II- Des banques de petites tailles et peu
compétitives
Les banques jouent un rTMle essentiel dans le financement de
l'économie tunisienne. En effet, plus de 95% des concours à
l'économie transitent par ces institutions financières.
Le financement concerne aussi bien le développement des
entreprises, que le renouvellement de l'appareil productif ou de l'innovation
et l'accompagnement des entreprises à l'international. Il concerne
également le cycle d'exploitation. Les changements politiques et sociaux
que la Tunisie est en train de vivre appellent une transformation substantielle
dans les fondements même du métier de la Banque.
Les banques sont ainsi appelées à revoir le
partage de la valeur créée. Du point de vue des entreprises, et
en considérant les résultats de l'enquête menée, les
marges réalisées par les établissements financiers sont
très élevées et dénotent d'une relation de type
oligopolistique dans la quelle l'acteur le plus fort, en l'occurrence la
banque, est en train d'imposer ses conditions. Les taux d'intérêt
sont élevés et les garanties toujours exigées.
En outre, le système bancaire tunisien composé
d'une trentaine de banques, semble sur- bancarisé, et ne permettant pas,
par conséquent, un financement efficient de l'économie. En effet,
un tel nombre de banques, laisse supposer que celles-ci ne
bénéficient pas de rendements d'échelle.
L'industrie bancaire est en effet, fragmentée et
dominée par des banques de petites tailles. Les trois premières
banques ne représentent que 60% des actifs du secteur contre 86% en
Jordanie et plus de 90% au Maroc. Ces taux sont par contre supérieurs
à ceux observés en Malaisie et en Turquie.
La fragmentation des banques constitue un double handicap.
Elle les prive de réaliser les économies d'échelle et de
gammes indispensables à l'amélioration de leur
compétitivité. Ce faisant, elle réduit les
possibilités de leur implantation à l'étranger.
A cet l première tunisienne 48 ème
effet, a banque à
pointe la place sur le plan africain (STB)
et son total de bilan 1/39 ème
représente du total de bilan de la première banque
africaine (la
Standard Bank Group, Afrique du Sud). A titre de comparaison,
deux banques marocaines
ème)
se classent dans le top 10 des b anques africaines. Il s'agit d'
Attijari Wafa Bank (7 et du
Crédit Populaire du Maroc (10ème).
L'émergence de grandes banques tunisiennes ayant une
stratégie claire d'internationalisation avec un plan de
développement précis semble devenir une nécessité.
Les entreprises tunisiennes sont en effet de plus en plus présentes sur
les marchés européens, arabes et africains.
Des operations de croissance interne par augmentation de
capital ou externe par fusions amicales et negociees devraient etre suscitees
par les Autorites publiques.
A ce propos signalons quÕune operation de fusion entre
la STB et la BH a ete envisagée au cours de la derniere periode. Malgre
les arguments qui viennent d'être avances nous pensons quÕune
telle opération, qui serait realisée dans la precipitation et
sans concertation prealable, ne parait pas souhaitable. Ce genre
dÕactions realisees avec empressement risquerait en effet de creer plus
de problemes quÕil ne va en resoudre. La recherche de synergies serait
en effet handicapée par le choc de cultures internes qui sont tres
fortes dans les deux institutions, par les conflits aux niveaux des systemes
dÕinformation ainsi que par la resistance aux changements
organisationnels qui accompagneraient une telle operation.
LÕautre alternative consisterait à encourager
(ou pousser) les banques privées à réaliser des operations
de fusions. Une première solution serait dÕaugmenter le capital
minimal exigé (100 Md actuellement jusquÕà 2014). Nous
pensons quÕen dépit des bienfaits dÕun niveau de
capitalisation élevé , cette mesure nÕaurait pas
dÕincidence directe sur la taille des banques. En Afrique du Sud par
exemple, le capital minimal est de 37 millions de dollars. Ceci nÕa pas
empêché les banques sud africaines dÕoccuper les cinq
premières places à lÕéchelle du continent. En
même temps, l'internationalisation dÕAttijari Wafa Bank au Maroc
sÕest faite par le biais dÕemprunts obligataires. Les leviers de
la croissance semblent etre situés ailleurs quÕau niveau des
fonds propres.
Tableau 4 : Classement africains des banques
tunisiennes
|
2009
|
2010
|
2011
|
1 ere Banque africaine/
Banque Tunisienne
|
STB
|
47
|
44
|
48
|
39 fois
|
BIAT
|
50
|
42
|
50
|
41
|
BNA
|
49
|
47
|
53
|
42
|
BH
|
57
|
52
|
56
|
50
|
Amen Bank
|
67
|
60
|
60
|
55
|
ATB
|
69
|
61
|
70
|
66
|
Attijari
|
74
|
65
|
69
|
66
|
BT
|
83
|
76
|
83
|
84
|
UIB
|
89
|
83
|
53
|
92
|
UBCI
|
104
|
102
|
109
|
120
|
Source : Jeune Afrique, différents
numéros.
Le taux de bancarisation reste cependant faible en Tunisie. La
densité par agence est de 12000 habitants (Maroc : 6000 habitants par
agence, pays de lÕOCDE moins de 2000 habitants par agence).
Les tableaux 5 et 6 donnent quelques indications en rapport avec
le taux de bancarisation et l'inclusion financiere :
Tableau 5 : Inclusion financière (chiffres
2009)
Nombre d'agences par
100000 habitants (> 15 ans) Nombre de comptes par 1000
habitants (> 15 ans)
Nombre ATM par adulte (>15 ans)
Nombre de comptes de dépTMts par 1000 adultes ((>15
ans)
|
Jordanie Malaisie Maroc Afrique du sud Tunisie
Turquie
16,17 11,5 11,59 8,03 13,3 17,3
160 972 296 175 315
43,25 16,64 54,85 14,26 40,98
814,23 2226,74 277,36 671,98 788,13 1851,15
|
Source : Banque mondiale, WDI, 2011
Le nombre d'agences par 100000 adultes a atteint selon les
derniers chiffres publiés par la Banque Mondiale, 13,3 agences en
Tunisie contre 11,59 au Maroc et 17,3 en Turquie. La disponibilité des
services bancaires présente néanmoins, de fortes
disparités entre les régions. Le tableau 6 montre que dans le
centre ouest du pays, il existe une agence pour 22000 habitants alors que dans
le grand Tunis ce chiffre passe à 7000 habitants. Par ailleurs,
l'utilisation des services bancaires semble être tres en retard
comparativement à d'autres pays ayant un niveau de développement
similaire. Ainsi, le nombre de comptes pour 1000 adultes est seulement de 175
en Tunisie contre 296 en Afrique du Sud, 315 en Turquie et 972 en Malaisie.
Enfin, le nombre de machines ATM est de 14,26 en Tunisie alors qu'il est
supérieur à 40 dans les autres pays.
Tableau 6 : R6seau bancaire : repartition par region au
30 septembre 2011
|
Population par agence
|
Nombre d'agence
|
% Nombre d'agences
|
Centre ouest
|
22072
|
92
|
6,71%
|
Grand Tunis
|
7001
|
551
|
40,16%
|
Nord ouest
|
14500
|
68
|
4,96%
|
R6gion cTMtière
|
9354
|
575
|
41,91%
|
Sud
|
11536
|
86
|
6,27%
|
Total general
|
12618
|
1372
|
100%
|
Source : APTBEF et calculs des auteurs
La derniere mesure en rapport avec la structure du secteur que
nous présentons est la concentration. Le tableau 7 retrace ainsi, pour
le même groupe de pays, le poids des trois premières banques sur
la derniere décennie.
Tableau 7. Concentration bancaire : Total des actifs des
trois premières banques en % du total du total des actifs des
banques
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
Moy.
|
Egypte
|
0,57
|
0,58
|
0,57
|
0,57
|
0,55
|
0,58
|
0,59
|
0,57
|
0,55
|
0,53
|
0,57
|
Jordanie
|
0,85
|
0,90
|
0,90
|
0,90
|
0,89
|
0,85
|
0,85
|
0,85
|
0,86
|
0,86
|
0,87
|
Malaisie
|
0,48
|
0,44
|
0,40
|
0,40
|
0,41
|
0,41
|
0,46
|
0,47
|
0,49
|
0,50
|
0,45
|
Maroc
|
0,53
|
0,62
|
0,63
|
0,64
|
0,68
|
0,66
|
0,66
|
0,78
|
0,91
|
0,91
|
0,71
|
Tunisie
|
0,45
|
0,45
|
0,45
|
0,46
|
0,46
|
0,45
|
0,45
|
0,49
|
0,54
|
0,59
|
0,48
|
Turquie
|
0,74
|
0,66
|
0,74
|
0,71
|
0,70
|
0,96
|
0,50
|
0,46
|
0,42
|
0,39
|
0,63
|
Source : Banque mondiale, Financial Development and structure
Database
Il apparait que ce poids a été en moyenne de
l'ordre de 48% sur l'ensemble de la décennie. Nous notons qu'il a
néanmoins augmenté de manière significative à
partir de 2007, passant ainsi de 49% à 59% en 2009.
Comparé aux pays du groupe, ce poids moyen apparait
nettement inférieur à celui observé au Maroc oü il
est égal à 71% et à celui de la Jordanie qui est de
l'ordre de 87%. Ce constat confirme l'image tracée
précédemment qui est celle d'un secteur fortement
émietté composé d'un grand nombre de petites banques.
Aucune de celles-ci ne dominant significativement le secteur. Cependant ce
nombre élevé ne se traduit pas par une forte bancarisation et une
grande inclusion financière. Les différentes mesures moyennes de
ces deux dimensions sont relativement faibles par rapport celles d'autres pays.
Leur décomposition en paramètres régionaux
révèle également d'assez fortes disparités.
|
|