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Approche systémique des jeux pragmatiques communicationnels.

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par Colin FAY
Université de Rennes 2 - Master LCER 2012
  

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A.3.3. Le modèle économique-efficace

Comme nous venons de le voir, la communication est un système dans lequel sont engagés des interlocuteurs. Une des propriétés de ce système est qu'il répond au principe d'équifinalité, c'est-à-dire qu'un état particulier du système peut être atteint depuis des conditions initiales différentes mais aussi via des utilisations, des Ç voies È différentes. Ainsi, il peut atteindre un état qui est indépendant des conditions initiales depuis lesquelles il évolue, et donc un état dU à des influences environnementales ou à une production spontanée par et dans le système. De ce fait, les interlocuteurs doivent faire des choix d'utilisation, guidés par le processus de pertinence, afin de choisir parmi les différentes hypothèses à leur disposition afin d'arriver aux conclusions souhaitées ; en d'autres termes, un utilisateur du système va produire des indices et inférer des hypothèses qui vont être optimalement pertinents. Nous allons ici développer les critères qui font cette pertinence.

Selon Sperber&Wilson, la pertinence est un processus d'optimisation de la communication par production d'un signe créant le maximum d'effets contextuels, un effet contextuel étant la conclusion d'une Ç déduction utilisant comme prémisses l'union d'informations nouvelles P et d'information anciennes C. È (1989:168) Ainsi, un effet contextuel est la création d'une conclusion prenant pour prémisse la jonction d'une information nouvelle avec une information plus ancienne. C'est la création de d'effets contextuels maximales que recherche les interlocuteurs à travers un minimum d'effort cognitif, c'est-à-dire qu'une Ç hypothèse est d'autant plus pertinente dans un contexte donné que ses effets contextuels y sont plus importants (et) (...) que l'effort nécessaire pour l'y traiter est moindre. È (ibid:191) Ce n'est cependant pas tout à fait la terminologie que nous utiliserons. Comme nous l'avons vu, notre vision de la communication est celle d'une interaction totale écartant l'idée d'un tour de parole quelconque. Or, pour rendre compte de cette interaction totale, nous nous devons d'utiliser une terminologie qui répond des deux processus de compréhension et de production de façon égale.

Comme nous l'avons vu précédemment, les interlocuteurs possèdent une capacité cognitive de compréhension inférentielle depuis les indices laissés par la production. Une pertinence non-optimale n'est pas due à une incapacité de compréhension (car, rappelons le, tout interlocuteur possède la capacité cognitive inférentielle lui permettant de comprendre les indices), mais à une économie lors de la production d'indices qui est trop forte de la part d'un interlocuteur. De ce fait, nous considérerons que tout interlocuteur est capable de comprendre une production si et seulement si cette production produit efficacement, c'est-à-dire si elle produit assez d'effets contextuels pour sa compréhension. C'est à la production qu'il Ç incombe de ne pas se tromper et de savoir quels codes et quelle information contextuelle (l'autre) est à même d'utiliser dans le processus de compréhension. È (ibid:73)

Ainsi, envisageons un exemple, qui sera bien sUr schématique : si un interlocuteur A produit à un autre interlocuteur B le signe locutionnel S suivant : Ç J'ai vu le dernier King dans la boutique en bas de la rueÈ, il est évident que A présuppose que le signe-indice Ç King È est suffisamment efficace pour que la compréhension mène B à la conclusion souhaitée par A, à savoir que pour référer au dernier ouvrage de Stephen King, DTMme, il peut faire l'économie d'indices supplémentaires à King. Cependant, si B n'arrive pas à la conclusion à laquelle veut le mener A, ce n'est pas parce qu'il n'arrive pas à fournir l'effort nécessaire à la compréhension, mais bien parce que A a été trop économique dans sa production de signe, c'est-à-dire que A n'a pas produit assez d'indices pour que B comprenne, à savoir qu'ici, B peut comprendre que le dernier King est Duma Key, si B ne connait pas l'existence de l'ouvrage plus récent DTMme, voire même que King est la chanteuse Diana King. Schématiquement, pour que B comprenne A à travers S, il faut que A fournisse un nombre n d'indices à B pour être assez pertinent pour la compréhension par B. Or, si B ne comprend pas A, ce n'est pas par effort trop élevé lors de la compréhension, mais bien parce que A envisage que B comprendra avec moins d'indices que n, et est trop économe dans sa production pour être efficace.

Ce modèle permet également de rendre compte des communications qui sont dans un premier temps source d'incompréhension : quand un locuteur n'est pas familier avec l'interlocuteur, il suivra d'abord sa propre économie cognitive, avant de l'adapter s'il s'aperçoit que cette économie est trop grande par rapport à l'efficacité

nécessaire à une compréhension juste. De fait, le modèle coUt/effet ne rend pas compte de façon juste de ces incompréhensions en considérant que les incompréhensions et ambigu
·tés sont dues à un coUt trop élevé par rapport à l'effet : encore une fois, ce modèle ne prend en compte que le niveau compréhension et pas le niveau production, n'expliquant pas pourquoi la production du locuteur engendre un coUt trop élevé, c'est-à-dire que la théorie coUt/effort développée par Sperber et Wilson analyse la pertinence dans une optique de la compréhension verbale. Notre terminologie s'adaptant aux deux processus de la communication, elle nous para»t donc plus adaptée pour rendre compte de la communication en tant qu'interaction ainsi que de ses jeux. Ë travers la notion économie-efficacité, nous pouvons rendre compte des ambigu
·tés de façon juste.

Ces ambigu
·tés existent uniquement dans le processus de compréhension, en effet, considérer que l'on puisse produire des énoncés ambigus pour nous même est une idée fausse qui ne se retrouve jamais dans la conversation réelle, en d'autres termes, lorsque nous communiquons, nous Ç savons ce que nous voulons dire È, nous ne produisons jamais d'énoncés non pertinents pour notre propre compréhension. En d'autres termes, l'énoncé n'est jamais ambigu pour celui qui le produit. Comment est-il possible que celui-ci deviennent ambigu avec la compréhension ? Ce phénomène appara»t lorsque celui qui produit suit sa propre économie cognitive sans envisager (ou sans conna»tre) l'équilibre nécessaire pour arriver à être efficace, c'est-à-dire en suivant son propre sens du signe, sans envisager les informations potentiellement nécessaires à la compréhension par l'Autre.

Pour résumer, nous ne contredisons pas le développement fait par Sperber et Wilson, nous nous permettons de le reformuler. La terminologie utilisée par ces derniers ne permet pas d'envisager un point de vue totalement interactionnel, puisqu'elle renferme toujours l'idée d'un Ç communicateur È produisant ce qu'il envisage comme pertinent pour la compréhension par Ç l'auditeur È en fonction de coUts et d'effets cognitifs. Or, cette idée contredit ce que nous avons vu précédemment. Est pertinent en communication ce qui optimise les tâches de compréhension et de production, la pertinence ne peut donc recouvrir le seul processus de compréhension, mais se doit de recouvrir les deux processus, ce que

fait la terminologie économie-efficacité, les deux processus devant être économiques et efficace, l'économie s'effectuant pour soi et l'efficacité pour l'entièreté du système.

Ainsi, la compréhension est indissociable de la production, et ces deux tâches cognitives sont dirigées par la notion d'inférence, c'est-à-dire que l'on produit et l'on comprend en posant des hypothèses sur les capacités cognitives représentationnelles de l'Autre. Chaque interlocuteur partage la supposition que l'Autre est pertinent dans sa production, qu'il utilise optimalement les moyens à sa disposition pour maximiser la compréhension, et va ainsi, par économie, utiliser ses capacités inférentielles pour comprendre ce qui lui est le plus directement accessible, car Ç même si dans le processus de compréhension les données et les hypothèses dont on pourrait en principe tenir compte sont innombrables, les seules dont on tienne compte en fait sont celles qui sont directement accessibles. È (ibid:105) L'interlocuteur qui produit envisage que sa production est économique pour éviter le superflu mais aussi qu'elle va produire assez d'effets contextuels (c'est-à-dire être assez efficace) pour que la compréhension-économique arrive aux conclusions voulues. Nous soutenons l'idée que tout interlocuteur est capable de comprendre une production à condition que celle-ci produise assez d'effets contextuels pour être comprise. Ainsi, selon notre terminologie, si une incompréhension survient, ce n'est pas parce que la compréhension demande trop d'efforts, mais bien parce que la production a été trop économique. De ce fait, un signe est pertinent lorsqu'il crée un équilibre entre l'économie et l'efficacité, c'est-à-dire lorsque la production fait l'économie du superflu en restant assez efficace pour permettre à la compréhension d'arriver aux conclusions souhaitées.

Nous rappelons que la communication recouvre la communication ainsi que la méta-communication, il en va ipso facto de même pour la pertinence. Un signe peut être non pertinent à un niveau communicationnel mais pertinent à un niveau métacommunicationnel : un interlocuteur peut vouloir communiquer une Ç non-communication È, c'est-à-dire communiquer qu'il ne souhaite pas communiquer, ou encore l'informer qu'il est capable de fournir une économie cognitive que l'Autre ne peut pas fournir, afin d'affirmer une supériorité de ses capacités cognitives ou encore afin de signifier qu'il connait mieux un sujet que l'Autre. Ainsi, une production peut sembler trop économique, mais cette économie peut être elle même pertinente, car l'effet contextuel visé se situe à un niveau méta-communicationnel.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon