CONCLUSION
Ces dernières années, la Cour européenne
des droits de l'Homme a montré un intérêt grandissant
à protéger les droits des étrangers. Qu'il s'agisse
spécifiquement de demandeurs d'asile ou non, les droits qui ont
été découverts ont permis une avancée certaine vers
la reconnaissance d'un droit d'asile européen. Ce droit n'a toujours pas
été inscrit dans la Convention et le dernier projet de
réforme en ce sens date du début des années
90204. Il y aurait pourtant une cohérence certaine à
le faire aujourd'hui.
La Cour européenne ne le dit pas mais sa jurisprudence
révèle ses intentions. Les affaires amènent elles
mêmes la Cour à traiter du sujet et les premiers pas vers la
reconnaissance du droit d'asile par les juges européens
sont d'ailleurs anciens. Les affaires récentes ont simplement
montré qu'il y avait urgence à inscrire ce droit dans la
Convention.
Le secrétaire général du Conseil de
l'Europe l'a avoué récemment : « il est évident que
la question de la gestion des frontières, du droit d'asile et du retour
des demandeurs d'asile déboutés a des implications
particulières au regard de la CEDH 205 ». Cependant,
c'est uniquement grâce à la protection par ricochet mise en oeuvre
par la Cour que les requérants demandeurs d'asile peuvent faire valoir
leurs droits. L'article 3 de la Convention européenne en est le meilleur
exemple car il a ouvert des perspectives incroyables aux demandeurs d'asile. De
même, la Cour s'est référée aux articles 13, 5 et 8
de la Convention pour défendre certains droits procéduraux et
substantiels à leur égard. Cependant, cette technique
présente de réels inconvénients notamment au regard du
principe de sécurité juridique. Aucune
prévisibilité n'est possible alors que la Cour fait face à
un nombre très important de personnes susceptibles d'être
concernées par la violation du doit d'asile.
De même, l'adhésion prévue de l'Union
européenne à la CEDH augmentera le nombre d'affaires portant sur
le droit d'asile car la Cour européenne devra vérifier la
conventionalité de la législation européenne. L'Union
européenne a justement mis en place un véritable régime
juridique entourant la demande d'asile. Le contentieux à ce propos sera
donc potentiellement important.
204 Dans sa recommandation 1236 de 1994, l'Assemblée
parlementaire proposait au Conseil des Ministres de modifier la Convention pour
y inscrire un droit d'asile en fondant le texte à adopter sur les
suggestions formulées dans la recommandation 293 (1961) ou dans l'Annexe
II au rapport de 1988 sur le droit d'asile (Doc 5930).
205 Document d'information SG/Inf(2011)10 rév, 10 juin
2011
La Cour avance ainsi sur un terrain qui lui est normalement
interdit et réussit à protéger le droit d'asile en
quasi-totalité. Mais la jurisprudence de la Cour ne peut pas remplacer
la force que présenterait une inscription du droit d'asile dans le texte
européen. De plus, à l'heure où la réforme de la
Cour est au centre des préoccupations, il ne fait aucun doute qu'une
mention expresse de tous les droits protégés serait une
solution.
Qu'attendre alors ? Est-ce que le droit d'asile ne doit tenir
qu'à l'activisme de la Cour ? Et peut-elle légitimement continuer
ainsi sans trop s'éloigner de la Convention et donc de son office?
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