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Quelles sont les dérives dont il faut se méfier dès lors qu'on utilise des incentives pour rémunérer la performance?

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par Nadia LAKHAL
Université Paris Dauphine - Master en finance contrôle de gestion 2009
  

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LAKHAL NADIA

Quelles sont les dérives dont il faut se méfier dès lors qu'on utilise des incentives pour rémunérer la performance ?

Master 1 Gestion

Majeure : Contrôle de gestion et système d'information

UE 301 - Approche Stratégique du Contrôle de Gestion 2008/2009SOMMAIRE

INTRODUCTION 3

I. LIER LA RÉMUNÉRATION À LA PERFORMANCE 4

I.A. OBJECTIFS STRATÉGIQUES DES INCENTIVES 4

I.A.1. THÉORIE DE L'AGENCE 4

I.A.2. INSTRUMENT DE MOTIVATION ET DE COHÉSION 4

I.A.3. INSTRUMENT DE FIDÉLISATION ET DE SÉLECTION 5

I.A.4. ATOUT FISCAL 6

I.B. MESURE DE LA PERFORMANCE 6

I.B.1. ASSIGNATION DES OBJECTIFS AUX CADRES 6

I.B.2. CONTRÔLABILITÉ 7

I.B.3. INDICATEURS 7

II. INCONVÉNIENTS DE LA RÉMUNÉRATION INCITATIVE 8

II.A. RÉFLEXION « COURTERMISTE » 8

II.B. LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES 9

II.B.1. COHÉSION 9

II.B.2. MOBILITÉ DES MANAGERS 9

II.C. L'ETHIQUE 10

II.C.1. CHANGEMENT DE COMPORTEMENTS DES CADRES 10

II.C.2. MANIPULATION DE L'INFORMATION 11

II.D. LES INCENTIVES NE PÉNALISENT PAS LA MAUVAISE PERFORMANCE 12

II.E. COÛTS SUPÉRIEURS AUX BÉNEFICES 12

CONCLUSION 14

BIBLIOGRAPHIE 16

INTRODUCTION

La rémunération des différents acteurs de l'entreprise et notamment, celle des dirigeants est aujourd'hui de plus en plus contestée. Dans un contexte où l'économie mondiale est en récession à cause de la crise bancaire, impulsée par la crise des sub-primes, les « parachutes dorés » dont bénéficient les dirigeants malgré les mauvais résultats de leur entreprise sont mal perçus. Et les incentives sont donc remis en cause.

Les incentives sont un outil managérial de motivation des salariés, né aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Ce terme anglo-saxon peut être traduit par « motivation » en français. Il englobe tous les bonus que peuvent recevoir les salariés, cadres et dirigeants : les stocks options, les primes individuelles ou collectives, les voitures de fonction ...

La structure de la rémunération est divisée en deux composantes qui ont deux objectifs distincts : une partie fixe qui a pour objectif de sécuriser et une partie variable qui constitue une rémunération incitative. Nous nous intéresserons dans notre travail à la partie variable de la rémunération.

Les incentives servent à récompenser la performance au sein de l'entreprise. A l'origine, cette pratique concernait l'animation des réseaux de ventes, mais aujourd'hui, ce modèle s'étend à l'ensemble des fonctions de l'entreprise. Toutefois, cette rémunération est plus simple à mettre en oeuvre pour les cadres supérieurs et les dirigeants que pour l'échelon intermédiaire où l'on essaie de privilégier l'égalité. Durant notre étude, nous nous intéresserons d'ailleurs qu'à la situation du top management.

Dans ce contexte de remise en cause des incentives, nous pouvons donc nous demander quelles sont les dérives dont il faut se méfier dès lors qu'on utilise des incentives pour rémunérer la performance. Nous étudierons tout d'abord pourquoi et comment peut-on lier la performance à la rémunération puis nous aborderons les limites de l'utilisation des incentives.

I. LIER LA RÉMUNÉRATION À LA PERFORMANCE

I.A. OBJECTIFS STRATÉGIQUES DES INCENTIVES

I.A.1. THÉORIE DE L'AGENCE

Nous allons nous intéresser aux entreprises ayant un capital dilué. Dans ce cas, la problématique de la rémunération des cadres dirigeants est liée à la théorie de l'agence développée par Jensen et Meckling en 1976. Dans ce type d'entreprises, une asymétrie d'intérêts et d'information existe entre les actionnaires qui apportent les ressources et qui en contrepartie recherchent la création de valeur, en particulier la performance boursière et les dirigeants qui prennent les décisions managériales. Les actionnaires doivent alors inciter les dirigeants à s'aligner sur leurs intérêts. Une politique de rémunération incitative peut être mise en place.

Les dirigeants sont ainsi incités à prendre les décisions les plus créatrices de valeur pour les actionnaires en se voyant offrir un ensemble d'incitations de nature à rapprocher leurs intérêts financiers de ceux des actionnaires, en particulier par l'attribution d'options de souscription d'actions. En effet, l'amélioration du cours de l'action profite également aux dirigeants. Selon l'enquête de C. Alcouffe de 2004, cette politique de rémunération est d'autant plus pratiquée dans les grands groupes, plus difficile à contrôler. Elle constitue un outil de délégation.

I.A.2. INSTRUMENT DE MOTIVATION ET DE COHÉSION

L'avantage premier des incentives est que les cadres vont travailler plus pour pouvoir améliorer leur résultat et leur rémunération. Dans ce cas, la rémunération de la performance est simplement la rétribution a posteriori d'un résultat constaté.

Cependant, la rémunération incitative possède plusieurs intérêts pour la gestion des ressources humaines. Dans le Contrôle de gestion social, B. Martory souligne qu'elle constitue « l'instrument, le levier, qui incite, motive et agit sur les ressources pour atteindre les résultats prévus ». Elle permet d'inciter les managers à exercer le bon niveau d'effort, et de s'impliquer plus en rendant une partie de leur rémunération liée aux résultats économiques de l'entreprise. La rémunération à la performance est également une façon de « développer le sentiment d'appartenance à l'entreprise » (B.Martory) en leur transmettant et faisant internaliser les objectifs de l'entreprise.

Il ressort d'une enquête mondiale, «Global Equity Incentives», réalisée par Price waterhouse Coopers, ayant pour but d'analyser les «equity incentives plans», que les entreprises estiment de plus en plus que ce type de «plans» a une influence positive sur la motivation des top managers.

I.A.3. INSTRUMENT DE FIDÉLISATION ET DE SÉLECTION

La rémunération incitative constitue également pour gérer les ressources humaines un instrument de fidélisation et de sélection.

Bien qu'ils récompensent en théorie l'atteinte des objectifs, les incentives peuvent être considérés parfois disproportionnés par rapport à la performance. En effet, ces « larges » rétributions sont un bon moyen d'attirer et de fidéliser les top-managers performants au sein de l'entreprise, rares sur le marché du travail. Cet argument est d'autant plus avancé dans un contexte actuel marqué par la mondialisation et la mobilité des « bon-managers » français susceptibles d'êtres débauchés par les firmes américaines où les rémunérations sont censées être plus attractives. Les incentives ne sont donc pas uniquement un instrument de rétribution. Ils constituent un mode de sélection caché.

Dans l'article intitulé « La rémunération des dirigeants sous forme d'actions et de stock-options », Philippe Desbrières explique que l'attribution des plans d'actions est une stratégie permettant de retenir les bons managers. « La perspective de réaliser un gain financier si les actions prennent de la valeur les retient dans l'entreprise. La revente des actions acquises ne s'effectuant généralement qu'après plusieurs années (d'autant plus que des périodes d'indisponibilité des stock-options et d'incessibilité des actions détenues sont imposées), les managers doivent demeurer en fonction dans la firme pour réaliser ce gain ». Ce mécanisme les "menottes dorées" (golden handcuffs) consiste donc à retenir le bon dirigeant par l'argent.

I.A.4. ATOUT FISCAL

Le développement des incentives s'explique aussi par une optimisation fiscale pour la société. De nombreuses lois ont été créées comme la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié permettant l'allègement fiscal. L'entreprise peut, par exemple, déduire certaines charges dues à l'attribution des stock-options ou des actions gratuites (S. Guimbert et J-C Vallat, « La fiscalité des stock-options : une perspective internationale »). De plus, les incentives ne rentrent pas tous dans la rémunération brute et aucune cotisation patronale n'est à payer.

I.B. MESURE DE LA PERFORMANCE

La mise en place de la rémunération incitative implique l'assignation d'objectifs clairs et précis aux cadres. Ils doivent pouvoir maîtriser leurs actions. Finalement, la performance est mesurée et de son niveau dépend la rémunération.

I.B.1. ASSIGNATION DES OBJECTIFS AUX CADRES

Si la mesure de la performance s'avère difficile et imparfaite, l'assignation d'objectifs censés représenter la performance peut être également parfois aléatoire et imparfaite. Ceci constitue une première difficulté dans la mise en place des incentives. Selon Daniel Held, la fixation d'objectifs est imparfaite car elle porte souvent uniquement sur des axes financiers, en conséquence, elle réduit la motivation à s'engager pour une cause, pour une finalité. Or il s'agit de la seule motivation viable à long terme.

De plus, des objectifs mal assignés sont sources de conflits, les objectifs peuvent être perçus comme injustes et ainsi entraînés l'insatisfaction voire la démotivation. Lors de l'adoption d'un système de rémunération lié à la performance, la première difficulté résulte donc dans la fixation d'objectifs qui doit être effectuée avec précision.

I.B.2. CONTRÔLABILITÉ

Le manager doit pouvoir contrôler les actions dont il a la responsabilité. Or l'environnement économique est souvent instable, incertain comme le montre la période de crise financière que nous traversons actuellement. En conséquence, les résultats peuvent se trouver affectés par la crise et les objectifs fixés ne peuvent donc plus être atteints.

Une rémunération fondée sur des données boursières est pour partie sans lien avec les efforts du dirigeant car la valeur de l'action en bourse dépend elle-même de plusieurs facteurs qui sont hors de son champ de contrôle. La performance individuelle des dirigeants n'a qu'un faible effet sur ces variations. On peut alors se poser la question si on rémunère l'atteinte des objectifs ou l'attitude du manager.

I.B.3. INDICATEURS

Préalablement à la mesure de la performance, il faut déterminer les objectifs et les responsabilités de chacun. Les objectifs peuvent être financiers (chiffre d'affaires, création de valeur, réduction des coûts) ou non financiers (part de marché, satisfaction clients).

On retient alors comme notion de performance le fait que le cadre a atteint les objectifs qui lui ont été assignés. Il faut donc mettre en place des indicateurs qui serviront à rémunérer cette performance.

Selon B. Roman, les systèmes de mesure de la performance doivent être pertinents, simples et connus de tous pour servir de base à la rémunération variable. La mesure de la performance doit prendre en compte différents niveaux : la performance individuelle, la performance de l'équipe ou du métier et la performance générale de l'entreprise.

Comme on se focalise sur le top management, la performance s'analyse principalement à travers des indicateurs financiers. Les actionnaires cherchent en effet à mesurer la rentabilité économique (ROI) ou la création de valeur (EVA). Mais il se pose déjà le problème de la pertinence des indicateurs retenus. Ce sont des indicateurs comptables. En outre, le ROI est pertinent sur une périodicité de cinq ans alors que généralement l'horizon retenu est annuel.

II. INCONVÉNIENTS DE LA RÉMUNÉRATION INCITATIVE

II.A. RÉFLEXION « COURTERMISTE »

La rémunération incitative peut entraîner un manque de réflexion stratégique sur le long terme, qui découle directement des indicateurs et des seuils retenus pour mesurer la performance. En effet, ils vont guider le choix des actions des managers.

Si le bonus court terme peut être motivant pour le dirigeant, il n'en demeure pas moins que le système de rémunération incitative peut conduire à des conduites déviantes, néfastes pour l'intérêt de l'entreprise à moyen et long terme. En effet, la course effrénée à la rentabilité pour répondre aux exigences des actionnaires peut entraîner une prise de risque inconsidérée par les managers qui prennent des décisions à horizon d'un an en occultant ainsi les plans de réflexion stratégique qui s'inscrivent sur le long terme (cinq à dix ans). Dans l'étude « Une expérimentation sur l'impact des systèmes d'incitation sur la création de valeur actionnariale », Nicolas Mottis & Philippe Zarlowski soulignent que certains dirigeants, averses au risque, refuseraient de procéder à certains investissement générateurs de gains trop éloignés dans le temps ou trop risqués.

Pour contrer ces effets néfastes, il se développe une tendance d'attribution de bonus sur le moyen terme. Ainsi le dirigeant a le droit à l'erreur et a suffisamment de temps pour mettre en place des actions longues et puis lancer des actions correctrices. La continuité de la performance est ainsi récompensée.

Sur ce thème, Sofiane Aboura et Antoine Renucci, maîtres de conférence à l'université Paris-Dauphine, dans une interview accordée à l'agefi concernant les bonus alloués aux traders, préconisent d'étendre la période sur laquelle la performance est évaluée : « L'horizon sur lequel on juge la performance des traders (un an) est trop court. Il faudrait calculer les bonus sur des périodes de trois ou quatre ans pour éliminer le facteur chance, comme un cycle haussier par exemple.»

II.B. LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

II.B.1. COHÉSION

Les incentives sont essentiellement touchés par les cadres. Toutefois, l'entreprise est un tout. Les managers ne travaillent pas seuls. Les processus sont de plus en plus transversaux. Les bons résultats de l'entreprise reposent donc sur le bon travail des différentes fonctions (commerciaux, productions, marketing, ...) et l'ensemble du personnel.

Deux problèmes se posent. D'une part, comment récompenser un manager sur des résultats qui ne dépendent pas uniquement de lui. La question de la contrôlabilité du cadre se retrouve. D'autre part, un sentiment d'injustice et un risque de démotivation des opérationnels peuvent se produire. Eux également contribuent à la performance de l'entreprise mais ils ne se verront pas aussi bien récompenser que les managers.

Les inégalités de salaires se creusent, surtout que l'accès aux formes les plus dynamiques de rémunération (stock-options) reste le plus souvent réservé au top management. En 2006, la rémunération globale des patrons du CAC 40 représente en moyenne 380 SMIC. Ainsi ce système de rémunération privilégiant les managers peut engendrer de l'incompréhension et surtout un manque de cohésion. Des scissions entre les cadres dirigeants et les opérations au sein de l'entreprise ne sont pourtant pas favorables à une bonne remontée de l'information et à une bonne productivité. En outre, pour atteindre les objectifs de performance imposés par les actionnaires, les dirigeants imposent des objectifs encore plus élevés à leur subordonnées. Or cela contribue à démultiplier la pression au fil des échelons hiérarchiques ce qui est néfaste pour une bonne cohésion au sein de l'entreprise.

C'est la raison pour laquelle il faut instaurer des objectifs clairs et proposer une politique de rémunération plus transparente et plus équitable pour l'ensemble du personnel.

II.B.2. MOBILITÉ DES MANAGERS

Selon Daniel Held, un autre problème majeur est celui de l'impact négatif des incentives sur la mobilité des dirigeants. Selon lui, « c'est surtout l'impact sur la mobilité des collaborateurs et sur les politiques de management développement qui nous semble le plus préoccupant dans le contexte actuel caractérisé par une croissance faible ou négative des effectifs, et surtout un aplatissement significatifs des structures hiérarchiques » (Daniel Held (1997), « La rémunération à la performance : un art délicat », Persorama, n°3).

En effet, les incentives permettent aux managers très compétents et à haut potentiel de prouver leurs compétences et d'atteindre rapidement des niveaux de rémunération élevés. Mais ces managers ont alors tendance à vouloir rester dans la fonction où ils sont compétents, leur carrière reste linéaire, ils n'acquièrent pas d'expériences à l'étranger ou dans une autre fonction. Or, pour pouvoir occuper des fonctions de Direction Générale, le manager doit avoir une vision globale de l'entreprise et des compétences étendues à toutes les fonctions de l'entreprise.

Les incentives n'encouragent pas la mobilité, car si le manager décide de travailler dans une autre fonction ou, du moins au départ, il sera moins compétent et moins performant que dans son actuelle fonction, sa rémunération risque de baisser. De plus, les conditions de retour à son ancien poste ne seront jamais claires au vue des nombreuses restructurations dans les entreprises. Le manager préfèrera donc se spécialiser dans la fonction où il est le plus performant. Les équipes de direction, ayant des compétences polyvalentes et qui ont une vision des différentes fictions de l'entreprise, sont donc de plus en plus difficile à constituer, ce qui est problématique pour le bien de l'entreprise à long terme.

II.C. L'ETHIQUE

II.C.1. CHANGEMENT DE COMPORTEMENTS DES CADRES

D'après C. Prendergast, la rémunération à la performance entraîne un changement de comportements des cadres. Ils vont se focaliser sur les tâches récompensées et délaisser d'autres obligations. En effet, les cadres effectuent de nombreuses tâches et les mesures de performance ne peuvent pas prendre en compte tous les aspects de leur métier. La bonne mesure de la performance est primordiale pour que le système d'incentives soit efficace. Sinon les cadres vont agir pour leur propre intérêt, délaisser le travail d'équipe et ce comportement peut nuire à l'entreprise à long terme.

II.C.2. MANIPULATION DE L'INFORMATION

Les dirigeants produisent les résultats comptables et financiers remis aux actionnaires qui servent de base à leur évaluation dont dépend ensuite leur rémunération. Or il s'agit d'un instrument de pouvoir mis entre leurs mains. C. Alcouffe parle de « marge discrétionnaire des dirigeants ». Les dirigeants ont connaissance des données exactes et pourrait les dissimuler aux actionnaires afin de présenter par tous les moyens un état favorable de leur performance au détriment de la qualité de l'information. En d'autres termes, ils sont évalués sur la base d'indicateurs qu'ils influencent ou produisent eux-mêmes, ce qui n'est pas sain. Les actionnaires doivent donc avoir un regard pertinent sur les informations fournies et les connaissances nécessaires.

Le cas le plus emblématique est le scandale Enron qui a fait faillite en 2001, suite à des pertes occasionnées par des opérations spéculatives. Elles avaient étés dissimulées par des manipulations comptables.

Ces défaillances soulèvent la nécessité de contrôles réalisés par des autorités indépendantes représentant un contrôle fiable des données et qui n'auraient aucun intérêt à influencer les résultats à produire. Dans l'affaire Enron, l'auditeur des compteurs, l'entreprise Arthur Andersen a également fait faillite n'ayant pas révélée ses manipulations.

Mais, comme l'explique Edith Ginglinger, dans « L'actionnaire comme contrôleur », (Revue française de gestion, pp39), « plus l'actionnariat est dispersé moins le contrôle des dirigeants est effectif » puisque les coûts de contrôle sont élevés et supportés totalement par l'actionnaire qui le met en oeuvre alors qu'il n'en bénéficiera qu'à la hauteur de sa participation au capital. Au contraire, un actionnaire qui n'engage pas d'efforts de contrôle ne supportera pas de coûts, et bénéficiera des efforts des autres actionnaires. Ceci renvoie à la théorie du passager clandestin.

II.D. LES INCENTIVES NE PÉNALISENT PAS LA MAUVAISE PERFORMANCE

Certes, les incentives récompensent la bonne performance, mais ils ne sanctionnent pas forcément la mauvaise performance du dirigeant. En effet, des erreurs de gestion ou de choix de projets prises par le dirigeant entrainant de mauvaises performances n'ont pas le même impact sur sa rémunération. Selon B. Roman, la rémunération à la performance doit pourtant être réellement variable, comme la performance elle-même pour motiver le dirigeant à créer d'avantage de valeur.

Les parachutes dorés sont l'exemple parfait d'incentives ne pénalisant pas la mauvaise performance. Les détracteurs parlent de « prime à l'échec ». A l'origine, ces indemnités de départ sont censées remercier la bonne performance du dirigeant dans l'entreprise et payer la clause de non-concurrence. Or depuis quelques années, ils assurent à certains dirigeants de recevoir plusieurs millions d'euros, même si l'entreprise connaît une situation difficile. On peut citer le cas de Patricia Russo, directrice générale de l'équipementier Alcatel-Lucent qui va recevoir un parachute dorée de six millions d'euros alors que le groupe subit une perte de plus d'un milliard d'euros au second semestre 2008 (Le Point.fr). Ces parachutes dorés entraînent des scandales au niveau de l'opinion publique. Les pouvoirs publics ont donc menacé de légiférer. Les grands groupes ont ainsi adopté le code de bonne conduite du Medef, qui stipule que les parachutes dorés seront versés que si l'entreprise n'est pas en position d'échec et que la somme versée ne dépassera pas deux ans de salaires.

II.E. COÛTS SUPÉRIEURS AUX BÉNEFICES

La rémunération à la performance peut générer une hausse des coûts salariaux qui n'est pas compensée par la meilleure performance permise par les incentives. 

Les cadres reçoivent des actions ou des stocks options en fonction de la performance de l'entreprise. Pour les actionnaires, ce système revient à donner une part du résultat futur et du contrôle de l'entreprise aux cadres pour les inciter à améliorer le cours de l'action et le bénéfice. Mais il est difficile de connaître l'efficacité de ce mode de rémunération. D'après les études recueillies par C. Prendergast, le versement de stocks options peuvent représenter jusqu'à trois années de salaires. Le coût de l'incitation est énorme. De plus, le cadre, détenteur de stock-options peut gagner beaucoup d'argent en cas de hausse du marché boursier en général alors que la performance de l'entreprise est inchangée. Le problème de la contrôlabilité se pose. Le salarié doit pouvoir contrôler les éléments dont dépend sa rémunération. Pour réduire les coûts, les stock-options devraient dépendre de la performance de la société par rapport au marché et non du cours de l'action de la société.

De manière générale, les incentives peuvent paraître coûteuses puisque leur efficacité est parfois difficile à prouver. Ils sont efficaces au moment de leur création, puis ils se banalisent et perdent leur utilité. L'entreprise doit donc mettre en place d'autres systèmes d'incentives. Toutefois, l'accumulation des dispositifs entraîne des surcoûts et peut annuler les effets désirés. L'entreprise doit donc pouvoir modifier ou supprimer les incentives pour atteindre les objectifs souhaités.

CONCLUSION

Dans les modèles anglo-saxons, la tradition de lier la performance à la rémunération est ancienne. Malgré de fortes réticences, ce système de rémunération tend à s'imposer au niveau des cadres en France. Selon l'Association pour l'emploi des cadres (Apec), 71 % des cadres français reçoivent un élément variable dans leur salaire en 2005 contre 56 % en 1994. Or les outils sont juxtaposés (salaire variable, intéressement ou participation, stock-options, plan d'actionnariat, plan de retraite, ordinateur portable, ...).

L'objectif premier des incentives est d'aligner les intérêts des dirigeants sur ceux des actionnaires, à savoir améliorer la performance de l'entreprise et les dividendes. Pour une politique de rémunération incitative efficace, il faut assigner des objectifs clairs, précis et atteignables. Comme la mesure de la performance est annuelle, les dirigeants sont pousser à adopter des décisions court-termistes qui ne peuvent être que néfastes pour le développement à moyen et long terme de l'entreprise. Pour contrer ces effets, les dirigeants devraient plutôt être évalués sur le moyen terme. Mais sont-ils prêts à voir différer leur bonus ?

Toutefois, un système de contrôle est nécessaire en raison de l'asymétrie d'informations. Les dirigeants peuvent être tentés de manipuler les données comptables pour améliorer les données boursières, qui sont fortement aléatoires et parfois sans lien avec les efforts des dirigeants. Bien que coûteuses, les mesures d'audit sont utiles. Toutefois, trop de contrôle peut tuer l'initiative, démotiver les dirigeants, et aboutir à terme à réduire la performance de l'entreprise.

Au niveau des ressources humaines, la politique des incentives peut conduire à des effets inverses à ceux initialement souhaités, à savoir la motivation, la cohésion et la fidélité. Récompenser les « meilleurs » peut générer un mauvais climat social dans l'entreprise en frustrant, démotivant et générant des conflits plus qu'en créant une réelle cohésion au sein des équipes. Pour une bonne cohésion, il faut mieux développer la rémunération variable collective, par le biais de l'intéressement, de la participation, de l'actionnariat salarié.

La rémunération des top-managers a connu une telle dérive, qu'elle a fait naître de nombreuses polémiques sur leur bien-fondé et sur leur faible relation avec la performance boursière de l'entreprise gérée. Début 2008, la plupart des grandes entreprises se sont engagés à ne plus verser ces parachutes dorés en cas de mauvaise performance de l'entreprise. Comment demander aux salariés de faire plus d'efforts pour sauver l'entreprise alors que les dirigeants qui l'ont amenés en situation d'échec quittent l'entreprise avec des millions d'euros, comme A. Zacharias, PDG de Vince treize millions d'euros ? Ainsi les incentives censés rémunérer la bonne performance ne jouent plus leur rôle et sont considérés comme une rémunération « fixe ». Les coûts engendrés par ce système sont alors très importants sans améliorer la performance de l'entreprise.

Finalement, lier la rémunération à la performance nécessite de fixer des objectifs possibles, un bon système d'information, un bon système de contrôle et la prise en compte des aléas de l'environnement pour satisfaire les cadres et les actionnaires. Sinon ce système de rémunération peut sérieusement nuire à l'entreprise au niveau des coûts salariaux, sur le climat social et à la survie de l'entreprise à long terme.

BIBLIOGRAPHIE

Ø Ouvrages

o B. Martory (2005), Contrôle de gestion sociale, Vuibert, 5ème édition.

o B. Roman (2006), Bâtir une stratégie de rémunération, Système de rémunération et management de la performance, Paris, Dunod, 1ère édition.

Ø Revues et articles

o C. Alcouffe (septembre 2004), « La rémunération des dirigeants en France, fondements et pratiques », les notes du LIRHE, n°399.

o Philippe Desbrières (2000), « La rémunération des dirigeants sous forme d'actions et de stock-options ».

o S. Guimbert S. et J-C. Vallat (2001), « La fiscalité des stock options : une perspective internationale »), Economie et statistique, n° 344.

o Daniel Held (1997), « La rémunération à la performance : un art délicat », Persorama, n°3.

o Nicolas Mottis & Philippe Zarlowski (2000), « Faire des dirigeants des actionnaires, pour quelle efficacité ? Une expérimentation sur l'impact des systèmes d'incitation sur la création de valeur actionnariale ».

o C. Prendergast (8 juin 2000), « Encourager la performance », Les Echos, l'Art de la stratégie, n°12.

o Edith Ginglinger (2002), « L'actionnaire comme contrôleur », Revue Française de Gestion, n°141, pp 37 à 55.

Ø Sites Internet

o « La rémunération des top managers de plus en plus liée aux objectifs de l'entreprise », RH Tribune, n° 124, Novembre 2008.

o Patrick Bonazza (29/07/2008), « Patricia Russo et Serge Tchuruk quittent la direction d'Alcatel-Lucent », Le Point.fr

o S. Leboucher (31/10/2007), « Rémunération des cadres : toujours plus d'individualisation», JDN Management.

o Fauconnier F. (31/10/2007), « Rémunération : faut-il vraiment aller vers l'individualisation ? », interview de Bruno Fourage co-responsable activité conseil en capital humain chez Mercer, JDN Management.






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