WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Entre convention alpine, directive territoriale d'aménagement des Alpes du nord et initiatives locales, quelles perspectives pour les politiques foncières volontaristes dans les Alpes ?

( Télécharger le fichier original )
par Nathalie MOYON
Université Joseph Fourier (Grenoble1), Institut de Géographie Alpine - Master 2 Recherche Villes, Territoires et Durabilité 2009
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

    Master Sciences du Territoire

    Master 2 Recherche « Villes, Territoires et Durabilité »

    Dirigé par Olivier SOUBEYRAN

    Mémoire soutenu par

    Nathalie MOYON

    Le 16 septembre 2010

    Sous la direction de Sylvie DUVILLARD

    Entre Convention Alpine, Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord et initiatives locales,

    quelles perspectives pour les politiques foncières volontaristes dans les Alpes ?

    Membre du jury :

    Sylvie DUVILLARD,

    Maître de Conférence à l'Université Joseph Fourier, Grenoble 1

    et à l'Université Pierre Mendes France, Grenoble 2

    Paulette DUARTE,

    Maître de Conférence à l'Université Pierre Mendes France, Grenoble 2

    Alexandre MIGNOTTE,

    Directeur de CIPRA France, tuteur de stage

    MOYON Nathalie

    Master 2 recherche Sciences du territoire « Villes, territoires et durabilité »

    Novembre 2010

    INSTITUT DE GEOGRAPHIE ALPINE

    Contrat de diffusion des mémoires

    Entre

    L'auteur du mémoire, Melle MOYON Nathalie

    Adresse : Grenoble

    Intitulé du mémoire : Entre Convention Alpine, Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord et initiatives locales, quelles perspectives pour les politiques foncières volontaristes dans les Alpes ?

    Et

    L'université Joseph Fourier pour le compte de l'Institut de Géographie Alpine ; ci-après « l'Université ».

    Article 1

    Dans le respect des droits de propriété intellectuelle, relativement à la protection des données à caractère personnel, et soucieuse de donner davantage de reconnaissance aux mémoires réalisés par les étudiants de l'IGA, l'Université entend favoriser leur diffusion sur support papier et support électronique.

    Article 2

    Le présent contrat n'a pas de caractère exclusif. L'auteur se réserve le droit d'une diffusion concomitante de son mémoire aux conditions de son choix.

    Article 3

    L'auteur autorise l'Université à diffuser ses travaux dans les conditions suivantes :

     

    OUI

    NON

    - CONSULTATION CONTROLEE SUR INTERNET

     
     
     
     

    - DIFFUSION INTERNET

    SANS RESTRICTION D'ACCES

    Article 4

    La signature du présent contrat n'oblige en aucun cas l'Université à diffuser le mémoire en ligne. Sa diffusion reste soumise à l'accord du jury.

    Article 5

    L'auteur certifie que l'exemplaire du mémoire remis à l'Université est conforme à la version officielle de son travail remise à ses enseignants.

    Article 6

    L'auteur est responsable du contenu de son oeuvre. Il certifie avoir obtenu toutes les autorisations écrites nécessaires à la constitution de son mémoire. L'Université ne peut être tenue responsable de toute représentation illégale de documents et de tout délit de contrefaçon (plagiat). L'Université se réserve le droit de suspendre la consultation d'une oeuvre après avoir pris connaissance du caractère illicite de son contenu.

    ATTENTION: En cas de non dépôt du mémoire en bibliothèque, le diplôme ne pourra pas être délivré.

    Fait à GRENOBLE, le 1ier novembre 2010

    La direction L'auteur

    NOTICE ANALYTIQUE

    Observations du jury

    A : Très bon mémoire

    B : Bon mémoire mais avec des faiblesses sur quelques aspects

    C : Mémoire acceptable présentant un intérêt particulier sur certains aspects

    Précisions éventuelles sur les faiblesses et les forces du mémoire :

    Signature

    FILIERE Master 2 Sciences du territoire ANNEE UNIVERSITAIRE : 2009-2010

    ? IUP ? MASTER

    AUTEUR

    NOM

    PRENOM

    MOYON

    NATHALIE

    TITRE

    Entre Convention Alpine, Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord et initiatives locales, quelles perspectives pour les politiques foncières volontaristes dans les Alpes ?

    UNIVERSITE JOSEPH FOURIER

    Institut de géographie

    alpine

    Nom et prénom du directeur de mémoire

    Stage sous convention :

    organisme et lieu

    Nom et prénom du

    maître de stage

    DUVILLARD Sylvie

    CIPRA France

    Grenoble

    MIGNOTTE Alexandre

    MOTS CLES

    Foncier, Convention Alpine, DTA des Alpes du Nord, politique foncière

    TERRAIN D'ETUDE OU D'APPLICATION

    Alpes du Nord

    PERIODE DE

    L' ETUDE

    Mars 2010-Août 2010

    EMPRISE GEOGRAPHIQUE DE L' ETUDE

    latitude/longitude

    ex. N.S.E.O.

     

    RESUME

    Puisque de nombreux outils existent pour mettre en oeuvre une politique foncière, pourquoi celle-ci semble-t-elle être une action si difficile à mener pour les acteurs locaux ? Dans le contexte alpin, les caractéristiques spécifiques des territoires jouent peut-être un rôle particulier dans cette difficulté du passage à l'action foncière, autrement dit, existe-t-il une spécificité alpine en matière de gestion foncière?

    L'hypothèse développée ici est la suivante : l'outil de l'action publique ne conditionne pas nécessairement l'efficacité de la politique foncière, mais il révèle des discours produits par des cadres normatifs. C'est donc la démarche mise en oeuvre localement, adaptée aux objectifs de chaque territoire, qui détermine l'efficacité, voire l'efficience, d'une politique foncière volontariste.

    L'objectif de ce travail de recherche est de montrer de quelles manières des outils existants (de planification, réglementaires, fiscaux...) mettent en oeuvre des démarches jugées efficaces, voire innovantes. In fine, nous envisagerons la transposabilité de ces démarches, autrement dit, de mettre en exergue les conditions de réussite d'une politique foncière volontariste. Ce travail a ainsi identifié trois pistes de recherche : la spécificité alpine, le rapport au droit et à la norme, le hiatus entre procédures et bricolage foncier. Enfin, trois axes de travail ont été poursuivis : l'analyse de deux cadres normatifs de l'aménagement alpin -la Convention alpine et la Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord-, l'analyse et la diffusion de bonnes pratiques en matière de gestion foncière, et enfin, la recherche de définitions, de dispositifs et d'outils pour une gestion foncière durable des territoires alpins.

    RESUME Anglais

    Although many tools exist to implement a land policy, it still seems difficult for local actors to conduct it. In the alpine context, the specific characteristics of areas may complicate the transition to a proactive land policy : does there exist an alpine-type land management?

    The hypothesis developed here assumes that the measures chosen for a policy do not determine the effectiveness of land policy, but it reflects state-of-minds from normative frameworks. A key to understand to which extent a policy could be efficient has to be found in local configurations, unique for each territory. Which tools (planning, regulatory, tax ...) are used to implement policies considered as effective or innovative?

    Finally, we will consider the transferability of these policies, to highlight the conditions of success for a proactive land policy. This report identifies three research hypothesizes : the specificity of alpine territories, the relation to law and standards and the gap between property procedures and the actor-tinkerer (practices).

    Three working fields have been investigated: the analysis of two regulatory frameworks of the Alpine planning - the Alpine Convention and the Directive Territoriale d'Aménagement in the Northern Alps - , the analyze and the dissemination of good practices of land management, and the recension of definitions and tools for a sustainable land management of the alpine area.

    RESUME Allemand

    Da viele Werkzeuge gibt, um ein Land Policy um zu implementieren, warum scheint es zu einer schweren Aktion für die lokalen Akteure zu erreichen? In der alpinen Kontext, die besondere Merkmalen der Gebiete können eine besondere Rolle spielen : gibt es eine einzigartige alpine Raumordnung?

    Die Hypothese ist dass, das Werkzeug des staatlichen Handelns kein automatische Einfluss auf die Effizienz der Bodennutzung Politik hat. Es erklärt auch die Auslegung den normativen Rahmenbedingungen. Die Berücksichtigung der lokalen Kontext mit seine eigenen Zielen , bestimmt auch die Wirksamkeit und die Effizienz einer Land Policy .

    Welche Werkzeuge (Planung, regulatorische, steuerliche ...) verwendet werden, um Politik als wirksam oder als innovative umzusetzen? In wie fern sind die analysierte Land Policy übertragbar?

    Diese Arbeit besteht aus drei Bereichen der Forschung: die Spezifität den Alpen, die besondere alpine Beziehung zum Gesetz und Normen, die Kluft zwischen Theorie und Praxis in Property-Prozeduren.

    Drei Linien werden verfolgt: die Analyse von zwei rechtliche Rahmenbedingungen der Organisation Alpine - der Alpenkonvention und die Richtlinie der Raumplanung in den Nordalpen - , die Analyse und Verbreitung bewährter Praktiken Landmanagement, und schließlich die Rezension den Definitionen und Werkzeugen, um eine nachhaltige Landnutzung des Alpenraums implementieren.

    Remerciements

    Tout d'abord, je tiens à remercier Alexandre Mignotte, directeur de la CIPRA France, qui m'a fait confiance et m'a permis de travailler en parfaite autonomie durant ces six mois de stage. Je remercie aussi la petite équipe de la CIPRA qui m'a accueilli chaleureusement parmi eux.

    Je remercie bien évidemment ma tutrice de mémoire, Sylvie Duvillard, qui a su se montrer présente pour me faire avancer dans cette démarche de recherche appliquée. Ses conseils avisés et sincères ont permis d'aller jusqu'au bout de ce mémoire.

    Je tiens également à remercier l'ensemble des acteurs rencontrés ou sollicités pour la réalisation de ce travail. Merci pour le temps qu'ils m'ont accordé.

    Enfin, je remercie tout particulièrement mes proches, surtout celui qui partage mon quotidien, qui m'ont soutenu y compris durant l'été où il était difficile de se mettre au travail.

    Sommaire

    Introduction générale 3

    Partie I. Appréhender la question foncière 9

    Chapitre 1. Démarche générale du mémoire ou comment construire les bases d'une énième étude sur le foncier 11

    1. Une recherche appliquée aux questions foncières dans les Alpes du Nord 12

    2. « L'effort méthodologique » 14

    3. Production et construction des données 19

    4. Les entretiens 21

    5. Liens avec d'autres travaux de recherche 22

    Chapitre 2. Les miscellanées du foncier 27

    1. Le foncier, de quoi s'agit-il ? 28

    2. Qui se préoccupe du foncier ? 36

    3. Comment agir sur le foncier ? 40

    Partie II. A la conquête du foncier alpin 53

    Chapitre 1 La Convention Alpine et la DTA des Alpes du Nord, deux cadres normatifs face au foncier alpin 55

    1. Quels discours sur le foncier alpin ? 56

    2. La DTA des Alpes du Nord ou le parcours du combattant 67

    3. L'acceptabilité de ces cadres normatifs alpins 72

    Chapitre 2. Trois territoires alpins en quête de maîtrise foncière 79

    1. Une ingénierie au service d'une politique foncière à Chamonix 80

    2. La « participation-formation » dans le massif du Vercors 87

    3. L'ambition d'agir sur la gestion de l'espace dans Belledonne 95

    4. Vers la maîtrise foncière 107

    Partie III. De la théorie à la pratique 115

    Chapitre 1. Articuler la théorie des cadres normatifs à la pratique des initiatives locales alpines 117

    1. Grille d'analyse (C) « Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin » : concordance ou décalage ? 118

    2. Quel(s) rapport(s) à la norme et au droit en aménagement ? 121

    3. La figure de l'acteur-bricoleur 126

    Chapitre 2. De la spécificité alpine en matière de politique foncière 129

    1. Des particularismes reconnus aux spécificités proclamées 130

    2. A qui la terre ? 135

    3. Montagne et littoral même combat foncier ? 139

    Chapitre 3. Vers une gestion foncière durable des territoires alpins 143

    1. Foncier et durabilité 144

    2. Pour des politiques foncières... 147

    3. Elargir le champ de la réflexion 151

    Conclusion générale 157

    BIBLIOGRAPHIE 165

    ANNEXES 171

    J'ai longtemps cru que le problème foncier était de nature juridique, technique, économique et qu'une bonne dose d'ingéniosité suffirait à le résoudre. J'ai lentement découvert qu'il était le problème politique le plus significatif qui soit, parce que nos définitions et nos pratiques foncières fondent tout à la fois notre civilisation et notre système de pouvoir, façonnent nos comportements ».

    Edgard Pisani, Utopie foncière, 1977

    Introduction générale

    Déjà en 1977, Edgard Pisani, homme politique français mettait le doigt sur toute la complexité du problème foncier, un problème politique incontournable. D'ailleurs, son ouvrage Utopie foncière1(*) est une lecture étonnamment pertinente plus de trente ans après son écriture2(*).

    Aujourd'hui, l'espace -le manque et le besoin- est devenu un enjeu majeur dans les territoires urbains, périurbains et ruraux. Comme en témoigne la forte hausse des prix du foncier et de l'immobilier, la question de la pression foncière revêt « depuis le début des années 2000, une acuité grandissante, une préoccupation qui frappe l'ensemble des régions françaises et particulièrement la région Rhône-Alpes »3(*). Le foncier n'est donc plus un simple zonage à l'intérêt géographique limité tel qu'il était abordé par le Plan d'occupation des sols, car l'espace se trouve au coeur d'un système de production de richesses et de contrôle de rentes et plus-values. Ainsi, si la question foncière est intéressante pour le géographe, c'est parce qu'elle traduit publiquement et concrètement -par la matérialité du sol- une mise en débat du territoire. Le territoire est défini ici comme l'articulation entre identité, appartenance et appropriation, c'est en cela un objet géographique à part entière. Par ailleurs, le champ du foncier est vaste puisque la terre est le seul élément matériel dont aucun homme ne peut s'affranchir à moins de vivre en apesanteur, et lorsque l'on redescend sur terre, gare à l'endroit où l'on pose le pied ! Toute partie à un propriétaire ou des règles d'usage à ne pas méconnaître (S. Duvillard).

    Désormais, le « foncier » est devenu un mot presque « tendance ». La remobilisation publique et politique autour du foncier vient bousculer une de ses caractéristiques : autrefois réservée aux initiés et à l'intimité, abordée intégralement que dans les cabinets des notaires, la question foncière s'est véritablement transformée en « problème foncier » discuté sur la place publique4(*). La formulation du problème foncier n'est donc pas nouvelle comme le montre E. Pisani, mais elle est restée d'actualité. Le glissement sémantique de la « question » au « problème » s'est accompagné d'une croissance des injonctions de « maîtrise foncière », de « politique foncière » ou encore de « stratégie de régulation foncière »5(*) qui traduisent des attentes fortes envers les pouvoirs publics en matière de foncier. La maîtrise foncière positionne donc les décideurs politiques locaux, avec les maires en première ligne, comme les acteurs incontournables du foncier, aussi important sinon plus que les propriétaires fonciers eux-mêmes (d'autant plus que les maires ou la collectivité sont potentiellement des propriétaires fonciers). De leur point de vue, le foncier relève du domaine de politiques publiques mais aussi, sinon plus, du domaine des stratégies locales. La connaissance particulière du maire concernant son territoire et ses administrés (dont les propriétaires) lui permet d'apprécier les marges de manoeuvre d'une négociation foncière. Bien souvent, la négociation est une stratégie foncière préférée par les maires au service de politiques d'aménagement individualistes (E. Pisani 1977, S. Duvillard 2001).

    Des acteurs émergeants se positionnent également sur cette thématique du foncier: la société civile et les associations, par exemple Terre de Liens, ou des ONG telles que CIPRA France développent une réflexion ou des actions concrètes. Ces démarches qui restent encore assez marginales souhaitent faire valoir l'intérêt général d'un bien commun, le foncier en tant que ressource rare, indispensable et non renouvelable. Le système d'acteurs mobilisés autour du foncier est d'autant plus complexe qu'il concerne des acteurs variés : élus, techniciens, organismes parapublics, habitants, propriétaires, agriculteurs, notaires, géomètres, agents immobiliers, services fiscaux, promoteurs...

    De plus, la succession des textes relatifs aux politiques foncières semble montrer que la question foncière marque aussi son retour au sein des politiques publiques de l'Etat. De la LOADDT de 1999 (Loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire) qui comprend un volet foncier pour les contrats d'agglomération, aux lois Grenelle I et II, en passant par la Loi SRU de 2000 (Loi solidarité et renouvellement urbains) qui a modifié la mise en oeuvre des programme locaux de l'habitat (PLH) avec entre autre une exigence de solidarité financière pour le logement social, toutes les dernières « grandes lois d'aménagement » ont participé à construire un discours sur le foncier6(*). Par exemple avec la Loi SRU, le mécanisme mis en place consiste dans le prélèvement sur ressource de la commune « déficitaire » en logements sociaux (les 20% de logements sociaux). On peut d'ailleurs remarquer que la Loi SRU répond à une demande de la société civile en faveur de l'affichage d'une règle stable et égale pour tous. En ce sens, elle s'oppose aux pratiques de négociations informelles des collectivités et plaide dès 2000 pour un retour de la maîtrise foncière par acquisitions publiques. Si le foncier occupe une place de choix dans l'actualité territoriale, dans les discours et finalement peu dans les pratiques, le développement durable n'a rien à lui envier, bien au contraire.

    En effet, l'importance croissante prise par les questions environnementales et le développement durable au sein des sciences humaines et sociales traduisent les évolutions sociales et sociétales, sans épargner le champ du foncier. La prise en compte de ces questionnements se traduit d'ailleurs par de nouveaux référentiels pour appréhender le foncier : ceux-ci tentent d'y intégrer une plus grande « durabilité du territoire ». On observe ainsi la consommation de terres naturelles ou agricoles qui « partent » à l'urbanisation chaque année : en moyenne, un département français tous les 10 ans7(*). Des chiffres démonstratifs qui appuient un maitre mot unanime : « économisons le foncier ! ». Rationnaliser la consommation de foncier met en exergue la pression exercée sur les terres agricoles qui s'avèrent être finalement plus « sensibles » car moins protégées en tant que tel, et donc plus volatiles que le foncier naturel. Ce qui s'expliquerait peut-être par une « protection » des espaces agricoles plus récente que celle des espaces naturels qui disposent quant à eux d'un grand nombre d'outils et de moyens financiers : par exemple, la labellisation « réserve naturelle » bénéficie d'aides financières alors que le dispositif « PAEN »8(*) n'est dispose pas.

    Selon ces deux perspectives distinctes, de pression foncière accrue et de développement durable, l'espace alpin fait l'objet de nombreuses attentions. La réalisation d'un stage au sein de CIPRA France9(*) s'ancre dans cette réalité puisque l'ONG s'engage à construire, à l'échelle de l'arc alpin, une connaissance territoriale alpine spécifique, et à promouvoir les bonnes pratiques en matière de développement territorial alpin. CIPRA France identifie ainsi une pression foncière dans les territoires alpins français selon trois modalités que le travail de recherche a permis d'affiner :

    ü la surface disponible en vallée est plus limitée qu'ailleurs,

    ü la périurbanisation autour des pôles urbains alpins s'étale désormais dans les vallées avoisinantes et les piémonts (par exemple dans le Sillon alpin et les massifs préalpins),

    ü l'accès au foncier des populations (surtout locales) au sein des stations et bassins touristiques alpins caractérise une situation très critique.

    Dans ce contexte délicat, l'espace est un bien de plus en plus convoité et les paysages, qui sont une richesse de l'espace alpin, sont menacés. A terme, la pression foncière met en danger la dynamique des activités économiques majeures que sont l'agriculture et le tourisme. La pression foncière alpine menace aussi l'habitat permanent des populations locales et les activités industrielles par l'effet dissuasif que représente une hausse des coûts d'accès au foncier. Il semble qu'une demande sociale croissante, notamment de la part des collectivités alpines, pousse à traiter cet enjeu territorial majeur sans plus attendre. Pour Sylvie Duvillard, « tout se passe comme si les problèmes d'aujourd'hui et les incertitudes de demain se dissolvent dans la question foncière. Celle-ci est liée à la prise de conscience qu'un certain nombre de problèmes en montagne revêtent une dimension foncière incontournable, à l'instar de ceux rencontrés dans les villes »10(*). L'une des dimensions de la question foncière abordée par ce travail s'interroge donc sur l'existence d'une spécificité alpine en matière foncière. En d'autres termes, les caractéristiques spécifiques des territoires alpins influencent-elles la mise en oeuvre de politiques de maîtrise foncière ? Certes, l'approche est assez triviale en géographie mais elle semble ici nécessaire puisque, s'il y a spécificité alpine en matière de politique foncière, les procédures et les outils règlementaires sont peut-être à repenser ou leur utilisation à adapter.

    Au moment même de la réalisation de ce travail, le dernier numéro de la Revue de Géographie Alpine intitulé La gestion foncière au coeur du devenir des territoires alpins, amorce une réflexion de plusieurs chercheurs-géographes autour de la problématique foncière alpine. Sous la houlette de S. Duvillard, la question suivante interpelle les chercheurs : entre arbitrages politiques et marchés, est-il possible d'identifier des modes de gestion foncière spécifiques dans les territoires de montagne ? L'objectif ici est « de mettre en lumière les expériences engagées par les collectivités alpines pour agir à différentes échelles sur les enjeux de développement saisis à travers la problématique foncière »11(*). A l'instar de cette réflexion coordonnée par la tutrice de ce mémoire, mais également en lien avec les autres initiatives qui se constituent aujourd'hui (au Suaci, au Cemagref de Grenoble), cette recherche initie un projet sur le foncier porté par CIPRA France. Souhaitant pleinement s'inscrire dans une dynamique émergente, l'un de ses objectifs est de travailler à la définition -par l'illustration- de ce que peuvent être les perspectives de politiques foncières volontaristes dans les Alpes.

    Ce mémoire s'intéresse à la capacité d'une collectivité à décider des formes d'occupation de son territoire suivant son projet et les objectifs qu'elle s'est fixée. Pour autant, les perspectives de politiques foncières volontaristes qui peuvent en découler tâcheront d'éviter l'écueil de la « mode du durable »12(*) : lorsqu'en amont, une politique volontariste s'oriente en faveur d'un développement durable de son territoire, alors seulement le rapprochement entre des actions concrètes et un discours peut être effectif. De plus, l'élaboration de la notion de développement durable a permis d'inverser le cheminement classique de construction d'une utopie, initialement « de l'audible au faisable » : le développement durable démontre une démarche d'utopie « du faisable à l'audible », il

    devient ainsi une trajectoire vers laquelle il faut tendre (O. Soubeyran 2010). En d'autres termes, si une collectivité assure par exemple la pérennité d'une exploitation agricole en fond de vallée qui subissait jusqu'alors une très forte pression foncière (par le rachat des terres par la commune par exemple), c'est par cette action concrète (le « faisable ») que la commune s'inscrit dans une politique de développement durable et qu'elle peut produire un discours sur sa démarche de gestion raisonnée du foncier (« l'audible »). La primauté de l'action concrète est la condition sine qua non à la production d'un discours de développement durable, y compris dans le champ du foncier.

    Ainsi, les premiers questionnements qui se posent à cette recherche sont de deux ordres :

    ü Comment mesurer cette pression foncière dont tout le monde parle, évaluer son ampleur exacte et sa nature ?

    ü Quels sont les outils de maîtrise foncière mobilisables par les collectivités ? Sont-ils utilisés et suffisent-ils face à l'ampleur du phénomène actuel?

    En effet, malgré les outils au service d'une politique foncière (outils de planification, d'acquisition foncière, d'aménagement opérationnel ou encore les outils fiscaux et financiers), la maîtrise foncière -que tout le monde appelle pourtant de ses voeux- demeure une action difficile à mener pour les acteurs locaux. On peut donc se demander à juste titre si le législateur et l'aménageur ont réellement inventé les outils d'une maîtrise matérielle et symbolique du territoire (symbolique afin d'embrasser également les changements de mode d'appropriation). Pour S. Duvillard, cette « illusion de la maîtrise » est bien visible dans les territoires ruraux. L'ensemble de ces cadres règlementaires et législatifs, et des procédures et outils qui les accompagnent, constitue le contexte normatif de l'aménagement dans lequel se déroule l'action foncière : il parait donc intéressant de regarder ces cadres normatifs comme un moyen de saisir les discours produits, notamment sur l'objet foncier.

    Deux cadres normatifs ont alors été retenu afin de saisir leur discours en matière de foncier : la Convention alpine et la Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord. Leurs territoires d'application se recoupant, ils ont permis de dessiner les limites du territoire d'étude qui se confondent donc à celle du projet de DTA. Tout d'abord la Convention alpine est un traité de droit international, visant à assurer la protection et le développement durable de la chaîne alpine. Entré en vigueur en 1995 mais signée en 1991 par les ministres en charge de l'environnement dans les pays alpins13(*), ce traité a pour objectif la protection étendue et le développement durable des Alpes. La Convention alpine est concrétisée par des protocoles dits d'application, prévus pour douze domaines. Huit d'entre eux ont déjà été élaborés sur les thématiques telles que l'aménagement du territoire et le développement durable: ce cadre normatif peut-il être un recours supplémentaire pour répondre aux questions de gestion foncière dans l'espace alpin français?

    De façon similaire, le projet de DTA des Alpes du Nord manifeste une volonté étatique de « préserver le milieu naturel comme une condition indispensable à toutes perspectives de développement à long terme »14(*). Cet instrument de planification territoriale ouvre-t-il de nouvelles perspectives pour les collectivités alpines françaises ? Ce projet de DTA, qui se réfère d'ailleurs à plusieurs reprises à la Convention alpine, pourrait ainsi servir de base à un référentiel permettant d'appréhender les bonnes pratiques en matière foncière sur le territoire des Alpes du Nord. De plus, l'analyse du jeu d'acteurs s'avère nécessaire pour appréhender les dimensions symboliques mobilisées autour du projet de DTA : qui l'a fait et contre qui ?

    Plus précisément, la question spécifique soulevée à travers cette recherche s'attache à voir comment les acteurs se saisissent des outils pour les adapter à leurs problématiques foncières locales. En somme, il serait inexact de qualifier une politique foncière de « bonne » ou « mauvaise » (J. Comby, 2008). La maîtrise foncière fait plutôt référence à des décisions concernant l'occupation d'un territoire suivant le projet d'une équipe municipale, ses ambitions et les objectifs qu'elle s'est fixée : il y a donc des politiques plus ou moins adaptées aux objectifs. Toutefois, les effets pervers de l'action publique ou de l'action aménagiste sont nombreux. Une mesure adoptée peut produire un effet inverse de l'objectif poursuivi et même d'autres effets imprévus, des « conséquences non intentionnelles de l'action aménagiste »15(*). Alors, sont-ce les outils qui sont inadaptés, insuffisants, difficiles à combiner ou à appliquer, ou la volonté politique de les mettre en oeuvre qui fait défaut ? Selon S. Duvillard, les outils au service des politiques ne manquent pas, les auteurs le soulignent (Clivaz, Herrera, Tranda-Pittion) et surtout les acteurs des espaces alpins, dès lors qu'ils objectivent l'importance de la dimension foncière dans la gestion de leur territoire, cherchent des solutions adaptées à un espace spécifique, celui des Alpes16(*).

    L'hypothèse privilégiée considère que l'outil n'est pas vraiment intéressant en soi, au profit d'une démarche mise en oeuvre, adaptée aux objectifs définis par chaque territoire. Cette hypothèse propose deux modalités de réponse : soit l'on s'intéresse à une meilleure utilisation des outils existants (les politiques foncières locales), soit l'on débat sur la modification de ces outils pour définir de nouvelles politiques foncières nationales. En matière de foncier, la force de l'outil est possible grâce à la loi : pour le projet de DTA, son opposabilité doit être assurée dans cette perspective. Afin de tester cette hypothèse, le stage à CIPRA France permet une mise en regard du cadre législatif et des acteurs de terrain et leurs pratiques. L'objectif du travail de recherche est donc bien de montrer comment l'on peut utiliser des outils de maîtrise foncière existants pour mettre en oeuvre des démarches innovantes. In fine, il s'agit de voir si ces démarches sont transposables ailleurs. Dès à présent, des premiers éléments de réponse apparaissent. Tout d'abord concernant la démarche générale : celle-ci semble être guidée par l'objectif politique de maîtrise foncière qui devient alors moteur de l'action. Dans ce cas, les outils utilisés s'appuient sur le cadre existant et vont au-delà : c'est sur ce point que l'on peut considérer qu'il y a innovation territoriale en matière de foncier. D'autre part, une autre posture semble placer la démarche innovante au centre de l'action foncière : celle-ci va jusqu'à distordre les outils classiques de gestion foncière. Toutefois, là encore la démarche établie en amont a guidé l'action. L'innovation réside dans l'utilisation même des outils existants.

    En outre, si l'analyse de cas concrets doit être réalisée, il semble opportun de rentrer dans une démarche de généralisation des réflexions et des outils et la réflexion engagée par les cadres normatifs de l'aménagement que sont la Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord va dans ce sens. La méthodologie de recherche s'appuie donc notamment sur la réalisation d'entretiens auprès d'acteurs locaux. Les personnes ressources sont identifiées en fonction des trois terrains d'études retenus dans le cadre du stage. Chamonix constitue le premier terrain d'études : il s'agit d'étudier les pratiques de maîtrise foncière à l'oeuvre avec, a priori, une utilisation novatrice des outils existants qui traduirait peut-être une volonté de gestion foncière plus techniciste. Le second terrain est celui du plateau du Vercors, en particulier du territoire « Quatre Montagnes » : sur cet espace, la prise en compte de la question foncière s'est d'abord accompagnée de la réalisation d'une Charte paysagère. Aujourd'hui, la volonté de mettre en oeuvre une véritable politique foncière encourage à aller au-delà, c'est ce qu'ambitionne la Charte de Développement. Dans le cadre de la Charte du Parc naturel régional du Vercors, des ateliers sur la mise en oeuvre d'une politique foncière ont été mis en place en direction des élus. Cette stratégie de formation des politiques locaux vise à montrer comment il est possible d'utiliser les outils existants pour les mettre au service d'une politique visée. Enfin, le massif de Belledonne est le troisième terrain retenu. Ses balcons qui surplombent la vallée du Grésivaudan subissent les conséquences d'une périurbanisation croissante non maîtrisée, sous la puissante influence du bassin grenoblois. Pourtant, des pratiques foncières volontaristes semblent aussi se structurer dans le massif, et la perspective de la révision du SCOT de la région urbaine grenobloise (dont Belledonne est un secteur) pose clairement la question des limites intangibles à l'urbanisation.

    Ainsi, la réalisation du stage au sein de CIPRA France offre un contexte qui permet de croiser et d'enrichir mutuellement les deux approches de ce travail de recherche appliquée : d'une part, le recul théorique et critique de la posture de recherche, et d'autre part, l'expérience pratique du terrain par le stage. Ainsi, le présent mémoire met en regard la demande du stage et la posture de recherche et son ambition est explicitée dans le titre choisit : Entre projet de DTA Alpes du Nord, Convention alpine et initiatives locales : quelles pratiques et perspectives de gestion foncière dans les vallées alpines françaises ? L'organisation générale du mémoire s'articule selon trois axes. La première partie s'attachera à poser les bases de l'objet foncier, permettant ainsi d'appréhender avec une plus grande justesse le foncier comme objet d'étude. La seconde partie du mémoire entrera au coeur des investigations menées durant ces six mois : entre analyse du discours foncier produit par les deux cadres normatifs, et pratiques foncières volontaristes dans les Alpes du Nord, il s'agira d'aller à la conquête de l'objet foncier alpin. Enfin, la dernière partie permettra de répondre plus précisément à l'enjeu d'articuler la théorie à la pratique en matière de foncier, sur le territoire des Alpes du Nord.

    Partie I.

    Appréhender la question foncière

    Le foncier est un thème étudié depuis longtemps et assez légitimement par les juristes s'attachant au droit, les économistes modélisant les prix et les urbanistes se référant au plan. Comme le remarque Aurélien Esposito-Fava « la géographie s'est rarement préoccupée du foncier [...] ce qui apparaît d'autant plus étonnant au regard du paradigme qui la fonde : comprendre les interactions entre l'homme et la terre, les sociétés et leur environnement »17(*). En fait, le foncier devient un objet qui suscite l'intérêt du géographe grâce à la montée en puissance du concept de « territoire »18(*): c'est en quelque sorte par le territoire que la géographie a trouvé sa légitimité scientifique pour aborder le thème du foncier. La propriété foncière matérialise alors une forme d'appropriation de l'espace.

    Dans cette perspective géographique, la première partie de ce mémoire s'attache à défricher la question foncière sans toutefois prétendre à l'exhaustivité. La métaphore du défrichement se comprend ici au sens propre et au sens figuré. Au sens propre, il s'agit de faire référence à un phénomène particulier à certains espaces montagnards: l'enfrichement des versants dû à la déprise agricole19(*). Cet enjeu pèse sur l'usage du foncier alpin, mais l'urbanisation croissante (des coteaux et balcons) et continue des fonds de vallée constitue une menace encore plus criante. Au sens figuré, défricher le foncier, c'est mobiliser activement cette thématique pour mieux la comprendre, dans la théorie (les chercheurs notamment) et la pratique (les élus et les techniciens).

    Deux chapitres déclinent cette démarche d'appréhension du foncier alpin. Le chapitre 1 a pour but d'expliciter la démarche générale du mémoire en s'attachant aux modalités de production des données et au cheminement de l'interprétation menée. Le second chapitre souhaite apporter un éclairage sur les « faits marquants » de la question foncière : les acteurs, les échelles, les cadres de l'action foncière et ses outils, telle est l'idée de « miscellanées » du foncier.

    Chapitre 1. Démarche générale du mémoire

    ou comment construire les bases d'une énième étude sur le foncier

    1. Une recherche appliquée aux questions foncières dans les Alpes du Nord

    1.1. La démarche de recherche

    Ce mémoire en géographie est l'aboutissement d'une année de « Master 2 recherche Villes, Territoires et Durabilité » dirigé par Olivier Soubeyran à l'Institut de Géographie Alpine de Grenoble. La démarche de recherche qui guide la réalisation de ce travail est le fruit d'une collaboration entre Sylvie Duvillard en tant que directrice de mémoire, Alexandre Mignotte, directeur de la structure d'accueil -le comité français de la Commission Internationale pour la Protection des Alpes (CIPRA France)- et moi-même.

    La vision du foncier et l'utilité même de cette approche du territoire sont dans les pas des réflexions de recherche menées par Sylvie Duvillard dès 200120(*). Certes le champ du foncier est vaste, mais on ne peut l'ignorer en tant que géographe car la terre est en quelque sorte la matérialité du territoire. Puisque la propriété foncière superpose deux couches distinctes, d'une part le droit du propriétaire foncier (l'individu, personne physique ou moral), et d'autre part le droit d'usage (le zonage public du PLU par exemple), il s'agit de mettre en évidence le pouvoir du propriétaire foncier et des représentations individuelles et de montrer de facto la limite des politiques publiques dans la gestion de l'espace. En ce sens, Sylvie Duvillard a développé une réflexion selon laquelle « le foncier est bien plus qu'un opérateur, il permet l'acte d'appropriation. Il révèle la relation à un espace et permet l'intelligence de cette relation. Cet acte d'appropriation parfois individuel ou collectif est capital dans la construction des territoires et dans la pérennisation des constructions territoriales »21(*).

    Ainsi, l'objectif de ce mémoire de recherche est de participer aux travaux sur la question foncière sous l'angle du géographe. L'exercice souhaite mettre à l'épreuve le postulat d'une spécificité alpine en la matière, une clé d'entrée emblématique de l'Institut de Géographie Alpine s'il en est. L'intérêt pour l'apprenti-chercheur est d'aborder le thème du foncier par une approche « originale » au sens premier du terme. Il s'agit ici d'une approche par les cadres de planification, des cadres normatifs de l'aménagement et du développement territorial qui ne sont pas nécessairement « opposables » au sens du droit de l'urbanisme22(*). Le périmètre retenu, les Alpes du Nord, est concerné -entre autre- par la Convention alpine et le projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord dont l'aboutissement est proche23(*).

    Cette démarche de recherche s'est appuyée sur la réalisation d'un stage de six mois à CIPRA France dont le siège est à Grenoble. Parmi les objectifs visés par CIPRA France concernant ce stage, on énoncera les deux principaux :

    ü Identifier des leviers d'action efficaces afin que la question foncière participe au développement durable des territoires de montagne.

    ü Diffuser des bonnes pratiques en matière de gestion foncière alpine raisonnée et durable pour les territoires de montagne.

    Dès 2007 une réflexion sur le thème du foncier prend forme avec le projet d'un séminaire à vocation technique et pratique (des échanges autour d'exemples concrets) sur « la pression foncière dans les vallées alpines ». Plusieurs questions alimentent la démarche de la CIPRA : la mesure du phénomène de pression foncière, les outils et leurs utilisations, le rôle potentiel de la Convention alpine sur cette question... D'une manière générale, la problématique transversale identifiée alors est la suivante : « pourquoi n'a-t-on pas de réponse politique et technique globale aux maux de la gestion foncière ? Quels sont les obstacles à la mise en oeuvre d'une telle réponse ? »24(*). Prévu pour novembre 2008, le séminaire a échoué en raison des incompatibilités d'approches entre certains partenaires. La CIPRA s'est alors réorientée vers des travaux de recherche (2010-2011) pour préfigurer un séminaire d'échanges sur cette question. Ce stage correspond à la première phase du travail et ce mémoire constitue un rendu intermédiaire.

    1.2. Le problème général de recherche25(*)

    Figure 1. Le problème général de recherche, N. Moyon 2010

    L'objectif de ce travail de recherche est bien de montrer comment l'on peut utiliser des outils (de planification, règlementaires, fiscaux...) existants pour mettre en oeuvre des démarches efficaces voire innovantes, qui servent une politique foncière. In fine, il s'agit de voir si ces démarches sont transposables ailleurs, autrement dit, de mettre en exergue les conditions de réussite d'une politique foncière volontariste dans les Alpes du Nord, tout comme les motifs de ses échecs.

    De premiers éléments hypothétiques de réponse peuvent être apportés. D'une part, la démarche générale guidée par l'objectif politique de maîtrise foncière est moteur de l'action. Les outils utilisés s'appuient sur le cadre existant et vont au-delà : là se trouve l'innovation territoriale en matière de foncier ou plutôt l'efficacité de l'action publique. D'autre part, la démarche innovante va jusqu'à distordre certains outils classiques de gestion foncière : là encore, la démarche établie en amont guide l'action publique. Si des distinctions peuvent être faites dans la pratique de ces différentes démarches, il ne s'agira pas ici d'en construire la typologie. Enfin, si le neuf n'est pas dans la nouveauté (un énième nouvel outil), il est dans la capacité de dépasser, d'adapter ou d'évoluer avec des outils « classiques ». Alors, l'innovation se trouve dans l'utilisation même des outils existants.

    Figure 2. Les trois pistes de recherche identifiées, N. Moyon 2010

    1.3. Les jalons de la recherche appliquée

    Dans sa « dimension mémoire », trois pistes de recherche sont identifiées sur le schéma ci-contre :

    Dans sa « dimension stage », trois axes de travail sont définis :

    ü L'analyse de deux cadres « normatifs » de l'aménagement en cohérence avec les principes de l'ONG : la Convention alpine (et ses protocoles d'application) et le projet de Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord.

    ü L'analyse et la diffusion de bonnes pratiques en matière de gestion foncière.

    ü La recherche de définitions, de dispositifs, d'outils pour une « gestion foncière durable pour les territoires alpins ».

    La conjonction de ses impératifs de recherche et de stage pratique, permet d'entamer une démarche de recherche appliquée qui se formalise à travers la méthodologie mise en oeuvre.

    Figure 3. Les jalons de la recherche appliquée, N. Moyon 2010

    2. « L'effort méthodologique »

    2.1. Quelques principes méthodologiques

    La méthodologie mise en oeuvre pour la réalisation de ce travail s'appuie sur une approche qualitative de la question foncière. Comme le développe Pierre-Yves LE MEUR, « Il s'agit ici de montrer que des approches de type qualitatif obéissent à des procédures qui doivent leur donner toute leur rigueur, sans pour autant tomber dans la recette - illusoire de toute manière - [...]»26(*). La méthodologie adoptée durant ces six mois constitue un processus évolutif et ouvert, s'affinant au fur et à mesure des travaux et des entretiens effectués. « Il s'agit en même temps d'éviter deux écueils : celui du positivisme qui suppose que la réalité se donnerait directement à voir et à saisir (à cet égard, l'expression usuelle de "collecte des données" apparaît extrêmement trompeuse : les données ne sont pas collectées, elles ne sont justement pas "données", mais produites, construites selon des procédures d'investigation à expliciter). L'autre écueil est celui du postmodernisme dans ses variantes radicales, qui réduit le résultat de l'enquête à une production littéraire, à un récit parmi d'autres, sans référentiel empirique. Entre ces deux extrêmes, le principal souci du chercheur consistera en l'élaboration de procédures rigoureuses et explicites donnant en particulier au lecteur la possibilité de suivre autant que faire se peut les modalités de production des données et le cheminement de l'interprétation, et donc de pouvoir vérifier la plausibilité des résultats proposés. Cette exigence renvoie aux trois critères de validité, de fiabilité et de représentativité »27(*).

    En prenant en compte autant que possible les principes méthodologiques énoncés ci-dessus, la rédaction de ce mémoire espère répondre aux trois exigences d'un travail de recherche : « La validité se réfère à la qualité et à la "vérité" des données et des interprétations produites.[...] La notion de fiabilité correspond à la reproductibilité des résultats et à leur "accessibilité" à d'autres chercheurs, à leur vérifiabilité.[...] La représentativité dont il s'agit ici ne résulte pas de formes de généralisation statistique ou prédictive. Elle est qualitative et inductive, visant à expliquer et "abstraire" des mécanismes et des processus. Ici, un écueil à éviter est celui, malheureusement très fréquent, de la généralisation empirique abusive [...] »28(*).

    2.2. Les prémices du sujet de recherche

    La CIPRA France travaille sur les questions de développement territorial de l'espace alpin avec des entrées généralement thématiques (transport-mobilité, biodiversité, énergie-bâtiment, tourisme...) croisées très souvent aux enjeux du changement climatique et du développement durable. Presque « inévitablement », la gestion de l'espace, du sol et donc du foncier s'est révélée être une clé d'observation transversale assez efficace des jeux et enjeux territoriaux. De cette façon, Vincent Renard éclaire le constat selon lequel l'objet foncier est construit parmi des enjeux plus vastes qui focalisent d'abord sur eux les interrogations de la recherche : « la question foncière fait système, constitue une sorte de noeud gordien d'un ensemble de caractères d'une société : elle est à la fois la synthèse des caractères et origine des questions »29(*).

    D'une façon similaire à la CIPRA, le travail de Marielle Mouly sur les relations ville-campagne l'amène à s'intéresser à cette question du foncier : « il semblerait que les enjeux liés à "la campagne ressource", agricoles et plus généralement, économiques, soient recoupés par un enjeu transversal qui est celui du foncier. La question de l'organisation et de la répartition des usages du sol conditionne le prix des terres dans notre pays, et est à l'origine de conflits d'usage et/ou d'intérêts parfois complexes et virulents. Ces conflits peuvent également être liés à la nouvelle attractivité des espaces ruraux et à l'arrivée de nouvelles populations non issues du milieu rural ou de touristes »30(*).

    Au fil du temps, la CIPRA est d'ailleurs passée d'une approche centrée sur l'environnement stricto sensu à une vision plus systémique traduite par des projets plus transversaux (tournés vers l'aménagement et le développement territorial et plus seulement la protection du milieu) : son entrée actuelle, « Vivre dans les Alpes », comporte les trois piliers du développement durable. Au sens de la CIPRA France, faire du développement territorial durable nécessite d'actionner le levier du foncier.

    Il était alors nécessaire de définir quelle clé d'entrée choisir pour s'attaquer à la question foncière. Le contexte normatif de l'aménagement constitué des cadres règlementaires et législatifs dans lesquels se déroulent l'action foncière semble intéressant puisqu'il traduit la façon dont on pense le territoire, et détermine - au moins à première vue - la manière dont on « fait » l'action territoriale. Regarder les cadres normatifs de l'aménagement est un moyen de saisir les discours produits, notamment sur l'objet foncier. Un choix était donc nécessaire pour déterminer un ou deux « cadres normatifs » à étudier et à décortiquer pour entamer ce travail de recherche. La Convention alpine et ses protocoles d'application ainsi que le projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord ont été retenus pour les raisons suivantes.

    Comme l'a rappelé Andreas Götz, le directeur de CIPRA International, à l'occasion du colloque « La Convention alpine. Un nouveau droit pour la montagne ? » en 200831(*), l'histoire de la CIPRA est très étroitement liée à celle de la Convention alpine, un texte de droit international contraignant qui doit être appliqué par les administrations et les tribunaux32(*). L'idée de la Convention alpine est née en 1951, tout juste un an avant la fondation de la CIPRA en tant qu'organisation faîtière alpine dont les documents de sa création prévoyaient « que la tâche la plus importante est la protection des Alpes, en élaborant une convention internationale pour la protection des Alpes et en veillant à son application par les pays signataires ». La Convention alpine voit le jour officiellement en 1991 lorsqu'elle fut signée par une large majorité des pays alpins et l'Union Européenne, et depuis, la CIPRA dispose d'un statut d'observateur officiel de la mise en oeuvre du traité.

    Les protocoles d'application de la Convention alpine rédigés au fur et à mesure permettent de décliner ses principes suivant des grandes thématiques : aménagement du territoire et développement durable (1994), protection de la nature et entretien du paysage (1994), agriculture de montagne (1994), forêts de montagne (1996), protection des sols (1998), énergie (1998), tourisme (1998) et transport (2000). En raison -peut-être- de la transversalité de l'objet foncier, on ne retrouve pas de « protocole foncier ». Toutefois, il semble qu'aujourd'hui la Convention alpine soit devenue une plate-forme institutionnelle mise en difficulté33(*). Bien sûr, elle continue de donner à la CIPRA des axes de pensée et d'actions en restant un objectif fort mais non unique de son action.

    Le projet de Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord est revenu d'actualité ce printemps 2010 ; il n'est pourtant pas récent. Dès 1996, soit un an après l'adoption de la LOADT34(*) instituant ce nouvel outil de planification étatique, un courrier des trois ministères concernés35(*) adressé aux préfets « futurs coordonnateurs » annonce en objet le « lancement des travaux préparatoires à l'élaboration des directives territoriales d'aménagement sur des territoires expérimentaux »36(*). Cinq sites expérimentaux sont retenus, dont les Alpes du Nord, pour constituer un échantillon « représentatif des principaux enjeux en matière d'aménagement, de développement, de protection, et de mise en valeur du territoire ». Une étude préalable à une DTA sur les Alpes du Nord est donc lancée pour une durée de six mois.

    Quatorze années plus tard, seule la DTA des Alpes du Nord n'a pas abouti. Pour la CIPRA et de nombreuses autres associations de protection de l'environnement, cette DTA constitue (ou plutôt constituait) un garde-fou utile qui va dans le sens d'un développement équilibré et raisonné des Alpes du Nord, celle-ci se référant à plusieurs reprises à la Convention alpine. On peut ainsi appréhender la DTA des Alpes du Nord comme une déclinaison locale et concrète (ses orientations sont prescriptives et non indicatives) de la Convention alpine. Les fortes oppositions qui ont marqué le projet de la DTA alpine attirent d'autant plus l'attention sur ce cadre normatif mort-né37(*).

    Le mandat du 11 mai 2000 définit le périmètre de mise en oeuvre de la DTA des Alpes du Nord : ce territoire comprend les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie, la partie orientale du département de l'Isère (bornée par la limite du SCOT de la région urbaine grenobloise), et les communes drômoises appartenant au Parc Naturel Régional du Vercors. Il s'agit d'un territoire d'une superficie de 16 077 km², concernant 923 communes et 1 841 256 habitants répartis sur 16 aires urbaines38(*).

    Enfin, l'étude de ces deux cadres normatifs ne pouvait s'effectuer sans une « confrontation » au réel, c'est-à-dire un travail de terrain39(*).

    www.dta-alpesdunord.fr

    Au sein du périmètre défini par la DTA des Alpes du Nord, trois terrains d'études ont été choisis pour illustrer des situations différentes face à la question foncière :

    ü La commune de Chamonix (74) qui développe une ingénierie foncière pointue sur des opérations de lotissement à destination des résidents permanents40(*),

    ü Le Vercors Quatre Montagnes (38) qui travaille à la formation des élus sur les questions de mise en oeuvre d'une politique foncière,

    ü Le territoire des balcons de Belledonne (38-73) où les enjeux de déprise agricole et de pression urbaine l'amènent dans l'arène de l'élaboration du SCOT de la région urbaine grenobloise41(*).

    Le développement de l'analyse produite pour ces trois terrains d'études (Partie II) permettra également de justifier le choix de ces terrains. De plus, ces trois sites répondent aux impératifs pratiques qui s'imposent à la réalisation de ce travail : Chamonix et le Vercors sont deux des terrains d'études du programme de recherche IngéTerr auquel participe Sylvie Duvillard, le territoire de Belledonne est quant à lui facilement accessible depuis l'agglomération grenobloise.

    2.3. Les questionnements retenus

    Une fois ces premiers cadres posés, les questionnements suivants permettent d'affiner un peu plus la démarche du mémoire. Tout d'abord concernant le problème spécifique que l'on cherche à traiter : les cadres normatifs. Le projet de DTA des Alpes du Nord (qui reprend les principes de la Convention alpine) produit un discours sur la question foncière : lequel est-il ? Quel est le rapport à la réalité de ce discours ? N'est-il qu'une série de « beaux principes » selon certains, ou les conditions d'une réelle application sont-elles fournies et possibles ? Observe-t-on un décalage notoire avec les pratiques du terrain ou au contraire, une certaine adéquation?

    La présentation succincte faite précédemment indique que quatorze années de procédure n'ont pas permis d'adopter un projet opposable. D'ores et déjà, si avec cette DTA il s'agit de passer de la théorie à la pratique, que peuvent nous apprendre les rebondissements et les modalités de l'élaboration de cet outil de planification impulsé par l'Etat ? Le questionnement sera développé en Partie II du mémoire, où il s'agira de s'intéresser au rapport au droit et à la norme en aménagement qu'entretiennent ceux qui « font le territoire » (les élus et les techniciens essentiellement).

    Enfin, la question spécifique de recherche que l'on souhaite traiter regarde du côté des outils et de leurs utilisations : comment les acteurs se saisissent-ils des outils pour les adapter à leurs problématiques foncières locales ? Il s'agira d'évoquer des procédures de l'action foncière et d'une forme de « bricolage » qui s'opère en parallèle42(*). Cette question opérationnelle nécessite un travail de terrain par la réalisation d'entretiens.

    2.4. « Méthodologie pratique » de travail

    Une méthodologie de travail a été élaborée avec le tuteur de stage en prenant en compte les impératifs de recherche. Finalisée durant le premier mois de stage, elle a permis d'élaborer dans le même temps un planning prévisionnel sur six mois.

    Ce schéma permet d'avoir une vision synoptique de la démarche réalisée selon trois phases : la première s'attache aux deux cadres normatifs retenus, la seconde concerne le travail de terrain, et enfin la dernière s'attache à mettre en regard le travail accomplit pour dessiner les perspectives d'une politique foncière « durable » pour les territoires alpins.

    Figure 4. Méthodologie de travail, N. Moyon 2010

    Le rétroplanning ci-dessous imaginé au début du stage était optimal. Dans les faits, le travail d'expérimentations sur le terrain a débuté mi-juin pour s'achever environ mi-juillet. Ce décalage est essentiellement dû au fait que la phase I. ait été peut-être sous-estimée puisqu'elle devait aussi inclure un travail préalable de prise de connaissance de la thématique foncière.

    Figure 5. Rétroplanning de l'étude

    Mars

    Phase I. Exploitation du cadre normatif Convention alpine & DTA

    Orientations thématiques, leviers d'action pour la gestion foncière

    Avril

     
     

    Mai

    Phase II. Expérimentations sur le terrain

    Cas d'étude à définir

    Juin

     
     

    Juillet

    Phase III. Mise en regard, confrontation des phases I. et II.

    Aout

     
     

    Fin Aout -Septembre

    Rédaction finale du mémoire (préfiguration d'un livrable CIPRA)

    3. Production et construction des données

    3.1. Elaboration de la grille d'analyse

    L'objectif de la grille d'analyse est de pouvoir confronter le cadre normatif à la pratique sur le territoire des Alpes du Nord. L'élaboration de cette grille a été l'objet d'un travail que l'on peut diviser en trois étapes.

    1) Extraction : la méthode employée vise à « extraire » tout ce qui est dit en matière de foncier (de manière plus au moins explicite et directe), dans la Convention alpine et ses huit protocoles d'application43(*), puis dans le projet de DTA des Alpes du Nord44(*).

    2) Reformulation : ces extraits, qui, mis bout à bout constituent le fond d'un discours sur le foncier, sont relus, rediscutés, puis reformulés. L'objectif est d'en sortir une forme minimaliste du discours ; ce sont les « mesures » envisagées par ces deux cadres normatifs.

    3) Actions envisagées

    Dénomination : l'enjeu est de trouver les bons mots clés pour illustrer l'ensemble du discours produit. Ils recouvrent soit les « thèmes abordés », soit les « actions envisagées » à propos du foncier ; ils constituent les deux axes de la grille d'analyse.

     

    Action 1

    Action 2

    Action 3

    Action 4

    Action 5

    Thème 1

     
     
     
     

    Mesure

    Thème 2

     

    Mesure

     
     
     

    Thème 3

     
     

    Mesure

    Mesure

     

    Figure 6. Structure de la grille d'analyse, N. Moyon 2010

    Thèmes abordés


    Une fois la matrice de la grille constituée, on peut établir deux grilles d'analyse : l'une sur le discours produit par les cadres normatifs (A), l'autre sur les pratiques dans le périmètre des Alpes du Nord (B). Pour la première, il faut donc revenir sur les morceaux de discours issus de la reformulation afin de les positionner dans cette « grille d'analyse du discours normatif ». Pour la seconde grille, il faut activer une méthodologie pour mobiliser les renseignements fournis dans les entretiens puis effectuer la même démarche afin de synthétiser ces données du terrain (entretiens et documentation).

    3.2. Interprétation de la grille

    Disposant d'une même matrice, il est alors possible de superposer ces deux grilles et de voir ainsi les thèmes ou actions pour lesquels le discours et la pratique se retrouvent. A l'inverse, on peut également lire « en creux », c'est-à-dire s'intéresser aux cases vides ; là où les cadres normatifs produisent du discours mais où la réalisation pratique n'existe pas, mais aussi là où les pratiques existent en outrepassant le cadre normatif, et encore, là où rien n'existe. C'est peut-être dans ces cases totalement vides, sans discours normatif et sans pratique de terrain, que s'ouvre le champ des possibles ; proposer une mesure qui permette de créer un lien encore inédit entre un « thème abordé » et une « action envisagée ».

    La superposition des deux grilles permet d'appréhender le décalage, ou au contraire l'adéquation, entre deux cadres normatifs de l'aménagement (et les principes qu'ils développent en matière de foncier), et les pratiques et initiatives alpines dans le périmètre des Alpes du Nord.

    4. Les entretiens

    4.1. Pourquoi faire des entretiens ?

    Le travail de terrain correspond à la nécessaire « confrontation » au réel du travail plus théorique effectué sur les cadres normatifs. La méthode des entretiens a été choisie car il s'agissait avant tout de saisir des discours et des expériences d'acteurs « incontournables » sur la question du foncier. Les personnes interrogées ont ainsi été identifiées par d'autres acteurs - la CIPRA, Sylvie Duvillard, leurs pairs - ou par le titre de leur fonction (directeur d'un établissement foncier local, responsable foncier, par exemple). L'analyse des discours d'acteurs permet de confronter la réflexion théorique et la pratique de terrain ; là se trouve tout l'intérêt, et la condition même, d'un travail de recherche appliquée.

    Afin de vérifier la validité des hypothèses de recherche, et suivant la méthodologie définie, les entretiens ont pour objectif de connaître les perceptions des acteurs, leur connaissance et leur vécu relatif aux questions foncières. Ainsi, pour la démarche de recherche, les entretiens permettent de produire un argumentaire de mémoire inspiré de multiples sources et points de vue : l'argumentaire du chercheur bénéficie d'une justification par le « poids de sa connexion avec le réel » ainsi que d'une forme de « véracité » produite par le terrain et construite suivant une méthodologie de recherche qui en constitue des références. Enfin, ces entretiens ont été particulièrement utiles pour l'analyse des jeux d'acteurs au niveau local, et les modalités pratiques de mise en oeuvre des mesures identifiées.

    Cette assise du terrain est également une dimension importante du travail réalisé par la CIPRA. De nombreux travaux et réflexions plus théoriques naissent bien souvent de l'étude de pratiques originales et exemplaires en matière de développement territorial dans les Alpes45(*).

    De manière plus prosaïque, la démarche de terrain basée sur les entretiens permet de faire connaître la CIPRA, de tisser éventuellement des liens avec de nouveaux acteurs territoriaux, c'est-à-dire de développer son réseau. Cet effet induit s'applique aussi personnellement.

    4.2. La méthode utilisée

    L'étude a été conduite sur la base d'entretiens semi-directifs auprès de dix-huit personnes46(*) mobilisées sur la question du foncier dans le périmètre des Alpes du Nord : des acteurs concernés directement par le sujet au sein de structures tels que SAFER, Etablissement Public Foncier Local, ou le service foncier d'une collectivité, le chargé d'études foncier d'une agence d'urbanisme par exemple, et plus indirectement concernés comme un chargé de mission urbanisme, un directeur de CAUE, ou encore l'animatrice d'une association chargée du développement de l'agriculture. Les entretiens réalisés ont un statut informatif, il est donc important de répondre à la question « qui parle » pour chacun d'entre eux. Ici, il s'agit intégralement (à une ou deux exceptions près) de techniciens ou de directeur de structure ou de service de collectivité. De nombreux entretiens (à partir d'une quarantaine peut-être) auraient permis de réaliser une typologie des discours d'acteurs produits sur la question du foncier : par exemple, y'a-t-il un discours type de « l'élu de vallée » en matière de foncier ? Une piste de recherche peut s'envisager dans ce sens.

    En vue de tester l'hypothèse du mémoire47(*), une grille d'entretien s'est progressivement structurée conduisant à 1H30 d'entretien en moyenne. La grille d'entretien est organisée en cinq thèmes dont l'ordre est tout à fait flexible en fonction de la personne interrogée48(*) :

    1. Une présentation générale ; permet de cerner l'interlocuteur (sa fonction et sa posture par rapport au foncier), la structure et son territoire.

    2. La mise en oeuvre d'une politique foncière dans les Alpes ; afin d'aborder plus ou moins en filigrane la question d'une spécificité alpine en la matière.

    3. Les outils d'une politique foncière ; souhaite susciter des avis sur leurs usages ou non-usages, et décline des interrogations sur le rapport au droit et à la norme en aménagement.

    4. Les deux cadres normatifs étudiés la Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord ; pour connaître les opinions, les positionnements des acteurs, ils sont abordés d'une manière plus directe.

    5. Les perspectives en matière de foncier sur leur territoire et dans les Alpes du Nord ; désire cerner les pistes de travail vers lesquelles aller pour une politique foncière participant au développement durable du territoire.

    La méthode utilisée pour traiter le contenu des entretiens consiste à effectuer une explication de texte simplifiée : cela implique des relectures de la prise de note effectuée (pour les entretiens non enregistrés) ou des réécoutes de l'enregistrement afin de retranscrire le contenu qui sera réutilisé dans l'analyse. Ce contenu est organisé suivant les thèmes les plus redondants. De fait, la grille d'analyse élaborée au préalable est une première clé de lecture des entretiens.

    Le contenu de ces entretiens (les données quantitatives et qualitatives) constitue l'un des matériaux de base de l'analyse produite dans ce mémoire, au même titre que la bibliographie : son contenu sera donc valorisé de la même manière, comme élément de réflexion ou comme argumentaire par exemple. Toutefois, les entretiens sont des documents confidentiels qui garantissent le sens et le contexte des propos tenus par les personnes rencontrées. Le choix a donc été fait, en concertation avec les tuteurs de mémoire, de compiler dans un cd annexe à ce document les fichiers audio des entretiens enregistrés. Un exemplaire de ce cd annexe est confié à Sylvie Duvillard la tutrice de recherche, à Alexandre Mignotte pour CIPRA France et à moi-même.

    5. Liens avec d'autres travaux de recherche

    « Différents travaux ont été lancés ces dernières années par des organismes scientifiques ou techniques concernant le foncier en montagne. La plupart de ces programmes (pluriannuels le plus souvent) se concentrent généralement sur les mécanismes et enjeux fonciers pour le maintien d'espaces naturels, agricoles, forestiers (cf. projet Popfongo du Suaci Alpes du Nord et du Cemagref de Grenoble). Notre ambition n'est ni d'ignorer ces travaux qui rassemblent déjà beaucoup d'acteurs concernés par la question du foncier, ni de s'y « fondre » pleinement car notre projet ne se concentre pas directement sur les implications agricoles et naturelles de la gestion foncière. Il s'agira donc davantage de prendre contact avec les organismes impliqués dans ces programmes et de discuter la manière dont notre projet peut contribuer, s'articuler, compléter des analyses déjà en cours »49(*).

    5.1. Le projet « Foncimalp »

    CIPRA France participe au projet de recherche-action piloté par le Suaci Alpes du Nord, Foncimalp, qui s'intéresse à la gestion du foncier des espaces agricoles et naturels pour répondre aux enjeux du multi-usage de l'espace en zone de montagne50(*). Le constat de départ est le suivant : des expériences existent mais on ne capitalise pas assez pour diffuser et reproduire des actions. Foncimalp souhaite être à l'écoute d'initiatives intéressantes ou des problèmes récurrents de la gestion de l'espace en territoires de montagne afin de faire avancer les actions dans les quatre départements : la Haute-Savoie, la Savoie, l'Isère et la Drôme. L'objectif visé est double51(*) :

    ü Appuyer des expériences locales « exemplaires » de gestion du foncier visant à expérimenter de nouveaux outils ou adapter des outils existants, et expérimenter des formes de gouvernance nouvelles. Des réalisations locales concrètes sont attendues en réponse à un certain nombre de questionnements.

    ü A partir de ces questionnements, mutualiser des expériences « exemplaires », en capitaliser et valoriser les enseignements.

    Les objectifs du projet et l'ambition affichée (« donner aux acteurs des territoires de montagne les moyens d'une meilleure gestion du foncier ») sont très proches des travaux entrepris par la CIPRA France sur cette thématique. De même, la définition du terme « exemplarité » correspond tout à fait à la démarche de recherche envisagée dans ce mémoire : il faut entendre par exemplarité « des solutions techniques ou juridiques "nouvelles" (des outils nouveaux ou déformés) ou une gouvernance nouvelle (renouvellement de la façon de mobiliser des outils "classiques" déjà existants) ». La CIPRA participe aux réunions du groupe de travail Foncimalp coordonné par Carole Barthès. Une collaboration plus étroite était envisagée avec l'élaboration d'une grille d'analyse commune pour renseigner les actions observées mais l'idée n'a pu aboutir, le type d'action et les éléments à regarder étant parfois trop différents : les questions de transmission d'exploitation et de compensation agricole sont apparues comme prépondérantes dans le projet Foncimalp alors qu'elles ne participent pas à la réflexion menée dans l'étude CIPRA. Un rapprochement est prévu pour la valorisation commune des travaux respectifs.

    Figure 7. Projet Foncimalp, Suaci Alpes du Nord 2010

    5.2. Le projet de recherche « IngéTerr »

    Dans un contexte de mutations de l'action publique, de nouvelles formes d'ingénierie territoriale émergent. Le projet IngéTerr s'intéresse ainsi aux concepts, cadres et pratiques de l'ingénierie territoriale. Il vise en particulier à caractériser les métiers, identifier les compétences mobilisées ou attendues, élaborer des indicateurs de suivi de l'ingénierie et proposer de nouvelles formations. Ce projet est conduit dans un cadre interrégional (Auvergne - Rhône-Alpes) et bénéficie d'interrelations avec les projets CreActE et RessTerr52(*).

    Partie prenante du projet, Sylvie Duvillard coordonne plus spécifiquement les travaux s'attachant à l'ingénierie foncière et aux compétences associées. Ainsi, IngéTerr a influencé ce travail sur deux aspects. Tout d'abord, deux des trois terrains d'études retenus dans la présente étude sont en commun ; il s'agit de Chamonix et le Vercors. Par conséquent, des liens pour la réalisation des entretiens se sont concrétisés sous la forme d'échanges de contacts et d'une mutualisation de certains moyens logistiques (pour les déplacements en Haute-Savoie par exemple). Enfin, la question des compétences disponibles localement pour travailler les questions de gestion du foncier dans l'espace alpin est une dimension qui ressort des entretiens réalisés dans le cadre de cette étude.

    5.3. Les projets de recherche « Popfongo » et « AMEN »

    Le Cemagref de Grenoble est impliqué dans deux projets de recherche qui concernent directement les questions de foncier53(*).

    Le projet Popfongo, piloté par le Cemagref de Grenoble et le Suaci GIS Alpes-Jura, observe les dispositifs de gouvernance foncière des espaces agricoles et naturels périurbains. Cette recherche vise à mieux comprendre les modalités de gouvernance du foncier non urbanisé (considéré ici comme une ressource territoriale rare) à travers d'une part l'étude de leur contexte (marché foncier et nature de la propriété foncière) et d'autre part, l'analyse de conflits fonciers et d'actions de préservation ou de mise en valeur du foncier. A cette fin, la recherche s'intéresse aux conditions de diversification du marché foncier agricole et des espaces naturels et en particulier, aux facteurs territoriaux qui peuvent l'influencer (aménités environnementales notamment) ; elle s'intéresse également à la diversité des situations de propriété foncière. Ce premier volet de recherche est réalisé à l'échelle d'onze SCOT.

    L'analyse porte également sur les formes de gouvernance foncière qui permettent de passer d'une logique purement conservatoire à une mise en valeur des espaces agricoles et naturels intégrant leur multi-usage. Deux entrées sont alors proposées pour décrypter les changements institutionnels et organisationnels et les nouvelles formes de coordination à l'oeuvre dans cette gouvernance : le développement et l'expression de conflits d'usage, ainsi que l'émergence d'accords volontaires et de nouvelles institutions comme facilitateurs des coordinations entre acteurs du foncier, privés et publics. Une journée d'échanges sur la question du marché foncier est prévue pour octobre 2010.

    Le projet AMEN porte sur les aménités environnementales des espaces ruraux : « Valorisation, gestion, et contribution au développement durable des territoires ». L'objectif principal de ce projet de recherche interrégional est d'analyser la cohérence, l'efficacité et la visibilité des stratégies d'offre (actions publiques et privées) d'aménités environnementales en relation avec l'évolution de leurs demandes et leurs incidences sur le développement régional. Plus précisément, il s'agit d'analyser les vecteurs possibles et les conditions de valorisation des aménités environnementales dans les espaces écologiquement remarquables et les formes de coordination territoriale permettant de concilier activités économiques et actions de protection des ressources et des milieux naturels54(*).

    Le Cemagref de Grenoble travaille à l'élaboration d'une typologie des paysages du Parc Naturel Régional des Bauges selon les enjeux écologiques et réalise, avec des partenaires, une étude des aménités environnementales associées à ces types de paysages, la question du foncier est donc incontournable55(*). L'objectif secondaire est de répondre à la question suivante : y'a-t-il un effet PNR, notamment en matière de foncier ? Là encore, ces travaux se connectent bien avec la présente recherche : le PNR du Vercors est l'un des terrains d'étude choisi et le massif de Belledonne débute sa démarche de labellisation auprès de la région Rhône-Alpes. Dans ce dernier territoire, cet effet potentiel d'une labellisation PNR est avancé56(*).

    Le premier chapitre a permis d'introduire - certes de façon assez minutieuse - la démarche d'étude choisie. La posture méthodologique du mémoire a été détaillée afin de répondre aux exigences d'un travail de recherche en géographie. Le chapitre qui suit entre davantage dans le contenu du sujet, l'objet foncier en lui-même.

    Chapitre 2. Les miscellanées du foncier

    1. Le foncier, de quoi s'agit-il ?

    Il apparait tout à fait nécessaire de poser quelques bases de définition du sujet d'étude. La recherche bibliographique et les entretiens réalisés ont permis d'éclairer le sens d'un large vocabulaire qui gravite autour de la question foncière. Comme le souligne Thibaud Wyon57(*), la gestion foncière est transversale (multisectorielle) et à diverses échelles territoriales imbriquées (multiscalaire). Le foncier est bien au coeur des problématiques d'aménagement du territoire mais de quoi parle-t-on précisément ? De droit, d'argent et de politique, telle est en substance la réponse que l'on tachera de formuler selon ce triptyque.

    1.1. De droit

    Le droit est peut-être l'angle de départ pour appréhender le foncier. En effet, l'approche foncière ne s'attarde pas sur la matérialité du terrain comme le ferait le géologue ou le géomètre mais plutôt sur les droits -et leurs valeurs- dont il est l'objet. Pour Joseph Comby, « le terrain est une abstraction, un support, un espace localisé par rapport à d'autres localisations. En outre, ce n'est même pas à cet espace que l'on s'intéresse véritablement »58(*). Aussi, pour que l'usage d'un terrain soit reconnu (ou protégé), il est nécessaire de lui associer un régime juridique particulier, ce qui n'est pas toujours évident. Par exemple, la faible reconnaissance des enjeux liés à la biodiversité ordinaire se traduit par un nombre très faible d'instruments opérationnels : « or, l'opérationnalité d'un outil suppose que le droit dispose d'un champ d'application territorial pour appliquer un régime juridique. Le droit, pour se construire et être effectif, a donc besoin d'une délimitation spatiale, mais il est difficile voire impossible de définir la délimitation spatiale des corridors écologiques. Si l'on revendique que la connectivité n'a pas de limites, le droit lui en a besoin pour exister ! »59(*).

    Le foncier nous renvoie directement vers la propriété foncière et donc le droit de propriété, élevée au rang de droit naturel et imprescriptible par la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité». C'est ce qui fonde un rapport si particulier entre la terre et le citoyen français, où le droit « s'incorpore à la chose » 60(*): la conflictualité autour du foncier prend ici tout son sens. Ainsi, Olivier Barrière rapporte l'analyse partagée par de nombreux spécialistes qui s'appuient sur le Code civil de 1804 pour affirmer que les pouvoirs du propriétaire sont si étendus qu'ils se confondent avec la chose sur laquelle ils portent : le droit est un bien et la propriété est un droit. En d'autres termes, le droit de propriété tel qu'il est énoncé qualifie l'imprégnation de la chose par l'homme, et réciproquement selon Carbonnier, une imprégnation de l'homme par la chose car « la personne ne pouvant être arrachée sans souffrance à ses entours de biens familiers »61(*).

    Puisqu'il n'existe pas en France de terre sans propriétaire62(*), l'appropriation de l'espace par le droit de propriété est incontournable : c'est ce caractère du foncier qui interpelle la géographique humaine. En matière de propriété privée, on qualifie alors, assez péjorativement, ce « paysage propriétariste ». Alain Bernard63(*) le décrit ainsi, « l'ordre de la propriété privée trace des lignes droites au mépris de la courbe naturelle. Il engendre une rationalisation de l'espace, une mise au pas des paysages et, sans doute, de ses habitants sommés de se conformer à un modèle unique », et Dominique Dujols fustige quant à elle « notre vieille nation de paysans accrochés à leurs parcelles »64(*).

    Toutefois, Joseph Comby nous interpelle vivement sur une interprétation du droit de propriété qui s'est propagée à tort65(*) : « L'article 544 du Code civil qui dans une formule inchangée depuis deux siècles, définit le droit de propriété, le fait à la française, en jouant sur les mots. Après avoir salué bien bas la grandeur du droit de propriété, il ne le ramène à presque rien par une pirouette puisqu'il définit la propriété comme le droit " le plus absolu " [...] de faire de son bien ... ce que les lois et règlements autorisent d'en faire. La propriété c'est le droit d'obéir aux règlements ». C'est ainsi qu'est censée triompher la collectivité publique qui dispose quant à elle du droit de définir les utilisations permises, favorisées ou interdites, voire obligatoires de son territoire.

    En réalité, poursuit J. Comby, personne n'est jamais propriétaire d'un terrain : « on ne peut ni l'emmener, ni le détruire et l'usage que l'on fera devra tenir compte de multiples contraintes juridiques.[...] Le propriétaire d'un terrain, lui, n'est pas libre d'en faire ce qu'il veut. Jamais il ne dispose de tous les droits sur son terrain car il existe toujours des droits concurrents du sien...». Le propriétaire a le droit de gérer son terrain en prenant compte des limites et contraintes qui s'imposent à sa parcelle. Cette digression juridique nous apporte un éclairage sur les résistances de certains propriétaires face aux velléités d'une collectivité qui voudrait bouleverser l'ordre établit de la propriété sur son territoire : le propriétaire schizophrénique se retranche derrière son droit de propriété absolu tout en sachant que celui-ci est soumis à des droits concurrents, dont ceux de la collectivité. Le Code de l'urbanisme ne va d'ailleurs pas dans un autre sens et indique dès son premier et très long article :

    « Le territoire français est le patrimoine commun de la nation. Chaque collectivité publique en est le gestionnaire et le garant dans le cadre de ses compétences. Afin d'aménager le cadre de vie, d'assurer sans discrimination aux populations résidentes et futures des conditions d'habitat, d'emploi, de services et de transports répondant à la diversité de ses besoins et de ses ressources, de gérer le sol de façon économe, de réduire les émissions de gaz à effet de serre, de réduire les consommations d'énergie, d'économiser les ressources fossiles d'assurer la protection des milieux naturels et des paysages, la préservation de la biodiversité notamment par la conservation, la restauration et la création de continuités écologiques, ainsi que la sécurité et la salubrité publiques et de promouvoir l'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales et de rationaliser la demande de déplacements, les collectivités publiques harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace. Leur action en matière d'urbanisme contribue à la lutte contre le changement climatique et à l'adaptation à ce changement »66(*).

    Il semble que ce dogme soit repris et rappelé sans cesse dans les cadres normatifs concernant l'aménagement du territoire (DTA des Alpes du Nord compris), indiquant d'ailleurs très clairement l'orientation que doivent prendre les collectivités sur leur territoire.

    L'idée de patrimoine commun est à défendre, ou au moins à revendiquer, comme l'expose Dominique Dujols67(*) : cette notion « implique une gestion au bénéfice de la communauté, qui permette donc éventuellement de corriger les effets négatifs d'actions individuelles ». Toutefois, comme l'auteur le fait remarquer, il s'agit de comprendre pourquoi ce point de départ du Code de l'urbanisme ne s'est guère illustré dans les faits. Au-delà du constat d'échec, D. Dujols cherche à restaurer la notion de patrimoine commun comme guide d'une nouvelle politique foncière à la fois ambitieuse et réaliste. Pour le moment, « au tribunal administratif, le maire doit prouver qu'il agit pour l'intérêt général, le bien collectif, et c'est presque toujours le requérant privé qui l'emporte sur la collectivité »68(*).

    Enfin, J. Comby nous interpelle sur la superposition des droits sur le sol, ce qu'il appelle « les mille-feuilles du foncier »69(*) : le droit du propriétaire est en compétition avec de nombreux autres droits, notamment ceux de la collectivité, et c'est l'examen détaillé des droits qui s'exercent sur une parcelle qui va déterminer, en partie, sa valeur et donc son prix sur le marché. Or, d'après Comby, « les changements d'énoncés des règles de droit public sont devenus la principale cause de valorisation ou de dévalorisation des terrains privés », ce qui nous montre le lien étroit entre le droit et la seconde dimension du foncier, l'argent.

    1.2. D'argent

    Lorsque l'on parle de foncier, on parle forcément d'argent, ou du moins implicitement tout le monde y pense. En considérant le foncier comme une ressource primaire et non renouvelable, celui-ci devient un bien marchand s'échangeant sur un marché, en somme ; « Achetez de la terre, on n'en fabrique plus ! »70(*).

    Après une entrée par le droit, la définition du foncier comme bien marchand est liée à la première : la valeur marchande d'un terrain n'est pas la valeur intrinsèque de la terre (y compris pour des parcelles agricoles, mais sauf pour des ressources minières) mais plutôt la valeur des droits dont le futur acheteur disposera. Un terrain « n'entre dans le champ économique qu'à partir du moment où il devient le support de droits »71(*). Cette valeur varie aussi suivant l'utilisation du terrain (par exemple, si le terrain est squatté), le potentiel de transformation/d'aménagement du terrain, et également suivant l'imaginaire collectif qui lui est associé (rumeurs de phénomènes paranormaux par exemple).

    L'économie foncière englobe, selon J. Comby, tout ce qui concerne les marchés fonciers, les prix des terrains et leurs variables (constructibles, coûts d'aménagement associés...). Cela passe par l'analyse d'une valeur foncière (un prix) qui commence obligatoirement par une analyse précise et exhaustive des droits concurrents qui existent sur un terrain. Le contexte de pression foncière rend cette dimension du foncier tout à fait incontournable. La « pression foncière » est d'ailleurs une expression souvent utilisée pour qualifier la forte demande marchande dont certains espaces font l'objet, comme par exemple dans les vallées alpines ou sur les littoraux. Dans le champ de l'économie foncière, plusieurs expressions qualifient des comportements différents, utilisées abondamment par de nombreux acteurs, parfois à tort. Les définitions qui sont proposées ci-dessous s'appuient sur le vocabulaire foncier développé par J. Comby72(*).

    Pour commencer, la spéculation foncière -au sens strict- n'existe pratiquement pas. Il faudrait imaginer qu'il puisse être rentable d'acheter un terrain et de le revendre en l'état, quelques temps après en faisant une plus-value, pour que le terme de « spéculation » garde son sens (la spéculation boursière par exemple). En réalité, ce type de plus-value foncière repose presque toujours sur la capacité du « spéculateur » à obtenir des informations que tout le monde n'a pas et surtout à faire changer le droit applicable sur le terrain : on devrait alors plutôt parler de trafic d'influence. En fait, la véritable spéculation foncière (achat d'un terrain dans l'espoir de le revendre plus cher, plus tard, à l'identique) est assez rare compte tenu des coûts de mutation qu'il faudrait alors assumer. C'est donc improprement que l'on qualifie habituellement de « spéculation » l'acte d'acheter un terrain inconstructible et d'obtenir qu'il soit classé constructible avant de le revendre avec des droits à bâtir.

    Le concept de spéculation foncière est également souvent appliqué à tort aux pratiques de « rétention foncière » qui obéissent pourtant à une autre logique. Le propriétaire qui refuse de vendre aujourd'hui à un prix proposé pourtant supérieur à la valeur économique d'usage, espère une hausse future des prix. Ce propriétaire est généralement aussi rationnel que l'opérateur qui voudrait lui acheter le terrain, mais il ne fonctionne pas avec les mêmes paramètres. Le prix du temps d'un propriétaire foncier (qui a placé ses économies) est en effet généralement beaucoup plus faible que le prix du temps de l'opérateur (qui « travaille » avec de l'argent emprunté). Le propriétaire est donc beaucoup plus enclin que l'opérateur à attendre une hausse hypothétique. Paradoxalement, il est donc mieux placé que l'opérateur pour « spéculer » sur l'avenir, c'est-à-dire, attendre une potentielle hausse des prix à son avantage. D'une certaine manière, cette pratique foncière de rétention est « non-conforme aux incitations du zonage » comme l'explique A. Esposito-Fava73(*). C'est la non-mise à disposition de terrains ou la non-réalisation d'une possibilité de construction, pour des objectifs variés : l'espoir d'une plus-value supérieure évoquée précédemment, le souhait de réaliser plus tard une construction pour son propre bénéfice (son fils/sa fille), des conflits de voisinage, ou encore le plaisir de bénéficier d'un terrain d'agrément.

    La rétention se distingue parfois assez difficilement de « l'anticipation foncière », et on peut d'ailleurs considérer celle-ci comme une forme particulière d'anticipation foncière. C'est donc là encore une non-conformité des comportements de propriétaires avec les documents d'urbanisme. Selon Jean-Pierre Boutinet, anticiper, « c'est montrer cette capacité à suspendre momentanément le cours des choses pour savoir comment ce cours va évoluer, donc pour tenter le cas échéant d'infléchir la suite des évènements »74(*). Dans sa conclusion, A. Esposito-Fava rappelle une typologie de trois types « d'acteurs anticipateurs », dont le premier type apparait comme le plus problématique car il est « actif » :

    ü Le premier est l'anticipateur-but (anticipateur) qui est déterminé à voir le zonage changer sur ses parcelles et à entreprendre des actions concrètes pour que cela soit le cas, à un horizon proche.

    ü Le second est l'anticipateur-souhait (volitif) qui ne cherche pas à accélérer l'évolution du zonage en sa faveur, il attend la plus-value foncière.

    ü Et enfin, l'anticipateur-projet (opportuniste) veut obtenir un certificat d'urbanisme mais il ne peut changer de stratégie selon la conjoncture future et les opportunités qui s'offrent à lui.

    Face à ces comportements, les collectivités développent parfois, ou essaient de le faire, une stratégie de régulation foncière. Tout l'enjeu de la régulation foncière repose sur la maîtrise des prix du foncier souvent hors de portée d'une grande partie des concitoyens. Cette question du « prix acceptable » du foncier est développée par Dominique Dujols75(*) qui plaide pour une stratégie de régulation foncière avec comme mot d'ordre : « ni spoliation, ni enrichissement sans cause ». En effet, le raisonnement qui sous-tend implicitement les politiques de soutien, à la production de logements par exemple, coûte cher à la collectivité tout en manquant largement sa cible.

    Le raisonnement actuel est le suivant : « combien peut-on s'offrir de logements accessibles compte tenu des prix fonciers et de l'état des finances publiques ? »

    Sauf que l'auteur remarque à juste titre que l'Etat et les collectivités se maintiennent dans une posture d'agents dominés et que leurs actions pour soutenir la production de logements malgré des prix fonciers élevés ne font parfois qu'alimenter cette flambée des prix. La question de la régulation foncière reste ouverte, mais il semble que des éléments de réponse soient à chercher vers une politique foncière volontariste plus globale.

    1.3. De politique

    Le troisième pilier de notre définition de l'objet foncier est la politique, c'est-à-dire comprendre le foncier comme un objet politique à part entière tout en étant lui-même l'objet de politiques publiques. Les solutions invoquées pour répondre au « problème foncier » semblent relever bien plus du champ de la politique que de celui du droit ou de l'économie : « aller vers une politique volontariste », « mener une stratégie foncière forte et déterminée », « pour une politique foncière ambitieuse et efficace ». Ces expressions recueillies durant les entretiens traduisent une croyance assez forte en la politique pour agir sur le foncier et intrinsèquement le maîtriser. Paradoxalement, ces avis cohabitent avec des désillusions passées de promesses politiques non tenues, mais surtout une conjoncture difficile dans laquelle les élus locaux disposent d'une marge de manoeuvre réduite pour agir (restrictions budgétaires, des priorités sur l'emploi et le social au détriment de la planification et de l'aménagement).

    Le Conseil Général de Haute-Savoie, qui se montre actif sur la question foncière76(*), définit une politique foncière comme « l'ensemble des réglementations, moyens, outils mis en oeuvre afin d'assurer l'administration des sols, qu'ils soient urbains, agricoles ou naturels. La politique foncière a notamment pour but de maîtriser le développement urbain, de permettre aux communes la réalisation de projets importants en réservant des terrains et de contribuer à la régulation du marché foncier »77(*).

    Il semble que le foncier soit devenu un élément crucial de la gestion de l'espace, à tel point que l'on confonde gestion foncière et gestion de l'espace. Au sens de Catherine Herrera, la gestion de l'espace renvoie à l'ensemble des modalités mises en oeuvre pour administrer au mieux les différents enjeux portés par les relations construites par l'homme avec son environnement (compris comme l'ensemble des réalités biophysiques)78(*). Elle recouvre une action plus globale et systémique du territoire. La gestion foncière peut se comprendre comme une action particulière de la gestion de l'espace : elle porte sur l'organisation et la mise en oeuvre de mécanismes et dispositifs institutionnels qui assurent les droits, les usages, les transmissions du sol, etc. La gestion foncière renvoie donc à des instances institutionnelles qui, pour exercer leurs responsabilités, ont besoin d'outils, de registres, de procédures, définissant les actes à réaliser et la façon de les réaliser.

    La gestion foncière communale définit des tâches particulières aux communes, qui doivent alors se doter du personnel, des compétences et des moyens financiers nécessaires. En résumé, la gestion foncière qualifie tout un système qui est d'ailleurs en construction en Afrique (où l'actualité foncière relate régulièrement de nouveaux scandales et conflits fonciers). La gestion foncière, bien établie en France, vise à résoudre les problèmes de sécurisation foncière, de procédures d'identification et de validation juridique des droits et des mutations du sol.

    En somme, la préoccupation de la gestion de l'espace s'effectue au niveau de la planification urbaine (là où il faut entendre « pratique de l'urbanisme ») et amène à la définition de réglementations de l'usage des sols. C'est précisément à ce niveau que le courage politique associé à une vision stratégique du développement territorial sont incontournables. Le titre de l'article de Romain Cazajous résume assez bien l'enjeu foncier en politique, « maîtriser le sol pour maîtriser son territoire »79(*) : il s'agit donc là d'élaborer une stratégie foncière.

    Une stratégie foncière implique d'observer et de planifier pour mieux agir, en définissant, d'une part des objectifs généraux en matières sociale, économique, environnementale et, d'autre part, les moyens opérationnels et structurels propres à réaliser ces objectifs. Selon S. Mordaret, la stratégie foncière d'un agriculteur peut se définir comme le projet concernant le foncier et sa place dans le fonctionnement global de l'exploitation, avec un programme d'actions à réaliser pour atteindre ces objectifs80(*). Pour une collectivité, c'est la traduction opérationnelle d'un projet de territoire, un ancrage foncier indispensable, « la matière première de l'aménagement sans laquelle toute programmation ne serait qu'utopie »81(*).

    La stratégie foncière est donc, ou devrait être, la déclinaison d'un projet de territoire, lui-même déclinaison d'un projet politique territorialisé. Elle précède l'action foncière que J. Comby définit comme la partie de la politique foncière locale qui consiste, pour la puissance publique, à intervenir sur le foncier par des acquisitions de terrains, soit à l'amiable, soit par préemption, expropriation ou cessions gratuites (par exemple dans le cadre d'une opération d'aménagement de ZAC ou d'un lotissement) et par différentes sortes de cessions. La conduite de l'action foncière peut être confiée par délégation à un « opérateur foncier», par exemple un établissement public foncier local.

    L'action foncière, autrement dit l'acquisition de foncier en vue de l'action de la collectivité, préfigure l'aménagement foncier qui regroupe l'ensemble des opérations consistant à la fois à équiper les terrains (en particulier à les viabiliser) et à en restructurer le parcellaire afin de permettre une nouvelle utilisation des sols.

    L'aménagement foncier peut être directement réalisé ou commandité par le propriétaire (potentiellement la collectivité publique) ou par un intermédiaire spécialisé (aménageur ou lotisseur, de statut privé ou parapublic type SEM82(*)).

    L'aménagement foncier se réfère parfois aussi aux opérations de remembrement, ou remembrement-aménagement, autrefois initiées en vue d'une restructuration foncière des exploitations agricoles. Cette politique foncière est « un puissant outil d'aménagement du territoire »83(*). Concrètement, l'opération consiste en un échange parcellaire, dans un périmètre déterminé. Souvent qualifié comme « le meilleur outil qui puisse exister sur l'aménagement du territoire tant au niveau de la planification que de la justice par rapport aux propriétaires »84(*), les opérations menées à terme sont si rares qu'elles en sont exceptionnelles : « c'est une mesure qui existait mais qui est peu utilisée parce qu'elle fait peur aux élus. Vous imaginez bien, en Haute-Savoie, aller toucher le foncier, le champ du papa, le déplacer... le poirier de la grand-mère... vous imaginez toutes les résistances mentales qu'il peut y avoir. Il faut en connaitre les limites »85(*). La force politique semble être au coeur de la réussite d'une politique foncière globale et ambitieuse qui souhaite faire passer l'intérêt général avant les intérêts particuliers, qui sont aussi ceux des électeurs...

    Le foncier est une matière première transformée à plusieurs reprises pour obtenir, au bout de la chaîne de valeur, une opération de construction. Sa valeur est progressivement augmentée par le travail de mobilisation et d'aménagement réalisé par de multiples acteurs, qui apporte une véritable valeur ajoutée. Le schéma ci-dessous permet de comprendre ce que l'on qualifie de « chaîne de transformation du foncier »86(*).

    En effet, l'évolution d'une parcelle (son usage et sa valeur) va dépendre directement de la politique foncière de la collectivité, suivant son projet de territoire et donc la stratégie foncière qui doit s'exercer lors de la vente de la parcelle en question. Le modèle développé est celui de l'extensif, tout à fait opérant dans les Alpes françaises, et il attire l'attention sur le moment « logique » d'intervention de la collectivité et sur la multiplicité des choix qui s'offrent à elle, avec l'évolution des prix en ligne de mire87(*).

    Figure 8.Mise en perspective de la chaîne de transformation du foncier, CLD des Vals du Dauphiné & Nord Isère 2008

    En somme, la politique foncière est la résultante des politiques publiques (logement, économie, agriculture, environnement) ayant trait au développement et à l'aménagement du territoire. Deux enjeux fonciers où il est urgent d'agir semblent ressortir des entretiens : le logement et l'artificialisation des terres agricoles88(*). Faire l'impasse sur la question foncière, c'est finalement compromettre la concrétisation du projet de territoire. La responsabilité politique est donc essentielle.

    Le foncier est au coeur du projet de territoire, dans sa dimension politique, économique et dans sa consistance juridique. Les définitions proposées ont balayé le vocabulaire de l'univers foncier en essayant de démontrer que ce qui fonde la question foncière relève de ces trois dimensions complémentaires et fortement liées : le juridique (le foncier, c'est du droit), l'économique (le foncier, c'est de l'argent) et du politique (le foncier, c'est un objet politique).

    2. Qui se préoccupe du foncier ?

    Cette seconde question est incontournable : qui sont les acteurs sur cette scène du foncier ? Selon Le Meur89(*), l'enjeu foncier se situe à ce niveau car « il renvoie tout d'abord à une relation foncière, c'est-à-dire à un rapport social noué entre acteurs individuels ou collectifs autour d'une chose ou d'un bien et non au rapport direct d'un individu ou d'un groupe à cette chose ou à ce bien. En outre, une relation foncière est souvent sous-tendue par un complexe d'enjeux très hétérogènes et dépendants des acteurs impliqués. [...] En bref, une relation foncière n'est que rarement purement foncière ». Le jeu d'acteurs permet de comprendre à la fois le conflit foncier et l'objet foncier en lui-même (usage, valeur, histoire...). Cette seconde partie s'attardera donc à la question des acteurs du foncier.

    2.1. Les acteurs et la préoccupation foncière

    D'après J. Comby, un opérateur foncier est un organisme public ou parapublic chargé de mener des opérations d'achat et de vente de terrains pour le compte d'une collectivité publique en utilisant un fonds de roulement et la compétence de techniciens dont les collectivités publiques ne disposent pas toujours. En effet, depuis les Lois de décentralisation de 1982-1983, les collectivités territoriales, (communes, départements et régions) se sont vues octroyer certaines prérogatives d'aménagement de l'espace et par conséquent, une responsabilité en matière de gestion du foncier. En revanche, comme le fait remarquer Comby, ce rôle d'opérateur foncier est tenu de plus en plus souvent par d'autres acteurs (publics ou parapublics) tels que les établissements publics fonciers (EPF).

    Les enjeux fonciers sont portés par des acteurs individuels et collectifs, que Le Meur90(*) classe schématiquement dans deux catégories : d'une part des acteurs en compétition pour l'accès aux ressources (relations de concurrence, d'échange, de conflit, d'alliance), d'autre part, des instances ou institutions de contrôle de l'accès aux ressources (Etat, collectivités). Cependant, il est très complexe d'essayer de représenter la diversité des acteurs qui sont mobilisés sur la question du foncier (cela reviendrait presque à répertorier les acteurs de l'aménagement et du développement territorial en France), et développer une liste de ces acteurs, de leurs missions, de leur échelle d'intervention ou encore de leurs moyens d'actions serait long, fastidieux et inutile puisque ces données sont facilement accessibles par ailleurs.

    Toutefois, une typologie des acteurs sollicités sur le thème de l'ingénierie foncière dans le cadre du programme de recherche IngéTerr est en cours. Cette typologie offrira une visibilité, jusqu'ici inexistante, des acteurs du foncier en France (et donc des compétences mobilisables sur le sujet), permettant d'organiser les organismes ou individus suivants91(*) : CAUE, SAFER, SUACI, Agence d'urbanisme, EPF, maire, adjoint à l'urbanisme et autres adjoints, conseil local de développement, DDT, préfet, chambres d'agriculture, conseils généraux, associations, notaires, bureaux d'études, citoyens, techniciens des collectivités territoriales, agriculteurs, PNR...

    Le schéma suivant est une première tentative d'organisation des acteurs qui se « préoccupent » du foncier (le propriétaire par exemple), ou dont l'objet de travail est le foncier (le notaire par exemple). Le schéma distingue six grandes catégories d'acteurs repérés notamment à l'occasion des entretiens : ces catégories d'acteurs sont détaillées par une liste non-exhaustive d'individus ou de structures.

    Région, Conseil général,

    Communes, EPCI,

    PNR, Parcs,

    Elus et adjoints

    Etat central,

    Préfecture de région,

    Préfecture départementale,

    DDT

    SAFER, EPF / EPFL

    Chambres d'agriculture,

    SUACI, CAUE,

    Agence d'urbanisme

    Association Foncière Urbaine,

    Société Civile Immobilière Association Foncière Pastorale,

    Groupement Foncier Agricole

    Notaires

    Géomètres

    Bureaux d'études

    Propriétaires, Citoyens,

    Exploitants agricoles,

    Terre de Liens,

    Associations diverses

    Figure 9. Acteurs et "préoccupation foncière", N. Moyon 2010

    L'approche du foncier par des cadres normatifs de l'aménagement met en avant le rôle de l'Etat. Il est à la fois relais des politiques publiques européennes qui peuvent impacter le foncier (par exemple la Politique Agricole Commune), il initie ses propres politiques publiques dans un cadre normatif qu'il maîtrise, et met en oeuvre lui-même certaines de ses directives (à travers ses services déconcentrés, ou certains outils de planification et d'aménagement tels que les DTA ou les PIG92(*)). Pourtant, le schéma précédant montre à quel point l'Etat, mais aussi les collectivités territoriales « classiques », ne sont pas seuls sur cette question du foncier. Deux catégories ont vu leur importance croître ces dernières années : les organismes publics et parapublics, notamment avec la montée en puissance des Etablissements Publics Fonciers (locaux ou d'Etat) et les agences d'urbanisme, ainsi que la société civile.

    Certes, les propriétaires ont toujours été « actifs », mais aujourd'hui ils ne sont plus les seuls individus à s'adresser à leur maire au sujet du foncier : un citoyen souhaite préserver le paysage typique de sa commune, des individus désirent consommer des produits issus d'une agriculture de proximité, une association nationale se mobilise sur les questions d'accès au foncier agricole... Le foncier mobilise-t-il plus d'acteurs qu'auparavant ? Il semblerait que la réponse soit positive. Ces deux catégories d'acteurs illustrent deux tendances parallèles, presque contradictoire : d'un côté, l'objet foncier se spécialise avec une ingénierie qui semble se déployer progressivement, et de l'autre, la société civile, novice, se réapproprie cette question territoriale.

    Par ailleurs, les collectivités abordent le foncier à travers une série d'institutions spécialisées séparées les unes des autres : l'administration de la justice pour régler les conflits entre propriétaires, la perception de l'impôt, la conservation juridique des actes de mutation, l'expropriation d'utilité publique, les interventions sur le marché des terrains, les politiques d'aménagement, la réglementation de l'usage des sols. A travers ces institutions, on retrouve les dimensions juridiques, économiques et politiques de l'objet foncier.

    2.2. Le problème du mille-feuille

    L'image du mille-feuille est souvent reprise pour évoquer l'empilement des structures territoriales, et donc des compétences, y compris en matière de foncier. A la lumière d'un cadre législatif national complexe et contraint, où la compétence foncière est portée par plusieurs collectivités territoriales, un certain flou plane sur les limites du principe de subsidiarité et l'action publique en matière de foncier n'a pas de réelle lisibilité, tant pour les institutions elles-mêmes et leurs services que pour la population. Comme le constate Marielle Mouly93(*), les couches administratives s'empilent et se multiplient. Ainsi, chaque institution met en oeuvre sa propre politique et ses propres orientations stratégiques sans concertation préalable avec les autres. Les politiques de l'Europe, de l'Etat, des régions et des départements sont cloisonnées entre elles et ce contexte représente une difficulté supplémentaire pour la mobilisation des acteurs locaux et des ressources financières.

    La future réforme des collectivités, adoptée par le Sénat en seconde lecture le 8 juillet 2010, prévoit un nouveau tournant dans l'organisation territoriale française pour en finir avec « l'empilement des structures »94(*), telle est la première raison évoquée pour sortir du contexte organisationnel actuel. Les trois mots d'ordre de cette réforme, « simplifier, adapter, alléger », pourraient tout à fait se décliner à la problématique foncière. Aujourd'hui, tous les « espoirs » se portent sur l'échelle intercommunale en matière de gestion de l'espace, considérée comme LA bonne échelle pour appréhender la question foncière, à condition que celle-ci corresponde au bassin de vie95(*).

    En attendant un échelon de moins dans ce mille-feuille des compétences foncières, la commune demeure l'échelon incontournable, quelques soient les espoirs que nourrissent l'échelle de l'intercommunalité et le PLU-intercommunal : « C'est bien à cette échelle que se situe la responsabilité de la délivrance des autorisations de construire ou d'aménager et c'est bien à cette échelle qu'est réalisée encore aujourd'hui la quasi-totalité des POS et PLU »96(*).

    2.3. Les conflits fonciers

    « Rural-urbain : le nombre de conflits en nette augmentation »97(*) : le foncier est ici identifié comme la première source de conflit territorial (questions de constructibilité et de zonage), avec un niveau de conflictualité qui n'a cessé d'augmenter depuis dix ans et dont le nombre d'affaires portées devant les tribunaux est en tête de tous les autres types de conflits. Le foncier est l'objet de conflits notamment car il cristallise des représentations immatérielles fortes très ancrées dans les esprits.

    Le tableau suivant est extrait des travaux d'Anthony Tchekemian98(*), où il explicite -au sujet du foncier- les interactions entre citadins et ruraux dans les territoires ruraux et périurbains. Ces interactions sont basées sur les représentations de deux groupes d'acteurs : les « ruraux » représentés par les exploitants agricoles d'une part, et les « néo-ruraux » pour les périurbains d'autre part.

    Interactions dans les territoires ruraux et périurbains

    Représentations des citadins sur les exploitants

    Représentations des exploitants sur les citadins

    Les exploitants souhaitent une valorisation de leurs produits et de leur profession, mais perçoivent mal l'installation de citadins dans le village

    Les néo-ruraux veulent les avantages de la campagne, mais non les inconvénients liés aux pratiques agricoles (souvent il s'agit d'exploitants âgés, retraités, sans successeur)

    Les exploitants développent des stratégies différentes :

    - obtention du classement de leurs parcelles en zone constructible afin que la vente soit plus avantageuse ;

    - mode de fonctionnement différent (agriculture biologique, animations, etc.) ;

    - grands propriétaires conservant leurs parcelles.

    La périphérie est rythmée par les déplacements pendulaires, domicile-travail, des néo-ruraux ; les villages sont souvent qualifiés de dortoirs. Les exploitants ont le sentiment que les Coteaux du lyonnais sont une réserve foncière immobilière.

    Les territoires périurbains sont attractifs, car ils permettent l'acquisition d'un habitat pavillonnaire avec jardin, la recherche d'un meilleur cadre de vie, le souhait d'une reconnaissance sociale et la nostalgie des souvenirs de campagne.

    Une fois installés, les néo-ruraux souhaitent des services et un confort identique à ceux de la ville, pour une qualité de vie supérieure.

    Figure 10. Interactions dans les territoires ruraux et périurbains, d'après A. Tchekemian 2008

    Ainsi, ces représentations sont porteuses de conflits fonciers qui perpétuent en quelque sorte le clivage urbain-rural bien que tout le monde s'accorde sur sa disparition spatiale progressive.

    Par une démarche similaire, Marielle Mouly a construit un tableau des « exemples d'enjeux et bénéfices partagés entre le rural et l'urbain »99(*) dont on a extrait ci-dessous ce qui concernait directement le thème du foncier. Le bénéfice partagé de la dernière colonne doit être lu de la sorte : Ville Campagne , « ce que la ville apporte à la campagne », et inversement. Cette démarche vise à montrer qu'une complémentarité entre espaces urbains et ruraux est possible et souhaitable : ce bénéfice partagé est aussi synonyme d'une moindre conflictualité autour de l'enjeu foncier. Ainsi, dans la perspective d'une densification accrue de l'espace urbain qui se traduirait par un ralentissement de la périurbanisation, la ville serait potentiellement susceptible de permettre un infléchissement de la pression foncière à la campagne.

    Types d'enjeu

    Vu par l'urbain

    Vu par le rural

    Quel bénéfice partagé ?

    Foncier

    Densification de la ville, maîtrise de l'urbanisation

    Protection des espaces agricoles et « naturels »

    Ville Campagne : une diminution de la pression foncière

    Campagne Ville : des espaces verts de qualités et préservés et des paysages entretenus grâce notamment à l'agriculture

    Figure 11. Exemples d'enjeux et bénéfices partagés entre le rural et l'urbain, d'après M. Mouly 2008

    Au sujet de la conflictualité autour du foncier, l'espace alpin n'échappe pas à la règle, bien au contraire. Ce thème est souvent abordé à travers l'enjeu du maintien du multi-usage de l'espace en montagne, sur les versants et en vallées.

    Dans des espaces protégés tels que les parcs nationaux, Lionel Laslaz n'oublie pas d'évoquer ce problème. « Les différents usages des territoires montagnards renforcent ces tensions récurrentes. Les flux touristiques constituent ainsi un défi auxquels les gestionnaires des espaces protégés proposent des solutions souvent identiques, volontiers basées sur une vision "prédatrice" de la fréquentation récréative et sur le postulat de la "fragilité" des milieux montagnards »100(*). De fait, autour des polémiques déclenchées par la Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord, Camille Blanc101(*) est allée explorer les enjeux de territoires et les conflits identitaires cristallisés dans les stations de sports d'hiver. Là encore l'usage du sol en montagne est tiraillé entre deux tendances caricaturales : les « prédateurs » d'un côté, les « protecteurs » de l'autre.

    3. Comment agir sur le foncier ?

    Dans son épilogue imaginaire, Edgard Pisani102(*) n'oublie pas de rappeler qu'un « texte de loi, c'est beaucoup, et c'est très peu de chose. Ce qui compte est ce qu'en feront les hommes. [...] La loi est l'expression et l'instrument d'une Nation. L'expression est acquise, il faut maintenant que la Nation et les collectivités territoriales qui la composent apprennent à se servir des outils qui sont désormais à leur disposition ». Pour sa part, Jacques Manesse indique à propos de la loi Montagne ; « la loi laisse trop souvent une marge d'appréciation qui peut aller jusqu'à en tourner l'esprit »103(*).

    3.1. Les cadres normatifs du foncier

    Le tableau qui suit permet de récapituler les principales lois qui ont structuré au fil du temps la question foncière dans la législation française. De lois « de référence » à d'autre lois quelque peu « oubliées », cette vision synthétique s'est attardée sur les avancées successives en matière de foncier, depuis la loi Cornudet de mars 1919 jusqu'à la loi « Grenelle II » de juillet 2010.

    Cependant, ce tableau synthétique ne prétend pas offrir un reflet parfaitement exhaustif des différentes mesures foncières apportées par ces dix-neuf lois sur une période de quatre-vingt onze ans.

    Figure 12. Les cadres normatifs du foncier, N. Moyon 2010

    Date

    Loi

    En matière de foncier...

    Les outils instaurés

    14 mars 1919

    Loi Cornudet

    Introduction de la planification urbaine.

     

    15 juin 1943

    Loi d'Urbanisme

    Pose les bases de l'urbanisme réglementaire et charge l'Etat de l'organisation de la gestion urbaine avec sa Délégation Générale à l'Equipement National

    3 volets : création d'une administration spécifique, refonte des projets d'aménagement, renforcement des réglementations de l'urbanisme (instauration du permis de construire obligatoire sur tout le territoire).

    23 octobre 1958

    Ordonnance

    Confirme et fixe le droit à l'expropriation institué aux collectivités

    Réglementation spécifique

    26 juillet 1962

    -------------------------

    Permet d'éviter un effet spéculatif généré par l'annonce d'un projet

    Procédure d'extrême urgence en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique

    Création des Zones d'Aménagement Différées

    30 décembre 1967

    Loi d'Orientation Foncière (LOF)

    Met en place les principales procédures de la planification réglementaire

    Distinction entre documents prospectifs et documents réglementaires (SDAU, POS). Outils : Taxe Local d'Equipement (TLE), COS, ZAC en remplacement des ZUP

    31 décembre 1975

    Loi foncière

    Deux nouveaux outils de maîtrise foncière et début des critiques sur la non efficacité de l'interventionnisme public

    Plafond Légal de Densité (PLD) et Zone d'Intervention Foncière (ZIF)

    7 janvier et 22 juillet 1983

    Lois de décentralisation

    Transfert des compétences d'urbanisme aux communes

    Autorisations de construction confiées aux maires

    9 janvier 1985 et 3 janvier 1986

    Loi Montagne & Loi Littoral

    Protection des zones sensibles

    Obligation de construire en continuité du bâti existant et inconstructibilité sur les rivages et les grands lacs

    23 décembre 1986

    Loi Méhaignerie

    Relance l'offre foncière constructible

    3 mesures : réduction du droit de préemption, abrogation du plafond légal de densité, application anticipée des POS en cours de révision

    25 juin 1999

    Loi d'Orientation pour l'Aménagement et le Développement Durable (LOADDT ou Loi Voynet)

    Affirme la complémentarité entre pays et EPCI à fiscalité propre et intègre la notion de développement durable à l'aménagement.

    -------------------------

    12 juillet 1999

    Loi « relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunales » (Loi Chevènement)

    -------------------------

    3 échelons de l'intercommunalité sont définis : communauté de communes, communauté d'agglomération, communauté urbaine

    13 décembre 2000

    Loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU)

    Lutte contre l'étalement urbain et encourage le renouvellement urbain

    Rénovation de certains outils réglementaires et de planification : SCOT, PLU, PADD, Objectif des 20% de logements sociaux (Art 55)...

    2 juillet 2003

    Loi Urbanisme et Habitat

    Contribue à accélérer le mitage des zones NB des POS

    Retarde la conversion des POS en PLU

    -------------------------

    23 février 2005

    Loi pour le Développement des Territoires Ruraux (DTR)

    3 objectifs :

    - améliorer les conditions d'exploitations des propriétés rurales agricoles et forestières,

    - assurer la mise en valeur des espaces naturels ruraux,

    - contribuer à l'aménagement des territoires communaux et intercommunaux.

    - Nouvel outil d'intervention pour les Conseils généraux : le PAEN (Périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains)

    - Permet aux collectivités de choisir entre l'application de l'une ou l'autre des lois Montagne et Littoral en matière de constructibilité des rives (Article 187)

    5 janvier 2006

    Loi d'Orientation Agricole (LOA)

    Transfert de compétence vers les Conseils généraux

    Mise en place de commission pour avis consultatif sur les PLU

    13 juillet 2006

    Loi d'Engagement National pour le Logement (ENL)

    4 thématiques abordées :

    - Aide les collectivités à construire

    - Augmente l'offre en loyers maîtrisés

    - Favorise l'accession sociale à la propriété

    - Renforce l'accès de tous à un logement confortable

    Majoration de la taxe foncière sur les propriétés non-bâties. Maintien des objectifs de construction de logement sociaux. Accélération des procédures de cession des terrains de l'Etat. Pass Foncier.

    25 mars 2009

    Loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion

    Assouplit l'article 55 de la loi SRU en incluant l'accession à la propriété dans le calcul des 20% de logements sociaux obligatoires

    -------------------------

    3 août 2009

    Loi « Grenelle 1 »

    Programme la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement

    Limite la consommation de zones agricoles par l'urbanisation

    12 juillet 2010

    Loi « Grenelle 2 »

    Définie les orientations d'application et de territorialisation du Grenelle de l'environnement et de la loi Grenelle 1

    Redéfinition des compétences des établissements publics d'aménagement et fonciers,

    Compensation à la charge des départements dans le cadre d'opérations d'aménagements fonciers,

    Observatoire de consommation foncière,

    Mise en place des trames vertes et bleues,

    Revient sur l'assouplissement de l'art. 187 de la Loi DTR 2005

    Remplace les DTA en DTADD (perte du caractère opposable du document)

    3.2. Les lois « Grenelle », et après ?

    Dans un article paru début 2010, Richard Trapitzine, urbaniste consultant, détaille les apports et les oublis des lois Grenelle I et Grenelle II104(*). Les commentaires qui suivent sont pour la plupart issus de ses conclusions.

    Tout d'abord, le premier constat qui nous intéresse ici est que la thématique foncière est le grand absent de ces deux lois Grenelle. L'auteur constate qu'au total, il n'apparait qu'à trois reprises : dans la loi Grenelle I à propos de l'extension du foncier artificialisé en zone agricole, et dans la loi Grenelle II, à l'article 13 pour redéfinir les compétences des établissements publics d'aménagement et des établissements publics fonciers, et enfin, à l'article 44 à propos de la compensation mise à la charge des départements dans le cadre d'opérations d'aménagement foncier. Ce constat constitue un véritable paradoxe car ces deux lois Grenelle entrainent « la réécriture du livre premier du code de l'urbanisme et de grands pans d'autres codes comme celui de l'environnement ». De plus, ces textes « bouleversent les façons de concevoir l'aménagement et la planification des territoires. Ils introduisent en ces domaines une nouvelle conception de l'action publique d'Etat ». Pour Trapitzine, le foncier est d'autant plus une dimension incontournable dans une perspective de développement durable des territoires : « l'espace ne peut se transformer que par et au profit de celui qui en détient sa propriété ou son usage », sans maîtrise du sol aucune stratégie territoriale ne peut aboutir. Ensuite, l'auteur constate que la loi Grenelle I comme Grenelle II apportent de nouveaux moyens institutionnels et règlementaires. Ainsi, deux orientations ont été prises :

    ü L'adaptation de l'organisation administrative de gestion des territoires, pour traiter à la bonne échelle les enjeux environnementaux et les contradictions entre intérêt local et intérêt général.

    ü La modification des échelles des documents d'urbanisme, « de sorte qu'à terme le PLU communal devienne une exception ».

    La loi Grenelle II propose donc de favoriser une meilleure harmonisation des documents d'orientation et de planification avec une meilleure lisibilité de leur hiérarchisation. Pour Trapitzine, cela suppose surtout une conception qui s'opère à la bonne échelle, accompagnée d'un dialogue constructif entre Etat et collectivités, sans oublier une forte volonté des élus de mettre en oeuvre au plan opérationnel les orientations générales. Sur ce dernier point, la maîtrise du foncier, qui est en quelque sorte le support du projet de territoire, est incontournable voire « essentielle » selon l'auteur.

    En outre, la loi Grenelle II marque également « la prédominance de l'environnement sur l'aménagement » d'après Trapitzine. Par exemple, la nouvelle définition du Plan Local d'Urbanisme (article L 123-1) vise à intégrer dans les nouveaux documents de planification la trilogie durable : l'environnement, le social, et l'économie. Selon lui, « ce ne sera plus l'urbanisme qui façonnera l'environnement, mais l'environnement et le développement durable qui conditionneront en amont la localisation des activités humaines et le cadre de vie des populations ».

    Cependant, ce prima de l'environnement représente d'après l'auteur un risque : un difficile dialogue entre, d'une part, un Etat qui sera porteur des contraintes écologiques et environnementales et d'autre part, les collectivités (région, pays, département, EPCI, communes) proches des réalités sociales et économiques. Toutefois, ce « prima de l'environnement sur l'urbanisme » présente également une opportunité : en fixant des objectifs de modération dans la consommation d'espace, le Grenelle II opère un retour vers les fondamentaux de la loi SRU de 2000, qui furent quelque peu mis à mal par la loi Urbanisme et Habitat de 2003, laquelle a contribué à accélérer le mitage des zones NB des POS et à retarder leur conversion en PLU. Les collectivités seront désormais dans l'obligation de démontrer l'économie effective de l'espace et leur volonté de stopper la consommation des espaces naturels.

    A l'échelle du SCOT, les intercommunalités devront tenir une comptabilité de la consommation de l'espace nécessaire pour développer le territoire : cette veille sur les évolutions foncières et celles de l'occupation de l'espace doit permettre « d'agir dans le préventif ». Par cet observatoire, les collectivités locales seront censées orienter en conséquence leurs stratégies foncières et d'aménagement : mesures de protection, évaluation chiffrée de la consommation d'espace, justification de la localisation et de l'emprise de l'urbanisation... Mais l'auteur estime que dans le projet de loi Grenelle II, « l'espace agricole reste encore considéré uniquement comme un espace à préserver », et regrette que « le souci de programmation applicable dans les zones urbaines n'ait pas été explicitement étendu aux territoires à forts enjeux agricoles méritant d'être considérés comme de véritables zones de développement économique ». Selon lui, cette forme d'intégration de l'activité agricole à l'aménagement urbain ou métropolitain « aurait contribué à favoriser une approche globale de l'aménagement et à effacer ainsi la dichotomie ambiante entre l'urbain et le rural ». Cette approche est également partagée par plusieurs acteurs locaux proche du milieu agricole105(*).

    Désormais, le PLU semble acquérir une vision « plus prospective, avec une dimension programmatrice ». Ces nouvelles qualités contribuent, selon Trapitzine, à effacer la rupture qui s'opérait jusqu'ici entre le réglementaire et l'opérationnel, pour qui c'était la cause de nombreuses « dérives incontrôlées au cours de la phase de transformation physique de l'espace ». En revanche, la volonté de généraliser les PLU intercommunaux ne manquera pas de se heurter aux élus municipaux comme le rappelle l'auteur : «les réticences des élus communaux à devoir abandonner leurs prérogatives dans la gestion du droit des sols n'a pas permis pour l'instant d'imposer des élaborations de PLU à ces niveaux de territoire.[...] Pour cela, les parlementaires doivent réussir à convaincre leur base d'appréhender globalement l'aménagement de l'espace à des échelles homogènes et pertinentes ». Les lois Grenelle laisseraient ainsi entrevoir la fin de « l'urbanisme statique de zonage », s'orientant vers une conception urbaine plus dynamique en terme de gouvernance et « obligeant à penser à la fois stratégies et projets au service des territoires et des hommes ». Dans cette nouvelle perspective, les outils et la règle d'urbanisme doivent se mettre au service d'un projet de territoire : leur usage n'est pas, ou n'est plus, une fin en soi.

    En matière de préservation de la biodiversité, les futurs schémas régionaux de cohérence écologique identifieront les espaces qu'il conviendra de préserver et d'appeler « trames vertes » et « trames bleues ». Ce seront donc de nouvelles servitudes qui participeront à la lutte contre l'étalement urbain et de facto, contraindront les acteurs locaux à se rendre économes en espace consommé.

    Les lois Grenelle marquent aussi un retour relatif de l'Etat. Par exemple, avec l'élargissement du contrôle a priori des préfets, ceux-ci pourront s'opposer à l'entrée en vigueur d'un PLU si ce dernier autorise une consommation excessive d'espace sans justification, ou encore la densification des secteurs non desservis par les transports. De même pour Trapitzine, ces lois annoncent sans le dire la prochaine loi sur la Réforme des Collectivités Territoriales qui redéfinira leurs champs de compétences. Cette évolution devrait entraîner forcément « pour des raisons d'équilibre » un retour de l'Etat, fort et déconcentré, « qui ne manquera pas de tenter de récupérer par des actions préventives le terrain qu'il avait perdu, en imposant aux futures collectivités locales des visions d'ensemble plus globales et régulatrices qu'elles ne le sont actuellement ».

    Bien sur, les lois Grenelle « favorise un urbanisme de projet soucieux de préservation de l'environnement et de développement durable, et un urbanisme plus dynamique que par le passé ». Mais une fois n'est pas coutume, « il est permis de s'interroger sur les conditions de mise en oeuvre et d'application ». Trapitzine regrette un urbanisme « auquel il manque un souci de cohérence régionale et surtout l'ancrage foncier, cette matière première de l'aménagement sans laquelle toute programmation ne serait qu'utopie ». Enfin, à la manière d'Edgard Pisani, l'auteur conclue ainsi : « au-delà des textes, ce sont les volontés politiques qui, comme toujours, primeront ».

    Pour leur part, les élus de l'association nationale des Elus de Montagne (ANEM) regrettent que les « Lois Montagne et Littoral se chevauchent à nouveau »106(*). En effet, l'article 187 de la loi DTR (loi relative au développement des territoires, 2005) avait assoupli la règle qui prévalait jusque là : il était devenu possible de distinguer les espaces où devaient s'appliquer la loi Littoral ou bien la loi Montagne, pour ce qui est de la règle de constructibilité des rives. Cet article 187 avait répondu au souhait des élus de l'ANEM. La loi Grenelle II a supprimé cet assouplissement, ce que les associations écologistes ont plutôt apprécié. Une dernière inquiétude semble tourmenter les élus de l'ANEM : « les trames vertes et bleues ne risquent-elles pas de rendre toute la montagne inconstructible ? ». Enfin, Thierry Repentin107(*) évoque dans sa tribune « une évolution en demi-teinte » à propos de la loi Grenelle II. Selon lui, on a plutôt assisté à une « déperdition d'énergie entre Grenelle 1 en 2007 et Grenelle 2 d'aujourd'hui », aboutissant à ce qu'il qualifie de « résultats bricolés et polémiques ».

    Si les lois Grenelle I et II constituent peut-être des étapes déterminantes qui marqueront durablement les pratiques de l'aménagement du territoire, c'est à leur « bonne » mise en oeuvre qu'il faut désormais s'attacher. Au-delà de ces actualités législatives, Dominique Dujols propose de poser les bases d'une future « loi d'orientation foncière urbaine » à partir de propositions formulées lors des Etats généraux du logement qui se sont tenus le 4 mai 2010108(*). Cette future « loi d'orientation foncière urbaine » répondrait notamment à la nécessité de disposer de valeurs de références, ainsi que d'une « véritable transparence des prix de transactions » y compris pour les loyers. Dominique Dujols énumère les cinq mesures suivantes qui permettraient d'atteindre ces objectifs :

    1. Mise en place d'outils de connaissance des marchés permettant la transparence des transactions : « c'est peut-être uniquement dans cette perspective que l'observatoire est vraiment utile ».

    2. Généralisation des PLU intercommunaux avec des secteurs de mixité sociale.

    3. Développement des procédures de gels de prix à une date antérieure, soit au classement d'un terrain en zone constructible, soit au lancement d'un équipement valorisant, « ce qui permettrait l'exercice du droit de préemption à un prix raisonnable ».

    4. Au niveau fiscal : transfert aux collectivités locales de l'impôt sur les revenus fonciers.

    5. Révision de la fiscalité foncière pour « pénaliser la rétention, inciter à l'activation et à l'optimisation du foncier ».

    3.3. Les outils d'une politique foncière

    Aux multiples lois évoquées précédemment s'ajoutent une liste d'outils tout aussi longue. Les outils suivants permettent tous de maîtriser, d'une manière plus ou moins directe, permanente ou ponctuelle, la gestion de l'espace et l'usage des sols, les prix du foncier ou leur disponibilité qui permettent la mise en oeuvre d'un projet d'aménagement. L'ensemble de ces outils sont donc à articuler autour d'une politique foncière définie par la collectivité.

    D'après la définition de Joseph Comby, « les politiques foncières peuvent avoir des objets extrêmement variée (aménagement du territoire, répartition de la propriété, protection de l'environnement, politique de peuplement, etc.) et poursuivre des objectifs différents : telle commune privilégiant une volonté de développement économique, telle autre une amélioration des conditions de vie ». Ce premier constat lui permet de conclure : « il n'existe donc pas de bonnes et de mauvaises politiques foncières, mais des politiques foncières plus ou moins bien adaptées aux objectifs poursuivis », une sorte de slogan repris très largement par l'ensemble des professionnels de la question foncière.

    De plus, J. Comby propose de distinguer : d'une part les débats portant sur la meilleure utilisation des outils existants dans le cadre de politiques foncières locales, et d'autre part, les débats portant sur la modification éventuelle des outils pour définir de nouvelles politiques foncières nationales. Selon l'auteur, « on peut aussi parler dans le premier cas de politiques foncières à droit constant et, dans le second, de politiques foncières à droit variable ». Selon cette définition, si les politiques foncières nationales relèvent de l'Etat, les services de l'Etat peuvent aussi mener des politiques foncières locales concurrentes ou complémentaires à celles des collectivités locales, par exemple en souhaitant implanter localement un projet d'intérêt national.

    Hormis ce problème d'arbitrage entre politique foncière d'Etat et politiques foncières locales, il semble que l'enjeu réside surtout dans la liste pléthorique d'outils dont disposent les collectivités. Le paradoxe demeure donc celui-ci : de nombreux outils existent pour mettre en oeuvre une politique foncière mais celle-ci semble une action difficile à mener pour les acteurs locaux. Dans sa thèse, Louis Allie rapporte cette citation de Faure (In Amoury, 2002)109(*) pour qui l'empilement des procédures ou des outils de protection de la nature paraît excessif : « Les parcs naturels régionaux, réserves naturelles, sites classés, zones humides, sites Nature 2000 ou arrêtés de biotope se conjuguent les uns aux autres - éventuellement dans une même commune - pour finalement brouiller les cartes (au point qu'il devient difficile, parfois, de savoir où poser les toilettes publiques!). Certes, chaque porteur de projet se targue de justifier le maintien de ses propres classifications; néanmoins, les choses deviennent rapidement illisibles et insupportables ».

    3.3.1. La boite à outils fonciers

    Les boites à outils ou les guides pour la maîtrise du foncier, urbain ou agricole, sont très nombreux. En ce sens, après avoir découvert l'ensemble de ces outils, le choix a été fait de sélectionner les travaux du juriste Romain Cazajous développés dans son article Le sol pour maîtriser son territoire110(*), ainsi que ceux de Thibaud Wyon réalisés dans le cadre d'un Diplôme de Recherche Technologique à la région Rhône-Alpes111(*) : en effet, leurs approches bénéficient déjà d'une vision synoptique de ces outils. Ce qui suit est donc en quelque sorte un panel de cette boite à outils foncier. Le schéma montre quant à lui le degré d'imbrication des outils et des opérateurs fonciers, suivant les différentes échelles de planification territoriale. La question de la coordination prend alors tout son sens112(*).

    Figure 13. Tableau des outils de planification, d'après R. Cazajous 2007

    Outils de planification (selon l'ordre hiérarchique)

    o DTA : Directive territoriale d'aménagement élaborée sous la responsabilité de l'État. Elle fixe les principaux objectifs de l'État en matière de localisation des grandes infrastructures et de préservation des espaces naturels.

    o SCOT : Schéma de cohérence territoriale qui fixe les orientations générales des politiques d'urbanisme, de l'habitat, des activités économiques, etc. au niveau intercommunal.

    o PLH : Programme local de l'habitat. Outil d'observation, de définition et de planification des actions servant au développement d'une politique locale de logement.

    o PLU : Plan local d'urbanisme qui établit un projet global d'urbanisme (projet de territoire avec son PADD) et fixe les règles d'utilisation des sols au niveau communal (possibilité de PLU intercommunal).

    o Carte communale : plus limitée que le PLU, elle fixe néanmoins les règles d'utilisation des sols en délimitant les secteurs constructibles de ceux où les constructions ne sont pas admises.

    Figure 14. Tableau des outils d'acquisition foncière, d'après R. Cazajous 2007

    Outils d'acquisition foncière

    o DPU : le droit de préemption urbain permet à une collectivité d'acquérir un bien en se substituant à l'acquéreur trouvé par un vendeur.

    o ZAD : la zone d'aménagement différé est créée par l'État sur proposition d'une commune ou d'un ÉPCI. C'est un secteur à l'intérieur duquel s'applique un droit de préemption équivalent au DPU sans que l'existence d'un document d'urbanisme soit nécessaire.

    o Expropriation pour cause d'utilité publique : une procédure permettant à la collectivité territoriale de s'approprier, grâce à la contrainte, un terrain pour réaliser un projet d'aménagement.

    Figure 15. Tableau des outils d'aménagement opérationnel, d'après R. Cazajous 2007

    Outils d'aménagement opérationnel

    o ZAC : la zone d'aménagement concerté est une opération d'aménagement par laquelle une collectivité réalise ou fait réaliser l'aménagement et l'équipement des terrains en vue de les céder ou de les concéder à des utilisateurs publics ou privés. Cette procédure consiste donc à la fois à produire des constructions et à réaliser des équipements publics.

    o Lotissement : soumis à une autorisation administrative individuelle, il consiste dans la division d'une propriété foncière en vue d'y implanter des bâtiments.

    o Permis de construire groupé : autorisation donnée à un constructeur pour réaliser des bâtiments sur le même terrain.

    Figure 16. Tableau des outils fiscaux et financiers, d'après R. Cazajous 2007

    Outils fiscaux et financiers

    o La participation pour voirie et réseaux : possibilité offerte aux communes de percevoir des propriétaires riverains bénéficiant de la desserte, une contribution financière pour la réalisation des travaux. Adaptée aux plus petites communes, elle évite de mettre en place des procédures plus complexes comme la ZAC ou le PAE.

    o La Taxe locale d'équipement (TLE): outil permettant de financer des équipements rendus nécessaires par l'urbanisation. C'est un impôt forfaitaire perçu par les communes exigibles sur toutes les opérations assujetties à un permis de construire.

    o Le Programme d'aménagement d'ensemble (PAE) : outil complémentaire à la TLE et plus intéressant au niveau des recettes, il permet le financement par les constructeurs de tout ou partie des frais relatifs à la réalisation d'équipements publics importants telles que des voiries rendues nécessaires par l'édification de nouvelles constructions.

    o La subvention pour surcharge foncière : subvention étatique allouée à des organismes bailleurs sociaux en vue de la construction de logements locatifs aidés lorsque le prix du foncier est très élevé.

    Figure 17. Schéma des outils fonciers, par catégorie et échelle d'intervention/utilisation, d'après T. Wyon 2008

    CERF-R-A

    Thibaud Wyon commente ce schéma en indiquant tout d'abord que la liste des acteurs du foncier n'est pas exhaustive : « elle ne comprend que les acteurs directs dont la mission principale est l'action foncière, que ce soit sur des espaces urbains, périphériques ou ruraux »113(*).

    D'un point de vue spatiale, il remarque également que c'est à l'échelle communale que la concentration des outils opérationnels est la plus forte, alors que l'ingénierie territoriale et la planification se concentre à une plus grande échelle. En toute logique, ce décalage est donc nuisible à la bonne mise en oeuvre des outils fonciers. Une des dimensions de l'action publique peut également porter sur cette aide à l'ingénierie locale qui demeure « indispensable pour orchestrer les outils opérationnels nécessaires à la réalisation de leur projet de territoire » selon T. Wyon.

    En outre, Romain Cazajous débute sa démonstration par le constat suivant : « à défaut de donner un mode d'emploi de la maîtrise foncière, l'État a mis à la disposition des collectivités territoriales une vaste boite à outils, soulignant combien la maîtrise de la question foncière est une étape incontournable du développement local ». Toutefois, il ne manque pas non plus de rappeler que la dissémination des nombreux textes constitue une difficulté pour les collectivités de s'y retrouver ; « d'autant que, face à la pénurie du foncier, à la spéculation du marché, à l'étalement urbain et aux préoccupations environnementales, celles-ci ont-elles les moyens d'avoir une réelle maîtrise foncière ? ».

    Puisque la boite à outils semble être remplie, la mutualisation des efforts apporte une solution à l'effet pervers ainsi constitué. De même, une plus grande coordination entre les collectivités permettrait de rechercher l'échelon le plus pertinent pour exercer les compétences foncières, ou bien pour trouver une combinatoire des outils fonciers. Toutefois, pour R. Cazajous, il n'en demeure pas moins que « l'enjeu pour une collectivité est moins d'avoir une parfaite maîtrise foncière que d'être acteur de son propre développement ».

    3.3.2. La fiscalité, un levier potentiel

    La fiscalité vient compléter la boite à outils fonciers par de nombreux dispositifs dont le détail nécessiterait de faire appel à un juriste fiscaliste. Cependant, Joseph Comby distingue tout d'abord deux types de fiscalité foncière pour lesquelles les effets économiques sont selon lui, « diamétralement opposés » :

    ü La fiscalité sur les mutations a pour effet de réduire la mobilité des terrains et du parc immobilier.

    ü La fiscalité annuelle sur les propriétés est plus douloureuse, mais présente une série d'avantages économiques.

    Ainsi, le premier type de fiscalité « freine l'investissement, pénalise la construction, frappe surtout les jeunes actifs... mais a l'avantage d'être relativement indolore, les acquéreurs n'ayant souvent même pas conscience qu'une partie des sommes qu'ils empruntent sert seulement à payer un impôt » d'après l'avis de Comby. D'autre part, le second type de fiscalité « facilite la mobilité du parc, favorise sa pleine utilisation en poussant les propriétaires à se débarrasser de biens qui ne sont plus assez utiles ou rentables pour eux, accroît l'offre foncière, encourage l'investissement. Son impact social est plus discutable ; ainsi, il frappe surtout les personnes âgées (statistiquement, les propriétaires sont plus vieux que les locataires) ». De plus, une réforme fiscale est en cours de réflexion à l'échelle nationale : l'objectif consisterait notamment à rénover les outils fiscaux afin d'en faire de véritables leviers de la maîtrise foncière. Un groupe de travail réfléchit notamment à la proposition d'une « taxe sur le non-usage complet du COS attribué ». L'enjeu est d'inciter à une réflexion approfondie de l'aménagement pour une rationalisation de l'utilisation du foncier114(*).

    Enfin, Thibaud Wyon s'est penché sur le système fiscal éprouvé dans plusieurs pays d'Europe du Nord : « la taxation des plus-values sur la mutation des biens agricoles »115(*).

    Par exemple, le Parlement danois a adopté en 1992, une loi sur la planification foncière. La taxation des plus-values de cession sur les terres agricoles s'inscrit ainsi dans un dispositif législatif « cohérent et relativement rigide » qui interdit, par exemple, le changement d'affectation des bâtiments existants. En outre, le taux de la taxe foncière applicable en zone urbaine est de dix à vingt fois supérieur à celui concernant les biens situés en zone rurale. La fiscalité encourage donc les propriétaires à ne pas demander le classement de leurs biens en zone urbaine. De fait, la base d'imposition de la taxe d'urbanisation résulte de la différence entre le prix de vente des terrains urbanisables et la valeur initiale de la terre agricole (fixée à partir de la valeur locative cadastrale). Le taux de la taxe est assez élevé puisqu'il varie de 40% pour les transactions d'un montant inférieur à environ 26 830€ à 60% pour les transactions d'un montant supérieur. De plus, la taxe est exigible dès le changement de statut des terrains.

    La taxation de cet « enrichissement sans cause » est l'enjeu de ce système fiscal116(*) puisque ce mode de taxation des plus-values pénalise fortement le changement d'affectation des terres, et limite ainsi toute spéculation sur les terres agricoles. Il est à noter que ce système de taxation ne pénalise pas seulement les particuliers, mais également les communes qui réalisent des ventes de terrains agricoles à des fins d'urbanisation. En outre, si elles procèdent à une modification du document d'urbanisme (équivalent au plan d'occupation des sols), les communes peuvent être obligées par les propriétaires de terrains frappés d'une taxe d'urbanisation de les racheter. En conséquence, ces collectivités sont fortement incitées à ne pas modifier le zonage qui relève de leur compétence.

    La gestion des marchés fonciers de l'espace rural au Danemark s'effectue à la source, avec un système qui s'auto alimente : la sur-taxation des plus values foncières incite à un gel de la mutation des terres agricoles. La limitation des mutations stabilise les documents d'urbanisme et réciproquement. En France, La base d'imposition est cependant beaucoup plus souple (laissant place à un important régime exonératoire. Outre la complexité du calcul de la taxe, on note la différence d'engagement politique de la loi française, beaucoup plus consensuelle. Résultat : même si cette taxe génère une ressource fiscale supplémentaire à la commune, elle est contre-productive en termes de stabilisation de la hausse des marchés fonciers. En effet, les propriétaires calculent la valeur de la taxe sur leur prix de vente initiale, et répercutent son montant pour obtenir approximativement le prix de vente final.

    En attendant cette prise de position (à la probabilité réduite) de l'Etat, les collectivités territoriales (agglomérations, départements, régions) allouent chaque année des millions d'euros de subventions pour réduire une charge foncière ne permettant plus l'intégration d'opération mixte (accession à la propriété, locatif et locatif aidé).

    Le chapitre 2 a fait le choix de ne pas s'attarder sur les phénomènes interpellés par le foncier (disparition de terres agricoles utiles, étalement urbain, mitage, fermeture des paysages...), ou même l'importance de « travailler » cette question du foncier : par exemple, l'irréversibilité de l'imperméabilisation des sols, la réversibilité des documents d'urbanisme et donc des zonages, d'où les phénomènes de spéculation foncière, d'anticipation du changement d'usage du sol, etc. Enfin, ces miscellanées du foncier ont souhaité offrir un aperçu large et varié de la complexité de l'objet foncier lui-même : ses interactions avec les autres champs de l'aménagement et du développement du territoire, ses acteurs, ses cadres normatifs et ses outils.

    Partie I. Conclusion intermédiaire

    L'enjeu de cette première partie du mémoire était de réussir à appréhender l'objet foncier, malgré sa complexité (son imbrication à d'autres thématiques de l'aménagement et de l'urbanisme et sa transversalité). Aujourd'hui, s'il semble que le foncier bénéficie d'un regain d'intérêt par les pouvoirs publiques, cette remobilisation du foncier prend la forme tantôt d'une question posée au foncier, tantôt du problème foncier. En effet, « c'est bien souvent sous forme de question que le foncier est évoqué : question posée complexe, difficile, à résoudre.... pour améliorer la production de logements neufs, réduire les coûts des opérations... »117(*). Le « problème foncier » concerne ainsi des élus, des primo-accédants, mais aussi des natifs évincés par les prix d'un territoire devenu « trop » attractif par exemple.

    Aujourd'hui, le foncier est un problème saisi par les politiques publiques d'aménagement et de développement du territoire, mais également par les politiques sectorielles (agriculture, habitat, environnement, tourisme). Ainsi, dans toutes les dernières « grandes lois d'aménagement », un discours sur le foncier se construit : celui-ci vise à faire prendre conscience du « problème foncier », et ainsi, à rationnaliser la consommation d'espace utilisé pour le développement urbain. En somme, il s'agit d'un retour à une plus grande maîtrise foncière, dans un contexte général de retour à la maîtrise territoriale.

    A la manière dont la mission départementale drômoise d'observation de l'habitat le formule, cette première partie « propose des outils de connaissance et des données [...] sur le foncier, non pour résoudre la question mais contribuer à mieux la poser. A chaque élu d'utiliser au mieux ces informations pour avancer dans la résolution de la question foncière »118(*).

    Partie II.

    A la conquête du foncier alpin

    La première partie de ce travail a permis de poser les bases de la question foncière, dans sa complexité et donc dans tout son intérêt. Cette seconde partie s'attache à explorer deux dimensions du mémoire. Celles-ci ont permis de structurer un cheminement de réflexions tournées vers les enjeux fonciers du territoire des Alpes du Nord, et même pour ainsi dire, à la conquête du foncier alpin lui-même.

    Le chapitre 1 s'intéresse à étudier et à décortiquer deux cadres normatifs alpins. La Convention alpine et la Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord produisent un discours foncier que ce travail a permis de saisir. Dès lors, en tant que « cadres normatifs de l'aménagement », ces deux textes ont une posture particulière vis-à-vis de leur territoire de mise en oeuvre : quel est leur rôle respectif, leurs efficacités, leurs « péripéties »... Sur ce dernier aspect, la DTA des Alpes du Nord est apparue très vite intéressante : que révèle son actualité du printemps 2010 ? Concernant les controverses qui l'entourent, quelles sont-elles et d'où viennent-elles ? Que défendent-elles si précieusement sur le territoire des Alpes du Nord ? In fine, l'analyse de ces deux cadres normatifs alpins amène à engager une réflexion élargie au rapport au droit et à la norme sur ces territoires montagnards.

    Le chapitre 2 permet d'embrasser la seconde dimension de cette recherche appliquée. Centré sur l'étude de trois territoires des Alpes du Nord, ce chapitre questionne les initiatives locales mises en oeuvre en matière de foncier, plus que les enjeux visés eux-mêmes. En effet, la commune de Chamonix, le plateau du Vercors et le massif de Belledonne donnent à voir et à comprendre le sens et la forme d'une sorte de « quête de maîtrise » de la problématique foncière. L'approche est donc plus « pratique » : quels objectifs sont poursuivis, quels outils sont utilisés, quelles compétences sont mobilisées, auprès de qui, et quels leviers d'intervention sont actionnés, quelles thématiques sont mises à contribution... Ce sont à ces nombreuses questions que le travail de terrain a taché de répondre. En somme, tout l'enjeu a été d'identifier quel était le « problème foncier » que chaque territoire formule, et surtout comment les acteurs locaux ont travaillé à essayer de le résoudre localement (et continuent de le faire). Enfin, la prise de recul a permis de mieux voir ce que l'on pouvait en retirer plus globalement afin de diffuser ces pratiques intéressantes en matière de politique volontariste du foncier sur le territoire des Alpes du Nord.

    Chapitre 1 La Convention Alpine et la DTA des Alpes du Nord,

    deux cadres normatifs face au foncier alpin

    1. Quels discours sur le foncier alpin ?

    Le regard porte ici sur un périmètre limité et précis de l'espace alpin, les Alpes du Nord, qui est soumis à de multiples cadres normatifs. Deux cadres ont été choisis pour cette étude : la Convention alpine et ses protocoles qui s'appliquent à tout l'arc alpin, et le projet de Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord dont le périmètre d'application nous sert de périmètre d'études. A travers ces deux textes, l'objectif est d'extraire un discours, a priori univoque, en matière de foncier : ces constatations et ces recommandations peuvent constituer un cadre de référence pour des acteurs tels que la CIPRA France.

    1.1. Convention Alpine, protocoles d`application : quid du foncier ?

    Un ouvrage de référence, La Convention Alpine, Un nouveau droit pour la montagne ? 119(*), permet de faire le point sur la Convention alpine, sur sa portée juridique en tant que traité de droit international mais également sur sa portée plus opérationnelle pour les politiques d'aménagement et de développement du territoire alpin français. Il ne s'agit donc pas ici de revenir sur son caractère faiblement astreignant, « ces "normes molles" courantes dans le droit international »120(*) ni sur la présidence française de la Convention alpine (2007-2009) considérée par certains comme un échec car elle aurait pu relancer plus fortement la visibilité de la Convention alpine en France121(*).

    Toutefois, il est important de rappeler que la Convention alpine est le seul instrument juridique existant au niveau international pour le développement durable de l'espace alpin. Son approche globale intégrant les dimensions écologique, économique et sociale permet de prendre en compte l'interconnexion de l'espace alpin avec les espaces voisins. Au sein de ce dispositif, CIPRA occupe une place d'observateur officiel et est souvent considéré comme l'un des « metteurs en oeuvre » majeur du texte.

    Pour notre part, l'objectif est de poser la question du foncier à la Convention alpine ainsi qu'à ces huit protocoles d'application. Que disent-ils au sujet de la gestion de l'espace, de l'usage du sol alpin ? Pourrait-on produire une forme de protocole foncier en rassemblant les éléments distillés dans ces textes ? Afin de répondre à ces interrogations, la Convention alpine et ses huit protocoles ont été décortiqués en s'arrêtant sur chaque phrase (ou bout de phrase) qui pouvait nous parler de foncier, de manière plus ou moins directe.

    Par exemple, dans l'article 2 de la Convention alpine, alinéa i, il est écrit qu'en matière de tourisme et de loisirs, les Etats s'engagent à prendre des mesure appropriées « notamment par la délimitation de zones déclarées non aménageables» ; on considère que cette indication de la Convention alpine concerne la question foncière très directement car elle incite à un règlement d'urbanisme qui restreigne la constructibilité de certains espaces. En revanche, l'article 1er du protocole aménagement du territoire et développement durable est moins explicite et indique l'objectif suivant : « harmoniser l'utilisation de l'espace avec les objectifs et les exigences écologiques ». Sous l'angle du foncier, on peut comprendre qu'il faille prendre en compte le multi-usage de l'espace dans le respect des équilibres environnementaux.

    Par la redondance des formulations de certaines idées concernant la gestion de l'espace alpin, dix « mesures » extraites de la Convention alpine et de ses huit protocoles d'application ont été retenues ; elles pourraient permettre de structurer la rédaction d'un « protocole foncier » pour autant que cela puisse être envisagée, et même envisageable ! Ces dix mesures posent les jalons d'un discours en faveur d'une gestion du foncier qui intègre les principes du développement durable des Alpes.

    10 mesures pour construire une gestion foncière au sens de la Convention alpine

    1. Utilisation économe et rationnelle de l'espace

    2. Imperméabilisation limitée des sols et réversibilité potentielle de l'artificialisation

    3. Préservation (voir rétablissement) d'espaces naturels et agricoles

    4. Délimitation (zonage) et contractualisation de l'usage des sols

    5. Densité maîtrisée et densification urbaine

    6. Vision prospective, réservation de terrains pour usages futurs

    7. Equilibre (économique et social) des territoires et des populations

    8. Insertion paysagère et faible impact (qualitatif et quantitatif) du bâti sur les ressources

    9. Régulation des prix (mesures financières et fiscales)

    10. Observation et veille des espaces naturels et ruraux

    Figure 18. 10 mesures pour construire une gestion foncière au sens de la Convention alpine, N. Moyon 2010

    Ce travail permet de montrer que lorsque l'on parle d'agriculture de montagne, de forêt, de transport ou encore d'énergie dans un territoire donné, on ne peut ne pas parler de manière plus ou moins directe de foncier. Bien sur, la nature et le statut même de la Convention alpine, un traité de droit international, ne permet pas d'énoncer des règles opérationnelles, y compris en matière de gestion économe de l'espace alpin. Comme l'indique Philippe Yolka, il revient au législateur et au gouvernement de durcir ce droit pâteux, d'en opérer la catalyse pour passer du « proclamatoire » à « l'opératoire »122(*). C'est en ce sens que nous faisons le lien direct avec le projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord.

    1.2. DTA des Alpes du Nord et foncier

    « Les Directives territoriales d'aménagement (définies à l'article L 111-1-1 du Code de l'urbanisme) sont des documents d'urbanisme élaborés sous la responsabilité de l'État en association avec les collectivités territoriales et les groupements de communes compétentes en matière d'aménagement. Elles sont approuvées par décret en Conseil d'État. Ciblées en fonction de grands objectifs sélectionnés pour leur enjeu, elles ne traitent que des questions pour lesquelles les outils de droit commun sont insuffisants. Leurs orientations prescriptives encadrent les documents d'urbanisme de rang inférieur qui doivent leur être compatibles »123(*).

    Les enjeux sur lesquels se focalise la DTA des Alpes du Nord s'inscrivent sur une échelle prospective de long terme (20-25 ans), plus lointaine que celle des Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT) et Plans Locaux d'Urbanisme (PLU). L'échelle de réflexion élargie ainsi que le vaste périmètre retenu pour cette DTA permet d'aborder les problématiques posées dans leur globalité, y compris la problématique foncière. Mentionnée une douzaine de fois dans la version finale de la DTA des Alpes du Nord124(*), on peut dire sans crainte que les principes de la Convention alpine ont inspiré le contenu de ce document de planification française alpine. L'hypothèse d'un discours univoque au sujet du foncier entre la Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord semble donc se confirmer.

    La DTA des Alpes du Nord est organisée en quatre chapitres :

    ü Le premier chapitre est un diagnostic du territoire des Alpes du Nord : il s'agit de l'actualisation du Livre Blanc de 2005125(*) (40p.)

    ü Le second chapitre reprend les objectifs retenus par le Livre Blanc (8p.)

    ü Le chapitre 3 énonce les orientations prescriptives de la DTA (qui devait alors être opposable) (33p. + 1 annexe)

    ü Le dernier chapitre définit les mesures d'accompagnement et les recommandations (5p.)

    Pour saisir le « discours foncier » de cette DTA, trois versions ont été analysées : le projet au 15 juin 2009, puis le projet de novembre 2009 soumis à la consultation des personnes publiques associées et à enquête publique, et enfin la version finale de la DTA de Juillet 2010 après que l'avis de la commission d'enquête publique ait été rendu le 9 juillet dernier. La même méthodologie que celle de l'analyse de la Convention alpine a été appliquée au premier document, celui de Juin 2009. Seuls les éléments concernant le foncier ont ensuite fait l'objet d'une comparaison entre versions.

    Trois ressources se sont constituées à l'issue de ce travail :

    ü Tableau 1 : il s'agit d'une liste exhaustive des éléments évoqués ou développés au sujet du foncier alpin. Ils permettent de cerner l'objet foncier, ses enjeux et les connexions qui sont faites avec d'autres thématiques de la planification territoriale (le logement ou la gouvernance par exemple), ceci à travers le discours saisi dans la DTA.

    ü Tableau 2 : deux colonnes opposent d'une part le constat alarmant dressé par la DTA à, d'autre part, une vision promue pour le foncier des Alpes du Nord.

    ü Schéma 3 : on s'intéresse à l'évolution récente de « l'ambition foncière » du projet de DTA des Alpes du Nord de Juin 2009 à Juillet 2010. Il s'agit de voir si les mesures envisagées par la DTA en matière de foncier sont plus ou moins ambitieuses au regard du contenu initial du projet. L'ambition dont il est question est celle énoncée officiellement par l'Etat : « définir une stratégie cohérente et volontaire » et « faire le choix du développement durable pour les Alpes du Nord »126(*).

    1.2.1. L'objet foncier selon la DTA : un support, un corollaire, un levier

    Figure 19. Cerner l'objet foncier et ses enjeux à travers l'analyse de la DTA des Alpes du Nord, N. Moyon 2010

    Les éléments de l'objet foncier à travers la DTA Alpes du Nord

    o Imperméabilisation, atteintes qualitatives des sols, menace des risques naturels

    o Atteintes quantitatives des sols, consommation des espaces naturels et agricoles

    o Irréversibilité des impacts de l'artificialisation

    o En altitude et sur les versants : particularismes du foncier en station, enfrichement/reboisement des alpages

    o En vallée : urbanisation, résidentialisation et infrastructures

    o Polarisation urbaine, centralité urbaine

    o Renouvellement urbain, densification, y compris dans les stations de ski

    o Lien transport-urbanisme : densification autour des axes desservis en transport en commun

    o Problème du logement : social, permanent, saisonnier

    o Maîtrise des prix du foncier, ségrégation socio-spatiale : évincement des populations locales, des natifs, concurrence avec les résidences secondaires et les frontaliers à haut pouvoir d'achat

    o Rôle des pouvoirs publics : prospective, planification, dans les métropoles et les stations

    o Gouvernance, subsidiarité, échelles d'intervention sur le foncier

    o Question paysagère : destruction, uniformisation, fermeture des paysages, perte d'identité et du patrimoine culturel

    o Intégration paysagère, question de l'implantation du bâti

    o Préservation des espaces naturels et agricoles existants

    o Coupures d'urbanisation, continuum urbain les long des infrastructures et des grands lacs alpins

    o Connectivité écologique, trame verte et bleue, espaces de proximité, espaces ordinaires

    o Dualisme aménagement versus foncier, liens ville-montagne

    o Concurrence entre usages, conflits fonciers

    o Arbitrage, médiation, compensation

    Figure 20. Constat et orientations en matière de foncier selon la DTA Alpes du Nord, N. Moyon 2010

    « Un constat alarmant »

    « Ce qu'il est nécessaire de faire »

    o Imperméabilisation des sols, irréversibilité des impacts (quantitatifs et qualitatifs)

    o Préserver l'existant : ce qu'il reste d'espaces agricoles et naturels

    o Risques naturels accrus

    o Opérer des choix d'implantation pour les constructions nouvelles

    o Mitage de l'espace, résidentialisation

    o Lier transport et urbanisme pour la densification urbaine

    o Uniformisation des paysages

    o Organiser les polarités urbaines en maintenant ou créant des coupures urbaines

    o Continuum urbain le long des infrastructures et autour des grands lacs

    o Considérer la connectivité écologique et les espaces de proximité

    o Concurrence entre usages

    o Mettre en place une gouvernance qui s'appuie sur une vision prospective et une planification territoriale

    o Pression foncière, ségrégation socio-spatiale

    o Favoriser la médiation pour résoudre les conflits fonciers et assurer la pluriactivité du territoire

    o Problème du logement : permanent, social, touristique, secondaire

    o Densifier, réhabiliter, renouveler la ville sur la ville et la station sur la station

    o Déprise agricole : perte patrimoniale, identitaire, impact sur la biodiversité, sur les structures sociales

    o Insérer les projets d'aménagement dans le paysage

     

    o Construire ou renforcer les liens ville-montagne, vallée-versant

    Cette analyse du discours de la DTA des Alpes du Nord sur le foncier alpin propose une lecture de l'objet foncier suivant trois dimensions : « le foncier-support », « le foncier-corollaire » et « le foncier-levier ».

    Tout d'abord, la DTA met l'accent sur l'artificialisation croissante des sols, la diffusion de l'urbanisation et la mise en danger des espaces naturels, ruraux ou agricoles. On évoque le foncier plutôt de manière indirecte, il est toutefois fortement induit par le diagnostic dressé. En ce sens, le foncier est le support de ces phénomènes territoriaux qui « mettent en péril » cet espace alpin au sens de la DTA Alpes du Nord.

    Ensuite, cette consommation d'espace pour l'urbanisation ou les infrastructures a déjà des conséquences sur les populations et les territoires : ségrégation socio-spatiale, mitage de l'espace, accroissement des risques naturels et de l'exposition des populations, perte de paysages, de biodiversité, exacerbation des problèmes de logement... Le foncier est ici marqué par les effets pervers d'un mode d'aménagement et de développement territorial que la DTA des Alpes du Nord souhaite revoir en fixant un nouveau cadre de planification. Le foncier est donc un objet empreint des conséquences de pratiques antérieures de l'aménagement, il en est le corollaire. Ainsi, il n'est pas une donnée de départ puisqu'il n'est pas une question posée au territoire (au même titre que la polarisation urbaine par exemple), mais le foncier est de facto un problème qui se pose au territoire.

    Enfin, les conflits fonciers et les problèmes du logement imposent aux pouvoirs publics de considérer le foncier comme un point de blocage de l'action publique. Le foncier existe en soi et peut donc être le levier des politiques publiques qui daignent l'examiner comme une donnée de départ. L'objet foncier peut même constituée le support de sa propre politique publique, « une politique foncière publique volontariste et pérenne » que la DTA des Alpes du Nord recommande127(*).

    1.2.2. « L'ambition foncière » de la DTA des Alpes du Nord

    Figure 21. Evolution de « l'ambition foncière » de la DTA Alpes du Nord (Juin 2009 - Juillet 2010), N. Moyon 2010

    Les résultats de l'analyse de ce que l'on a appelé ici « l'ambition foncière de la DTA Alpes du Nord » à travers ce schéma peuvent surprendre128(*). En effet, il a été « admis » maintes fois que la DTA avait été « vidée de sa substance » au cours de son élaboration, ou encore, que sa volonté d'inscrire la planification du territoire alpin dans une démarche de développement durable avait été « revue à la baisse » (notamment sur les sujets les plus polémiques : tourisme et infrastructures). En somme, les éléments réduisant son ambition de départ auraient dû être prépondérants et ce n'est pas ce qui apparait dans le schéma ci-dessus. Il est donc important de rappeler deux caractéristiques fondamentales de notre analyse :

    1. L'ambition « mesurée » concerne uniquement la thématique foncière entendue au sens large, dans un souci de rationalisation de l'usage des sols.

    2. L'analyse porte sur une période extrêmement courte : de juin 2009 à juillet 2010, soit 13 mois pour un document dont les négociations ont débuté en 1996, il y a 14 ans !

    Ce qui est donc admis au sujet de la DTA Alpes du Nord n'est pas remis en cause. Cela suggère plutôt que les plus grosses « pertes d'ambition » du document se sont déroulées avant la période étudiée ci-dessus. Le compte-rendu du Comité technique des grandes collectivités du 26 février 2009 vient corroborer cette hypothèse (il y aurait probablement de nombreux autres documents similaires à trouver dans les archives de la DTA)129(*). Il indique qu'il est proposé « un assouplissement des prescriptions très strictes pour les grandes stations » à laquelle est répondue qu'une « réécriture va être étudiée, qui précisera les règles de construction dans l'enveloppe bâtie de la station ». Finalement, c'est une mesure prescriptive indiquant l'interdiction de consommer des espaces naturels supplémentaires dans les pôles touristiques qui disparait avant la version de juin 2009.

    De même en matière de transport, « il est précisé que le document remis en séance contient une erreur à la page 38 : le paragraphe débutant par "Ces principes s'appliquent aux projets routiers suivants" doit être supprimé, ces projets n'étant plus explicitement cités dans la DTA ». Cela nous indique qu'avant février 2009, et donc avant la version de juin 2009, un degré de détail sur l'application de ces principes a été supprimé. Depuis 1996, ce type de modification -pour des raisons diverses- ont dû impacter le degré d'ambition que l'on cherche à regarder aujourd'hui au sujet du foncier.

    Toutefois, les limites induites par la deuxième caractéristique permettent de préciser l'intérêt de cette analyse récente de l'ambition foncière de la DTA Alpes du Nord. Ce que montre ce schéma est justement très révélateur de ce qui se joue à travers cette DTA : contrairement à ce que l'on aurait présumé, les indices d'une plus grande ambition foncière l'emportent sur les suppressions d'éléments ambitieux (sept contre quatre) ; en définitive, la balance penche vers une plus grande ambition foncière. A cet instant, il ne s'agit pas de se tromper d'interprétation, l'hypothèse soutenue est la suivante. L'ambition foncière s'est vue renforcée grâce à deux facteurs explicatifs :

    1. La montée en charge du foncier dans les mentalités, chez les élus, au sein de la société civile, et donc dans les politiques publiques locales (tous les échelons territoriaux s'en sont saisi, y compris la région Rhône-Alpes) ; ce facteur n'est pas spécifique à la DTA des Alpes du Nord mais il l'impacte nécessairement.

    2. La forte mobilisation des « pro-DTA » durant les derniers mois de l'élaboration du projet s'est traduite par de nombreuses contributions, en amont et aussi lors de la phase d'enquête publique. Cette mobilisation s'est renforcée au regard des menaces incarnées par le projet de Loi Grenelle II sur le caractère opposable des DTA en cours d'élaboration.

    La DTA des Alpes du Nord s'est donc globalement « enrichi » de précisions en matière de foncier durant ces treize derniers mois, quantitativement au moins. Car en réalité, les « anti-DTA » ne se sont pas désintéressés du sujet, ils jouaient leurs cartes sur une autre scène de négociation : la scène politique et médiatique. Deux suppressions sont assez emblématiques de cette stratégie pour le sujet, de loin, le plus polémique : le tourisme.

    Plus « qualitativement », l'ambition foncière de la DTA des Alpes du Nord résidait dans des positions jusqu'alors inédite : d'une part, dire que dorénavant, le développement touristique devrait se faire sur le patrimoine existant dans « les paysages et ensembles bâtis les plus remarquables », et d'autre part, imposer explicitement l'interdiction d'une consommation supplémentaire d'espaces naturels dans les pôles touristiques (« les grandes stations » dans la version de juin 2009). C'est plutôt dans le poids de ces deux mesures, qui étaient alors prescriptives, que résidait l'ambition de la DTA alpine ; sur le plan symbolique, leur suppression est plus forte que l'ajout d'autres mesures « de moindre envergure ».

    1.3. Grille d'analyse (A) « Cadres normatifs et foncier »

    Comme cela a été détaillé en Partie I du mémoire, l'objectif de la grille d'analyse est de pouvoir confronter le cadre normatif à la pratique sur le territoire des Alpes du Nord. La grille d'analyse suivante correspond donc au « discours foncier » produit par la Convention Alpine, ses protocoles d'application et la DTA des Alpes du Nord130(*). Cette grille est un tableau à double entrée : les colonnes correspondent à des leviers d'intervention possibles pour agir sur le foncier, et les lignes sont les différentes thématiques en lien plus ou moins direct avec la question foncière ou la gestion de l'espace. Par exemple pour les leviers, la « préservation » est plutôt un levier dogmatique, idéologique. A l'inverse, le levier « choix d'urbanisation » correspond à la réflexion que l'on peut mener pour implanter le bâti sur une parcelle, à la limite de propriété pour économiser un maximum d'espace ou pour permettre une division foncière éventuelle par exemple. La grille d'analyse (A) est accompagnée d'un tableau qui permet de détailler les cases cochées de la grille : en effet, intégrer le texte à cette grille n'aurait pas été lisible. Ces deux documents suivent l'analyse ci-dessous.

    Cette première grille d'analyse (A) du discours foncier des cadres normatifs est complétée à 50% (36 mesures sur les 72 potentielles). Si ce premier constat semble difficile à interpréter, on constate toutefois que certains leviers (colonnes) ou certains thèmes (lignes) sont plus sollicités que d'autres. Ainsi, le discours foncier produit par les deux cadres normatifs étudiés se caractérise de la façon suivante :

    Par des leviers d'intervention privilégiés :

    ü La préservation, un mot d'ordre qui semble être bien intégré au discours sur le foncier.

    ü La polarisation urbaine, pour structurer et hiérarchiser les Alpes du Nord, surtout le long du Sillon alpin.

    ü La gouvernance, montre la nécessité de coordonner les multiples acteurs de la question foncière, à différentes échelles territoriales (la gouvernance privilégiant cette de l'intercommunalité ou du basin de vie).

    ü La densification, est devenu un mot d'ordre pour rationnaliser l'utilisation de foncier et économiser le foncier naturel et agricole.

    Par des thématiques d'action identifiées :

    ü Le paysage et le cadre de vie sont deux dimensions assez larges qui permettent de mobiliser potentiellement presque tous les leviers d'intervention sur le foncier.

    ü L'étalement de l'urbanisation, en ville comme en station de montagne, est un phénomène à rationnaliser par une maîtrise accrue du foncier.

    ü L'agriculture, sa préservation et son rôle dans la structuration de l'espace par exemple montre la nécessité d'intégrer cet enjeu aux questions de développement urbain et métropolitain.

    En revanche, les deux cadres normatifs ne proposent peu -voire pas- de mesures dans les domaines suivants : les leviers « participation », « solidarité territoriale » et « transport-urbanisme » sont très faiblement actionnés par leur discours foncier, de même que le thème de la ségrégation socio-spatiale n'est pas mis en lien avec un levier précis d'intervention foncière, il reste encore dans le champ des discours politiques et n'est pas -ou faiblement- entré dans le champ de l'opérationnel.

    Grille d'Analyse (A)

    « Cadres normatifs et foncier »

    Figure 22. Grille d'analyse (A) "Cadres normatifs et foncier", N. Moyon 2010

    Détail de la Grille d'analyse (A)

    « Cadres normatifs et foncier »

    A. Préservation

    1. Limiter le développement de l'urbanisation en fonction des capacités d'alimentation en eau potable et d'assainissement.

    2. La préservation de l'urbanisation à l'égard de ce risque d'inondation revêt une importance stratégique vis-à-vis de l'adaptation du territoire aux effets du changement climatique.

    4. Pour l'ensemble des espaces urbanisés ou non, les documents d'urbanisme protégeront la qualité et les conditions de perception des paysages (préservation des points de vue et cônes de vue significatifs).

    5. Limiter l'extension de l'urbanisation en front de lac.

    8. Le principe général de préservation de terres agricoles en vallée devra être respecté.

    B. Choix d'urbanisation

    1. Réduire les atteintes d'ordre quantitatif et qualitatif causées aux sols, notamment en limitant l'imperméabilisation des sols.

    2. Aucun permis de construire ne doit être accordé dans les zones instables.

    4. Privilégier des modes de réalisation de logement qui permettent de contribuer à la qualité des paysages (qualité architecturale).

    8. Les pôles complémentaires se situent dans les vallées fragilisées par une urbanisation en continu le long des infrastructures de transport notamment, qui menace les espaces agricoles et ruraux.

    C. Polarisation urbaine

    1. Les espaces de nature jugés ordinaires (cours d'eau, des zones humides, des espaces boisés, des espaces non bâtis de fond de vallée) assurent des fonctions de continuités naturelles et de mise en communication avec d'autres espaces.

    3. Les pôles locaux doivent être confortés afin de jouer un rôle de polarisation du développement par rapport aux autres villages, et constituer une alternative à la dispersion urbaine.

    4. Pour enrayer la déstructuration des territoires et les atteintes aux milieux naturels et au paysage, la croissance sera organisée de façon polarisée.

    5. Les pôles complémentaires s'appuient souvent sur plusieurs entités urbaines distinctes dont il convient de maîtriser la croissance afin d'éviter le développement d'un continuum urbain.

    8. Les coupures d'urbanisation contribuent à conforter les terres agricoles et massifs boisés, et à maintenir les continuités biologiques.

    D. Participation

    4. Agir dans un cadre concerté en conciliant les objectifs de préservation des espaces naturels et les mesures de développement touristique, dans une optique de « développement durable ».

    8. Agir dans un cadre concerté et associer les acteurs représentatifs des différentes dimensions de la gestion des espaces : collectivités, aménageurs, gestionnaires touristiques, exploitants agricoles et forestiers, administrations, gestionnaires d'espaces protégés, associations.

    E. Solidarité territoriale

    4. Les collectivités ont un intérêt à adopter des stratégies communes autour des problématiques qui les préoccupent, dont la préservation des paysages, des sites naturels, par la gestion de manière contractuelle d'un patrimoine naturel, rural et culturel...

    7. Outre l'exigence de solidarité, le droit au logement est aussi un enjeu d'une part, d'aménagement du territoire et de développement durable et, d'autre part, de développement économique.

    8. Des structures de coopération entre espaces urbains et milieux ruraux sont nécessaires et doivent se développer autour de projets communs appuyés sur la complémentarité de ces espaces, en matière de valorisation agricole notamment.

    F. Gouvernance

    2. Dans les Chartes des parcs naturels régionaux et nationaux qui constituent le coeur d'un projet de territoire, l'ambition d'un développement durable pourrait être renforcée en minimisant les risques.

    3. Cette échelle plus large vise à limiter le "grignotage" des espaces naturels sensibles par la réalisation d'une succession de projets ponctuels.

    4. La gestion de l'espace et la maîtrise foncière par l'accompagnement des actions entreprises par les EPFL, en articulation avec celle des SAFER sur les espaces agricoles, et celles du conservatoire du Littoral ou des conservatoires des espaces naturels.

    5. Effectuer un arbitrage fort entre la part et le type de développement à orienter dans les villes et la part à orienter en périphérie.

    7. Ces politiques locales de l'habitat et du foncier sont très étroitement liées, elles ne pourront être mises en oeuvre que grâce à une forte mobilisation et une coopération de tous les acteurs de l'aménagement et du logement.

    G. Prospective

    1. Favoriser une vision prospective et concertée de la valorisation de ces espaces naturels qui sont espaces de projets, eux aussi.

    4. Les Parcs doivent conforter leur caractère exemplaire et innovant en matière de développement durable et gérer la pression urbaine en évitant qu'elle ne banalise leurs paysages.

    7. Pour atteindre les objectifs fixés pour le logement, cela nécessite une politique foncière anticipative conciliant le double impératif de gestion de l'espace et de régulation des tensions.

    8. La vocation agricole de certains secteurs doit être affichée dans les documents de planification.

    H. Densification

    1.2. Pour limiter les impacts des domaines skiables sur les espaces naturels et les paysages, les restructurations de ces domaines se feront à l'intérieur de l'enveloppe existante du domaine skiable : elles devront contribuer à améliorer la qualité de l'offre et la sécurité, sans incidence notable sur les milieux naturels, les paysages et la ressource en eau.

    3.4.5. Concernant les paysages, la maîtrise et la réduction des impacts de l'urbanisation et des équipements de toutes natures supposent le renforcement des bourgs-centres plutôt que l'extension urbaine et périurbaine, et l'inscription des installations nouvelles dans les périmètres déjà urbanisés.

    6. Dans les pôles urbains majeurs, l'objectif de constructions de logements susceptibles de répondre aux nouveaux besoins doit être atteint, il comportera 25% de logements sociaux au moins.

    7. Privilégier des modes de réalisation de logement qui permettent d'économiser l'espace: formes d'habitat économe d'espace, renouvellement urbain dans les agglomérations.

    I. Transport-Urbanisme

    3. En dehors des parties agglomérées des pôles urbains majeurs et complémentaires, les créations de nouveaux diffuseurs ne sont pas autorisées par l'Etat sauf exception.

    5. Les extensions urbaines qui s'avéreraient nécessaires doivent se réaliser autour de l'offre de transports collectifs existante ou à développer.

    Figure 23. Détail de la grille d'analyse (A), N. Moyon 2010

    2. La DTA des Alpes du Nord ou le parcours du combattant

    2.1. 14 années de procédure : rapide retour historique

    Le 4 février 1995, la Loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT, dite « Loi Pasqua ») instaure un nouvel instrument juridique d'aménagement du territoire, les directives territoriales d'aménagement, définies à l'article L 111-1-1 du Code de l'urbanisme. L'année suivante, cinq territoires expérimentaux sont retenus pour la mise en place de ce nouvel outil de planification étatique, une courte étude préalable est lancée, toutefois, le périmètre définitif de la DTA des Alpes du Nord ne sera institué qu'en mai 2000.

    www.dta-alpesdunord.fr

    Plusieurs étapes se succédent durant ces quatorze années, la DTA Alpes du Nord traversant des passages à vide, mais les services régionaux de l'Etat persévèrent puisque « dans un contexte de morcellement institutionnel et d'émiettement des compétences, il appartient à l'Etat et aux collectivités de définir une stratégie cohérente et volontariste pour assurer un développement durable du territoire des Alpes du Nord » 131(*).

    Le 18 décembre 2003, le CIADT132(*) décide de l'élaboration d'un Livre Blanc. Ce Livre Blanc des Alpes du Nord élaboré par la DRE Rhône-Alpes est soumis à la consultation des collectivités locales et autres personnes publiques associées (PPA) en 2005, il constitue la base de la DTA (chapitre 1 et 2) et élabore le diagnostic territorial ainsi que les six orientations retenues133(*) :

    ü Organiser la métropole du sillon alpin dans un système multipolaire,

    ü Garantir le droit au logement, par une offre diversifiée et accessible à tous,

    ü Préserver un système d'espaces naturels et ruraux et les ressources naturelles et patrimoniales,

    ü Organiser la poursuite du développement économique, en s'appuyant notamment sur les pôles de compétitivité,

    ü Pérenniser le potentiel touristique,

    ü Garantir un système de transport durable pour les liaisons internes et internationales.

    Le CIACT134(*) du 6 mars 2006 approuve le Livre Blanc des Alpes du Nord et donne mandat au préfet de région de poursuivre l'élaboration de la DTA. La DRE Rhône-Alpes continue son travail de rédaction avec l'assistance des DDE concernées, et en parallèle, une évaluation stratégique environnementale (ESE) est réalisée par un cabinet privé. Cette évaluation est conçue dans une logique de démarche itérative, qui permet de faire évoluer le projet de DTA au fur et à mesure des analyses, en privilégiant les orientations les plus respectueuses de l'environnement. Sauf que l'évaluation a été lancée fin 2008 et a débutée en février 2009, alors même que le Livre Blanc et les orientations (chapitre 3 de la DTA) étaient déjà pour l'un validé, pour les autres en rédaction avancée. De fait, ce calendrier décalé a limité les possibilités d'itération en cours de rédaction de la DTA des Alpes du Nord 135(*). La version finale de ce rapport environnemental de la DTA est rendue le 5 octobre 2009. Tardivement donc, des informations très intéressantes, notamment au sujet des « difficultés d'accès à l'information » sont livrées, notamment sur le thème qui nous préoccupe, l'occupation des sols136(*).

    2008-2009 seront deux années charnières dans lesquelles la DTA des Alpes du Nord entre dans la dernière ligne droite. Un calendrier serré enchaîne phase de concertation, comité de pilotage, puis phase de consultation137(*).

    Phase de concertation
    Réunions des personnes publiques associées, Réunions techniques avec les grandes collectivités, Réunions territoriales d'information

    Octobre 2008 - Avril 2009

    Comité de pilotage
    Bilan de la concertation, présentation du projet de DTA et de l'évaluation stratégique environnementale

    28 Avril 2009

    Phase de consultation
    Saisine des PPA, consultation des Etats voisins et des régions voisines

    15 Novembre 2009 - 15 Février 2010

    Enquête publique

    9 Avril - 21 Mai 2010

    Phase d'approbation
    Validation et signature du décret de la DTA en Conseil d'État

    Juin - Novembre 2010

    En un peu plus d'un an et demi, le projet de DTA doit être modifié pour tenir compte de toutes ces contributions, dont le rapport environnemental138(*), l'avis de l'Autorité Environnementale139(*) et les travaux de la commission d'enquête publique. Ainsi, les questions de calendrier ont caractérisé l'élaboration de la DTA Alpes du Nord, longue et laborieuse ; mais peut-être est-ce le destin de ce type de document étatique réalisé à une échelle inédite.

    2.2. Enquête publique et Grenelle II : le combat de l'opposabilité

    La phase d'enquête publique s'est déroulée du 9 avril au 21 mai 2010 au sein du périmètre de la DTA et la commission d'enquête publique a rendu son rapport complet et « ses conclusions personnelles et motivées » (soit deux documents140(*)) le 9 juillet dernier. La lecture du rapport complet est vivement recommandée pour saisir avec précision le jeu d'acteurs qui s'est mis en place autour de cette DTA alpine puisque ce document organisé en six chapitres expose :

    1. Les généralités du projet de DTA des Alpes du Nord

    2. La réalisation pratique de l'enquête publique

    3. Les avis émis par les personnes publiques lors de la concertation, commentés par la Commission

    4. Les observations du public déposées dans les registres, commentées par la Commission

    5. Les demandes de la Commission et les réponses apportées par le SGAR141(*)

    6. L'analyse et l'évaluation du projet par la Commission

    Parallèlement à cette démarche, le projet de loi portant engagement national pour l'environnement dit « Grenelle II », adopté par le Sénat en première lecture le 8 octobre 2009142(*), est discuté à l'Assemblée Nationale du 4 au 11 mai 2010. Le projet de Loi Grenelle II est donc adopté par l'Assemblée et, dans le même coup, il vient de modifier la portée juridique de la DTA des Alpes du Nord en pleine phase d'enquête publique.

    En effet, la Loi Grenelle II prévoit, article 13143(*), la mise en place de « Directive territoriale d'aménagement et de développement durables » qui remplace les actuelles « Directives territoriales d'aménagement ». Les nouvelles dispositions des « DTADD » changent, entre autre, la portée juridique du document qui perd son opposabilité. Toutefois, une disposition proposée au Sénat par M. Repentin144(*)(sénateur savoyard, groupe socialiste), avait précisé que les procédures de DTA en cours (celle des Alpes du Nord étant la seule) gardaient l'ancien régime des DTA, donc opposable.

    Ce qui s'est joué la nuit du mercredi 5 au jeudi 6 mai à l'Assemblée Nationale a fait basculer la DTA des Alpes du Nord en « DTADD ». L'amendement « n°208 rectifié » déposé par le député Michel Bouvard145(*) revient précisément sur la « disposition Repentin » mais c'est finalement celui d'Yves Cochet (député Vert, Paris) qui a déjà enterré l'opposabilité de la DTA Alpes du Nord. L'amendement d'Yves Cochet « est déjà satisfait par l'alinéa 16 de l'article 5 qui précise que : « Si leur adoption intervient après la publication de la présente loi, elles [les DTA] sont soumises aux dispositions applicables aux directives territoriales d'aménagement et de développement durable »146(*). L'amendement de Michel Bouvard est donc retiré sous la garantit d'un calendrier favorable à l'adoption d'une « DTADD des Alpes du Nord » non opposable.

    Alors que les élus locaux « Vert et Gauche » ont défendus l'opposabilité du document aux côtés des associations de protection de l'environnement, leurs parlementaires s'y sont opposés, se rangeant aux côtés des avis des élus savoyards et haut-savoyards, « anti-DTA » de première heure. Presque plus personne donc pour défendre le maintien d'une DTA des Alpes du Nord opposable. En somme, tout s'est réduit à des questions de calendrier, comme l'illustre ci-contre l'extrait du compte-rendu des débats de l'Assemblée à ce sujet147(*).

    L'opposabilité de la DTA Alpes du Nord, une question de calendrier

    Compte rendu intégral - Deuxième séance du mercredi 5 mai 2010

    Article 5 - Amendement n°208

    o M. le président : Nous en venons donc à l'amendement n° 208 rectifié.

    Vous avez la parole, monsieur Bouvard.

    o M. Michel Bouvard [Savoie, UMP]: Cet amendement avait été déposé indépendamment de l'adoption d'un amendement de M. le rapporteur qui est venu préciser le statut des DTA n'ayant pas été publiées au moment de la promulgation de la loi. Cela constitue un immense progrès et je salue à la fois l'initiative du rapporteur et la position de la commission.

    Il n'en reste pas moins qu'un problème risque de se poser si une DTA en cours d'élaboration se trouvait à être publiée juste avant la publication de la loi, ce qui peut tenir à des délais liés, par exemple, à son passage devant le Conseil constitutionnel.

    Cet amendement a pour but d'appeler l'attention de notre assemblée sur le problème qui se pose dans les zones de montagne.

    Comme dans le reste du territoire, nous sommes confrontés à la problématique des DTA dans son ensemble. Les DTA ont été créées avec la loi de 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire dont Patrick Ollier se souvient bien.

    o M. Christophe Caresche [Gironde, socialiste]: Depuis, M. Ollier est devenu un élu de la plaine !

    o M. Patrick Ollier [Hauts-de-Seine, UMP, président de la commission des affaires économiques]: Mais la montagne est restée dans mon coeur !

    o M. Michel Bouvard : Quant aux SCOT, ils ont été créés avec la loi SRU. Il s'agit de documents opposables qui ont un cadre plus large que les PLU.

    Il existe encore les prescriptions particulières de massif, créées avec la loi de 1985 dite loi montagne. À ce jour, ces dispositions ne sont pas activées ; mais elles pourraient l'être.

    Ainsi, sur un même territoire, nous pourrions disposer de quatre documents opposables, ce qui entraînerait de nombreux contentieux. Un récent décret réformant les unités touristiques nouvelles a considéré que ces unités ne sont plus applicables dès lors que le SCOT est suffisamment précis et contraignant.

    Nous attendons qu'il soit clairement indiqué qu'il n'y a pas lieu d'avoir un nouveau document opposable dans les territoires de montagne.

    o M. François Brottes [Isère, socialiste] : Il y en a assez !

    o M. Michel Bouvard : En clair, nous n'avons pas la totale certitude que la DTA en cours d'élaboration pourrait être publiée après le vote de la loi.

    Si le Gouvernement m'indique que cette DTA n'a aucune chance d'être publiée avant le vote de la loi, je retirerai l'amendement n° 208 rectifié. Mais si le doute persistait, je serais obligé de le maintenir afin que nous ne nous retrouvions pas, sur un même territoire, avec quatre documents potentiellement opposables.

    o M. Hervé Gaymard [Savoie, UMP] : Très bien !

    o M. le président : Quel est l'avis de la commission des affaires économiques ?

    o M. Michel Piron, [Maine-et-Loire, UMP, rapporteur pour avis] : Je me réjouis d'avance de la réponse du Gouvernement. Comme je ne partage pas les doutes de M. Bouvard, je prends le pari de la sérénité en émettant un avis défavorable qui devrait être confirmé par les certitudes du secrétaire d'État.

    o M. Christophe Caresche : Le secrétaire d'État peut-il le dire ?

    o M. le président : Quel est l'avis du Gouvernement ?

    o M. Benoist Apparu [secrétaire d'État] : « Oui, monsieur Caresche, je peux le dire !

    Monsieur Bouvard, nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer ensemble de sujet.

    Je vous confirme, et c'est inscrit noir sur blanc dans le texte de loi, que toutes les DTA non approuvées à ce jour mais en cours d'élaboration deviendront des DTADD. Il se trouve qu'une seule est en cours d'élaboration, celle qui couvre des zones de montagne, ce qui n'a, bien sûr, rien à voir avec l'amendement que vous avez déposé. (Sourires.) Pourquoi ces sourires ?

    La DTA en cours d'élaboration dans les Alpes ne paraîtra évidemment pas avant la publication de ce texte de loi. Ce sera donc bien une DTADD. À la lumière de cette explication, je vous propose donc de retirer cet amendement ».

    Figure 24. L'opposabilité de la DTA des Alpes du Nord, une question de calendrier, N. Moyon 2010

    La Commission mixte paritaire a examiné le 16 juin les articles restant en discussion à l'issue du passage devant l'Assemblée du projet de loi Grenelle II, dont l'article concernant les DTADD. Le caractère opposable de la DTA des Alpes du Nord n'a finalement pas résisté aux amendements du projet de Loi Grenelle II ; celle-ci a été promulguée le 13 juillet 2010148(*).

    Cependant, le public qui s'est manifesté dans le cadre de l'enquête publique, ainsi que la Commission d'enquête publique elle-même, n'ont pas manqué de commenter cette modification du statut juridique de l'objet d'enquête : « le public qui s'est exprimé n'a pas apprécié le vote par les parlementaires [...]. Pour sa part, la Commission d'enquête publique estime que l'Etat a eu une attitude assez désinvolte en modifiant la loi pendant l'enquête publique »149(*). Le débat parlementaire aurait pu être différé, ou alors la procédure d'enquête arrêtée, le projet de DTA des Alpes du Nord étant soumis à de nouvelles règles. « Que faut-il faire ? Continuer ou pas l'enquête publique ? Si l'on continue, cela est-il vraiment utile ? »150(*). Sans consigne à ce sujet, la Commission a mené l'enquête à son terme.

    3. L'acceptabilité de ces cadres normatifs alpins

    Au vue des derniers rebondissements dans l'élaboration de cette DTA des Alpes du Nord, notre approche du foncier alpin s'est recentrée sur le rapport au droit et à la norme en aménagement. Il s'agit de voir en quoi la DTA et la Convention alpine sont des cadres normatifs dont la nature même rend difficile l'acceptation (voir l'appropriation) par les territoires qu'ils encadrent. Comme en témoigne la Commission d'enquête de la DTA, « l'enquête publique aurait dû constituer un temps fort dans la préparation finale du projet [...]. Mais la complexité du dossier, la diversité des thèmes traités et l'étendue du territoire ont rendu difficile la compréhension du projet »151(*). C'est une première piste de réponse. En outre, une différence de mobilisation du public est perceptible, au moins géographiquement : on comptabilise 160 contributions en Haute-Savoie, contre 258 en Savoie et 229 en Isère152(*).

    3.1. Un objet et un cadre « difficilement audible »

    La Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord produisent un même discours sur le foncier alpin : la question foncière y est protéiforme car elle mobilise d'autres thématiques (logement, tourisme, biodiversité...). En somme, l'objet foncier est déjà « difficilement audible » en soi, mais la nature même de ces cadres normatifs, leur statut et leurs modalités d'élaboration puis d'application, représente un obstacle supplémentaire à cette audibilité de l'objet foncier par les acteurs locaux. On peut supposer que certains acteurs locaux alpins qui se sont vigoureusement opposés à cette DTA (essentiellement savoyards et hauts-savoyards, proches des milieux économiques dont celui du ski), se sont focalisés sur la forme et sur le fond de la démarche -ce que cela symbolise ou cristallise- plus que sur son contenu, c'est-à-dire le discours réellement porté par la DTA Alpes du Nord.

    Bien sur, le discours porté par un cadre normatif compte beaucoup mais c'est peut-être le sujet abordé et son degré d'intelligibilité qui suscite plutôt la polémique. Dans le cadre des différents protocoles d'application de la Convention alpine, ce sont ceux concernant le transport et le tourisme qui ont été les plus durs à négocier et à faire adopter ; des thématiques polémiques s'il en est, qui mobilisent notamment de puissants lobbies. Concernant la DTA des Alpes du Nord, aucune des personnes rencontrées n'a indiqué avoir une connaissance précise du contenu du document, et peu d'entre elles lui ont vraiment porté un intérêt, ce qui va dans le sens du commentaire de France Nature Environnement au sujet du Grenelle II : « un texte de loi n'a jamais été une baguette magique »153(*).

    De plus, la thématique du « tourisme durable » indiquée par la DTA apporte un autre éclairage à cet obstacle supplémentaire qu'induit le cadre normatif154(*). L'hypothèse du basculement d'un « paradigme du développement » vers un « paradigme de la durabilité » dans les vallées alpines peut permettre d'expliquer les divergences au sujet de la DTA. Dans le premier paradigme selon lequel « c'est la station qui fait le territoire », le cadre normatif vient s'opposer à une logique de station, tandis que pour le second paradigme où c'est « le territoire qui fait la station », le cadre normatif tend à incarner cette notion de durabilité portée par une logique territoriale. Ainsi l'ANMSM155(*) s'oppose-t-elle dans sa motion, à toutes les prescriptions du chapitre de la DTA « Promouvoir un tourisme respectueux de l'environnement » et regrette que les règles supplémentaires d'encadrement de l'urbanisation touristique remettent en cause la libre administration des collectivités locales156(*). La région Rhône-Alpes quant à elle s'ancre un peu plus dans cette logique territoriale en soutenant la DTA.

    3.2. Une DTA directive

    Comme son nom le rappelle, la Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord est une directive, « la DTA est donc d'abord un document d'affichage des politiques de l'Etat »157(*). Le caractère directif d'une directive explique une majeure partie des oppositions rencontrées par la DTA alpine : parfois qualifiée de « diktat » de l'Etat, la DTA provoque une réaction urticante auprès d'élus locaux dont l'opposition quasi-systématique à toutes procédures impulsées par l'Etat est globalement reconnue. Cette logique est peut-être exacerbée dans les territoires de montagne. L'existence même d'une DTA sur un territoire alpin est source de conflits. Dans un périmètre particulier et précis, elle pointe du doigt les dysfonctionnements d'un territoire, lui dit qu'il ne respecte pas les règles du jeu ou même certaines lois (Loi Littoral par exemple), et de part son échelle la DTA rend audible une gestion territoriale que l'Etat souhaite encadrer plus qu'ailleurs.

    Déjà en 1988, un article de Jacques Manesse posait la question fatidique, Montagne : qui décide ?158(*). L'auteur relate que sur le terrain, tout encadrement administratif ou réglementaire est perçu comme une entrave au développement, voire, de façon plus idéologique, comme une atteinte à la liberté. Mais avant les lois de décentralisation, « la bonne foi et la bonne conscience des "victimes" pouvaient, jusqu'alors, et sans risque, s'exprimer dans un rituel sans surprise, et politiquement rentable, en dénonçant le centralisme et la bureaucratie »159(*). Encore aujourd'hui, cette idéologie du « on ne veut pas que les parisiens nous disent quoi faire chez nous » dont l'auteur parle perdure dans certaines vallées alpines, c'est donc plutôt en toute logique que la DTA a perdu son caractère opposable. Dans le cadre de la mise en oeuvre d'une autre directive, la Directive « Habitats Faune Flore » dite « Habitats » ratifiée par la France en 1996, l'Association nationale des élus de montagne (ANEM) avait déposé un recours au Conseil d'Etat en 2001 : « en 1998, une centaine de maires avaient déjà contesté cette limitation de fait de la libre administration de leur territoire »160(*).

    Bien sur, ces oppositions ne sont pas sans paradoxe car l'on peut considérer que le produit économique alpin d'aujourd'hui, le ski, est entièrement le fruit d'une politique d'Etat, en l'occurrence le Plan neige. En revanche, comme le remarque J. Manesse, les élus locaux « montent à Paris » pour solliciter l'Etat contre la fermeture d'une école ou d'autres services publiques (bureaux de poste et hôpitaux par exemple), ou encore l'arbitrage de conflits locaux.

    L'exemple de la Vanoise développé par Françoise Gerbaux161(*), « cas d'école de la mise en cause de l'administration traditionnelle territoriale par des conflits locaux » illustre la complexité de la gestion de l'espace montagnard. Si du point de vue temporel, il apparait logique que l'Etat, par sa permanence, garantisse le maintien des valeurs patrimoniales d'un « territoire d'exception » tel qu'est décrit le périmètre de la DTA des Alpes du Nord, du point de vue spatial cette préoccupation rentre inévitablement en conflit avec une logique locale de gestion pour laquelle l'espace constitue plutôt une opportunité de valorisation économique.

    L'arbitrage de l'usage des sols traduit ainsi une opposition entre « nationale ou local », « protection ou développement » même si ces catégories ne sont pas aussi tranchées dans la réalité. La DTA alpine le répète d'ailleurs à plusieurs reprises et encourage à dépasser cette vision réductrice mais ces termes symboliques ont occulté ce qui devait être un réel objet de discussion. Les débats des parlementaires autour de l'article 5 sur les nouvelles DTADD ont pris parfois la tournure d'un affrontement quasi-religieux : la dénonciation d'un Etat qui impose sa vision, ses outils et ses règles du jeu en matière d'aménagement du territoire, une « logique de recentralisation » pour certains, ou encore un « Etat bolchévique » pour d'autres. Un débat qui met en avant la question permanente du partage des compétences territoriales et du rapport au droit et à la norme pour les collectivités, dans un contexte de réforme des collectivités territoriales.

    Comme l'écrit ainsi Catherine Bersani dans son article au titre évocateur, La DTA ou le retour de l'Etat gendarme162(*), « la relation de l'Etat avec les élus est bien au coeur du débat, et plus largement le droit des citoyens à dire comment ils veulent habiter leur pays, et à vivre selon ce souhait. La démocratie est donc l'enjeu par excellence de la DTA. Assumer cette vocation impliquera encore beaucoup de travail [...] ».

    Toutefois, l'opposabilité de cette DTA qui pouvait représenter un infléchissement supplémentaire des pouvoirs et des compétences locales n'a pas empêcher la région Rhône-Alpes de soutenir la démarche. Malgré le fait que cet échelon territorial monte en puissance et en capacité d'ingénierie territoriale notamment, la région a admis et appuyé la nécessité d'une intervention d'Etat en matière d'aménagement du territoire sur cet espace des Alpes du Nord. Sans doute que l'opposabilité induit alors une protection contre les pression locales plutôt qu'une contrainte dans l'exercice de ses pouvoirs.

    3.3. Des montagnards, coupables désignés

    « Nous, élus parfois rudes de ces territoires rudes, ne sommes ni des accros du bulldozer, ni les tenants de la sanctuarisation de nos régions, mais les garants d'une démarche de développement que nous souhaitons harmonieux »163(*). Si ces propos paraissent peut-être exagérés ou hors de propos, ils ne sont toutefois dénués de raison. L'image de certains montagnards (surtout proches du milieu du ski), coupables et irresponsables, perdure depuis longtemps dans les esprits et risque de perdurer avec la montée des préoccupations environnementales dans les massifs alpins comme ailleurs. Aujourd'hui, les associations de protection de l'environnement se rangent d'ailleurs souvent derrière cette vision « initiée » par l'Etat il y a bien longtemps.

    Dans Les Faiseurs de montagne164(*), Bernard Debarbieux et Gilles Rudaz illustrent au XIXe siècle avec les politiques de reboisement cette image stéréotypée du montagnard rebelle qui s'est construite depuis le siècle des Lumières. Ils indiquent ainsi que « si l'habitant des hauteurs est parfois idéalisé sous cette image du "gardien de la montagne", les auteurs et les forestiers les décrivent le plus souvent sous les traits, moins avantageux, du coupable et de l'irresponsable ». Les ingénieurs de l'Etat dénoncent ainsi les droits communaux, les prélèvements de bois de consommation courante, le pacage des moutons et des chèvres en sous-bois, la transhumance aux densités excessives... et « Bernard Lorents, le premier directeur de l'Ecole nationale des Eaux et Forêts de Nancy, s'insurge lors d'une tournée en montagne en 1840 : est-il tolérable que des propriétaires de la montagne y introduisent une culture et un mode de jouissance qui portent la désolation dans les vallées ? ». Des accusations comparables sont proférés en Suisse ; en 1849, le responsable des forêts du canton de Berne s'exclame : « si le malheur qui frappe les montagnes déboisées se limitait à ces régions, on aurait pu dire qu'il sanctionnait l'imprudence coupable de leurs habitants [...]. Mais ce malheur touche jusqu'aux vallées et aux plaines fertiles ».

    Les lois de la seconde moitié du XIXe siècle priveront alors ces montagnards irresponsables de droits séculaires et les évinceront de la gestion de leurs ressources naturelles. On ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec la démarche d'une DTA alpine entreprise en 1996, même si, à bien des égards, les proportions des injonctions du XIXe sont sans commune mesure avec celles de la DTA des Alpes du Nord. La force symbolique d'une politique interventionniste est toutefois bien présente.

    Ainsi, cette image des montagnards n'est pas récente, et si à cette époque on évoquait la résistance de quelques « foyers d'agitation dans certaines petites républiques de pasteurs cachées dans les replis des Alpes »165(*), aujourd'hui, on pointe du doigt des vallées et des élus savoyards et hauts-savoyards, à tort ou à raison166(*).

    3.4. Ces cadres normatifs, des tentatives de gouvernance environnementale

    La Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord sont considérées d'emblée comme des cadres normatifs, plus ou moins précis ou concrets, qui viennent contraindre leur territoire d'application. On peut aussi montrer que ces outils de planification fournissent de nouveaux cadres de réflexion qui servent le territoire ; pour Philippe Yolka par exemple, la Convention alpine « fournit un cadre de réflexion commun pour rompre avec l'esprit de vallée »167(*).

    Dans cette perspective, la gouvernance environnementale propose une compréhension théorique de ce changement de regard sur ces deux cadres normatifs. Dans son article sur le sujet, Olivier Barrière168(*) indique que l'objectif de la gouvernance environnementale est « de parvenir à une régulation des pratiques des acteurs en répondant à un souci de responsabilisation, mais également à la nécessité de canaliser leurs comportements en limitant leur marge de manoeuvre, afin de circonscrire les stratégies des acteurs dans un cadre », le tout se construisant sur deux fondamentaux : les préoccupations écologiques du monde et les univers endogènes des sociétés. Cette notion de gouvernance environnementale, qui définit et organise la place de chacun des acteurs concernés, permet de basculer d'une DTA vue comme le retour de l'Etat gendarme169(*) vers un outil qui impulse « un nouveau type de rapport entre l'Etat et les citoyens pour aboutir à un partenariat entre le pouvoir central et le pouvoir local »170(*).

    Pour mettre en oeuvre cette gouvernance environnementale, l'Etat devient alors partie prenante de la gestion raisonnée du territoire, ce qu'il a semblé vouloir faire à travers les Lois Grenelle I et II, et il intervient « seulement » en orientant le comportement des acteurs locaux, confortés dans leur responsabilité ; l'Etat peut donc « orienter » en posant si nécessaire de nouveaux cadres normatifs. Aussi, l'auteur remarque avec justesse que la préférence de la persuasion à l'action autoritaire peut faire son chemin surtout face à l'inapplication de la législation répressive. Dans une certaine mesure, c'est ce constat d'inapplication de la règle qui a pu guider pendant quatorze ans la mise en oeuvre d'un outil étatique, opposable, de planification qu'était la DTA des Alpes du Nord.

    Cette persuasion qui peut passer par l'incitation ne constitue qu'une étape vers la réalisation des objectifs d'une politique publique. Avec la nouvelle formule de DTA non-opposable, les DTADD orientent les comportements sur des thématiques plus larges et plus nombreuses, sans les rendre obligatoires. Finalement, l'action devient directive car elle « imprime une direction sans l'imposer »171(*), comme le fait la Convention alpine sur l'arc alpin, ou les futurs DTADD au sein de leur périmètre. La gouvernance environnementale permet de prendre le contre-pied des formes autoritaires de conduite des comportements.

    Ce premier chapitre nous a permis de revenir sur deux cadres normatifs alpins : la Convention alpine et ses huit protocoles, ainsi que le projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord dans le périmètre définit par cette dernière.

    Cette analyse sur le « discours foncier » d'une part, et sur les modalités de mise en oeuvre de ces cadres normatifs alpins d'autre part, permet de distinguer trois niveaux croissants d'ajustement, voire de distorsion, de ces cadres :

    ü Ces cadres permettent de rendre intelligible une vision de l'aménagement et du développement du territoire alpin promu par l'Etat : en particulier la DTA qui contextualise assez précisément ce discours. Sauf que deux obstacles se posent et peuvent expliquer une opposition féroce et unanime du milieu des stations de ski : l'objet au coeur du discours est faiblement audible, mais surtout, la nature de la procédure (DTA et même Convention alpine) a une audibilité plus que limitée sur ces territoires et empêche de facto l'acceptabilité d'un tel cadre normatif, vécu plutôt comme un diktat de l'Etat.

    ü Les acteurs locaux se servent de ces cadres : en les décriant ils réaffirment leur propre projet de territoire, ou inversement, ils enrichissent ou confortent leurs politiques et leurs pratiques territoriales, ils « font déjà de la DTA ou de la Convention alpine »172(*). Dans les deux cas, le cadre normatif a le mérite d'exister car il re-questionne forcément l'ensemble des acteurs locaux (partisans et opposants confondus) et favorise les réajustements.

    ü Dans les pratiques innovantes, les outils ou les méthodes existantes sont souvent refaçonnées par un cadre règlementaire ou des mentalités progressistes : l'intérêt ici est de voir comment ces ajustements ou ces distorsions de méthodes ou d'outils peuvent monter en généralité (verticalement) ou se diffuser dans d'autres territoires (horizontalement). Toutefois, la montée en généralité ne signifie pas de copier une solution trouvée localement pour en faire une nouvelle règle, mais plutôt de faciliter la prise de conscience, de créer les conditions « pour que », en somme, des conditions favorables localement pour que ce type de solution puisse se multiplier avec de moindres contraintes (des contraintes réduites comparées à la situation de départ).

    Dans le troisième niveau, l'Etat applique le principe de réflexivité, il tient compte des réactions des destinataires de ses commandements, ou bien il cherche à s'adapter à la logique des systèmes qu'il tente d'influencer173(*).

    Ces démarches innovantes permettent également de voir comment les acteurs locaux sont capables de remobiliser un cadre normatif ou un outil différemment. Le chapitre suivant s'attachera donc à des pratiques de terrain qui offrent des pistes de réponse pour continuer d'explorer ce rapport au droit et à la norme en aménagement, et plus spécifiquement, sur des questions foncières alpines.

    Chapitre 2. Trois territoires alpins en quête de maîtrise foncière

    1. Une ingénierie au service d'une politique foncière à Chamonix

    1.1. Présentation générale

    La présentation générale de Chamonix qui suit s'est appuyée essentiellement sur quatre sources174(*).

    Située à 1000m d'altitude dans la haute-vallée de l'Arve (74), Chamonix est emblématique des territoires touristiques de haute-montagne. Avec ses 10 000 habitants à l'année, Chamonix doit accueillir jusqu'à 100 000 personnes en été et 60 000 en hiver, dans une vallée très étroite (de 500m à 1,5km de largeur) s'étirant sur 17km des Houches jusqu'à Vallorcine. Par ailleurs, le territoire est très contraint par les risques naturels (avalanches et inondations) ce qui restreint d'autant les possibilités de constructions. La Haute-Savoie est un département où la pression foncière est l'une des plus élevée de France, et il reste le plus cher à l'échelle régionale : Chamonix n'échappe pas à cette règle.

    Aujourd'hui, Chamonix se recompose d'une manière inédite sous l'influence de la métropolisation de grands centres urbains ; elle devient l'épicentre d'une dynamique de redistribution de la population et produit à son tour ses propres espaces périurbains. Désormais, Chamonix la ville-station est une banlieue lointaine de Londres ou de Genève, elle loge ses salariés dans l'ensemble de la vallée de l'Arve à défaut de pouvoir les accueillir sur son propre territoire, et c'est ainsi que la population chamoniarde est devenue déclinante et vieillissante (départ des jeunes ménages qui ne peuvent se loger sur place, et arrivée de résidents secondaires dont beaucoup de retraités).

    Alors qu'en station, trois fonctions se disputaient traditionnellement l'occupation de l'espace -l'agriculture, le tourisme et l'habitat-, c'est dorénavant pour cette dernière que la compétition se complexifie (quantitativement et qualitativement). En effet, un arbitrage est rendu nécessaire selon les quatre usages de l'habitat -touristique, secondaire, principal ou saisonnier- mais la flambée des prix de l'immobilier et du foncier bénéficie souvent aux résidences secondaires. Ainsi, les phénomènes de ségrégation socio-spatiale qui opèrent finissent par dessiner des « territoires patchworks » ; à l'échelle micro apparaît un ensemble composé de types de résidents aux intérêts souvent divergents voire contradictoires, qui ne permettent bientôt plus de faire consensus et donc de produire du collectif.

    La prise de conscience du problème par les élus chamoniards remonterait au début des années 1990 (réflexion autour de la Zac de la Frasse dès 1996) et c'est en toute logique que la préoccupation du logement permanent est devenue de plus en plus prégnante dans les politiques locales, parallèlement à l'accroissement du phénomène. De fait, l'éviction d'une partie de la population locale ou autochtone a permis une mobilisation des élus et des habitants autour de cette question de l'habitation principale à Chamonix, et c'est la formulation d'un problème collectif - et non de problèmes particuliers - qui a permis d'enclencher un politique foncière volontariste ciblée sur cet enjeu.

    En revanche, on peut évoquer brièvement deux limites à la politique foncière chamoniarde. Alors que l'intercommunalité est proclamée partout comme l'échelle la plus pertinente pour aborder l'enjeu foncier, et que l'adhésion à un Etablissement public foncier local (ici l'EPFL 74) est en passe de devenir un outil jugé pertinent et efficace pour le portage foncier (qui reste en quelque sorte le bras armé d'une politique foncière), Chamonix semble plutôt mettre de côté ces deux leviers.

    Tout d'abord en matière d'intercommunalité, rien ne semble aller de soi en Haute-Savoie, en particulier au sein du Syndicat mixte du Pays Mont-Blanc175(*). Ce syndicat mixte (ex-SIVOM Pays du Mont-Blanc) avec quelques ambitions de gestion coordonnée du territoire avait engagé un ensemble de réflexions (schéma d'aménagement commercial, politique locale de l'habitat, schéma de transport, SCOT) mais à ce jour, aucune des démarches n'a abouti. Trois explications permettent de comprendre les obstacles à cette coopération intercommunale renforcée dont les politiques devaient s'incarner in fine dans un SCOT:

    ü un territoire « globalement riche » qui n'a pas besoin d'une intercommunalité pour « bien fonctionner »,

    ü un territoire dans lequel il est difficile de créer des solidarités entre plaine et stations, de faire comprendre que les handicaps et les intérêts sont partagés sur de nombreux sujets,

    ü entre stations elles-mêmes, la situation de concurrence demeure.

    Ce constat a encouragé Chamonix et ses trois communes voisines, déjà regroupé en SIVOM, à aller plus loin dans la coopération intercommunale sur un territoire où « la communauté d'intérêt était plus forte »176(*) : c'est le choix d'une intercommunalité de proximité qui a donc été fait, s'affranchissant pour un temps des difficultés -qui semblent aujourd'hui encore insurmontables- de faire naître une réflexion stratégique et partagée à l'échelle adéquate d'un territoire élargi (celle correspondant au bassin de vie). Un choix en outre revendiqué puisque, « pour agir efficacement, il faut agir sur un périmètre à dimension humaine avec les meilleurs outils. Ainsi, les communes transfèrent leurs compétences en matière de logement aidé, d'aménagement de l'espace, de protection et de mise en valeur de l'environnement, d'équipements culturels, sportifs et éducatifs, d'aide sociale et d'assainissement. [...] Concrètement, la Communauté de Communes de la Vallée de Chamonix Mont-Blanc mettra en oeuvre la politique foncière en faveur du logement aidé et du logement saisonnier »177(*).

    Au rang des compétences déléguées à la communauté de communes, on retrouve toutefois les grands enjeux territoriaux de cette vallée de Chamonix : l'aménagement de l'espace, l'élaboration et la révision d'un SCOT, l'élaboration et la révision des schémas de secteurs, la mise en oeuvre d'une démarche d'harmonisation des PLU et d'une zone d'aménagement à vocation communautaire, la mise en oeuvre d'une politique transfrontalière et de transports urbains, un schéma territorial de mobilité, l'élaboration d'un plan local d'habitat intercommunal, et la mise en cohérence d'une politique foncière en faveur de logements sociaux locatifs conventionnés. En outre, c'est précisément sur ce dernier point qu'une attention particulière des élus a été portée puisque c'est une problématique forte partagée par les quatre communes.

    Enfin, l'adhésion à l'établissement public foncier de Haute-Savoie ne semble pas répondre à un besoin de la commune de Chamonix. Comme l'explique le directeur de l'EPFL 74, Philippe Vansteenkiste178(*), on peut distinguer quatre freins potentiels à l'adhésion d'une commune à l'EPFL179(*) :

    ü la mise en place d'une fiscalité spécifique,

    ü l'intérêt de l'outil lui-même, qui peut être perçu comme trop interventionniste,

    ü l'attente d'une situation particulière qui rendra nécessaire l'adhésion de la commune à l'EPFL pour cette opération précise,

    ü la problématique majeure de l'EPFL, inscrite dans la charte de création, qui est la mixité sociale180(*).

    En somme, comme pour l'intercommunalité en Haute-Savoie, « plus une commune est riche, moins elle a d'intérêt à adhérer à l'EPFL [...], cela se voit notamment dans les dents creuses du périmètre de celui-ci »181(*).

    A Chamonix, même si les façons de faire ne semblent pas être tournées vers la coopération ni vers les dynamiques de réseau182(*), elles n'en sont pas moins intéressantes, bien au contraire. Ainsi, les opérations engagées par la commune et réalisées par ses services semblent innovantes, quasi inédites voires exemplaires.

    1.2. Une politique foncière volontariste et interventionniste tournée vers l'habitat permanent

    « La rareté et la cherté du foncier chamoniard s'est accompagnée d'une « prise de conscience partagée par les élus et les habitants »183(*) ce qui a conduit à l'émergence d'un discours politique volontariste, « c'est-à-dire prêt à proposer, imposer et donc s'opposer »184(*). La pérennité du logement permanent, problématique partagée par d'autres stations, a permis de construire une politique foncière qui formule un problème collectif, d'intérêt général, et qui n'est pas basé sur l'agrégation de problèmes particuliers : « tel est bien le dilemme dans lequel se trouve prise la question foncière et ... avec elle, les élus »185(*). De fait, la négociation foncière prend le sens d'une médiation au service de la politique communale.

    Propriétaire foncier important, la commune de Chamonix a engagé le recensement de tous ses biens (terrains, bâtiments, salles) dans la perspective d'une gestion plus stratégique de son patrimoine (en vue de ventes potentielles et donc de recettes municipales), sous l'impulsion des élus. Dès 2009, des groupes de travail se sont donc constitués pour réfléchir à l'affectation future de chaque bien, pour éviter « une gestion au coup par coup »186(*), tout cela s'articulant dans le processus de révision du PLU. Cette stratégie foncière qui s'affirme a amené la commune à se comporter en tant qu'aménageur parce qu'elle était propriétaire des terrains sur lesquels portaient les opérations d'habitat qu'elle envisageait. Ainsi, Chamonix a vendu des lots viabilisés dont l'acte de vente encadrait les conditions de revente, avec en amont la sélection des candidats acheteurs selon des critères définis par la commune.

    1.2.1. Des opérations pour le logement permanent qui se multiplient

    A partir de 1996, l'opération de la Zac de La Frasse marque en quelque sorte le début d'une politique foncière chamoniarde, volontariste et interventionniste en faveur de l'habitat permanent. Avant La Frasse, Chamonix avait déjà participé à d'autres programmes d'accession à la propriété mais plus timidement, avec des clauses assez « légères » et sans sanction en cas de non respect.

    Pour la Zac de La Frasse, la commune achète les terrains pour compléter le tènement, effectue le remembrement puis commercialise trente-deux lots à bâtir : ces lots sont « contraints » par le cahier des charges de la ZAC qui prévoit un droit de priorité de la commune en cas de revente. Lors d'une revente et malgré les efforts de sensibilisation entrepris par la commune, les propriétaires se tournent vers le plus offrant ; la commune engage alors une procédure mais est déboutée par le tribunal administratif puis par la Cour de cassation qui estime qu'il y a un détournement du droit de préemption pour motifs anti-spéculatifs. Aujourd'hui, ces biens et leur objet « résidence permanente » sont inscrits au PLU en droit de préemption renforcé. En somme, dix ans après, on constate seulement trois ou quatre cas de revente et dans certains cas une transformation en résidence secondaire, ce qui reste concluant sur un total de trente-deux lots.

    Dès le début des années 2000, l'idée d'un programme aux Bossons, « le Clos Napoléon », va rompre avec les opérations antérieures puisque des compétences externes vont être sollicitées pour renforcer les clauses de revente. Prenant le contre-pied des mésaventures de La Frasse, le Clos Napoléon sera « une opération lourde et difficile »187(*) et marque ainsi l'affirmation de la politique foncière de Chamonix pour offrir à sa population des logements à des prix inférieurs à ceux du marché. En 2005, la mise en oeuvre est effective ; le montage du programme technique et surtout des clauses juridiques de la Zac vont concernés douze lots à bâtir en accession à la propriété. Cinq ans plus tard, la dernière vente a lieu malgré un ensemble de clauses limitatives du droit de propriété plus affirmées.

    Aujourd'hui, on peut considérer que la politique foncière de Chamonix prend de l'envergure. Un futur projet, « Les Tissières », prévoit la réalisation de quatre-vingt à cent logements (lots individuels et collectifs) à l'horizon 2012 : des maitres d'oeuvres externes sont sollicités sous l'égide d'un comité de pilotage pour cette opération trop lourde pour être menée en interne188(*). Un autre projet de huit logements se profile également aux Pèlerins. D'autre part, un travail de longue haleine a mobilisé la commune autour du centre Jean Franco en centre ville (un grand terrain et un bâtiment propriétés de l'Etat). Après deux ans de négociation pour l'acquisition du bien et la négociation du prix, assortie d'un contentieux avec une association locale, l'Etat a décidé de vendre à la commune dans le cadre des dispositions de la circulaire Borloo : 75% de logement social seront donc réalisés sous un délai de cinq ans. On remarquera ici que la politique foncière de Chamonix reproduit à son échelle communale une disposition de « clauses particulières de vente » déjà mise en oeuvre par l'Etat. Enfin, la commune de Chamonix agit sur la maîtrise du coût du foncier en acquérant des terrains de RFF ou de la SNCF189(*) puis en les revendant « à un prix défiant toute concurrence »190(*) à l'opérateur d'habitat social ICF.

    1.2.2. Une technicité juridique qui s'affine : vers un infléchissement du droit de propriété

    La politique foncière de Chamonix a fait le choix de développer la technicité juridique des opérations d'habitat permanent pour réaliser son objectif : garantir la destination et un prix encadré lors de la revente du logement, et donc en un sens, comment faire en sorte que lors de la revente la plus-value soit reversée à la commune et que le bien ne change pas d'usage ? Ces conditions de revente, inscrites dans l'acte de vente, constituent des limitations explicites du droit de propriété assorties de clauses anti-spéculatives : si la revente s'effectue au-delà d'un certain prix, les vendeurs doivent rembourser à la commune la différence en raison de l'effort financier consenti en amont par cette dernière.

    Pour le Clos Napoléon, il s'agit bien « d'encadrer la revente » : aux clauses anti-spéculatives s'ajoutent des clauses d'affectation du bien sur une durée de vingt ans (au début il a même été question de trente ans) : une durée déjà assez longue a estimé le notaire qui a piloté le montage juridique. Bien sur, la revente n'est pas interdite mais les acheteurs savent qu'ils devront revendre leur bien, sans réaliser de plus-value, à des personnes correspondant aux critères définis par la commune et qui s'engageront à leur tour à respecter les mêmes termes du contrat. L'ensemble de ces clauses juridiques ont fait l'objet d'un exposé préalable au programme communal afin de préciser les motifs de cet interventionnisme (déclin démographique, fermeture de classes,...) justifiant l'objectif du « maintien de la population permanente sur le territoire » dans sa dimension d'intérêt général.

    Bien que le bon sens semble donner raison à cette stratégie foncière, l'expérience judiciaire pour l'opération de La Frasse rappelle qu'en France, le droit de propriété est sacré. Ainsi, « dans la mesure où le droit de disposer du terrain (le vendre ou le donner) est le critère de la pleine propriété, il est logique de considérer que toute restriction apportée à la liberté de la mutation, constitue une réduction des droits du propriétaire » rappelle Joseph Comby191(*). Mais il semble que le droit reconsidère ses positions et qu'une jurisprudence en la matière vienne récemment encourager les politiques foncières volontaristes et interventionnistes des communes. L'article d'Hugues Périnet-Marquet relate avec une précision juridique cette évolution tout à fait inédite qui décrit parfaitement la situation chamoniarde 192(*):

    « Le droit de propriété que se fait consentir une commune venderesse de pouvoir racheter un terrain à son prix de vente pendant vingt ans n'est pas une atteinte au droit de propriété. L'arrêt rendu le 23 septembre 2009 est important car, pour la première fois, se trouvaient soumises à la Cour de cassation les modalités de création d'un marché de l'acquisition protégé.

    Une commune avait vendu un terrain à un prix relativement modique. Mais, sous l'intitulé "pacte de préférence", il était prévu dans l'acte qu'avant toute revente à un tiers, le rachat du terrain devait, pendant vingt ans, être proposé à la commune, au prix de l'acquisition initiale réactualisé.[..]Or, trois ans après avoir acheté, les acquéreurs signent un compromis de vente de leur terrain à un prix trois fois supérieur à celui d'acquisition. La commune voulant exercer son droit de préférence, les acquéreurs tentent de faire annuler la clause [...].

    En l'espèce, l'important n'était pas tant la priorité offerte à la commune que le blocage du prix de revente, qui pouvait apparaître comme une évidente limitation du droit de disposer au prix du marché. Pourtant, l'atteinte au droit de disposer, flagrante, est validée tant par les juges du fond que par la Cour de cassation qui considère qu'outre la libre acceptation de la stipulation, celle-ci avait pour but d'empêcher la spéculation sur le bien dans un contexte marqué par la rareté de l'offre et le décrochage des possibilités financières de la plupart des ménages par rapport à l'envolée des prix de l'immobilier et que l'acquéreur avait bénéficié, en contrepartie de son acceptation, de la possibilité d'accéder à un marché protégé de la spéculation immobilière. [...] En effet, l'effort fait par la commune en vendant le terrain à un prix sans rapport avec celui du marché méritait d'être encouragé et protégé. »

    Cette jurisprudence valide ainsi la mise en oeuvre de clauses restrictives de revente, démarche adoptée dans les opérations de lotissement de la commune de Chamonix. Enfin, une seconde question juridique restait à traiter, celle des critères de sélection des futurs propriétaires. Pour le Clos Napoléon, un groupe de travail avait permis de définir quatre principaux critères :

    ü la composition familiale : nécessité d'avoir un ou plusieurs enfants scolarisés dans la commune,

    ü un revenu-plafond fixé à 54 000 €/an/ménage (soit 4 500 €/mois/ménage en moyenne),

    ü l'âge : = 90 ans d'âges cumulés pour un couple, ou = 45 ans pour une famille monoparentale,

    ü l'activité professionnelle : dix ans d'activité sur la commune.

    Cet aspect n'échappe pas à Hugues Périnet-Marquet : « comment sont déterminés les bénéficiaires des prix préférentiels ? Y'a-t-il une véritable publicité ? [...]Quels que soient les bons sentiments qui président à cette technique, elle n'en conduit pas moins une personne publique à consentir un avantage financier plus ou moins immédiat à certaines personnes privées dont le choix est fait sans transparence »193(*). A Chamonix, le jury d'attribution194(*) des lots du Clos Napoléon a fini par solliciter les compétences d'un huissier afin de réaliser un tirage au sort pour départager les vingt-deux candidats restants pour les douze lots disponibles. La démarche semble trouver un large écho auprès des chamoniards, et depuis 2000, une liste d'inscription a été ouverte : toute personne qui souhaiterait disposer de ce type de logement peut s'inscrire, et bien que les prochains critères d'attribution pour Les Tissières ne soient pas encore définis, plus de cinq cent personnes se sont manifestées.

    Enfin, cette question des critères reste assez sensible car elle discrimine, plus ou moins implicitement, une population jugée indésirable195(*). Toutefois, le but est d'arriver à définir des critères qui permettent à la fois d'atteindre les objectifs de la politique foncière municipale, et qui sont « recevables » d'un point de vue juridique, d'où la nécessité de s'entourer par exemple d'un bon notaire196(*). Quoiqu'il en soit, chaque territoire doit réfléchir à ses propres critères en fonction de ses spécificités locales.

    1.3. Entre bricolage et ingéniosité

    La démarche adoptée par la commune de Chamonix est guidée par le souci d'améliorer et de peaufiner un dispositif, en l'occurrence, une technicité juridique197(*). Ainsi, les écueils rencontrés pour la Zac de La Frasse ont tenté d'être corrigés pour le Clos Napoléon, et il en sera probablement de même pour Les Tissières. Aujourd'hui, la jurisprudence émergente sera peut-être renforcée par des dispositions prises par le législateur car le risque juridique pour une collectivité qui tenterait l'aventure reste présent198(*).

    La politique foncière de Chamonix mobilise différents outils de maîtrise du foncier afin de « varier les procédures »199(*) le plus possible. A raison d'une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) reçue par jour (entre trois cent et quatre cent par an en moyenne, sauf en 2009 avec la chute du nombre de transactions), le service foncier privilégie comme ailleurs les procédures à l'amiable : en moyenne, le droit de préemption urbain est utilisé une fois par an. Cependant, la définition d'emplacements réservés (disposition du Code de l'urbanisme) au Plan local d'urbanisme est peut-être la mesure phare de la commune : beaucoup d'emplacements réservés « logement » quadrillent le PLU, du centre-ville de Chamonix jusqu'à Argentières notamment. Les chercheurs relèvent d'ailleurs la façon dont les élus interprètent, optimisent et souhaitent adapter un zonage dont le rôle est renouvelé par la stratégie foncière ou encore, comment le pouvoir politique s'empare du zonage pour contrer les projets individuels200(*).

    En somme, « les outils, on les a mais il faut savoir bien les utiliser pour ce pourquoi ils sont faits, et après, on peut arriver à les adapter à certaines mesures pour répondre à nos besoins, par exemple en matière de logement permanent »201(*). Mais encore faut-il être capable de mobiliser des compétences externes coûteuses tels que notaire, avocat, juriste, ou encore géomètre et bureau d'étude, et seules les collectivités suffisamment riches le peuvent. Même si les services de la ville se défendent d'être innovants, et encore moins d'être exemplaires, leurs démarches et leur manière de se saisir des outils existants est proche de ce que l'on qualifierait couramment de « bricolage ». La figure de « l'acteur-bricoleur » de Louis Allie202(*) montre notamment « comment et pourquoi l'acteur au coeur des processus d'aménagement, de gestion et de planification agit et pense à la manière d'un bricoleur qui bricole »203(*). Cet éclairage de Louis Allie est tout à fait opportun pour observer la situation à Chamonix : il permet de relever une certaine forme d'ingéniosité dont font preuve ceux qui réalisent la politique foncière chamoniarde.

    De plus, les opérations réalisées à Chamonix font peut-être déjà boule de neige : d'autres municipalités n'hésitent pas à contacter les services chamoniards pour obtenir des détails sur le montage de la Zac, les critères, etc. Ces procédures sont donc amenées à se diffuser et ainsi à s'améliorer. Déjà aux Houches un programme pour de l'accession à la propriété, avec un organisme social, se construit avec des critères assez similaires, sur des terrains appartenant aussi à la commune. Pourtant, il est vrai que Chamonix n'a rien inventé bien que ses opérations semblent quasi-inédites en territoire de montagne. Ailleurs, ou plutôt hors de vallées touristiques alpines, des démarches similaires (dans la technique) sont observables partout ou presque, par exemple lorsque l'on fait un OPH204(*). Pour ces logements, des critères d'attribution et des clauses anti-spéculatives existent afin qu'en cas de revente avec plus-value, l'office public puisse récupérer les subventions injectées dans l'opération. Ce qui est spécifique ici ce n'est peut-être pas tant la thématique du maintien des populations locales, mais plutôt le retard dans la prise de conscience ou la mise en oeuvre de solutions répandues ailleurs (deux cent soixante-dix-neuf OPH en France en 2007). En résumé, si la technique existe déjà, Chamonix a eu l'intelligence de l'adapter pour la mettre au service de l'objectif visé par sa propre politique foncière locale : l'habitat permanent.

    2. La « participation-formation » dans le massif du Vercors

    2.1. Présentation générale

    Le Vercors est le plus grand massif des Préalpes du Nord (environ 135 000 ha) et constitue la limite sud-est du périmètre d'application de la DTA des Alpes du Nord. Loin d'être un territoire homogène, le Parc naturel régional du Vercors (PNRV) distingue huit secteurs confrontés à des enjeux territoriaux parfois très différents. La DTA des Alpes du Nord différencie quant à elle un territoire soumis à la forte pression urbaine qui correspond aux piémonts isérois du Vercors (secteur « Piémont Nord »), et un territoire soumis à une pression émergente sur le plateau (secteur « Quatre-Montagnes »). Toutefois, au sein de ce « PNR montagnard périurbain »205(*), cette diversité de situation est appréhendée au sein du périmètre de révision de la charte du Parc 2008-2020 : celui-ci regroupe 95 communes dont 62 classées « Parc ».

    Du point de vue foncier, l'hétérogénéité du massif du Vercors doit être soulignée : globalement, une moitié nord du massif est soumise au phénomène de périurbanisation de la région urbaine grenobloise, voire lyonnaise, tandis qu'une moitié sud est plutôt menacée de déclin206(*). Ces deux tendances traduisent assez bien l'une des distinctions possibles que l'on peut faire entre les Alpes du Nord et les Alpes du Sud. On s'intéressera donc à cette partie nord du Vercors, où certaines communes craignent « de devenir des cités-dortoir d'un nouveau genre, banlieues de luxe pour cadre des hautes technologies du sillon alpin »207(*), et où l'artificialisation des sols menace de manière irréversible l'agriculture, les paysages typiques des piémonts et du plateau, et donc à terme le potentiel touristique de ce territoire.

    C'est au sein de la communauté de communes du massif du Vercors208(*) que la croissance démographique a été fulgurante ces quinze dernières années, soit trois fois supérieure à celle de l'agglomération grenobloise. Une population estimée à 11 600 habitants, relativement jeune (28 % de moins de 20 ans) mais vieillissante209(*), avec des communes comme Méaudre ou Lans-en-Vercors dont la population a augmenté respectivement de 30 et 50%210(*). Ainsi, les constructions induites ont dessiné progressivement un chapelet de maisons le long des voies de communications, alors que la part des résidences secondaires dans l'ensemble des logements s'élevait à 59,2% sur le canton de Villard-de-Lans en 2006211(*).

    En outre, l'hypothèse de transformation du plateau en « banlieue de luxe pour cadres » est corroborée par plusieurs chiffres : depuis 1999, sur 153 logements construits par an en moyenne sur le canton, 58 % des demandeurs de permis de construire viennent de l'extérieur du plateau, à un prix de vente au mètre carré en hausse de 58 % pour les maisons individuelles (depuis 2000)212(*), mais qui demeure plus attractif que dans la plaine.

    L'arrivée de ces néo-ruraux sur le plateau s'est assortie d'un accroissement des conflits d'usage avec les exploitants agricoles pour qui l'enclavement progressif du siège d'exploitation met en péril la pérennité de l'activité agricole tout entière. Dès avril 2004, un diagnostic territorial agricole met en perspective le rôle et le fonctionnement des exploitations avec les enjeux de développement économique, de gestion de l'espace ou encore des choix en matière d'aménagement, dans le but de concilier aménagements fonciers et paysages. Peu à peu, les élus ont pris conscience des dangers d'une urbanisation non maîtrisée213(*) et la question de la maîtrise foncière est devenue évidente.

    Dans le cadre de la révision de la Charte du PNRV (bilan évaluatif et diagnostic territorial) ainsi que lors des débats locaux organisés pour la phase de concertation, les principaux enjeux mis en évidence ont permis de préciser les différents axes et objectifs stratégiques de la nouvelle Charte 2008-2020 : à la première place des enjeux répertoriés figure « la gestion du foncier et de l'urbanisme »214(*). Ainsi, l'objectif opérationnel 1.4.1. engage le Parc à soutenir la mise en place de stratégies paysagères et de plans d'action portés localement ; ces « Chartes paysagères » doivent permettre de planifier l'usage des sols et de protéger le foncier agricole soumis à la pression de l'urbanisation.

    La « dimension foncière » que l'on a souhaité explorer sur ce territoire du Vercors est introduite par l'axe 3 de la Charte du Parc : « Inventer et préparer les territoires de demain »215(*). En effet, face à la pression urbaine et à ses effets sur la gestion de l'espace qui échappe alors à la maîtrise des pouvoirs publics, les collectivités doivent en faire une de leurs préoccupations majeures. Dès lors, il est nécessaire qu'elles se mobilisent fortement « à l'échelle communale, intercommunale et avec les agglomérations voisines », pour retrouver la maîtrise foncière de leur territoire. Suivant cette logique de mobilisation, « le parc incitera et soutiendra les collectivités locales dans la mise en place d'outils permettant de contenir la pression urbaine et de préserver les espaces à vocation agricole et forestière ». Deux objectifs opérationnels déclinent cet axe d'action216(*) :

    ü 3.2.1. Contribuer à la définition et la mise en oeuvre des stratégies et documents d'urbanisme. Les interventions du PNR visent l'appuie à la mise en place de Charte de développement et paysagère à l'échelle intercommunale.

    ü 3.2.2. Assurer une observation de l'évolution du foncier et de la construction aux différentes échelles territoriales. Il s'agit de développer une « approche prospective sur le foncier et la construction ».

    Ainsi, les communes signataires de la Charte du Parc s'engagent « à économiser l'espace, à préserver le foncier agricole et à densifier les zones déjà urbanisées ou urbanisables dans le cadre des documents d'urbanisme ». Toutefois, c'est dans le passage à l'acte que le Vercors semble se distingue et qu'il retient ici notre attention.

    2.2. La Charte de développement de la CCMV

    Tout d'abord, une charte paysagère élaborée au sein du PNR va permettre de poser les premières pièces de la future Charte de développement. Coordonnée par la conseillère de la commission paysage de la CCMV, Michelle Prax, et le chargé de mission paysage-urbanisme du PNR, Guy Chatain, la charte paysagère devient par la suite l'outil de mise en oeuvre de l'objectif opérationnel 1.4. de la future Charte du Parc.

    Lors d'un entretien avec Guy Chatain217(*), en quelque sorte la cheville ouvrière du projet (côté Parc), l'analyse faite du problème foncier identifie trois dimensions pour appréhender cet enjeu complexe:

    ü avoir une vision claire et simple du foncier (mais pas simpliste car les enjeux n'en sont pas moins énormes : enjeux financiers et de pouvoir) qui puisse se traduire dans un document de synthèse. Le manque de formation des élus est l'obstacle majeur de ce type de démarche (des guides sur le foncier agricole, le foncier urbain,etc. ne répondent pas à ce besoin de formation).

    ü avoir du courage politique pour mener à son terme une démarche volontariste en matière de foncier. Jusqu'à présent, les enjeux sont tels que l'intérêt général s'oppose systématiquement aux intérêts particuliers. Le manque de vision à long terme, de projet de territoire est rattrapé par les visions court-termistes des acteurs locaux.

    ü se comporter en aménageur pour qu'un projet de territoire soit élaboré en amont de la règlementation. C'est un problème lié au processus lui-même qu'il faudrait inverser : un projet de territoire permettrait alors de fixer un cadre aux futurs projets d'aménagement, tout cela en amont de la décision finale de l'élu. C'est le projet de territoire qui refaçonne l'élu en aménageur.

    Ce sont ces trois dimensions qui ont nourri le projet de Charte de développement porté par la communauté de communes du massif du Vercors.

    2.2.1. Une démarche alternative au SCOT

    Dès 2005, donc avant l'adoption de la nouvelle Charte du Parc, les premières réflexions sont lancées pour l'élaboration d'une charte de développement durable du territoire de la CCMV. Accompagnée dans sa démarche par le PNR Vercors, mais également par le département de l'Isère et le contrat de développement Rhône-Alpes du Royans-Vercors, la CCMV sollicite un bureau d'études. En septembre 2006 émergent les orientations de développement à moyen terme (dix ans) ; celles-ci sont validées en conseil communautaire le 6 novembre 2006.

    Ce « Vercors à l'horizon 2015 » se construit donc à l'échelon intercommunal : les sept communes s'engagent ainsi dans une vision concertée de l'aménagement, et traduisent :

    « Une vision du territoire qui dépasse les limites communales dans une approche identitaire fondée à la fois sur la géographie, l'histoire et les caractéristiques économiques, sociales et culturelles des Quatre Montagnes. Un développement maîtrisé et concerté s'impose pour maintenir un cadre naturel attractif et favoriser une économie locale diversifiée, capable de s'adapter aux évolutions de l'environnement. Ce document est le résultat d'un engagement unanime des élus de la Communauté de communes qui ont participé activement à son élaboration sous la conduite de Guy Charron, Vice-Président à l'aménagement de l'espace »218(*).

    L'adoption d'un Plan d'actions le 4 mai 2007219(*) décline alors les actions opérationnelles et leur mise en oeuvre (objectifs, résultats attendus, maître d'ouvrage, partenaires, maîtres d'oeuvre, contenu, méthodologie et mesures d'accompagnement) selon cinq orientations thématiques (dont deux transversales) : l'habitat, le tourisme, l'emploi, le paysage et les réseaux. Ce sont donc 25 fiches-action qui guident la mise en oeuvre de la Charte de développement.

    La démarche de la CCMV est donc finalement assez proche de celle d'un SCOT : l'élaboration a été relativement longue, concertée mais beaucoup moins lourde que celle d'un véritable SCOT, et aussi beaucoup moins coûteuse. Peut-être même au-delà d'un SCOT, cette Charte de développement intercommunale s'oriente vers ce que pourrait être à terme un PLU-intercommunal. Comme le souligne Guy Chatain, « jusqu'alors, l'harmonisation se limitait aux prescriptions architecturales figurants dans l'article 11 de leur POS ou PLU. La Charte de développement ne devant pas être l'oeuvre de la communauté de communes mais de toutes les municipalités, cette méthode permit de les associer directement »220(*). Cette association des communes a permis de co-construire ce nouveau cadre de planification à moyen terme, qui s'est accompagné d'un calendrier de mise en oeuvre, ainsi que d'une carte de destination générale des sols. Le schéma ci-dessous récapitule la démarche entreprise à travers cette Charte de développement221(*).

    Figure 25. Démarche de la Charte de développement de la CCMV, 2007

    A la manière d'un SCOT, de grandes orientations ont été retenues, et celles concernant la thématique de l'habitat permettent de cerner la vision du foncier prônée par la Charte. Deux orientations sont ainsi retenues 222(*):

    1.1. Contenir l'urbanisation dans la limite des surfaces constructibles des documents d'urbanisme actuels

    a) Localiser la construction selon les caractéristiques des communes

    Autrans

    réduit son rythme annuel de construction à 8 logements/an (12 logements/an entre 1999-2005). Autrans conserve des possibilités de développement à long terme dans l'enveloppe foncière destinée à la construction (zones NA).

    Corrençon

    maintient son rythme de construction à 4 logements/an. Corrençon reste en deçà de ses capacités afin de préserver des possibilités à long terme (zones NA).

    Engins

    maintient le rythme de 1999-2005. La construction d'une vingtaine de logements d'ici 2015 mènera la commune au bout de ses capacités de construction et de renouvellement.

    Lans-en-Vercors

    limite son rythme annuel de construction à 17 logements/an (27 logements/an entre 1999-2005). La commune assure néanmoins 19 % de la construction du plateau et mise sur la reconversion en habitat d'une partie du parc touristique désaffecté. Elle garde des possibilités d'optimiser sa capacité de construction.

    Méaudre

    maintient son rythme de construction à 19 logements/an. Méaudre assure plus de 20 % de la construction du plateau et va au bout de ses capacités.

    Villard-de-Lans

    qui concentre 45 % de la construction du plateau, réduit néanmoins considérablement son rythme de construction de 72 logements/an entre 1999-2005, à 52 logements/an jusqu'en 2015. La commune ne prévoit qu'une reconversion partielle de son parc touristique désaffecté en logement, lui préférant la réhabilitation en lits touristiques et la création de lits marchands.

    Saint-Nizier

    limite sa construction à 7 logements/an, avec la possibilité de transformation d'immeubles touristiques. Le rythme est divisé par deux pour des raisons techniques et sociales : desserte et organisation des circulations, adduction en eau potable, gestion des équipements liés à la petite enfance, animation et vie communale...

    1.2 Optimiser la capacité de construction du plateau

    a) Programmer la construction

    Cette orientation se décline suivant trois modalités : la diversification de la construction, la relance de la construction sociale, et enfin, la production de nouvelles formes de logements (individuel et collectif). L'objectif visé est celui du maintien de la mixité sociale sur le territoire.

    b) Adopter une politique foncière

    Identifier comme « un levier de développement primordial pour la CCMV », la maîtrise foncière doit permettre la mise en oeuvre du scénario retenu. C'est une politique foncière à moyen et à long terme qui doit être impulsée selon trois axes :

    ü la réduction de la part du développement en secteur diffus pour lutter contre l'urbanisation linéaire,

    ü l'ajustement des densités de construction afin d'optimiser le foncier disponible,

    ü la régulation du coût du foncier par l'utilisation d'outils d'aménagement opérationnel (ZAC...) et l'intervention de l'établissement public foncier.

    Document de cadrage mais aussi document de mise en oeuvre, la Charte de développement, dans son Plan d'actions, va au-delà d'un SCOT. En matière de foncier, six fiches-action (sur les 25) déclinent la marche à suivre223(*). La volonté de formation, de mise en dialogue des acteurs est très présente. Par exemple, dans la fiche-action 1, il est question d'organiser des formations sur le panel d'outils mobilisables pour une politique foncière, destinées aux élus et personnels des mairies. Dans la fiche-action 3, il s'agit d'aider directement les communes, ou encore dans la fiche-action 9, l'enjeu est de développer le dialogue territorial avec les habitants, permettant de réduire aussi les conflits fonciers.

    2.2.2. Une Charte opposable

    L'atout de cette Charte de développement réside à la fois dans sa forme, relativement courte, lisible, chiffrée et cartographiée, que dans le fond adopté par les communes, par des orientations stratégiques, des mesures volontaristes et des fiches-actions pragmatiques. Toutefois, ces efforts auraient peut-être été réduits à de simples « voeux pieux » -comme il en existe déjà tant- malgré la volonté d'une majorité d'élus.

    Bien sur, comme le relate Isabelle Berthier dans son article, le déclassement de certaines parcelles a suscité quelques émois : « les menaces de contentieux n'ont pas manqué. Les discussions avec les propriétaires sont très longues ; les intérêts des agriculteurs et des propriétaires ne se recoupent pas puisque rares sont les propriétaires qui sont en même temps agriculteurs, rapporte Pierre Buisson, président de la communauté de communes, conseiller général et maire de Méaudre »224(*).

    Sans l'opposabilité de la Charte de développement, le souci d'économiser l'espace agricole par exemple pouvait être remis en cause : le maire cédant inévitablement aux pressions de certains défendant ardemment leur intérêt particulier, ou encore, au changement de municipalité suivant (ou basculement de l'équilibre entre pouvoirs au conseil municipal), les limites instaurées se seraient progressivement délitées.

    Afin de donner une force juridique à ce cadre de planification intercommunal, le document devait donc être opposable aux tiers, assurant le crédit de la CCMV face à l'Etat -la Charte de développement étant validée par le préfet-, mais aussi face à l'ensemble des élus et des concitoyens du territoire des Quatre-Montagnes. Alors que la révision de la Charte du Parc du Vercors était en cours, il a été décidé d'inscrire la Charte de développement de la CCMV ainsi que sa carte de destination des sols au sein de la future Charte du Parc 2008-2020, lui donnant automatiquement le caractère opposable qu'il lui manquait. Grâce à ce montage judicieux, l'intégralité de la Charte de développement de la Communauté de communes du massif du Vercors bénéficie de l'opposabilité de la Charte du Parc naturel régional du Vercors pendant la durée d'exécution de celle-ci, soit jusqu'en 2020. Cette démarche originale et volontariste initiée à l'échelle de l'intercommunalité va ainsi au-delà de l'affichage politique.

    2.2.3. Une réaction au SCOT grenoblois

    La Loi Urbanisme et Habitat du 2 juillet 2003 prévoit que « dans les communes qui sont situées à moins de 15km de la périphérie d'une agglomération de plus de 50 000 habitants et qui ne sont pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme ne peut être modifié ou révisé en vue d'ouvrir à l'urbanisation une zone à urbaniser délimitée après le 1er juillet 2002 ou une zone naturelle » (Art. L. 122-2 du Code de l'Urbanisme). Toutefois, en cas de rupture géographique due à des circonstances naturelles, le préfet peut exclure du champ d'application de cette règle certaines communes : ainsi, la CCMV a alors le choix d'intégrer le périmètre de la région urbaine grenobloise -RUG- et donc son SCOT, ou de rester sous un régime d'autorisations délivrées par le préfet. Dans un contexte de forte pression immobilière et foncière, le préfet interpelle la CCMV en 2004 : celle-ci décide de rester hors du SCOT et d'enclencher une réflexion collective, encouragée par le Parc225(*).

    La Charte de développement constitue dès lors un outil de « résistance » à l'intégration des Quatre-Montagnes au sein de la RUG. Selon l'appréciation des élus de la CCMV, « les intérêts et attitudes des communes du Vercors divergent trop de celles de l'agglomération pour envisager une prise de décisions commune »226(*). La crainte d'être assimilée à ce vaste périmètre, d'être réduite au statut de « secteur » du SCOT, n'efface cependant pas les liens évidents entre ces deux territoires. Une charte d'intention est donc signée en 2005 entre la CCMV, La Métro et le PNRV afin de « coordonner plus étroitement les actions pour garantir un développement équilibré et concerté des territoires ».

    D'autre part, on peut considérer que la démarche entreprise par les communes de la CCMV est plus ambitieuse que ce qu'il aurait été possible de réaliser au sein du SCOT de la RUG, notamment parce que les orientations prises ont été co-construites par les communes elles-mêmes et leurs élus, qu'elles ont été cartographiées avec précision, et que l'ensemble de la Charte de développement est opposable aux documents d'urbanisme de rang inférieur. Comme en témoigne Michelle Prax de la CCMV : « la charte est à certains égards plus contraignante car elle comprend une carte de destination générale des sols, à la différence d'un SCOT. Or autant cela peut se justifier lorsque le SCOT couvre un vaste périmètre, autant l'absence de carte est pénalisante pour un territoire restreint tel que le Vercors-Quatre-Montagnes »227(*). Cependant, il semble que la perspective d'une intégration préoccupe toujours quelques élus : la Charte de développement sera-t-elle un jour transformée en schéma de secteur du SCOT grenoblois ?

    2.3. Sensibilisation, participation, formation

    Dès le début de la démarche entreprise pour l'élaboration de la Charte de développement de la CCMV, le bureau d'études choisit de travailler d'abord sur les logiques d'acteurs, avant d'effectuer un diagnostic pour sous-tendre le projet de charte. Comme le précise Guy Chatain228(*), « il s'agissait de conduire les communes, par le recours à des jeux de rôles, à évaluer ensemble l'impact de l'urbanisation sur l'agriculture et le tourisme, et à coordonner leur politique ». Ces ateliers participatifs pour maîtriser la pression urbaine se sont appuyés sur l'utilisation du logiciel Urbax qui met en scène l'élaboration d'un PLU avec simulation des actions et conséquences sur les différents types d'acteurs mobilisés.

    Les projections intégrées à la Charte de développement229(*) ont été travaillées au cours de trois ateliers avec les élus, les institutionnels et les professionnels de l'aménagement. Ce travail de mise en situation des élus face aux scenarii a permis d'appréhender véritablement leur impact à l'échelle du plateau et de chaque commune : les décisions adoptées à l'issue de ce processus participatif (limitation de l'urbanisation, déclassement de zones AU en zone A ou N) témoignent d'une prise de conscience et d'une volonté réfléchie de changer en profondeur le modèle d'aménagement et de développement des Quatre-Montagnes.

    Poursuivant sur cette démarche participative -et même intégrative- des élus dans l'élaboration du projet de territoire, le Plan d'actions énonce plusieurs besoins en matière de formation, qui devront être satisfaits à travers la réalisation des fiches-actions. Les actions de formation sont récapitulées dans le tableau suivant (fiche-action 1 à 8)230(*).

    Plan d'actions CCMV : 3 mesures pour structurer la démarche de formation des acteurs locaux

    11. Lancer un appel à candidatures pour organiser une formation à destination des élus et personnels des mairies sur les outils de maîtrise foncière

    12. Organiser des journées d'échanges entre élus et opérateurs de l'aménagement et de la construction

    13. Organiser des journées d'échanges sur la révision des P.L.U, sur l'élaboration des prescriptions particulières d'aménagement, sur la présentation d'opérations « pilotes »

    Figure 26. Démarche de formation des élus du Vercors, Plan d'actions CCMV 2007

    La réalisation de la première mesure a été confiée au Parc : la formation aurait dû commencer début 2010, mais elle sera finalement lancée début 2011, sous la houlette de Guy Chatain. La formation, proposée et acceptée par les élus, concernera les trois types d'acteurs qui interviennent sur ces questions de foncier : les élus, les techniciens et les consultants, s'appuyant sur la méthode mise en oeuvre pour l'élaboration de la Charte de développement.

    Dans un autre territoire vertacomicorien, la Communauté des communes du Vercors231(*) sur le canton de La Chapelle-en-Vercors, un processus participatif a été engagé dans le cadre des opérations pilotes de la Charte paysagère232(*). Sous forme d'ateliers, deux objectifs définis lors de l'élaboration de la Charte paysagère sont poursuivis : « Mieux maîtriser l'urbanisation future des villages et hameaux ainsi que l'intégration paysagère et architecturale des nouvelles constructions ». Une première tranche d'ateliers a été réalisée en 2008-2009, et une seconde tranche a été définie puis engagée sur les communes de St Agnan, de La Chapelle et de St Julien en 2010. Ce projet innovant mobilise élus et habitants pour les faire travailler ensemble, dans le cadre d'ateliers participatifs, sur un pré-projet d'aménagement. Plus concrètement, ce sont des groupes d'une vingtaine de personnes, une moitié d'élus et une moitié d'habitants (dont beaucoup de porteurs de projet), qui ont été « formés en pratiquant » à partir de cas concrets, dans l'idée de faire des propositions à la Communauté des communes qui assurera ensuite la cohérence à l'échelle du canton.

    Partant d'une dimension paysagère, et donc esthétique voire affective, ce travail participatif mobilise les élus et les habitants et concoure ainsi à une meilleure compréhension mutuelle des enjeux liés à la gestion territoriale. L'approche paysagère permet d'aborder, d'une façon détournée, les conflits fonciers, les choix d'implantation des nouvelles constructions, et in fine, la difficulté d'accorder intérêts particuliers et intérêt général. C'est dans cette mise en dialogue, à travers la formation par l'élaboration de pré-projets d'aménagement, que ces ateliers participatifs renouvellent le dialogue territorial difficile au sujet du foncier.

    Dans ce processus de dialogue, de la sensibilisation à la formation en passant par la participation, le Parc du Vercors est un acteur-clé incontournable : l'objectif de faire participer les acteurs, les partenaires et les habitants, est une dimension forte de son action sur le territoire du Parc. Ainsi, l'Axe 6 des orientations du PNRV marque sa volonté « d'impulser les démarches participatives et [de] renforcer l'implication des territoires et collectivités du Vercors »233(*) pour la mise en oeuvre, le suivi et l'évaluation de la Charte du Parc. Il s'agit également de développer des méthodes participatives, tels que les jeux de rôles évoqués précédemment. De même, l'ouverture des Commissions du Parc et groupes de travail aux acteurs associatifs et socioprofessionnels peut servir à renouveler cette mise en dialogue du territoire, notamment sur la question foncière.

    Enfin, les réflexions de Louis Allie sur le rôle du PNR du Vercors l'amènent à considérer que l'éducation des jeunes et la sensibilisation des élus est peut-être « la voie la plus porteuse afin de maintenir en vie l'âme du massif [...]. Selon cette idée, les P.N.R. insuffleraient des valeurs du développement durable dans les comportements des touristes jusqu'aux conseils municipaux et ce dès le plus jeune âge. Les plus optimistes considèrent ces actions comme étant potentiellement rayonnantes à conditions d'expliquer de manière convaincante les tenants et les aboutissants des enjeux de développement social et économique et de la préservation du patrimoine culturel et naturel»234(*). Par ces démarches innovantes de « participation-formation » qui n'oublient pas la question foncière, le Parc naturel régional du Vercors contribue à faire vivre l'idée selon laquelle les Parcs sont des territoires d'innovation235(*).

    3. L'ambition d'agir sur la gestion de l'espace dans Belledonne

    3.1. Présentation générale

    Le massif de Belledonne est une chaîne de montagnes qui s'étend sur 60 km de long et 10 km de large, constituant la bordure sud et est de la vallée du Grésivaudan. La vallée du Grésivaudan est quant à elle un axe majeur du Sillon alpin (du Genevois français au nord, au Valentinois au sud) et draine une très forte croissance démographique et économique entre Grenoble et Chambéry. Belledonne est donc sous influence périurbaine, essentiellement par sa relative proximité à l'agglomération grenobloise. Néanmoins, il est difficile de qualifier pleinement ce massif de territoire périurbain car des logiques d'agriculture de montagne et de tourisme alpin notamment sont encore très présentes.

    D'un point de vue administratif, une partie du massif de Belledonne, les « balcons », est réunie depuis le 1er janvier 2009 au sein de la Communauté de communes du Grésivaudan : cette récente intercommunalité résulte de la fusion de cinq communautés de communes et d'onze autres communes « isolées » (qui n'étaient pas membre d'un EPCI), soit un total de 47 communes réunies236(*). Côté Belledonne, l'ancienne Communauté de communes du balcon de Belledonne (CCBB) créée en 1993 regroupait alors les dix communes de la partie sud des balcons : limitée au nord par la commune de Laval, et au sud par Vaulnaveys-le-Haut. Cependant, la fusion au sein de la nouvelle intercommunalité n'a pas permis l'intégration de toutes les communes des balcons de Belledonne : en 2010, Venon a intégré La Métro (agglomération grenobloise), et Vaulnaveys-le-Haut la Communauté de communes du Sud Grenoblois.

    Source : AURG, Avril 2002

    D'un point de vue purement géographique, l'analyse du massif de Belledonne indique une unité territoriale qui ne correspond pas vraiment au découpage administratif existant.

    On pourrait ainsi imaginer une intercommunalité des balcons de Belledonne Sud, qui regrouperait les seize communes suivantes, du nord au sud : Laval, Saint-Agnès, Saint-Mury-Monteymond, La Combe de Lancey, Saint-Jean-Le-Vieux, Revel, Saint-Martin-d'Uriage, Chamrousse, Vaulnaveys-le-Haut, Vaulnaveys-le-Bas, Herbeys, Brié-et-Angonnes, Bresson, Jarrie, Champagnier, Montchaboud.

    Le retour à la réalité du découpage administratif est d'autant plus intéressant qu'il reflète un décalage dans le temps entre Belledonne Sud (dont les communes les plus au sud font partie de l'intercommunalité du Sud Grenoblois ou de La Métro), et Belledonne centre et nord (dont les communes sont réunies au sein de l'intercommunalité du Grésivaudan). Ce décalage dans le temps concerne des logiques territoriales liées à la périurbanisation rayonnante de l'agglomération grenobloise. Cette influence urbaine s'étend progressivement aux balcons de Belledonne, du sud vers le nord : c'est ainsi que les communes de l'extrémité sud du massif sont déjà des territoires périurbains, subissant dès la fin des années 1990, les tensions foncières caractéristiques d'un espace attractif de coteaux. Dans une perspective de gestion de l'espace économe en foncier ou encore du maintien de paysages patrimoniaux, pour Belledonne Sud « c'est quasiment trop tard, ce n'est plus là que tout se joue car le pire est passé »237(*). L'enjeu d'aujourd'hui semble donc porté sur la partie centre et nord du massif où s'affirme un enjeu majeur : la « disparition » du foncier agricole.

    Lorsque l'on aborde la problématique foncière sur ce territoire, le maintien de l'agriculture de Belledonne s'affirme comme la problématique première du massif : de là découlent les questions du mitage de l'espace sous la pression urbaine de la vallée du Grésivaudan et de la cuvette grenobloise, de la concurrence entre usages de sols et de la fermeture des paysages en raison de l'enfrichement238(*).

    De plus, c'est sous l'action de deux phénomènes intimement liés que la surface agricole recule ; ils structurent la réflexion sur la gestion de l'espace au sein du massif. D'une part, l'urbanisation des terres agricoles plates traduit le processus de mitage à l'oeuvre (responsable à 25% de la perte de terres agricoles), et d'autre part, l'enfrichement de la pente conduit à la fermeture des paysages d'alpages, synonyme d'uniformisation (l'avancée de la forêt constitue les 75% restants). Cet enfrichement résulte peu du déclin du pastoralisme mais plutôt de l'urbanisation des surfaces agricoles mécanisables, et donc plates, comme le résume l'illustration suivante proposée par l'Association pour le Développement de l'Agriculture de Belledonne, « l'ADABEL »239(*).

    Figure 27. Interdépendance vallée-versant, ADABEL 2009

    Cette interdépendance de la parcelle en pente avec la parcelle plane est peut-être exemplaire de la précarité de l'agriculture dans Belledonne : à cela s'ajoute un foncier très morcelé, avec des exploitations restées modestes. De plus, le développement des espaces résidentiels s'effectue au détriment de la superficie des espaces agricoles : une agriculture qui, au fil du temps, occupe de moins en moins d'espace et d'hommes.

    Figure 28. Evolution de l'agriculture de Belledonne, ADABEL 2009

    Ce tableau offre une perspective historique du déclin de l'agriculture de Belledonne : durant la période de 1979 à 1988, c'est en moyenne 66 ha par an « perdu » pour l'agriculture, puis la seconde période, de 1988 à 2000, où la consommation d'espace agricole dans Belledonne a presque doublée passant à 113 ha par an, et enfin, la dernière période montre un ralentissement de la consommation d'espace agricole, ramenée à 84 ha en moyenne par an, pourtant loin d'être stoppée sans l'adoption d'un changement de cap radical.

    Ainsi, sous le spectre de devenir définitivement des « communes-dortoirs », le maintien du multi-usage de l'espace alpin sous influence urbaine est un enjeu fort du massif de Belledonne. Comme ses deux voisins, le Vercors et la Chartreuse, Belledonne subit de profondes transformations par l'arrivée de nouveaux habitants qui viennent trouver un cadre de vie bucolique -au moins dans leur imaginaire- réalisant l'idéal de vivre à la campagne-montagne et de travailler en ville, dans la vallée. L'intercommunalité du Grésivaudan réunie ainsi les communes des balcons de Belledonne et leurs semblables de l'autre côté de la vallée, les communes du Plateau des Petites Roches sur le balcon de Chartreuse.

    Deux organismes jouent un rôle clé pour aborder les questions de gestion de l'espace sur Belledonne. Tout d'abord, l'association Espace Belledonne, créée en 1998, rassemble 33 communes (19 des balcons isérois de Belledonne puis 14 communes savoyardes du massif) sous une instance fédératrice souple afin de permettre un travail collectif à cette nouvelle échelle. Ce territoire élargi a été choisi pour constitué un Groupement d'Action Locale -GAL- qui a mis en oeuvre entre 2000 et 2006 le programme Leader+, puis sur la période 2007-2013 un programme Leader intitulé « La coopération, pour une démarche qualité commune de nos territoires ». Enfin, l'ADABEL est une association qui regroupe des agriculteurs, élus locaux, partenaires socioprofessionnels et autres citoyens qui sont impliqués dans le développement agricole sur vingt-deux communes du massif. Axée sur les questions agricoles, l'ADABEL défend depuis 1985 une gestion de l'espace qui assure la pérennité de l'activité agricole dans Belledonne : la sensibilisation a toujours été une orientation forte de son travail de terrain. L'association a identifié six axes d'action pour agir sur le foncier dans Belledonne :

    1. modification des pratiques de pâturage pour lutter contre la friche,

    2. réorganisations du parcellaire agricole pour faciliter l'accès et l'entretien des parcelles,

    3. création d'une Association Foncière Pastorale (en relation avec l'ADASEA240(*)),

    4. favoriser la création d'exploitation (création ou reprise d'activité),

    5. responsabiliser les propriétaires et faire appliquer la loi (mesures « terres incultes » notamment),

    6. création d'Unités d'Habitations Nouvelles sur des zones délaissées par l'agriculture.

    Sur le massif de Belledonne, les préoccupations en matière de gestion de l'espace semblent dessiner un tournant dans la stratégie adoptée jusqu'ici. Plutôt tournés vers la sensibilisation et la médiation depuis plusieurs années, les démarches s'orientent peut-être aujourd'hui vers d'autres pistes de solutions pour tenter de maîtriser l'usage des sols et garantir ainsi le maintien de l'activité agricole : intégré au périmètre de la région urbaine grenobloise, le territoire pourrait bien « bénéficier » des mesures imposées règlementairement par le futur SCOT.

    Ce terrain d'études permet ainsi d'identifier les principaux freins à la mise en oeuvre d'actions concrètes en faveur d'une gestion économe du foncier, assurant le multi-usage de l'espace alpin sur un territoire soumis à de fortes pressions urbaines. En outre, il s'agit d'interroger cette difficulté récurrente dans le passage à l'action, malgré les efforts qui sont parfois portés depuis longtemps.

    3.2. Des efforts portés sur la sensibilisation et l'animation territoriale

    3.2.1. Sensibiliser les élus et les habitants

    Si aujourd'hui la prise de conscience d'une gestion raisonnée de l'espace, protectrice des terres agricoles, est quasiment acquise sur Belledonne, c'est probablement grâce aux nombreuses démarches de sensibilisation menées depuis plusieurs années. Ici, l'effort s'est concentré sur la volonté de faire changer les mentalités, celles des élus en premier lieu. Et puisque les habitants, la société civile d'une façon plus globale, est aussi potentiellement un propriétaire foncier, la sensibilisation ne s'est pas cloisonnée aux élus ou aux acteurs institutionnels mais s'est adressée aux habitants de Belledonne. Dans le cadre du programme Leader+ de 2000-2006 sur le thème « la valorisation des ressources naturelles et culturelles », de premières initiatives dont la pertinence a été ensuite reconnue, ont pu être lancées.

    Source : ADABEL, 2001

    Dès 2001, l'ADABEL met en place un processus de concertation aboutissant à la rédaction d'une charte « Bien vivre en Belledonne ». Devant l'augmentation des conflits d'usage, l'incompréhension mutuelle, et la méconnaissance de l'agriculture, un groupe de travail est constitué pour élaborer ensemble une liste « d'actions-citoyennes » afin de réduire les conflits et mieux vivre dans Belledonne. Rassemblant des agriculteurs, des habitants, des chasseurs, des pêcheurs, des bergers, les Offices de Tourisme, des usagers et la Fédération de randonnée, un large espace de dialogue a pu s'ouvrir. A l'origine seuls les nouveaux résidents étaient visés, mais le sujet s'est vite élargi, des enquêtes auprès des élus et des parents d'élèves ont été réalisées, et la charte a finalement été diffusée très largement, chez tous les habitants des 22 communes participantes.

    Cependant, la Charte n'était pas une fin en soi : elle a permis d'impulser une large concertation mais la mise en oeuvre des principes définis aurait nécessité un travail d'animation important et continu, déterminé par la volonté politique et les moyens consacrés241(*).

    La sensibilisation se poursuit plus précisément sur la question de la gestion de l'espace face à l'avancée de la friche sur les terres agricoles non entretenues. Un Guide méthodologique « Agir contre la fermeture de l'espace » à destination des élus va ainsi être réalisé en 2003 par l'ADABEL à la demande de l'Espace Belledonne. Cette sensibilisation se fait plus « opérationnelle » et souhaite servir d'appui à la conception, à la planification et à la mise en place d'actions concertées de lutte contre la friche et l'extension des boisements en Belledonne.

    Enfin, l'enjeu de l'urbanisation du massif est abordé à travers la brochure pédagogique « Habiter et construire en Belledonne » distribuée systématiquement aux personnes venant retirer un dossier de demande de permis de construire. La réflexion est menée à l'échelle de l'unité paysagère de la maison, en passant par le hameau et la parcelle. De plus, c'était aussi la première fois que les dix-neuf communes iséroises de l'Espace Belledonne portaient un même discours sur l'urbanisation du massif. Le CAUE de l'Isère242(*) associé à un bureau d'étude, a mis en place un plan d'action de qualité architecturale et paysagère, et ce processus s'est accompagné d'un travail de sensibilisation des élus, en partenariat avec la DDE et le CAUE.

    D'autres démarches de sensibilisation et de pédagogie ont été initiées sur Belledonne, et c'est sans doute par l'accumulation de ces efforts que la prise de conscience a pu aboutir à ce qu'elle est aujourd'hui. Cette stratégie a permis de répondre aux nombreuses interrogations et inquiétudes qui pesaient sur la gestion de l'espace, auprès des élus, des institutionnels mais également des habitants ou des agriculteurs. Aujourd'hui, la Communauté de communes du Grésivaudan relance sa Charte paysagère et urbanistique qui devrait également impulser une nouvelle dynamique de sensibilisation sur les balcons de Belledonne. Ce volet de sensibilisation-pédagogie apparait être un préalable incontournable à toutes actions territoriales et semble faire l'unanimité.

    En lien avec l'Association Régionale de Développement de l'Emploi Agricole et Rural, et l'association Terre de Liens, la Communauté de communes du Sud Grenoblois se tourne elle aussi vers « la pédagogie auprès des élus ». Progressivement, la gestion des espaces sous pression urbaine et la maîtrise du foncier deviennent des sujets que la société civile s'approprie publiquement. En organisant de nombreuses réunions avec des propriétaires, sur les enjeux fonciers de Belledonne, les devoirs de chacun, les projets qui peuvent émerger, l'ADABEL diffuse les principes qu'elle défend. Par cette démarche de sensibilisation, longue, régulière et parfois laborieuse, la société civile devient un nouvel acteur sur la scène du foncier ; en faisant circuler l'information, cet acteur diffuse ainsi une sensibilisation à la gestion économe de l'espace. Finalement, se tourner vers le grand public, vers les habitants, c'est peut-être opérer un changement stratégique.

    Toutefois, il n'est pas question de faire sans les élus : « on ne peut pas faire sans les élus, c'est la donnée de base » indique Sophie Gouin, l'animatrice de l'Espace Belledonne243(*). Si tout est donc question de sensibilisation, il faut néanmoins sortir les élus de leur cadre communal : en montrant la dynamique à l'échelle du massif, la sensibilisation des élus permet d'amener à la réflexion territoriale, et c'est bien là tout l'enjeu. Ainsi, un travail sur l'harmonisation des documents d'urbanisme des communes de Belledonne permet de formuler collectivement la question suivante : « comment travailler ensemble ? ». Car si les mentalités des élus ont presque toutes évolué, les communes n'ont pas forcément les mêmes objectifs pour passer à l'action.

    3.2.2. Entre animation et accompagnement

    Cette seconde étape découle avant tout de la première : les acteurs sensibilisés sont potentiellement prêt à entrer dans une démarche de projet, mais pour cela, l'animation et l'accompagnement sont indispensables. Sur le territoire de Belledonne, de nombreux « petits » projets ont pu être porté grâce à cette stratégie portée par l'Espace Belledonne et l'ADABEL.

    Par exemple, l'ADABEL travaille avec les collectivités et les exploitants agricoles pour élaborer une stratégie en faveur de la transmission des exploitations sur Belledonne. L'accompagnement réalisé par l'ADABEL a initié la création de Comités Locaux d'Installation (CLI) en 2008. Ces CLI mobilisent des élus et des agriculteurs qui s'organisent dans une démarche de veille foncière, de diffusion de l'information, voire de médiation avec les propriétaires. L'objectif est d'essayer d'anticiper les mouvements fonciers, en amont de la vente. Le rôle d'animateur de l'ADABEL a permis d'organiser le fonctionnement de ces CLI, de favoriser leur mise en place, et l'association a également accompagner les communes afin qu'au sein de chacune, il y ait une personne chargée d'assurer cette veille foncière sur toutes les notifications de vente. La stratégie adoptée vise donc à accompagner les différents acteurs, élus, agriculteurs, candidats à l'installation, ou encore habitants, à se saisir des outils existants, à les aider dans l'élaboration d'un projet cohérent et concerté de gestion de l'espace et du foncier.

    L'ADABEL a d'autant plus un rôle stratégique que sous la pression foncière, la question de l'adaptation de l'agriculture à un nouveau contexte se pose. Ici, l'accompagnement permet d'opter pour une stratégie de spécialisation avec des produits du terroir, la vente directe, le bio, en somme, des projets innovants avec beaucoup de jeunes et de néo-agriculteurs sur un foncier précaire244(*). La pluriactivité, la transformation et la commercialisation à la ferme, sont autant de démarches de qualité soutenues par l'association245(*). Par ces actions d'animation de groupe de travail ou d'accompagnement de projet, la dynamique territoriale est bien présente, le territoire de Belledonne demeure attractif même si le coût du foncier reste assez sclérosant.

    Cependant, si la dynamique est présente, elle serait nettement réduite sans les missions d'animation et d'accompagnement assurées par différents organismes : « si l'on attend que les communes nous sollicitent, concrètement il ne se passera rien sur le foncier »246(*). L'animation permet en réalité de créer du projet, parfois ex nihilo, l'accompagnement vient donc ensuite. C'est au final un procédé en trois étapes qui succède à la phase de sensibilisation : chercher sur les communes les projets éventuels, accompagner les porteurs (élus ou individus) dans la définition du projet, et enfin, les aider jusqu'à la mise en oeuvre. Aujourd'hui, l'ADABEL est au début de cette démarche et de premières communes ont été visitées : de premières perspectives de projet ont déjà été identifiées, par exemple sur la commune de Saint-Martin-d'Uriage, un recensement de tous les exploitants est envisagé dans la perspective d'un échange parcellaire. Beaucoup de petits projets, en général sur des petites parcelles, bénéficient de cette aide, mais la question des moyens humains alloués à la démarche d'accompagnement est posée.

    Parmi les outils de gestion foncière ou de veille foncière sur Belledonne, on peut aussi citer la création de deux nouvelles Associations Foncières Pastorales (AFP), la mise en place d'une veille foncière en partenariat avec la SAFER ainsi qu'un répertoire des cédants potentiels de terres agricoles réalisé par l'ADASEA sur la partie sud de Belledonne (membre de l'intercommunalité du Sud Grenoblois). De plus, l'ADABEL assure le suivi des procédures de PLU et l'expérimentation d'une démarche sur une commune volontaire dans le cadre de l'arrêt des Programmes d'Entretien des Zones Menacées d'Abandon (PEZMA) fin 2010247(*). Enfin, au sein de la Communauté de communes du Grésivaudan, une réflexion est menée sur la création d'un Etablissement Public Foncier Local ou l'adhésion à l'EPFL grenoblois. L'acquisition foncière, quasiment impossible par les petites communes de Belledonne, reste un moyen direct mais lourd pour maîtriser son foncier.

    En revanche, si le diagnostic s'affine progressivement grâce aux missions d'animation et d'accompagnement, la plupart des collectivités sont encore dans l'incapacité de sortir du « rôle de gendarme », en réaction à un phénomène et non en anticipation de celui-ci. Face à l'urbanisation, il apparaît nécessaire d'anticiper, d'être dans une posture proactive. Pour la pérennité de l'activité agricole sur le massif, il s'agit de rassurer les agriculteurs encore en activité face aux agriculteurs-propriétaires qui anticipent le changement d'usage de leurs parcelles et à la tradition des baux oraux qui précarisent l'activité mais permet une vente aisée au cas où la parcelle devenait constructible.

    L'accompagnement des projets qui permettent d'assurer le multi-usage du territoire alpin est d'autant plus coûteux en énergie qu'il n'est pas un gage de réussite du projet. Par exemple, l'ADABEL essaie, parfois en vain, de trouver des terres pour de jeunes agriculteurs (car la demande d'installation est extrêmement forte). Ainsi, un projet de chèvrerie bio à Revel a pu aboutir grâce à la mobilisation de plusieurs acteurs, mais l'obstacle du foncier n'a pu être franchi ; c'est donc une chèvrerie « hors-sol » dépourvue de terres pour faire pâturer les chèvres qui a ouverte.

    En somme, la sensibilisation et les démarches d'animation ou d'accompagnement de projets participent fortement à la prise de conscience générale des problèmes fonciers sur Belledonne, mais le passage à l'action reste difficile. La volonté de mise en oeuvre concrète d'un projet de gestion de l'espace ou de maîtrise du foncier est bien moins évidente et tout semble dépendre de la politique de chaque commune. Si certaines communes sont volontaristes en la matière, la commune de Saint-Martin-d'Uriage a ainsi « rendu » 100 hectares à l'agriculture, a contrario, d'autres élus du massif ne sont pas du tout réceptifs. Dans une certaine mesure, la stratégie « sensibilisation-animation-accompagnement » au service de la maîtrise foncière reste limitée et « tant que les communes n'ont pas définis leur politique, cela ne pourra pas aller plus loin »248(*). Une autre démarche plus lourde, plus difficile et plus risquée politiquement fédère pourtant les acteurs soucieux du développement équilibré de Belledonne : « il faudrait plutôt réussir à anticiper, à construire une vraie politique foncière qui permette de trouver et de proposer de nouveaux projets dans une cohérence globale à l'échelle du territoire »249(*).

    3.3. Des « UHN » aux « limites intangibles », le tournant du SCOT ?

    L'initiative des Unités d'Habitations Nouvelles (UHN) sur Belledonne opte pour une démarche orientée vers le projet d'aménagement lui-même, à l'échelle de la commune. La volonté de passer à l'opérationnalité de la lutte contre la friche est ici prépondérante. Cependant, la révision du Schéma Directeur en SCOT de la Région Urbaine Grenobloise offre une autre perspective d'action pour préserver les terres agricoles de Belledonne et les soustraire à la pression foncière : la réflexion ainsi menée révèle aussi les potentiels effets pervers de l'inscription d'UHN au sein du futur SCOT.

    3.3.1. Le Projet d'Unités d'Habitations Nouvelles (UHN)

    Partant du constat selon lequel les espaces agricoles sont les seuls réserves foncières utilisées pour permettre la croissance urbaine, l'ADABEL propose de trouver un nouvel équilibre pour mieux répartir la pression foncière sur différents types d'espace. Par ailleurs, on constate que sur le massif, des surfaces importantes ont été délaissées par l'agriculture depuis plus de trente ans. L'avancée de la friche et des boisements porte alors atteinte aux terres agricoles mais aussi à la capacité de construire. Profitant du soutien financier du Leader+ sur Belledonne, l'ADABEL entame une réflexion sur des formes d'urbanisation alternatives, les « Unités d'Habitations Nouvelles »: l'idée est d'implanter de nouvelles constructions en hameau dans la pente, quitte à défricher ou déboiser certains espaces, dans le but de préserver les terres agricoles stratégiques sur terrain plat. Dans cette perspective, « les collectivités locales sont les acteurs clefs pour construire en lisière de forêt et préserver les terres agricoles »250(*). Il s'agit aussi de prendre le contre-pied suivant : « Alors que les espaces agricoles, forestiers et naturels sont régulièrement associés dans les textes législatifs, ils n'ont absolument pas le même rôle face au développement des activités consommatrices d'espace. A ce jour, seules les surfaces agricoles sont mises à contribution, cette situation ne doit pas perdurer »251(*).

    La création de ce nouvel outil d'aménagement profite du cadre règlementaire modifié par la Loi Urbanisme et Habitat de 2003 : l'article L 145-3 du Code de l'Urbanisme autorise dorénavant, sous certaines conditions, la réalisation de constructions en dehors des zones déjà urbanisées de la commune, sur des terrains à vocation pastorale, agricole ou forestière. C'est notamment le cas quand le maintien des terres nécessaires aux activités agricoles et forestières [...] impose une urbanisation en discontinuité des hameaux252(*). En fait, cette disposition existait déjà au sein de la Loi Montagne de 1985 -« création de hameaux nouveaux »- ou encore au sein de la Loi SRU de 2000 : « la construction de zones urbaines nouvelles en discontinuité, à condition que cette discontinuité soit nécessaire à une meilleure préservation des terres agricoles et des espaces naturels ». L'originalité et l'intelligence de cet outil UHN est de permettre la mise en oeuvre de principes édictés dans la loi mais qui n'avaient jusqu'ici pas été décliné. Ici, le cadre normatif n'était pas restrictif, au contraire, il offrait la possibilité d'être décliné localement : avec les UHN, l'ADABEL a construit une intelligibilité mais surtout une utilité au cadre normatif, au service des enjeux du territoire de Belledonne.

    Seulement, les UHN sont restées au stade de projet. Par exemple à Saint-Mury-Monteymond (10,84 km², 344 habitants au recensement 2006) en 2006, des projets d'UHN ont été portés jusqu'au Conseil municipal, mais lors du vote, il a manqué une voix pour que les projets soient approuvés. Les études lancées également sur Laval et Saint-Pierre-d'Allevard n'ont pas abouti, et à chaque fois « les élus ont eu peur »253(*). Pourtant, dans la partie nord du massif de Belledonne, « la vallée du Haut-Bréda est tellement envahie par l'avancée de la forêt qu'il n'y a même plus de place pour construire des maisons : l'enjeu là-bas c'est déjà de défricher pour construire »254(*).

    En 2008, le Pays du Grésivaudan propose de relancer l'idée des UHN dans le cadre de la charte paysagère urbanistique et architecturale du Pays du Grésivaudan, le projet s'intitule alors : « Extension choisie du paysage bâti dans le cadre d'une approche environnementale, paysagère et urbanistique : un projet de nouveau hameau ». Ce dernier n'aborde toutefois pas le préalable d'une contrepartie agricole à l'urbanisation, et l'ADABEL rappelle que « la construction d'UHN doit être accompagnée de la préservation de façon durable d'espaces agricoles à fort potentiel »255(*). Le Pays se justifie en indiquant alors qu'il n'est pas possible d'imposer aux maires du Pays cette contrepartie agricole de manière règlementaire. Depuis, aucun projet d'UHN n'est en cours ni à l'étude.

    Aujourd'hui, le territoire de Belledonne s'inscrit dans la dynamique de révision du Schéma Directeur en SCOT de la Région Urbaine Grenobloise. L'ADABEL a été sollicitée au sujet des UHN afin d'étudier l'intégration de cette démarche au futur document. Après réflexion, il a été décidé de ne pas porter cette idée d'UHN à l'échelle du SCOT car le zonage actuel U (urbanisable) et AU (à urbaniser) est déjà suffisamment important pour contenir la croissance urbaine à venir. En effet, le diagnostic réalisé256(*) indique que dans les périmètres urbains actuels (PLU et Schéma Directeur), et au rythme de croissance actuel (130ha/an pour l'habitat) des réserves sont constituées pour soixante ans dans les PLU, et pour quinze ans dans les marges du Schéma Directeur : « le risque que comporte les UHN, c'est d'ouvrir des zones à l'urbanisation, là où il n'y en aurait pas eu »257(*). Puisqu'à l'échelle du SCOT les réserves foncières actuelles sont assez importantes, nul besoin d'ouvrir des espaces à l'urbanisation en discontinuité des zones urbanisées existantes : autant urbaniser d'abord les zones U puis AU, au fur et à mesure des besoins. Pour une fois, cet outil d'aménagement, l'UHN, ne semble trouver sa pertinence qu'à l'échelle communale, au service d'un projet local et précis.

    3.3.2. Le SCOT de la RUG et ses « limites intangibles »

    Le futur SCOT contient des prescriptions pour valoriser et préserver les espaces naturels et agricoles (zonage N et A) sur le long terme, à l'horizon 2030. Ainsi, une carte indiquera précisément les limites maximales intangibles du développement urbain sur tout le périmètre du SCOT (nouveauté des SCOT « Grenelle »). Ce sont donc sur ces futures « limites intangibles » de l'urbanisation du massif de Belledonne que l'ADABEL a préféré concentrer ses efforts.

    Dans ce nouveau contexte, la maîtrise du foncier agricole du territoire de Belledonne peut s'appuyer sur ces limites intangibles afin d'asseoir l'usage des parcelles stratégiques pour l'agriculture qui sont soumises aux pressions de l'urbanisation. Pour l'ADABEL, il s'agit de ramener ces limites intangibles au plus près de l'urbanisation actuelle, afin d'assurer une superficie agricole la plus grande possible sur des terrains plats. Le lobbying est ici la stratégie à adopter pour que ce SCOT encadre fortement la consommation des terres agricoles. Les limites fixées doivent reprendre au moins toutes les zones N et A des POS et PLU, et de façon optimale ou idéale, reprendre des zones classées AU qui sont véritablement stratégiques pour l`agriculture, ce qu'a identifié l'ADABEL par ailleurs. De la même manière, l'intercommunalité du Sud Grenoblois a lancé une étude foncière réalisée par l'ADAYG sur les secteurs à enjeux stratégiques sur son territoire. Ainsi, la révision du SCOT peut se comprendre comme une occasion inédite de poser des limites intangibles pour préserver les terres agricoles et ce, à une échelle intercommunale élargie, celle du bassin de vie, autrement plus pertinente que l'échelle communale.

    Les prescriptions du SCOT seront inscrites d'ici la fin 2010 dans son Document d'Orientations et d'Objectifs (DOO) qui dispose d'une valeur règlementaire : ses prescriptions s'imposeront donc à tous les documents d'urbanisme dits « de rang inférieur » (PLU, PLH, PDU, schéma commercial...) qui devront lui être compatible. Ainsi, la carte des limites intangibles de l'urbanisation imposera aux PLU de définir la position exacte de ces limites qui deviendront alors intangibles (sauf décision prise à l'échelle de la RUG). Si ces limites ne sont pas définies par le PLU communal dans les trois ans qui suivent l'adoption du SCOT (donc d'ici fin 2013 a priori), ce sont les limites actuelles qui deviendront intangibles.

    De plus, le SCOT prescrit aussi de diviser par deux la consommation d'espaces urbains non bâtis dédiés à l'habitat et aux services urbains : pour chaque secteur a donc été fixé un seuil de consommation annuel qui est de 15ha/an sur Belledonne (chiffres de novembre 2009). Toujours dans cet état d'esprit de limiter au maximum l'étalement urbain et la périurbanisation, des règles limitant la consommation d'espace par logement ont également été fixées : pour l'habitat individuel, il s'agit de 500m² par logement maximum (chiffre calculé sur l'ensemble des logements individuels réalisés durant l'année dans une commune). Cet automne 2010 devrait être proposée aux communes une méthodologie pour travailler à la question de ces limites intangibles : une méthodologie qui serait retravaillée pour chaque territoire de la région grenobloise.

    Si le futur SCOT de la région grenobloise est une nouvelle opportunité pour la gestion de l'espace sur Belledonne, il n'en demeure pas moins que revenir sur le classement de parcelles AU non urbanisées (et encore plus pour une parcelle U non urbanisée) n'est pas aisé. A cette échelle, la démarche a des chances d'aboutir alors que cela est quasiment impossible à l'échelle communale, c'est ainsi qu'il est porteur d'un certain espoir. Le SCOT permet d'éloigner le centre de décision, du Conseil municipal vers le Conseil communautaire.

    Le zonage proposé par le SCOT n'engage pas directement la responsabilité des maires. « Il y a des maires volontaristes, qui sont très clairs et cohérents sur ce qu'ils veulent, et il y en a d'autres qui sont plus sensibles aux demandes individuelles : c'est là qu'il faut être le plus vigilent »258(*). On en revient dès lors au problème de fond du foncier dans ces territoires, le prix. Faire avec l'état actuel du marché foncier amène ainsi à opposer frontalement les intérêts particuliers à l'intérêt général. Maintenir le collectif, c'est cela qui demande le plus d'énergie et une stratégie de sensibilisation et d'animation sur un temps long. Avec un zonage fort qui pose des limites intangibles sur le long terme, la réversibilité des documents d'urbanisme locaux est évitée, et même si les élus ont souvent de très bonnes intentions c'est au moment de déterminer les parcelles qui resteront agricoles que les impératifs de « démocratie participative » sont parfois brandis259(*).

    Aujourd'hui, « au-delà des intentions, il faut arriver à trouver des élus qui sont près à se faire des ennemis pour défendre l'intérêt collectif »260(*). De nombreuses exemples illustrent ce constat et sur Belledonne, c'est l'exemple de la ferme communale de La Chapelle du Bard : à l'époque, une hostilité féroce s'était manifestée et les élus locaux n'avaient bien entendu pas été réélu, mais sous la menace ils avaient fait naître ce projet dont aujourd'hui l'utilité et la pertinence font l'unanimité...261(*)

    Enfin, si l'on peut parler d'un tournant opéré par le SCOT dans la stratégie de gestion de l'espace sur Belledonne, c'est essentiellement grâce à la portée règlementaire et contraignante d'un tel document. De fait, quand les cadres ne sont pas « règlementaires » ou « opposables », la pratique de terrain semble montrer que leurs bons principes passent par la sensibilisation, l'animation ou l'accompagnement réalisés à l'échelle locale ; le cadre est alors subsidiaire.

    Si le cadre normatif doit jouer son rôle, il s'avère peut-être que ce soit plutôt à l'échelle d'un SCOT, puisque dans un PLU, on s'appuiera directement sur celui-ci et pas sur d'autres cadres normatifs, ni Convention alpine ni DTA des Alpes du Nord : le PLU ne multipliera pas les références. D'après plusieurs acteurs locaux, si ces cadres peuvent devenir « parlants », c'est par leur transcription au sein des SCOT, pour inclure les spécificités de la montagne par exemple. La traduction opérationnelle de ce type de cadres normatifs est donc surement à construire à cette échelle de l'intercommunalité.

    3.4. Le problème récurrent du financement

    La dernière dimension offerte par ce terrain d'études sur Belledonne est le problème du financement des actions. En effet, ni sur Chamonix ni sur le Vercors cette question a semblé poser véritablement problème, alors que sur le massif de Belledonne, le financement apparait comme un obstacle récurrent.

    3.4.1. Financer une mission d'ingénierie à destination des élus

    Avec le programme Leader 2007-2013, l'Espace Belledonne souhaite porter à l'échelle du massif de Belledonne l'objectif de « maîtriser les mutations du territoire placé sous influence périurbaine, par la mise en oeuvre d'une démarche qualité territoriale »262(*). Mais d'après l'animatrice du programme263(*), pour passer à la mise en oeuvre il faudrait activer d'autres financements car les dispositifs du FEADER264(*) ne permettent pas de financer une « mission d'ingénierie à destination des élus ». Ce qui semble poser problème c'est le public ciblé par cette mesure, les élus. Si l'Espace Belledonne a choisi de renforcer sa stratégie d'accompagnement des élus, le cadre règlementaire européen n'est dans ce cas pas adapté aux besoins exprimés par ce territoire. En attendant de trouver une autre solution, la mise en oeuvre de cette mission d'ingénierie est reportée.

    Si la sensibilisation est un préalable, le financement de la mise en oeuvre et donc l'accompagnement du projet est indispensable. Les actions sont pour l'instant en attente mais « quand l'outil financier sera là, cela redémarrera tout seul »265(*). L'espace Belledonne apporte ainsi la majeure partie, si ce n'est l'intégralité des financements pour la réalisation d'actions sur le massif. Toutefois on peut comprendre les limites qui sont imposées par le FEADER car il est du devoir légal des municipalités d'assurer et d'assumer les compétences dont elles disposent. Si l'Espace Belledonne, par un accompagnement renforcé auprès des communes, souhaite voir la réalisation (facilité et plus rapide) de projets concrets sur le massif en faveur d'une gestion raisonnée de l'espace, dans quelle mesure permet-elle aux municipalités de se soustraire de leurs obligations ? Le fait de mobiliser des financements extérieurs au territoire (l'Europe) révèle le point faible de cette stratégie : ce qui pose problème ce n'est pas cette « stratégie de l'accompagnement » en elle-même, mais c'est plutôt par qui est-elle financée ? Il semble logique que si les communes ont besoin d'être accompagnées pour réaliser pleinement leurs obligations, elles sont censés affecter le financement correspondant. En matière de gestion foncière aussi les moyens financiers et humains locaux ne sont pas à la hauteur des enjeux auxquels doivent faire face les communes de Belledonne. Et pourtant, le besoin en accompagnement semble unanime266(*) :

    ü « Ce n'est pas forcément la volonté politique qui manque mais plutôt le manque de moyen en ingénierie, en animation et pour l'accompagnement des élus »

    ü « Ce dont on a besoin c'est "simplement" de l'animation et de l'accompagnement »

    ü « Les outils sont déjà nombreux, mais c'est l'action au cas par cas il est la plus pertinente »

    D'après l'ADABEL267(*), aujourd'hui il existe peu de financement sur ces questions d'animation foncière : ce sont les projets eux-mêmes qui mobilisent les aides, bien qu'il faille en amont de l'animation pour les susciter. Le projet Foncimalp piloté par le Suaci268(*) permet de dégager du temps sur cette question, mais peu d'aides s'attachent à faire émerger les projets (a priori ni le Leader ni le CDRA le permettent). Pour la lutte contre la friche, l'ADABEL a réussi à négocier des budgets qui seront alloués aux communes pour réaliser des actions concrètes dans le cadre de l'après-PEZMA. De cette manière, chaque commune pourra gérer une enveloppe financière allouée à la gestion de l'espace, et mettre ainsi en place les actions les plus pertinentes suivant le contexte local. En résumé, en matière de financement, les acteurs locaux partagent ce sentiment : « on n'a pas les moyens d'un Parc »269(*).

    3.4.2. Le projet de PNR de Belledonne

    Le projet de Parc Naturel Régional de Belledonne est intéressant au-delà du fait qu'il permettrait d'apporter des moyens financiers supplémentaires pour travailler sur cette question de l'animation foncière, ce qui n'a toutefois pas manqué d'être évoqué par les acteurs locaux.

    Promu « territoire remarquable de montagne » en février 2009 par la région Rhône-Alpes, le massif de Belledonne pourrait constituer un Parc comparable, en superficie, à celui de la Chartreuse : il rassemblerait un total de 54 communes (dont 27 iséroises et 27 savoyardes), s'étendant de Vaulnaveys-le-Bas à Le Pontet. Fortement mobilisée sur le projet, l'Espace Belledonne avait profité de son Assemblée Générale le 18 juin 2009 pour organiser un débat autour de la question suivante : « L'avenir de l'Espace Belledonne : quels outils pour construire un projet de territoire partagé et durable ? » Bien sur, la question de fond était celle du Parc comme outil adapté ou non pour assurer l'avenir du territoire de l'Espace Belledonne. Plusieurs élus avaient été conviés pour apporter leur éclairage sur ce questionnement et indiquer la meilleure marche à suivre.

    Depuis, un avant-projet a été lancé par l'Espace Belledonne et son président Jean Picchioni, et la région en a pris acte : le 15 avril 2010, elle a annoncé le lancement d'une étude préliminaire à un dossier de projet de PNR (réalisée par le bureau d'études Mosaïque Environnement) qui permettra de statuer sur la valeur du patrimoine naturel du territoire (qui doit être d'intérêt national pour le classement PNR) ; le rendu est prévu pour novembre 2010.

    Toutefois, la procédure de validation est devenue très complexe, longue et coûteuse et d'autres projets de PNR sont déjà en cours en Rhône-Alpes, dont celui des Baronnies initié il y a presque dix ans par exemple. Une procédure « normale » qui devrait prendre environ une dizaine d'année avant d'aboutir si tout se passe sans encombre sur Belledonne. Aujourd'hui, le contexte est plutôt défavorable donc, notamment en raison de la baisse de moyens que subit la région. Aussi, sur cette question récurrente du financement, la perspective d'un classement en PNR ne résoudrait ce problème que d'ici dix ans, au mieux. Enfin, il est difficile de ne pas y voir un probable « effet PNR » sur cette question de la maîtrise foncière.

    4. Vers la maîtrise foncière

    4.1. La grille d'analyse (B) « Initiatives locales et foncier »

    Cette seconde grille répond à la première réalisée pour l'analyse du discours foncier produit par les deux cadres normatifs alpins. La grille (B) est organisée de la même manière, les leviers potentiels d'intervention foncière en colonne, et les thèmes en lien avec le foncier et la gestion de l'espace en ligne, indiquant ainsi un large spectre de mesures possibles en matière de foncier. La grille (B) « Initiatives locales et foncier » permet d'organiser les multiples initiatives en matière de foncier dans les Alpes du Nord. Ainsi, plusieurs dimensions des expériences menées dans trois terrains d'études permettent de remplir la grille, mais également quelques autres initiatives -qui ont pu être évoquées par les acteurs interrogés- sont mobilisées. Toutefois, toutes les initiatives locales de la grille (B) sont cantonnées au périmètre de l'étude. De fait, il ne s'agit pas d'une liste exhaustive des initiatives locales en matière de foncier sur le territoire des Alpes du Nord. Les cases vides peuvent donc signifier qu'il n'y a pas d'initiatives connues qui peuvent correspondre à la structure de la grille telle qu'elle a été conçue. Dès lors, en cherchant spécifiquement une initiative selon un thème et un levier d'intervention, il est sans doute possible de remplir d'autres cases.

    Cette seconde grille d'analyse (B) des initiatives foncières locales est complétée à 68% (49 mesures sur les 72 potentielles) ce qui montre d'abord que les initiatives locales alpines sont variées dans leur mode d'action foncier (les colonnes) et transversales dans les thématiques abordées. De plus, les initiatives répertoriées sont inégalement réparties suivant les thèmes et les leviers : les pratiques foncières des acteurs du territoire des Alpes du Nord se caractérisent ainsi.

    Tout d'abord la majorité des leviers d'intervention sont fortement actionnés sur le terrain, avec une très faible variation entre eux (trois leviers sont mobilisés sept fois, trois autres six fois, et un autre levier cinq fois sur les huit fois possibles). Cependant, une « lecture en creux » montre d'une façon plus évidente que deux leviers d'intervention foncière semblent « mis de côté » :

    ü La solidarité territoriale, est un levier qui vise à entreprendre des actions concrètes d'assistance, de soutien entre collectivités, ou de coordination pour la mise en oeuvre d'action foncière sur le territoire communal ou supra-communal, on comprend de fait la difficulté d'actionner ce levier pour une collectivité. Sa mobilisation doit s'effectuer plutôt à l'échelle d'une intercommunalité.

    ü Le lien entre transport et urbanisme est également un levier foncier qui s'actionne à une échelle supra-communale (inter-Scot, approche métropolitaine par exemple) et la question de la gouvernance pour ce levier est essentielle. Cette logique de mise en oeuvre explique peut-être la moindre utilisation de ce levier.

    Par cette même « lecture en creux », seules deux thématiques sont moins mobilisées (trois fois sur neuf possibles) que les autres :

    ü L'atteinte aux ressources naturelles, « pâtit » certainement d'une approche qui demeure centrée sur la protection au sens strict (par un zonage, une règlementation inflexible, des périmètres...).

    ü La ségrégation socio-spatiale, ne semble pas être considérée comme une thématique sur laquelle l'action foncière peut agir. La politique du logement supplante une réflexion centrée sur cette ségrégation, peut-être parce qu'elle est politiquement « dangereuse » voire « taboue ».

    Cette grille d'analyse d'initiatives locales qui agissent sur le foncier alpin est complétée d'un tableau qui détaille les mesures identifiées sur le terrain.

    Grille d'Analyse (B)

    « Initiatives locales et foncier »

    Figure 29. Grille d'analyse (B) "Initiatives locales et foncier", N. Moyon 2010

    Détail de la Grille d'analyse (B)

    « Initiatives locales et foncier »

    A. Préservation

    1. Aux Gets dans le cadre du Projet Village 2003-2013, le gèle des constructions a répondu aux capacités d'approvisionnement et de traitement de l'eau localement.

    2. Principe de champs d'inondation contrôlée dans le Grésivaudan permet une réduction du débit de l'Isère en étalant la crue sur de grandes étendues, au lieu de la canaliser entre les digues.

    4. Charte paysagère de la communauté de communes du Massif du Vercors (CCMV) en 2006.

    5. Le Conservatoire du littoral détient de nombreux sites sur les bords du lac d'Annecy et du lac Léman côté français permettant de limiter l'étalement urbain et constituer un continuum urbain autour des lacs.

    8. Limites intangibles du SCOT de région urbaine grenobloise (RUG) pour préserver les espaces agricoles et naturels sur le long terme.

    B. Choix d'urbanisation

    1. Petit guide Bien construire sur les balcons de Chartreuse, réalisé en mai 2006 par le CAUE de l'Isère.

    2. PPR de Chamonix avec un zonage limitant l'implantation du bâti.

    3.5. Sur les balcons de Belledonne, la brochure Habiter en Belledonne » préconise un habitat économe en espace et cohérent avec le tissu bâti existant afin l'éparpillement de maisons individuelles positionnées au centre de leur parcelle.

    4. Guide méthodologique « Agir contre la fermeture de l'espace » à destination des élus a été réalisé en 2003 par l'ADABEL à la demande de l'Espace Belledonne.

    7. La brochure pédagogique « Habiter en Belledonne - construire en montagne» est distribuée systématiquement aux personnes venant retirer un dossier de demande de permis de construire. L'implantation de la maison sur la parcelle ou encore son orientation sont abordés

    8. Construire en continuité du bâti existant le plus possible, en ouvrant progressivement à l'urbanisation des parcelles plus éloignées si au moins 70% des parcelles urbanisations sont bâtis (SCOT RUG) : assure une meilleure pérennité de l'exploitation des terres agricoles périurbaines.

    C. Polarisation urbaine

    1. Renforcer les bourgs centres et les centres village pour limiter l'artificialisation des sols (Charte de développement de la CCMV).

    2. Les zones inconstructibles à risque participent à la polarisation urbaine dans une vallée longue et étroite comme Chamonix.

    3. C'est par le mitage de l'espace que s'opère l'étalement urbain, il faut donc ouvrir à l'urbanisation future seulement autours des pôles existants pour les renforcer (AURG).

    4. Les corridors biologiques permettent de maintenir des paysages de proximité (CG 38).

    5. Les coupures d'urbanisation doivent constituer des frontières intangibles à l'extension des pôles urbains (Scot Rug).

    7. L'axe 1 du futur PLH de l'agglomération grenobloise (2010-2015) indique d'accroître le rythme de production de logements, notamment les logements locatifs sociaux et en accession sociale à la propriété, dans une logique d'équilibre du territoire.

    8. Maintenir l'exploitation des terres mécanisables pour l'essentiel en plaine, entre les pôles urbains (Adabel, Adayg).

    D. Participation

    2. Dans le cadre de l'opération « Sites pilotes de gestion intégrée des risques naturels dans les Alpes » (PGRN) un projet participatif de réduction des risques s'est déroulé à Bourg Saint-Maurice au premier semestre 2010.

    3.4. Atelier avec les habitants dans le cadre des chartes paysagères à l'initiative du PNR Vercors.

    5. Sensibilisation à travers des ateliers pratiques des élus pour l'élaboration de la Charte de Développement de la CCMV.

    7. La mobilisation de plusieurs services de la commune de Chamonix (social, urbanisme, économie, tourisme) et la participation active de nombreux élus a fait émerger les lignes directrices de la politique foncière de Chamonix.

    8. La Charte Bien vivre en Belledonne a permis d'entamer un dialogue entre néo-ruraux et agriculteurs sur le massif : la charte a notamment permis de construire un discours pour limiter les conflits d'usage.

    E. Solidarité territoriale

    6. Chamonix mène une politique foncière en faveur du maintien des populations locales évincées par les prix élevés du marché local de l'habitat.

    7. A l'échelle de la communauté de communes de la Haute-Vallée de l'Arve, en matière de logement, l'objectif est mis sur le logement aidé et le logement saisonnier.

    8. L'ADABEL met en avant la liaison entre vallée et versants et la solidarité induite entre communes pour préserver l'activité agricole et l'entretien des versants.

    F. Gouvernance

    2. La communauté de communes de la vallée de Chamonix est chargée de réunir les financements pour améliorer le paravalanche de Taconnaz : la thématique des risques naturels mobilise cette nouvelle instance de gouvernance intercommunale.

    3. La réalisation de la carte de destination des sols jointe à la Charte de développement de la CCMV vise notamment à stopper le mitage de l'espace : cette carte à échelle intercommunale est opposable.

    4.5. Les débats de secteur dans le cadre du futur Scot de la Rug ont constitué une instance d'échanges supra-communale pour établir les limites de l'urbanisation future.

    7. Un groupe de travail « cession d'actifs immobiliers » s'est organisé en interne des services de la commune de Chamonix pour définir l'usage futur possible des biens immobiliers de la commune, certains ont été identifiés pour du logement.

    8. L'ADABEL et l'ADAYG participent en un sens à faire émerger une gouvernance agricole à l'échelle du Y grenoblois.

    G. Prospective

    2. Le SYMBHI se charge de la planification des travaux nécessaires dans le cadre de la gestion intégrée des grandes rivières et la protection contre les crues sur le bassin de l'Isère.
    3. La Charte de Développement de la CCMV ou le futur Scot de la Rug affichent des objectifs de limitation du mitage de l'espace.
    4. La Charte du PNR Vercors impulse une dynamique pour la réalisation de chartes paysagères.
    5. De même que pour le mitage de l'espace, les documents de planification restreignent l'étalement urbain.
    6.7. Le PLH est un document de planification qui fixe les objectifs de construction de logements sociaux et leur répartition au sein du périmètre de mise en oeuvre (PLH de l'agglomération grenobloise).
    8. L'ADABEL a identifié les zones agricoles stratégiques dans le secteur de Belledonne, afin que un zonage protecteur soit mise en place dans le cadre du futur Scot de la Rug.

    H. Densification

    3.4.5. Le guide « Habiter en Belledonne » indique qu'il est préférable de rénover l'habitat existant des centre-village avant d'ouvrir à l'urbanisation nouvelle d'autres parcelles, pour maîtriser l'étalement de l'urbanisation et maintenir des paysages patrimoniaux.

    6.7. Le futur programme Les Tissières piloté par la commune de Chamonix, à destination du logement permanent, comportera quelques lots individuels ainsi que du semi-collectif afin d'atteindre l'objectif de 80 à 100 logements.

    8. La densification de l'urbain, la rénovation, la construction des dents creuses est une priorité pour diminuer la consommation d'espaces agricoles et naturels (Scot de la Rug).

    I. Transport-Urbanisme

    3. Dans la région urbaine grenobloise, la polarisation urbaine autour des pôles multimodaux de transport concoure à limiter le mitage de l'espace en ouvrant à l'urbanisation de manière préférentielle des parcelles regroupées autour des pôles.

    5. Parmi les principaux éléments du futur Scot de la Rug, la réduction des vitesses (réaménagement des voies, par exemple réservées aux TC) devrait renforcer les comportements de proximité et donc l'offre locale, fiabiliser les distances/temps et l'équilibre des territoires, tout en infléchissant l'étalement urbain.

    Figure 30. Détail de la grille d'analyse (B), N. Moyon 2010

    4.2. Trois stratégies cumulatives pour construire les conditions d'une maîtrise foncière

    L'étude des trois terrains a montré des démarches différentes pour appréhender la question foncière dans les Alpes du Nord, et tenter d'y répondre. L'objectif poursuivi était de montrer l'utilisation de certains outils de maîtrise foncière dans un contexte local particulier, au service d'un projet précis. Ces démarches, dont l'efficacité ou le caractère novateur sont variables, servent quoiqu'il en soit une politique foncière volontariste, ou ses prémices, dans l'espace alpin.

    De plus, les particularismes de chaque cas étudié pourraient laisser penser que les démarches entreprises ne sont pas -ou faiblement- transposables à d'autres territoires. Et pourtant au contraire, ces trois terrains sont représentatifs d'une grande partie du territoire des Alpes du Nord : un territoire plutôt riche et très attractif à Chamonix, un autre qui bénéficie d'une puissante structure d'accompagnement (un PNR), et enfin, un dernier territoire qui ne possède ni l'un ni l'autre et qui actionne ainsi d'autres leviers d'action pour travailler cette question foncière. Chacun dans leur style, ces territoires ont développé une démarche pour maîtriser le foncier (ou tenter de le faire) qui leur est propre.

    Figure 31. Trois stratégies cumulatives vers une politique foncière volontariste, N. Moyon 2010

    Bien qu'il n'y ait pas de recette miracle, les trois « stratégies » qui vont être déclinées servent cette quête de la maîtrise foncière dans les Alpes du Nord. Ces « stratégies » peuvent être cumulatives, elles s'inspirent des trois cas d'étude et du ressenti formulé sur les problèmes fonciers auprès des personnes rencontrées en entretien.

    4.2.1. Construire du dialogue

    Sur le thème du foncier peut-être plus que sur d'autres sujets de l'aménagement et du développement territorial, le dialogue, l'échange, la médiation révèlent les conflits. Autour du foncier se cristallise souvent une forme de lutte opposant les intérêts particuliers à l'intérêt général : une situation difficile que la collectivité est censée arbitrer. La sensibilisation permet de créer de l'échange mais pas nécessairement de résoudre les conflits : son action est intéressante car elle créée, comme le dialogue, des conditions favorables à l'élaboration d'un projet futur. Il ne s'agit donc pas de construire du dialogue pour le dialogue lui-même, mais plutôt pour construire du projet ou le mettre en oeuvre.

    La stratégie est donc de construire un contexte favorable à une future politique foncière, de lui offrir en amont les conditions de sa réussite ; c'est un investissement dans l'immatériel. La sensibilisation, l'animation, l'accompagnement, la formation toutes ces démarches permettent d'impulser un dialogue territorial. Cette stratégie est très « utile » en vue de l'élaboration d'un PLU volontariste par exemple, qui portera des principes forts d'économie d'espace ou d'aménagement, des obligations d'insertion architecturale et paysagère, etc.

    Les moyens pour servir cette stratégie du dialogue sont illimités, notamment en faisant intervenir des acteurs extérieurs au territoire : des artistes, des formateurs, et pourquoi pas des psychologues. L'intérêt est bien d'ouvrir un espace de dialogue, d'aménager un moment propice à celui-ci (un évènement festif par exemple) et de réussir à faire échanger entre eux tous les acteurs d'un même territoire, de l'élu à l'habitant, des techniciens aux agriculteurs, des associations locales aux prestataires extérieurs.

    La sensibilisation, l'animation, l'accompagnement ou la formation sont nécessaires pour faire germer les idées, et donc construire les projets ou les mettre en oeuvre. Cependant, cette stratégie autour du dialogue n'a de sens que si elle s'inscrit dans un projet plus vaste, dans une démarche de projet de territoire. Le dialogue peut participer à la construction du projet dans un processus participatif ou itératif, mais également à sa réalisation.

    4.2.2. Investir dans la technique

    Cette seconde stratégie met l'accent sur le développement d'une technicité dans la mise en oeuvre de politiques publiques. Investir dans la technique implique de s'entourer de spécialistes (notaire, géomètre, avocat, etc.) et donc d'avoir les moyens financiers de faire appel à ce type de prestataires. Le choix peut être d'investir en interne sur ce type de compétences, juridiques notamment, qui seront utiles pour la mise en oeuvre de la politique foncière : il s'agit de se doter d'une ingénierie territoriale, voire foncière, assez spécialisée. Le projet quant à lui relève avant tout du domaine du politique. Il s'agit là d'imaginer une technique et ensuite, sur chaque territoire, les critères, les modalités de mise en oeuvre seront plus ou moins différentes au regard des objectifs politiques.

    Investir dans la technique c'est donc plutôt investir dans des compétences qui, mises au service d'une politique foncière, permettront à la collectivité de se comporter comme un aménageur, parfois en dépassant le cadre classique de ses compétences, voire être à la limite de la légalité. La façon de faire à Chamonix est très intéressante car elle renouvelle aussi l'interventionnisme public en matière de foncier. C'est une sorte « d'interventionnisme à la chamoniarde » ou « à la haute-savoyarde » : si la formulation est certes caricaturale, la stratégie est efficace et reproductible. Les élus se comportent progressivement en aménageur et l'on est finalement assez peu dans une situation classique d'une politique interventionniste qui poserait des cadres normatifs de plus en plus restrictifs et contraignants pour l'ensemble des acteurs (habitants, aménageurs, promoteurs et acteurs institutionnels eux-mêmes). Ici, on fait le plus possible en interne, dans une perspective de maîtrise optimale des opérations portées par une politique foncière volontariste et interventionniste. Cependant, pour pouvoir se comporter en promoteur, la commune doit être obligatoirement propriétaire des terrains270(*).

    Cette stratégie peut aussi permettre de créer de nouveaux outils, comme cela a été le cas avec les UHN. L'ingénierie disponible localement a permis de créer un outil pour rendre opérationnel un principe énoncé dans la loi : de la sorte, l'échelon local s'est approprié le cadre normatif et législatif et l'a interprété au regard des ses propres enjeux.

    Enfin, cette stratégie de la technique ou de l'ingénierie foncière, pose avant tout une question : les collectivités peuvent-elles se doter des moyens de leur compétence foncière? Les communes riches le peuvent très certainement (il s'agit plus d'une question d'arbitrage dans les priorités qu'elles se donnent), une structure tel qu'un PNR assure en partie cette mission, mais les autres collectivités ? Globalement, le constat est plutôt celui du « sous-équipement en technicité » alors qu'il y en aurait d'autant plus besoin qu'il y a de réformes, d'outils, de lois. Dans ce contexte, cette seconde stratégie est tout à fait pertinente.

    4.2.3. Agir sur les cadres de planification

    La dernière stratégie se concentre sur les outils classiques de la planification territoriale. C'est le choix d'agir sur les cadres, PLU et SCOT, et de produire un certain urbanisme qui réponde au projet de territoire défini au préalable. Il s'agit de « jouer » avec ces cadres règlementaires, de les modeler, de les mettre au service d'une vision de territoire. L'effort consiste donc à redonner de l'intelligence à tous ces outils, de les choisir, de jongler avec la vaste boite à outils de la maîtrise foncière dont l'on dispose. En redonnant de l'intelligence à ces outils, l'ambition est de retrouver l'efficacité des documents d'urbanisme. Puisque la difficulté n'est pas tant de fixer des règles ou des orientations volontaristes, mais plutôt de réussir à les respecter, l'enjeu est de réfléchir à la mise en oeuvre de quel projet et par quels moyens opérationnels.

    Agir sur les cadres de planification est en fait inévitable puisqu'il s'agit de la traduction règlementaire des règles d'aménagement sur un territoire. Ici, il est question de se concentrer sur ces documents, d'en faire des outils inédits, correspondant aux spécificités de son territoire, et non pas la reproduction de celui de la commune voisine. Cette intelligence du document d'urbanisme peut faire l'objet de formations auprès des élus afin qu'ils se saisissent de l'opportunité qu'offre par exemple la révision d'un PLU271(*), mais des compétences spécifiques sont requises. Là encore une certaine ingénierie est nécessaire mais elle servira avant tout un projet porté par le conseil municipal. On peut y voir une certaine ingéniosité dans la pratique des documents, dans l'utilisation des outils. C'est développer une certaine habilité dans l'agencement des dispositifs entre eux. L'action sur les cadres de planification est un moyen plus indirect de maîtriser le foncier, notamment son coût ou la forme urbaine. C'est donc un « PLU bien ficelé », avec des orientations d'aménagement ou encore un COS bonifié, qui apporte une maîtrise sur les permis de construire. Le Code de l'Urbanisme est en ce sens extrêmement pragmatique puisqu'il offre tous les outils possibles : le problème est donc bien dans la capacité à les utiliser, à leur donner du sens, à les mettre au service d'un projet. Cette stratégie s'attarde donc à travailler à ce problème. Toutefois, « si la règle est un outil extrêmement important, de même que la planification opposable aux tiers, ce ne sont pas des outils autonomes, ce sont des outils parmi d'autres, qui doivent être au service du projet »272(*).

    La réversibilité des documents d'urbanisme a souvent été évoquée par les acteurs locaux, mais face aux « déçus de la limite »273(*), le coût de révision d'un PLU par exemple risque de freiner ce phénomène. L'éloignement du centre de décision en matière d'aménagement et d'urbanisme de la commune vers l'intercommunalité contribue également à la pérennité des cadres de planification. Toutefois, élaborer des cadres de planification ne doit pas faire oublier l'utilité du document : être au service d'un projet de territoire, d'un projet de vie pour ce territoire. L'enjeu du PLU est de réussir une hiérarchisation de l'espace : définir les espaces de développement et les espaces de préservation notamment, et en justifier la pertinence. Cette stratégie doit mettre en place des systèmes évolutifs afin de ne pas figer ni le projet d'urbanisme, ni le foncier. Aussi, l'adaptabilité ne doit pas être confondue avec la volatilité : il est important de réussir à faire évoluer la règle en fonction de l'évolution des modes de vie par exemple. Le travers de cette stratégie de maîtrise foncière par les cadres de planification est sans doute là : réussir une règle ferme, mais potentiellement évolutive qui puisse correspondre aux évolutions des mentalités et des modes de vie, en somme, trouver un juste équilibre.

    Dans ce second chapitre, les trois terrains d'études ont été explorés de manière très détaillée afin d'apporter une connaissance précise de certaines pratiques foncières qu'on a jugé ici innovantes et/ou volontaristes. A Chamonix, dans le Vercors ou dans Belledonne, les acteurs locaux montrent qu'ils sont capables de mobiliser les cadres normatifs et les outils pour les mettre au service de leurs politiques foncières.

    Partie III. De la théorie à la pratique

    Cette troisième et dernière partie permet de confronter les deux étapes précédentes, la théorie avec les cadres de planification, et la pratique avec les initiatives de terrain. Le premier chapitre permettra donc de tirer les conclusions du travail entrepris à travers les grilles d'analyse : la grille (C) montrera les points de concordance et de décalage entre le discours foncier des cadres normatifs et les initiatives locales répertoriées sur le terrain d'étude.

    A travers l'analyse qui en sera faite, la démonstration se concentrera ensuite sur la question de la spécificité alpine en matière de foncier. La troisième et dernière partie a permis de répondre plus précisément à l'enjeu d'articuler la théorie à la pratique en matière de foncier, sur le territoire des Alpes du Nord.

    Enfin, le dernier chapitre questionnera la pertinence du concept de durabilité associé à la thématique foncière. Quelles perspectives cela offre-t-il à l'heure où tout le monde ou presque se réclame de mettre en oeuvre, sur son territoire, les principes du développement durable ? En somme, qu'est-ce que pourrait-être une gestion durable, raisonnée, volontariste du foncier dans les Alpes ?

    Chapitre 1. Articuler la théorie des cadres normatifs à la pratique des initiatives locales alpines

    1. Grille d'analyse (C) « Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin » : concordance ou décalage ?

    L'ambition de départ était de voir, à l'aide des deux premières grilles (A) et (B), si l'on pouvait constater et mesurer un décalage plus ou moins flagrant entre le discours foncier porté par les deux cadres normatifs d'une part, et les mesures des initiatives locales dans le périmètre des Alpes du Nord d'autre part. A l'inverse, sur les « mesures concordantes » des deux grilles, l'analyse permettrait de commenter ou d'expliquer cette adéquation entre la théorie des cadres normatifs, et la pratique du terrain.

    Avec une méthodologie de recherche similaire, les chercheurs du Cemagref de Grenoble et du laboratoire PACTE proposaient d'élargir et de systématiser leur démarche sur un territoire plus vaste (la Tarentaise), afin d'avoir une vue transversale et de pouvoir repérer l'écart entre le discours « foncier » d'une autorité organisatrice et sa traduction quantitative et spatiale274(*).

    Cette dernière grille « d'analyse foncière comparative » des cadres normatifs et des initiatives locales affiche une globale concordance entre la théorie des discours sur le foncier et les pratiques en la matière : en effet, on comptabilise trente-trois mesures qui sont partagées par la théorie et la pratique (croix rouges), on remarquera en ce sens une relative adéquation (45% des mesures en commun) entre deux cadres normatifs - qui paraissaient pourtant éloignés des territoires alpins d'après les acteurs locaux - et les initiatives locales qui travaillent au quotidien à une plus grande maîtrise de la question foncière.

    D'autre part, cette grille de synthèse montre aussi que les initiatives locales dépassent bien plus les cadres normatifs - seize mesures sont « initiées » par la pratique de terrain - que les cadres normatifs ne dépassent les initiatives locales - seulement trois mesures sont initiées par la « théorie ». Le décalage est le plus flagrant pour les leviers (colonnes) de participation et de prospective pour lesquels les initiatives locales ont porté beaucoup plus de mesures que les cadres normatifs l'ont envisagé. Cela est d'ailleurs assez étonnant pour la prospective qui conviendrait plutôt à la perspective d'un document de planification à une échelle macro-territoriale. On peut ainsi dire que les collectivités locales ont pris conscience de l'importance de ce « levier planificateur » pour traiter les questions foncières auxquelles ils sont confrontés (Scot, Charte de développement, Charte paysagère, etc.).

    Un décalage est aussi visible dans l'approche transversale de la thématique foncière. Ainsi, les initiatives locales proposent de plus nombreuses solutions que les cadres normatifs pour les trois thématiques suivantes, pour lesquelles elles actionnent aussi de multiples leviers :

    ü les risques naturels,

    ü le mitage de l'espace,

    ü le logement.

    Est-ce le signe d'une plus grande transversalité des pratiques foncières locales comparée au discours foncier porté par les cadres normatifs ? Les cadres normatifs « dépassent » quant à eux les initiatives locales en associant :

    ü le thème du paysage/cadre de vie au levier de la solidarité territoriale : il s'agit d'inciter les collectivités à adopter des stratégies communes autour des problématiques qui les préoccupent, dont la préservation des paysages et des sites naturels, par une gestion de manière contractuelle.

    ü le thème des risques naturels au levier de densification : par exemple, dans le but de limiter les impacts des domaines skiables sur les espaces naturels et les paysages, leurs restructurations se feront à l'intérieur de l'enveloppe existante du domaine skiable et devront contribuer à améliorer la qualité de l'offre et la sécurité.

    ü le thème des atteintes aux ressources naturels au levier de la prospective, afin de favoriser une vision prospective et concertée de la valorisation des espaces naturels.

    Cependant, le résultat obtenu par la grille (C) est une analyse à un instant T, basée sur six mois de travaux de recherche appliquée, dont la portée n'est pas exhaustive pour les raisons suivantes :

    ü le discours théorique de la grille d'analyse (A) est issu de « seulement » deux cadres normatifs, qui, associés, sont toutefois spécifiques au périmètre d'étude.

    ü la grille d'analyse des initiatives locales alpines (B) est alimentée pour l'essentiel des recherches effectuées sur trois terrains, Chamonix, le Vercors et Belledonne, qui ne revendiquent pas d'offrir un panel exhaustif des initiatives possibles en matière de foncier sur le territoire des Alpes du Nord.

    Toutefois, ce travail d'analyse permet, dans une certaine mesure, de contrecarrer l'idée reçue selon laquelle les cadres normatifs sont totalement déconnectés de la réalité, et qu'ils ne permettent pas de percevoir réellement les enjeux auxquels sont confrontés les acteurs locaux. Ce travail de construction puis de confrontation de plusieurs grilles d'analyse est aussi un exercice théorique et méthodologique qui participe à la dimension de recherche de cette étude. Enfin, l'enjeu était aussi de tenter d'articuler « savoir expert » et « savoir profane », sans dénigrer l'un ou l'autre. Alors que les savoirs institutionnels ou scientifiques ont un regard plus externe sur le territoire, les savoirs locaux sont issus des acteurs qui pratiquent le territoire, et par la recherche appliquée en sciences sociales l'articulation des deux a été tentée à travers ce travail de mémoire en géographie.

    Grille d'Analyse (C)

    « Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin »

    ý33 mesures partagées par la théorie et la pratique

    ý16 mesures initiées par la pratique de terrain

    ý3 mesures initiées par la théorie des cadres

    Figure 32. Grille d'analyse (C) "Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin", N. Moyon 2010

    2. Quel(s) rapport(s) à la norme et au droit en aménagement ?

    2.1. Des perspectives ouvertes par la gouvernance...

    Dans une perspective plus globale, la confrontation des deux grilles d'analyse amène à s'interroger sur les relations entre les acteurs locaux de l'aménagement du territoire et les cadres normatifs, et par conséquence sur les rapports à la norme et au droit au sujet du foncier et in fine à l'aménagement du territoire. Ainsi, les apports théoriques sur la gouvernance permettent de poser quelques bases à cette réflexion275(*).

    Tout d'abord, selon Olivier Barrière qui développe une réflexion sur l'écologie foncière à partir de la gouvernance environnementale ancrée dans une perspective patrimoniale276(*), la gouvernance est une démarche qui permet d'orienter et de guider plutôt que d'appliquer une régulation autoritaire, dans le but de construire la légitimation d'un mode de régulation par la négociation, voire la construction par les acteurs eux-mêmes. Se référant alors à J. Kooiman277(*), la gouvernance est « le processus par lequel les organisations humaines, qu'elles soient privées, publiques ou civiques, prennent elles-mêmes la barre pour se gouverner ». Aujourd'hui, la gouvernance peut être vue comme un phénomène inter-organisationnel ou encore comme un système plus coopératif, proche des expressions de « co-gestion, codirection et co-orientation », toujours d'après J. Kooiman.

    Cette démarche de gouvernance met en avant la posture de « l'Etat incitateur » qui, pour O. Barrière, dispose dès lors « d'une panoplie de moyens lui permettant d'orienter les comportements sans édicter de normes obligatoires ». En matière foncière, il est vrai que son intervention par la fiscalité et l'urbanisme réglementaire est incontournable tout en restant indirecte. Si la persuasion, l'information ou la diffusion de connaissances constituent des « ressources essentielles de la gouvernance étatique, un ressort majeur des politiques publiques »278(*), elles sont tout de même devenues des moyens largement utilisés par les collectivités locales. D'après l'auteur, ces moyens illustre un renoncement à la contrainte, au profit d'une « influence douce sur les comportements, un pilotage indirect de ceux-ci ». En revanche, la DTA des Alpes du Nord, par son caractère opposable initial, ne relève pas vraiment de cette posture de l'Etat incitateur mais plutôt d'une stratégie de passage en force face à certaines oppositions locales qui se sont toujours manifestées. Si le désire « d'organiser l'auto-organisation de la société »279(*) se retrouve dans la gouvernance, il semble que l'auto-organisation des Alpes du Nord n'ait pas été perçue comme souhaitable par l'Etat, justifiant ainsi des années de procédures et de bras de fer. Cependant, le recours à ces modes d'action « plus négociée » en quelque sort, s'explique par trois raisons principales selon MORAND :

    ü la très grande complexité de la société que les pouvoirs publics cherchent à influencer,

    ü l'inadéquation fréquente du contrôle direct des comportements au moyen de règles autoritaires,

    ü l'effritement de la capacité de l'État à assurer, de manière centralisée et autoritaire, la régulation sociale.

    D'autres démarches peuvent être interpréter comme des alternatives à la gouvernance : le contrat, ou des relations de type contractuel, sont un substitut possible à la perte du pouvoir de tutelle de l'Etat. Ainsi, pour Jean-Marie Pontier, « lorsqu'en effet, le législateur supprime la tutelle administrative (qui est surtout de l'ordre du symbolique), la tutelle financière (bien réelle, elle) et réduit la tutelle technique (d'autant plus efficace qu'elle n'était prévue par aucun texte de loi), l'autorité administrative centrale est bien obligée de trouver un autre moyen que les circulaires et instructions qui constituaient de véritables fourches caudines sous lesquelles, bon gré mal gré, étaient obligées de passer les autorités locales»280(*). Toutefois, dans une démarche de gouvernance, l'idée de l'Etat « incitateur » telle qu'elle est décrite pourrait aussi bien être formulée de manière plus péjorative transformant « l'influence douce », en « manipulation ». A l'intermédiaire de ces deux postures opposées, on peut rappeler plus fondamentalement qu'il n'y a pas de systèmes sociaux entièrement réglés ou contrôlés (du type « Big Brother »), et que les acteurs, même à l'intérieur des contraintes souvent très lourdes imposées par le « système », disposent d'une marge de liberté qu'ils utilisent de façon stratégique dans leurs interactions avec les autres281(*).

    Enfin, si l'on peut constater la « négociation » de certains cadres normatifs, comme cela a été le cas avec le projet de DTA des Alpes du Nord, c'est peut-être parce qu'il s'agit de remettre en cause la légitimité de la légalité elle-même dans certains territoires alpins. En somme, si c'était le cas, la gouvernance a encore du chemin à parcourir pour devenir une démarche efficiente partout en France.

    2.2. Mais un cadre qui reste « hyper réglementé »

    En matière d'aménagement comme de foncier, la pratique doit considérer une multitude de cadres, de normes, de règles, de lois, d'outils282(*) avant de passer à l'acte. Pour Marc Sauvez283(*), ce qu'il dénonce comme « la vanité de la réglementation et son inefficacité » ont pour conséquence de proposer un cadre de l'action territoriale tellement réglementé qu'il semble immuable. S'il la qualifie « d'idéologie réglementeuse », ici se profile le débat d'une planification réglementaire à la française, et la question posée est la suivante : « l'urbanisme réglementaire est-il adapté aux problématiques plus récentes ? Ne faut-il pas développer d'autres outils comme le font la plupart des autres pays européens ? »284(*). Pourtant la profusion d'outils et le « on a tout ce qu'il nous faut » l'emportent largement auprès des personnes entretenues sur le terrain. Ce que M. Sauvez dénonce c'est un certain décalage entre la « machine centrale » et la réalité locale, alors qu'il considère que l'existence d'un cadre national adapté est pourtant indispensable pour obtenir une garantie juridique de toute les démarches de planification. Ce travail de recherche appliquée posait cependant l'hypothèse suivante : les cadres et donc les outils qui peuvent en découler ne sont pas vraiment intéressants pour ce qu'ils sont, mais c'est plutôt dans la façon dont les acteurs s'en emparent, ce qu'ils en font et la manière dont ils les utilisent, c'est sur tout cela que l'analyse doit s'attarder.

    L'hypothèse a été vérifiée par les études de terrain, mais elle est quelque peu infléchie par l'analyse du rapport à la norme qui se dessine ici. Ce qu'indiquent ces cadres normatifs, c'est peut-être leur incapacité à évoluer (ou à évoluer suffisamment rapidement) parallèlement aux transformations du contexte de l'aménagement et de la maîtrise foncière d'aujourd'hui. De même que si le décalage ressentit n'est pas dans le discours produit par ces cadres normatifs, il ne peut être que dans leur forme, leur nature ou encore leur procédure de mise en oeuvre. L'obstacle posé par des procédures incapables d'intégrer ces évolutions amène au constat suivant : les cadres et donc les outils deviennent inadéquates, rendant de facto caducs les démarches impulsées par l'Etat.

    Pour illustrer ce problème, Marc Sauvez prend l'exemple de l'inexistence d'un cadre de négociation financière entre collectivités qui conduit a « beaucoup d'irresponsabilité». Il est vrai que « dans le système réglementaire actuel, la réglementation sur la construction est principalement définie au niveau communal, mais ses conséquences financières, du fait notamment des équipements induits ou des coûts sociaux qui en découlent, sont assumés en grande partie par les "grandes collectivités locales" (Etat, région, département). Or, il n'y a pas de cadre pour les négociations financières globales qui permettraient une régulation entre les niveaux qui décident et ceux qui financent. De même, les engagements pris sur le court terme n'engagent personne sur le long terme »285(*).

    Paradoxalement, cette règlementation croissante de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme ne semble pas avoir permis de réaliser toutes ses promesses ; les problèmes de logements, de transports, et bien sûr de maîtrise foncière portent déjà atteinte au fonctionnement des territoires. C'est donc un constat d'échec de cette politique d'aménagement « hyper-règlementée » que certains dressent, à l'instar de Serge Gros, le directeur du CAUE de l'Isère : « globalement, mon sentiment reste que l'urbanisation s'est faite en choisissant la voie de la facilité. [...] On a bâti en quarante ans plus qu'en trois siècles. On a jamais tant planifié, programmé, délibéré de schéma directeur, d'aménagement et de règlement. Force est de se rendre compte que le règlement n'a pas généré de qualité, bien au contraire que la programmation ou les tentatives de prospective n'ont pas été stimulantes intellectuellement, ni permis d'installer un art de vivre satisfaisant »286(*).

    De plus, la relation entre l'accroissement des règles, notamment juridiques, et des difficultés des collectivités ressemble plutôt à un cercle vicieux : la pression foncière perçue comme un problème majeur induit alors un essor de règles, et plus le problème est criant, plus la norme est rigoureuse. A la non maîtrise d'un phénomène territorial s'ajoute ainsi la non maîtrise d'outils et de normes pour résoudre cette première non maîtrise, car les collectivités faiblement équipées en ingénierie foncière ou territoriale ne sont pas capables de s'approprier une recrudescence de règlements. En un sens, c'est le législateur qui a accentué ce problème de non-maîtrise foncière, par une norme qui sclérose une situation plus qu'il ne la résout. Sur cette question du rapport à la norme, il devient alors difficile de distinguer le problème foncier du reste de l'aménagement du territoire.

    Enfin, le principe de « droit négocié pour mettre en oeuvre une gouvernance environnementale » d'Olivier Barrière287(*) propose un rapport à la règle et au droit avec lequel les impératifs d'un développement urbain maîtrisé sont compatibles. Selon lui, c'est le rapport d'obligation intergénérationnelle qui justifie et définit le patrimoine commun et renverse ainsi la tendance à la dilapidation, par exemple du foncier agricole. La portée philosophique de cette « écologie foncière » est très proche du principe même de « développement durable » puisque la gouvernance patrimoniale repose ici sur un « lien ombilical entre générations » qui responsabilise particulièrement ceux qui se situent en amont de la transmission : le rapport que les sociétés entretiennent à l'espace-milieu, sont inéluctablement dans un rapport foncier. L'écologie foncière traduit dès lors un jeu d'acteurs, au sein duquel les relations entre sociétés et nature constituent un enjeu vital de reproduction à travers un lien intergénérationnel. En termes juridiques, cette perspective éco-foncière se définit dans « un rapport où les devoirs dominent les droits subjectifs ».

    Plus concrètement, l'application de cette inversion juridique serait déterminante au sujet du maintien des terres agricoles stratégiques par exemple. Ainsi, la formule suivante énoncée dans plusieurs entretiens, « l'agriculteur n'est pas le meilleur ami de l'agriculture » ne pourrait plus se vérifier au regard de la pénurie actuelle de foncier agricole sur certains territoires. Par cette situation où les devoirs domineraient sur les droits, l'intérêt de maintenir l'usage de parcelles agricoles mises en vente l'emporterait sur la perspective pour le vendeur d'obtenir la plus-value liée au changement d'affectation, de l'agriculture vers de l'habitat par exemple.

    Ainsi, même si cet apport d'Olivier Barrière reste très théorique, il offre un éclairage intéressant pour réfléchir à un rapport au droit et à la norme en aménagement qui permettent d'intégrer de nouveaux enjeux. Si l'on considère que la lutte contre le changement climatique est l'enjeu majeur du XXIe siècle, ce qui par ailleurs est un objectif affiché dans tous les derniers cadres normatifs français (textes de Loi et documents d'urbanisme), alors repenser le droit de propriété en France devient absolument nécessaire afin que les devoirs intergénérationnels puissent un jour dominer les droits subjectifs si profondément ancrés dans les mentalités288(*).

    2.3. L'efficacité des outils et des cadres

    Les entretiens réalisés ont permis de dégager un avis univoque au sujet des outils de la gestion foncière : la boîte à outils du foncier est pleine de procédures ou de règlements que les collectivités sont bien en mal de mettre en oeuvre, bien souvent par manque de connaissances sur l'usage possible des outils. Le manque de moyens en ingénierie territoriale, et encore plus en ingénierie foncière est globalement évoqué ce qui pose problème dans la mesure où les normes générales de l'Etat s'avèrent parfois peu adaptés à chaque situation particulière. Les documents d'urbanisme réglementaire, limités à la seule interdiction de faire et non à la convergence vers des réalisations, deviennent parfois incantatoires289(*), ce que les acteurs locaux avouent parfois eux-mêmes : « la vraie difficulté semble plutôt résider dans la décision des territoires de se donner les conditions et les moyens nécessaires pour leur permettre de faire ce qu'ils ont dit. Et jusqu'à présent : aucun territoire ne semble y être encore parvenu »290(*).

    C'est toute la question de l'efficacité des documents d'urbanisme qui est posée, et l'entrée par le rapport à la norme et au droit en aménagement semble montrer que si l'approche réglementaire n'est pas mise en oeuvre à la bonne échelle, elle est vouée à l'échec et à l'inefficacité. Marc Sauvez aspire quant à lui à « une résurrection de la planification sur de nouveaux paradigmes [...], pour de nouveaux acteurs [...] et sur de nouveaux thèmes tels que l'environnement, la culture ou la santé [...] et en recherchant leur convergence sur des périodes longues autour de documents explicites accompagnant leurs accords et leurs projets... »291(*). Si ce sont les outils d'une planification stratégique partenariale qui font réellement défaut, peut-être que les nouveaux SCOT, dits « SCOT Grenelle », dont celui de la région urbaine grenobloise, permettront de relever ce défi.

    Cependant, les écarts constatés précédemment entre le cadre prospectif souhaité par le législateur et la réalité du terrain, rendent difficile l'élaboration d'une véritable vision foncière pour les petites collectivités. Le projet de territoire ou la détermination politique locale sont deux « conditions de réussites » identifiées par le travail de terrain qui sont évoquées au même degré d'importance, si ce n'est plus, que la maîtrise des outils ou du cadre normatif. L'élaboration d'un nouveau document d'urbanisme ou sa révision reste avant tout une démarche politique, donc des instants précis dans l'évolution du territoire. A ce sujet, les conclusions des travaux sur les nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne292(*) vont dans ce sens. Leurs analyses de terrain ont montré qu'à la question de l'adéquation des outils de gestion foncière aux enjeux locaux, il convenait de formuler un questionnement plus large notamment autour d'un triptyque élus-orientations stratégiques-outils293(*).

    Finalement, l'ingénierie foncière est formulée par les acteurs rencontrés comme un moyen transversal de mobilisation technique mais aussi politique autour de l'élaboration ou de la mise en oeuvre d'un projet foncier ou plus globalement d'un projet de territoire. C'est de cette manière une solution pour dépasser l'obstacle des cadres normatifs innombrables ou des outils inusités, et dans un sens s'affranchir de la non-maîtrise de la norme.

    Pourtant, les travaux de thèse de Dany Lapostolle294(*) démontrent tout l'inverse : par cette ingénierie (territoriale ou foncière, peu importe ici), la collectivité apporte les conditions de son contrôle par l'Etat, ainsi l'esquisse le résumé suivant :

    L'ingénierie territoriale est une bureaucratie professionnelle territoriale coincée entre les injonctions autoritaires de l'État et les velléités d'autonomie du pouvoir local. D'un côté, on observe que l'Europe, les services centraux de l'État diffusent des représentations et les bonnes pratiques aussi strictes que les règles impersonnelles du modèle bureaucratique wébérien. De l'autre côté, les pouvoirs locaux, face à aux insuffisances des services déconcentrés de l'État structurent une ingénierie territoriale composite pour se doter de l'expertise nécessaire à leur stratégie de développement.

    Paradoxalement, c'est dans le cadre des politiques constitutives, que le pouvoir local en se dotant d'un appareil d'expertise, gage d'autonomie, crée les conditions de son propre contrôle et de sa soumission au régime d'agence qui s'impose comme nouveau mode de régulation de l'action publique au détriment de la négociation contractuelle. En d'autres termes, les instruments d'action publique et les savoir mobilisés par l'ingénierie territoriale dans la démarche de projet participent d'une technologie de gouvernement qui ne met pas fin à la rationalité bureaucratique, elle la transforme.

    Si cette bureaucratie territoriale est renouvelée comme l'expose Dany Lapostolle, des expériences de terrain rappellent néanmoins que les acteurs, tout en évoluant à l'intérieur de cadres sociaux structurants, conservent une certaine liberté et autonomie décisionnelle qui leur offrent la capacité de faire évoluer ces mêmes cadres295(*). Par exemple, dans le cadre des discussions autour du projet de Loi de Modernisation Agricole (LMA) au printemps 2010, un problème très local, spécifique à la montagne a pu remonter à l'échelle nationale pour être discuté296(*).

    Dans cette perspective, Yves Barel297(*) évoque la rencontre du code avec le territoire, ce qui signifie dès lors « l'irruption de la ruse dans le code ». Il explique ainsi que les pratiques sociales concrètes sont souvent des combinaisons dynamiques du code et de la ruse, où le code lui-même est rusé, où la ruse elle-même est secrètement codifiée et où se manifeste aussi la ruse du code et la ruse avec le code.

    3. La figure de l'acteur-bricoleur

    A travers les entretiens réalisés, la démarche de l'action foncière ou territoriale apparait souvent comme le résultat d'un cheminement sinueux, marqué par des expérimentations, des déboires, des négociations ou des ajustements. Les acteurs locaux semblent fonctionner ainsi, par tâtonnement successifs, en se saisissant de quelques outils, parfois en les détournant même de leur fonction première pour construire une démarche permettant d'atteindre l'objectif fixé. Poussée à l'extrême, des alternatives au modèle rationnel de planification proposent des démarches de tâtonnements-réajustements permanents, ou encore l'improvisation comme discipline de l'action298(*).

    A Chamonix, la démarche de bricolage mise en oeuvre pour les opérations de lotissement traduit à la fois cette démarche de tâtonnement (vers un meilleur montage juridique à chaque opération), ainsi qu'une ingéniosité, peut-être même une ruse, dans la façon d'utiliser les outils existants, de les combiner ou de les distordre. Cette même démarche se retrouve sur le Vercors et sur Belledonne, qui, chacun à leur manière, développe aussi une intelligence dans l'agencement des outils entre eux ou dans l'utilisation renouvelée de ces derniers.

    A partir de ce constat, la figure de « l'acteur-bricoleur » construite par Louis Allie299(*) apporte l'éclairage théorique suivant. « Tout d'abord, cet acteur-bricoleur n'est pas un type d'acteur au même titre qu'un agriculteur, un élu ou un militant. Il s'agit d'un fondement commun aux acteurs que nous définissions ici afin de mieux saisir et expliquer comment et pourquoi les acteurs de la gestion pensent et agissent comme ils le font ». A partir de l'apport théorique de C.L. Strauss pour qui « il semble ne pas y avoir de plus grand producteur d'espaces que le bricoleur », L. Allie montre « comment et pourquoi l'acteur au coeur des processus d'aménagement, de gestion et de planification agit et pense à la manière d'un bricoleur qui bricole » ; c'est précisément une dimension qu'a révélé la question du foncier sur les trois terrains étudiés.

    Dans notre perspective de questionner le rapport à la norme et au droit en aménagement, de son point de vue, l'auteur affirme que :

    « La production spatiale n'est pas une fin en soi ni un moyen d'atteindre un optimum territorial mais simplement la résultante de petits arrangements entre acteurs équipés d'un bagage d'information, d'outils théoriques et pratiques innés ou acquis, plus ou moins volontairement consentants mais qui est toujours la résultante de choix structurellement contraints.

    Ainsi, l'aménagement, la gestion et la planification au sein d'objectifs de développement et de préservation sont des activités à l'image d'un bricoleur dont la portée des outils est parfois bien en deçà de l'ampleur des projets. Il aimerait volontiers tout assembler d'un seul tour de mains mais des aléas conceptuels, pratiques et techniques l'empêchent d'y parvenir: il n'a pas tout le temps qu'il souhaite pour se familiariser avec les outils (par ex. P.L.U., S.CO.T., P.N.R. et S.R.U.) qui ne sont pas tous faciles d'utilisation, il a un budget limité, il ne peut pas toujours mettre à jour son équipement, les bons matériaux ne sont pas nécessairement à portée de mains, les partenaires sont plus ou moins disponibles; il possède cependant des habiletés exceptionnelles qui lui permettent de tout faire avec presque rien »300(*).

    La particularité offerte ici par les territoires de montagne est peut-être d'accroître cette nécessité d'allier développement et protection, et par conséquent de bricoler des solutions territoriales particulières dans l'espace et dans le temps. Une nécessité affirmée à plusieurs reprises dans les deux cadres normatifs étudiés, la Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord, et dont la difficulté est partagée par les acteurs rencontrés.

    Ce premier chapitre a souhaité explorer le défi que constitue finalement cette articulation de la théorie des cadres normatifs à la pratique des initiatives locales. L'intérêt d'une réflexion sur les cadres normatifs de l'aménagement est finalement posé en ces termes. Par la « gouvernance », la « démocratie participative », ou encore le « développement durable », l'Etat incite, encourage, préconise. En revanche, avec la profusion de cadres normatifs, de lois, de règles, l'Etat semble en réalité rechercher une nouvelle maîtrise du territoire dans un contexte d'incertitude, notamment économique et climatique.

    Chapitre 2. De la spécificité alpine en matière de politique foncière

    Le périmètre d'étude de ce travail de mémoire se confond avec celui de la Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord : il s'agit d'un territoire hétérogène, constitué par exemple de larges vallées urbanisées à l'image du Sillon alpin, de vallées étroites, industrielles ou touristiques (par exemple, la vallée de l'Arve en Haute-Savoie), de plateaux, de coteaux ou de balcons qui se péri-urbanisent progressivement (ou se « monturbanisent »301(*)). A l'opposé, les Alpes du Nord sont aussi des alpages, de hauts sommets et des paysages patrimoniaux, ou encore des versants qui s'enfrichent (par exemple, la vallée du Haut-Brédat en Isère).

    Or, comme le constate Josselin Dupont dont la thèse est en cours, il existe peu « d'études générales » sur le foncier dans un contexte régional en France. Le retour aux approches régionalistes pourrait ainsi constituer un nouveau champ d'investigation scientifique, « surtout si il est enrichi par l'analyse et l'évaluation d'expériences antérieures (en France mais aussi à l'étranger) » 302(*).

    L'enjeu de cette question, éminemment empreinte des fondements de l'Institut de Géographie Alpine de Grenoble, est peut-être de réussir à distinguer ce qui relèverait :

    ü d'une part, du particularisme : « tendance d'un groupe à conserver ses traits particuliers, distinctifs. Particularisme artistique; particularisme corporatif; particularisme breton »303(*). Donc, ce qui distingue les politiques foncières alpines d'autres formes de politique foncière.

    ü d'autre part, de la spécificité : « qualité de ce qui est spécifique, qui présente une caractéristique originale et exclusive »304(*). Donc, ce qui rend les politiques foncières alpines uniques.

    Cependant, il s'agit ici de questionner, avec une moindre ambition, une « potentielle » spécificité alpine en matière de politique foncière. L'hypothèse est la suivante : les caractéristiques spécifiques aux vallées alpines jouent peut-être un rôle dans la difficulté constatée du passage à l'action foncière, autrement dit, y'a-t-il une spécificité alpine en matière de politique foncière ? Est-ce que les particularismes fonciers que l'on observe sont liés à la montagne ou à d'autres facteurs ?305(*) Dès lors, cette première analyse permet de constituer les bases d'une réflexion qu'il faudrait approfondir par ailleurs.

    1. Des particularismes reconnus aux spécificités proclamées

    1.1. La loi Montagne de 1985

    Printemps 2010, la réalisation d'un énième « Bilan de la Loi Montagne » a été entreprise par le Conseil national de la montagne. Dès 2002, le rapport d'information de Jean-Paul Amoudry (au nom de la mission commune d'information) dresse un « bilan de la politique de la montagne et en particulier de l'application de la loi du 9 janvier 1985, de son avenir, et de ses nécessaires adaptations »306(*). En 2003, une autre mission d'information initiée par les élus de l'Association Nationale des Elus de Montagne (ANEM) aboutit à une proposition de Loi307(*). Pour sa part, le Comité français de l'Union Mondiale pour la Nature (UICN) édite en 2005 un bilan des vingt ans de la loi Montagne accompagné de propositions308(*).

    Tous ces bilan dressés s'accordent à reconnaître que la loi Montagne de 1985 a constitué un cadre cohérent pour la mise en oeuvre d'une politique de la montagne qui ne reniait pas la compensation des handicaps du territoire alpin, et donne droit à la reconnaissance de la spécificité de la montagne. L'un de ces initiateurs, Louis Besson, reconnait qu'il s'agissait d'une loi « assez révolutionnaire » puisque « c'était le premier texte qui ne s'appliquait pas à la totalité du territoire mais uniquement aux 22% qui occupe la montagne »309(*). Aujourd'hui, les opinions divergent, une loi vidée de sa substance ou édulcorée pour certains, un flou juridique qui la rend inapplicable pour d'autres310(*), mais ces opinions se retrouvent autour d'une nécessaire réforme.

    Toutefois, la loi Montagne symbolise la reconnaissance de particularismes régionaux des territoires de montagne (divisés en sept massifs, dont les Alpes) qui sont élevés au rang de « spécificités » reconnues par la Nation, les élus montagnards s'attachant à revendiquer dès les années 1970 un « droit à la différence »311(*). Cette spécificité revendique, de fait, des caractéristiques originales et exclusives en matière d'organisation institutionnelle, d'aménagement et de développement du territoire en montagne. En revanche, la loi Montagne ne permet pas de répondre à la question d'une spécificité alpine au sein même de la spécificité montagnarde.

    De plus, avec la loi Montagne, le pari a été fait de rapprocher les décisions du terrain, concrétisant alors « l'aboutissement d'un vaste mouvement qui croit à l'efficacité du développement maîtrisé par les acteurs locaux »312(*). Si l'auto-développement est fondé sur la mobilisation locale et maîtrisée de toutes les ressources territoriales, la maîtrise du foncier aurait dû devenir au fil du temps un axe majeur des politiques d'aménagement. Paradoxalement, la prise de conscience de l'ampleur de la problématique du logement dans les vallées alpines a été très tardive : « on pressentait bien les choses mais elles n'étaient pas objectivées et ne justifiaient pas la mise en place de dispositions particulières »313(*), cela pourrait par ailleurs être qualifiée de spécificité.

    Enfin, le projet d'une Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord, dont la décision est intervenue dix ans après le vote de la loi Montagne, vient infléchir fortement les ambitions d'auto-développement qui ont pu être portées dans les Alpes, par sa nature même de « Directive étatique ». Dès lors, si une spécificité alpine devait s'édifier, ce fût sous le contrôle de l'Etat par un document de planification opposable. Aujourd'hui, la perte du caractère opposable de l'ancienne DTA devenue DTADD des Alpes du Nord, peut être vue soit comme un échec de l'Etat à imposer « un cadre de cohérence au développement durable du territoire »314(*), soit comme un retour de l'Etat à une stratégie d'auto-développement des territoires (dans la continuité du désengagement financier des l'Etat et d'un transfert de compétences notamment vers les régions).

    1.2. Entre handicaps et opportunités pour le territoire alpin

    Au sens de la loi Montagne de 1985, les particularismes montagnards, formulés plutôt comme des « handicaps », deviennent constitutifs d'une véritable « spécificité montagnarde ». La proposition de loi de l'ANEM en 2003 reprend cette notion de « spécificité montagnarde » et propose la nouvelle définition suivante315(*) :

    « L'article 3 de la proposition de loi introduit une nouvelle définition de la montagne. Celle-ci est présentée comme un territoire caractérisé par des modes de vie et d'occupation de l'espace, des activités économiques, des formes d'organisation sociale et des cultures originales, ainsi que par des écosystèmes particuliers représentant autant d'adaptations des sociétés ou espèces aux caractéristiques géographiques que sont l'altitude, la pente, le climat. La montagne est ainsi saisie dans son originalité et dans son identité profonde. Elle apparaît comme un « système » complexe, géographique, humain, biologique, qui exige d'être appréhendé dans son ensemble. Le fondement de l'intervention publique n'est donc plus le handicap à corriger mais le caractère spécifique d'un territoire, ce qui élargit considérablement le champ des politiques à mettre en oeuvre ».

    A travers les entretiens, cette notion de « spécificité montagnarde » se confond avec l'idée d'une « spécificité alpine » que l'on tente de formuler. Les premiers éléments évoqués, impactant nécessairement la gestion de l'espace et donc la politique foncière à mettre en oeuvre, relèvent des caractéristiques physiques du territoire alpin : ils reprennent ainsi les termes de la définition de l'ANEM ci-dessus. Ces caractéristiques topographique et géographiques sont également reprises par les chercheurs qui reconnaissent eux-aussi leurs « effets induits » sur le foncier : « la région Rhône-Alpes, avec sa capitale lyonnaise et le Sillon alpin, font partie des régions présentant un tissu urbain dense et des phénomènes de desserrement urbain associés. S'ajoute à cela une topographie montagnarde qui réduit d'autant les surfaces facilement urbanisables. Ces différents éléments contribuent à donner une tonalité particulière aux enjeux fonciers dans ces territoires touristiques, même si ils restent le reflet de tendances lourdes aux échelons national comme européen »316(*). Cette « tonalité particulière » dont il est question peut laisser supposer que les enjeux fonciers nécessitent une politique foncière adaptée au territoire : en somme, passer « d'enjeux fonciers sur le territoires alpins » à « des enjeux fonciers alpins ».

    Face au changement climatique, la CIPRA317(*) précise que les Alpes se caractérisent par des particularités qui doivent être prise en compte par le développement territorial et la protection du climat. Ainsi, ce sont principalement les risques naturels qui font peser une menace importante sur les populations locales, pour qui l'espace urbanisable est amené à se réduire de plus en plus. Cette question des risques naturels et de son impact sur la limitation de l'expansion urbaine pour protéger les populations (par la généralisation des Plans de Prévention des Risques) est un enjeu majeur des territoires alpins détaillé dans le projet de DTA des Alpes du Nord : couloirs d'avalanche, risques d'inondation, d'éboulement ou de glissement de terrain sont autant de facteurs qui participent fortement à diminuer le foncier disponible pour l'urbanisation.

    Enfin, il apparait évident que la gestion courante d'un territoire montagnard, généralement plus vaste, discontinu et accidenté, subissant des contraintes géophysiques et climatiques, est plus coûteuse qu'en plaine (notamment pour les voiries et réseaux divers). Ces surcoûts demeurent des handicaps pour les collectivités en zone de montagne qui souhaitent par exemple ouvrir à l'habitat des espaces pentues, boisés ou en friche, pour répondre à la forte demande de logement.

    Pourtant, si ces handicaps montagnards accroissent objectivement les difficultés de gestion de l'espace et participent à l'émergence d'enjeux fonciers spécifiquement alpins, dans notre « imaginaire aménageur »318(*) ils constituent des défis à relever, voire des opportunités pour marquer une singularité des « gens » et du territoire alpin (et pourquoi pas une spécificité).

    Plusieurs ouvrages, séminaires ou colloques mobilisent de nombreux acteurs alpins selon une même dynamique que l'on peut essayer de résumer ainsi : « le territoire alpin est spécifique mais profitons-en pour développer une intelligence particulière aux problèmes rencontrés afin de les dépasser collectivement »319(*). Ainsi, les deux derniers colloques de la Facim (cimes 2007 et cimes 2009) s'intitulent respectivement, « la montagne, univers de tous les possibles ? » et « construire dans la pente, une opportunité ? » : les actes de ces deux colloques permettent d'illustrer l'idée selon laquelle, si une spécificité alpine existe, elle constitue en tout cas une opportunité de développement et d'innovation pour le territoire.

    De même, dans son article Innovation et territoires: les effets contradictoires de la marginalité320(*), Frédéric Giraut invoque « la posture optimiste qui [...] se focalise sur les marges de manoeuvre offertes par la situation périphérique pour innover hors de standards qui régissent l'économie du centre, mais aussi hors des normes que le centre impose en son sein mais auxquelles la marge peut déroger [...] pour adapter les pratiques à ses difficultés ou problématiques propres, et parce que la dérogation n'y met pas en cause la cohérence du centre et peut donc y être tolérée, ce qui en fait des espaces d'expérimentations (Antheaume & Girut, 2002) ». Dans la littérature, Louis Allie321(*) remarque que la montagne apparaît sous la métaphore de « laboratoire de la diversité » en reprenant ainsi le titre d'un ouvrage collectif, et poursuit : « comme tout ce qui est grand, écrit Le Bras, la montagne a une dimension d'universalité: c'est un lieu d'innovation, un laboratoire (...). L'idée de laboratoire renvoie aussi à l'idée de produit à étudier. On retrouve à cette occasion la revendication de SPÉCIFICITÉ du milieu et de la société montagnarde ».

    « Spécificité montagnarde », « opportunité » et « expérimentation » semblent être des notions clés qui éloignent les caractères handicapants de ces mêmes territoires alpins. Ainsi, c'est peut-être parce que les acteurs locaux sont pris dans une dualité d'appréciation qu'il est difficile de saisir, à travers les entretiens réalisés, dans quelle mesure des « enjeux fonciers alpins » et une « spécificité alpine en matière de politique foncière » peuvent globalement faire sens.

    1.3. Une spécificité des territoires touristiques alpins ?

    Il semble que les territoires de montagne cumulent les évolutions de deux phénomènes, sources de difficultés territoriales profondes. A la manière dont l'exprime S. Duvillard, A. Sgard et C. Ziotti, « depuis que les prix de l'immobilier s'envolent, rien n'est plus comme avant ; ou du moins rien ne sera plus comme avant. Ce phénomène [la pression foncière] s'observe sur divers territoires en France, mais il prend une acuité particulière dans les régions touristiques où cette activité exacerbe les pressions en rentrant en concurrence avec les autres logiques d'occupation de l'espace, en pesant sur le marché des biens mais aussi sur le dynamisme économique et l'attractivité. [...] Les territoires touristiques des Alpes du nord connaissent actuellement des transformations majeures liées tant à l'évolution des pratiques de séjours et de loisirs, qu'aux effets de plus en plus étendus de la périurbanisation et aux nouvelles formes de résidentialité »322(*).

    Ainsi, en territoire alpin, l'enjeu du multi-usage de l'espace est très présent, tant dans les deux cadres normatifs alpins étudiés (Convention alpine et DTA des Alpes du Nord) que dans les entretiens réalisés, a priori quelque soit les territoires concernés du périmètre d'étude. De plus, on peut considérer qu'une majorité de territoires alpins sont « touristiques » bien qu'il ne le soit pas uniquement. L'arbitrage foncier qui tente d'être mené pour maintenir le multi-usage sur certains espaces se confrontent donc à deux problématiques majeures :

    ü les évolutions du tourisme alpin

    ü la périurbanisation croissante des fonds de vallées, des coteaux, des balcons et des plateaux

    Les effets conjugués de ces deux phénomènes constituent une caractéristique de l'espace alpin qui semble être indéniable.

    Pour leur part, les stations de ski apparaissent être des territoires touristiques particuliers, y compris en matière de gestion foncière à l'image du questionnement suivant : « quelles sont les marges de libertés laissées par les politiques foncières passées ? Autrement dit, les stations de tourisme sont-elles structurellement handicapées pour répondre aux pressions foncières qu'elles subissent et maintenir leur capacité à porter une offre touristique ? »323(*). Les vieux lotissements du début des stations de ski cristallisent par exemple des points de blocage à une gestion foncière répondant à d'autres objectifs : ainsi, certains cahiers des charges très précis sur la destination individuelle des logements empêchent aujourd'hui d'en changer l'utilisation vers du logement collectif car ces dispositions de droit privé ne peuvent être abandonnées qu'à l'unanimité des propriétaires.

    Une autre dimension « spécifique » sur ces territoires touristiques alpins s'avère être l'organisation institutionnelle des communes de station. D'un point de vue opérationnel, « il est à constater, à déplorer diront certains, qu'aucun guide de bonnes pratiques n'existe sur les outils des politiques foncières locales, appliqués à la spécificité institutionnelle des communes supports de station »324(*). D'un point de vue plus polémique, cette spécificité des territoires touristiques alpins est abordée notamment par un article de Jacques Manesse au titre évocateur et provocateur, Montagne : qui décide ?325(*) :

    « Tout ce qui touche au partage de l'espace, déclenche des passions, suscite conflits et controverses. L'expérience de l'aménagement touristique de la montagne est, depuis une trentaine d'années, un de ces exemples, quasi caricatural.[..] Le débat se cristallise autour de la question "qui décide", à laquelle, bien sûr aucune réponse tranchée ne peut être objectivement apportée. La discussion porte d'abord moins sur les finalités, le "pourquoi" que sur le "comment", sur les procédures. Celles-ci ont pris le pas sur les objectifs. On en arrive à se demander de quelles politiques elles constituent la mise en oeuvre.

    Les tenants d'un étatisme plus ou moins bien tempéré invoquent, selon les cas, l'utilité collective d'un patrimoine naturel de valeur universelle ou les enjeux économique et sociaux de caractère national. Leur répond comme en écho le slogan sommaire "la montagne aux montagnards" qui a fleuri ces dernières années sans arriver toujours à dissimuler la revendication du droit de se vendre au plus offrant ».

    Enfin, il serait difficile de ne pas faire de parallèle avec les controverses suscitées par le projet de DTA des Alpes du Nord, bien que l'article de Manesse date de 1988. Aussi bien que le développe Camille Blanc326(*), ce sont dans les territoires touristiques alpins que les oppositions au projet de DTA ont été les plus vives, marquant ainsi une distinction possible entre les stations de montagne et les autres territoires alpins, touristiques ou non.

    2. A qui la terre ?

    Reprenant une partie du titre de la thèse de Mériaudeau, A qui la terre ? La propriété foncière en Savoie et Haute Savoie327(*), soutenue en 1985, cette partie s'attache à questionner la propriété foncière dans les territoires alpins et ses incidences potentielles sur la gestion foncière des collectivités.

    Ce questionnement est apparu nécessaire à travers les entretiens réalisés dont les avis divergeaient : deux points de vue s'opposent ainsi. D'une part, l'avantage dans les territoires alpins, et ce qui pourrait en faire une spécificité, c'est une relative disponibilité du foncier : beaucoup de parcelles appartiennent aux communes alpines, y compris en zone potentiellement urbanisable. La faible utilisation d'outils du type ZAC ou DUP (déclaration d'utilité publique, pour de l'expropriation) rapporté au nombre de m² construits dans les communes alpines vient appuyer cet avis : la pression foncière serait donc toute relative, car de nombreuses communes détenant du foncier participent en un sens à accroître ce phénomène.

    A contrario, face à la pression foncière les communes alpines (certaines ont dilapidé leur foncier dans les années 1990 et d'autres n'en ont jamais disposé) acquièrent avec une grande difficulté du foncier très coûteux pour réaliser des projet d'habitat ou d'équipement par exemple. La naissance de trois Etablissement Public Foncier Locaux328(*) (à l'initiative des collectivités, contrairement aux EPF d'Etat dont le périmètre est imposé) marque fortement la nécessité de disposer d'un outil d'acquisition foncière pour les collectivités des Alpes du Nord, d'autant plus qu'il est le fruit de leur initiative (l'adhésion à l'EPFL est volontaire). Face à ce questionnement, il apparait intéressant de solliciter les recherches pointues de Robert Mériaudeau réalisées dans les années 1980.

    1.1. L'apport de Mériaudeau sur la question foncière alpine

    Robert Mériaudeau329(*), offre une étude presque exhaustive de la propriété foncière dans les 595 communes savoyardes comme le relève Bernard Janin dans un compte-rendu critique de ces travaux330(*). En répondant aux deux questions suivantes, l'auteur montre qu'une indéniable spécificité foncière caractérise les montagnes françaises et que celle-ci impose des contraintes particulières à l'aménagement du territoire. D'une part, à qui appartient la terre savoyarde aujourd'hui ? Et d'autre part, quelles sont ses fonctions ?

    L'analyse de Mériaudeau s'effectue à partir de la distinction entre personnes morales et personnes physiques et son décryptage du cadastre a pour résultats de mettre en relief le bouleversement de l'espace rural et l'ébranlement de la tradition paysanne au profit de l'espace urbain et de la civilisation des loisirs. Selon B. Janin « le cadastre est un palimpseste où s'inscrivent l'organisation agraire et sociale d'hier et celle de demain »331(*), ce que traduit aussi la conclusion générale de Mériaudeau : « finalement, depuis le début du XXIème siècle, le véritable changement réside moins dans la distribution superficiaire de la propriété que dans la répartition sociale des bien-fonds des personnes physiques. Et la mutation la plus profonde porte sur les fonctions mêmes de la propriété foncière »332(*).

    En matière de spécificité foncière alpine, Mériaudeau affirme : « Oui il existe une spécificité foncière de la montagne française, et plus particulièrement de sa partie alpestre entendue ici comme une montagne constituée de vigoureux reliefs saillants séparés par de profondes vallées. Cette spécificité s'exprime d'une part par la forte proportion de l'appropriation publique dans les parties les plus élevées et/ou fortes pentes, et d'autre part, par des tensions exacerbés sur les bas versants et les fonds de vallées »333(*). L'auteur établit donc une distinction entre ces deux types d'espaces : les « hauts versants », alpages et forêts qui subissent le « déterminisme de la pente et de l'altitude », et les « bas versants », fonds de vallées et autres replats qui sont concernés par des tensions foncières liées à l'urbanisation croissante.

    Tout d'abord, sur la montagne française de haute et moyenne altitude, Mériaudeau indique (statistiquement) qu'elle est le lieu de l'appropriation publique collective constituant une spécificité foncière de la montagne alpestre : les grandes communes situées à haute ou moyenne altitude possèdent un vaste communal, les petites communes sises dans les fonds de vallée ou de cluse, dans les bassins intramontagnards ou sur les bas versants, ne disposent que d'un bien collectif de petite contenance. Son analyse fine du parcellaire alpin montre l'hétérogénéité des communes alpines en matière de propriété foncière, cela rend intelligible les deux positions divergentes développées précédemment. Il relève qu'à l'époque, la plus vaste cote parmi les possessions de communes est celle de Chamonix « qui se range parmi les plus grandes propriétés française, mesure 18 47O hectares ». Ainsi, à l'auteur de proclamer : « oui, la montagne française, notamment dans ses parties les plus alpestres, est bien la terre d'élection de la grande propriété collective ». Une distinction peut être faite entre les Alpes du Nord et les Alpes du Sud pour qui la forme juridique du communal est préférée à la propriété domaniale plutôt étatique.

    Mériaudeau relève également une autre spécificité montagnarde : celle de la diversité et la complexité des régimes juridiques et des droits d'usage du communal et du sectionnal. Cette spécificité à pour conséquence selon lui qu'il faut beaucoup de temps et de détermination pour réussir une opération d'aménagement du territoire... sur des communaux ou sectionnaux soumis au régime forestier. Les droits d'usages, quant à eux, sont sources de plus de difficultés encore... Mériaudeau présageait dès lors que : « droits d'usage, complexité ou flou juridique pourraient, à terme, en ce qui concerne l'aménagement du territoire, donner à la montagne alpestre une inquiétante spécificité ».

    Ensuite, concernant les replats, les bas versants et les fonds de vallées, l'auteur constate qu'ils sont les lieux des principaux conflits fonciers, et reconnait par ailleurs qu'il y a aussi des conflits « sur les hauts » (création de parc naturel, réserves naturelles, extension de domaine de station de ski, exercice des droits de chasse) qui sont toutefois « plus localisés et beaucoup moins fréquents que dans les fonds de vallées ». L'auteur caractérise ces espaces par « de minuscules biens-fonds privés », des « fiefs lilliputiens » ou encore une « proliférante micro-propriété » qui ont des conséquences multiples sur l'aménagement du territoire alpin : selon lui et « de manière générale, en montagne, c'est cette micro-propriété qui nourrit une bonne part de l'offre sur un marché très peu ouvert et c'est elle aussi qui règle, indirectement, le prix des terres agricoles ». Le recul historique permet d'expliquer cette situation : « ces espaces furent, jadis et naguère, l'objet d'une âpre compétition foncière que la prolifération des micro-cotes révèle aujourd'hui encore ».

    Constituant un sérieux handicap pour la collectivité, ces espaces sont les lieux de tous les conflits fonciers car leur situation est très convoitée pour : de l'habitat, des loisirs et du tourisme, de l'industrie, du commerce et des services, des transports, de la production hydro-électrique ou de la protection des bas pays contre les crues, etc. Ainsi, le territoire de l'urbain est restreint, « ce n'est pas la montagne qui fait la pression foncière, c'est bien la ville »334(*). Sur ce problème du multi-usage de l'espace alpin, Mériaudeau ne manque pas de soulever un paradoxe tout à fait d'actualité335(*) : « Les meilleures terres agricoles sont ainsi les plus disputées au tire de l'aménagement du territoire : voilà encore une autre spécificité bien montagnarde ». A l'époque, cette caractéristique se limitait à l'espace montagnard comme l'indique l'auteur, en revanche, ce phénomène d'artificialisation des terres agricoles, même les plus fertiles, s'est aujourd'hui étendu à tout le territoire français336(*).

    En conclusion, Mériaudeau réaffirme son propos quant à une spécificité alpine en matière de foncier:

    « Oui d'un point de vue foncier, tant en ce qui concerne la propriété elle-même que ces contraintes en termes d'aménagement du territoire, la montagne, et plus spécifiquement la montagne alpestre, est autre, particulière, spécifique... Cette spécificité née de déterminants locaux forts et anciens, perdure alors même que ces déterminants ont presque perdu toute signification locale... Toutefois, tant que le législateur ne se sera profondément pénétré de la complexité de cette spécificité, tant qu'il tentera d'imposer une rationalité exogène oublieuse des mentalités indigènes, il n'y a guère de risques à prévoir l'échec des législations foncières en montagne ».

    Cette dernière remarque de Mériaudeau montre peut-être à quel point le rapport à la norme et au droit en aménagement, qui est pénétré lui aussi d'une potentielle spécificité alpine, à une incidence tangible sur la mise en oeuvre de politiques foncières volontaristes dans les Alpes.

    2.2. Un état d'esprit typique et ses incidences sur les politiques foncières alpines

    S'il n'y a pas une politique foncière alpine mais de multiples politiques foncières, propres à chaque territoire de projet, certaines d'entre elles sont pourtant le reflet d'un état d'esprit partagé plus largement. Plus marqué en Savoie et Haute-Savoie qu'en Isère, cet état d'esprit montagnard est peut-être ce que suggère Mériaudeau par « mentalités indigènes » : il s'agit d'une autre dimension, plus sociologique, que l'on pourrait retrouver dans une spécificité alpine des politiques foncières. Cet état d'esprit typique des territoires de montagne a été abordé également lors des entretiens, un argument pour tenter de mieux comprendre comment les communes alpines considèrent les enjeux fonciers de leur territoire, et surtout, quelles stratégies (dont les politiques foncières) elles mobilisent pour y faire face.

    A ce propos, le directeur du CAUE de Haute-Savoie, Arnaud Dutheil337(*) indique que pendant trente ans le développement économique du département fut incroyable : au sein du triangle Lausanne - Annecy - Milan, dont le PIB est le plus élevé d'Europe, ce « miracle de développement » tient à : quatre moteurs :

    ü la finance grâce à la proximité avec Genève

    ü l'industrie de « l'or blanc » avec les stations de ski

    ü le leadership mondial en mécanique de la vallée de l'Arve

    ü l'agriculture de montagne grâce à ses AOC

    En somme, ces territoires alpins sont pétris de l'esprit libéral - comprendre ici « favorable aux libertés individuelles »338(*) - qui porte une vision dynamique et entrepreneuriale du territoire alpin. Le projet de territoire et ses priorités sont reliées à ce mode de développement, marquant nécessairement la gestion foncière locale : une volonté de maîtrise plus ou moins forte, une stratégie de réserves foncières, un plan d'actions autour d'une politique foncière, ou à l'inverse, une dimension du projet local secondaire. Par la discussion avec les acteurs économiques notamment, les collectivités parviennent ainsi à résoudre ou à réduire certains problèmes autour du foncier (sa disponibilité par exemple) mais d'autres problèmes s'aggravent à l'instar de l'éviction des populations locales qui ne trouvent plus de logement à prix abordable. Dans cette perspective, il est possible que, ancrées dans un système économique qui a généré un essor formidable du territoire mais qui ne fonctionne plus si bien, certaines collectivités alpines ont des difficultés, ou des réticences, à trouver un modèle de développement territorial qui leur permettrait de faire face à un nouveau contexte urbain et touristique, et qui se traduirait in fine par une politique foncière locale adaptée aux enjeux locaux.

    Une seconde dimension de cet état d'esprit typique qui peut influencer la manière de faire le territoire alpin est sans doute plus anthropologique339(*). Selon l'expression familière, en montagne, « tout le monde connait tout le monde » : cette caractéristique permet souvent de distinguer les espaces ruraux des espaces urbains et métropolitains, mais en matière de foncier, cela constitue une véritable « problématique ». Faisant écho à l'échelle la mieux adaptée pour traiter des questions foncières, celle de l'intercommunalité ou du bassin de vie est plébiscitée dans le but, entre autre, d'éloigner le pouvoir décisionnel de l'échelon communal, trop enclin à l'influence des demandes individuelles au lieu de servir l'intérêt du collectif.

    Les territoires alpins ne font donc pas exception à cette problématique du foncier, peut-être bien au contraire. Sur un territoire montagnard où des communautés d'intérêts (essentiellement économiques) peuvent être plus fortes et plus persistantes qu'ailleurs, dont les acteurs institutionnels et économiques sont enchevêtrés ou se confondent même souvent, la gestion du foncier (du droit, de l'argent et de la politique340(*)) est hautement plus délicate que l'implication de chacun dans les affaires locales est forte.

    Cette « communauté montagnarde d'intérêts » semble rassemblée autour d'une même vision de l'aménagement et du développement de la montagne, partageant probablement une identité montagnarde commune et fréquentant les mêmes institutions politiques et économiques (par exemple, l'ANEM, l'ANMSM, les CCI, Ski France, France Neige International, etc.). Pour autant, l'implication parfois personnelle de certains élus de montagne ne signifie pas fatalement l'absence de projet de territoire sur le long terme. A l'inverse d'un élu « de plaine » qui peut s'en aller à l'issu de son mandat, les élus de montagne qui sont communément « du cru » restent bien souvent, même s'ils ne sont pas réélus : finalement, ils assument peut-être plus qu'ailleurs les conséquences de leurs actions, y compris en matière de foncier. Trouver un équilibre entre implication personnelle, familiale, ou amicale et intérêt général au coeur d'un projet de territoire « durable »341(*) apparait donc le plus ardu au sein de ces communautés alpines.

    Cependant, afin d'étayer l'hypothèse d'un état d'esprit typique alpin et les suppositions évoquées précédemment, il serait nécessaire de rechercher des études sociologiques ou anthropologiques des acteurs alpins d'aujourd'hui, ou d'en réaliser, par exemple à la manière des travaux des sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon sur la bourgeoisie française342(*).

    3. Montagne et littoral même combat foncier ?

    3.1. Des problématiques foncières assez proches

    Sur ces deux types de territoire, « les collectivités doivent avoir conscience des particularités (sur les plans géographique, historique, naturel, etc.) et des sensibilités des espaces littoral et montagne »343(*). Pourtant très différents sur le plan géographique ou topographique, le littoral et la montagne sont tous deux des espaces particulièrement sensibles, dont « les richesses écologiques, patrimoniales, et paysagères qui les caractérisent, les soumettent en général à des pressions fortes en matière d'aménagement »344(*). Ces pressions de l'urbanisation rappellent trois qualificatifs partagés en grande partie par ces territoires alpins ou littoraux :

    ü attractif : pour l'emploi et l'habitat, ces territoires subissent une pression démographique.

    ü touristique : leur patrimoine attire de très nombreux touristes.

    ü limité : par le rivage ou la pente, l'espace « à occuper » temporairement ou définitivement est restreint.

    D'un point de vue foncier, la montagne et le littoral sont donc assez semblables. La pression foncière croissante résulte de la conjonction de plusieurs phénomènes urbains qui semble-t-il, n'ont pas été suffisamment anticipés. Ainsi, la pression démographique locale se confronte à celle du tourisme et créée une situation de concurrence par exemple entre les différents types d'habitats. A la montagne comme à la mer, les prix du marché évincent les populations locales au profit des résidents secondaires dont la capacité d'investissement est plus élevée (notamment les investisseurs étrangers). De même, l'artificialisation croissante d'espaces naturels ou agricoles est un phénomène partagé. La disparition du foncier agricole, qui semble avoir été estimée à 24m² de terres par seconde345(*), ou encore 320 terrains de football par jour346(*), concerne également les parcelles agricoles « de proximité » (à proximité des centres urbains), en raison du refus de certains propriétaires de louer leurs terres à l'exploitation, en montagne et aussi sur le littoral347(*).

    Au regard des outils dont disposent la montagne et le littoral, ces territoires bénéficient chacun de mesures prenant en compte leurs spécificités. Par exemple, la loi Montagne de 1985 est suivie de la loi Littoral en 1986, et le réseau d'espaces protégés Natura 2000 regroupent des sites alpins et du littoral. Si le classement en « Parc national » bénéficie plutôt aux territoires alpins, le littoral profite de l'action d'un Conservatoire qui lui est dédié. En effet, le Conservatoire du littoral (« Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ») est un établissement public créé en 1975 « qui acquiert des terrains fragiles ou menacés à l'amiable, par préemption, ou exceptionnellement par expropriation »348(*). Le Conservatoire est donc un outil opérationnel qui met en oeuvre une politique foncière visant à la protection définitive des espaces naturels et des paysages sur les rivages maritimes et lacustres français.

    Massif alpin ou littoral français, il apparait que ces deux espaces sensibles ont en commun la plupart des enjeux fonciers auxquels ils doivent faire face, non sans difficulté, quelque soit leur spécificité respective.

    3.2. L'exemple de la Bretagne

    L'aperçu de la situation foncière en Bretagne qui est dressé ci-dessous s'appuie en grande partie sur un article de Josselin Dupont, dont la thèse actuellement en cours concerne « La Maîtrise du foncier comme outil de gestion intégré des territoires bretons »349(*). De toute évidence, ce portrait succinct pourrait bien être celui d'un territoire alpin.

    « Pierre d'angle des politiques d'aménagement, la question foncière mobilise aujourd'hui nombre d'acteurs privés et publics et tous s'accordent à reconnaître qu'il n'existe pas de pénurie foncière brute mais une insuffisance de terrains à prix abordables notamment pour construire des logements adaptés aux besoins actuels. Fort de son attractivité résidentielle, économique et touristique, le territoire breton connaît une forte dynamique démographique, c'est pourquoi il est aujourd'hui confronté à des enjeux fonciers de premier ordre ».

    La précision sur la pénurie foncière permet de réitérer ici notre propos : dans les territoires alpins comme en Bretagne, c'est la disponibilité d'un foncier à prix abordable, pour les populations locales et pour les collectivités, qui fait véritablement défaut. D'ailleurs, le phénomène d'anticipation foncière (anticipation sur le changement de zonage) participe à augmenter les prix, y compris sur des parcelles classées « AU » ou « A ».

    « En effet, si l'on considère les projections de l'Insee, la région Bretagne pourrait voir sa population augmenter de 350 000 habitants d'ici à 2030. Cette pression démographique nouvelle essentiellement due à un solde migratoire très nettement positif, renforce une pression foncière déjà très vive et pose la question de la consommation de l'espace. Dans des territoires bretons où l'artificialisation de l'espace avance à grands pas (+25% ces dix dernières années selon l'Insee contre 16% en moyenne nationale), encouragée par des modes d'habitat spécifiques (fort attachement à l'habitat individuel), la consommation et le bon usage du capital foncier questionne les acteurs des territoires bretons notamment face aux difficultés d'accès au logement, en particulier pour les ménages les plus modestes ».

    Cette problématique du maintien des ménages modestes dans les centres urbains est également partagée par les territoires des Alpes du Nord. Un autre handicap s'impose aux territoires touristiques, celui de la concurrence avec l'habitat secondaire ou touristique. A Chamonix par exemple, mais probablement dans certaines communes du littoral breton, les collectivités doivent faire face au déclin de leur population active au profit des résidents secondaires ou des touristes.

    « La cohésion sociale et territoriale est mise à rude épreuve et une ségrégation socio-spatiale par les prix s'opère de fait (opposant ainsi les centres aux périphéries et le littoral à l'arrière-pays) et menace l'équilibre du développement régional. La forte demande sociale actuelle (et à venir !) semble nécessiter une intervention directe des institutions publiques sur le marché du foncier et ce à une échelle régionale. C'est dans ce contexte que le Conseil Régional cherche à mettre en place une nouvelle politique territoriale s'appuyant notamment sur la création d'un Etablissement Public Foncier (EPF) d'Etat.

    L'EPF, outil de solidarité reposant sur la mutualisation des moyens, il sera chargé de constituer des réserves foncières pour faciliter l'action des Intercommunalités en faveur de l'habitat (public et privé), de l'environnement (protection des paysages et prévention des risques) et du développement économique (capacité d'accueil et reconquête de friches industrielles et militaires) ».

    Créé par décret en Conseil d'Etat le 8 juin 2009, le « Foncier de Bretagne » est devenu l'établissement public foncier d'Etat (sous son contrôle) dont le périmètre d'intervention s'étend à l'ensemble de la région administrative bretonne. De la même manière qu'en Rhône-Alpes (qui dispose quant à elle d'un EPF d'Etat -EPORA-, et de quatre EPFL), la Bretagne se dote d'un outil opérationnel pour épauler les politiques foncières locales de ses collectivités. Dorénavant, le foncier constitue un enjeu territorial majeur en Bretagne. Daniel Cueff, le Président de Foncier de Bretagne le présente ainsi : « la maîtrise du foncier permet aux collectivités de mener leurs projets, de gérer leur développement et ainsi de maîtriser leur avenir. Cependant, toutes n'en ont pas les moyens notamment dans les zones rurales et littorales particulièrement concernées par les pressions foncières. D'autant qu'en dix ans, les prix ont en moyenne augmenté de 129% en Bretagne et que la pression sur les terres urbanisables n'a cessé de croître. Et que dire du grignotage des terres agricoles qui ne cesse de s'accélérer année après année »350(*).

    Enfin, la question du foncier agricole occupe une place importante en Bretagne. Si après quinze années de hausse les prix des terres agricoles semblent s'être stabilisés, il n'empêche que « 5 000 ha échappent définitivement à l'agriculture »351(*). Dans ce contexte tendu, la Safer intervient en utilisant son droit de préemption et est également sollicitée pour aider les agriculteurs à préserver l'environnement et la ressource en eau. Ainsi, dans les bassins versants touchés par les algues vertes, des tentatives de réserves foncières pour faciliter les échanges ou les regroupements de parcelles sont en cours puisque les agriculteurs ne peuvent plus exploiter les terres de manière intensive. En outre, cet exemple montre que la préservation de l'environnement et des terres agricoles ne s'opposent pas forcément.

    Chapitre 3. Vers une gestion foncière durable des territoires alpins

    Ce dernier chapitre s'attèle à construire les bases de ce que « la mode du durable » étendue au champ du foncier appelle déjà « gestion foncière durable », « foncier durable » ou encore « politique foncière durable ». A la manière dont cela a été énoncé en introduction de ce mémoire, il s'agit de partir du postulat suivant : lorsqu'en amont, une politique volontariste s'oriente en faveur d'un développement durable de son territoire, alors seulement le rapprochement entre des actions concrètes et un discours peut être effectif. Ainsi, le qualificatif de durabilité apporte-t-il une dimension nouvelle ou un sens renouvelé à l'action foncière ? Une politique foncière durable est-elle différente d'une politique foncière volontariste ? Ces questions tacheront d'être éclaircies afin d'éviter l'écueil de cette « mode du durable ». Enfin, d'un point de vue plus opérationnel, il s'agit de voir « comment les préoccupations de développement durable peuvent-elles s'intégrer concrètement dans les politiques de gestion urbaine en privilégiant le levier de la politique foncière ? »352(*)

    1. Foncier et durabilité

    1.1. « Faire du foncier durable »

    Parmi les nombreuses recherches réalisées dans le cadre de ce travail, le lien direct entre les termes « foncier » et « durable » ou « durabilité » reste encore très rare et relativement récent (le plus « ancien » document répertorié date de 2007353(*)). Si l'aménagement, l'urbanisme et l'architecture « durables » sont entrés dans le vocabulaire courant des professionnels, il semble donc que ce ne soit pas - encore - le cas du foncier. Dans le cadre des actions menées par le chantier maîtrise qualitative, innovation urbaine et sociale de la démarche métropole Sillon alpin en 2006-2007354(*), Jean-Claude Martin, Président de l'EPFL de la Haute-Savoie, Président de la communauté de communes du pays d'Alby et Maire d'Alby-sur-Chéran présente sa vision du « foncier durable » :

    « J'entends par foncier durable un espace construit, sans pour autant être dénaturé : pour cela, il faut respecter les courbes de niveau, éviter les remblais, gérer les eaux de pluie... En tant que maire, j'utilise plusieurs outils pour faire du foncier durable. Le SCOT d'abord [...] qui constitue le meilleur moyen de mettre en place une politique de l'aménagement du territoire cohérente à l'échelle d'un bassin de vie. Le PLU ensuite, qui permet de traduire ces orientations à l'échelle de la commune. Enfin, le passage à la TPU [Taxe Professionnelle Unique] de la communauté de communes a permis de définir judicieusement l'emplacement des zones d'activités en effaçant la compétition entre les communes ».

    Un encart répond à la question « qu'est-ce qu'un foncier durable ? ». Cinq axes d'action sont ainsi proposés pour que ce foncier durable permette « de limiter l'éparpillement urbain et de rationaliser l'aménagement en termes de déplacements, de densité et de formes urbaines »355(*):

    ü privilégier l'urbanisation en continuité du bâti existant,

    ü polariser le territoire et hiérarchiser les pôles urbains en fonction de leur accessibilité en transport en commun (un pôle autour d'une gare par exemple),

    ü fixer des objectifs de densité au projet urbain (par exemple, les contrats d'axe avec le tramway grenoblois),

    ü reconquérir en priorité les dents creuses du tissu urbain (friches industrielles ou militaires par exemple),

    ü proposer des nouvelles formes d'habitat qui répondent aux enjeux de densification, de fonctionnalité, de qualité de vie et de réduction de l'impact écologique du bâti.

    Il est ensuite rappeler qu'il faut au préalable désigner les zones naturelles à préserver, les espaces agricoles à forts potentiels, les zones à enjeu agricole et espace de vie, définir celles où l'urbanisation doit se concentrer, renforcer les pôles annexes, et éventuellement fixer les densités de bâti, avant de conclure que la principale clé de la maîtrise de l'étalement urbain, ce sont les collectivités qui la détiennent, à travers les documents de planification que constituent SCOT, PLU et PLH.

    Si la construction du concept de « foncier durable » ou de « gestion foncière durable » peut tenter de renouveler l'approche de cette thématique et faire évoluer les modes d'action, il est certain que cette définition du foncier durable est loin de relever ce défi. En réalité, on constate que l'expression « foncier durable » correspond plutôt à une « gestion foncière » ou une « politique foncière » qui répondrait aux injonctions du développement urbain durable. Les principes de ce foncier durable sont donc la déclinaison d'un urbanisme « économe en foncier » : on en revient ainsi aux mêmes propositions que celles qui concernent l'aménagement ou l'urbanisme durable.

    1.2. Durabilité en station de montagne

    Si cette première tentative pour construire le concept de « foncier durable » n'est pas concluante, il semble intéressant de se tourner vers les territoires touristiques alpins où la durabilité a progressivement remodelé les discours des acteurs locaux.

    Comme l'évoque - non sans moquerie - Vincent Renard356(*) dès 2005, la notion de développement durable déferlera inéluctablement sur les territoires alpins : « La "conquête" de la montagne et le développement de l'industrie du ski, avec notamment le "plan neige", ont constitué une étape qui a probablement trop mis l'accent sur la monoactivité touristique hivernal. L'heure est probablement venue de décliner la notion fourre-tout de développement durable au territoire montagnard, en y introduisant en particulier une perspective de diversité, de stratégie de long terme et de réversibilité ».

    Effectivement, en quelques années à peine la « durabilité » a envahi les stations de ski quelque soit leur taille ou leur renommée357(*) : du changement d'ampoules au tri des déchets en passant par la maîtrise de l'énergie et des consommations d'eau, il demeure difficile à conceptualiser un tel changement de paradigme sur ces territoires dont le mode de développement industrielle (tourisme de masse) est - par essence - incompatible avec des principes de durabilité ou de développement durable des territoires alpins358(*).

    En matière de foncier, les actions réalisées dans les territoires touristiques alpins comme Chamonix doivent s'inscrire dans une stratégie durable dans le temps : ici, la durabilité peut alors se traduire par la notion de pérennité. La gouvernance en station semble un levier pertinent pour mobiliser efficacement les outils de maîtrise foncière au service d'une vision partagée (par les acteurs publics et privés et les habitants) du territoire.

    Enfin, l'idée d'élaborer des indicateurs fonciers et de les intégrer à une mesure globale de la performance des stations et du degré de durabilité de leur développement a été émise par les chercheurs du Cemagref de Grenoble et du laboratoire PACTE359(*). Elle est tout à fait intéressante car ces indicateurs permettraient sans doute de nuancer avec objectivité les « bonnes performances » des stations engagées sur la voie du développement durable. En extrapolant cette idée, on peut se demander si ce n'était pas la dimension (limiter la consommation d'espace par les stations de ski) la plus dérangeante du projet de DTA des Alpes du Nord.

    1.3. « Personne n'a intérêt à scier la branche sur laquelle il s'assoit »

    La définition du développement durable (« sustainable development ») communément admise est celle du rapport Brundtland de 1987 : « un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de "besoins", et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis à qui il convient d'accorder la plus grande priorité, et l'idée des limitations que l'état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l'environnement à répondre aux besoins actuels et à venir »360(*).

    Les acteurs locaux rencontrés dans le cadre de l'étude sont concernés par les questions foncières sur le territoire des Alpes du Nord : à l'unanimité, ils constatent que, globalement, les mentalités ont évolué vers une prise de conscience progressive de la nécessité de considérer dorénavant le foncier comme une ressource rare et non renouvelable qu'il faut donc économiser. Suivant des injonctions diverses, crise alimentaire ou financière, destruction des paysages et de la biodiversité et même lutte contre le changement climatique, la notion de développement durable rend audible la multitude des enjeux fonciers. Ainsi, elle a sans doute permis une prise de conscience plus large et plus rapide des enjeux qui pèsent aujourd'hui sur la ressource foncière.

    L'extrait suivant permet d'illustrer cette prise de conscience en faveur d'une meilleure gestion foncière, à travers le regard d'un maire du Trièves (38)361(*) :

    « Les temps changent, et c'est tant mieux. Il y a de cela dix ou quinze ans, si une entreprise projetait de venir s'installer chez nous, nous étions prêts à lui offrir le plus beau terrain de la commune. Le spectre de l'exode n'était encore pas si loin et le développement économique, sous n'importe quelle forme, semblait être la première des richesses pour un territoire comme le nôtre.

    Aujourd'hui, on n'a pas complètement changé d'avis, mais on a radicalement changé de raisonnement. On est capable d'expliquer à un entrepreneur qu'il est de son intérêt, comme de l'intérêt collectif, de respecter la qualité de l'endroit où il s'installe. Personne n'a intérêt à scier la branche sur laquelle il s'assoit.

    Avant, on disait : "ce n'est pas la place qui manque !" Aujourd'hui, on affirme qu'en matière de paysage, c'est le "vide" qui révèle le "plein" et vice-versa ; et la zone d'équilibre entre les deux est plutôt mince...[...] Ce n'est pas toujours facile de déclasser des terrains qui avaient été déclarés constructibles "avant"...

    Il faut pouvoir s'appuyer sur des arguments solides pour négocier... et le sens de l'intérêt commun, la philosophie supra-communale qui justifie ces contraintes nouvelles, ne font pas recette à tous les coups...

    C'est comme pour tout : il vaut mieux être très nombreux à jouer le jeu pour venir à bout des individualismes. »

    2. Pour des politiques foncières...

    La notion de « foncier durable » ne fait peut-être pas recette, en revanche, celle de « politique foncière durable » est en train de se construire. Ainsi, le Conseil général de la Gironde pose les fondements de sa définition (ci-dessous) plutôt axée sur le foncier rural, au sein d'une démarche plus large du « foncier au service d'un développement solidaire »362(*).

    Figure 33. Les atouts d'une politique foncière durable, CG Gironde 2010

    De la même façon, le guide Agir ensemble pour le foncier agricole dont l'initiative et la réalisation revient à la Direction Départementale de l'Agriculture et de la Forêt de l'Isère (devenue Direction Départementale des Territoires, DDT) évoque l'enjeu de « gérer durablement le foncier »363(*).

    2.1. Cinq conditions de réussite pour une politique foncière volontariste

    Bien que l'étude réalisée ne prétende pas à l'exhaustivité des situations existantes sur le territoire des Alpes du Nord, les trois terrains ont permis de mettre en exergue certaines conditions nécessaires à la mise en oeuvre d'une politique foncière volontariste. Les entretiens réalisés ont également enrichi la réflexion et conforté cette approche par des « conditions de réussite ».

    Ainsi, si chaque démarche est particulière, ces cinq conditions de réussite se révèlent être des constantes pour structurer une politique foncière volontariste, qui, mises au service d'un projet plus large de développement territorial durable pourraient bien être « cinq conditions de réussite pour une politique foncière volontariste et durable ». Suivant ces jalons, les démarches présentées à Chamonix, dans le Vercors et Belledonne, peuvent inspirer d'autres territoires, dans les Alpes et ailleurs.

    Figure 34. 5 conditions de réussite pour une politique foncière volontariste, N. Moyon 2010

    De plus, les entretiens apportent une épaisseur à ces cinq conditions de réussite. En effet, à la question qui s'intéresse aux perspectives en matière de foncier dans un contexte de développement durable du territoire (question clôturant en général l'entretien), les personnes interrogées énuméraient pour la plupart des mesures d'action foncière « raisonnées », « économes », « stratégiques » ou « coordonnées », dessinant au fur et à mesure ce que serait une politique foncière durable pour les Alpes :

    « Une gestion foncière raisonnée et durable, ce serait une gestion qui essaie d'être responsable dans l'utilisation du foncier - communale entre autre - mais aussi au niveau général avec le PLU qui affecte une destination à certains biens. Mais la commune ne peut pas tout faire ni tout se permettre, d'autant plus qu'elle subit de nombreuses contraintes qui limitent l'action. Ce serait une gestion foncière raisonnée par rapport à une politique, à l'intérêt de la commune, et aussi réfléchit, de plus en plus, on répertorie les biens, on décide de leur utilisation, c'est une vision à plus long terme et plus ciblée. Tout cela structure une politique foncière, en somme, il y a des enjeux, on y réfléchit et donc on essaie d'y répondre. C'est une politique foncière qui existait déjà avant mais seulement au stade de la prise de conscience, aujourd'hui, la politique foncière est de plus en plus réfléchit »364(*).

    2.2. Vingt-quatre propositions de Joseph Comby

    Dans la continuité des cinq conditions de réussite exposées précédemment, le tableau ci-dessous synthétise vingt-quatre propositions faites par Joseph Comby sur les politiques foncières locales365(*) : il énumère ainsi « quelques lignes de conduite utiles à respecter » n'oubliant pas de préciser que la bonne et l'unique politique foncière n'existe pas. Certaines des propositions de J. Comby ont déjà été abordées par ailleurs, mais ce tableau donne tout de même l'occasion d'un panorama qui se veut général mais exhaustif.

    24 propositions sur les politiques foncières locales par Joseph Comby

    o Ne pas réduire la « politique foncière » à « l'action foncière »

    On fait d'abord de la politique foncière (règles d'urbanisme, négociation avec les opérateurs, organisation du financement), puis vient l'action foncière publique qui est l'aspect le plus coûteux (achat des terrains, portage...).

    o Choisir l'échelle de l'agglomération ou du pays pour conduire une politique foncière cohérente

    L'ambition poursuivie est d'avoir un impact sur la formation des valeurs foncières et l'approvisionnement du marché en terrains. C'est à cette échelle que s'établissent les interactions qui conditionnent le fonctionnement des marchés fonciers.

    o Une bonne politique foncière doit être subordonnée à une politique d'aménagement

    La politique foncière n'est qu'un outil ; elle ne constitue jamais une fin en soi.

    o Une bonne politique foncière doit savoir être « opportuniste »

    Elle se donne les moyens d'une prise de décision rapide appuyée sur un potentiel d'intervention suffisant : elle ne doit pas s'enfermer dans une planification pluriannuelle trop rigide car la mise en vente d'une emprise intéressante peut être imprévisible.

    o Une politique foncière a besoin d'un système d'observation foncière

    La connaissance du fonctionnement et de l'évolution des marchés nécessite un système d'observation pérenne et global qui doit rester neutre et accessible à tous.

    o S'appuyer sur une claire conceptualisation des différents types de marchés

    Ils n'obéissent pas aux mêmes types de mécanismes, les techniques d'observation, les méthodes de diagnostic et d'analyse, et donc les modes d'intervention doivent être adaptés selon le marché (voir typologie des six marchés).

    o Articuler urbanismes règlementaire et opérationnel à la politique foncière

    La politique foncière doit inclure toutes les interventions qui contribuent à infléchir la valeur et l'usage des espaces, ou du moins s'articuler avec elles.

    o Intervenir en priorité sur le marché des terrains à urbaniser et non pas sur celui des terrains à bâtir

    Subventionner la production de terrains à bâtir est une politique facile à concevoir mais extrêmement coûteuse et ne se justifie pas en termes de politique foncière mais plutôt de politique sociale (pour logements sociaux) ou économique (aide à l'implantation d'activités).

    o Assurer une stabilité du zonage pour garantir la valorisation des espaces agricoles et naturels

    Les exploitants agricoles, les propriétaires privés d'espaces boisés, ne sont généralement pas des « spéculateurs ». Ils le deviennent lorsqu'ils constatent que les collectivités publiques changent d'avis, rendent constructibles, au cas par cas, des terrains voisins qui ne l'étaient pas auparavant, procurent ainsi à certains acteurs de fortes plus-values.

    o Une hausse excessive des prix des terrains est d'abord le résultat d'une mauvaise politique foncière

    Inutile d'accuser la « spéculation foncière » qui profite seulement de cette situation. Le prix des terrains ne dépend que de la compétition entre les acquéreurs potentiels de ces terrains.

    o De trop faibles valeurs peuvent aussi être le symptôme de graves dysfonctionnements

    Le but d'une politique foncière peut parfois devenir la revalorisation du marché d'un secteur, il faut donc être attentif à ces signaux et les expliquer.

    o La croissance urbaine est nécessaire, même en l'absence de croissance démographique

    Cette croissance urbaine peut se faire soit par densification du bâti, soit par extension du bâti, soit, plus naturellement, les deux à la fois.

    o Ne pas confondre densification du bâti et densification de la population

    La population peut diminuer alors que les volumes bâtis augmentent si cette augmentation est insuffisante. A fortiori, si les constructions nouvelles ne font que remplacer les constructions vétustes à l'identique, la population diminuera (sauf en cas de paupérisation relative).

    o Ne pas confondre « extension urbaine » et « dispersion urbaine »

    La même quantité de constructions nouvelles et d'habitants nouveaux dans une commune périphérique d'une agglomération n'a pas le même impact selon que les constructions nouvelles se font en continuité du bourg existant ou en petites opérations dispersées.

    o Pour préserver les espaces agricoles et naturels il est nécessaire d'accepter une certaine densification des espaces urbanisés

    Du point de vue de la défense de l'environnement, il est contre-productif d'adopter des règlements d'urbanisme qui imposent de faibles densités constructibles.

    o C'est moins l'habitat individuel en tant que tel, que la taille des terrains qui est responsable de l'étalement urbain

    Dans la mesure où il existe une forte demande pour la maison individuelle, il est donc plus sage d'y répondre en produisant des petits terrains individuels bien placés plutôt que de prétendre imposer une urbanisation en habitat collectif dont les acquéreurs ne veulent pas.

    o Densifier en priorité les secteurs desservis par une ligne de transport en commun en site propre

    La localisation des stations doit être choisie en fonction de la densité (en activités et/ou en logement) de ces secteurs ou de leur capacité de densification.

    o La finalité d'une politique de réserve foncière n'est pas d'ordre financier mais d'ordre urbanistique

    Contrairement à une idée reçue, une réserve foncière est rarement une bonne affaire financière. Par contre, c'est presque toujours une bonne affaire urbanistique car il faut du temps pour constituer, acquisition après acquisition, les ensembles fonciers cohérents dont on a besoin par la suite.

    o Le portage foncier public, peut se révéler dangereux dans le tissu urbain existant

    Les coûts financiers de portage qui n'avaient qu'un faible impact sur les coûts finaux de l'aménagement en périphérie, ont au contraire un poids capital dans une opération de renouvellement urbain.

    o L'utilité d'un EPF n'est pas la réalisation d'économies mais l'apport d'un savoir-faire et la contribution à une meilleure maîtrise du territoire

    Il est en particulier erroné d'imaginer qu'ils permettent de faire plus avec moins d'argent. L'EPF dispose d'un véritable savoir-faire et la négociation, l'acquisition et la gestion d'un portefeuille foncier nécessite des professionnels.

    o Les implantations d'activités excentriques sont davantage responsables de l'étalement urbain que les implantations résidentielles

    L'implantation des zones d'activités étant presque toujours le résultat d'initiatives publiques soutenues par des subventions locales, on pourrait donc facilement éviter qu'elles ne compromettent les politiques d'aménagement menées par ailleurs.

    o Le renouvellement urbain peut relever de deux stratégies foncières opposées

    Soit on considère que la situation du quartier n'est pas trop dégradée et que des actions de revalorisation ramèneront une dynamique immobilière. Soit il faut se résoudre à engager une action plus lourde de restructuration qui nécessitera d'abord d'importantes acquisitions. Mais il faut choisir.

    o Le recours (mesuré) à l'expropriation est inévitable pour faire un bon urbanisme

    Si la localisation des opérations nouvelles n'est conditionnée que par l'existence de propriétaires qui ont besoin de vendre leurs terrains, il est clair que l'on aboutit à des formes d'urbanisation anarchique. Quoi qu'il en soit, l'utilité publique de l'opération doit être clairement établie.

    o Une bonne gestion de l'espace peut amenée à la mise en vente de terrains publics sous utilisés

    Le recensement, la cartographie et le diagnostic de l'ensemble des terrains publics doivent constituer l'une des préoccupations permanentes des politiques foncières.

    Figure 35. 24 propositions sur les politiques foncières locales, J. Comby 2009

    3. Elargir le champ de la réflexion

    Le terrain d'étude du mémoire s'est limité aux Alpes du Nord, suivant le périmètre défini par la Directive Territoriale d'Aménagement du même nom. Toutefois, aller voir plus loin, et précisément dans d'autres territoires alpins promet d'être tout à fait intéressant. Enclin à des problématiques foncières peut-être différentes, le territoire des « Alpes du Sud » française mériterait ainsi d'être explorer. En outre, d'autres terrains d'étude choisis dans tout l'arc alpin offriraient une vision pan alpine de la question foncière dans toute sa diversité.

    Par exemple en Suisse, des initiatives en faveur d'une gestion raisonnée du foncier font parler d'elles. L'association `Altitude 1400' « milite pour une urbanisation des Alpes axée sur un développement naturel et construit au service d'une vision économique et touristique de qualité et durable » et a publié en 2009 un dépliant comportant « 10 propositions pour l'avenir »366(*). L'association ProNatura (la plus ancienne organisation suisse de protection de la nature) a également édité un « Point de vue : milieu bâti et paysage »367(*) qui montre que cette thématique de la maîtrise foncière n'a pas de frontière alpine. Enfin, un article enthousiaste relate la mise en place d'un Plan directeur cantonal (PDCn) pour le Canton de Vaud offrant ainsi un outil stratégique complémentaire pour construire un projet de territoire368(*).

    Cependant, l'élargissement du champ de réflexion proposé ici ne s'effectuera pas géographiquement mais plutôt historiquement puis culturellement.

    3.1. Une mise en perspective historique

    Dans un article de Dominique Dujols369(*), le retour au siècle dernier est opéré pour apporter un éclairage au propos central du texte qui concerne la notion de patrimoine commun de la Nation. En effet, l'auteur revient sur la vaste et longue politique de remembrement foncier lancée en réaction aux pénuries alimentaires qui ont succédés à la Première Guerre Mondiale. L'auteur propose cette mise en perspective historique pour démontrer qu'à cette époque, la réglementation n'avait cessé d'encadrer les conditions d'exercice du droit de la propriété rurale pour lutter contre la rétention des terres, favoriser voire imposer leur valorisation, éviter la spéculation et préserver le droit des exploitants. Elle commente dès lors que « l'usage l'a emporté sur le support : le territoire rural français est devenu "patrimoine commun de la Nation" ». Cependant, si par le remembrement l'usage du foncier l'emporte sur le droit de propriété, les difficultés rencontrées aujourd'hui par les exploitants non propriétaires ne sauraient être oubliées : le refus de louer des parcelles sous statut de fermage par exemple fragilise la pérennité et la stabilité des exploitations370(*), démontrant à l'inverse que le droit du propriétaire foncier l'emporte sur l'usage agricole.

    Grâce à cette référence à la politique foncière du remembrement (16 millions d'hectares ont ainsi été restructurés), l'auteur bénéficie d'un argument supplémentaire pour appeler à une politique foncière volontariste en faveur de l'habitat : « le moins que l'on puisse dire est que le législateur a été d'une audace inouïe. Demander aux propriétaires d'apporter leurs terres pour recevoir d'autres parcelles en échange, et imposer aux non exploitants de mettre leurs terres à la disposition des agriculteurs... ». Dans quelle mesure serait-il pertinent de relancer ce type de politique étatique forte pour obliger en quelque sorte une mobilisation « optimale du foncier agricole » aujourd'hui ? Surtout, quelle probabilité d'aboutir une telle politique aurait-elle ? D'ailleurs, la loi instituant le droit au logement opposable du 5 mars 2007 (DALO) ne suit-elle pas, dans une moindre mesure, une logique similaire ? A cette époque donc, « la collectivité a fait prévaloir pour l'agriculture l'intérêt général, sans mettre à bas le droit de propriété ». Dominique Dujols s'interroge ainsi : « Pourquoi n'en serait-il pas de même pour le logement dans la "Nation urbaine" que nous sommes devenus ? »

    Cet éclairage historique semble d'autant plus pertinent qu'il réitère des avis saisis durant les entretiens effectués sur le terrain. Enfin, à la façon dont l'énonce la région Rhône-Alpes, « l'obligation du retour de l'intérêt général est une question du 21ème siècle »371(*).

    3.2. L'apport des chercheurs « du Sud » aux problématiques foncières alpines ?

    Elargir le champ de la réflexion à des territoires qui sont très différents du terrain d'étude alpin constitue une ouverture plus culturelle que géographique. Les systèmes sociaux, institutionnels ou législatifs qui structurent des problèmes fonciers de certains « pays du Sud » sont parfois éloignés des problématiques des vallées alpines, mais pas toujours. De plus, quand bien même les situations de problèmes sont différentes des nôtres, les solutions qui sont construites localement ouvrent des perspectives intéressantes de « transposition » ou « d'importation » d'une méthodologie éprouvée par les chercheurs dans des pays du Sud.

    Ainsi, en matière de prévention des risques dans une perspective de réduction de la vulnérabilité, le chercheur Jean-Christophe Gaillard qui travaille essentiellement sur les pays du Sud (Philippines, Indonésie, Comores...) a participé à un projet dans les Alpes dont la stratégie de réduction de la vulnérabilité est directement issues de ses travaux de l'hémisphère sud. Celui-ci s'est déroulé à Bourg-Saint-Maurice du 27 mai au 2 juin 2010. Le projet était financé par le Pôle Grenoblois d'Etude et de Recherche pour la Prévention des Risques Naturels dans le cadre de l'opération « Sites pilotes de gestion intégrée des risques naturels dans les Alpes ».  De même, un article intitulé Stratégie pour un développement durable par le foncier à Madagascar372(*), enrichit une approche franco-française des problématiques foncières et encourage à expérimenter d'autres méthodologies et d'autres stratégies « du Sud » sur des territoires alpins.

    Ainsi, les chercheurs du Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris (LAJP) partagent à travers cet article sur la gestion patrimoniale373(*) une démarche de négociation, de discussion, d'élaboration d'un projet commun pour dépasser les intérêts particuliers induits par la propriété foncière, en somme, une stratégie de négociation foncière assez similaire aux pratiques observées dans le périmètre alpin retenu pour le mémoire.

    « Les ordonnancements sociaux sont ensuite le facteur le plus déterminant de l'approche patrimoniale en privilégiant le mode négocié dans des contextes antérieurement régulés selon le mode imposé, technocratique ou bureaucratique au sommet, tatillon, interventionniste et caporaliste à la base quand il s'agissait des interventions des Eaux et Forêts avant leur réforme interne dans nombre de pays africains. Le choix de la négociation représente une véritable révolution culturelle au sein de l'administration. Il aura fallu batailler ferme à Madagascar pour l'obtenir. Au Mali, l'idée est acceptée "du bout des lèvres". Ailleurs, le principe adopté peut être contredit dans la pratique ».

    « Pour négocier il faut que les intervenants soient globalement à égalité. Il faut donc aider les plus faibles à réunir leurs informations, approfondir leurs analyses et pondérer leurs choix : à organiser leurs conduites sur les plans stratégique et tactique. Pour ce faire, on recommande de former des formateurs qu'on appelle médiateurs environnementaux à Madagascar, médiateurs patrimoniaux aux Comores et qui sont choisis en raison de leurs expériences, compétences et proximité psychologique avec les populations à assister. Il va falloir en effet se plier, pour tous les protagonistes de la négociation, à une démarche intellectuelle délicate fondée sur une méthode régressive et associant divers processus ».

    L'idée d'un nouvel acteur spécialiste de la médiation foncière et identifié comme tel, le « médiateur patrimonial » ou « médiateur environnemental » est tout à fait intéressante car des acteurs alpins endossent déjà plus ou moins ce rôle sauf qu'ils n'en ont pas forcément toute la légitimité et la reconnaissance.

    « Dans un premier temps, les acteurs sont invités à déterminer en commun l'objectif qu'ils assignent à leur gestion en se projetant sur vingt à trente ans (une génération, celle de leurs enfants). Ils déterminent donc un résultat à atteindre compte tenu des informations en leur possession (pression et projection démographiques, évolution du marché, environnement national et international...). Puis, par régressions successives, émergent toutes les contraintes dont il faut tenir compte et les réponses que chaque acteur devra apporter pour que l'objectif final soit atteint. On passe ainsi de l'horizon trente ans à l'horizon un an, voire un mois ou un jour en cas d'urgence, cette combinaison de méso et de micro-processus faisant prendre conscience de l'indispensable solidarité par interaction spatio-temporelle des décisions collectives ».

    La démarche décrite ci-dessus est exactement la même qui a été entreprise début 2010 sur la commune de La Grave (38). Dans la perspective de la révision du POS en PLU, une démarche de concertation préalable à la rédaction d'un cahier des charges pour l'élaboration du PLU par un bureau d'études a été initiée et mise en oeuvre par Vincent Tonnelier374(*), « missionné » par le maire de la commune pour tenter de construire avec l'ensemble des habitants les bases d'une vision prospective, « Quel avenir pour La Grave à l'horizon 2025 ? ».

    « Enjeux et règles du jeu sont, à nouveau, étroitement associés. Les solutions adoptées doivent en effet prendre une forme juridique et leur adoption doit être assez solennelle pour que le mode de gestion soit stabilisé sur une longue période. Actuellement, la démarche adoptée à Madagascar préconise la forme contractuelle accompagnée de rituels sociaux et religieux (kabary et sacrifice de boeufs).[...]

    Reste enfin un dernier problème, celui de la qualification de ce mode de gestion. Derrière l'adjectif patrimonial, que veut dire patrimoine ? En quoi ce mode de gestion se distingue-t-il d'une approche domaniale ou privative-capitaliste ? C'est là où l'inventivité des jeunes chercheurs a pu se développer ».

    Sans aller jusqu'au sacrifice de boeufs, là encore l'adoption de nouvelles règles doit prendre une forme juridique stable, reconnue et respectée de tous, par exemple, grâce à un document de planification opposable. Dans le Vercors, la communauté de communes du Massif du Vercors a réussi à donner cette qualité à sa Charte de Développement en l'intégrant (ainsi que la carte de destination des sols) à la Charte du Parc naturel régional qui est un document opposable aux documents d'urbanisme de rang inférieurs (PLU, PLH) dans tout le territoire du Parc.

    « Un des effets les plus visibles de ce type de recherches est de remettre au premier plan les notions de commun, communaux, communautaire et communauté que la pensée moderne avait dévalorisées [...]. C'est parce que, en Afrique et à Madagascar mais aussi en France, certains acteurs se situent dans des logiques traditionnelles et communautaires et d'autres dans des logiques capitalistes qu'il convient de confronter leurs points de vue et leurs besoins considérés chacun comme initialement légitimes mais à négocier nécessairement ».

    A la source même de la question foncière, l'enjeu de concilier intérêt général et intérêts particuliers est un obstacle à franchir quelque soit le territoire, au Nord comme au Sud.

    Ce dernier chapitre a permis d'éclaircir ce que pouvait constituer une gestion foncière durable pour les territoires de montagne. Si cette approche ne semble pas révolutionner les pratiques, elle met l'accent sur la nécessité de mettre en oeuvre une politique foncière volontariste - qui soit au service d'un projet de territoire plus vaste - afin d'accomplir une véritable politique de développement durable.

    Pour finir, cette illustration intitulée « un aménagement foncier réussi »375(*) offre un joli modèle, idyllique et apaisé de quelques interventions foncières en espace rural. Un beau dessin qui rappelle à quel point la théorie est parfois loin de la pratique.



    Conclusion générale

    Avant de clore ce travail de recherche appliquée à la question foncière dans les Alpes du Nord, il est opportun de rappeler tout d'abord le point de départ de la réflexion qui a guidé le mémoire. Ensuite seront reprises les différentes étapes de la démonstration articulée autour des trois grandes parties du document. Enfin, il s'agira d'ouvrir ce travail à de nouvelles pistes de recherche évoquées au fil du mémoire.

    Ce travail part d'un constat simple : de nombreux outils existent pour mettre en oeuvre une politique foncière mais celle-ci semble une action difficile à mener pour les acteurs locaux. Au regard du territoire d'étude induit par la réalisation d'un stage à CIPRA France, les Alpes, il a semblé intéressant d'étudier le rôle potentiel que pouvaient jouer les caractéristiques spécifiques aux espaces alpins dans la difficulté du passage à l'action foncière. Dès lors, il s'agissait de poser la question d'une spécificité alpine en matière de gestion et de politique foncière. L'hypothèse qui a permis de guider l'investigation répondait ainsi au constat de départ : l'outil de l'action publique n'est pas important en soi pour mener une politique foncière mais il est intéressant car il révèle des discours. C'est plutôt la démarche mise en oeuvre localement, adaptée aux propres objectifs définis par chaque territoire, qui détermine l'efficience d'une politique foncière volontariste dans les Alpes du Nord.

    L'hypothèse suppose dès lors plusieurs nuances à corroborer ou à infirmer, partant d'une même donnée : le projet de territoire (projet politique) est le moteur de l'action foncière. Tout d'abord, les outils de maîtrise du foncier qui sont utilisés dépassent les cadres normatifs en innovant là où ces derniers ne sont pas encore allés. D'autre part, la démarche foncière innovante va jusqu'à distordre certains outils de gestion foncière pour les mettre au service de son projet (détourner l'usage commun de l'outil, le combiner à d'autres pour en changer la nature...). Ainsi l'a résumé Alexandre Mignotte (CIPRA France), si le neuf n'est pas dans la nouveauté (un énième nouvel outil), il est dans la capacité de dépasser, d'adapter ou d'évoluer avec des outils « classiques », là se trouve l'innovation territoriale en matière de foncier.

    Une méthodologie exploratoire a proposé un angle d'attaque original pour travailler cette réflexion sur le foncier. La mise en regard de deux cadres normatifs de planification avec les acteurs de terrain et leurs pratiques a permis d'aborder le rapport au droit et à la norme en aménagement, et plus spécifiquement sur le foncier. Une première grille d'analyse (A) a donc permis de saisir le discours foncier produit par les deux cadres normatifs retenus, la Convention alpine, et la Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Une seconde grille réalisée selon la même méthodologie, a saisi les pratiques foncières explorées sur le terrain d'étude des Alpes du Nord (B). La dernière grille (C) a permis de confronter la théorie de ces cadres normatifs à la pratique foncière alpine, de « voir » la relative adéquation et de « mesurer » le décalage perceptible grâce à cette méthodologie.

    Guidé par l'hypothèse de départ, l'objectif poursuivit était de montrer, par trois exemples concrets et détaillés, des pratiques foncières alpines qui mettent en oeuvre des démarches efficaces voire innovantes sur leur territoire. Trois terrains d'étude ont été retenus : Chamonix, le plateau du Vercors, les balcons de Belledonne. Au-delà de ces trois terrains, la réflexion devait permettre de mettre en exergue les conditions de réussite et les obstacles d'une politique foncière volontariste dans les Alpes du Nord.

    Figure 36. Imbrication de la recherche et du stage, N. Moyon 2010

    Au final, trois dimensions ont été explorées selon un axe de recherche, et trois autres selon celui du stage, ce qui a permis d'associer les impératifs d'un mémoire de recherche et ceux d'un stage professionnalisant.

    Le mémoire s'est structuré selon trois grandes parties dont les conclusions principales vont être énoncées, rappelant ainsi le fil de cette longue démonstration.

    La première partie a permis de mobiliser les différentes facettes de l'objet foncier afin de l'appréhender avec une plus grande attention une fois sur le terrain. Cette partie plus introductive était donc nécessaire pour poser les bases de l'objet d'étude et comprendre par conséquent la complexité de la question foncière. Ainsi, le foncier s'est révélé être l'objet de toutes les attentes et donc de nombreux conflits. Mobilisant pléthore d'acteurs, de lois et d'outils, la question foncière prend racine dans le droit, mobilise de l'argent et questionne la politique (c'est même à la fois un objet politique et l'objet de politiques). En résumé, c'est par son imbrication à d'autres thématiques de l'aménagement et de l'urbanisme, et la transversalité elle-même de l'objet foncier que l'on peut appréhender le problème foncier plus justement.

    La seconde partie a constitué le coeur de la démarche de recherche, entre cadres normatifs et pratiques de terrain, montrant comment chacun d'eux allaient en quelque sorte « à la conquête » du foncier alpin. L'attention s'est portée sur le discours foncier de deux cadres normatifs : la Convention alpine et ses protocoles d'application, et le projet de DTA des Alpes du Nord. Ensuite, l'analyse de la mise en oeuvre de ces cadres normatifs alpins a montré les modalités du rapport au droit et à la norme qu'entretiennent certains acteurs, en particulier avec la DTA. Revenant sur l'hypothèse de départ, il a été possible de distinguer trois niveaux croissants d'ajustement par rapport aux cadres, voire de distorsion des cadres normatifs.

    Premièrement, ces cadres normatifs permettent de rendre intelligible la vision de l'aménagement et du développement alpin promue par l'Etat. La DTA restreint ce discours à un périmètre identifié et réduit, se confrontant dès lors à la farouche et unanime opposition des territoires touristiques de station. Deux explications sont proposées pour comprendre ce phénomène : l'objet au coeur du discours de la DTA est faiblement audible (une réalité donnée à voir par l'Etat qui ne correspond pas du tout aux représentations de certains acteurs locaux), mais surtout, la nature de la procédure étatique (une DTA « directive » par essence) a une audibilité presque inexistante car « inacceptée » sur ces territoires alpins. De facto l'acceptabilité d'un tel cadre normatif est rendue impossible car la norme est ici vécue plutôt comme un diktat de l'Etat.

    Deuxièmement, le cadre normatif a le mérite d'exister car il re-questionne forcément l'ensemble des acteurs locaux (partisans et opposants confondus) et favorise les réajustements : en les décriant, les acteurs locaux s'en servent pour réaffirmer leur propre projet, et inversement, ils peuvent tout autant enrichir ou conforter leurs pratiques.

    Enfin, les pratiques innovantes peuvent permettre de réajuster ou refaçonner les cadres normatifs : en montant en généralité (verticalement) ou en se diffusant dans d'autres territoires (horizontalement). La montée en généralité peut permettre de faciliter la création de conditions favorables localement pour que ce type de « solution foncière innovante » puisse se multiplier avec de moindres contraintes.

    Le chapitre 2 s'est ensuite attaché à répondre à la question spécifique de recherche. En regardant du côté des outils et de leurs utilisations sur trois terrains d'études, l'analyse des différentes pratiques foncières a montré un hiatus relatif entre les procédures définies en théorie, et le bricolage opéré en pratique pour les mettre en oeuvre. En effet, à Chamonix, dans le Vercors ou dans Belledonne, les acteurs locaux se saisissent des outils de maîtrise foncière dans les cadres normatifs existants et les mettent au service de leur politique foncière ou de leur vision du territoire quitte à les distordre. En réalité, la procédure foncière est « absorber » par ce qu'il convient d'appeler un « bricolage foncier ». Pour autant, ce bricolage mobilise une intelligence particulière (et sans doute accrue) des acteurs locaux, une forme d'ingéniosité dans l'utilisation et la mise en oeuvre d'outils ou de cadres, voire le signe de l'irruption de la ruse dans le code (BAREL, 1981). Dans cette perspective, la figure de « l'acteur-bricoleur » (ALLIE, 2005) vient éclairer ces pratiques foncières innovantes ou volontaristes saisies dans les Alpes du Nord.

    Là encore, la montée en généralité a permis d'identifier trois stratégies cumulatives pour construire les conditions d'une maîtrise foncière diffusable plus largement. Celles-ci s'appuient sur les expériences des trois terrains d'études : chacun dans leur « style », ces territoires ont développé une démarche pour maîtriser le foncier (ou tenter de le faire) qui leur est propre. Chamonix a renforcé sa technicité territoriale et foncière pour la mettre au service d'un projet politique ; c'est donc une stratégie d'investissement dans la technique qui a été retenue. Le plateau du Vercors et Belledonne, chacun d'une façon différente illustrent et enrichissent la seconde stratégie qui vise à « construire du dialogue » : par la sensibilisation, la participation et la formation aux questions foncières, la collectivité fabrique un contexte favorable à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'une politique foncière volontariste. Enfin, la troisième stratégie, transversale aux trois terrains d'étude, met l'accent sur les cadres de planification. Il s'agit de « jouer » avec ces cadres règlementaires, de les modeler pour les mettre au service d'un projet de territoire. Une question a germé au fil des réflexions : que cherche-t-on réellement à maîtriser, le foncier ou la question foncière ?

    La troisième et dernière partie a permis de répondre plus précisément à l'enjeu d'articuler la théorie à la pratique en matière de foncier, sur le territoire des Alpes du Nord. Le premier chapitre a opéré la confrontation entre les grilles d'analyses du « discours foncier » et des « initiatives locales » : la grille (C) montre les points de concordance et de décalage et permet, dans une certaine mesure, de contrecarrer l'idée reçue selon laquelle les cadres normatifs sont déconnectés de la réalité. Par cette grille d'analyse, on voit que 45% des mesures foncières recensées sont partagés par les cadres normatifs et les initiatives locales (même levier d'intervention et même thème mobilisé). La grille montre également que les initiatives locales « dépassent » bien plus les cadres normatifs (seize mesures initiées par la pratique) qu'ils ne les « dépassent » (trois mesures initiées par le discours foncier). Ce travail de construction puis de confrontation de plusieurs grilles d'analyse est un exercice à la fois théorique et méthodologique qui a participé à la dimension de recherche de cette étude.

    Le second chapitre pose la question de la spécificité alpine en matière de politique foncière, une question quelque peu en filigrane dans la partie concernant la DTA des Alpes du Nord. Il s'avère que des particularités physiques du territoire alpin impactent nécessairement la gestion de l'espace et donc l'appréhension du foncier. De fait, dans ces espaces restreints par la pente ou les risques naturels, et convoités (attrait du site, bassin d'emploi dynamique, tourisme), les conflits fonciers sont inévitables et l'enjeu du multi-usage de l'espace montagnard est accru : habitat, loisirs, tourisme, industrie, transports... Ainsi, c'est plutôt le territoire de l'urbain qui est restreint et donc dans ce sens, ce n'est pas la montagne qui créée la pression foncière mais bien la ville. Toutefois, une certaine spécificité alpine semble pertinente pour le foncier des territoires touristiques alpins qui conjuguent des contraintes physiques, urbaines et touristiques. C'est aussi là qu'un état d'esprit montagnard typique continue d'influencer fortement la manière dont on fait le territoire. Les territoires alpins du Nord, à l'image des littoraux, subissent une pression urbaine qui prend une acuité particulière dans les régions touristiques.

    Enfin, le dernier chapitre pose une question qui répond plutôt aux impératifs du stage : peut-on parler d'une politique foncière durable pour les Alpes ? La réflexion s'est beaucoup inspirée des avis émis par les acteurs rencontrés, construisant au fur et à mesure ce qu'il serait possible d'envisager grâce au concept de durabilité appliqué au champ du foncier. De plus, énonçant des conditions de réussite pour une politique foncière volontariste ainsi que les vingt-quatre propositions de J. Comby pour les politiques foncières locales, il a été déduit que le concept de durabilité ne renouvelait pas vraiment l'idée d'une politique foncière volontariste. La réflexion portée sur une gestion du foncier alpin qui soit durable signifie, en d'autres termes, qu'il faille maîtriser le foncier en faveur d'un projet de développement durable du territoire. Cela recouvre ainsi deux étapes : tout d'abord, la maîtrise du foncier par la collectivité, et ensuite, un arbitrage de l'usage des sols qui soit en faveur du développement durable du territoire. Par cette démonstration, il semble que le concept d'urbanisme durable ou d'aménagement durable suffise à impulser une politique foncière volontariste sur la voie de la durabilité.

    Ainsi, l'hypothèse du mémoire a pu être vérifiée à travers les modalités de mise en oeuvre des cadres normatifs et les pratiques foncières sur les terrains d'étude. Cependant, si l'outil de l'action publique n'est pas important en soi pour mener une politique foncière, le jeu de l'hypothèse implique de tester cette affirmation et de tenter de l'invalider. En ce sens, l'outil (ou le cadre) est intéressant pour lui-même car s'il révèle des discours, il traduit aussi l'effort mis dans sa « construction ». L'outil est très important selon comment il a été construit et définis, et surtout selon la force normative qu'on lui donne. La DTA illustre cette idée : tant qu'elle était opposable, elle a déclenchée les passions, mais dès lors qu'elle perdu son opposabilité, l'outil « DTA » est tombé dans l'oubli. On a bien là un cadre de planification dont l'efficacité peut être forte comme nulle. En somme, l'efficacité potentielle d'un outil ou d'un cadre normatif renouvelle l'importance à lui consacrer, pour lui-même.

    En somme, ce mémoire a permis d'effleurer d'autres pistes de recherche plus ou moins liées à la question foncière mais ici on en retiendra deux qui ont été récurrentes durant cette démonstration. Ainsi, les réflexions sur les relations ville-campagne et de manière plus spécifique, ville-montagne ou vallée-versant, semblent tout à fait pertinentes dans un contexte d'urbanisation croissante des massifs préalpins. De plus, il semble que l'une des priorités des territoires ruraux à faible ressource est de réussir à mobiliser une ingénierie territoriale, et plus particulièrement une ingénierie foncière dans les espaces sous influence périurbaine.

    Sur ce territoire des Alpes du Nord, deux grands enjeux en matière de foncier se distinguent : d'une part le foncier du Sillon alpin, un foncier ancré dans une stratégie métropolitaine qui influence les massifs de proximité, et d'autre part, le foncier des territoires touristiques. Quoiqu'il en soit, « la question foncière est toujours et partout un problème difficile, lancinant, mal résolu, ou enraciné dans l'histoire des patrimoines »376(*) et des identités locales.

    Table des matières

    Introduction générale 3

    Partie I. Appréhender la question foncière 9

    Chapitre 1. Démarche générale du mémoire ou comment construire les bases d'une énième étude sur le foncier 11

    1. Une recherche appliquée aux questions foncières dans les Alpes du Nord 12

    1.1. La démarche de recherche 12

    1.2. Le problème général de recherche 13

    1.3. Les jalons de la recherche appliquée 14

    2. « L'effort méthodologique » 14

    2.1. Quelques principes méthodologiques 14

    2.2. Les prémices du sujet de recherche 15

    2.3. Les questionnements retenus 18

    2.4. « Méthodologie pratique » de travail 18

    3. Production et construction des données 19

    3.1. Elaboration de la grille d'analyse 19

    3.2. Interprétation de la grille 20

    4. Les entretiens 21

    4.1. Pourquoi faire des entretiens ? 21

    4.2. La méthode utilisée 21

    5. Liens avec d'autres travaux de recherche 22

    5.1. Le projet « Foncimalp » 23

    5.2. Le projet de recherche « IngéTerr » 24

    5.3. Les projets de recherche « Popfongo » et « AMEN » 24

    Chapitre 2. Les miscellanées du foncier 27

    1. Le foncier, de quoi s'agit-il ? 28

    1.1. De droit 28

    1.2. D'argent 30

    1.3. De politique 32

    2. Qui se préoccupe du foncier ? 36

    2.1. Les acteurs et la préoccupation foncière 36

    2.2. Le problème du mille-feuille 38

    2.3. Les conflits fonciers 38

    3. Comment agir sur le foncier ? 40

    3.1. Les cadres normatifs du foncier 40

    3.2. Les lois « Grenelle », et après ? 44

    3.3. Les outils d'une politique foncière 46

    3.3.1. La boite à outils fonciers 47

    3.3.2. La fiscalité, un levier potentiel 50

    Partie II. A la conquête du foncier alpin 53

    Chapitre 1 La Convention Alpine et la DTA des Alpes du Nord, deux cadres normatifs face au foncier alpin 55

    1. Quels discours sur le foncier alpin ? 56

    1.1. Convention Alpine, protocoles d`application : quid du foncier ? 56

    1.2. DTA des Alpes du Nord et foncier 57

    1.2.1. L'objet foncier selon la DTA : un support, un corollaire, un levier 59

    1.2.2. « L'ambition foncière » de la DTA des Alpes du Nord 61

    1.3. Grille d'analyse (A) « Cadres normatifs et foncier » 63

    2. La DTA des Alpes du Nord ou le parcours du combattant 67

    2.1. 14 années de procédure : rapide retour historique 67

    2.2. Enquête publique et Grenelle II : le combat de l'opposabilité 69

    3. L'acceptabilité de ces cadres normatifs alpins 72

    3.1. Un objet et un cadre « difficilement audible » 72

    3.2. Une DTA directive 73

    3.3. Des montagnards, coupables désignés 75

    3.4. Ces cadres normatifs, des tentatives de gouvernance environnementale 76

    Chapitre 2. Trois territoires alpins en quête de maîtrise foncière 79

    1. Une ingénierie au service d'une politique foncière à Chamonix 80

    1.1. Présentation générale 80

    1.2. Une politique foncière volontariste et interventionniste tournée vers l'habitat permanent 82

    1.2.1. Des opérations pour le logement permanent qui se multiplient 83

    1.2.2. Une technicité juridique qui s'affine : vers un infléchissement du droit de propriété 84

    1.3. Entre bricolage et ingéniosité 85

    2. La « participation-formation » dans le massif du Vercors 87

    2.1. Présentation générale 87

    2.2. La Charte de développement de la CCMV 88

    2.2.1. Une démarche alternative au SCOT 89

    2.2.2. Une Charte opposable 91

    2.2.3. Une réaction au SCOT grenoblois 92

    2.3. Sensibilisation, participation, formation 93

    3. L'ambition d'agir sur la gestion de l'espace dans Belledonne 95

    3.1. Présentation générale 95

    3.2. Des efforts portés sur la sensibilisation et l'animation territoriale 98

    3.2.1. Sensibiliser les élus et les habitants 98

    3.2.2. Entre animation et accompagnement 100

    3.3. Des « UHN » aux « limites intangibles », le tournant du SCOT ? 101

    3.3.1. Le Projet d'Unités d'Habitations Nouvelles (UHN) 102

    3.3.2. Le SCOT de la RUG et ses « limites intangibles » 103

    3.4. Le problème récurrent du financement 105

    3.4.1. Financer une mission d'ingénierie à destination des élus 105

    3.4.2. Le projet de PNR de Belledonne 106

    4. Vers la maîtrise foncière 107

    4.1. La grille d'analyse (B) « Initiatives locales et foncier » 107

    4.2. Trois stratégies cumulatives pour construire les conditions d'une maîtrise foncière 111

    4.2.1. Construire du dialogue 112

    4.2.2. Investir dans la technique 112

    4.2.3. Agir sur les cadres de planification 113

    Partie III. De la théorie à la pratique 115

    Chapitre 1. Articuler la théorie des cadres normatifs à la pratique des initiatives locales alpines 117

    1. Grille d'analyse (C) « Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin » : concordance ou décalage ? 118

    2. Quel(s) rapport(s) à la norme et au droit en aménagement ? 121

    2.1. Des perspectives ouvertes par la gouvernance... 121

    2.2. Mais un cadre qui reste « hyper réglementé » 122

    2.3. L'efficacité des outils et des cadres 124

    3. La figure de l'acteur-bricoleur 126

    Chapitre 2. De la spécificité alpine en matière de politique foncière 129

    1. Des particularismes reconnus aux spécificités proclamées 130

    1.1. La loi Montagne de 1985 130

    1.2. Entre handicaps et opportunités pour le territoire alpin 132

    1.3. Une spécificité des territoires touristiques alpins ? 133

    2. A qui la terre ? 135

    1.1. L'apport de Mériaudeau sur la question foncière alpine 135

    2.2. Un état d'esprit typique et ses incidences sur les politiques foncières alpines 137

    3. Montagne et littoral même combat foncier ? 139

    3.1. Des problématiques foncières assez proches 139

    3.2. L'exemple de la Bretagne 140

    Chapitre 3. Vers une gestion foncière durable des territoires alpins 143

    1. Foncier et durabilité 144

    1.1. « Faire du foncier durable » 144

    1.2. Durabilité en station de montagne 145

    1.3. « Personne n'a intérêt à scier la branche sur laquelle il s'assoit » 146

    2. Pour des politiques foncières... 147

    2.1. Cinq conditions de réussite pour une politique foncière volontariste 148

    2.2. Vingt-quatre propositions de Joseph Comby 149

    3. Elargir le champ de la réflexion 151

    3.1. Une mise en perspective historique 152

    3.2. L'apport des chercheurs « du Sud » aux problématiques foncières alpines ? 153

    Conclusion générale 157

    BIBLIOGRAPHIE 165

    ANNEXES 171

    Table des illustrations

    Figure 1. Le problème général de recherche, N. Moyon 2010 13

    Figure 3. Les jalons de la recherche appliquée, N. Moyon 2010 14

    Figure 2. Les trois pistes de recherche identifiées, N. Moyon 2010 14

    Figure 4. Méthodologie de travail, N. Moyon 2010 19

    Figure 5. Rétroplanning de l'étude 19

    Figure 6. Structure de la grille d'analyse, N. Moyon 2010 20

    Figure 7. Projet Foncimalp, Suaci Alpes du Nord 2010 23

    Figure 8.Mise en perspective de la chaîne de transformation du foncier, CLD des Vals du Dauphiné & Nord Isère 2008 35

    Figure 9. Acteurs et "préoccupation foncière", N. Moyon 2010 37

    Figure 10. Interactions dans les territoires ruraux et périurbains, d'après A. Tchekemian 2008 39

    Figure 11. Exemples d'enjeux et bénéfices partagés entre le rural et l'urbain, d'après M. Mouly 2008 39

    Figure 12. Les cadres normatifs du foncier, N. Moyon 2010 41

    Figure 13. Tableau des outils de planification, d'après R. Cazajous 2007 48

    Figure 14. Tableau des outils d'acquisition foncière, d'après R. Cazajous 2007 48

    Figure 15. Tableau des outils d'aménagement opérationnel, d'après R. Cazajous 2007 48

    Figure 16. Tableau des outils fiscaux et financiers, d'après R. Cazajous 2007 49

    Figure 17. Schéma des outils fonciers, par catégorie et échelle d'intervention/utilisation, d'après T. Wyon 2008 49

    Figure 18. 10 mesures pour construire une gestion foncière au sens de la Convention alpine, N. Moyon 2010 57

    Figure 19. Cerner l'objet foncier et ses enjeux à travers l'analyse de la DTA des Alpes du Nord, N. Moyon 2010 59

    Figure 20. Constat et orientations en matière de foncier selon la DTA Alpes du Nord, N. Moyon 2010 59

    Figure 21. Evolution de « l'ambition foncière » de la DTA Alpes du Nord (Juin 2009 - Juillet 2010), N. Moyon 2010 61

    Figure 22. Grille d'analyse (A) "Cadres normatifs et foncier", N. Moyon 2010 64

    Figure 23. Détail de la grille d'analyse (A), N. Moyon 2010 66

    Figure 24. L'opposabilité de la DTA des Alpes du Nord, une question de calendrier, N. Moyon 2010 71

    Figure 25. Démarche de la Charte de développement de la CCMV, 2007 90

    Figure 26. Démarche de formation des élus du Vercors, Plan d'actions CCMV 2007 93

    Figure 27. Interdépendance vallée-versant, ADABEL 2009 96

    Figure 28. Evolution de l'agriculture de Belledonne, ADABEL 2009 97

    Figure 29. Grille d'analyse (B) "Initiatives locales et foncier", N. Moyon 2010 108

    Figure 30. Détail de la grille d'analyse (B), N. Moyon 2010 111

    Figure 31. Trois stratégies cumulatives vers une politique foncière volontariste, N. Moyon 2010 112

    Figure 32. Grille d'analyse (C) "Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin", N. Moyon 2010 120

    Figure 33. Les atouts d'une politique foncière durable, CG Gironde 2010 147

    Figure 34. 5 conditions de réussite pour une politique foncière volontariste, N. Moyon 2010 148

    Figure 35. 24 propositions sur les politiques foncières locales, J. Comby 2009 151

    Figure 36. Imbrication de la recherche et du stage, N. Moyon 2010 Erreur ! Signet non défini.

    BIBLIOGRAPHIE

    Ouvrages

    - BOUTINET Jean-Pierre, Anthropologie du projet, PUF, Paris, 1992, 307p.

    - CHALAS Yves (sous la dir.de), L'imaginaire aménageur en mutation. Cadres et référents nouveaux de la pensée et de l'action urbanistique, L'Harmattan, Paris, 2004, 340 p.

    - CIPRA, Nous les Alpes ! Des femmes et des hommes façonnent l'avenir, 3ième rapport sur l'état des Alpes, Schaan, Liechtenstein, Editions Yves Michel, Gap, 2007, 301p.

    - DEBARBIEUX Bernard, RUDAZ Gilles, Les Faiseurs de montagne, CNRS Editions, Paris, 2010, 373p.

    - DEBROUX Josette, Les nouveaux venus du canton de Châtillon-en-Diois ou la rencontre entre un territoire et des histoires individuelles, In HANUS, Regards croisés sur l'agriculture en Vercors, Éd. Parc naturel régional du Vercors, coll. « Études et chroniques », Lans-en-Vercors, 2003, pp. 240-254

    - FACIM, La montagne, univers de tous les possibles ?, Actes de la conférence-débat CIMES 2007, Albertville.

    - FACIM, Construire dans la pente, une opportunité, Actes de la conférence-débat du 17 déc. 2009, CIMES 2009, Chambéry, 120p.

    - GERBAUX Françoise, La montagne en politique, L'Harmattan, 1994. Commentaire de l'ouvrage [en ligne]. Disponible sur : http://pweb.ens-lsh.fr/omilhaud/La_montagne_en_politique.doc (consulté le 20/04/10).

    - GIRAUT Frédéric, Innovation et territoires: les effets contradictoires de la marginalité, In Semaine alpine 2008 : innover dans les Alpes, RGA, Editions du Fournel, L'Argentière La Bessée, s.l.n.d., pp.6-8

    - MARCELPOIL E., BENSAHEL-PERRIN L., FRANCOIS H., Les stations de sports d'hiver face au développement durable - Etat des lieux et perspectives, L'Harmattan, Paris, 2010, 176p.

    - MIGNOTTE Alexandre, Le tourisme durable à l'échelle des Alpes : quelle place pour les stations de montagne? In Les stations de sports d'hiver face au développement durable. L'Harmattan, Paris, 2010

    - MORAND Charles-Albert, Le droit néo-moderne des politiques publiques, éd. LGDJ, coll. Droit et société, 1999, 224p.

    - PISANI Edgard, Utopie foncière, 1977, Editions du Linteau réédité en 2010, Paris, 240p.

    - RENARD Vincent, Préface. In : ELLOUMI M., JOUVE A.M. (sous la dir. de). Bouleversements fonciers en Méditerranée : des agriculteurs sous le choc de l'urbanisation et des privatisations, Karthala-CIHEAM, Montpellier, 2003, 384p.

    - YOLKA Philippe (sous la dir. de), La Convention Alpine. Un nouveau droit pour la montagne ?, CIPRA-France, Grenoble, 2008, 148p.

    Mémoires, thèses

    - ALLIE Louis, La gestion de l'espace dans des Parcs naturels régionaux sous pressions touristique et urbaine ou comment les acteurs bricolent du développement et de la préservation dans les massifs de Chartreuse et du Vercors? Thèse de géographie, Université de Montréal, 2005, 450 p.

    - BLANC Camille, La Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Enjeux de territoires et conflits identitaires portés par les stations de sports d'hiver, Mémoire Master 1, Institut d'Urbanisme de Paris, juin 2010, 64p.

    - DEVOUASSOUX Anne-Sophie, Chamonix mène-t-il une politique exemplaire en matière de logement? Mémoire Master 2 géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble, 2006

    - DUVILLARD Sylvie, De l'appropriation foncière à la « ville-territoire » : les processus de territorialisation par la propriété foncière dans deux petites villes des Montagnes Méditerranéennes (Nyons et Aubenas), thèse de géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2001, 314p.

    - ESPOSITO-FAVA Aurélien, Economisons le foncier agricole ! Conflits d'acteurs et de référentiels dans la gestion territoriale du foncier agricole, Mémoire de Master 2 Sciences du Territoire, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2006

    - LAPOSTOLLE Dany, L'ingénierie territoriale vue des pays : une bureaucratie professionnelle territoriale en gestation, thèse de sciences politiques, Institut d'Etudes Politiques de Lyon, Université Lumière Lyon 2, 2010 [en ligne]. Disponible sur : http://theses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/2010/lapostolle_d/info (consulté le 17/08/10)

    - MERIAUDEAU Robert, A qui la terre ? La propriété foncière en Savoie et Haute Savoie, Thèse de Géographie, Institut de géographie alpine de Grenoble, 1986, 480p.

    - MORDARET Sylvie, Pratiques et stratégies foncières des agriculteurs : un outil d'analyse pour l'aménagement des zones fragiles, Thèse CEMAGREF, Montpellier, 1994

    - MOULY Marielle, Les relations ville-campagne, Stratégies de développement urbain-rural en Rhône-Alpes, Mémoire de Master 2 Sciences des Sociétés et de leur environnement, Université Lumière, Lyon 2, 2008

    - TCHEKEMIAN Anthony, L'impact d'une politique publique agricole européenne sur les acteurs et les territoires ruraux français, thèse de géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2008, 505p.

    - WYON Thibaud, Eléments d'analyse, d'évaluation et de repositionnement des dispositifs fonciers de la région Rhône-Alpes, Mémoire de DRT Développement Territorial, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2008

    Articles

    - ADABEL, Une coopérative laitière en projet sur Belledonne, 19/04/10 [en ligne]. Disponible sur : http://www.sillon38.com/blog/2010/04/19/une-cooperative-laitiere-en-projet-sur-belledonne/ (consulté le 09/06/10)

    - ADABEL, PEZMA, un programme en voie d'abandon, 29/03/10 [en ligne]. Disponible sur : http://www.sillon38.com/blog/2010/03/29/pezma-un-programme-en-voie-d%E2%80%99abandon/ (consulté le 09/06/10)

    - ANEM, Pour la Montagne, n°126-127, mars-avril 2003, 23p.

    - BAREL Yves, Modernité, code, territoire, Annales de la recherche urbaine, n°10-11, printemps 1981, Paris, pp.3-21

    - BARRIERE Olivier, Une gouvernance environnementale dans une perspective patrimoniale : approche d'une écologie foncière, Site Foncier-développement [en ligne], consulté le 31/05/10, 26p. Disponible sur : http://www.foncier-developpement.org/analyses-et-debats/decentralisation-et-gestion-fonciere/une-gouvernance-environnementale-dans-une-perspective-patrimoniale-approche-d2019ecologie-fonciere/view

    - BERSANI Catherine, La DTA ou le retour de l'Etat gendarme, Etudes Foncières, juin 1999, n°83. Disponible sur : http://www.adef.org/site/1999/06/01/les-dta-ou-le-retour-de-letat-gendarme/#more-203 (consulté le 20/10/10)

    - BERTHIER I., Massif du Vercors, une contrainte librement ressentie, Diagonal, n°181, juin 2010

    - BESANCENOT François, Le territoire : un espace à identifier, Grain de géo [en ligne], ENS Lyon, 2006. Disponible sur : http://grain-de-geo.ens-lyon.fr/article.php3?id_article=165 (consulté le 20/07/10)

    - CAZAJOUS Romain, Maîtriser le sol pour maîtriser son territoire, Territoires [en ligne]. Septembre 2007, n°480. Disponible sur : http://www.adels.org/territoires/480.htm#aun (consulté le 05/06/10)

    - Chamonix, Plus d'efficacité avec la nouvelle Communauté de Communes de la Vallée de Chamonix-Mont-Blanc, Chamonix Bulletin municipal n° 3, décembre 2009

    - Chamonix, Une nouvelle étape pour la vallée de Chamonix Mont-Blanc, Chamonix Bulletin municipal n°4, mai 2010

    - Clicanoo.com, Chaque seconde, 24 m² de terres disparaissent, Clicanoo - le journal de l'île de la Réunion, article publié le 20/06/10 [En ligne]. Disponible sur : http://www.clicanoo.re/11-actualites/Agriculture/249092-chaque-seconde-24-m2-de-terres.html (consulté le 23/06/10)

    - COMBY Joseph, De la volatilité foncière, Etudes Foncières, janvier-février 2009, n°137, pp.6-8

    - COMBY Joseph, Superposition des droits sur le sol, Les mille-feuilles du foncier, Etudes Foncières, janvier-février 2010, n°143, pp.21-29

    - DUPONT Josselin, La Maîtrise du foncier comme outil de gestion intégré des territoires bretons, ESO-Rennes, 16/09/08, [en ligne]. Disponible sur : http://eso.cnrs.fr/spip.php?article406 (consulté le 19/05/10)

    - DUJOLS Dominique, Le territoire français est le patrimoine commun de la Nation, Etudes Foncières, juillet-août 2010, n°146, pp.24-26

    - DUVILARD Sylvie, « Préface », Revue de géographie alpine [En ligne], 98-2 | 2010, mis en ligne le 10/09/10. Disponible sur : http://rga.revues.org/index1181.html (consulté le 27/10/10)

    - DUVILLARD S., Ségrégation en zone rurale - Le cas des Baronnies. Etudes Foncières, 2005, n°113, pp. 28-32

    - DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., Les territoires touristiques de montagne bousculés par la pression foncière : le poids des politiques publiques dans les trajectoires territoriales, 6è Rencontres de Mâcon "Tourismes et territoires", pré-actes, 13-14-15 septembre 2007, 8p.

    - France Nature Environnement, Grenelle II voté : que l'esprit du Grenelle continue !, communiqué de presse [en ligne], 11/05/10. Disponible sur : http://fne.asso.fr/fr/grenelle-ii-vote--que-lesprit-du-grenelle-continue-.html?cmp_id=33&news_id=1657&vID=49 (consulté le 12/05/10)

    - GILLI Frédéric, Durabilité l'atout foncier, édito Etudes Foncières, n°142, novembre-décembre 2009

    - HERRERA Catherine, A la recherche de la ressource foncière territoriale sur les territoires de montagne, Revue de géographie alpine [En ligne], 98-2 - 2010, mis en ligne le 10/09/10, Disponible sur : http://rga.revues.org/index1185.html (consulté le 27/10/10)

    - JANIN Bernard, La terre savoyarde - Compte-rendu critique, In Revue de géographie alpine, Vol. 75, n°1, 1987, pp. 96-97

    - JARRIGE F., JOUVE A-M., NAPOLEONE C., Et si le capitalisme foncier changeait nos paysages quotidiens ?, In Le Courrier de l'environnement, n°49, juin 2003, Disponible sur : http://www.inra.fr/dpenv/jarric49.htm (consulté le 24/08/10)

    - JAUNEAU Jean-Claude, CHEDIN Sylvie, Le Vercors en friche ? et alors ?. Revue de géographie alpine, 1990, fascicule 4

    - La Gazette.fr, Le gouvernement veut lutter contre le gaspillage des terres agricoles, [en ligne], publié le 11/01/10.Disponible sur : http://infos.lagazettedescommunes.com/27581/le-gouvernement-veut-lutter-contre-le-gaspillage-des-terres-agricoles/ (consulté le 22/03/10)

    - LASLAZ Lionel, « Préface », Revue de géographie alpine, Parcs nationaux de montagne et construction territoriale des processus participatifs [En ligne], mars 2010. Disponible sur : http://rga.revues.org/index1088.html (consulté le 06/06/10).

    - LAURENT Bernard, Morbihan (56) Disparition du foncier agricole / Tout n'est pas lié à l'urbanisme, Paysan Breton Hebdo, semaine du 11 au 17 Juin 2010 [en ligne]. Disponible sur : http://www.paysan-breton.fr/article/10799/disparition-du-foncier-agricole--tout-n%92est-pas-lie-a-l%92urbanisme.html (consulté le 14/06/10)

    - LE MEUR Pierre-Yves, Approche qualitative de la question foncière, Note méthodologique, IRD REFO, Document de travail de l'unité de recherche 095. Mai 2002, n°4, 23p.

    - LE ROY Etienne, L'apport des chercheurs du LAJP à la gestion patrimoniale, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, 03/03/2007 [En ligne]. Disponible sur : http://www.foncier-developpement.org/analyses-et-debats/debats-conceptuels/l2019apport-des-chercheurs-du-lajp-a-la-gestion-patrimoniale/view (consulté le 31/05/10)

    - LEVESQUE Robert, Pour une politique foncière durable - La terre, une ressource naturelle à respecter au même titre que l'eau et l'air, Chambres d'agriculture n°963, mai 2007 (article daté de mars 2007) pp.35-42

    - Localtis.info, Artificialisation des sols - Terres agricoles : 320 terrains de football disparaissent chaque jour, article publié le 21/07/10 [en ligne]. Consulté le 09/08/10

    - MANESSE Jacques, Montagne : qui décide ?, Etudes foncières, mars 1988, n°38, pp.8-16

    - MARLY Jean et BONNEFOY Serge, Urbaniser le périurbain, Etudes Foncières, mars-avril 2010, n°144

    - MERIAUDEAU Robert, La spécificité foncière de la montagne française. In Revue de géographie alpine, Tome 77, N°1-3, 1989, pp. 203-210 [en ligne]. Disponible sur (consulté le 27/07/10) : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_1989_num_77_1_2741

    - NAYROU Henri, Le Grenelle des idées, oui, des leçons, non ! (Edito), Pour la montagne, juillet-août 2010, n°207

    - PERINET-MARQUET Hugues. In La Semaine Juridique, édition notariale et immobilière, n°21, 28 mai 2010, pp.18-19. Article disponible sur : http://anil.bibli.fr/opac//doc_num.php?explnum_id=5604 (consulté le 13/07/10)

    - RADISON RAKOTOARISOA Célestin, RAMANANARIVO Romaine et Sylvain, Stratégie pour un développement durable par le foncier à Madagascar, TALOHA (revue scientifique internationale des civilisations), n°19, 30/01/10 [En ligne]. Disponible sur : http://www.taloha.info/document.php?id=845 (consulté le 04/09/10)

    - RENARD Vincent, Aménagement de la montagne et économie foncière - De la fuite en avant à la réversibilité et au développement durable, In Revue française de droit administratif, n° 3, mai-juin 2005, pp. 502-506

    - RENARD Vincent, Aménagement de la montagne et économie foncière [en ligne]. Disponible sur : http://vincentrenard.eu/index.php?option=com_content&task=view&id=5&Itemid=10 (consulté le 22/06/10)

    - SAUVEZ Marc, Accompagner les mutations urbaines vers une autre planification, Etudes Foncières, n°146, juillet-août 2010, pp.11-13

    - SGARD Anne, Une « éthique du paysage » est-elle souhaitable ?, VertigO, vol.10, n°1, avril 2010, [En ligne], mis en ligne le 07/04/10. Disponible sur : http://vertigo.revues.org/9472 (consulté le 25/07/10)

    - TRAPITZINE Richard, Les non-dits du Grenelle, Entre oubli du foncier, nouvelle conception de l'action publique, retour de l'Etat et primat de l'environnement, Etudes Foncières, janvier-février 2010, n°143

    - ZAPALSKI Emilie, Rural-urbain : le nombre de conflits en nette augmentation, Localtis.info [en ligne], article publié le 04/05/09 

    Autres documents

    - ADABEL, Contribution de l'ADABEL au SCOT de la Région grenobloise, octobre 2009, 4p.

    - ADABEL, Entre urbanisation et agriculture, juin 2005, 4p.

    - ADABEL, Unités d'Habitations Nouvelles, Conseil d'Administration du 03/03/08

    - AGRESTE Primeur, L'artificialisation atteint 9% du territoire en 2009, n°246, juillet 2010, 4p.

    - Atout France, Tourisme, urbanisme et aménagement sur le littoral et en montagne, guide de savoir-faire, n°31, août 2009, 136p.

    - BEDARD Mario, Vade-Mecum méthodologique, Méthodologie et méthodes de sa recherche en géographie, UQAM, 2009

    - CAUE Haute-Savoie, Chantier maîtrise quantitative et qualitative de la métropolisation - synthèse des débats 2006-2007, juin 2008, 27p.

    - CCMV, Charte de développement, document de référence, mai 2007, 57p

    - CCMV, Charte de développement, Plan d'actions, mai 2007, 45p.

    - CIPRA France, Le foncier en vallée alpine, Document de cadrage en vue d'un projet CIPRA-Région Rhône-Alpes, Octobre 2009

    - CIPRA France, Econnect - Limites et potentiels juridiques à la mise en oeuvre de corridors écologiques dans les Alpes, Econnect WP6, séminaire du 06/05/10, Grenoble, synthèse des interventions

    - Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) - Autorité Environnementale, Avis délibéré de l'Autorité environnementale concernant la Directive territoriale d'aménagement « Alpes du Nord », n° 2010 - 02, 14/O1/10, 13p.

    - Conseil régional Rhône-Alpes, schémas de cohérence territoriale : enjeux d'équilibre en Rhône-Alpes, septembre 2007, 48 pages.

    - DAVID-CAVAZ Bernard, Paroles..., Brochure du CAUE de l'Isère, page sur le Trièves, le pays des âmes fortes - Paroles de maires, s.l.n.d.

    - Direction régionale de l'Equipement, Projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord, 15 Juin 2009

    - DTA Alpes du Nord, Juillet 2010

    - Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Rapport Final de la Commission d'enquête publique, 09/07/10, 111p., p.11

    - Etablissement public du SCOT, Document support au débat des territoires, Premiers éléments de diagnostic, Document de travail, novembre 2009, Grenoble

    - GIS Alpes du Nord, Agriculture et urbanisation dans les Alpes du Nord, sept.2004, 4p.

    - MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? Réponse à l'appel d'offre "Hausse du foncier et de l'immobilier, quels enjeux autour du tourisme ? ", Cemagref Grenoble/PACTE-Territoires, s.l.n.d, 71p. Disponible en ligne (consulté le 29/03/10) : http://www.tourisme.gouv.fr/stat_etudes/etudes/territoires/zone_montagne.pdf

    - Mission départementale d'observation de l'habitat, La question foncière, Lettre de la mission, septembre 2007 [en ligne]. Disponible sur : http://adil.dromenet.org/obs/lettres_adil/Mission_obs_6.pdf (consulté le 24/05/10)

    - Moutain Riders, L'Eco guide des stations. Disponible sur : http://www.mountain-riders.org/_EcoGuideStations/ (consulté le 02/09/10)

    - Parc Naturel Régional de Chartreuse, Guide à destination des élus locaux : réaliser un Plan Local d'urbanisme dans le Parc de Chartreuse, 2009

    - PNRV, 2008-2020, la charte du parc du Vercors, approuvée le 22/09/07 par le comité syndical, 96p.

    - PNRV, Bilan d'activité 2009, mars 2010, 123p.

    - Préfecture de région Rhône-Alpes, DTA Alpes du Nord, Présentation de la démarche, 17/07/98, Lyon, 6p.

    -Préfecture de région Rhône-Alpes : Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord - Évaluation Stratégique Environnementale - Rapport Environnemental, Mars 2010, 230p

    - Programme Comédie, Etude de cas La charte de bien vivre en Belledonne, concilier différents usages de l'espace, Forum régional sur la concertation et la médiation environnementales, 28 juin 2006, 14p.

    - Rapport final de la Commission d'enquête publique, 09/07/10, 111p., Conclusions motivées de la Commission d'enquête publique, 09/07/10, 13p.

    - Région Rhône-Alpes, Compte-rendu des Débats prospectifs: quelles mobilités à l'horizon 2050? s.l.n.d.

    - Région Rhône-Alpes, Rapport n°08.10.490 Politique de la ville et du logement

    - RENARD Vincent, Politiques foncières et développement durable, Formation Sciences Po Paris, 15/06/10 [En ligne]. Disponible sur : http://www.sciences-po.fr/spf/programmes/pdf/IPP11.pdf (consulté le 02/09/10)

    - SUACI Alpes du Nord, Expériences de gestion du foncier (espace agricoles et naturels) en zone de montagne -Projet Foncimalp- , groupe de travail, 22 Avril 2010, St Baldoph

    - UICN, 1985-2005 : 20 ans de loi Montagne - Bilan et propositions, Paris, 2005, 15p.

    Site Internet

    http://www.dta-alpesdunord.fr/quest-ce-quune-dta.html

    http://www.senat.fr

    http://www.vercors.net/

    http://www.le-gresivaudan.fr

    http://www.parcs-naturels-regionaux.fr

    http://www.assemblee-nationale.fr

    http://www.comby-foncier.com/voc/vocabulaire_foncier.htm

    http://www.offices-hlm.org/

    www.observatoire-montagnes.org

    http://www.espacebelledonne.fr

    Conseil Général de Haute-Savoie, définition de « politique foncière » [en ligne]. Disponible sur : http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche7.pdf (Consulté le 13/08/10)

    Conseil Général de la Moselle, définition du principe de l'aménagement foncier [en ligne]. Disponible sur : http://www.cg57.fr/vivrelamoselle/Pages/Environnement/Amenagementfoncier.aspx (consulté le 29/07/10)

    CLD Nord Isère et Val Dauphiné : http://www.rhonealpes21.fr/IMG/pdf/contribution_cld_nordisere_valsdauphine.pdf (consulté le 15/06/10)

    Site dédié à l'expérimentation du dispositif PAEN : http://www.experimentation-paen.fr/index.asp (consulté le 26/10/10)

    Site officiel de la Réforme des collectivités territoriales : http://www.interieur.gouv.fr/sections/reforme-collectivites/pourquoi-reforme (consulté le 11/08/10)

    http://www.cemagref.fr/le-cemagref/lorganisation/les-centres/grenoble/ur-emgr/projets/amen-les-amenites-environnementales-des-espaces-ruraux-valorisation-gestion-et-contribution-au-developpement-durable-des-territoires/

    ANNEXES

    1. Tableau de synthèse des entretiens réalisés

    2. Grille détaillée d'entretien

    3. Conformité, compatibilité des documents d'urbanisme : éclairage

    4. L'enchevêtrement de compétences et d'interventions publiques autour du SCOT

    5. Schéma de l'évolution de l'ambition foncière de la DTA des Alpes du Nord - références

    6. Exemples de Fiches-action de la CCMV dans le cadre de sa Charte de développement

    1. Tableau de synthèse des entretiens réalisés

    2. Grille détaillée d'entretien

    Etude Cipra - Mémoire de recherche IGA

    I. Présentation générale

    1) Pouvez vous me présenter votre structure et son action sur le foncier ?

    2) Qui sont les acteurs de la question foncière, qui sont les décideurs, qui sont les « metteurs en oeuvre » ? Où vous situez-vous ?

    3) Quels sont les enjeux fonciers de votre territoire d'intervention ?

    4) Avec du recul, observe-t-on une évolution des problématiques foncières et de sa gestion sur votre territoire ? Y-a-t-il plus d'acteurs qu'avant, plus de compétences, de connaissances, d'outils, de nouveaux enjeux... ?

    5) Pouvez-vous me donner un exemple emblématique des actions/projets/réflexions que mène votre structure ?

    II. Mettre en oeuvre une politique foncière volontariste, dans les Alpes (en filigrane, la question de la spécificité alpine)

    6) Selon vous, quelles sont les forces et faiblesses de votre territoire pour conduire sa propre politique foncière ?

    7) Aujourd'hui, les collectivités ont-elles les moyens de leurs compétences foncières face aux enjeux auxquels elles sont confrontées?

    8) La collectivité doit-elle chercher des appuis ou des soutiens pour réussir à mettre en oeuvre une politique foncière volontariste ?

    9) Peut-on parler d'une spécificité alpine en matière de gestion foncière?

    10) Faut-il des moyens spécifiques à la montagne pour traiter des questions de foncier? (procédures et outils particuliers, compétences spécifiques renforcées, aides financières...)

    III. Les outils de gestion foncière

    11) Quels sont les outils de maîtrise du foncier que vous utilisez ? Votre avis sur ces outils : trop ou pas assez, peu connus, mal utilisés, pas adaptés aux situations locales...

    12) Par qui les procédures relatives au foncier sont-elles impulsées et décidées? D'où proviennent les cadres dans lesquels agissent les collectivités ?

    13) Dans quelle mesure les territoires participent à l'élaboration des outils et des cadres de l'aménagement du territoire qu'ils sont chargés d'utiliser?

    14) Faites-vous remonter (auprès d'autres échelons territoriaux) vos problématiques de terrain, des blocages que peuvent constituer certaines procédures ou outil de gestion foncière?

    15) Selon vous, qui a le pouvoir de faire évoluer des procédures nationales qui s'avèreraient inadaptées localement? Peut-on agir localement sur les outils et les cadres de planification?

    IV. Deux cadres de planification des Alpes du Nord : la Convention alpine et la DTA Alpes du Nord

    16) Des cadres de planification ou d'aménagement tels que la Convention Alpine et le projet de DTA Alpes du Nord vous semblent-ils « utiles » localement pour mener une politique foncière ?

    17) Peuvent-ils le devenir ?

    18) Y fait-on référence dans les documents d'urbanisme locaux ?

    V. Quelles perspectives de gestion foncières dans les Alpes ?

    19) Où se situent les besoins pour maîtriser le foncier dans les territoires de montagne? (Connaissances, sensibilisation des acteurs, accompagnement/formation des élus et techniciens, gouvernance, intercommunalité...)

    20) Pour conclure, comment définiriez-vous une "gestion raisonnée et durable du foncier" dans les territoires de montagne?

    3. Conformité, compatibilité des documents d'urbanisme : éclairage

    Sur son site internet, le conseil général de Haute-Savoie propose l'accès à un centre de ressources sur les questions foncières ainsi que des fiches techniques sur le foncier et le logement. Ces nombreux outils sont destinés aux collectivités territoriales. Les informations qui suivent en sont tirées.

    Disponible sur : http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche10.pdf (consulté le 13/08/10)

    En matière juridique, la hiérarchie des normes (normes constitutionnelles, traités internationaux, lois, règlements) s'organise sous différents rapports :

    1) Le rapport de conformité :

    Le contenu de la norme inférieure doit être déduit du contenu plus général de la norme supérieure. L'autorité inférieure ne dispose alors que d'une compétence liée et l'on peut bien dire qu'en lui obéissant, on n'obéit qu'à la loi.

    2) Le rapport de compatibilité :

    La norme supérieure se borne à tracer un cadre général, par exemple, en déterminant des objectifs ou en fixant des limites, mais laisse à l'autorité inférieure le choix des moyens et le pouvoir de décider librement, dans les limites prescrites, du contenu de la norme.

    L'autorité administrative peut user d'une marge d'interprétation et d'appréciation dans la mise en oeuvre d'un document prévisionnel, sous réserve que ce document ne l'interdise pas et que son économie générale ne soit pas remise en cause. La compatibilité ne doit révéler aucune contradiction.

    Le rapport de compatibilité est donc moins strict que le rapport de conformité.

    Ci-dessous, un schéma de la hiérarchie des normes en matière d'urbanisme et d'habitat :

    4. L'enchevêtrement de compétences et d'interventions publiques autour du SCOT

    Source : Conseil régional, schémas de cohérence territoriale : enjeux d'équilibre en Rhône-Alpes, septembre 2007, 48 pages.

    5. Schéma de l'évolution de l'ambition foncière de la DTA des Alpes du Nord

    Le schéma présenté s'intéresse à l'évolution récente de « l'ambition foncière » du projet de DTA des Alpes du Nord de Juin 2009 à Juillet 2010. Il s'agissait de voir si les mesures envisagées par la DTA en matière de foncier sont plus ou moins ambitieuses au regard du contenu initial du projet. L'ambition dont il est question est celle énoncée officiellement par l'Etat : « définir une stratégie cohérente et volontaire » et « faire le choix du développement durable pour les Alpes du Nord »

    Il est donc nécessaire de se reporter aux deux versions qui sont comparées :

    Doc 1 : Version de Juin 2009

    Doc 2 : Version de Juillet 2010

    Figure 21bis. Evolution de « l'ambition foncière » de la DTA Alpes du Nord (Juin 2009 - Juillet 2010), N. Moyon 2010

    6. Exemples de Fiches-action de la CCMV dans le cadre de sa Charte de développement

    Dans le cadre du Plan d'action de la Charte de Développement de la Communauté de Communes du Massif du Vercors, 25 fiches-action ont été élaborées, réparties suivant 5 thématiques de l'aménagement et du développement : habitat, tourisme, emploi, paysage, réseaux.

    Les 6 fiches-action suivantes sont quelques exemples les plus en lien avec le sujet abordé ; elles concernent toutes la thématique de l'habitat.

    * 1 PISANI Edgard, Utopie foncière, 1977, Editions du Linteau, réédition 2010, Paris, 240p. Citation pp.9-10

    * 2 Entretien n°16, EPFL 74

    * 3 Rapport n°08.10.490 Politique de la ville et du logement - Région Rhône-Alpes

    * 4 Séminaires, colloques, tables rondes, les évènements autour de la thématique foncière se sont multipliés partout en France, en réponse à une pression foncière de plus en plus ressentie.

    * 5 Le vocabulaire est défini Partie I., chapitre 2, 1. Le foncier, de quoi s'agit-il ?

    * 6 Cf. Partie I, chapitre 2, 3. Comment agir sur le foncier ?

    * 7 La Gazette.fr, Le gouvernement veut lutter contre le gaspillage des terres agricoles, [en ligne], publié le 11/01/10.Disponible sur : http://infos.lagazettedescommunes.com/27581/le-gouvernement-veut-lutter-contre-le-gaspillage-des-terres-agricoles/ (consulté le 22/03/10)

    * 8 PAEN : périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels. Consulter le site dédié à l'expérimentation du dispositif : http://www.experimentation-paen.fr/index.asp (consulté le 26/10/10)

    * 9 CIPRA France est la délégation française de CIPRA international. CIPRA est l'acronyme de Commission internationale pour la protection des Alpes.

    * 10 DUVILARD Sylvie, « Préface », Revue de géographie alpine [En ligne], 98-2 | 2010, mis en ligne le 10/09/10. Disponible sur : http://rga.revues.org/index1181.html (consulté le 27/10/10)

    * 11 Idem

    * 12 Par exemple, la Convention Européenne du Paysage (Florence, 2000) qui était liée à la problématique du développement durable a fait naitre le nouveau concept de "paysage durable". Ce type de situation est relativement problématique car pour les chercheurs, ces nouveaux concepts doivent être définis. La chercheure Anne Sgard pose donc la question: "qu'est-ce qu'un paysage durable?". SGARD Anne, Une « éthique du paysage » est-elle souhaitable ?, VertigO, vol.10, n°1, avril 2010, [En ligne], mis en ligne le 07/04/10. Disponible sur : http://vertigo.revues.org/9472 (consulté le 25/07/10)

    * 13 La Convention alpine a été signée le 7 novembre 1991 à Salzbourg en Autriche par l'Autriche, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Liechtenstein, la Suisse et l'Union Européenne.

    * 14 Site officiel de la DTA des Alpes du Nord : http://www.dta-alpesdunord.fr/

    * 15 SOUBEYRAN Olivier, cours 2010

    * 16 DUVILARD Sylvie, « Préface », Revue de géographie alpine, op. cit.

    * 17 ESPOSITO-FAVA Aurélien, Economisons le foncier agricole ! Conflits d'acteurs et de référentiels dans la gestion territoriale du foncier agricole, Mémoire de Master 2 Sciences du Territoire, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2006, p.6

    * 18 Cf. l'article de BESANCENOT François, Le territoire : un espace à identifier, Grain de géo [en ligne], ENS Lyon, 2006. Disponible sur : http://grain-de-geo.ens-lyon.fr/article.php3?id_article=165 (consulté le 20/07/10). L'article permet de « mettre en lumière les principales acceptations de la notion de territoire » de BAILLY à LUSSAULT en passant par BRUNET, DI MEO, LACOSTE et LEVY. Au sein de ce travail de mémoire, le terme « territoire » doit toutefois être entendu avant tout dans sons sens administratif, juridique et politique.

    * 19 JAUNEAU Jean-Claude, CHEDIN Sylvie, Le Vercors en friche ? et alors ? Revue de géographie alpine, 1990, fascicule 4, p.33, p.41

    * 20 DUVILLARD Sylvie, De l'appropriation foncière à la « ville-territoire » : les processus de territorialisation par la propriété foncière dans deux petites villes des Montagnes Méditerranéennes (Nyons et Aubenas), thèse de géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2001, 314p.

    * 21 DUVILLARD S., Ségrégation en zone rurale - Le cas des Baronnies. Etudes Foncières, 2005, n°113, pp. 28-32

    * 22 L'opposabilité d'un document d'urbanisme induit une compatibilité et une mise en conformité des documents dits de rang inférieur, par exemple, une DTA opposable encadre les SCOT de son périmètre, et eux-mêmes encadrent les PLU. Pour plus de précision, voir l'Annexe n°3.

    * 23 A l'issue de l'avis favorable émis par la commission d'enquête le 9 juillet 2010, le décret de la DTA des Alpes du Nord devrait être validé et signé en Conseil d'Etat d'ici novembre 2010 (calendrier prévisionnel).

    * 24 CIPRA France, Le foncier en vallée alpine, Document de cadrage en vue d'un projet CIPRA-Région Rhône-Alpes, Octobre 2009

    * 25 Cette démarche est inspirée de BEDARD Mario, Vade-Mecum méthodologique, Méthodologie et méthodes de sa recherche en géographie, UQAM, 2009

    * 26 LE MEUR Pierre-Yves, Approche qualitative de la question foncière, Note méthodologique, IRD REFO, Document de travail de l'unité de recherche 095. Mai 2002, n°4, 23p.

    * 27 Idem, p.3

    * 28 Idem, pp.3-4

    * 29 RENARD Vincent, Préface. In : ELLOUMI M., JOUVE A.M. (sous la dir. de). Bouleversements fonciers en Méditerranée : des agriculteurs sous le choc de l'urbanisation et des privatisations, Karthala-CIHEAM, Montpellier, 2003, 384p.

    * 30 MOULY Marielle, Les relations ville-campagne, Stratégies de développement urbain-rural en Rhône-Alpes, Mémoire de Master 2 Sciences des Sociétés et de leur environnement, Université Lumière, Lyon 2, 2008, p.63

    * 31 YOLKA Philippe (sous la dir. de), La Convention Alpine. Un nouveau droit pour la montagne ?, CIPRA France, Grenoble, 2008, 148p.

    * 32 GÖTZ Andreas, Architecture, fonctionnement et dysfonctionnements du système conventionnel, In :idem, p.16

    * 33 De plus, d'autres initiatives émergent, « complémentaires » pour certains, « concurrentes » pour d'autres : le réseau des régions alpines avec l'idée d'une macro-région telle qu'envisagée au niveau communautaire, ou encore le programme communautaire INTERREG "Alpine Space" qui constitue une plate-forme technique qui agit concrètement sur les territoires alpins.

    * 34 La Loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) instaure un nouvel instrument juridique d'aménagement du territoire, les directives territoriales d'aménagement, définies à l'article L 111-1-1 du Code de l'urbanisme.

    * 35 Ministère de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration, Ministère de l'environnement, et Ministère de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.

    * 36 Une photocopie de ce courrier daté du 23/07/1996 a été retrouvée dans les archives de CIPRA France.

    * 37 Comme cela sera détaillé dans la Partie II du mémoire, le caractère opposable de la DTA des Alpes du Nord n'a pas résisté aux amendements du projet de loi Grenelle II ; celle-ci a été promulguée le 13 juillet 2010.

    * 38 DTA Alpes du Nord, Chiffres clés en 2006, Juillet 2010, p.8

    * 39 L'intérêt du travail de terrain est développé au chapitre concernant les entretiens.

    * 40 DEVOUASSOUX Anne-Sophie, Chamonix mène-t-il une politique exemplaire en matière de logement? Mémoire Master 2 géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble, 2006

    * 41 Le Schéma de Cohérence Territorial de la Région Urbaine Grenobloise (RUG) devrait être adopté courant 2011.

    * 42 ALLIE Louis, La gestion de l'espace dans des Parcs naturels régionaux sous pressions touristique et urbaine ou comment les acteurs bricolent du développement et de la préservation dans les massifs de Chartreuse et du Vercors? Thèse de géographie, Université de Montréal, 2005, 450 p.

    * 43 L'ensemble des protocoles de la Convention Alpine a été ratifié par la France.

    * 44 Les deux dernières versions - à ce jour - du projet de DTA Alpes du Nord ont été décortiquées et comparées l'une à l'autre : il s'agit du projet présenté par la Direction régionale de l'équipement Rhône-Alpes en juin 2009, et de la version de novembre 2009 soumise à consultation des personnes publiques associées puis à enquête publique.

    * 45 Pour illustrer cette démarche : CIPRA, Nous les Alpes ! Des femmes et des hommes façonnent l'avenir, 3ième rapport sur l'état des Alpes, Schaan, Liechtenstein, Editions Yves Michel, Gap, 2007, 301p.

    * 46 Voir annexe Tableau de synthèse des entretiens.

    * 47 « L'outil de l'action publique n'est pas important en soi pour mener une politique foncière mais il est intéressant car il révèle des discours. C'est plutôt la démarche mise en oeuvre localement, adaptée aux propres objectifs définis par chaque territoire, qui détermine l'efficience d'une politique foncière volontariste dans les Alpes du Nord ».

    * 48 Voir en annexe la grille d'entretien détaillée

    * 49 CIPRA France, Le foncier en vallée alpine, op.cit.

    * 50 Projet d'une durée de deux ans (septembre 2009 - septembre 2011) avec un financement FNADT et Région Rhône-Alpes.

    * 51 Les éléments concernant le projet Foncimalp (schéma compris) sont issus de : SUACI Alpes du Nord, Expériences de gestion du foncier (espace agricoles et naturels) en zone de montagne -Projet Foncimalp- , groupe de travail, 22 Avril 2010, St Baldoph

    * 52 IngéTerr : concepts, cadres et pratiques de l'ingénierie territoriale, s.l.n.d. [En ligne] https://psdr-auvergne.cemagref.fr/documents/seminaire-nov-2009/4p_ingeterr09.pdf (consulté le 26/07/2010)

    * 53 Entretien avec Nathalie Bertrand (Cemagref Grenoble), Nicolas Gourdin (stagiaire du projet AMEN, qui travaille à l'analyse, dans le contexte de la charte du PNR des Bauges soumis à pression urbaine, des modalités de l'action foncière dans les espaces naturels et agricoles) et Alexandre Mignotte pour la CIPRA, le 12/07/10.

    * 54 Descriptif du projet AMEN [en ligne] : http://www.cemagref.fr/le-cemagref/lorganisation/les-centres/grenoble/ur-emgr/projets/amen-les-amenites-environnementales-des-espaces-ruraux-valorisation-gestion-et-contribution-au-developpement-durable-des-territoires/ (consulté le 26/07/10)

    * 55 Sur les liens « paysage et foncier », se référer aux travaux de recherche d'Anne SGARD et Sylvie DUVILLARD.

    * 56 Tel qu'il est formulé, cet effet PNR espéré et attendu repose surtout sur le fait que la labellisation corresponde à l'attribution de moyens financiers et donc humains supplémentaires pour coordonner et mettre en oeuvre la Charte du Parc. Entretien n°8, Espace Belledonne.

    * 57 WYON Thibaud, Eléments d'analyse, d'évaluation et de repositionnement des dispositifs fonciers de la région Rhône-Alpes, Mémoire de DRT, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2008, p.12

    * 58 COMBY Joseph, De la volatilité foncière, Etudes Foncières, janvier-février 2009, n°137, pp.6-8, p.6

    * 59 LANGLAIS Alexandra, Programme DIVA-corridors, action 10 « continuités écologiques et politiques publiques » : Quelles procédures juridiques de conception et de mise en oeuvre de corridors pour dégager de nouvelles pistes d'actions ?, In Econnect - WP6 / séminaire du 06-05-2010 / Grenoble

    * 60 BARRIERE Olivier, Une gouvernance environnementale dans une perspective patrimoniale : approche d'une écologie foncière, Portail foncier et développement [en ligne], 2005, 26p. Disponible sur : http://www.foncier-developpement.org/analyses-et-debats/decentralisation-et-gestion-fonciere/une-gouvernance-environnementale-dans-une-perspective-patrimoniale-approche-d2019ecologie-fonciere/view (consulté le

    31/05/10)

    * 61 Idem, pp.4-5

    * 62 DRIARD J-H, Droit de l'urbanisme et Droit de propriété, 1997, In WYON Thibaud, op.cit., p.18

    * 63 BERNARD Alain, 2002, In BARRIERE Olivier, op.cit.

    * 64 DUJOLS Dominique, Le territoire français est le patrimoine commun de la Nation, Etudes Foncières, juillet-août 2010, n°146, pp. 24-26

    * 65 COMBY Joseph, op.cit.

    * 66 Code de l'urbanisme, Partie législative, Article L 110 [en ligne]. Disponible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=D87142082162DDB996C5B0F503F8DA6F.tpdjo10v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006143277&cidTexte=LEGITEXT000006074075&dateTexte=20100907 (consulté le 18/07/10)

    * 67 DUJOLS Dominique, op.cit., p.24

    * 68 Entretien n°3, CIPRA

    * 69 COMBY Joseph, Superposition des droits sur le sol, Les mille-feuilles du foncier, Etudes Foncières, janvier-février 2010, n°143, pp.21-29

    * 70 TWAIN Mark (1835-1910), In WYON Thibaud, op.cit., p.11

    * 71 COMBY Joseph, De la volatilité foncière, op. cit., p.6

    * 72 COMBY Joseph, Vocabulaire foncier [en ligne]. Disponible sur :

    http://www.comby-foncier.com/voc/vocabulaire_foncier.htm (consulté le 03/08/10)

    * 73 ESPOSITO-FAVA Aurélien, op.cit., p.86

    * 74 BOUTINET Jean-Pierre, Anthropologie du projet, PUF, Paris, 1992, 307 p., p.67

    * 75 DUJOLS Dominique, op. cit., pp.25-26

    * 76 Le Conseil Générale de Haute-Savoie dispose d'un centre de ressources sur les questions foncières ainsi que plusieurs fiches techniques. Toutes ces données sont disponibles sur : http://www.cg74.fr/pages/fr/menu1/les-actions/amenagement-du-territoire/questions-foncieres-256.html (consulté le 16/06/10)

    * 77 Conseil Général de Haute-Savoie, définition de « politique foncière » [en ligne]. Disponible sur : http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche7.pdf (Consulté le 16/06/10)

    * 78 HERRERA Catherine, A la recherche de la ressource foncière territoriale sur les territoires de montagne, Revue de géographie alpine [En ligne], 98-2 | 2010, mis en ligne le 10/09/10. Disponible sur : http://rga.revues.org/index1185.html (consulté le 27/10/10)

    * 79 CAZAJOUS Romain, Maîtriser le sol pour maîtriser son territoire, Territoires [en ligne]. Septembre 2007, n°480. Disponible sur : http://www.adels.org/territoires/480.htm#aun (consulté le 05/06/10)

    * 80 MORDARET Sylvie, Pratiques et stratégies foncières des agriculteurs : un outil d'analyse pour l'aménagement des zones fragiles, Thèse CEMAGREF, Montpellier, 1994, p.42

    * 81 TRAPITZINE Richard, Les non-dits du Grenelle, Entre oubli du foncier, nouvelle conception de l'action publique, retour de l'Etat et primat de l'environnement, Etudes Foncières, janvier-février 2010, n°143, p.9

    * 82 SEM : Société d'Economie Mixte

    * 83 Conseil Général de la Moselle, définition du principe de l'aménagement foncier [en ligne]. Disponible sur : http://www.cg57.fr/vivrelamoselle/Pages/Environnement/Amenagementfoncier.aspx (consulté le 29/07/10)

    * 84 FACIM, La montagne, univers de tous les possibles ?, Actes de la conférence-débat CIMES 2007, Albertville. Intervention de Jean Picchioni pp :200-201, Présentation de l'opération menée à Cervens (74) par Jean-Claude Reynaud pp :145-158

    * 85 Idem, présentation de l'opération menée à Cervens (74) par Jean-Claude Reynaud pp :145-158

    * 86 Région Rhône-Alpes, disponible sur : http://www.rhonealpes21.fr/IMG/pdf/contribution_cld_nordisere_valsdauphine.pdf (consulté le 15/06/10)

    * 87 Pour plus de détail, consulté la fiche n°21 sur la création des valeurs foncières réalisée par le CG74. Disponible sur : http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche21.pdf (consulté le 13/08/10)

    * 88 Probablement en raison de la « casquette » CIPRA, mes interlocuteurs se sont plutôt attardés sur les problèmes posés par l'artificialisation des terres agricoles, ou encore l'enfrichement.

    * 89 LE MEUR Pierre-Yves, op.cit.

    * 90 Idem, p.4

    * 91 Cette liste est indicative et donc non-exhaustive, elle est donnée à titre d'exemple.

    * 92 DTA : Directive territorial d'aménagement, devenue DTADD, et PIG, Projet d'intérêt général.

    * 93 MOULY Marielle, op. cit., p.137

    * 94 Site officiel de la Réforme des collectivités territoriales : http://www.interieur.gouv.fr/sections/reforme-collectivites/pourquoi-reforme (consulté le 11/08/10)

    * 95 Entretien n° 17, ADAYG

    * 96 MARLY Jean et BONNEFOY Serge, Urbaniser le périurbain, Etudes Foncières, mars-avril 2010, n°144, p.36

    * 97 ZAPALSKI Emilie, Rural-urbain : le nombre de conflits en nette augmentation, Localtis.info [en ligne], article publié le 04/05/09 

    * 98 TCHEKEMIAN Anthony, L'impact d'une politique publique agricole européenne sur les acteurs et les territoires ruraux français, thèse de géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2008, 505p., p.290

    * 99 MOULY Marielle, op. cit., p.79

    * 100 LASLAZ Lionel, « Préface », Revue de géographie alpine, Parcs nationaux de montagne et construction territoriale des processus participatifs [En ligne], mars 2010. Disponible sur : http://rga.revues.org/index1088.html (consulté le 06/06/10).

    * 101 BLANC Camille, La Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Enjeux de territoires et conflits identitaires portés par les stations de sports d'hiver, Mémoire Master 1, Institut d'Urbanisme de Paris, juin 2010, 64p.

    * 102 PISANI Edgard, Utopie Foncière, op. cit., pp.214-215

    * 103 MANESSE Jacques, Montagne : qui décide ?, Etudes foncières, n°38, mars 1988, pp.8-16

    * 104 TRAPITZINE Richard, op.cit.

    * 105 Réunion du groupe de travail Foncimalp, 22/04/10

    * 106 Dossier : Le monde de l'après-Grenelle, Pour la montagne, n°207, juillet-août 2010, paris, pp.7-10

    * 107 Président de la communauté d'agglomération de Chambéry métropole, Thierry Repentin est également sénateur et chef de file de l'opposition socialiste au Conseil Général de la Savoie. Tribune In Pour la montagne, op. cit.

    * 108 DUJOLS Dominique, op.cit.

    * 109 ALLIE Louis, op. cit., p.54

    * 110 CAZAJOUS Romain, Le sol pour maîtriser son territoire, Revue Territoires, n°480, septembre 2007, [En ligne]. Disponible sur : http://www.adels.org/territoires/480.htm#aun (consulté le 05/08/10)

    * 111 WYON Thibaud, op. cit.

    * 112 A l'échelle du SCOT, l'enchevêtrement de compétences et des interventions publiques nécessite cet effort de coordination. Le schéma en Annexe l'illustre parfaitement bien.

    * 113 WYON Thibaud, op. cit., p.29

    * 114 Entretien n°6, CAUE 74

    * 115 WYON Thibaud, op. cit., pp.81-82

    * 116 Voir également le rapport du Sénat [en ligne]. Disponible sur : http://www.senat.fr/rap/r97-415/r97-41540.html (consulté le 12/06/10)

    * 117 Mission départementale d'observation de l'habitat, La question foncière, Lettre de la mission, septembre 2007 [en ligne]. Disponible sur : http://adil.dromenet.org/obs/lettres_adil/Mission_obs_6.pdf (consulté le 24/05/10)

    * 118 Idem

    * 119 YOLKA Philippe (sous la dir. de), La Convention Alpine. Un nouveau droit pour la montagne ?, op.cit.

    * 120 Idem, p.5

    * 121 La CIPRA France a été fortement sollicitée durant cette période pour « épauler » la présidence française de la Convention alpine. Toutefois, les moyens humains et financiers mobilisés par le ministère n'auraient pas été à la hauteur, et en mars 2009, la présidence française était plutôt ravie de « passer le bâton » à la présidence slovène selon certains.

    * 122 YOLKA Philippe, op. cit., p.6

    * 123 Site officiel de la DTA des Alpes du Nord. Disponible sur : http://www.dta-alpesdunord.fr/quest-ce-quune-dta.html (consulté le 13/08/10)

    * 124 Sur les 103 pages de la version finale de la DTA des Alpes du Nord de juillet 2010, la Convention alpine est citée douze fois : dans la description du contexte mais également dans les objectifs et les orientations prescriptives du document.

    * 125 Le Livre Blanc a été approuvé par le Comité Interministériel d'Aménagement et de Compétitivité des Territoires (CIACT) du 6 mars 2006 : « le CIACT a approuvé le Livre Blanc des Alpes du Nord qui constitue la référence stratégique de l'Etat pour la définition et la mise en oeuvre de ses politiques sur ce territoire et a demandé au préfet de la région Rhône-Alpes de poursuivre l'élaboration de la DTA des Alpes du Nord sur un nombre limité d'objectifs ». Source : DTA Alpes du Nord, Juillet 2010, p.6

    * 126 Disponible sur le site officiel de la DTA des Alpes du Nord : http://www.dta-alpesdunord.fr/diagnostic.29.html (consulté le 13/08/10)

    * 127 DTA Alpes du Nord, « Des politiques foncières pour mieux maîtriser le développement, gérer l'espace et réguler les tensions », Juillet 2010, p.103

    * 128 Se reporter à la notice explicative du schéma pour les références et autres détails, en Annexe.

    * 129 Compte-rendu du GTGC du 26-02-09 (rédigé le 18/03/09) [en ligne], p.4. Disponible sur : http://www.dta-alpesdunord.fr/la-concertation.html (consulté le 24/03/10)

    * 130 DTA des Alpes du Nord : hors introduction et diagnostic du chapitre 1, de la version finale de juillet 2010.

    * 131 Direction régionale de l'Equipement, Projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord, 15 Juin 2009, p.38

    * 132 CIADT : Comité Interministériel d'Aménagement et de Développement du Territoire

    * 133 Direction régionale de l'équipement en Rhône-Alpes, Livre Blanc et DTA Alpes du Nord [en ligne]. Disponible sur : http://www.rhone-alpes.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=90&var_recherche=alpes+nord (consulté le 16/08/10)

    * 134 CIACT : Comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires. Le CIACT du 6 mars 2006 [en ligne]. Disponible sur : http://www.rhone-alpes.equipement.gouv.fr/IMG/pdf/CIACT_6_mars_2006-Alpes-du-Nord_cle656b81.pdf (consulté le 16/08/10)

    * 135 Edater, Evaluation Stratégique Environnementale de la DTA Alpes du Nord - Rapport environnemental, 05/10/ 2009, 203p., p.5

    * 136 Idem, p.14. « Les principaux obstacles étant d'une part d'obtenir des données actualisées et, d'autre part, de les avoir à l'échelle du territoire de la DTA ».

    * 137 Calendrier officiel [en ligne]. Disponible sur : http://www.dta-alpesdunord.fr/Calendrier.html (consulté le 16/08/10)

    * 138 Le rapport environnemental rendu par Edater le 5 octobre 2009 (203p.) est ensuite repris comme document officiel par la préfecture de région Rhône-Alpes : Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord - Évaluation Stratégique Environnementale - Rapport Environnemental, Mars 2010, 230p.

    * 139 Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) - Autorité Environnementale, Avis délibéré de l'Autorité environnementale concernant la Directive territoriale d'aménagement « Alpes du Nord », n° 2010 - 02, 14/O1/10, 13p.

    * 140 Rapport final de la Commission d'enquête publique, 09/07/10, 111p., Conclusions motivées de la Commission d'enquête publique, 09/07/10, 13p.

    * 141 SGAR : Secrétariat Général pour les Affaires Régionales. Il assiste le préfet de région dans ses fonctions et constitue à ce titre la Préfecture de Région. Disponible sur : http://www.rhone.gouv.fr/web/127-le-secretariat-general-pour-les-affaires-regionales.php (consulté le 16/08/10)

    * 142 Pour plus de détails, se référer au site officiel du Sénat : http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl08-155.html

    * 143 Version en vigueur au 14 juillet 2010, Titre 1er, Chapitre 2, article 13 (ex-article 5 du projet de Loi)

    * 144 Projet de Loi Grenelle II, article 5 : « Sur proposition de MM Thierry Repentin, Daniel Raoul et des membres du groupe socialiste, rattachés et apparentés, votre commission a introduit dans le texte une disposition visant à permettre aux parties prenantes dans les DTA actuellement en cours, mais pour lesquelles les négociations ont pris du retard, de poursuivre l'élaboration dans le cadre des procédures existantes, de sorte que ces territoires ne soient pas pénalisés, et que les études n'aient pas été réalisées en pure perte », [en ligne]. Disponible sur : http://www.senat.fr/rap/l08-552-1/l08-552-127.html (consulté le 20/05/10)

    * 145 Michel Bouvard, député UMP de la 3ième circonscription de Savoie, vice-président du Conseil Général de Savoie, vice-président de la Commission des Finances de l'Assemblée Nationale et président de l'Association Européenne des élus de la Montagne (AEM).

    * 146 Extrait du compte-rendu des débats sur l'article 5 (actuel article 13) du projet de Loi Grenelle II, à propos du maintien du caractère opposable de la DTA des Alpes du Nord en cours d'élaboration, amendement n°457 proposé par Yves Cochet.

    * 147 Tous les comptes-rendus des débats à l'Assemblée Nationale sont disponibles en ligne, dont celui de la 2ème séance du Mercredi 5 mai 2010 : http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2009-2010/20100179.asp#ANCR201000000184-00404 (consulté le 20/05/10)

    * 148 Les conclusions de la commission mixte paritaire ont été examinées à l'Assemblée le 28 juin et le 29 au Sénat. Un tableau comparatif des modifications apportées est disponible en ligne : http://www.senat.fr/rap/l09-567/l09-5670.html#toc0 (consulté le 17/08/10)

    * 149 Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Rapport Final de la Commission d'enquête publique, op.cit.

    * 150 Rencontre avec Pierre-Yves FAFOURNOUX, Président de la Commission d'enquête publique de la DTA des Alpes du Nord, permanence du commissaire enquêteur à Crolles, le 21/05/10, en présence de Vincent Neirinck pour Mountain Wilderness France.

    * 151 Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Rapport Final de la Commission d'enquête publique, op. cit.

    * 152 Idem, p.43

    * 153 France Nature Environnement, Grenelle II voté : que l'esprit du Grenelle continue !, communiqué de presse [en ligne], 11/05/10. Disponible sur : http://fne.asso.fr/fr/grenelle-ii-vote--que-lesprit-du-grenelle-continue-.html?cmp_id=33&news_id=1657&vID=49 (consulté le 12/05/10)

    * 154 MIGNOTTE Alexandre, Le tourisme durable à l'échelle des Alpes : quelle place pour les stations de montagne? In Les stations de sports d'hiver face au développement durable. L'Harmattan, Paris, 2010, p.101

    * 155 ANMSM : Association nationale des maires des stations de montagne

    * 156 BLANC Camille, La Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Enjeux de territoires et conflits identitaires portés par les stations de sports d'hiver, op.cit.

    * 157 Préfecture de région Rhône-Alpes, DTA Alpes du Nord, Présentation de la démarche, 17/07/98, Lyon, 6p.

    * 158 MANESSE Jacques, Montagne : qui décide ?, op.cit.

    * 159 Idem

    * 160 Brève du Dauphiné Libéré du 06/06/01. La Directive Habitats doit s'appuyer sur la mise en place du réseau Natura 2000.

    * 161 GERBAUX Françoise, La montagne en politique, L'Harmattan, 1994. Commentaire de l'ouvrage [en ligne]. Disponible sur : http://pweb.ens-lsh.fr/omilhaud/La_montagne_en_politique.doc (consulté le 20/04/10). L'affaire de la Vanoise concerne le promoteur de la station de Val-Thorens et les élus mauriennais qui revendiquent un accès Ménuires/Val-Thorens et pour cela, le déclassement d'une partie du parc national de la Vanoise ; ils rencontrent alors de violentes oppositions des « naturalistes » qui mettent en avant l'intangibilité des parcs. Un arbitrage est finalement demandé au président Pompidou qui autorisera les remontées mécaniques.

    * 162 BERSANI Catherine, La DTA ou le retour de l'Etat gendarme, Etudes Foncières, juin 1999, n°83. Mme Bersani est inspecteur général de l'Equipement. Disponible sur : http://www.adef.org/site/1999/06/01/les-dta-ou-le-retour-de-letat-gendarme/#more-203 (consulté le 20/10/10)

    * 163 NAYROU Henri, Le Grenelle des idées, oui, des leçons, non ! (Edito), Pour la montagne, juillet-août 2010, n°207. Henri Nayrou est le président de l'ANEM, l'association nationale des élus de la montagne, et député de l'Ariège. Le magazine Pour la Montagne est le mensuel d'information de l'ANEM.

    * 164 DEBARBIEUX Bernard, RUDAZ Gilles, Les Faiseurs de montagne, CNRS Editions, Paris, 2010, 373p. « Les montagnards, coupables désignés », pp.107-108

    * 165 DEBARBIEUX Bernard, RUDAZ Gilles, loc. cit.

    * 166 Une visite au « SAM 2010 », « le rendez-vous international de référence pour l'aménagement en montagne », le 23/04/10 à Grenoble, offre un aperçu assez exhaustif de ce qu'est l'aménagement de la montagne dans sa version durable.

    * 167 YOLKA Philippe, op. cit., p.5

    * 168 BARRIERE Olivier, Une gouvernance environnementale dans une perspective patrimoniale : approche d'une écologie foncière, op.cit.

    * 169 BERSANI Catherine, op. cit.

    * 170 BARRIERE Olivier , loc. cit.

    * 171 BARRIERE Olivier, loc. cit.

    * 172 C'est d'ailleurs l'un des questionnements de CIPRA France et une dimension de ce travail de recherche : la Convention alpine, et plus précisément la DTA des Alpes du Nord, peuvent-elles servir de base d'un référentiel pour appréhender les bonnes pratiques de gestion foncière dans l'espace alpin ?

    * 173 MORAND Charles-Albert, Le droit néo-moderne des politiques publiques, éd. LGDJ, coll. Droit et société, 1999, 224p.

    * 174 Cette présentation s'est appuyée sur deux documents et deux entretiens réalisés à Chamonix :

    DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., Les territoires touristiques de montagne bousculés par la pression foncière : le poids des politiques publiques dans les trajectoires territoriales, 6è Rencontres de Mâcon "Tourismes et territoires", pré-actes, 13-14-15 septembre 2007, 8p.

    MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? Réponse à l'appel d'offre "Hausse du foncier et de l'immobilier, quels enjeux autour du tourisme ? ", Cemagref Grenoble/PACTE-Territoires, s.l.n.d, 71p. Disponible en ligne (consulté le 29/03/10) : http://www.tourisme.gouv.fr/stat_etudes/etudes/territoires/zone_montagne.pdf

    Entretien n°1 et 2, Chamonix

    * 175 Il rassemble quatorze communes, dont Servoz, Les Houches, Vallorcine et Chamonix qui constituent de leur côté une communauté de communes depuis le 1ier janvier 2010 : transformation de l'ex-SIVOM HVA -Haute vallée de l'Arve- en un EPCI à fiscalité propre. Les réflexions ont été initiées dès octobre 2008

    * 176 Entretien n°2, Chamonix

    * 177 Plus d'efficacité avec la nouvelle Communauté de Communes de la Vallée de Chamonix-Mont-Blanc, Chamonix Bulletin municipal n° 3, décembre 2009, p.2

    Une nouvelle étape pour la vallée de Chamonix Mont-Blanc, Chamonix Bulletin municipal n°4, mai 2010, p.2

    * 178 Entretien n°16, EPFL 74

    * 179 Une étude réalisée en 2009 par l'EPFL 74 s'est intéressée aux freins potentiels à l'adhésion d'une commune.

    * 180 Cette thématique mobilise 60% (voir 80% certaines années) des interventions de l'EPFL de Haute-Savoie.

    * 181 Entretien n°16, EPFL 74

    * 182 Ainsi, une étude pour un observatoire foncier a été commandée par le syndicat mixte du Pays du Mont-Blanc auprès de la SAFER Rhône-Alpes pour l'automne 2010 (Entretien n°7, SAFER Rhône-Alpes). Le service foncier de la ville de Chamonix n'en était pas informé.

    * 183 Entretien n°1, Chamonix

    * 184 DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., op. cit., p.6

    * 185 Idem

    * 186 Entretien n°1, Chamonix. Ce travail « en interne » marque une démarche sur le long terme, avec plusieurs échéances. En revanche, le service foncier ainsi que l'élue à l'urbanisme ne participaient pas au groupe de travail (composé d'élus) : ils l'ont intégré par la suite.

    * 187 Entretien n°1, Chamonix

    * 188 Il était aussi question de monter une SEM, société d'économie mixte, comme alternative à un promoteur mais cela n'a pas encore aboutit... L'idée s'inspire d'une expérience menée dans le Beaufortain où une SEM aurait été créée pour ce type d'opération.

    * 189 Deux établissements publics (EPIC) qui sont dans l'obligation de faire appliquer un droit de priorité aux collectivités territoriales, tout comme l'Etat, sur la cession de biens fonciers ou immobiliers.

    * 190 Entretien n°1, Chamonix

    * 191 COMBY Joseph, Superposition des droits sur le sol. Les mille-feuilles du foncier, Etudes Foncières, n°143, janvier-février 2010, p.24

    * 192 PERINET-MARQUET Hugues. In La Semaine Juridique, édition notariale et immobilière, n°21, 28 mai 2010, pp.18-19. Article disponible sur : http://anil.bibli.fr/opac//doc_num.php?explnum_id=5604 (consulté le 13/07/10)

    * 193 PERINET-MARQUET Hugues, op. cit.

    * 194 D'après A.S. Devouassoux, pour le Clos Napoléon, le jury d'attribution composé d'élus aurait subit des pressions significatives. In Chamonix mène-t-il une politique exemplaire en matière de logement? op.cit.

    * 195 A Chamonix, on peut supposer sans trop se tromper qu'il s'agit d'anglais richissimes.

    * 196 Maitre Pacaud s'avère être le notaire de référence sur cette question récurrente des stations alpines. Il est intervenu à Chamonix mais aussi à Courchevel et ailleurs.

    * 197 La responsable du service foncier, Anne Berthier, est d'ailleurs juriste de formation.

    * 198 Entretien n°1 et 2, Chamonix

    * 199 Entretien n°1, Chamonix

    * 200 DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., op. cit., pp.6-7

    * 201 Entretien n°1, Chamonix

    * 202 ALLIE Louis, op.cit.

    * 203 Idem, p.41

    * 204 OPH : Office Public de l'Habitat, nouveau et unique statut qui regroupe les OPAC et OPHLM depuis le 1ier février 2007. Plus d'informations sur le site de la fédération nationale : http://www.offices-hlm.org/

    * 205 ALLIE Louis, op. cit., p.6

    * 206 Secteur Gervanne et Diois. Dans une étude réalisée à la demande du PNRV par la sociologue Josette Debroux, il est évoqué l'apparition d'un « quart-monde » dans ses secteurs sud du Vercors : Les nouveaux venus du canton de Châtillon-en-Diois ou la rencontre entre un territoire et des histoires individuelles, In HANUS, Regards croisés sur l'agriculture en Vercors, Éd. Parc naturel régional du Vercors, coll. « Études et chroniques », Lans-en-Vercors, 2003, pp. 240-254

    * 207 DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., op. cit., p.2

    * 208 La « CCMV » regroupe les sept communes suivantes : Autrans, Corrençon-en-Vercors, Engins, Lans-en-Vercors, Méaudre, Saint-Nizier-du-Moucherotte, Villard-de-Lans.

    * 209 CCMV, Charte de développement, document de référence, mai 2007, 57p., p.14. Population en 2005.

    * 210 BERTHIER I., Massif du Vercors, une contrainte librement ressentie, Diagonal, n°181, juin 2010, pp : 54-56

    * 211 Source : INSEE-RP. Disponible sur : www.observatoire-montagnes.org (consulté le 23/08/10)

    * 212 CCMV, Charte de développement, document de référence, op. cit.

    * 213 Idem, p.25

    * 214 PNRV, 2008-2020, la charte du parc du Vercors, approuvée le 22/09/07 par le comité syndical, 96p., p.7

    * 215 Idem, p.54

    * 216 Idem, pp.58-59

    * 217 Entretien n°4, PNR Vercors

    * 218 CCMV, Charte de développement, document de référence, op. cit., p.3. Discours d'introduction de Jean Faure, président de la Communauté de communes du massif du Vercors, sénateur-maire d'Autrans.

    * 219 CCMV, Charte de développement, Plan d'actions, mai 2007, 45p.

    * 220 BERTHIER I., Massif du Vercors, une contrainte librement ressentie, op.cit.

    * 221 CCMV, Charte de développement, document de référence, op. cit., p.12

    * 222 CCMV, Charte de développement, document de référence, op. cit., p.40. Tableau réalisée à partir des données du document.

    * 223 C.f. Annexes.

    * 224 BERTHIER I., Massif du Vercors, une contrainte librement ressentie, op.cit.

    * 225 CCMV, Charte de développement, document de référence, op. cit., p.10

    * 226 Idem, p.26

    * 227 BERTHIER I., Massif du Vercors, une contrainte librement ressentie, op.cit.

    * 228 Entretien n°4, PNR Vercors

    * 229 CCMV, Charte de développement, document de référence, op. cit., p.12

    * 230 CCMV, Charte de développement, Plan d'actions, op. cit., p.45

    * 231 La Communauté des communes du Vercors regroupe cinq communes du même canton : La Chapelle-en-Vercors, St Agnan-en-Vercors, St Julien-en-Vercors, St Martin-en-Vercors et Vassieux-en-Vercors. Informations disponible sur : http://www.vercors.net/

    * 232 PNRV, Bilan d'activité 2009, mars 2010, 123p., p.29. Les opérations pilotes de Charte paysagère sont impulsées par le PNRV dans le cadre des objectifs définis par sa Charte 2008-2020.

    * 233 Idem, p.32

    * 234 ALLIE Louis, op. cit., p.448-449

    * 235 Congrès des Parcs naturels régionaux « Les parcs, terres d'innovations », le 30 septembre, 1er et 2 octobre 2009, Parc naturel régional de la Chartreuse [en ligne]. Disponible sur : http://www.parcs-naturels-regionaux.fr/fr/approfondir/communique-presse.asp?op=_communique_details&id=1088

    * 236 Plus d'informations disponibles sur : http://www.le-gresivaudan.fr/-Fiche-d-identite- (consulté le 24/08/10)

    * 237 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 238 Dans leur article Et si le capitalisme foncier changeait nos paysages quotidiens ?, Françoise Jarrige, Anne-Marie Jouve et Claude Napoleone estiment que la première conséquence de la périurbanisation est le mitage de l'espace et donc la production d'un paysage « patchwork ». In Le Courrier de l'environnement, n°49, juin 2003, Disponible sur : http://www.inra.fr/dpenv/jarric49.htm (consulté le 24/08/10)

    * 239 ADABEL, Contribution de l'ADABEL au SCOT de la Région grenobloise, octobre 2009, 4p.

    * 240 ADASEA : Association Départementale pour l'Aménagement des Structures des Exploitations Agricoles

    * 241 L'expérience est détaillée dans les deux documents suivants :

    - MOULY Marielle, op. cit. p.64-65

    - Programme Comédie, Etude de cas La charte de bien vivre en Belledonne, concilier différents usages de l'espace, Forum régional sur la concertation et la médiation environnementales, 28 juin 2006, 14p.

    * 242 CAUE : le Conseil d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement de l'Isère

    * 243 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 244 JARRIGE F., JOUVE A-M., NAPOLEONE C., op.cit.

    * 245 ADABEL, Une coopérative laitière en projet sur Belledonne, 19/04/10 [en ligne]. Consulté le 09/06/10. Disponible sur : http://www.sillon38.com/blog/2010/04/19/une-cooperative-laitiere-en-projet-sur-belledonne/

    * 246 Entretien n°13, ADABEL

    * 247 ADABEL, PEZMA, un programme en voie d'abandon, 29/03/10 [en ligne]. Consulté le 09/06/10. Disponible sur : http://www.sillon38.com/blog/2010/03/29/pezma-un-programme-en-voie-d%E2%80%99abandon/

    * 248 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 249 Entretien téléphonique avec M. Benigna, Communauté de communes Sud grenoblois.

    * 250 ADABEL, Entre urbanisation et agriculture, juin 2005, 4p.

    * 251 Idem

    * 252 Idem

    * 253 Entretien n°13, ADABEL

    * 254 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 255 ADABEL, Unités d'Habitations Nouvelles, Conseil d'Administration du 03/03/08

    * 256 Etablissement public du SCOT, Document support au débat des territoires, Premiers éléments de diagnostic, Document de travail, novembre 2009, Grenoble

    * 257 Entretien n°13, ADABEL

    * 258 Entretien n°13, ADABEL

    * 259 Idem

    * 260 Idem

    * 261 Visite de la ferme, CA CIPRA France Mars 2010

    * 262 Informations détaillées disponible sur : http://www.espacebelledonne.fr/-Leader-2007-2013-.html (consulté le 15/05/10)

    * 263 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 264 Le FEADER, Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural, complète les fonds structurels mis en place par la Commission Européenne (Fonds Social Européen -FSE- et Fonds Européen de Développement Régional -FEDER-). Le FEADER finance le programme Leader.

    * 265 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 266 Idem et Entretien n°13, ADABEL

    * 267 Entretien n°13, ADABEL

    * 268 C.f. Partie I, chapitre 1

    * 269 Entretien n°8, Espace Belledonne

    * 270 PERINET-MARQUET Hugues, op. cit.

    * 271 Le Parc Naturel Régional de Chartreuse a édité en 2009 un « Guide à destination des élus locaux : réaliser un Plan Local d'urbanisme dans le Parc de Chartreuse ». Une double page (pp.4-5) est consacrée à poser des questions préalables sur l'intérêt de réviser ou d'élaborer un document d'urbanisme. Entretien n°12, PNR Chartreuse

    * 272 Entretien n°5, Métropole Savoie

    * 273 Entretien n°17, ADAYG. Expression pour définir les propriétaires donc la parcelle se trouve de l'autre côté du trait de l'urbaniste, en zone N, A ou AU, contrairement à son voisin de parcelle qui lui est en zone U.

    * 274 MARCELPOIL E (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? op.cit., p.59

    * 275 Il s'agit d'aborder ici quelques pistes de réflexion sur cette dimension du rapport à la norme et au droit en aménagement, en ayant toutefois conscience que ce sujet ouvre sur un nouveau champ d'investigation qui n'était pas le point focal de ce travail de recherche.

    * 276 BARRIERE Olivier, op.cit.

    * 277 Idem

    * 278 Idem

    * 279 Idem, citation de MORAND Charles-Albert (1999)

    * 280 MAULY Marielle, op. cit. Citation de PONTIER Jean-Marie (1993), p.45

    * 281 ALLIE Louis, op. cit. p.343. Référence à M. Crozier et E. Friedberg.

    * 282 Un aperçu a été donné en Partie I du mémoire.

    * 283 SAUVEZ Marc, Accompagner les mutations urbaines vers une autre planification, Etudes Foncières, n°146, juillet-août 2010, pp : 11-13

    * 284 Idem

    * 285 SAUVEZ Marc, op. cit.

    * 286 GROS Serge, In CIMES 2009 Construire dans la pente, une opportunité, Actes de la conférence-débat du 17 déc. 2009, Fondation Facim, Chambéry, 120p., pp.116-117 

    * 287 BARRIERE Olivier, op. cit., p.22

    * 288 Une première étape vers un infléchissement du droit de propriété est déjà engagée par la démarche de « démembrer la propriété », ou « démembrer le foncier ». Se référer par exemples à l'article de TOURNAFOND Bérénice, L'usufruit social, Etudes Foncières, n°136, novembre-décembre 2008, pp.49-52

    * 289 SAUVEZ Marc, op. cit.

    * 290 Etablissement public du SCOT de la région urbaine grenobloise, op. cit.

    * 291 SAUVEZ Marc, op. cit.

    * 292 MARCELPOIL E (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? op.cit., p.59

    * 293 Idem, p.64

    * 294 LAPOSTOLLE Dany, L'ingénierie territoriale vue des pays : une bureaucratie professionnelle territoriale en gestation, thèse de sciences politiques, Institut d'Etudes Politiques de Lyon, Université Lumière Lyon 2, 2010 [en ligne]. Disponible sur : http://theses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/2010/lapostolle_d/info (consulté le 17/08/10). Résumé de la thèse.

    * 295 ESPOSITO-FAVA Aurélien, op. cit., p.7

    * 296 Entretien n°7, SAFER Rhône-Alpes. Au sujet de la vente des chalets d'alpage (bâti et alpage agricoles), si la SAFER préempte, elle ne peut dissocier le bâti des terres lors de la rétrocession si l'ensemble de reste pas agricole.

    * 297 BAREL Yves, Modernité, code, territoire, Annales de la recherche urbaine, n°10-11, printemps 1981, Paris, pp.3-21

    * 298 Se référer aux travaux de SOUBEYRAN Olivier qui posent la question : l'improvisation peut-elle être une théorie de l'action ou de la pensée aménagiste ? Ainsi qu'aux travaux des pragmatistes américains, et ceux de C. Lindblom dans les années 1950 sur l'incrémentalisme, The Science of muddling throught, 1959

    * 299 ALLIE Louis, op. cit. p.350, p.339, p.41, p.39

    * 300 ALLIE Louis, op. cit.

    * 301 ALLIE Louis, op. cit., p.14. Selon l'expression de Louis Allie, la «monturbanisation est une forme d'urbanisation de moyenne montagne ». Ni « l'urbanisation galopante ni la multiplication de grandes surfaces commerciales [...] Il s'agit plutôt de la résultante d'action au coeur d'objectifs de développement et de préservation ».

    * 302 DUPONT Josselin, La Maîtrise du foncier comme outil de gestion intégré des territoires bretons, ESO-Rennes, 16/09/08, [en ligne]. Disponible sur : http://eso.cnrs.fr/spip.php?article406 (consulté le 19/05/10)

    * 303 Définition du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL)

    * 304 Idem

    * 305 Question posée lors de : Entretien n°6, CAUE 74

    * 306 Annexe au procès-verbal de la séance du Sénat du 09/10/02, 408p.

    * 307 ANEM, Pour la Montagne, n°126-127, mars-avril 2003, 23p.

    * 308 UICN, 1985-2005 : 20 ans de loi Montagne - Bilan et propositions, Paris, 2005, 15p. Le comité français regroupe deux ministères, cinq établissements publics, trente-sept ONG (dont CIPRA France) et deux cent experts.

    * 309 BESSON Louis (initiateur de la Loi Montagne de 1985 et ancien maire de Chambéry), In Pour la Montagne, op. cit., p.3.

    * 310 MANESSE Jacques, Montagne : qui décide ?, op.cit. L'auteur remarque que la loi Montagne qui reprend pourtant les principales rubriques de la Directive de 1977, « n'est pas marquée par un contenu clairement et fermement normatif ». Par exemple, la préservation des terres nécessaires à l'agriculture n'est pas « nettement garantie contre la concurrence des équipement liés notamment à la pratique du tourisme sportif (L 145-3-1) ». Ainsi dès 1988, J. Manesse souligne que « la marge d'appréciation n'est pas négligeable ».

    * 311 GERBAUX Françoise, La montagne en politique, op.cit.

    * 312 Idem

    * 313 Entretien n°2, Chamonix

    * 314 Site internet officiel de la DTA des Alpes du Nord : www.dta-alpesdunord.fr

    * 315 ANEM, Pour la Montagne, op. cit., p.5

    * 316 MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? op.cit., pp.61-62

    * 317 CIPRA, Spatial planning in climate change, a background report of CIPRA, Compact No 02/2010, p.4

    * 318 CHALAS Yves (sous la dir. de), L'imaginaire aménageur en mutation. Cadres et référents nouveaux de la pensée et de l'action urbanistique, L'Harmattan, Paris, 2004, 340 p.

    * 319 Le 2ième forum des « ONG montagne » organisé à l'Institut de géographie alpine de Grenoble le 30/04/10 par la CIPRA France, le REEMA, l'IGA et la GTA était teinté de cet état d'esprit comme en témoigne son intitulé : « vers une intelligence collective et territoriale ? »

    * 320 GIRAUT Frédéric, Innovation et territoires: les effets contradictoires de la marginalité, In Semaine alpine 2008 : innover dans les Alpes, RGA, Editions du Fournel, L'Argentière La Bessée, s.l.n.d., pp.6-8

    * 321 ALLIE Louis, op. cit., p.48

    * 322 DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., Les territoires touristiques de montagne bousculés par la pression foncière : le poids des politiques publiques dans les trajectoires territoriales, op.cit., p.1

    * 323 MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ?, op.cit., p.3

    * 324 Idem, p.64

    * 325 MANESSE Jacques, op. cit.

    * 326 BLANC Camille, op. cit.

    * 327 MERIAUDEAU Robert, A qui la terre ? La propriété foncière en Savoie et Haute Savoie, Thèse de Géographie, Institut de géographie alpine de Grenoble, 1986, 480p.

    * 328 L'EPFL de la région grenobloise (2002), l'EPFL de la Haute-Savoie (2003) et l'EPFL de Savoie (2005)

    * 329 MERIAUDEAU Robert, op cit. Sa thèse a reçu le Prix Sully Olivier de Serres 1985 (premier prix de thèse)

    * 330 JANIN Bernard, La terre savoyarde - Compte-rendu critique, In Revue de géographie alpine, Vol. 75, N°1, 1987, pp. 96-97

    * 331 Idem

    * 332 Idem

    * 333 MERIAUDEAU Robert, La spécificité foncière de la montagne française. In Revue de géographie alpine, Tome 77, N°1-3, 1989, pp. 203-210 [en ligne]. Disponible sur (consulté le 27/07/10) : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_1989_num_77_1_2741

    * 334 Entretien n°6, CAUE 74

    * 335 AGRESTE Primeur, L'artificialisation atteint 9% du territoire en 2009, n°246, juillet 2010, 4p.

    GIS Alpes du Nord, Agriculture et urbanisation dans les Alpes du Nord, sept.2004, 4p. Atelier dans le cadre du programme de recherche-développement du GIS 2001/2006

    * 336 L'artificialisation des terres agricoles rassemble une très large littérature (recherches, guides pratiques et articles d'actualité), sans doute la production de connaissances et de données la plus importante actuellement.

    * 337 Entretien n°6, CAUE 74

    * 338 Définition du Petit Larousse illustré 2007

    * 339 Anthropologique dans le sens où il s'agit de « l'étude générale de l'homme sous le rapport de sa nature individuelle ou de son existence collective, sa relation physique ou spirituelle au monde, ses variations dans l'espace et dans le temps », définition du CNRTL, op. cit.

    * 340 cf. Partie I

    * 341 Au sens de « qui dure longtemps, qui est de longue durée, qui présente de la stabilité et de la constance dans le temps », définition du CNRTL, op. cit.

    * 342 A lire par exemple : Les Ghettos du Gotha : Comment la bourgeoisie défend ses espaces, Seuil, 2007, 294p.

    * 343 Atout France, Tourisme, urbanisme et aménagement sur le littoral et en montagne, guide de savoir-faire, n°31, août 2009, 136p., p.39.

    * 344 Idem

    * 345 Clicanoo.com, Chaque seconde, 24 m² de terres disparaissent, Clicanoo - le journal de l'île de la Réunion, article publié le 20/06/10 [En ligne]. Disponible sur : http://www.clicanoo.re/11-actualites/Agriculture/249092-chaque-seconde-24-m2-de-terres.html (consulté le 23/06/10)

    * 346 Localtis.info, Artificialisation des sols - Terres agricoles : 320 terrains de football disparaissent chaque jour, article publié le 21/07/10 [en ligne]. Consulté le 09/08/10.

    * 347 LAURENT Bernard, Morbihan (56) Disparition du foncier agricole / Tout n'est pas lié à l'urbanisme, Paysan Breton Hebdo, semaine du 11 au 17 Juin 2010 [en ligne]. Disponible sur : http://www.paysan-breton.fr/article/10799/disparition-du-foncier-agricole--tout-n%92est-pas-lie-a-l%92urbanisme.html (consulté le 14/06/10)

    * 348 Source : Site officiel du Conservatoire du littoral. Disponible sur : http://www.conservatoire-du-littoral.fr/front/process/Rubrique.asp?rub=4&rubec=4 (consulté le 01/09/10). Des biens peuvent également être donnés ou légués au Conservatoire.

    * 349 DUPONT Josselin, op cit.

    * 350 CUEFF Daniel, Edito [en ligne]. Disponible sur : http://foncierdebretagne.fr/ (consulté le 21/05/10)

    * 351 LE GALL Frédérique, Terres agricoles. Prix stables après 15 ans de hausse - Bretagne, 20/05/10 [en ligne]. Disponible sur : http://www.letelegramme.com/ig/generales/economie/terres-agricoles-prix-stables-apres-15-ans-de-hausse-20-05-2010-922031.php (consulté le 21/05/10)

    * 352 RENARD Vincent, Politiques foncières et développement durable, Formation Sciences Po Paris, 15/06/10 [En ligne]. Disponible sur : http://www.sciences-po.fr/spf/programmes/pdf/IPP11.pdf (consulté le 02/09/10)

    * 353 LEVESQUE Robert, Pour une politique foncière durable - La terre, une ressource naturelle à respecter au même titre que l'eau et l'air, Chambres d'agriculture n°963, mai 2007 (article daté de mars 2007) pp.35-42

    * 354 CAUE Haute-Savoie, Chantier maîtrise quantitative et qualitative de la métropolisation - synthèse des débats 2006-2007, juin 2008, 27p., p.9

    * 355 Idem

    * 356 RENARD Vincent, Aménagement de la montagne et économie foncière - De la fuite en avant à la réversibilité et au développement durable, Revue française de droit administratif, n° 3, mai-juin 2005, pp. 502-506

    * 357 « L'Eco guide des stations », à l'initiative et réalisé par l'association Mountain Riders, offre un large panorama des stations françaises (87) qui ont répondu au questionnaire en 2009 et des actions qu'elles entreprennent pour mettre en oeuvre les principes du développement durable sur leur site. Disponible sur : http://www.mountain-riders.org/_EcoGuideStations/ (consulté le 02/09/10)

    * 358 MARCELPOIL E., BENSAHEL-PERRIN L., FRANCOIS H., Les stations de sports d'hiver face au développement durable - Etat des lieux et perspectives, L'Harmattan, Paris, 2010, 176p.

    * 359 MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? Réponse à l'appel d'offre "Hausse du foncier et de l'immobilier, quels enjeux autour du tourisme ? ", p.64

    * 360 Définition Wikipedia [En ligne]. Disponible sur : http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9veloppement_durable (consulté le 02/09/10)

    * 361 DAVID-CAVAZ Bernard, Paroles..., Brochure du CAUE de l'Isère, page sur le Trièves, le pays des âmes fortes - Paroles de maires, s.l.n.d.

    * 362 Conseil Général de la Gironde, Le foncier au service d'un développement solidaire - Ensemble, mettons en oeuvre une politique d'aménagement durable du territoire, février 2010, 6p. [En ligne]. Disponible sur : http://www.cg33.fr/cg33/upload/docs/application/pdf/2010-03/plaquette.pdf (consulté le 02/09/10)

    * 363 DDAF Isère, Agir ensemble pour le foncier agricole isérois, Guide, 2005, p.5, [en ligne]. Disponible sur : http://ddaf38.agriculture.gouv.fr/article.php3?id_article=172 (consulté le 15/04/10)

    * 364 Entretien n°1, Chamonix

    * 365 COMBY Joseph, Vingt quatre propositions sur les politiques foncières locales (Actualisation en 2009 d'un texte initialement destiné à une brochure de grande diffusion de la DRE de Lyon) [En ligne]. Disponible sur : www.comby-foncier.com (consulté le 23/07/10)

    * 366 Altitude 1400, 10 propositions pour l'avenir - Pour un aménagement territorial durable des Alpes, 2009. Site de l'association : www.altitude1400.ch

    * 367 ProNatura, Point de vue : milieu bâti et paysage, Bâle, avril 2005, 16p.

    * 368 Dur'alpes attitude, La gestion durable du foncier, nos voisins suisses assurent ! 15/11/07 [En ligne]. Disponible sur : http://www.duralpes.com/la-gestion-durable-du-foncier-enjeu-majeur-du-sillon-alpin-nos-voisins-suisses-y-voient-clair/ (consulté le 23/06/10)

    * 369 DUJOLS Dominique, op.cit., p.25

    * 370 Entretien n°17, ADAYG

    * 371 Région Rhône-Alpes, Compte-rendu des Débats prospectifs: quelles mobilités à l'horizon 2050? s.l.n.d.

    * 372 RADISON RAKOTOARISOA Célestin, RAMANANARIVO Romaine et Sylvain, Stratégie pour un développement durable par le foncier à Madagascar, TALOHA (revue scientifique internationale des civilisations), n°19, 30/01/10 [En ligne]. Disponible sur : http://www.taloha.info/document.php?id=845 (consulté le 04/09/10)

    * 373 LE ROY Etienne, L'apport des chercheurs du LAJP à la gestion patrimoniale, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, 03/03/2007 [En ligne]. Disponible sur : http://www.foncier-developpement.org/analyses-et-debats/debats-conceptuels/l2019apport-des-chercheurs-du-lajp-a-la-gestion-patrimoniale/view (consulté le 31/05/10), p.6, pp.8-9

    * 374 Vincent Tonnelier a habité pendant 22ans à La Grave. Hôtelier et commissaire enquêteur, il avait déjà une bonne expérience de « concertation » avec les habitants. Entretien n° 15

    * 375 Conseil Général de la Moselle, un aménagement foncier réussi [En ligne]. Disponible sur : http://www.cg57.fr/vivrelamoselle/Pages/Environnement/Amenagementfoncier.aspx (consulté le 29/07/10)

    * 376 RENARD Vincent, Aménagement de la montagne et économie foncière [en ligne]. Disponible sur : http://vincentrenard.eu/index.php?option=com_content&task=view&id=5&Itemid=10 (consulté le 22/06/10)






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle