d'Abidjan, pour l'achat cette boisson. Pendant nos entretiens, un fabriquant de cette boisson nous fait la révélation suivante, « c'est notre cacao, le flux de cent litres plein, on le vent aux femmes d'Abidjan à cent vingt mille, ananas est tombé, cacao aussi est tombé c'est koutoukou qui nous permet de vivre nous les jeunes ».

II-4-4 Le commerce

L'activité commerciale dans le village de Yaou est considérablement variée. En effet, à Yaou, l'on trouve des kiosques des restauratrices ambulantes et des restaurants, des maquis, des jeux vidéo et des vidéos clubs, des buvettes de « pitèce ». A coté de cette catégorie d'activité, nous avons de nombreux points de vente d'aloko et de beignets. Le samedi est le jour de marché. Ce jour là, des vendeurs et vendeuses viennent de Bonoua ,de bassam et de moossou .

Mais il est formellement interdit aux allochtones et allogènes de vendre l'atoupkou et l'attiéké .

II-4-5 Le transport

La plupart des transporteurs sont des autochtones. Et une seule ligne compose l'itinéraire des transports à Yaou : la distance Yaou ? Bonoua et bonoua? Yaou

II-5 STRUCTURATION DU SYSTEME DE PARENTE

Le système de parenté est un ensemble de dispositions qui permettent à des personnes de vivre ensemble et de coopérer selon les règles de la vie sociale. Elle est basée sur la filiation ce qui détermine le caractère d'un système de parenté, c'est la façon dont la filiation est reconnue et établie. Il est important de signifier que la parenté n'est pas un vase clos. Il est en rapport avec tout le système social global. La structure de la parenté n'est pas basée sur le lien biologique, mais sur les relations d'alliance. Ce qui lui confère une nature culturelle et non biologique. Le caractère culturel de la parenté se manifeste de manière différentiels les dans les sociétés humaines. Ce qui nous introduit dans les logiques de différenciation des groupes en interaction. En effet, le système de parenté est différemment vécu et apprécier dans les différents groupes ethniques. L'ethnicité des descendants de mariages interethniques prend sa source dans le système de parenté en vigueur dans la société Abouré de Yaou.

Le système de filiation en vigueur dans le village de Yaou est la parenté matrilinéaire. Elle constitue la base de la matérialisation de l'ethnicité des descendants issus du mariage interethnique. L'accession aux relations de pouvoir est structurée par le mode de filiation établit à Yaou. L'accession à l'héritage, aux relations de pouvoir, à l'accès au foncier sont exclusivement réservés aux acteurs dont la mère est abouré. L'exclusivité dont nous faisons cas préalablement signifie, que ces acteurs dans le cadre de l'accession au pouvoir ou la gestion des biens familiaux, sont les seuls habiletés à postuler. Le système matrilinéaire influence la structure des relations dans les différents champs. Tout se fait et se défait selon la filiation matrilinéaire à Yaou. Tous les mécanismes de différenciation quelque soient leur mode de fonctionnement sont structurés par la filiation matrilinéaire à Yaou.

II-6 LA STRUCTURE FAMILIALE DE YAOU

- La famille

Elle est regroupée en clans. Un clan selon le petit Robert est une unité sociologique constituée d'individus se reconnaissant en un ancêtre commun.

A l'origine, Yaou comptait sept (7) clans à savoir agbessi ehivet42(*), obouon ehivet, alliet ehivet, manmlé ehivet, allié ehivet, samanté ehivet, vantouan ehivet, eyivévré ehivet. Pour des raisons particulières, il a maintenant douze lignages. Face à cette situation un autre conflit au niveau de la royauté emmène les lignages à remettre en cause le statut de lignages d'origines de certains lignages. Cette situation conduit le clan familial agbessi et avo ehivet à contester le statut de lignage royal et vis versa, le clan familial agbessi nie le statut de lignage royal à au clan avo ehivet. Ceci dit voici l'ensemble des clans familiaux :

· agbessi ehivet

· Oboon ehivet

· Alliét ehivet

· manmlé ehivet

· voManmlé ehivet

· allié ehivet

· samanté ehivet

· Vantouan ehivet

· eyivévré ehivet .

· sapié ehivet

· avo ehivet

· adévéssé ehivet

De nos jours on dénombre donc dix huit (12) clans. Mais avant de les citer, il faut remarquer qu'à Yaou, chaque clan est symbolisé par deux chaises (ou Ebihin). Et on reconnaît d'ailleurs les membres d'une famille par la chaise qui est la cellule sociale de la famille. Yaou est donc un regroupement de clans familiaux. Depuis 1997 le village de Yaou n'a plus de roi. Un conflit entre deux clans qui se disputent la chaise royale rend impossible la désignation du roi.

Tableau récapitulatif des clans familiaux et des chaises à la cour royale

Dénominations des clans

Familles-chaises

1

Agbessi ehivet

2 chaises

2

Obouon ehivet

2

3

Alliet ehivet

2

4

Manmlé ehivet

1

5

Vonamlé ehivet

1

6

Allié ehivet

2

7

samanté ehivet

2

8

Vantouan ehivet

1

9

Eyivévré

1

10

Sapié ehivet

2

11

Avo ehivet

1

12

Adévéssé ehivet

1

Total

12

18

- Logique de formation des couples mixtes

L'analyse des motifs de contraction des mariages interethniques à Yaou révèle deux tendances de motivations. Les données montrent que les autochtones qui contractent ce type de mariage sont les hommes abouré. Les raisons que les acteurs avancent pour expliquer cette disposition est la suivante : « les femmes abouré ont le comportement des hommes, très grossières et caractérielles ». C'est ce discours qui légitime la réticence des hommes à prendre en mariage les autochtones femmes. Dans la société abouré, en particulier à Yaou , les opinions des femmes sur des questions importantes est très déterminante dans le processus de résolution des conflits . De ce fait, elles sont très écoutées et leurs idées écrasent souvent celle des hommes. De plus, avec la légende de la reine « abla pokou », le rôle et la position des femmes se trouvent être logés un cran au dessus de celui de l'homme, car ce sont elles qui ont fait le sacrifice, afin d'échapper à l'ennemi. L'analyse des données révèlent que les hommes, fatigués de subir la position dominante des femmes sur les questions d'ordre publique, mettent en place des stratégies pour échapper à cette même situation au plan matrimonial. Le mariage interethnique devient pour les hommes abouré un moyen de contourner la position dominante des femmes. Car la suprématie des femmes s'étend sur d'autres champs tels que : l'accession à l'héritage et dans les relations de pouvoirs plus précisément sur le choix des autorités à savoir le roi et les chefs de familles qui sont les notables à la cour royale.

Ces différentes analyses montrent à quel point la question genre est de mise dans la société abouré de Yaou. Face à cette situation, nous cherchons à saisir les motivations des conjoints allogènes et allochtones dans le processus de formation des couples mixtes.

En effet, nous constatons que la plupart des conjoints allochtones sont de sexe féminin, alors que beaucoup de restriction sont faite à l'égard des allochtones et des allogènes sur le plan économique et sur le plan l'activité agricole. Le fait de contracter ce type de mariage constitue pour cette catégorie ethnique un moyen de contourner ces restrictions. De plus, le mariage interethnique est un moyen pour les conjointes, qui étaient des servantes dans les ménages abouré de se repositionner de façon identitaire et de se reconstruire un statut de meilleure qualité, que l'ancienne. Car, dans un passé récent, elles étaient catégorisées comme des servantes, donc des acteurs qui ne devaient pas prendre position, mais plutôt des acteurs qui subissent les positions et opinions de leur patron ou patronne. De ce fait, le mariage interethnique revêt pour les conjointes allochtones et allogènes des enjeux capitaux au niveau de leur insertion économique et au niveau de la reconstruction de leur statut professionnel et identitaire dans le village de Yaou .

III- LA QUESTION GENRE DANS LA SOCIETE ABOURE DE YAOU

La société abouré est très marquée par la question genre. En effet, nous l'affirmons à cause de la place importante que jour la femme dans la société abouré de Yaou. Au niveau de l'organisation sociale les femmes gèrent les questions cruciales à Yaou. A savoir la gestion de la question de l'héritage, donc les détentrices du système matrilinéaire. De plus se sont les femmes qui ont le dernier mot sur les questions de désignation des chefs de famille, des notables, du roi et des chefs guerriers. Tous ces éléments d'informations nous emmène à réfléchir sur l'origine de cette position importante des femmes dans la société abouré de Yaou. Cette situation prend source dans le mythe de la reine Abla Pokou43(*) lors de la fuite du grand groupe ethnique akan pendant la guerre au Ghana leur point d'origine selon l'historien. Ce mythe à un effet de double structuration au niveau des rapports intra ethnique et interethnique dans les interactions entre les acteurs. Dans un premier temps ce mythe fonde la dichotomie entre le groupe Akan et les autres grands groupes ethniques sous l'angle de leur origine, c'est-à-dire que le phénomène des frontières ethniques dans les relations interethnique s'explique aussi par la mise en évidence de ce mythe, le discours d'un acteur justifie ce poit de vue « c'est facile de se marier avec les baoulé, les Agni, les Adioukrou, les Attiés, les Ebrié ». Dans un second temps ce mythe produit l'idéologie selon laquelle se serait le neveu qui serait légitime pour hériter des biens de son oncle et que le « vrai abouré 44(*)» est l'acteur dont la mère est abouré. C'est bien cette deuxième structuration qui fonde la place importante qu'occupent les femmes dans la société Abouré. Mais dans notre démonstration nous nous pencherons sur le deuxième point, c'est-à-dire la position dominante de la femme sur les hommes, structuré par le mythe de la reine Abla Pokou .En effet, l'appartenance ethnique au groupe abouré de Yaou des descendants de mariage interethnique se construit en fonction des normes matriarcale. Car les enfants issus de mariage interethnique dont le père est abouré sont construits comme ayant sa famille ailleurs. Donc celui-ci n'appartient pas au groupe ethnique abouré de Yaou. Ceci révèle le statut de la femme dans la société abouré de Yaou. Car la définition de l'appartenance ethnique se définit selon les femmes et l'appartenance à une classe d'age et la participation effective aux activités de sa catégorie. Mais l'élément déterminant dans l'appartenance ethnique est la matrilinéarité. Le système matrilinéaire structure l'appartenance ethnique dans le village de Yaou. La construction sociale de ce système matrilinéaire à Yaou régit et filtre l'intégration des ascendants et descendants de mariage interethnique au niveau politique et au niveau de l'héritage.

De tout ce qui précède les femmes jouent un rôle important dans la société abouré de Yaou. Et ceci explique également le fait qu'elles sont peu à contracter des mariages interethniques.

IV- LES MANIFESTATIONS DE L'ETHNICITE

Dans cette partie, nous présenterons les différentes logiques de dichotomisation entre les acteurs issus du mariage interethnique et ceux qui sont issus du mariage intra ethnique.

IV-1 ETHNICITE ET INTEGRATION DES CONJOINTS

ALLOCHTONES ISSUS DE MARIAGES INTERETHNIQUE

Concernant la manière dont les abourés perçoivent, les conjoints allochtone ou allogène, nous pouvons dire, que la population ne manifeste pas une hostilité ouverte envers les beaux ou les belles. Mais la matérialisation des logiques de différenciation est plutôt transférée au niveau de l'ethnicité des enfants issus du mariage interethnique. Car, c'est au niveau de leur ethnicité que les enjeux revêtent une signification particulière. Le discours social qui conforte la description de l'interaction entre les autochtones et leur conjoint ou conjointe, les enfants issus et l'ensemble de la population villageoise est la suivante : « nos enfants, c'est-à-dire ceux dont le père est abouré de Yaou et la mère pas, doivent faire beaucoup attention à leur parole.». Ce discours révèle, que dans la société abouré, les logiques de différenciation se formalisent sur les acteurs issus du mariage interethnique. C'est donc sur les enfants que la société abouré braque les yeux. Car, ils sont une menace pour la reproduction des règles, normes institutionnelles. A ce sujet, une sélection est opérée entre les acteurs issus du mariage interethnique. Sur les différents niveaux de manifestation du pouvoir, la sélection se matérialise par la disqualification des acteurs sociaux dont la mère n'est pas abouré. Les acteurs justifient cette sélection par le respect des normes du système matrilinéaire. « Ici c'est le matrilinéaire, donc les enfants dont la mère est abouré ont un statut et une considération particulière face à ceux dont la mère n'est pas abouré. » Parmi ces deux catégories d'acteurs issus de ce type de mariage, il existe une ethnicité entre ces acteurs. Nous constatons une ethnicité effective au niveau de l'accession au pouvoir entre les deux catégories d'acteurs ci-dessus mentionné. Le constat que nous faisons est le suivant : entre les deux catégories d'acteurs issus du mariage interethnique, ce sont ceux dont la mère est abouré qui sont considérés comme des abouré à Yaou.

IV-2 ETHNICITE ET BLANCHIMENT DE LA GENEALOGIE

DU LIGNAGE AVO EHIVET

En effet, depuis 1997 le village de Yaou n'a plus de roi. La raison est la remise en cause ou le blanchiment de la généalogie du lignage précédemment autorisé à occuper la fonction de roi. « Quand nous sommes sortis d'Egypte, la famille royale était les avo éhivet. Arrivé sur le site actuel, après des années de règne le roi m'BE décède. Un problème se poser : la reine mère n'ayant plus d'enfants de sexe masculin, il sera donc impossible de recruter un autre roi dans le lignage avo éhivet. Un accord a donc été trouvé entre la famille du porte canne du défunt roi, pour que son porte canne soit roi jusqu'à ce que la reine mère ait un enfant de sexe masculin. Après de ce pacte, la reine n'a pas pu avoir d'enfant male et sa seule fille, malheureusement a trouvé la mort. Dans les soucis de récupérer le siège royal, la reine mère n'ayant plus d'enfant, va affranchir ses esclaves femmes, pour les considérer comme ses enfants. Ces enfants socialement construis aurons des maternités. C'est la naissance des enfants de celles-ci qui va relancer les clauses du pacte précédemment signé entre les familles ovoéhivet et agbessiéhivet »

IV-3 ETHNICITE ET INTEGRATION SOCIALE DES CONJOINTS

ETRANGERS ISSUS DE MARIAGE INTERETHNIQUE

Les autochtones ayant contractés un mariage interethnique savent que leurs enfants ne peuvent pas équitablement accéder aux différents postes de pouvoir dans le village à cause du fait que leur femme ne soit pas autochtone. Au niveau de l'ethnicité des conjointes allochtones l'intensité des logiques de différenciation est faible. En effet, au niveau de leur ethnicité l'enjeu n'est pas investi d'une signification particulière. Et la plupart des conjoints étrangers sont des acteurs de sexe féminin. Elles étaient pour la plupart des servantes dans le village avant de se marier avec un autochtone. Elles ont donc préalablement construit des rapports privilégiés avec la plupart des villageois. Elles sont également venues dans ce village, depuis près de quinze ans en arrière. Sur le nombre total de couples recensés, seul un conjoint est allogène burkinabé. Pendant les premières heures de la crise socio politique, et pendant que les autochtones chassaient les burkinabé. Il a été épargné, tandis que ses concitoyens étaient pourchassés. Le mariage interethnique qu'il a contracté a masqué sa nationalité. En effet, le mariage interethnique a contribué au blanchiment de sa généalogie, pour le reconstruir comme un des leurs. « Dramane c'est notre frère, il a marié notre soeur ». Ce discours social révèle la capacité des mariages interethniques à rendre poreuse les frontières ethniques. De plus, le mariage interethnique est une stratégie pour contourner les restrictions économiques à l'encontre des allochtones et allogènes dans le village. Car cette catégorie ethnique ne doit pas vendre de l'attiéké, l'atoupkou45(*) aux abords de la voie principale. Cette décision a été prise il y a deux ans à la cour royale par la notabilité. Il est important de signifier que l'intégration de ces acteurs est limitée dans le temps et dans l'espace. De plus, cette intégration comme pour les conjointes allochtone se limite aux champs culturels, économiques, sociaux, religieux.

IV-4 ETHNICITE ET APPARTENANCE ETHNIQUE

DES DESCENDANTS DE MARIAGE INTERETHNIQUE

Selon le système de parenté en vigueur dans le village de Yaou, les villageois distinguent deux catégories d'acteurs issus de mariage interethnique. Ceux dont la mère est autochtone et ceux dont le père est autochtone. La distinction n'est pas fortuite. En effet, se sont les enfants dont la mère est abouré de Yaou qui sont construits comme des autochtones, tandis que ceux dont le père est abouré sont considérés comme des autochtones à un degré moindre. Dans leur rapport quotidien, les autres acteurs leur rappellent qu'ils n'ont pas de famille dans le village. Et que leur famille se trouve dans leur village maternel .Cette dichotomie au niveau identitaire, qui les présente comme n'étant pas des « abouré pur »46(*), implique leur disqualification sur les champs de structuration du pouvoir. En effet, le contexte de crise identitaire qui secoue la Côte d'Ivoire depuis le début de la crise, a contribué à exacerber les restrictions définies à leur égard. De plus, cette situation contribue à transformer la manière de voir et de pratiquer l'intégration des minorités à Yaou. Ceci dit, revenons donc à la question particulière de notre étude, l'insertion des descendants issus du mariage interethnique à Yaou. Nous constatons sur la question de l'intégration de ces acteurs, qu'elle est différenciée sur les champs. En effet, nous constatons une intégration sur quatre champs : culturel, économique, religieux et social.

IV-5 ETHNICITE DES DESCENDANTS DU MARIAGE

INTERETHNIQUE ET RAPPORT DE POUVOIR

Nous avons constaté pendant nos enquêtes et le séminaire de restitution auquel nous avons pris part, que l'enjeu que révèle le champ politique est très sensible. Et ce sur tous les champs d'étude où se déroule la même étude. Au niveau politique, l'idéologie de l'autochtonie est instrumentalisée à un double niveau de structuration des rapports. Au niveau des acteurs issus du mariage interethnique, plus précisément les enfants issus de ce type de mariage, cette idéologie. contribue à mobiliser les villageois à remettre en cause la pureté du sang des enfants de mariage interethnique. Le discours social qui soutient cette idéologie est le suivant : « ils ne sont pas de purs abouré  ». Ce qui produit donc l'exclusion de ceux ci dans l'exercice de rapports de pouvoir. Sur ce champ, l'accession aux rapports de pouvoir des enfants issus de mariage interethnique est différenciée. Selon le système matrilinéaires seul les enfants dont la mère est abouré peuvent prétendre à la notabilité, à être chef de quartier, à être chef guerrier, à être chef des notables, et si sa mère est du lignage royal, à la royauté. La disqualification des acteurs dont le père est abouré, s'explique par le rôle dominant de la femme dans la gestion de la cité et dans la désignation des autorités du village. En réalité l'éventail de privilèges accordé aux acteurs dont la mère est abouré est plus large, que celui des acteurs dont le père est abouré, ceci démontre le rôle important mais latent que jouent les femmes dans la société abouré de Yaou. . De plus, cette réalité montre le recours inconditionnel des femmes dans la résolution des conflits dans la société abouré de Yaou. La disqualification des acteurs dont le père est abouré révèle que les femmes sont les dépositaires des rapports de pouvoir dans la société abouré de Yaou. Elles sont les détentrices exclusives du privilège de désignation des autorités du village. En d'autre terme, la place des femmes dans le système social à Yaou est déterminante dans la structuration des rapports dans notre champ d'étude. En poussant l'analyse plus loin, nous constatons que la configuration de l'organisation économique, politique, sociale, religieuse, symbolique, est beaucoup influencé par la position des femmes dans le village. Cependant, se sont les hommes qui dirigent et gèrent les affaires courantes dans le village. Mais ces derniers, n'exécutent que les décisions prises par les femmes.

IV-6 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE

INTERETHNIQUE ET ACCESSION A L'HERITAGE

Justification historique du système matrilinéaire

Elle est tirée de l'épopée de la Reine Pokou qui caractérise le groupe Akan en Côte d'Ivoire. De quoi s'agit-il ?

L'histoire enseigne que lors de l'exode du peuple Baoulé du Ghana vers la Côte d'Ivoire, il devait traverser un fleuve pour échapper aux poursuivants Ashanti. Il n'y avait pas d'embarcation. Le devin consulté, prédit que le fleuve exigerait un sacrifice humain. Celui d'un jeune enfant.

Lorsque le roi s'adressa à son épouse afin qu'elle permit que son plus jeune fils soit livré au fleuve, elle opposa un refus catégorique.

Compte tenu du danger qui menaçait le groupe, ce fut la soeur du roi qui offrit son fils qu'elle portait dans les bras. Le roi après incantation jeta l'enfant dans le fleuve et par miracle, un pont artificiel formé par une colonne de caïmans traversant le fleuve de part en part permit aux fugitifs de passer et d'avoir ainsi la vie sauve.

Depuis cette épopée, on décida que désormais l'enfant hérite de son oncle maternel.

Nous constatons que les deux catégories d'acteurs sociaux identifiées à la suite des données recueillies sur le terrain, ont un accès différentiel au système d'héritage en vigueur dans la société Abouré de Yaou. Ces données révèlent que les acteurs dont la mère est autochtone bénéficient d'un éventail de privilège plus vaste du point de vue de l'accession à l'héritage de leurs géniteurs, mais aussi au niveau de leurs oncles croisés. Alors que ceux dont le père est autochtone ne peuvent qu'accéder à l'héritage de leur géniteur, que si les biens en question, ne sont pas du patrimoine familial. Le système de recrutement des membres de la famille est un opérateur de détermination de rôle, de statuts, de niveau d'intégration dans la société Abouré de Yaou. Il ressort donc de l'analyse que le principe d'accession à l'héritage est un mécanisme de différenciation entre les acteurs issus de mariage interethnique. Aussi, l'idéologie de la matrilinéarité structure les rapports d'héritage dans la société Abouré de Yaou. Le système matrilinéaire est la sève nourricière de l'accession à l'héritage. Car pour comprendre le système d'héritage, il est important de saisir le système de parenté en vigueur dans la société étudiée.

IV-7 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE

ET ACCESSION AU FONCIER

Au niveau de l'accession au foncier, les données relèvent deux tendances. Mais il est important en effet, de préciser les représentations rattachées à la terre en tant que bien. Dans la société abouré de Yaou on distingue trois types de représentations liées à la terre dans la société abouré de Yaou. La première représentation est la suivante :

? « ebetié » terre lotie, qu'on peut vendre à toute personne.

? La deuxième qualité est celle-ci «  obo » forêt non déchiffrée, mais cultivable. La dernière représentation liée à la terre est :

? « n'foué » terre déjà travaillée.

L'énumération de ces trois représentations révèle du point de vue symbolique un système de hiérarchisation de la terre. Chaque représentation renvoie à un ou des objectifs qui sont soit communautaires, soient individuels. En ce qui concerne la terre « ébetié » l'objectif communautaire qui en ressort est le développement au sens de l'urbanisation. Cette représentation de la terre amène les acteurs à ne pas ériger des barrières entre les autochtones et les allogènes dans le processus d'accès à la terre « ébétié ». Toutes les catégories ethniques en interaction sur le champ d'étude peuvent accéder aux terrains lotis. Et ce, à cause de l'idéologie du développement rattachée à cette représentation de la terre. En effet, dans le processus de développement de la sous préfecture de Bonoua, Yaou veut concurrencer avec le village de Bonoua et de Mossou. Le village de Yaou veut prendre la revanche sur le passé, car selon les acteurs par le récit de l'arrivée des abouré sur le territoire au jour d'hui appeler Cote d'Ivoire disent ceci  « Lors de notre arrivée suite à la guerre qui a déclenché dans le royaume du Ghana. Nous sommes arrivées en groupe sur notre ancien site. Nous sommes arrivés ici les premiers parmi tous les abouré. C'est pourquoi lorsqu'il  y'a un problème dans les autres villages abouré, c'est ici qu'on venait le régler. Mais aujourd'hui c'est l'inverse ». Nous constatons, que l'intégration des allochtones et allogènes sur la question du foncier, au sens du lotissement, est motivée par l'idéologie du développement.

L'analyse nous a permis de comprendre, que le foncier sous son angle terre lotie n'est pas instrumentalisé par les acteurs comme un mécanisme de différenciation dans le processus des rapports interethnique. En d'autres termes, le foncier sous l'angle terrain loti ne constitue pas un élément de définition de l'appartenance ethnique.

L'objectif rattaché à la deuxième représentation de la terre dans la société abouré de Yaou est : la mise en avant de l'idéologie de l'autochtonie. Cette idéologie de l'autochtonie se matérialise par l'exclusion sur ce champ précis des autres catégories ethniques autres qu'autochtone. Le sens rattaché à cette seconde représentation de la terre pour les autochtones se perçoit dans ce discours social «  la forêt, c'est notre patrimoine, c'est ce qui prouve que nous sommes arrivés les premiers sur les lieux ». Propos d'un notable à la cour royale. L'analyse de ce discours montre que la forêt est un moyen de reproduction et de pérennisation de leur appartenance ethnique. De plus, elle constitue un cadre d'affirmation de l'autochtonie. Ce discours révèle également que la forêt non défrichée est un héritage que les ancêtres leur ont légué. Dans la culture abouré, les seuls acteurs qualifiés pour hériter d'un quelconque bien communautaire sont les neveux utérins. Le lien de parenté est un élément déterminant dans l'accession au « obo ». En somme les acteurs sociaux instrumentalisent la terre sous son angle « obo » comme un mécanisme de différenciation entre eux et les autres groupes ethniques présent à Yaou . Le prolongement de cette analyse permet de constater que parmi les deux catégories d'acteurs issues du mariage interethnique, ceux dont le père est autochtone sont aussi disqualifiés dans l'accession au « obo ». Ce mécanisme de différenciation structure à un double niveau les rapports à la terre sous son angle forêt non défrichée « obo ». Il permet d'écarter non seulement une partie des descendants issus des mariages interethniques, mais aussi les membres appartenant à un groupe ethnique distinct des abouré de Yaou.

Il ressort de la dernière représentation un objectif de convocation de l'idéologie de l'autochtonie ; le droit de propriété est donc exclusif aux autochtones. Toutefois, sa spécificité se matérialise par le fait qu'un allochtone ou un allogène ou un acteur issu d'un mariage interethnique dont le père est abouré peut bénéficier d'une propriété temporaire. Il en découle un second objectif économique. La mise en location de la terre dite n'foué est un moyen pour les autochtones de capter des ressources financières. Nous constatons que cette représentation à la terre « nfoué » est utilisée par les acteurs comme un mécanisme de différenciation entre eux et les catégories ethniques présentent sur notre champ d'étude.

Après la mise en évidence des représentations liées à la terre du groupe ethnique abouré de Yaou, que nous révèlent les deux tendances relatives à l'accession au foncier :

Les acteurs dont la mère est abouré de Yaou peuvent hériter de tout bien privé et familial .Quant aux acteurs dont le père est abouré de Yaou , ils ne peuvent hériter qui des biens appartenant à leur père .

CONLUSION

La multiplicité des mariages interethniques au sein de nos différentes sociétés africaines, soulève beaucoup de préoccupations d'ordres scientifiques, que sociaux. En effet, certains scientifiques confirment que la naissance des mariages interethniques contribue à la destruction des préjugés, des stéréotypes, attribués aux différentes ethnies autres fois. Aussi permettent-ils d'effacer les frontières ethniques entre les groupes ethniques en interaction. Face à ces constats, il paraît évident de signifier que les mariages interethniques constituent un facteur de consolidation de la cohésion sociale dans la société.

Cependant, sommes-nous interroger sur les implications que causent les mariages interethniques dans l'assignation et la désignation des identités ethniques des descendants de ce type de mariage ?

Cette interrogation ouvre la réflexion sur la manière dont les mariages interethniques, fabriquent l'ethnicité dans nos sociétés rurales.

En effet, au cours de notre étude, nous avons cherché à saisir les processus de construction des identités ethniques des descendants de mariages interethniques dans la société abouré de Yaou.

Car pendant que, la société en général présente le mariage interethnique comme un facteur de cohésion sociale. La réalité impose une autre lecture. Il est donné de constater que les mariages interethniques produisent de l'ethnicité à un double niveau de la construction de la réalité. C'est à dire au niveau des conjoints et au niveau des descendants de ce type de mariage. Mais dans le cas d'espèce, ce sont les résultats sur le questionnement de l'ethnicité des descendants que nous exposerons dans cette partie.

C'est dans cette perspective, que la question centrale qui a structuré notre étude se présente de la façon suivante : quels sont les mécanismes sociaux de différenciation des descendants de mariage interethnique entre un ou une abouré et un autre groupe ethnique ?

Il a s'agit tout le long de cette recherche, d'identifier et d'analyser les mécanismes par lesquels sont construis les dichotomies euxnous dans la société abouré de Yaou.

Dans le souci de comprendre la réalité liée aux rapports interethniques sous l'angle des mariages interethniques, nous avons émis une réponse provisoire afin de cerner l'acceptation ou le rejet des descendants de mariage interethnique à Yaou se structure de la façon suivante : l'intégration et la différenciation des acteurs issus de mariage interethnique dont l'un des conjoints est abouré de Yaou est lié à la représentation sociale de l'autochtonie.

Il est donné de voir que, que dans le cas d'espèce le concept d'autochtonie revêt une autre signification particulière dans la construction de la réalité sociale. En effet, le concept d'autochtonie est ici inextricablement lié au mode de recrutement des parents dans la société abouré de Yaou. La construction de l'identité ethnique se fait en rapport avec le système matrilinéaire dans le cas d'espèce, c'est-à-dire dans le village de Yaou.

Selon le système de parenté en vigueur dans le village de Yaou, les villageois distinguent deux catégories d'acteurs issus de mariage interethnique. Ceux dont la mère est autochtone et les acteurs dont le père est abouré. La distinction n'est pas fortuite. En effet, se sont les enfants dont la mère est abouré qui sont construits comme des autochtones, tandis que ceux dont le père est abouré sont considérés comme n'étant pas autochtones sur certains champs. Dans leurs rapports quotidien, les autres acteurs leur rappel qu'ils n'ont pas de famille dans le village. Et que leur famille se trouve dans leur village maternel .Cette dichotomisation au niveau identitaire, qui les présente comme n'étant pas des « abouré pur » implique leur disqualification sur les champs de structurant les relations de pouvoirs.

Nous avons constaté également que l'enjeu que révèle le champ politique est très sensible. Et ceux dans tous les villages où se déroule la même étude. Au niveau politique l'idéologie de l'autochtonie est instrumentalisée à un double niveau de structuration des rapports. Au niveau des acteurs issus du mariage interethnique, plus précisément les enfants issus de ce type de mariage, cette idéologie contribue à mobiliser les villageois à remettre en cause la pureté du sang des enfants de mariage interethnique. Le discours social qui soutient cette idéologie est le suivant « ils ne sont pas abouré pur ». Ce qui conduit à les exclure dans l'exercice de rapports de pouvoir. Sur ce champ, l'accession au rapport de pouvoir des enfants issus de mariage interethnique est différenciée. Selon le système matrilinéaire seul les enfants dont la mère est abouré peuvent prétendre à la notabilité, au chef de quartier, chef guerrier, chef des notables si sa mère est du lignage royal, à la royauté si sa mère est du lignage royal.

La disqualification des acteurs dont le père est abouré, s'explique par le rôle dominant de la femme dans la gestion des affaires au sein du village et dans la désignation des autorités du village.

Ces différents constats permettent d'affirmer que notre hypothèse d'étude s'est confirmée au terme de notre démonstration.

A propos des outils de collecte des données et méthodes d'analyse ayant eu cours tout au long de notre étude, au titre des outils et techniques de collecte des données, nous avons opté pour l'entretien. Car il est approprié aux études à perspective qualitative. De plus l'entretien permet au chercheur de retirer des informations et des éléments de réflexion très riches et nuancés. Plus précisément nous avons utilisés une des variantes de l'entretien qui est l'entretien semi directif.

Au niveau de la méthode d'analyse des données, il a s'agit de convoquer l'analyse de contenu, car elle permet de traiter de manière méthodique des informations et des témoignages qui présentent un degré de profondeur et de complexité.

Ces différents éléments méthodologiques annoncés nous ont permis d'aborder et d'expliquer les différents thèmes structurant notre guide d'entretien. A savoir :


·la description des représentations liées aux mariages interethniques selon les catégories ethniques.

La description des différentes institutions du village.

La question du genre dans la société Abouré de Yaou.

Les manifestations de l'ethnicité.

L'exposition et l'analyse des résultats structurant les différents thèmes énumérés, conduisent à retenir, que les descendants des mariages interethniques méritent une attention particulière en terme de production d'une littérature scientifique sur la dite question. Car la double appartenance à différents groupes ethniques constitue soit un avantage, soit un inconvénient au niveau de l'intégration des descendants des mariages interethniques dans les villages d'origines de leurs ascendants.

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Claudio Bobzman L'intégration des minorités, mémoire de matrise Université de Génève

TABLE DES MATIERES

AVANT-PROPOS ET REMERCIEMENT 1

TABLEAU DES SIGLES ET ABREVIATIONS 4

INTRODUCTION 5

CONTEXTE DE L'ETUDE 5

PREMIERE PARTIE CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE 7

I- CADRE THEORIQUE 8

I-1- PROBLEMATIQUE 8

I-2- REVUE DE LA LITTERATURE 12

-La question de l'ethnie 12

-La question de l'ethnicité 14

-La question des frontières ethniques 20

-La question du mariage interethnique 21

I-3- OBJECTIF DE L'ETUDE 26

I-3-1- Objectif général 26 I-3-2- Objectifs spécifiques 26

I-4- MODELE D'ANALYSE 26

I-4-1- Hypothèse de recherche 26

I-4-2 Plan de vérification de l'hypothèse 27

I-4-3 Représentation sociale 27

I-4-4 Autochtonie 33

I45 Représentation sociale de l'autochtonie 37

II-CADRE METHODOLOGIQUE 39

II-1- DELIMITATION DU CHAMP DE L'ETUDE 39

II-1-1- Champ géographique 39

II-1-2- Champ social 39

II-2- METHODE D'ANALYSE: l'analyse de contenu 40

II-3- ENQUETE EXPLORATOIRE 42

II-4- TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNEES 43

II-4-1 La construction de l'échantillon des enquêtés 43

II-4-2- Recherche documentaire 46

II-4-3- L'entretien 46

II-4-3-1 L'entretien semi directif 47

II-4-4- Dépouillement 47

II-4-5 Séminaire de restitution 48

II-5- L'ENQUETE 49

II-6 LES DIFFICULTES RENCONTREES ET LES IMPACTS SUR

LA METHODOLOGIE 50

DEUXIEME PARTIE ANALYSE ET INTERPRETATION DE DONNEES 53

I- REPRESENTATION DU MARIAGE INTERETHNIQUE

ET ETHNICITE 54

A- DEFINITION DE LA REPRESENTATION 54

B- REPRESENTATION DES ALLOCTHONES 54

C- REPRESENTATION DES AUTOCHTONES FACE 56

AU PHENOMENE DU MARIAGE INTERETHNIQUE

II- STRUCTURATION DE L'ORGANISATION SOCIALE A YAOU 58

II-1 HISTORIQUE DE L'INSTALLATION DES ABOURE DE YAOU 58

II- 2 STRUCTURATION POLITIQUE 60

-La royauté 60

-La notabilité ou « mlanté» 61

-Les chefs de quartiers ou « fakoué » 62

-Le chef de terre 62

-Les chefs de générations ou « orfouamanibé » 62

-Le porte canne ou « kpamanpouè » 63

-Les griots ou « orgbayèpouè » 63

-La place des femmes........................................................63 

-Organigramme de commandement du village 64

II-3 STRUCTURATION CULTURELLE 64

II-3-1- La génération 65

II-3-2- Les classes d'âges 66

II-3-3- La fête de génération 67

II-4- STRUCTURATION ECONOMIQUE 68

II-4-1 L'Agriculture 68

II-4-2 La pêche 69

II -4-3 La fabrication du koutoukou 69

II-4-4 Le commerce 70

II-4-5 Le transport 70

II-5 structuration du système de parenté 70

II-6 La structure familiale de Yaou 71

III- LA QUESTION GENRE DANS LA SOCIETE ABOURE DE YAOU 75

IV- LES MANIFESTATIONS DE L'ETHNICITE 76

IV-1 ETHNICITE ET INTEGRATION DES CONJOINTS

ALLOCHTONES ISSUS DE MARIAGES INTERETHNIQUE 77

IV-2 ETHNICITE ET BLANCHIMENT DE LA GENEALOGIE

DU LIGNAGE AVO EHIVET 78

IV-3 ETHNICITE ET INTEGRATION SOCIALE DES CONJOINTS

ETRANGERS ISSUS DE MARIAGE INTERETHNIQUE 79 IV-4 ETHNICITE ET APPARTENANCE ETHNIQUE

DES DESCENDANTS DE MARIAGE INTERETHNIQUE 80

IV-5 ETHNICITE DES DESCENDANTS DU MARIAGE

INTERETHNIQUE ET RAPPORT DE POUVOIR 81

IV-6 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE

INTERETHNIQUE ET ACCESSION A L'HERITAGE 82

IV-7 ETHNICITE DES DESCENDANTS DE MARIAGE ET

ACCESSION AU FONCIER 84

CONCLUSION 87

BIBLIOGRAPHIE 91

TABLE DES MATIERES..................................................................99

ANNEXES...................................................................................103

A N N E X E S

* 1 Pierre jean Simon, Pour une sociologie des relations interethniques et des minorités, Presse Universitaire de Rennes, 2006

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* 5 Augé Marc, 1992, Non lieux,. Introduction à une anthropologie de la sur modernité, Paris, ED du seuil

* 6 Discours social produit pour désigné les descendants de mariages interethniques dont le père est Abouré

* 7 Shils E ., Primordial , personal,sacred and civil ties , british journal of sociology, 1957p190_ 147

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* 25 Binet Jacques, Mariage en Afrique noire paris, les Editions du cerf 1959, coll. Foi vivante vie des missions

* 26 Norbert Robitaille et Erick Guimond, La reproduction des populations autochtones du Canada : exogamique, fécondité et mobilité ethnique, Cahiers Quebecois de démographie vol. 32no automne 2003

* 27L'ethnicisation : c'est l'ensemble des processus par lesquels les acteurs produisent leur différence

* 28 Rouquette (M.L). 1996 « Représentation et idéologie » in Deschamps J.C, 

* 29 Omar Aktouf, méthodologie des sciences sociales et approches qualitative des organisations : une introduction à la démarche classique et une critique Montréal : les presses de l'université du Québec, 1987,213, URL : http bibliothèque. Uquac .Uquebec.Ca index . htm

* 30 N'da P. , Méthodologie de la recherche : de la problématique à la discussion des résultats, Abidjan , EDUCI, Université de Cocody, 2003.

* 31 Jodelet (D) 1984 Représentations sociales : phénomènes concepts et théorie in : Moscovici (S) ; psychologie sociale. Paris, puf pp 357-378.

* 32 Dedy Sery et Tapé Gozé, famille et éducation (1994)

* 33 Propos du président des sages

* 34 Notable en Abouré de Yaou

* 35 Chef quartier en abouré de Yaou

* 36 Chef de génération en langue abouré de Yaou

* 37 Porte canne en langue de Yaou

* 38 Griot en langue Abouré Yaou

* 39 Ahoré Aka François, Le coutumier, Abidjan, 2000, p16.

* 40 Boisson alcoolisée obtenue à partir du vin de palme

* 41 Boisson forte produite artisanalement avec le vin de palme cuit associé à des tiges de plante thérapeutique

* 42 Ce mot signifie famille en abouré

* 43 Selon la legende de peuplement du groupe ethnique Akan, elle était la reine mère

* 44 Discours social désignant les descendants de mariage interethnique dont la mère est abouré

* 45 Mets culinaire abouré fait de poudre de manioc

* 46 Discous social designant un descendant de mariage interethnique dont le père est abouré






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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus