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Formation professionnelle et professionnels formateurs : le cas des stages cliniques infirmiers

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par Gaà¯ta Le Helloco-Moy
Université Bordeaux 2 - Master 0000
  

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4.3 - Relation pédagogique soignants-étudiants

Comme le signalait un infirmier dans une précédente citation, un étudiant « c'est une personnalité » (R) et nous pouvons étendre sa réflexion aux soignants, ce qui conduit alors à une multitudes de combinaisons possibles, cohérentes, détonantes ou surprenantes lors de la rencontre de ces deux individus durant l'expérience de formation. Partagé entre le cadre du soin et le cadre de la formation, selon son expertise, le soignant se placera plus ou moins dans l'un ou dans l'autre. Ce placement permettra ainsi aux étudiants d'intégrer le cadre requis afin d'assimiler l'ensemble des règles immanentes à tout le restant de leur carrière.

Le point commun à l'ensemble des professionnels interrogés, au sein de cette relation, est la manière de procéder, la technique plébiscitée par tous comme pédagogie de référence étant l'ostentation où le professionnel montre puis fait et enfin fait faire en expliquant les erreurs éventuelles à ne pas produire. Tellement consensuelle, cette méthode en appelle même à la prise de parole pour l'ensemble du groupe comme en témoigne les dires des infirmières des deux premiers groupes qui se laissent aller à employer le « on » pour parler au nom du groupe : « on ferait pareil, oui, on montre après on fait faire, on corrige et on part quoi, oui » (I). Le deuxième groupe note également la disparité des possibilités de chaque étudiant : « C'est un peu ce qu'on fait, on fait refaire jusqu'à temps que l'étudiant y arrive, donc généralement, cela peut prendre plusieurs fois voir plusieurs jours et c'est vrai qu'il faut montrer » (B). La même infirmière reprend ses propos en étayant : « D'abord on montre et après quand ils se sentent et qu'on a l'impression aussi qu'ils ont compris ...tout en sachant qu'on ne les laisse pas non plus, on est tout le temps à côté » (B). Nous ressentons ici le besoin de préciser que le moment où l'étudiant est livré à lui-même ne se fait pas sans de nombreuses vérifications et avec des garde-fous toujours en place. Pour le troisième groupe, l'importance de s'exercer avant pour être plus en confiance confirme cet accompagnement de l'étudiant vers la confiance en soi : « oui la démarche me parait logique... En plus l'étudiant s'est exercé avant et pas devant le patient et a plus d'assurance au moment de la réalisation du soin, un exercice en blanc sous la directive de l'infirmière... nan, c'est vraiment une bonne démarche » (R). Quant au quatrième et dernier groupe, il reprend à la fois cette démarche pédagogique comme référence et à la fois explique pourquoi elle fait consensus : « elle s'y prend bien, elle lui montre le B.A.BA, un truc tout simple par rapport au plateau et tout ça pour après faire, je trouve que dans sa façon de faire, il y a une démarche qui ne la met pas du tout en échec, au contraire. Donc ça le (la ?) met plus progressivement dans le soin » (C).

En sus, le dernier groupe apporte un élément nouveau en mettant l'accent sur l'importance des mots à utiliser lors de l'enseignement d'un acte de soin et ce, même s'il est technique et semble donc pouvoir être objectivé :

« Moi, ce qui m'interroge c'est que dans ce soin, l'infirmière dit qu'il ne faut toucher à rien et je pense que cela doit faire très peur, non ? (rires) Il faut toucher à tout mais avec des précautions à prendre sinon elle va la bloquer l'infirmière là non ? Elle va être paniquée non ? Si on dit de ne toucher à rien alors on se dit alors qu'est c'qu'on peut faire ... » (F, E4, 4-7)

On se rend bien compte ici de l'impact potentiel d'un mot mal utilisé, qui peut se traduire en une difficulté que certains étudiants auront pour assimiler l'ensemble des règles du cadre professionnel infirmier ; y compris les règles d'utilisation des mots que l'on pourrait assimiler au « jargon » professionnel. De nombreux mots sont porteurs d'un sens commun au champ professionnel infirmier et, pour les comprendre, il faut déjà appartenir à ce champ, d'où la difficulté ressentie par les étudiants commettant bévues et contre-sens. A titre d'exemple précis, reprenons le terme d'« encadrement » employé par tous pour représenter l'action de formation du professionnel envers l'étudiant. Lors du premier contact avec un stage, on imagine aisément que l'étudiant pensera se retrouver en position hiérarchique face à un « cadre » représenté par l'infirmier référent qui lui donnera la liste de ce qu'il pourra et ne pourra pas faire. Nous pouvons, dès à présent, montrer que ce mot d'« encadrement » n'est pas suffisant pour décrire l'expérience de formation au sein des stages et que le titre de formation professionnelle est, en partie du moins, plus approprié. Pourtant, lorsque les soignants décrivent leur fonction de formation, ils parlent d' « encadrement » des élèves alors qu'ils pensent apprentissage auprès des étudiants, persuadés que ces termes et notions sont synonymes alors qu'elles ne le sont pas.

Parmi les infirmiers interrogés, la responsabilité du soin apparait au travers d'évènements à prendre en compte vis-à-vis des étudiants puisqu'ils apprennent « en situation » et exercent leur activité directement auprès des malades. Les deux premiers groupes semblent plutôt être dans la crainte de l'erreur effectuée par l'étudiant comme dit dans le second entretien : « le jour où il y aura vraiment une bêtise » (I). Ils considèrent être responsables de cette erreur pouvant aller jusqu'à l'arrêt d'un stage voir des études si l'étudiant est vu comme dangereux comme en témoigne les propos d'une infirmière lors du premier entretien : « Elle a fait des bêtises qui auraient pu coûter la vie des patients donc, voilà, on a été obligé d'arrêter » (B). Pour les autres groupes, cette responsabilité apparait comme davantage partagée, laissant la crainte de côté, ils montrent à l'étudiant ses futurs responsabilités : « même si dans le service c'est mal rangé ou il y a eu une erreur, c'est quand même sa responsabilité de vérifier les médicaments » (R). Ils assument également l'erreur qui peut être commise à tout instant par un étudiant dont ils partagent la responsabilité : « je pense que les deux sont plus ou moins responsables, l'élève et l'infirmière en fait, l'infirmière parce qu'elle lui a pas dit et l'élève c'qu'elle a dit » (C) ; mais ils développent toujours l'évolution possible au sein des stages en relatant le fait qu'« il fera jamais les choses seul de toute façon sauf si cela a été validé et confirmé par l'infirmière après y'a toute confiance. Je pense que ça c'est important, cela évite des bêtises et des situations désagréables des deux côtés » (V). Il semble donc que la confiance donnée d'emblée aux étudiants permette une crainte moindre envers ce qu'ils pourront commettre et un stress moins important pour les professionnels face à la résultante des actes réalisés par les étudiants. Les professionnels ne laissant pas la confiance exister d'emblée ne parviennent pas à chercher les moyens de dépasser un obstacle rencontré en cours de stage, comme le manifeste une infirmière du premier entretien face aux arguments qu'oppose l'étudiant face à son erreur lors de la préparation des médicaments : « Nan, au bout de plusieurs altercations comme ça (...) j'aurais arrêté » (B). L'intérêt de l'équipe reprend alors tout son sens puisque cette infirmière nous explique que « si besoin quand l'étudiant pose problème on passe la main si cela ne va pas » (B). Une infirmière du deuxième entretien, elle, nous développe une autre réaction face à cette opposition : « Mais si tu sais pas pourquoi tu le fais, comment tu le fais et ce que tu vérifies et tout ça, je le fais à la place des gens moi » (I), plutôt que de laisser l'équipe prendre le relais, elle laisse son rôle de formateur de côté et se retourne vers celui de soignant, considérant ainsi que cet étudiant n'a pas sa place dans le stage si son attitude ne change pas.

Nous le remarquons bien ici, l'action de formation est liée à la relation entre étudiant et infirmier et, au-delà de cette interaction, elle se place même dans le cadre de l'expérience de formation. Cette expérience existe dans le cadre de la formation infirmière et cette formation se passe, en partie, au sein des stages cliniques aussi, comme nous pouvons le constater dans notre échantillon, l'importance de la relation soignant-étudiant ne doit pas être négligée pour la réussite de cette action de formation. Même si certains professionnels semblent plus à même de parer aux comportements les plus exceptionnels, il ne faut pas négliger pour autant le soutien qu'offre une équipe quand un individu pose problème à un autre dans un abîme d'incompréhension.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery