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Le roman pour adolescents et les outils numériques, évolution d?un paysage éditorial. comment internet devient le tremplin du marketing littéraire et des grands formats jeunesse ?

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par Adriana Tourny
Université de Villetaneuse Paris XIII - Commercialisation du livre - en alternance 2011
  

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III. Adopter le numérique pour séduire les digitals natives, une obligation future.

A. Librairies et bibliothèques, ce qui change pour le roman ados.

Ces dernières années, et notamment de par l'arrivée de la e-plateforme Amazon, les jeunes lecteurs se sont détournés de ces lieux de ventes et d'échanges que sont les librairies et les bibliothèques. Pour combattre ce désintéressement, certains libraires et bibliothécaires n'hésitent pas à se lancer, eux aussi, dans la numérisation de leurs catalogues. Certains vont même jusqu'à revoir leur fonctionnement total en se relookant grâce à Internet et au multimédia.

1. Les librairies se numérisent.

L'avenir du livre change mais il ne meurt pas. Quelques professionnels, en particulier, ont compris qu'il fallait avancer et non plus regarder avec nostalgie vers l'ancien mode de fonctionnement du marché du livre français.

Le paysage semble alarmant lorsqu'on voit de grandes librairies parisiennes déposer le bilan ou de petites librairies traditionnelles perdre leur clientèle face aux espaces culturels. Les libraires sont assaillies de nouveautés et ne peuvent plus assurer la vente des livres de fonds. Les livres doivent se vendre rapidement car, en seulement trois mois, ils peuvent être retournés chez l'éditeur. C'est d'ailleurs Amazon qui se charge aujourd'hui d'assurer la vente de ce que les libraires ne peuvent plus stocker ou mettre en place par manque d'espace. De plus, débordés par les flux allers et retours, les libraires n'ont plus véritablement le temps de conseiller leurs clients. La proximité entre vendeurs et lecteurs, les conseils de lecture d'un vrai professionnel et d'un passionné sont les valeurs ajoutées des petites librairies. Par conséquent, les clients, en voyant disparaître ces qualités, préfèrent se rendre directement sur Internet. Là-bas, ils trouveront, sans avoir à se déplacer, des conseils de lecture grâce aux « Avis des internautes » que pratiquent Amazon ou Fnac.com.

Concernant les jeunes lecteurs, il est clair que les librairies leur apparaissent aujourd'hui comme « démodées » mais aussi éloignées de leurs pratiques. Habitués aux grands espaces où l'on trouve autant de livres que de disques, les adolescents se détournent des petites librairies pour les grandes enseignes. Les librairies n'ont pas su se renouveler à temps afin de garder cette clientèle. En effet, les éditeurs remarquent que les librairies n'ont souvent pas d'espace réservé aux adolescents et jeunes adultes. Il y a le coin Jeunesse, le coin Littérature Générale, le coin Politique, le coin Polar et enfin le coin Poche mais il est très rare de trouver un coin Ados et Jeunes Adultes. Certains libraires commencent à faire cette distinction mais cela prend du temps. Il faut sélectionner les livres et choisir si tel ou tel roman serait plutôt jeunesse ou ado. Par ailleurs, persiste le problème d'espace à accorder à un nouveau rayonnage.

Les libraires qui perdent la jeune clientèle doivent alors se passer d'un chiffre d'affaires qui devient de plus en plus conséquent. Car si les jeunes ne sont pas les plus gros lecteurs, il est évident que les grands formats jeunesse sont un segment de l'édition en forte croissance qui fidélise un public et fait beaucoup vendre105. Les adolescents pris dans une saga ou une collection n'hésitent pas à se déplacer pour avoir leur livre le plus rapidement possible. C'est ici que les e-librairies peuvent perdre face aux points de vente physique. Librairies et grandes enseignes sont de véritables concurrents. La Fnac et, maintenant, les Espace Culturels Leclerc, attirent les consommateurs et particulièrement les jeunes. Ils ont de l'espace pour faire de bonne mise en place et pour stocker plus de produits. Ils suscitent l'achat d'impulsion. Tout est pensé et organisé afin de pousser le consommateur à acheter, telles que les PLV qui défilent dans le magasin, présentant des dizaines de nouveaux romans. Les consommateurs s'y rendent presque en famille pour se promener, voir les nouveautés en film, en musique ou en livre, parfois même sans idée particulière de ce qu'ils vont acheter. En effet, les tables, les PLV et les rayons sont étudiés pour pousser le consommateur à acheter de tout. La proximité entre clients et vendeurs n'est pas l'élément sur lequel ces enseignes reposent. Au contraire, la Fnac a aujourd'hui une réputation navrante en ce qui concerne l'espace librairie puisque ce ne sont plus des libraires qui y travaillent mais majoritairement des étudiants ou des caissiers qui ne connaissent pas plus le monde du livre que le vendeur d'ordinateurs.

105 Annexe D. Saisonnalité des ventes des romans ados.

Pour remédier à ces réels problèmes commerciaux et marketing, quelques gros libraires se sont lancés dans le numérique. Voyons ce qu'il se passe et qui, de tous, semble avoir la meilleure stratégie.

Ombre Blanche, la librairie toulousaine connue de tous, a un site Internet très fourni. Les adolescents y ont d'ailleurs une place réservée dans la rubrique Jeunesse. Le fait d'avoir dissocié les adolescents des autres jeunes lecteurs est une bonne chose. Cependant, comme nous l'avons compris, les adolescents n'aiment pas être considérés comme des << jeunes » et pourraient ne pas être attirés par cette segmentation.

C'est pourquoi la librairie bordelaise Mollat, l'une des plus grosses librairies indépendantes de France, a dédié un onglet spécialement aux adolescents sans les inclure dans le secteur jeunesse. La librairie va même plus loin dans son investissement en faisant une page << Questions d'ados » où sont présentés tous les essais et livres pratiques pouvant intéresser les adolescents comme la philosophie, la santé etc. Mollat a bien compris que les adolescents ne sont pas des enfants, qu'ils doivent être traités séparément des autres lecteurs car ils n'ont pas les mêmes envies et les mêmes préoccupations. De plus, en mettant les ados en avant sur son site, la librairie Mollat démontre que l'utilisation d'Internet est censée améliorer la communication avec les adolescents et les jeunes adultes, en priorité. Ces deux grosses librairies offrent évidemment la possibilité de commander les livres sur leur site et de les recevoir rapidement à domicile. Le principe est bien de concurrencer Amazon et Fnac.com.

Toutefois, il manque un élément crucial sur ces deux sites : le conseil du libraire ou des internautes. L'interactivité est absente alors qu'Amazon et Fnac.com reposent principalement sur la proximité entre consommateurs, ainsi qu'entre professionnels et consommateurs, que permet Internet.

La Fnac est donc un bon élève du numérique. Avec son site de produits multiculturels, la Fnac a toutefois cherché à mettre en avant les adolescents et les jeunes adultes. Le fait d'ajouter les jeunes adultes comme cible est un critère marketing très intelligent qui souligne une prise de conscience de ce que représente aujourd'hui le segment << adolescents » et plus largement, le segment << jeunesse ». Ainsi, la Fnac.com propose une forte actualité de la fiction jeunesse avec une rubrique Nouveautés, Meilleures ventes, Top des romans à paraître et Coups de coeur. Le reste du catalogue est classé sous différentes classifications : les vampires, les livres Girly, les livres d'aventures et de survie, les livres

pour garçons et jeunes garçons, le Hit des séries, les éditeurs et collections phares, les essais, les livres de santé etc. La Fnac travaille sur le même concept qu'Hachette avec son site Lecture Academy, celui des communautés. Créer plusieurs communautés favorise le ciblage marketing et aide à guider et fidéliser la jeune clientèle. Il y en a donc pour tous les goûts et contrairement à ce que les éditeurs peuvent penser, la Fnac met en avant des éditeurs plus ou moins importants. Dans la rubrique des éditeurs phares on trouve par exemple Thierry Magnier aux côtés d'Hachette. Si les points de vente physiques de la Fnac insistent sur les potentiels grands acteurs, le site permet de rééquilibrer la promotion entre petits et gros éditeurs.

Sur le même modèle qu'Amazon, la Fnac.com propose aux internautes-lecteurs de s'exprimer. Ils peuvent ainsi donner, en un clic, une note à un roman et ajouter un commentaire, négatif ou positif. L'échange entre pairs, primordial pour les jeunes lecteurs, est respecté ici. Les internautes se prêtent au jeu. Pour le Tome 1 de la longue série Journal d'un vampire, 138 internautes ont donné leur avis, construisant une réelle discussion autour du roman. Aux côtés des avis des lecteurs sont proposés des avis de vendeurs mais aussi un mot de l'éditeur. La promotion est parfaite car complémentaire. La Fnac a réussi un tour de force en donnant aux adolescents - jeunes adultes le premier rôle et le contrôle de la rubrique. Les « adonautes », comme ils sont appelés par la Fnac, ont trouvé leur repère.

2. Les bibliothèques, de nouveaux espaces physiques et numériques.

Les librairies ne sont pas les seules à s'ouvrir aux digitals natives. Les bibliothèques ont elles aussi décidé qu'Internet serait leur renaissance et non leur bourreau. Lecture Jeune, fondée par des bibliothécaires, s'est évidemment penchée sur le sujet106. Nous découvrons que les bibliothèques ne se contentent pas de numériser leur catalogue mais bien de faire intervenir les adolescents dans la création numérique. Les bibliothèques ont toujours organisé des activités pour les jeunes mais surtout pour les enfants. Aujourd'hui, alors que les jeunes désertent peu à peu ces lieux de lecture, les bibliothécaires ont décidé de capter l'attention des adolescents. Il s'agit ici d'établir un lien continu avec les ados et leurs pratiques quotidiennes. Pour cela, les blogs sont un support

106 Op.cit. Lecture Jeune, n°133, p.32.

parfaitement adapté. La bibliothèque de Saint-Raphaël, par exemple, tient un blog dédié aux adolescents. Ainsi, des actualités sur des jeux vidéo ou des films viennent alimenter l'intérêt pour la lecture. Le blog est actualisé presque quotidiennement ce qui lui permet de rester proche des habitudes et des attentes des adolescents. Dernièrement, le blog s'est intéressé à la musique et plus particulièrement à la musique en streaming. Ici, on ne condamne pas les jeunes de ne pas acheter les albums mais au contraire, on les conseille sur les sites les plus pratiques, les nouveautés américaines etc. Le blog propose donc plusieurs catégories susceptibles d'intéresser les adolescents : La Médiathèque, À lire, Art - Musique, BD, DOFUS (jeu de stratégie pour ordinateur), Geek, Info et Jeux. Une fois encore ce blog nous rappelle celui de Lecture Academy qui propose aux adolescents plus que de simples conseils de lecture mais un univers multiculturel et communautaire. Les adolescents peuvent laisser des commentaires, participer à des jeux concours et même s'entraîner à des jeux vidéo comme Tetris. La bibliothèque de Saint-Raphaël a compris que la séduction d'un adolescent passe par l'échange et par son implication dans la communauté culturelle.

Si Internet est un moyen pour les bibliothèques de renouer des liens avec le public adolescent et jeune adulte, elles s'interrogent aussi sur les réaménagements de leurs espaces physiques. Une étude a été menée en 2008 auprès de six bibliothèques contrastives : Lille, Nanterre, Auxerre, Toulouse, Dinan et Graulhet. Cette enquête qualitative et quantitative a abordé, parmi plusieurs sujets, celui de l'espace dédié aux adolescents et jeunes adultes.

Nous ne présenterons que deux de ces bibliothèques, dont les projets, parfois précurseurs, sont symptômes d'une volonté de changement et de modernisation.

BM Toulouse :

Espace Intermezzo : 500m2 créés pour attirer un public jeune, pour proposer un lieu passerelle, un espace de découverte de la lecture. Aménagement convivial, peu d'étagères, beaucoup de fauteuils, de tables, des téléviseurs et des écrans. Aucune connotation «ado» dans la déco ou le mobilier. L'équipe ne souhaitait pas flécher un espace ado, mais estomper les segmentations et les cloisonnements entre genres, âges, types de documents...et métisser les publics. Les fonds (3000 documents) sont décloisonnés : la fiction (la littérature ado, chick lit, classique, et contemporaine) côtoie les documentaires

adultes et jeunesse mêlés (offrant une première approche de chaque discipline), DVD documentaires, livres audios, albums susceptibles d'intéresser les ados voire les adultes, presse (une trentaine d'abonnements), etc. Une douzaine de postes Internet sont proposés. Les jeux consoles sont demandés et envisagés.

BM Auxerre :

Un pôle « Ados » a été créé en 1984 sous l'impulsion de la municipalité et de l'association de Lecture Jeunesse. 150 m2 sont aménagés dans la salle Jeunesse mais celleci attire principalement des jeunes adolescents dès la 6° et non les lycéens et jeunes adultes qui préfèrent se rendre à l'espace adulte. Pour l'aménagement de l'espace, la bibliothèque a opté pour des couleurs vives et le confort. Les ados y trouvent des livres, des BD, des revues et du multimédia. Le parascolaire a été volontairement exclu de l'espace. En effet, le pôle « Ados » est censé être un espace de détente et non de travail. Le choix de mettre l'espace ado à proximité de celui de la jeunesse permet également aux jeunes d'aller chercher des documents jeunesse sans avoir l'impression de « déchoir ». Un groupe de réflexion s'est constitué au sein de la bibliothèque afin de mieux cibler le public. Les adolescents constituant 10% des inscrits, leur avis sera pris en compte dans la réorganisation des espaces de la bibliothèque.

Les résultats de l'enquête sont très significatifs. Ceux qui sont pour : 78% des jeunes se positionnent en faveur d'un espace dédié, surtout les pré-ados 11-14 ans (notamment les filles).

Raisons évoquées :

· Il n'y a rien entre espace jeunesse et adulte.

· Pas envie d'être avec des adultes (dans un espace sérieux) ni avec des enfants.

· Côtoyer des jeunes qui ont les mêmes goûts, pour se retrouver entre eux, se distraire et discuter.

· Pour trouver facilement les documents qu'ils cherchent.

· Dans un espace fermé ou un espace décloisonné (pour circuler), un espace à l'image d'une MJC (jeux, personnel jeune) ou d'un grand magasin (Fnac) = une bulle pour les jeunes (avec des collections adaptées, un fond de livres diversifié, des bornes d'écoute musicale et une ambiance détendue).

Une nouvelle enquête menée cette fois par la Bibliothèque Georges Pompidou107 est consacrée à la fréquentation des bibliothèques par les jeunes à l'heure d'Internet. Si l'image de la bibliothèque apparaît << globalement positive >>, faisant l'objet d'un << consensus assez général, même chez les non-fréquentants >>, l'étude met en évidence << une sorte de familiarité distante >>, parfois proche d'une certaine indifférence. << En dépit des efforts des bibliothécaires, les bibliothèques souffrent d'un déficit d'image, résume Françoise Gaudet, responsable du service des études de la BPI. Il y a une grande méconnaissance de ce qu'elles sont et de ce qu'elles offrent >>108.

Pour les jeunes, les bibliothèques restent le lieu de l'étude, du silence, voire de la contrainte. << La médiathèque, c'est comme l'école. On a l'impression de quitter l'école pour aller à l'école >>, regrette ainsi Fahim, 17 ans. << Quand tu es là-bas, ils te disent : "Ne fais pas de bruit." Trop de restriction, ça ne donne pas envie d'y aller >>109.

L'étude s'intéresse aussi aux raisons du << décrochage >> des jeunes, au tournant de l'adolescence. Parmi les raisons citées, on trouve le manque de temps, la perte du goût de la lecture, les horaires d'ouverture incompatibles avec l'emploi du temps scolaire, le choix d'autres sources d'information dont Internet et les grandes surfaces généralistes. Pour leurs recherches, 73 % des jeunes interrogés déclarent ainsi utiliser Internet, quand 43 % font la démarche d'aller à la bibliothèque.

Au final, la bibliothèque reste un espace marqué par l'étrangeté. Gaëlla, 17 ans, évoque << un environnement assez mystérieux >>. Hosni, 16 ans, partage son désarroi : << J'ai eu une impression de vide, je ne savais pas quoi faire, où aller, avec qui >>.

<< La bibliothèque est encore un outil extrêmement complexe pour les jeunes, réagit Françoise Gaudet. Nous devons avant tout rendre compréhensible cet univers qui peut paraître hostile, mais un travail sur l'image des bibliothèques paraît aussi nécessaire >>. L'enquête suggère plusieurs pistes. Elle préconise de replacer le jeune public au coeur de la vie des bibliothèques, avec une offre plus diversifiée, la création d'instances lui permettant de participer aux acquisitions et à la définition des programmes d'animation, un accès facilité à l'informatique et à Internet.

107 BPI, Enquête de la Bibliothèque du Centre Pompidou, Les 11 - 18 ans et les bibliothèques municipales. Paris, publiée en 2010, réalisée en 2009.

108 Ibid.

109 Ibid.

Nous avons vu que de plus en plus d'éditeurs jeunesse créent des sites Internet et s'allient aux réseaux sociaux pour la promotion de leurs romans ou collections. Cependant, derrière cette cyberpromotion se cache aussi un moyen de mieux étudier son public, de le comptabiliser, de le suivre et de comprendre ses goûts.

B. Internet devient un baromètre utile aux éditeurs pour de futures publications.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand