3.10. ÉTAT DE LA MODÉLISATION
PLUIE-DÉBIT AVEC LES RÉSEAUX DE
NEURONES FORMELS OU ARTIFICIELS
Depuis les travaux de Mac Culloch et Pitts (1943), les
modèles connexionnistes ont eu plusieurs applications dans
différents domaines notamment l'hydrométéorologique
où de bons résultats ont été obtenus dans les
domaines de :
i. la classification des données hydrologiques, la
prévision des débits des rivières (crues et
étiages) (Jourdan, 2007) ;
ii. l'évaluation et la prévision de la
qualité de l'eau (Dimopoulos et al., 1996) ;
iii. la prévision de la consommation d'eau
(Främling, 1992);
iv. l'estimation des précipitations (Lafont, 2005) ;
v. la prévision des apports naturels aux
réservoirs d'irrigation ou de production hydroélectrique
(Jourdan, 2007).
Depuis 1997 plusieurs centaines d'articles ont
été publiés sur l'application des réseaux de
neurones formels à la gestion des ressources en eau nécessaire
à un Développement Durable. La moitié des applications
hydrologiques des Réseaux de neurones Formels concernent la
modélisation des débits, crues et étiages des cours
d'eau.
La période 2000 à 2005 fut marquée par la
publication de nombreux travaux dans le domaine de la modélisation
pluie-débits par Réseaux de neurones. On peut citer notamment les
travaux de Li-chiu et al. (2004) ; Ashu et al. (2004) ; Young
(2003) ; Masiyandina et al. (2003) ; Gunnar et Uhlenbrook (2003) ;
Sudheer et al. (2003) ; Sudheer et al. (2002) ; Cameron
et al. (2002) ; Abrahart et See (2000) et Schumann et al.
(2000).
Toujours dans le même axe de recherche que les auteurs
cités ci-dessus, Wenri et al. (2004) ont
développé un modèle de neurones pour la prévision
des débits du fleuve Apalachicola (USA, Floride). Il s'agissait d'un
modèle de type "feed-forward" entraîné avec la rétro
propagation de l'erreur sur la période 1939-2000. Ce modèle a
donné de très bons résultats au pas de temps journalier,
mensuel, trimestriel et annuel avec respectivement 0,98 ; 0,95 ; 0,91 et 0,83
comme coefficients de corrélation de Pearson. Pour valider ces
résultats, ces auteurs ont utilisé sur la même
période un autre modèle de type ARIMA. Après comparaison
des deux modèles, il ressort que le Réseau de neurones Formel est
plus performant. De ces résultats, on peut donc dire que les
Réseaux de neurones sont utilisables à tous les pas de temps en
simulation et en prévision.
Dechemi et al. (2003) ont utilisé les
réseaux de neurones artificiels pour modéliser le binôme
pluie-débit au pas de temps mensuel sur le bassin versant de la Cheffia
du Nord Est algérien. L'architecture du réseau utilisé est
de type (2-4-1) avec pour règle d'apprentissage l'algorithme de
Levenberg Marquard qui est un apprentissage supervisé en bloc.
Les résultats obtenus par ces auteurs ont
été comparés à deux types de modèles : un
modèle hydride neuronale-logique floue et des modèles conceptuels
(modèles de Thornthwaite et GR2M).
Ils conclurent que tous les modèles donnent de bonnes
valeurs mais que le modèle hybride donne les meilleurs résultats,
car ce modèle permet de décomposer le processus complexe en un
processus physique plus simple. Sur le même bassin versant de Cheffia en
Algérie, Tarik et Dechemi (2004), ont testé quatre modèles
pluie-débit au pas de temps journalier. Ces modèles appartiennent
à deux catégories : les modèles conceptuels, que sont le
modèle GR3j, le modèle CREC à huit paramètres ; et
les modèles de type «boîte noire»,
représentés par le modèle ARMAX (modèle
autorégressif à moyenne mobile avec variables exogènes) et
par un modèle neuroflou, qui combine un modèle structure
neuronale et la logique floue. Les modèles ont été
testés sur deux périodes, l'une sèche et l'autre humide.
Ces auteurs, après comparaison des différents résultats,
proposent une meilleure modélisation de la relation pluie-débit,
au pas de temps journalier, en combinant l'approche conceptuelle et le
modèle du système neuroflou.
Une autre étude significative a été
réalisée par Hsu et al. (1995). Ces auteurs ont
proposé une procédure nommée LLSSIM pour « Linear
Least Squares Simplex » pour une identification automatique des
paramètres du RNA. Trois modèles neuronaux identifiés
à l'aide de la technique LLSSIM sont comparés à deux
autres modèles de prévisions classiques : ARMAX, SAC-SMA «
Sacramento Soil Moisture Input Model », (U.S. National Weather Service).
Les
données hydrologiques (pluies et débits
journaliers) utilisées sont celles du "Leaf River Basin " dans le
Mississipi. En utilisant une seule année hydrologique pour la
calibration des différents modèles (ARMAX, SAC-SMA, RNA) et cinq
années pour leur validation, les résultats obtenus accordent les
meilleures performances aux RNA aussi bien pour la calibration que pour la
validation. De même, en calibrant les modèles sur 5 ans et en les
validant sur 1 année, les meilleurs résultats sont obtenus par
les RNA. Cependant, dans les deux cas, les "meilleurs résultats" obtenus
par les modèles neuronaux sont variables de bon à mauvais : la
prévision des débits de pointe est bonne, mais celle des
périodes de récession est mauvaise. Ces résultats sont
néanmoins meilleurs que ceux obtenus par les modèles ARMAX et
SAC-SMA pour ces mêmes périodes. Cette étude indique que
lorsque très peu de données sont disponibles, le modèle
neuronal serait préférable au modèle ARMAX pour la
prévision des débits. Par contre, une bonne application du
modèle SAC-SMA nécessiterait au moins 8 années
d'observations. Karunanithi et al. (1994) ont appliqué le
réseau en cascade, "Cascade Network", utilisant l'algorithme dit de "
Cascade-Corrélation" (Fahlman et Lebiere, 1990) pour la prévision
des débits de la rivière Huron dans l'état du Michigan.
Cet algorithme a l'avantage de modifier la topologie du modèle lors de
l'apprentissage. Les données hydrologiques utilisées sont les
débits journaliers observés sur 13 ans (1960-1972). Dans un
premier modèle, les variables d'entrées sont les débits
des jours j-5 à j-1 (j étant l'horizon de prévision),
tandis que pour le second modèle, les variables d'entrées sont
les moyennes mobiles des débits des jours j-5 à j-1. Ces deux
modèles sont calibrés à l'aide de 11 ans d'observations et
validés sur 2 ans. Les résultats de ces deux modèles
neuronaux sont comparés à ceux d'un modèle de puissance
(Chow, 1964). Les valeurs de l'erreur quadratique moyenne pour la
période de test ou de validation indiquent que les modèles
neuronaux sont de meilleurs prédicteurs que le modèle de
puissance. La comparaison des erreurs relatives indique que les modèles
neuronaux sont surtout meilleurs pour la prévision des débits de
pointe. L'analyse de la taille du réseau montre que l'algorithme de
"cascade-corrélation" est capable d'adapter la complexité du
Réseau de neurones artificiel (RNA) à celle de l'ensemble
d'apprentissage. Cette étude a aussi le mérite de montrer que
l'utilisation des débits du jour j5 à j-1 comme entrées du
RNA est meilleure à celle des débits moyens de j-5 à j-1.
De nombreuses autres applications des Perceptrons Multicouches (PMC) à
la modélisation de la relation pluie-débits et à la
prévision des crues ont été proposées. On peut
citer les travaux de Buch et al. (1993); Crespo et Mora (1993); Liong
et al. (1994); Zhu et Fujita (1994); Smith et Eli (1995); Dimopoulos
et al. (1996); Zhang et Trimble (1996); Asaad et Shamseldin (1997);
Huttunen et al. (1997); Clair et Ehrman (1998); Thirumalaiah et Deo
(1998).
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