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Les rébellions sous le régime d'Idriss Déby (1990-2008)

( Télécharger le fichier original )
par Eugène Le-yotha NGARTEBAYE
Université Jean Moulin Lyon 3 -  Master 2 sciences politiques, option: sécurité et défense 2008
  

Disponible en mode multipage

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a

REMERCIEMENTS

Nous voulons au début de cette étude, remercier toutes les personnes qui ont contribué à son élaboration. En premier lieu notre directeur M. David CUMIN qui accepté de guider cette étude et qui nous a accompagné au cours de sa rédaction de ses conseils et recommandations. Nous voulons ensuite remercier toute l'équipe du CLESID pour sa particulière attention tout au long de cette année de Master.

Enfin, nous exprimons notre gratitude à nos amis DIONMONG Mbaimdogoum, AMON Kouamé Hermann pour avoir fait la relecture du manuscrit. Que tous trouvent dans ces modestes mots, l'expression de notre profonde et sincère gratitude.

b

Acronymes

AN : Alliance Nationale

ANR : Alliance Nationale pour la Résistance

ANT : Armée Nationale Tchadienne

CDR : Conseil Démocratique Révolutionnaire

CDRT : Conseil Démocratique Révolutionnaire du Tchad

CMAP : Coordination des Mouvements Armés et Partis Politiques

CNR : Conseil National de Redressement

CNT : Concorde Nationale Tchadienne

CNT/R : Concorde Nationale Tchadienne /Rénové

CNS : Conférence Nationale Souveraine

CSNPD : Comité de Sursaut Nationale pour la Paix et la Démocratie

CPDC : Coordination Pour la Défense de la Constitution

CPR : Concorde pour le Progrès et le Redressement

EUFOR : Force de l'Union Européenne

FAN : Force Armée du Nord

FAR/F : Fédération Armée de la République Fédérale

FAT/MRP : Force Armées Tchadiennes/Mouvement Révolutionnaire Populaire

FIDEL : Forces pour l'Instauration de la Démocratie et de la Liberté

FNR : Force Nationale de Résistance

FNTR : Front nationale du Tchad Rénové

FNT /FLO : Front Nationale du Tchad/ Front de Libération du Ouaddaï

FROLINAT : Front de Libération Nationale du Tchad

FSR : Front pour le salut de la République

FUC : Front uni pour le Changement

FUCD : Front Uni pour le Changement Démocratique

MDD : Mouvement pour Démocratie et le Développement

MDD/ FANT : Mouvement pour Démocratie et le Développement/

Forces Armées Nationales Tchadiennes

C

MDD- MPLT : Mouvement pour la Démocratie et le Développement-

Mouvement Populaire de Libération

MDJT : Mouvement pour la Démocratie et la Justice au Tchad

MJE : Mouvement pour la Justice et l'Egalité

MOSANAT : Mouvement du Salut Nationale du Tchad

MPS : Mouvement Patriotique du Salut

ONU : Organisation des Nations Unies

RAFD : Rassemblement des Forces Démocratiques

RFC : Rassemblement des Forces pour le Changement

RDL : Rassemblement pour la Démocratie et la Liberté

RPJ : Rassemblement Pour la Justice

SCUD : Socle pour le Changement, l'Unité et la Démocratie

STEE : Société Tchadienne d'Eau et d'Electricité

SNER : Société Nationale d'Entretien Routier

UFCD : Union des Forces pour le Changement et la Démocratie

UFDD : Union des Forces pour la Démocratie et le Développement

UFDD/F : Union des Forces pour la Démocratie et le Développement/

Fondamentale

A

Tous et toutes qui ont perdu leur vie dans les conflits au Tchad, que votre sang soit le limon pour la construction de la nation tchadienne.

Que les orphelins, les veufs et veuves trouvent en votre disparition l'espérance d'une vie paisible au Tchad

« Au lieu de fortifier la justice, on justifie la force »

Blaise Pascal

Sommaire

INTRODUCTION GENERALE 2

PARTIE I DE LA FROMATION AUX STRUCTURES DES REBELLIONS 11

SOUS LE REGIME D'IDRISS DEBY 11

Chapitre 1 : Les rebellions de la période 1990 à 2000 12

Section 1 Les facteurs de l'émergence des rébellions dans la périonde1990-2000. 12

Section 2 Les Mouvements ou formations rebelles en activité dans la période de1990 à 2000 20

Chapitre 2 : L'éclosion des mouvements rebelles de 2001-2008 29

Section 1 Les nouveaux facteurs de l'émergence des rébellions. 29

Section 2 Les formations rebelles 36

PARTIE 2 LES LOGIQUES A L'OEUVRE DANS LES MOUVEMENTS REBELLES TCHADIENS. 45

Chapitre 3 : Les rébellions comme logique d'accumulation de richesse 46

Section 1 Les facteurs conduisant à la conclusion des accords. 46

Section 2 Les accords de paix comme droit d'accès aux richesses nationales 50

Chapitre 4 : Les rébellions : entre logique de revanche et contribution à la pérennisation du régime d'Idriss Déby 57

Section 1 La rébellion comme logique de revanche. 57

Section 2 La contribution à la pérennisation du régime d'Idriss Deby ? 60

Conclusion générale 69

Bibliographie 70

INTRODUCTION GENERALE

A- Contexte

Situé sur la ligne de contact entre l'Afrique « blanche » et l'Afrique « noire », au carrefour entre le Maghreb, le monde sahélien et l'Afrique équatoriale, le Tchad comme de nombreux pays africains, est une création coloniale. Devenu République en 1958, elle acquiert son indépendance le 11 août 1960. Couvrant une superficie de 1 284 000 km2 sur laquelle vivent environ 8 millions d'habitants, le Tchad se caractérise par une profonde diversité ethnique de sa population. En effet, celle-ci est divisée en différents groupes linguistiques que sont : les Sara (30%), les Arabes (15%), les Mayo-kebbi (12%), les Kanembou (9%), les Ouaddaï (15%), les Haddjaraï (8%), les Toubou/Gorane (6%), et les zaghawa (1,5%). Cette diversité ethnique s'exprime aussi à travers une inégale répartition spatiale de la population sur toute l'étendue de son territoire. Ainsi, nous notons que 7% de la population vivent dans le Nord du pays, 33% dans le Centre et 38% dans le Sud.

Sans aucune façade maritime, le territoire tchadien est entouré à l'Est par le Soudan, au Nord par la Libye, à l'Ouest par le Niger, le Nigeria, et au Sud par les Républiques du Cameroun et de Centrafricaine. Depuis l'indépendance, le pays est resté, sans discontinue, en proie à la guerre civile itinérante opposant les pouvoirs centraux successifs à des groupes armés n'ayant pour seul objectif que de ravir le pouvoir. Ces derniers parviennent le plus souvent à leurs fins avant d'être à leur tour chassés du pouvoir. C'est donc un cycle infernal de coups d'Etat précédés de conflits armés que le pays a connu jusqu'en 1990. A cette date s'effectue un évènement majeur pour l'histoire politique de cette jeune république. En effet, le 1er décembre de cette année, le colonel Idriss Deby s'empare du pouvoir par un coup d'Etat en chassant son prédécesseur Hisseine Habré. Dans sa lutte contre le gouvernement d'alors, il bénéficia du soutien du Mouvement Patriotique du Salut (MPS).

En effet, le MPS est né de la fusion de plusieurs organisations politiques dont l'action du 1er avril, le Mouvement du Salut National du Tchad (MOSANAT) et les Forces Armées Tchadienne-Mouvement Révolutionnaire du Peuple (FAT-MRP) auxquels il convient d'ajouter d'autres organisations et de nombreux cadres déjà engagés individuellement. La mutualisation de ces différents mouvements s'effectua lors du congrès de Bamina de mars 1990. Cette coalition avait pour objectif essentiel d'unifier leurs forces dans le seul but de chasser du pouvoir le président Hisseine Habré. 

Dans sa déclaration à la nation du 4 décembre 1990, Idriss Deby fit montre de sa volonté d'instaurer une vie démocratique en déclarant : « Nous n'aurons définitivement extirpé les démons de la dictature (...) qu'après l'établissement d'une démocratie vraie, totale, une démocratie pluraliste (...). Le plaisir est immense pour tous les combattants des forces patriotiques d'avoir contribué à l'éclosion du cadeau le plus cher que vous espériez. Ce cadeau n'est ni or ni argent : c'est la liberté »1(*).

La prise du pouvoir en 1990 par Idriss Deby a suscité beaucoup d'espoir au sein des populations tchadiennes, d'abord parce qu'elle lui a permis de sortir du joug dictatorial de Hisseine Habré mais aussi parce qu'elle a contribué dans une certaine mesure à amorcer un processus démocratique avec la libération de l'espace politique à travers l'instauration du multipartisme.

Mais l'espoir né du coup d'Etat du 1er décembre s'est rapidement étiolé. Très vite, les frustrations s'accumuleront et les dissonances se feront jour au sein du nouveau régime. Certains anciens compagnons d'armes d'Idriss Deby reprirent le chemin du maquis avec l'objectif de l'écarter du pouvoir.

De 1991 et jusqu'à 2008, les rebellions n'ont cessé de se créer avec pour seul objectif de renverser Idriss Deby. Cependant, celles-ci se heurtent à la solidité du régime de Deby. La conséquence directe de ces incessants conflits pour le pouvoir est de plonger le pays dans une situation de profonde instabilité ; plombant ainsi les efforts de redressement économique d'un pays qui se classe parmi les plus pauvres du continent africain. C'est donc pour comprendre et mettre en lumière les réels ressorts de cette instabilité politique que nous avons décidé de conduire cette analyse sur les rébellions tchadiennes dans la période de 1990 à 2008.

B- La revue de littérature

La rébellion se définit comme une « résistance ouverte face à l'autorité, surtout la résistance armée organisée face à un gouvernement établi ». En effet, la rébellion renvoie à une action de se rebeller, acte de rebelle ou une dissidence, une insurrection, une mutinerie, une révolte, une sédition, un soulèvement. Elle désigne aussi l'ensemble des rebelles.

L'action de se rebeller fait appel à l'état d'esprit du rebelle qui se traduit d'abord par une conviction : celle d'avoir raison, y compris contre l'ensemble du groupe ou contre un ordre établi accepté par tous, mais que le rebelle estime être un facteur de désordre car générateur d'inégalités, de misères matérielles et /ou morales.

La rébellion fait appel à deux postures : la prise des armes et la propagande politique dans le but de recueillir l'adhésion d'une majorité de la population à sa cause.

Dans la littérature, le thème de « rébellion » et la figure de « rebelle » furent longtemps un terrain fertile pour les artistes et les écrivains2(*). Les exemples sont nombreux : d'Antigone de Sophocle ; Les Misérables de Victor Hugo ; Germinal d'Emile Zola ; L'insurgé de Jules Valles.

La rébellion à l'ordre et au pouvoir politique est toujours perçue comme romantique car répondant à un combat noble mais perdu d'avance, celui du désir de hurler sa désespérance face à l'absurdité du monde. Et l'homme révolté3(*) d'Albert Camus en est la parfaite illustration. L'homme révolté, écrit Camus, ne défend pas seulement un bien qu'il ne possède pas ou dont on l'aurait frustré. Il vise à faire reconnaître quelque chose qu'il a, et qui a déjà été reconnu par lui, dans presque tous les cas, comme plus important que ce qu'il pourrait envier4(*). Les romans nous ont nourris et fascinés avec le mot « rébellion ». Jean Nicolas constate que « le mot titre rébellion touche d'abord l'affectivité du lecteur et déclenche, avant toute réflexion, une suite d'images immédiates liées au bruit, à la fureur, au déclenchement de pulsions instinctives et sauvages. Il donne à voir et à sentir l'énergie vitale qui explose en élans de refus. »5(*) La rébellion et la figure du rebelle quittent le domaine du roman pour entrer dans les sciences sociales.

Au miroir des sciences sociales, c'est l'histoire qui fut la première discipline à s'intéresser aux phénomènes de rébellions. L'approche historique procède à la description des rébellions. Elle permet de connaître les grandes rébellions, leurs évolutions, leurs stratégies et leurs figures de proues. C'est l'histoire des rébellions au début de l'Europe moderne (vers 1492-1789). Cette description historique montre les étapes de changements incroyables au niveau social, économique, religieux et politique à travers des douzaines de rébellions paysannes.

La perspective historique a permis de comprendre les mutations qu'ont connues les rebellions. Elle opère le passage de rébellion en révolution lorsque les insurgés gagnent leurs luttes. Les exemples historiques sont la révolution américaine (1775-1783), la révolution française (1789-1795) et la révolution russe de 1917.

En mettant en lumière la transformation de rébellion en révolution, l'approche historique permet aussi de faire la distinction entre les rebellions contre révolutionnaires par les idées (bretonne, corse, basque par exemple) et les mouvements révolutionnaires par les idées (en Afrique, particulièrement les guerres de libérations).

Mais aujourd'hui, après les indépendances, les pays africains sont en proies aux guerres intra étatiques. Les rébellions naissent de partout. Dans le contexte tchadien, les travaux de l'historien Robert Buijtenhuijs6(*) ont permis de faire connaître la rébellion qui avait sévi dans le nord du Tchad au début des années 1966, le FROLINAT7(*). Mais le développement des rebellions conduit à faire intervenir d'autres approches pour les appréhender. Ce sont les approches de la sociologie et de la science politique qui sont mobilisées.

L'approche sociologique voit les rebellions comme des phénomènes d'actions collectives. Olivier Fillieule et Cécile Pechu8(*) observent que « c'est sous la poussée de « l'histoire réelle » que le champ de la sociologie des mobilisations s'est progressivement constitué, en particulier aux lendemains de la Commune et au cours des turbulences des années 1960-1970 ». La perspective sociologique s'enrichit avec des recherches sur les spécialités des aires culturelles exotiques en montrant à travers « la politique par le bas9(*) » et « les objets politiques non identifiés10(*) », que l'ordre peut prendre plusieurs visages.

La contestation de l'ordre n'obéit plus aux canaux explicitement politiques organisés. Ainsi, la participation politique, dans les sociétés démocratiques, ne se résume pas seulement au vote, grève, manifestations, occupations des locaux, séquestrations. Elle s'exprime sur le plan artistique grâce à la musique, au théâtre et au choix du mode de vie.

En revanche dans les sociétés où la démocratie peine à trouver ancrage, la rébellion reste un moyen privilégié de contestation de l'ordre politique.

De ce fait, l'analyse des rébellions au Tchad se situe davantage dans le domaine de la science politique. Ainsi, exception faite des travaux historiques de Buijtenhuijs sur la rébellion du Front de Libération Nationale du Tchad, l'analyse des rebellions au Tchad a toujours été mise en relief par d'autres facteurs. Nebardoum Derlemati11(*) évoque la question des rébellions pour montrer leur contribution dans l'instabilité politique que connaît le Tchad. Mohamed Tétémadi Bangoura,12(*) quant à lui, analyse les violences politiques en s'attardant sur le rôle des différentes rebellions depuis l'indépendance. Pour Bangoura, les rébellions apparaissent comme un des facteurs aggravant de la violence politique au Tchad.

Yves Rabier13(*)enfin, établit la question des rebellions au Tchad en mettant en exergue leurs différentes liaisons avec les puissances étrangères.

Il apparaît clairement que la littérature sur les rebellions au Tchad est abondante. Cependant, cette abondance n'est qu'apparente ; il reste que les rebellions sous le régime de Idriss Déby n'ont pas connu de travaux spécifiques. C'est pourquoi notre travail se focalisera sur ces dernières.

C- Problématique

L'image du Tchad reste attachée à de multiples scènes insurrectionnelles. Les rebellions foisonnent. Tantôt les rebellions arrivent à conquérir le pouvoir d'Etat, tantôt elles n'y parviennent pas. C'est une vie politique fortement militarisée que nous auront à analyser. Durant ces « années de poudre et de sang »14(*) la kalachnikov a trop souvent permis l'accès au pouvoir (de Ngakoutou Malloum à Goukouni Weddey, en passant de Hisseine Habré à Idriss Déby) et par voie de conséquence à l'ascension sociale.

Cependant, l'avènement d'Idriss Deby au pouvoir a permis au pays de connaître une relative stabilité15(*). La prise du pouvoir par un mouvement rebelle devenait de plus en plus improbable. Toutefois, cette accalmie générale au niveau de la situation sécuritaire n'a jamais empêché les rébellions de se constituer et de continuer leurs attaques furent-elles sporadiques. Les évènements d'avril 2006 et de février 2008 dans la capitale N'djamena en sont la parfaite illustration. Dès lors, si la conquête du pouvoir par les armes semble révolue, pourquoi les rébellions se multiplient-elles sous le régime d'Idriss Deby ? Quelles sont les logiques qui animent ces rébellions ? S'agit-il toujours de la conquête du pouvoir ou simplement des actes de revanche contre un ancien allié, un ancien frère d'arme ou encore un ancien mentor ?

D- Hypothèses

Afin de répondre à ces différentes interrogations, nous formulons des réponses provisoires. Elles peuvent être confirmées ou infirmées. Pour les interrogations soulevées au sujet des rebellions sous le régime d'Idriss Deby de la période de 1990 à 2008, nous disons que :

Les rebellions obéissent beaucoup plus à une logique d'ascension sociale, d'accumulation de richesses plutôt qu'à celle de la conquête du pouvoir.

Elles participent davantage à des actes de vengeance et à une pratique visant à renforcer la domination et la pérennisation d'un clan au pouvoir.

E- Méthodologie

Par méthodologie, nous entendons donner les raisons qui guident notre modèle d'analyse (1), la justification du choix du sujet (2) et la technique d'investigation utilisée (3).

1- Modèle d'analyse

L'analyse des rébellions sous le régime d'Idriss Deby ne peut être appréhendée avec les approches classiques rationnelles sur les questions sécuritaires. Ces approches se focalisent essentiellement sur les états, les interactions étatiques. Or ici la question sécuritaire se pose à l'intérieur d'un Etat, en l'occurrence le Tchad ; mais qui reçoit des échos dans les pays voisins.

Pour ce faire, c'est dans les approches transnationalistes, qui postulent au dépassement des approches classiques de la sécurité, qu'il convient de rechercher l'outil théorique pouvant aider à comprendre la question des rébellions.

En effet, pour les transnationalistes, la sécurité de l'Etat n'est plus menacée exclusivement par les Etats mais également par les acteurs non étatiques. Les transnationalistes se focalisent sur les individus et les groupes d'individus qui agissent en dehors de tout cadre étatique. Mais l'action des ces individus produit des effets sur la relation et la conduite des Etats. Il s'agit ici des conflits de basse intensité qui affectent l'Etat à l'intérieur de ses frontières. Ces conflits peuvent opposer les différents groupes d'un Etat entre eux ou contre le pouvoir central. Et c'est dans ce dernier cas de figure que se situe l'action des rébellions contre le pouvoir central incarné par Idriss Deby.

En outre, cette approche nous permettrait de mettre en exergue les effets que peuvent produire ce conflit interne sur les autres pays, en l'espèce ses voisins proches ou plus largement de la région. Cet élargissement du conflit justifie ainsi la prise en compte des acteurs non étatiques pour étayer la question sécuritaire régionale ou sous régionale qui peut être affectée par les conflits intra étatiques.

2- Justification du choix de l'étude

Comme nous l'avons souligné dans la revue de littérature, l'analyse des rébellions au Tchad se fait toujours de manière globale16(*) excepté dans les travaux de Robert Buijtenhuijs17(*) sur le Front de Libération Nationale. C'est pourquoi nous voulons axer notre perspective sur les rébellions sous le régime d'Idriss Deby.

Le choix des années (1990-2008) se justifie par rapport à deux événements : le coup d'Etat d'Idriss Deby de décembre 1990 et les attaques des rebelles de février 2008 sur N'djamena, la capitale tchadienne. Il s'explique aussi par le besoin de circonscrire notre analyse sur des faits qui se sont déjà déroulés pour ne pas tomber dans l'évènementiel. Car les rebellions naissent et font toujours parler d'elles par les attaques qu'elles opèrent.

Au-delà de cette limitation chronologique, le travail vise à contribuer au débat sur la sécurité au Tchad en tentant de mettre en exergue les transformations des mouvements rebelles. Il vise par ailleurs à montrer la/les connexions qui peut/peuvent exister entre la sécurité au Tchad et celle de ses voisins proches ou plus largement celle de la région.

3- Technique d'investigation

Ce travail est essentiellement basé sur les documents. C'est dans les travaux (thèses, mémoires, livres, coupures de presse) et les informations recueillies sur la toile que nous nous appuierons pour mener ce travail. Ceci s'explique simplement par le fait que nous ne pourrons pas effectuer des enquêtes de terrain car les rebelles se méfient et n'osent pas beaucoup parler de leurs mouvements, si ce n'est dans un but propagandiste. Il faut souligner également que nos moyens (le temps et les finances) ne nous permettront de procéder à une telle enquête.

Articulation du travail

Notre travail se divise donc en deux parties reparties en deux chapitres chacune. La première sera consacrée aux causes et aux différentes formations ou coalitions rebelles. Les logiques à l'oeuvre dans les rebellions feront l'objet de la seconde partie.

PARTIE I : DE LA FORMATION AUX STRUCTURES DES REBELLIONS

SOUS LE REGIME D'IDRISS DEBY

Depuis 1965 le Tchad a connu une succession de crises caractérisées par une constante militarisation de sa vie politique. Cette situation s'expliquait par le choix de la tyrannie comme mode de gestion des affaires publiques. Cependant, après plus deux décennies de vie politique fortement militarisée, le Tchad amorce, comme la plupart des pays d'Afrique francophone, un processus de démocratisation en 1990.

Ce processus coïncide avec la prise du pouvoir en décembre 1990 par une force coalisée des rebelles nommée le Mouvement Patriotique du Salut (MPS), à la tête de laquelle se trouvait le colonel Idriss Deby. La prise du pouvoir de ce mouvement rebelle reçut la totale adhésion de la population qui espérait s'exprimer librement sur la gestion des affaires publiques.

Mais très vite, la promesse d'une ouverture démocratique va faire place à une parodie de vie démocratique. La vie politique tchadienne sera caractérisée par la falsification des résultats électoraux, par l'opacité dans la gestion des affaires publiques et par l'orientation clanique et partisane du pouvoir. En définitive, la promesse de l'instauration de la démocratie peine à trouver un véritable ancrage au Tchad.

Pour pallier cette situation d'obstruction institutionnelle et politique, certains groupes n'hésitent pas à prendre les armes pour faire triompher leur cause. Cette reprise des armes, qui du reste n'est pas chose nouvelle au Tchad, connaîtra une constance inquiétante, depuis la prise du pouvoir d'Idriss Deby jusqu'à nos jours. Pour tenter d'aborder cette problématique, nous divisons en deux phases ce développement des mouvements rebelles. Ainsi consacrons-nous une première partie aux rebellions qui ont existé entre 1990-2000 et une seconde partie à celles qui ont existé entre 2001 et 2008.

Chapitre 1 : Les rebellions de la période 1990 à 2000.

La naissance de rebellions sous Idriss Deby est la résultante d'une frustration ressentie et la traduction du dysfonctionnement d'un système.

En se rebellant, les insurgés estiment que leurs points de vue ne sont pas suffisamment pris en compte pour remédier au dysfonctionnement qui traverse le système. Ils veulent par la rébellion protester contre l'ordre existant pour en proposer un autre qui, selon eux, répondra aux véritables aspirations de la population dont ils s'érigent en représentants.

Il est vrai que, la plupart du temps, la conjonction d'une propagande politique savamment orchestrée et du soutien de la communauté internationale permet aux rebelles de s'emparer du pouvoir. Mais force est de reconnaître que cette stratégie semble peu porteuse dans le contexte actuel. En conséquence, sous le régime d'Idriss Deby, contrairement aux précédents régimes, les rébellions se forment et se déforment sans parvenir à atteindre leur but. Elles participent de manière indirecte à orienter les politiques des gouvernants.

Il convient donc de s'y attarder dans l'optique de faire ressortir les facteurs qui favorisent leur émergence (section 1) avant de procéder à la présentation des différentes formations et coalitions rebelles (section 2).

Section 1 Les facteurs de l'émergence des rébellions dans la période 1990-2000

Après la prise du pouvoir le 1er décembre 1990 et la promesse d'une ouverture démocratique, rien ne pouvait faire penser aux populations que le nouveau régime en place aurait à faire face à de nouvelles rebellions. L'installation du régime peine encore à prendre forme quand les premiers bruits de bottes se font entendre. L'interrogation qui revient de manière systématique était de comprendre les raisons d'une telle action contre ce nouveau régime représenté par Idriss Deby.

Pour trouver les justifications d'une telle action, un détour dans l'histoire politique du Tchad s'impose. Ainsi les causes des premières actions contre Deby sont à rechercher dans la survivance des rebellions antérieures (§1). Cependant, la « résurrection » des rebellions antérieures ne peut à elle seule fournir une réponse satisfaisante aux premières contestations du pouvoir d'Idriss Deby. Un regard sur la gestion du pouvoir politique par certains «  associés de Bamina » (§2) peut aussi contribuer à mieux appréhender les frustrations qui conduiront d'autres « associés » à la reprise des armes.

§1 - La survivance des rebellions antérieures.

La prise du pouvoir de Deby n'est pas le fruit de la réunion de toutes les forces rebelles qui étaient à l'oeuvre sous le règne de Hisseine Habré. Elle est seulement le résultat d'une union de quelques groupes ayant fusionné au congrès de Bamina pour fonder le MPS. C'est pourquoi, bien des formations rebelles n'ayant pas été parti prenante de l'accord de Bamina vont opérer une reconversion (A) pour attaquer le pouvoir du MPS.

Par ailleurs, Hisseine Habré et ses partisans n'ayant pas accepté leur mise à l'écart, ils tenteront tant bien que mal de s'organiser pour la reconquête du pouvoir. Ces nostalgiques du pouvoir de Hisseine Habré prendront une part active dans le conflit à travers leur soutien aux nouvelles rebellions (B).

· A- La survivances des rebellions antérieures.

La victoire des alliés du congrès de Bamina le 1er décembre 1990 a été une grande surprise pour beaucoup de formations rebelles qui n'avaient pas jugé opportun de s'associer à cette union. De cette surprise naissent les rivalités conduisant à la contestation systématique du nouveau régime de N'djamena.

En effet, surpris par la tournure rapide des évènements ayant conduit Idriss Deby au pouvoir, certains mouvements rebelles formulent des griefs proches de ceux que l'on entendait déjà du temps de Ngarta Tombalbaye, Goukouni Oueddei ou encore Hisseine Habré. Ils s'articulent autour du traditionnel clivage Nord - Sud, avec en toile de fond la lancinante question chrétien-musulmane, la crise de l'Etat. En complément du discours traditionnel, les rebellions, pour être en phase avec les réalités du moment, vont adapter leur discours.

Premièrement, c'est le caractère « étranger » du régime qui est brandi. En effet, Idriss Deby doit son arrivée au pouvoir en grande partie au soutien qu'il a reçut des autorités soudanaises. Ce sont elles qui ont fourni toute la logistique et le financement nécessaire à la coalition de Bamina.

Deuxièmement, les rebelles contestent la légitimité du statut d'opposant d'Idriss Deby. Sur ce registre, il faut rappeler qu'Idriss Deby fut pendant une longue période un proche collaborateur de Hisseine Habré. Aussi ses détracteurs pensent qu'Idriss Deby est dans une certaine mesure comptable de la gestion du pouvoir précédent et par voie de conséquence, responsable des dérives et des exactions commises sous le régime d'Hisseine Habré. A ce titre, il n'y a donc pas de changement de régime entre celui d'Hisseine Habré et de Idriss Deby, mais plutôt une continuité.

Troisièmement, les discours sur l'aspect clanique du pouvoir se font de plus en plus entendre. En effet, pour sa prise du pouvoir, Idriss Deby s'est fortement appuyé sur le clan Beri18(*). Très vite, on observe que la gestion du pouvoir de l'Etat se trouve concentré entre les mains des Béri. L'Etat est désormais considéré « comme un gisement de richesses sans maître »19(*) que le clan se partage. Ainsi tous les postes clés des services centraux de l'administration tels que la direction de douane, la direction des impôts, la direction des transports sont occupés par les membres du clan Béri. Il en est de même pour certaines sociétés nationales dans lesquelles l'Etat détient un capital important comme la Coton Tchad, la société tchadienne d'eau et d'électricité, la société nationale d'entretien des routes (SNER)20(*).

S'il est vrai que le fonctionnement clanique du pouvoir n'est pas l'apanage d'Idriss Deby21(*), il apparaît de façon flagrante que sous ce dernier, cette pratique passe pour être érigée en mode de gestion des affaires publiques. En outre, c'est l'ouverture démocratique qui accompagne la trame de la contestation. Les mouvements rebelles estiment que les conditions et les modalités d'organisation du pouvoir n'ont pas pour objectif de contribuer à l`émanation du peuple, mais plutôt à offrir les instruments de la pérennisation du régime d'Idriss Deby. Car les conditions d'un vrai dialogue n'ont jamais été aménagés par Idriss Deby22(*) et ce malgré les multiples occasions qui s'offrirent à lui. A ces vagues de contestations émanant des rébellions qui ont reconverti leurs discours, s'ajoutent celles des nostalgiques de l'ère Hisseine Habré.

· B- Les férus de Hisseine Habré.

Pour rappel, Idriss Deby fut pendant longtemps un haut dignitaire du régime de Habré. Il a été son chef d'état major et l'un de ses plus proches collaborateurs. C'est à partir de l'action du 1er avril 1989, organisée par Hassane Djamous, Ibrahim Itno et Idriss Deby Itno visant à renverser Habré, qu'il entra en disgrâce. Dès lors, il s'éloigne d'Hisseine Habré et se lance à la conquête de la magistrature suprême qu'il obtient le 1er décembre 1990 en chassant du pouvoir son mentor.

Par cette action, bien des dignitaires du régime déchu de Hisseine Habré, surtout le milieu des officiers Goranes, ethnie d'Hisseine Habré, estimèrent qu'Idriss Deby était un traître qu'il fallait à tout prix abattre. Afin de parvenir à cette fin, ces dignitaires du précédent régime vont s'appuyer sur l'importante manne financière qu'ils avaient accumulée durant leurs années de règne. Dans cette logique, c'est le caractère clanique qui se trouve mis en exergue pour venir à bout du régime d'Idriss Deby. C'est la logique Gorane contre celle des Béri ou zaghawa. Pour cette catégorie de rébellions, c'est la revanche qui prédomine, même si d'autres griefs énoncés dans le précédent paragraphe sont également avancés.

Ces justifications et légitimations n'expliquent pas à elles seules les sources de la première vague des rébellions à laquelle le pouvoir du MPS a eu à faire face. La gestion du pouvoir constitue aussi pour le MPS un autre facteur pouvant expliquer la naissance des foyers de tensions.

§2- La gestion du pouvoir politique par « les associés de Bamina ».

Si l'on a pu observer un simulacre d'union entre les associés de Bamina face aux frondes des rebellions qui contestent sa légitimité, cette union ne sera que de courte durée. Les accords de Bamina volèrent en éclat après quelques temps de gestion commune du pouvoir (A). Cette exclusion résulte du tacite bannissement du pouvoir des personnes n'appartenant pas à l'accord de Bamina (B).

· A- Les associés de Bamina à l'épreuve de la gestion politique.

La victoire du MPS fut le résultat de la coalition des formations rebelles en luttes contre Hisseine Habré. En effet, c'est à Bamina au Soudan que les formations rebelles suivantes, l'Action du 1er avril d'Idriss Deby et d'Abbas Koty, le Mouvement du salut national du Tchad (MOSONAT) de Maldoum Bada Abbas et les Forces armées tchadiennes-mouvement révolutionnaires populaire (FAT/MRP) de Hissein Dassert ont fusionné pour créer le mouvement patriotique du salut (MPS).

Ces différentes formations rebelles étaient construites sur des piliers ethniques. Ainsi, l'action du 1er avril était essentiellement composée des Béri (repartis en sous clans kobé, bideyat, boragate, et kapka) du Tchad comme du Soudan. C'est cette configuration ethnique qui permit à plusieurs Beri soudanais de prendre activement part au combat aux côtés de leurs frères tchadiens. Le MOSONAT avait pour bastion de recrutement les Hadjaraï du Guerra et les FAT/MRP les ouddaiens et apparentés. Ces différents groupes ethniques constituaient le socle des premières années du régime d'Idriss Deby. Le partage des postes de responsabilités obéissait à cette configuration des différents piliers.

On retrouvait ainsi Idriss Deby président de la république et président du MPS, Maldoum Bada Abbas ministre de l'intérieur et vice président du MPS, Hisseine Dassert ministre de la défense et Abbas koty chef d'Etat major des armées. Le pouvoir MPS s'impose ainsi selon cette logique aux tchadiens qui avaient cru entrevoir des lueurs d'espoir avec l'arrivée au pouvoir du MPS. Toutefois, au début du règne d'Idriss Deby, Gata Nder observait que « le despote Habré parti, le soulagement qui a traversé d'un bout à l'autre le Tchad ne s'est paradoxalement pas transformé en une liesse délirante. Les incertitudes de demain font planer quelques inquiétudes sur les esprits habitués aux lendemains qui déchantent. Les tchadiens de toute évidence ont mûri. Les promesses non tenues, les incitent à observer un prudent `wait and see' »23(*). Cette observation sonne, avec la tournure que vont prendre les évènements, comme une prédiction.

En effet, le MPS tint un congrès extraordinaire du 25 au 28 juillet 1991. Au cours de ce congrès, des voix s'élèvent pour contester le cumul des fonctions du numéro deux du régime, Maldoum Bada Abbas. Il était question pour ce dernier de choisir entre le poste de ministre de l'intérieur et le poste de vice président du MPS. A la fin du congrès le poste de vice président du MPS fut purement et simplement supprimé. Cette suppression a été mal reçue par le clan Hadjaraï et par Maldoum lui même. Elle fut interprétée comme une mise à l'écart du pouvoir des Hadjaraï, alors que ces derniers venaient de contribuer de manière significative à son instauration. Elle donna lieu à des frustrations qui conduisirent à l'arrestation de Bada Abbas Maldoum au motif de tentative de coup d'Etat. S'agissait-il d'un vrai coup d'Etat ou d'une stratégie d'Idriss Deby pour se défaire d'un allié devenu trop gênant ? Une chose est sûre, en octobre 1991, Bada Abbas Maldoum et plusieurs de ses partisans meurent dans des conditions non encore élucidées aujourd'hui. Aucune enquête officielle n'a été diligentée pour faire la lumière sur ces disparitions. Plusieurs partisans de Maldoum, à la tête desquels se trouvait le Colonel Kafine Chadallah, reprirent le chemin du maquis.

Ensuite vint le cas Abbas Koty. Ce dernier est considéré dans l'action du 1er avril comme représentant de tous les zaghawa (surtout le clan Kobé), tant du côté soudanais que du côté tchadien. Issu du clan Bideyat, Idriss Deby s'est fortement appuyé sur les éléments appartenant aux autres clans du groupe zaghawa pour sa prise du pouvoir. Abbas Koty constituait donc une pièce maîtresse dans cette stratégie. Par son poste de chef d'état major général des armées, Abbas Koty issu du clan Kobé était au centre de l'appareil d'Etat. Il avait le contrôle de l'ensemble des forces armées. Ce poste constituait pour les autres clans zaghawa une garantie et un contre pouvoir pour contrebalancer le pouvoir d'Idriss Deby au cas où ce dernier venait à rompre le pacte qui les unissait. Cependant, le sort de Koty sera réglé lorsque la question de la réorganisation de l'armée s'invite dans le débat politique.

En effet, aux questions de l'insécurité24(*), où le tristement célèbre « secteur n°5 » composé essentiellement des Kobé du soudan, est pointé du doigt par la population, la question de la réorganisation de l'armée devient de plus en plus pressante pour Idriss Deby.

A l'arrivée d'Idriss Deby au pouvoir, l'armée tchadienne était caractérisée par le nombre pléthorique de ces membres. Cette augmentation du nombre des soldats s'expliquait par le recrutement massif dans le milieu Béri au Soudan pendant la conquête du pouvoir par le MPS. En été 1991, la presse tchadienne annonça que la France avait accordé un crédit d'un montant de cinq milliards de francs Cfa à la démobilisation et la réinsertion des soldats désireux de quitter les Forces Armées Tchadiennes25(*). Le but de l'opération était donc de contribuer à la réduction des effectifs militaires en passant de 50 000 à 25 000 hommes.

Beaucoup d'éléments appartenant au clan Béri du côté soudanais seront visés par cette mesure car la restructuration s'opère au profit des soldats de carrières et ceux issus de milieu scolarisé26(*). Profitant de cette réorganisation, Idriss Deby choisit de muter Abbas Koty de l'Etat major général pour lui confier le Ministère de la Défense en juillet 1991. Cette mutation fut perçue comme la fin du contrôle d'Abbas Koty sur les effectifs militaires et la mise à l'écart implicite du leader et de son clan Kobe.

Du ministère de la défense, Koty passa au ministère des Travaux Publics et des Transports. Ce nouveau changement confirmait l'hypothèse de la mise à l'écart d'Abbas Koty. Se trouvant hors du dispositif militaire, il ne pouvait plus rien faire pour influer sur les décisions concernant l'armée. La réorganisation de l'armée entamée, beaucoup de Béri soudanais furent remerciés et priés de retourner chez eux. Il naît ainsi un climat de suspicion entre les clans Kobé et Bidéyat. Ce climat délétère fait de rumeurs persistantes sur une possible préparation de coup d'Etat contre le régime ou d'une très prochaine arrestation d'Abbas Koty, poussa ce dernier en juin 1992 à rejoindre la rébellion qui s'était déjà constituée27(*).

Enfin, le congrès qui avait scellé ou précipité la descente aux enfers de Maldoum n'a pas oublié de fixer le destin d'Hissein Dassert,28(*) le chef de la fraction rebelle FAT- MRP, le troisième pilier du régime d'Idriss Deby. En effet, depuis juillet 1991, ce dernier avait perdu le poste de Ministre de la défense, obtenu pour sa contribution à la victoire du MPS. Il était « quasiment entré en rébellion contre son mouvement, après son limogeage du ministère de la défense »29(*). Restant dans la légalité, le colonel Dassert finit par démissionner du MPS vers la fin de l'année 199230(*). Aussi, comme les partisans de Maldoum et d'Abbas Koty, Dassert renoua avec ses anciennes habitudes et reprit la route du maquis.

En définitive, on note qu'à peine installé au pouvoir l'alliance de Bamina vole en éclat et fait place à une guerre sourde au sein du MPS. S'agissait-il d'un calcul tactique orchestré par Idriss Deby pour se débarrasser de ses associés de Bamina ? Il est difficile à partir des informations dont nous disposons de répondre à cette question. Toutefois, un constat du retour à la case départ s'impose. L'alliance se disloque et les anciens alliés reprennent les armes. Si au sein du MPS les dissonances se font de plus en plus entendre, elles atteignent également certaines personnes se considérant comme les exclus du pouvoir.

· B- Les exclus du pouvoir.

Le club de Bamina se partage le pouvoir au prorata de l'effort consenti pour son acquisition. Pendant ce temps, bon nombre de citoyens, mais surtout d'officiers de l'armée nationale, sont mis à l'écart. Cette mise à l'écart conduit un groupe d'officiers majoritairement issus du sud du pays à signer une lettre ouverte dans laquelle ils indiquent leurs principales revendications. Celles-ci concernent l'avancement des militaires sur la base de l'ancienneté, l'abolition d'un décret datant d'Hisseine Habré favorisant les maquisards au détriment des militaires de carrières, la restauration de l'équilibre sociale entre les éleveurs et les agriculteurs et enfin l'instauration d'un fédéralisme accordant une large autonomie aux départements méridionaux.

La pétition fut mal perçue par le nouveau régime qui la considéra comme une tentative de coup d'état. Il en résulta que les officiers initiateurs de cette lettre ouverte furent arrêtés. Certains perdront leurs postes voire même leurs grades. Devant cette répression qui s'abattait de manière disproportionnée sur ces officiers, bon nombre d'entre eux préférèrent prendre la route du maquis. L'élément déclencheur de ce départ pour le maquis fut l'attaque du poste de police de Chagoua par les hommes conduit par Kétte Nodji Moïse.

Ainsi vont se succéder les formations et coalitions rebelles qui auront pour seul et unique objectif de reverser le régime d'Idriss Deby.

Section 2- Les Mouvements ou formations rebelles en activité dans la période de 1990 à 2000.

A peine la conquête du pouvoir du MPS est effective que des nouvelles alarmantes au sujet d'attaques rebelles envahissent le pays, rappelant ainsi les durs moments de lutte armée ayant conduit à la victoire d'Idriss Deby. Aussi, après seulement quelques mois d'accalmie, les foyers de tensions se ravivent, plongeant le pays dans une situation identique à celle qu'avait créée les actuels tenants du pouvoir.

Il serait impossible de faire ici une présentation synthétique de toutes ces forces et structures rebelles, tant elles sont nombreuses et multiformes. Les rebellions qui seront présentées dans cette partie sont celles qui ont été effectives, c'est à dire qui ont constitué, à un moment de leur existence, une menace pour le régime d'Idriss Deby. Par ailleurs, il convient d'indiquer que nous nous inspirerons dans une certaine mesure des présentations faites dans les ouvrages de Jean Marc Balencie 31(*) et de Mohamed Tétémadi BANGOURA32(*), quand bien même ces travaux procèdent à des classifications de mouvements rebelles en fonction de leurs aires géographiques.

Notre approche obéira à une présentation chronologique des mouvements rebelles (§1) sans occulter le fait que ceux-ci ont une certaine facilité à se fédérer en d'éphémères coalitions. (§2)

§1- Les structures des mouvements rebelles.

Il s'agira dans cette première partie de situer géographiquement les mouvements rebelles (A), d'indiquer les soutiens logiques et financiers dont ils disposent et enfin d'évoquer, dans la mesure du possible, le parcours de leur leader (B).

· A- La localisation des mouvements rebelles.

1- Le Mouvement pour la Démocratie et le Développement - Forces Armées Nationales Tchadiennes (MDD-FANT).

Surpris par la prise du pouvoir d'Idriss Deby, Hissein Habré et ses partisans ne renoncent pas pour autant à le récupérer. Fort des deniers publics amassés pendant la gestion du pays par Hisseine Habré, les barons du régime déchu exilés au Cameroun, en République Centrafricaine et au Niger s'organisent pour reconquérir le pouvoir.

C'est ainsi que naît le MDD-FANT. Ce mouvement recrute essentiellement chez les Goranes du Kanem et chez les Annakazas du Borkou (clan d'origine de Hisseine Habré). Le mouvement est financé par Hisseine Habré (même si officiellement il ne joue aucun rôle) et ses partisans. Le MDD-FANT a opéré à la fin de l'année 1991 et début 1992 autour du lac Tchad. Il était dirigé par Adoum YACOUB, assisté de plusieurs membres de la famille d'Hisseine Habré. Cependant, suite aux dissensions internes (ralliement partiel des combattants au régime d'Idriss Deby33(*), sourde rivalité à la tête du mouvement entre Adoum Yacoub et Mahamat Fadil, scission du printemps 1995 des combattants d'origine krédas conduit par Mahamat Hassabalah34(*) et la scission d'Ahmat Allatchi35(*)), le MDD-FANT disparaît de l`échiquier militaire et politique tchadien.

Outre ces éléments sus indiqués, la désagrégation du mouvement s'explique en partie par les coups sévères portés par l'armée régulière et l'opération tripartite (Tchad, Niger, Nigeria) au cours de laquelle plusieurs combattants du mouvement trouvèrent la mort.

2- Le Mouvement pour la Démocratie et le Développement - Forces armées Occidentales (MDD FAO)

Vu comme l'héritier de FAO-IIIe armée des années 70-80 en raison de sa zone d'implantation (le Kanem et la région du lac Tchad) et de son milieux de recrutement ethnique (les Kanembou et les Boudouma), le MDD FAO apparaît au début de l'année 1991. Il dispose de bases arrières au Niger, au Nigeria et au Cameroun. Il opère dans les régions de Baga Sola et de Tchoukou-Hadjer et dans certaines îles du Lac Tchad. Il est dirigé par Moussa Medella et Ibrahim Mallah et compte un demi-millier de combattants. Compte tenu de sa proximité géographique avec la capitale N'djamena, Idriss Deby entreprit des négociations avec le mouvement qui échouèrent36(*). Nonobstant son poids et sa position géographique favorable, le mouvement connut des dissensions internes : querelles de personnes entraînant la scission en deux tendances, celle de Moussa Medella et celle de Brahim Mallah. Cette dernière tendance prit le nom de MDD- MPLT37(*).

A cette division interne s'ajoute l'absence de moyens financiers. En effet, il faut rappeler que le financement de MDD FAO provient essentiellement de la Diaspora tchadienne vivant au Nigeria et en Arabie Saoudite. Au cours des années 1996-1998, le mouvement replié au Niger et au Nigeria ne cessera de se déliter au profit des alliances. Sa disparition définitive interviendra peu après l'arrestation de Moussa Medella et de son état major38(*)

3- Le Front National du Tchad/Front de Libération du Ouaddaï (le FNT/FO).

Cette formation est née sous les cendres d'un mouvement fondé dans les années 80 par Mahamat Nour adam Barka et se situe dans les confins soudano-tchadien. Elle regroupe plus d'un millier d'hommes repartit entre les hommes du Ouaddaï, des Zaghawa tchadiens et soudanais. Elle a été active au début de 1992 dans les régions d'Abéché et d'Adré ainsi que dans le Darfour. Le docteur Haris BACHAR en assure théoriquement la direction. Mais cette formation va très rapidement se dissoudre suite aux accords39(*) conclu avec le gouvernement ayant abouti au ralliement de Haris BACHAR et de ses partisans.

Cependant, les accords de paix ne vont pas être respectés par le gouvernement. La question de l'intégration et l'insertion des anciens rebelles et de leur casernement à Abéché va constituer la principale pomme de discorde. La lenteur et la mauvaise foi gouvernementale dans l'exécution de cet accord va pousser le docteur Haris Bachar à reprendre le chemin des maquis. Toutefois, depuis octobre 1994 une faction du mouvement dirigée par Mahamat Souboune a signé avec le gouvernement. Le FNT/FLO est scindé en plusieurs branches dont le plus représentatif est le Front National du Tchad-Rénové de Adoum Ahmat alias « Bazooka ».

4- Le conseil national de redressement (CNR)

Suite aux accusations de détournements de fonds et aux rumeurs répétées de coups d'Etat portées à son encontre par le régime d'Idriss Deby, Abbas Koty quitte le Tchad pour le Cameroun. Au même moment plusieurs de ses partisans prennent la direction du nord et de l'est du pays. Koty fonde le CNR en été 1992. Cependant, Koty se trouve très vite dans une impasse politique et militaire. En effet, grâce à un forcing diplomatique d'Idriss Deby, Tripoli et Khartoum n'accordent pas leur soutien à Abbas Koty durant son exil au Cameroun. Cette situation d'isolement le conduit à signer un accord de réconciliation à Tripoli le 13 août 1993 avec Idriss Deby.

Pourtant, le 22 octobre il trouve la mort dans des conditions non encore élucidées. La mort d'Abbas Koty ne met pas pour autant un terme à la lutte armée du CNR. Elle entraîne plutôt sous une solidarité clanique à une forte désertion des militaires issu du clan Kobé de la garde républicaine. Les rescapés du CNR seront dirigés par une direction collégiale comprenant Hissein KOTY, frère cadet du défunt Abbas Koty, et Bichar Idriss AGGAR. Le CNR relance les incursions dans le Guéra, le Biltine et le Ouaddaï. Depuis 1995 le CNR n'a plus fait parlé de lui.

5- Le Forces Nationales de Résistance (le FNR)

Ce mouvement est apparu en fin d'année 1994 sous la direction du lieutenant-colonel Mahamat Garfa. Il naît suite à un désaccord avec les autorités de N'djamena au sujet de la réorganisation de l'armée nationale tchadienne. Dénommé Armée Nationale Tchadienne- Dissidente (ANT-D), il se compose en majorité d'éléments issus de l'ethnie Tama comme Garfa. Leur zone d'activité a commencé dans le Biltine pour s'étendre progressivement dans le Darfour soudanais. Eu égard à son passé, Mahamat Garfa apparaît aux yeux de plusieurs observateurs internationaux comme l'une des principales menaces pour le régime d'Idriss Deby40(*).

6- Le Conseil de Sursaut National pour la Paix et la Démocratie CSNPD

Ce mouvement s'est constitué à la fin du mois de février 1992. Il est dirigé par un officier déserteur de l'armée nationale tchadienne, le lieutenant Kétte Nodji Moise. Il s'est officiellement fait connaître à partir de l'attaque de la garnison de Doba du 20 avril 1992. Il regroupe plus de 500 combattants et opère dans la région du Logone Oriental. Il compte de nombreux sympathisants et s'est progressivement montré actif dans le Mayo-Kebbi, la Tandjilé et les deux Logones. Après les premières incursions de ses éléments, il dût faire face aux importantes représailles des forces gouvernementales.

Ces représailles firent plusieurs victimes au sein de la population civile. Moïse Kétte voit peu à peu son mouvement s'effriter. Le gouvernement tente dans un premier temps de négocier41(*) mais ces négociations ne connurent pas d'issue heureuse. C'est dans ce contexte que débuta en 1993 la conférence nationale qui facilita la conclusion d'un accord entre le gouvernement et le CSNPD. Cet accord mit fin aux hostilités tout en permettant au CSNPD de prendre part à la conférence. Cependant, à l'image des précédents groupes rebelles, celui de Moïse Ketté connaît lui aussi des dissensions internes.

La fragilité interne de son mouvement incite Moïse Ketté à participer aux négociations de Bangui de février 1994 et à signer un accord de cessez le feu le 10 août 1994. Cet accord prévoit la légalisation du CSNPD, sa transformation en parti politique et l'intégration de ses militants au sein de l'ANT.

La signature de cet accord ne trouve pas l'adhésion de tous les membres du CSNPD. Laokein Bardé par exemple va le contester pour créer à son tour le FARF42(*). Cette formation s'imposera au cours de l'année 1995-1998 comme un mouvement incontournable. Mais la disparition du leader Laoukein mit fin à la poursuite de la lutte car ses partisans ont choisi de regagner la légalité.

7- Le Mouvement pour la Justice et la Démocratie au Tchad (MDJT).

Considéré comme le plus important mouvement rebelle de cette décennie43(*), le MDJT fut créé en octobre 1998 par Youssouf TOGOIMI. Ce mouvement recrute dans le milieu Toubou et était actif dans le Tibesti. Il disposait de solides relais sociaux dans la Libye voisine et menait une guerre de basse intensité. En 2000, le gouvernement tente en vain de nouer le dialogue avec le mouvement.

Mais le phénomène de querelles internes atteint à son tour le mouvement. Après la mort de son leader Youssouf TOGOIMI, un de ses lieutenants Adoum Togoï Abbo, se rallie avec une faction du mouvement aux autorités de N'djamena.

· B- Le parcours de certains leaders rebelles

Ce retour sur la trajectoire de certains leaders de groupes rebelles a pour principal objectif de fournir quelques indications pouvant aider à comprendre l'évolution de tel ou tel groupe armé. Nous ne serons pas en mesure de donner des informations sur tous les leaders des groupes rebelles présentés ci-dessus, mais seulement sur ceux dont le parcours est pertinent pour notre analyse.

1- Abbas KOTY  CNR

Il est d'ethnie zaghawa du clan Kobé et apparenté au clan bidéyat d'Idriss Deby par sa grand-mère. Il était un ancien responsable militaire du Gouvernement d'Union Nationale de 1978. Il se rallie à Hisseine Habré en 1985. Il était avec Idriss Deby, Hassan Djamous et Ibrahim Itno l'un des meneurs du coup d'Etat manqué du 1er avril 1989. Il deviendra plus tard l'homme clé de la victoire du MPS en 1990. Après, la victoire du MPS, il fut successivement chef d'état major général des armées, Ministre de la défense avant de prendre la tête du ministère des travaux publics. Il faut aussi observer qu'Abbas KOTY fut l'artificier qui stoppa la progression des anciens partisans d'Hisseine Habré.

2- Mahamat Garfa du FNR

Si Abbas Koty est considéré comme un élément majeur de la victoire du MPS, Mahamat Garfa fait en revanche partie des héros dans l'ombre. Fidèle lieutenant d'Idriss Deby, Mahamat Garfa fut chef d'état major de l'Armée Nationale Tchadienne et ministre des mines et de l'énergie jusqu'à la fin de l'année 1994.

Après s'être rebellé, Garfa finit par signer un accord sous l'égide du Gabon en 2001, où il rejoint son compagnon il fut promu à plusieurs postes ministériels.

3- Ketté Nodji Moïse, chef CSNPD

Originaire du sud, principalement du Logone Oriental, Ketté est juriste de formation avant d'embrasser une carrière militaire. Officier, il fut considéré comme l'instigateur de la lettre ouverte écrite par les officiers sudistes et des évènements qui s'en sont suivis.

Apres s'être retiré dans le sud du pays où il crée son mouvement avec plusieurs autres officiers, il finit par signer un accord de paix avec le gouvernement. Il devient à l'issu de cet accord, directeur général de la sécurité publique puis ministre de la sécurité publique.

Plus tard, il quitte la gestion publique pour tenter une seconde fois sa chance dans le maquis. Il meurt lors de cette seconde rébellion en 1999.

4- Youssouf Toigoimi chef du MDJT

Originaire du Tibesti, Togoimi est Toubou. Ce magistrat formé à l'école de la magistrature de Paris (section internationale) est reconnu pour son franc parlé : il avait notamment critiqué Hisseine Habré lorsqu'il était procureur de la République en poste à Abéché. Avant son entrée en rébellion, Toigoimi a occupé plusieurs postes de responsabilités dans l'exercice de sa fonction de magistrat.

Sous Idriss Deby, il fut ministre de la justice (1990-1993), ministre de la défense (1995-1997) puis, quelques mois plus tard, ministre de l'intérieur. En 1997 il entre officiellement en rébellion contre le régime d'Idriss Deby. Il est mort le 24 septembre 2002 en Libye dans des circonstances troubles.

§2- Les coalitions de rebellions.

Les coalitions de rebellions sont nombreuses. Nous ne pourrons rendre compte de toutes ces coalitions. Seules deux coalitions retiendront notre attention : l'ANR et La CMAP. Ce choix se justifie par l'impact qu'elles produisirent sur la scène politique nationale à travers les dommages qu'elles causèrent au pouvoir central.

· A- L'alliance nationale de la résistance (ANR)

Face à la puissante répression de l'ANT et aux difficultés éprouvées sur les terrains par les différentes formations rebelles, la coalition semble être la seule issue pour venir à bout du régime d'Idriss Deby. En effet, constitués pour la plupart sur des bases individuelles, ethniques voire religieuses dans le seul objectif de prendre le pouvoir, ces mouvements rebelles vont progressivement tenter d'aplanir leurs divergences pour s'associer. La mutualisation des forces rebelles conduit à la création le 16 novembre 1995 de l'Alliance Nationale de Résistance (ANR).

L'ANR regroupe l'ANDT de Mahamat, le FNT de Harris Bachar, le FARF de Laoukein Bardé, le CDR de Acheik Ibn oumar, le FAIDT et les FNR de Garfa. Mahamat Garfa assure la coordination de tous ces mouvements. Mû par le seul désir de renverser Idriss Deby, l'ANR tente de déstabiliser les forces gouvernementales par de régulières incursions. En raison du charisme de Garfa, l'ANR fut considérée comme l'une des principales menaces pour le régime d'Idriss Deby44(*). Pourtant, entre 1997-1998 l'alliance connaît un ralentissement de ses activités sur le plan militaire. Elle se dissout définitivement avec la signature par Mahamat Garfa à Libreville d'un accord de paix avec le gouvernement d'Idriss Deby.

· B- La Coordination des Mouvements Armés et Partis Politiques (CMAP)

C'est dans la recherche d'alternatives au régime d'Idriss Deby qu'est née la CMAP. La CMAP est une coordination de partis politiques (pour la plupart installés à l'étranger) et de mouvements armés plus ou moins actifs sur le terrain. Elle est créée en décembre 1999 et regroupe le Front National Tchadien Rénové (FNTR) de Ahmat yacoub, l'Action Tchadienne pour l'Unité et le Socialisme (ACTUS) de Ley Ngardigal Djimadoum, le Front Uni pour l'Alternance Démocratique (FU/AD) de Jean Prosper Boulada, le Rassemblement pour le Progrès et la Justice Sociale (RPJS) de Bourkou Louise Ngaradoum, le Front Extérieur pour la Rénovation (FER) de Antoine Bangui, le Front Démocratique Populaire de Nahor, l'Alliances des Démocrates Résistants (ADR) de younous Ibedou, la Convention des Forces Nationalistes (CFNT) de Moussa Tchorgue, le Conseil d'Union pour le Renouveau (CURE) de Ngaro Ahidjo, la Force pour le Ratissage et le Redressement du Tchad (FRRT) de Yaya Batit Ali, et enfin le Mouvement pour la Révolution Populaire (MRP) de Titinan Biré.

Comme la défunte ARN, la CMAP ne présente aucun projet de société, moins encore de structure politico-militaire fiable. Exceptions faites de quelques incursions sporadiques menées par certaines branches armées appartenant à la coordination, elle s'est cantonnée à une guerre de communiqués.

En définitive, il faut retenir que cette première décennie de « l'ère Deby » se caractérise par une profonde instabilité politique et militaire. Cet état de fait résulte de la gestion chaotique du pouvoir par Idriss Deby et par les dissensions au niveau des leaders politiques tchadiens. Par ailleurs, il convient de revenir sur les raisons de l'échec de toutes ces tentatives visant à renverser Idriss Deby. Ces échecs s'expliquent soit par l'absence de cohésion interne au sein des mouvements, soit par le fiasco des tentatives de coalition des différents mouvements.

De plus, il faut souligner que la constitution de rébellions devient un fonds de commerce pour les différents chefs de guerre qui cherchent à obtenir des fonctions dans l'appareil de l'Etat. La conséquence de cette mercantilisation des rébellions est que chaque conclusion d'accord entraîne des mécontentements, des scissions et donc la formation de nouveaux mouvements rebelles.

Chapitre 2 L'éclosion des mouvements rebelles de 2001-2008

Pendant la première décennie de son règne, Idriss Deby a dû affronter plusieurs sortes de conflits. D'abord, il fait face, dès sa prise du pouvoir, aux caciques du précédent régime d'Hisseine Habré qui souhaitent revenir sur le devant de la scène politique.

Il est ensuite confronté au phénomène d'empilement des allégeances qu'il avait lui-même utilisé pour conquérir le pouvoir. De plus, son noyau militaire vole très rapidement en éclats à cause de la marginalisation dont sont victimes les militaires qui l'avaient préalablement soutenu. Il faut noter également qu'il a surmonté durant cette période la fronde de la population et de certains groupes d'officiers qui n'ont cessé de critiquer sa gestion du pays.

Mais, en dépit de tous ces tumultes, il a résisté et s'est même constitué un autre soutien, celui de son clan zaghawa. Grâce au soutien de ce clan et de ses alliés, Idriss Deby pense assurer la pérennité de son régime.

Cependant, ce soutien clanique, pour des raisons de partage du pouvoir, va lui aussi voler en éclat. De ces dissensions claniques entre Zaghawa naîtront la majeure partie de la seconde vague de rebellions. Ces dernières viendront grossir le rang des anciens mouvements qui continuent toujours de mener la lutte armée contre le pouvoir. Si ce recours à la lutte armée contre le régime d'Idriss Deby n'apparaît pas comme un fait nouveau, de nouveaux facteurs entrent en jeu dans la formation de ces rebellions (section 1). La présentation de ces facteurs nous aidera dans l'identification de ces nouvelles rébellions et coalitions rebelles (section 2).

Section 1 Les nouveaux facteurs de l'émergence des rébellions.

Un observateur averti de la scène insurrectionnelle tchadienne pourrait dire qu'il n'y a pas véritablement de changement dans les causes qui expliquent la naissance de cette seconde vague de rébellions. La nature des revendications et les acteurs n'ont pas profondément changé depuis FROLINAT jusqu'à aujourd'hui. On retrouve toujours en filigrane la question du partage du pouvoir, de la forme de l'état, de l'éthnitisation du pouvoir.

Toutefois, depuis le début de l'année 2000, on peut noter une relative mutation dans les revendications des rébellions ainsi que l'apparition de nouveaux acteurs. Cette mutation des revendications s'explique dans une certaine mesure par l'ouverture démocratique voulue par le régime de N'djamena et la gestion des revenus du pétrole. Notons par ailleurs l'implication active du gouvernement soudanais dans l'émergence de ces nouvelles rebellions. Ces éléments font que les facteurs qui légitiment la prise des armes aujourd'hui au Tchad sont tant endogènes (§1) qu'exogènes (§2).

§1- Les facteurs endogènes

Les opposants au régime d'Idriss Deby peuvent trouver plusieurs raisons pour justifier leur recours aux armes. Nous ne pourrons malheureusement pas, au cours de cette analyse, toutes les identifier. Nous nous limiterons aux questions relatives à la difficile mise en oeuvre du processus démocratique (A) et à la mauvaise gouvernance (B).

· A- La difficile mise en oeuvre du processus démocratique.

Une observation attentive de la manière avec laquelle Idriss Déby règle les questions des mouvements rebelles, pendant la première décennie de sa gestion du pays, fait apparaître de façon éloquente l'issue des accords de paix signés avec les différentes factions rebelles.

En effet, dans le but d'instaurer la paix et la cohésion sociale, plusieurs formations rebelles ont signés des accords de paix avec le gouvernement. Pour la plupart, ces accords se résument à la mutation de la branche armée en parti politique, à l'intégration des anciens rebelles dans les forces armées gouvernementales et à l'insertion de ceux qui le désirent dans la vie socio-professionnelle.

Mais très vite, il est apparu que ces accords sont devenus une stratégie politique du président Déby visant à diviser les rebellions et à atténuer leur ardeur. A la différence d'Hisseine Habré qui répondait à toute dissidence, velléitaire ou ouverte, par une répression aveugle visant indistinctement l'ensemble du groupe ethnique concerné45(*), Idriss Déby a en revanche tempéré l'usage de la force et a privilégié le recours aux moyens financiers pour diviser les dissidents. L'échec de la plupart des alliances entre dissidents est le résultat de cette tactique. Il s'est maintenu en rachetant des anciennes allégeances temporaires passées entre dissidences ou en créant de nouvelles dans l'entourage adverse46(*). Cette tactique a jusque là porté ses fruits et a permit au régime de surmonter les défis des mouvements rebelles. Elle a aussi occasionné le retour de nombreux combattants du maquis au sein des forces gouvernementales. C'est ce qui explique en partie une nette floraison des formations rebelles dans la période allant de 2001 à 2008.

Outre la question de la gestion des accords, se trouve l'épineux problème de la consolidation du processus démocratique. En effet, le processus de démocratisation enclenché en 1990 avec la venue d'Idriss Déby n'a pas produit les résultats escomptés. Dès le début de la conférence nationale jusqu'aux consultations référendaires, législatives et présidentielles qui se sont succédées, les contestations n'ont pas cessé de grandir. Et la démocratie apparaît comme une simple vitrine vivant à donner bonne conscience au régime.

Devant les critiques de la population et les nombreuses réserves émises par la communauté internationale, Idriss Déby s'est engagé à respecter la constitution en promettant de ne pas la modifier pour briguer un troisième mandat. Cette promesse sonne comme une voie de succession ouverte dans le cercle des dirigeants du MPS et de l'Etat.

A partir de 2002, des cercles de réflexion zaghawa planchent sur la question de succession et le nom de Timane Erdimi est évoqué comme une alternative47(*). Mais au congrès du MPS de 2003, le débat tourne autour d'un troisième mandat et d'une éventuelle modification constitutionnelle. Paradoxalement, deux éminences grises du MPS, les frères Erdimi, étaient absents à ce congrès48(*). La proposition de loi de la révision fût adoptée par l'Assemblée Nationale (majoritairement issu du MPS) le 23 mai 2004. Un referendum va avaliser la modification constitutionnelle le 6 juin 2005. Cette modification permet à Idriss Déby de briguer un troisième mandat et de se représenter sans aucune limitation.

Cette situation va être perçue par certaines élites zaghawa (au rang desquelles figurent les frères Erdimi), ainsi que par certains barons du MPS qui aspiraient à remplacer Idriss Deby (Hassaballah Soubiane), comme un coup d'Etat. Ces derniers préfèreront l'option militaire à celle d'un dialogue démocratique avec Idriss Deby. Cette volonté de pérenniser son pouvoir, et face aux différentes contestations va faire resurgir la question de la bonne gouvernance.

· B-La question de la gouvernance

La crise de l'Etat au Tchad prend un accent particulier depuis un certain temps. Cette tournure s'explique entre autre par le développement du clientélisme, la généralisation de la corruption et la « malédiction » pétrolière. Durant ses premières années de règne, Idriss Déby avait fait des services centraux de l'Etat ainsi que de ses extensions (les sociétés nationales) des instruments de redistribution des privilèges et des prébendes pour ses proches. Ce système qui fonctionne en faveur des membres de la famille, du clan, connaît une nouvelle orientation. Il bénéficie de plus en plus aux courtisans et moins à la famille elle-même. Certains de ces courtisans occupent des postes stratégiques dans les sociétés nationales49(*). Ce système permet l'alimentation d'un vaste réseau de clientélisme et est à l'origine d'une déperdition fiscale considérable50(*). Cette pratique atteint tous les services de l'Etat et a permis au Tchad d'obtenir le tristement célèbre trophée de Transparency International51(*).

A cette corruption ambiante, la gestion du revenu pétrolier s'invite dans le débat. En effet, les grands espoirs nés de l'accession du Tchad au club des pays producteurs de l'or noir vont s'évaporer. Constituant l'investissement le plus élevé d'Afrique, l'exploitation du pétrole tchadien était vu comme un modèle grâce à l'adoption de la loi portant sur la gestion de revenus pétroliers52(*). Cette loi reçu un échos particulier car elle prévoyait un fonds pour les générations futures et un collège du contrôle de surveillance des ressources pétrolières. Mais quelques années après la promulgation de cette loi et la réception des premières dividendes, la loi fût modifiée53(*). La nouvelle loi consacre de facto la disparition du fonds pour les générations futures et une redéfinition des secteurs prioritaires, désormais laissée à la discrétion du gouvernement. L'éducation, la santé, les infrastructures ne sont plus les seuls domaines prioritaires pour lesquels le revenu du pétrole doit être consacré. La nouvelle réorientation permet dorénavant d'inclure les secteurs de l'administration et de la sécurité comme faisant partie des priorités.

Et aujourd'hui le Président ne se cache pas d'utiliser l'argent du pétrole pour acheter des armes54(*). Cette situation de gestion chaotique du revenu pétrolier est présente dans les revendications des rebelles. Mais il convient aussi de remarquer que les facteurs déclenchant cette nouvelle vague de rebellions se trouvent également à l'extérieur du Tchad.

§2- Les facteurs exogènes.

Il n'est de doute aujourd'hui pour personne qu'il existe une connexité entre l'instabilité politique au Tchad et la guerre qui sévit au Darfour55(*). Cette connexion s'explique tant par des raisons démographiques, historiques et politiques. Mais surtout par la posture de Déby dans la gestion de la crise soudanaise (A) qui trouve échos du côté du gouvernement du Soudan (B).

· A-La posture d'Idriss Déby dans la gestion de la crise du Darfour

Ayant bénéficié du soutien logistique et financier du régime de Khartoum lors de sa conquête du pouvoir en 1990, Idriss Déby, en guise de reconnaissance, est resté un allié loyal du régime soudanais jusqu'au début du conflit du Darfour. Cette loyauté s'est traduite par le refus opposé par ce dernier lorsque les groupes de rebelles du Darfour et du sud soudan ont sollicité son concours56(*).

Mais à partir de 2003, Déby n'était plus en mesure d'empêcher les deux mouvements rebelles du Darfour, l'armée de Libération du soudan (SLA) et le mouvement pour la justice et l'égalité (JEM), de faire du Tchad une base arrière, de lever des combattants et de rechercher le soutien des Béri tchadiens.

Malgré ses nombreux gestes de fidélité (l'envoi en 2003 des troupes tchadiennes pour lutter contre le SLA et le JEM, l'arrestation par les autorités tchadiennes de deux leaders57(*) pour les livrer au Soudan, l'acceptation de jouer la carte de Khartoum en créant des divisions au sein de JEM), Deby ne bénéficie plus de la sympathie de Khartoum. Il est plus que jamais pris en étau entre son alliance avec EL Bechir et sa solidarité avec les Béri soudanais, les deux camps qui lui ont permis d'accéder au pouvoir. Cette situation fait planer le doute sur un double jeu possible58(*).

En 2005, Idriss Déby ne résiste plus et cède à la pression Béri pour accorder aux rebelles zaghawa du Darfour des équipements et le droit de se servir du Tchad comme base arrière. Ce revirement place Idriss Déby dans la catégorie des anciens alliés devenus encombrants et qu'il faut remplacer ; d'où le soutien de Khartoum aux rebellions en prise avec le pouvoir de N'djamena.

· B- Khartoum et les rebelles tchadiens.

Qui mieux que Déby peut comprendre que toutes les rebellions ayant conquis le pouvoir de N'djamena, à l'exception de Malloum, doivent leurs victoires au Soudan59(*). Et la situation dans laquelle il se trouve avec la solidarité Béri ne peut contribuer qu'à l'éloigner de Khartoum son ancien mentor. Khartoum ne tarde pas à entrevoir le remplacement de Déby.

Dés l'été 2004, Khartoum change de perception par rapport au régime de N'djamena. Ce changement s'opère en faveur des groupes des rebelles tchadiens qui trouvent enfin des interlocuteurs du côté soudanais.

Pour ce faire, Khartoum tente d'organiser les rebelles tchadiens, d'abord pour leur cantonnement, puis l'armement et le financement. Ce renforcement des rebelles obéit à deux logiques : prêter mains fortes à Khartoum contre les insurgés darfouriens d'une part, et évincer Déby du pouvoir afin que cessent tous liens financiers entre les Beri d'autre part. Le soutien permet la mobilisation des opposants en quête de soutien populaire, d'argent, et d'une légitimité qui leur permettrait de faire valoir leur ambition un jour au Tchad. Et les coalitions d'avril 2006 ou de février 2008 sont les traductions concrètes de la volonté de Khartoum.

Le choix de Khartoum est fait en tenant compte de paramètres sociologiques tels que les rivalités entre les Zaghawa et les Tama ou encore Arabes. Ce savant dosage a permis à Khartoum de soutenir Mahamat Nour, chef de la formation front uni pour le changement qui avait échoué aux portes de N'djamena en avril 2006. C'est aussi le cas de la coalition qui, en février 2008, a failli prendre le pouvoir n'eut été les dissonances entre les chefs rebelles. Depuis, par rebelles interposés, Khartoum et N'djamena se livrent une guerre par procuration aux conséquences désastreuses pour les populations civiles tant côté tchadien que soudanais.

Section 2 Les formations rebelles

La facilité avec laquelle les rebellions tchadiennes des dernières années naissent, forment les alliances et changent d'appellation rend assez difficile de procéder à une trajectoire linéaire. Toutefois, partant de l'observation de la scène insurrectionnelle, certains acteurs apparaissent de manière décisive qu'il convient de les élucider (§1) et de procéder à quelques présentations laconiques des chefs rebelles (§2).

§1- Les différentes formations et coalitions.

Dans la floraison de rebellions qui s'observe actuellement à l'est et au nord est du Tchad, les coalitions sont très fréquentes (B) même si éphémères. Elles naissent en général des petites formations (A).

· A-Les différentes factions rebelles.

1-Front Populaire pour la Renaissance Nationale (FPRN)

C'est la formation rebelle créée en 2001 par Adoum Yacoub, originaire du Ouaddaï. Cette formation puise ses combattants chez les Ouaddaïens et les Massalit. Basée dans le Darfour ouest, elle n'a pas reçu un grand soutien de Khartoum et n'est partie à l'accord de Syrte. Elle opère dans la région de Tissi, à la frontière entre le Tchad, le Soudan et la Centrafrique.

2-Concorde Nationale du Tchad (CNT)

Apparue en 2004, la concorde est l'émanation de Hassan Saleh Al-Gaddam dit «  Al-Jineidi », un Arabe Hemat tchadien. Ses combattants sont de même ethnie que le chef Al-Jineidi. C'est la formation qui a contrôlé pendant un bon moment les régions de Daguessa et de Tissi dans le Sud-Est entre 2006 et 2007. Le groupe aurait des liens étroits avec les janjawids actifs au Tchad et dans le Darfour Ouest. Ancien membre du Conseil Démocratique Révolutionnaire et ancien vice président de FUC, Al-Jineidi a été partie à l'accord de Syrte. Après les échecs de l'accord, il entrepris des pourparlers avec le régime et s'y rallia, suivi d'une bonne partie de ses forces60(*).

3- Le Rassemblement pour la Démocratie et les Libertés ou RDL

Né sous les cendres de l'ANR (Cf. chp1) du fait du ralliement de Mahamat Garfa, le RDL est fondé en 2005 par Mahamat Nour. Il constitue la principale branche du FUC (voir plus bas). Il recrute principalement parmi les Tama (Tchadiens et Soudanais), les Arabes tchadiens (principalement les Ergat de Dar Tama) ainsi que les Ouaddaïens. En raison des rapports que chef Mahamat Nour entretient avec la Soudan est à la base du FUC.

4- Front pour le Salut de la République ou le FSR

Le front a été fondé en 2007 par Ahmat Hassaballah Soubiane61(*), un Arabe tchadien de la branche des Mahamid. Il comptait environ 1000 homme en 2008, et n'est partie à l'accord de Syrte. A défaut d'obtenir le soutien de Khartoum, il a tenté plusieurs coalitions notamment avec le FPRN (ci-dessus). Ce mouvement est né suite à la modification constitutionnelle contestée par Soubiane qui voit ses ambitions présidentielles bloquées.

· B-Les coalitions éphémères des rebellions

Plusieurs tentatives ont été faites pour fédérer les forces des rebellions afin de renverser Déby. Ces différentes coalitions ont été créées sous l'impulsion soudanaise qui souhaite se débarrasser de son ancien prodige. Mais la plupart de ces coalitions tournent court en raison des querelles de leadership, ou des considérations ethniques ou matérielles.

Outre ces questions, il convient de signaler le manque de projet politique de ces coalitions et leur incapacité à avoir un commandement intégré, préférant toujours agir en coalition tout en gardant leurs commandements respectifs. Il s'agit de :

1- Le Front Uni pour le Changement (Démocratique). FUC ou FUCD

Il résulte de la coalition de décembre 2005 et avait pour ambition de fédérer l'ensemble des factions rebelles tchadiennes contre Déby. Il regroupe à sa fondation le Rassemblement des forces démocratiques (RAFD) de Timane Erdimi, le Rassemblement Pour la Justice (RPJ) de Abakar Tolli et certains reliquats du Mouvement pour la Démocratie et la Justice au Tchad (MDJT) ainsi que certaines factions dont la réalité militaire sur le terrain reste discutable. Il est sous le commandement de Mahamat Nour Abdelkerim, un Tama.

Il représente la première tentative de fédération soudanaise. A son apogée en avril 2006, le FUC comptait 5000 à 7000 hommes62(*). Mais depuis l'offensive ratée d'avril 2006, il s'est peu à peu désagrégé en raison de dissensions. En mars 2007, quelques combattants et Nour se sont ralliés à la suite d'un accord de paix. Cependant, plusieurs centaines de combattants sont revenus à la rebellions et ont rejoint le rang d'autres formations.

2- Union des Forces pour la Démocratie et le Développement ou UFDD.

L'UFDD est fondée le 22 octobre 2006 sous la direction de Mahamat Nouri, un Gorane du sous groupe Anakassa, comme Hisseine Habré. Elle regroupe principalement le Conseil Démocratique Révolutionnaire (CDR) de Acheik Ibn Oumar, le front uni pour le changement ( FUC) de Mackaye, et l'Union de Forces pour le Progrès et la Démocratie (UFPD) de Mahamat Nouri.

En 2007, l'UFDD regroupe près de 3000 hommes parmi lesquels on dénombre les Ouddaiens, les Arabes, les Goranes et les Bideyats du sous groupes Borogate63(*). Elle opère au sud est du Tchad, à Adré, Abéché et l'ouest de l'Ennedi. Cette union née à la suite de la désagrégation du FUC rentre dans la deuxième stratégie de Khartoum de rassembler les rebelles sous une seule bannière. Souscrivant à l'accord de Syrte d'octobre 2007, l'UFDD a connu plusieurs scissions. Elle reste aujourd'hui la faction du chef Nouri de 2006.

3-UFDD-Fondamentale.

Née à la suite des tensions entre Arabes et Goranes qui régnaient au sein de l'UFDD,  elle est une faction arabe dissidente de l'UFDD formée en mai 2007 sous la direction de Acheik Ibn Oumar et Abdelwahid Aboud Makaye. Elle regroupe le CDR, le FIDEL (forces pour l'instauration de la démocratie et les libertés) d'Abdelwahid Aboud Makaye, le CPR (Concorde pour le Progrès et le Redressement) d'Amine Ben Barka. Elle comptait en 2007 1000 hommes et a souscrit à l'accord de Syrte. L'UFDD-F apparaît comme un groupe essentiellement arabe.

4-Alliance nationale ou AN

Après les échecs du FUC et de l'UFDD et sous l'impulsion soudanaise, l'AN a été fondée en février 2008. Elle est dirigée par Mahamat Nouri et regroupe quatre principales formations :

UFDD (voir ci -dessus)

1- Union des forces pour le changement et la démocratie ou UFCD. C'est la formation que dirige Adouma Hassaballah. Elle a été fondée en mars 2008 après les déboires de son leader avec le UFDD et FUC. Elle compte 2000 hommes issus du Ouaddaï pour la plupart anciens de l'UFDD et de FUC.

- UFDD-Fondamental voir ci-dessus.

- Front pour le salut de la république cf. FSR (§1-A-4)

5-Rassemblement des forces pour le changement/ Rassemblement des forces démocratiques ou RFC/RAFD.

Née en 2005, la coalition regroupe pour sa majeur partie les déserteurs Bidéyat, dont le principal est le Socle pour le changement, l'unité et la démocratie (SCUD). Le Socle pour le changement, l'unité et la démocratie (SCUD) est née de la forte défection qui avait eu lieu dans les rangs de la garde républicaine 2005, essentiellement des Bidéyat. Il fût dirigé par Yaya Dillo Djerou64(*), neveu des Erdimi. Ce mouvement formé essentiellement des intellectuels zaghawa est apparu sous l'appellation Rassemblement des Forces Démocratiques (RAFD), avant d'être rebaptisé RFC à la suite de l'alliance avec le Rassemblement Démocratique Populaire (RNDP) Ouaddaï.

Aujourd'hui la direction du mouvement est assurée par Timane Erdimi, une personnalité importante du dispositif du régime Déby entrée en rébellion. Le RAFD est établi dans la région de Hadjer Morfaïn, à la frontière orientale du Guéréda, et disposerait de 3000 hommes65(*). Cette formation n'est pas très appréciée du milieu rebelle tchadien ni de Khartoum à cause de ses liens familiaux avec le régime Déby.

L'échos particulier des rebellions qui agissent actuellement s'explique en grande partie par la figure des chefs rebelles.

§2- La figure des chefs rebelles.

Une chose que l'on peut retenir des différentes formations rebelles est qu'elles sont conduites par des personnalités qui ont été plus ou moins proches du pouvoir d'Idriss Déby. Contrairement à la première vague de rebellions qui tentent de trouver leur légitimation dans le partage du pouvoir entre associés, la seconde tient sa logique dans la volonté de nombreux collaborateurs de s'affranchir de leur « parrain ».

Ces collaborateurs devenus rebelles sont nombreux et nous ne pourrions pas tous les énumérer ici. En outre, dans les développements qui suivent, ce sont quelques indications sommaires de certains leaders qui peuvent faciliter la compréhension qui seront écrits.

1- Mahamat Nour  Abdelkerim.

Mahamat Nour  Abdelkerim appartient au groupe ouaddaïen des Tama et est le petit fils de leur sultanat. Il fait partie des héros de l'ombre de la victoire de décembre 1990 et devient préfet de Biltine. Lors du retour de Garfa à la rébellion, il suit son oncle Mahamat Garfa. Lors de la rébellion de ce dernier, Nour fait partie de ses hommes clés.

Après l'accord intervenu entre Déby et son oncle Garfa, Nour décide de faire cavalier seul compte tenu de son antipathie vis à vis des zaghawa. Soutenu par Khartoum, Nour a failli prendre le pouvoir en avril 2006 avant de signer un accord avec Déby.

Affaibli politiquement après l'attaque d'avril 2006, il signe l'accord en décembre 2006 et prend le poste de ministre de la défense. Mais très vite, l'accord tourne court ; Nour échappe à un assassinat et se réfugie à l'Ambassade de la Libye au Tchad d'où il apprendra son limogeage le 1er décembre 2007.

2-Mahamat Allatchi Nouri dirigeant de l'UFFD

Originaire de Faya Largeau, Nouri est d'ethnie Gorane du sous clan des Anakaza comme Hisseine Habré. Agent de poste de profession, il s'engage en 1969 dans le FROLINAT. Après plusieurs scissions intervenues dans le Frolinat, il fonde avec Habré les forces armées du nord (FAN). A la suite des accords de Khartoum de 1978 ayant conduit Habré à entrer dans le gouvernement d'union nationale du Tchad, Nouri occupe le poste de ministre de l'intérieur. En 1982, à la victoire des forces conduites par Habré, il occupe le poste du ministère des transports et de l'aviation civile.

Evoluant toujours du côté des gagnants, Nouri prête ses services à Idriss Déby lorsque celui-ci s'empare du pouvoir au détriment de Habré. Ce revirement permit à Nouri d'être préfet du Borkou Ennedi Tibesti, et d'occuper plusieurs fonctions ministérielles notamment celui de la défense. Il finit par être nommé ambassadeur du Tchad en Arabie Saoudite. C'est ce poste qu'il quitte en 2006 pour reprendre les armes. Il fonde l'UFDP qui deviendra l'UFFD à la suite de l'union éphémère avec le CDR.

Mais suite aux nombreuses querelles entre Nouri et d'autres groupes rebelles, notamment les Timan, Nouri maintient toujours ses forces et sa rébellion.

3-Ahmat Hassaballah Soubiane

Ancien membre fondateur du MPS, haut cadre du régime Déby, Souboubiane est un arabe du Guéra. Il fut Préfet dans le Logone occidentale et Ministre de la sécurité publique en 1992. Durant ce mandat il reçu le sobriquet « bavure » par la presse locale pour son opiniâtreté à défendre les exactions commises contre les populations civiles par les forces gouvernementales lancées contre le mouvement de Ketté Nodji Moise.

Il fut aussi ambassadeur du Tchad aux Etats-Unis et au Canada, poste qu'il quitte pour entrer en rébellion afin de protester contre la modification constitutionnelle. Il vient de signer un accord avec le pouvoir de N'djamena.

4- Les frères ERDIMI : Tom et Timane ou les ex-idéologues du régime Déby

Jusqu'en 2005, les jumeaux Erdimi sont considérés comme les têtes pensantes du régime et ont tous les pouvoirs. Ils sont zaghawa.

Tom Erdimi est physicien de formation et enseignant chercheur à la faculté des sciences exactes appliquées de Farcha. Il fut le tout premier directeur de cabinet civil de son oncle Déby en 1991. Il a été recteur de l'Université de N'djamena et coordonnateur national du projet Pétrole de Doba. Il a également représenté le Tchad au consortium pétrole de Exxon Mobil à Houston (1997) d'où il a noué des liens étroits avec des pétroliers texans. Il est officiellement aujourd'hui aux Etats-unis mais exerce une influence considérable sur le mouvement rebelle que dirige son frère Timane Erdimi.

Timane Erdimi, inconnu du milieu politique tchadien jusqu'à la prise du pouvoir de 1990, a succédé un temps à son frère Tom Erdimi à la direction du cabinet civil de son oncle Déby. Il a aussi été le président du conseil d'administration de la société Coton Tchad, première mamelle de l'économie avant l'exploitation du pétrole. Dans le cercle zaghawa, il a été perçu, avant le congrès du MPS qui a abouti à la modification constitutionnelle, comme l'alternative à son oncle Déby. Il est à la tête du RFC.

Les rébellions naissent, se transforment, sans pour autant venir à bout du régime de Déby. Cette situation trouve ses éléments de compréhension dans le caractère ethnique très marqué des rebellions de ces dernières années. Elle s'explique aussi par l'animosité et la guerre de leadership entre les chefs rebelles. C'est pourquoi les alliances ne sont qu'éphémères. Elles ne peuvent permettre d'opérer un changement, mais participent beaucoup plus à des logiques de positionnement sur l'échiquier politique des acteurs rebelles. Si cette logique n'est pas nouvelle, puisque pratiquée par les devancières, elle devient une pratique quasi internalisée par les chefs rebelles.

Partie 2 Les logiques à l'oeuvre dans les mouvements rebelles tchadiens.

L'histoire du Tchad est certes tumultueuse, mais on peut retenir que le régime d'Idriss Déby a été, de tous ces prédécesseurs, celui qui s'est le plus confronté à des vagues de contestations armées. Ce foisonnement de contestations armées s'explique par plusieurs facteurs : l'échec de l'instauration de la démocratie comme mode de gestion publique, l'exploitation du pétrole, la crise du Darfour, etc.

Cependant, force est de constater qu'aucune formation ou coalition rebelle n'a pu jusque là ébranler le régime d'Idriss Déby. Ce constat d'échec résulte de l'état des organisations rebelles, des querelles entre chefs rebelles, mais aussi du manque d'appui extérieur. Cependant, la scène insurrectionnelle tchadienne demeure plus riche qu'hier.

Si l'ambition affichée est de renverser Idriss Déby, force est de constater que cet objectif n'est pas aujourd'hui atteint. Il convient donc d'appréhender ce qui peut expliquer un tel engouement, c'est à dire les autres sources de motivation de l'éclosion des mouvements rebelles.

La recherche de ces nouvelles motivations, ces logiques, conduit à analyser la question des rébellions actuelles au Tchad comme moyen d'accumulation de richesses (Chapitre 3) d'une part, et comme logique de revanche et de contribution à la pérennisation du pouvoir d'Idriss Déby de l'autre (chapitre 4).

Chapitre3 Les rébellions comme logique d'accumulation de richesse

Toutes les forces rebelles en activité au Tchad ont officiellement pris les armes pour demander ou opérer un changement qu'elles ne peuvent obtenir par les voix légales. Cette situation s'explique par les difficultés à faire émerger un régime démocratique au Tchad : élections truquées, gabegie dans la gestion publique, inexistence d'une armée nationale, présidence à vie pour celui qui le détient, non-respect des droits et libertés fondamentales, liberté de presse confisquée, etc. Si l'on s'en tient à ce chapelet de doléances, il paraît difficile de reprocher quoi que ce soit à tous ceux et toutes celles qui choisissent la voix des armes.

Malheureusement, la pratique et l'issue des rebellions poussent davantage à voir les chefs rebelles comme des entrepreneurs de la guerre66(*). La logique commerciale s'observe très nettement dans la précipitation avec laquelle la conclusion des accords de paix (section 2) se matérialise. Ces accords de paix sont synonymes d'accès à des hautes fonctions ; ils recèlent de facteurs (section 1) qu'il convient de circonscrire.

Section 1 Les facteurs conduisant à la conclusion des accords.

Plusieurs facteurs peuvent être mobilisés ici pour tenter de justifier le changement de tactique que peut opérer une faction ou une coalition rebelle en signant un accord de paix. Pour ce travail, nous en retiendrons deux : le manque de travail politique des rébellions (§1) et les rapports entre les rébellions et les zones sous leur contrôle (§2).

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§1- Le manque de travail politique des rébellions.

La réussite d'une rébellion contre n'importe quel ordre constitué suppose deux choses : l'action, c'est à dire la lutte armée sur le terrain, et le travail politique qui doit accompagner cette action.

Les différentes rébellions sous Idris Déby ont constitué, à un moment de leur existence, une réelle menace pour les forces gouvernementales. Certaines sont passées à quelques doigts du pouvoir. Mais si aujourd'hui ces victoires militaires parcellaires n'ont pas réussi à renverser le régime, c'est que l'action armée à elle seule reste insuffisante pour changer la situation. Il faut impérativement l'associer à un travail politique.

Par travail politique, nous entendons le discours que doit porter la rébellion au sein de la population pour expliquer le bien fondé du mouvement afin que celle-ci adhère à la cause rebelle ; l'objectif étant, à terme, de faire prendre conscience à la population de l'oppression dont elle est victime. C'est un travail de sensibilisation, de propagande.

Le travail politique doit précéder et accompagner la lutte armée. L'histoire de la victoire des grandes révolutions nées de rébellions est illustrative : la révolution russe, la révolution française, la révolution chinoise de Mao ou les luttes de libération en Afrique, etc. Elle atteste de l'importance du travail politique et les effets que cela peut produire sur la population. Quand il est accomplit, le travail politique conduit la population à ne plus respecter l'ordre établi. Il peut être à l'origine du déclenchement de l'adhésion de la population à la cause rebelle. Cette adhésion peut se traduire de plusieurs façons : soutien moral et financier, engagement des jeunes comme combattants, refus de la population à obéir à l'autorité légalement établie, etc. C'est la création de ce que Gérard Chaliand appelle « l'infrastructure politique clandestine »67(*).

Le déclenchement de ce processus dépend de la capacité des dirigeants rebelles à communiquer avec la population, à leur expliquer de manière claire le projet de société dont ils sont porteurs, le pourquoi de l'opportunité de leur lutte, les avantages que la victoire de la rébellion accorderait à la population, etc. En clair, c'est l'idéologie politique dont il est question.

Or au Tchad, la rébellion se crée comme le résume cette déclaration : « Vous êtes mécontents de votre situation ? Vous voulez rapidement accéder aux sommités de l'État et aux privilèges reluisants ? Vous avez des comptes à régler avec X ou Y tribu ? Rien de plus facile... Il vous suffira de devenir un `rebelle' ou plus pudiquement `un politico-militaire »68(*).

Cette déclaration qui émane d'un acteur, un porte-parole d'une ancienne coalition rebelle FUC, est assez révélatrice. Elle traduit la pauvreté, l'absence dans les rébellions tchadiennes de la prise en compte du travail politique. Et Allazam de poursuivre « ... Ce qui nous manque c'est l'esprit de sacrifice pour la patrie. La force de Déby repose sur notre amateurisme et notre absence de patriotisme. »69(*)

En effet, comme nous avons pu le décrire dans la première partie de ce travail, les rébellions naissent souvent sous l'initiative d'une personne, d'un cercle d'amis. A l'origine, c'est parfois des considérations d'ordre personnel, ethnique, tribal ou régional, qui conduisent à la rébellion. De ce fait, il est vraiment difficile d'avoir une doctrine ou un projet de société qui puisse réussir un jour à trouver l'adhésion de la population. Une lecture attentive des différents projets de société proposés sur les sites70(*) Internet des rébellions conduit à dire que nous sommes en face des « rébellions copier-coller »71(*).

Le plus grand projet est le départ du « criminel, sanguinaire, dictateur, étranger Idriss Déby » du pouvoir. A part cette hargne, cet acharnement à vouloir le départ de Déby du pouvoir, il n'existe presque pas de projet de société des rébellions. C'est ce qui complique davantage la réalisation d'un travail politique.

Outre cette inexistence de projet politique, il faut signaler que ceux qui sont aujourd'hui à la tête des différentes formations ou coalitions rebelles ont été presque tous des « très proches collaborateurs » du régime ; et donc comptables d'une partie de la gestion du pouvoir Déby. Et Allazam Albassaty constate «  Il y a parmi nous des voleurs des deniers publics, des anciens fanfarons du régime [de Déby] en disgrâce avec ce dernier, des coupeurs de routes, des marabouts ratés, une brochette assez grasse de crétins... Au lieu de chercher à vaincre Déby, il faudrait d'abord se vaincre. Vaincre notre égoïsme, notre opportunisme, nos coups bas ; en un mot vaincre notre morale politiquement criminelle... Je dirais même qu'ils [les leaders politico-militaires actuels] sont à la limite très dangereux pour la république ; surtout pour l'avenir de la jeunesse qu'ils dupent... » 72(*).

C'est pourquoi aujourd'hui aucun chef rebelle ne peut, de manière claire, établir sa part de responsabilité quand il était aux commandes avec Déby. Chaque chef rebelle brandit, à qui veut l'entendre, la responsabilité du président du MPS dans la dérive du pouvoir en place, sans pourtant s'exprimer sur sa propre contribution. En expliquant leur part de responsabilité dans la gestion des affaires publiques par exemple, les différents chefs rebelles auraient, par un travail politique, amené bien des personnes, même les plus sceptiques, à soutenir leurs actions. Une telle auto-évaluation des leaders politico-militaires établirait la confiance entre les insurgés et la population. Mais il n'en est point question. Ce qui, au demeurant, rend très difficile la collaboration entre les populations et les rebelles dans les zones sous leur contrôle.

§2 Le rapport population et rebelles dans les zones sous contrôle rebelle.

Le plus gros perdant de la vague des rébellions et des répressions successives qui en ont résulté est la population civile. Elle reste la cible tant des actions des forces gouvernementales que celle des rebelles.

D'ordinaire les rebellions tchadiennes ont comme base arrière la localité dont sont issus leurs chefs. C'est là où le recrutement des combattants se fait et où le quartier général tente de prendre place. Ce processus d'installation de la rébellion ne reçoit pas forcement l'adhésion des chefs traditionnels et religieux locaux.

Ce climat de suspicion fait parfois naître un sentiment d'animosité entre ces derniers et les rebelles. Ce qui conduit souvent les rebelles à installer une « administration bis », visant au besoin, à destituer tous les détenteurs du pouvoir local qui ne veulent pas coopérer.

A ce climat d'animosité s'ajoutent « les impôts parallèles »73(*) que les paysans doivent payer et l'enrôlement forcé de leurs progénitures. Cette situation rend délétère la collaboration rebelles-populations, car faute de travail politique préalable, la population n'arrive toujours pas à comprendre les motifs de l'insurrection et pourquoi elle doit y contribuer.

Outre ce climat de harcèlement de la population par la rébellion, on retrouve aussi la répression des forces légales ou gouvernementales.

En effet, dans le cadre de la répression des rebelles par les forces gouvernementales, on assiste parfois à une répression de la population civile. Cette situation rentre peut être dans la stratégie du gouvernement qui consiste à faire craindre le pire à la population qui souhaiterait s'engager ou soutenir les rebelles.

Et depuis la prise du pouvoir par le MPS, sans dépasser le niveau de violence connu sous Habré où les villages entiers étaient brûlés, les exemples deviennent de plus en plus nombreux et criards. Les forces armées, lors de leurs différentes interventions contre les incursions rebelles, n'épargnent parfois pas les populations civiles. En 1991, lors de « l'affaire Maldoum Bada Abbas », une chasse aux sorcières a été menée contre la communauté Hadjaraï74(*). Pendant la lutte opposant les insurgés du CSNPD et les forces gouvernementales, des exactions ont été commises sur les populations civiles dans les zones où les rebelles ont trouvé refuge75(*). C'est encore le cas des massacres des Ouaddaiens Ninguilim lorsque certains leaders du Ouaddaï ont réagi aux actes d'humiliation et de torture dont ils ont été victimes. Ces derniers temps, cette pratique ne peut plus revêtire le qualificatif « erreur des forces de l'ordre », ou « bavure », expression chère à Ahmed Hassaballah Soubiana, mais correspond plutôt à un système pensé pour humilier et éliminer telle ou telle communauté dont les membres ont choisi la voie armée. Les ratissages réalisés dans le Dar Tama suite aux affaires de FUC76(*) constituent un autre exemple récent assez éloquent de cette pratique.

Devant l'effritement des rapports avec leur fief, en partie dû aux pressions exercées par les forces armées gouvernementales ainsi qu'aux mauvaises relations que les rebelles entretiennent avec leurs bases, les chefs rebelles sont contraints de signer les accords de paix pour sauver leur honneur.

Section 2 - Les accords de paix comme droit d'accès aux richesses nationales

La construction de la nation, définie comme un plébiscite quotidien par René Renan, résulte des sacrifices conjugués de tous les éléments composant celle-ci. Il importe de maintenir le plébiscite en faisant des concessions pour s'accorder sur la manière dont les affaires publiques doivent être conduites. En cas de rupture du plébiscite, les concessions doivent être faites pour le rétablir.

C'est pourquoi on s'attèle à signer les actes de réconciliation avec les rebelles pour favoriser la construction de la nation (§1). Mais il arrive que cet acte de réconciliation soit détourné de son but et produise des déçus (§2).

§1- L'acte de la réconciliation nationale.

Personne aujourd'hui ne peut s'opposer à la sortie d'une crise armée. C'est l'explication du travail de médiations ou de bons offices entrepris auprès des belligérants pour leur permettre d'harmoniser leur point de vue afin d'aplanir leurs divergences. En soi, négocier et signer un accord de paix reste salutaire.

Toutefois dans le contexte insurrectionnel tchadien, la conclusion des accords de paix ressemble beaucoup plus à un tremplin pour accéder aux postes juteux dans l'administration publique, donnant droit au partage de richesses nationales (A). De plus, les accords de paix participent à favoriser l'émergence et la consolidation de la culture de l'impunité (B).

· A- L'acte de réconciliation comme droit d'accès aux richesses.

Depuis l'effondrement du mur de Berlin et la fin de la bipolarisation qui en résulte, bon nombre de conflits en Afrique cessent d'attirer l'attention de la communauté internationale. Ce désintéressement fait place à un certain nombre d'acteurs qui entrent en scène. On retrouve d'une part les sociétés et firmes transnationales et les entrepreneurs de la guerre de l'autre. La combinaison des intérêts de ces deux nouveaux acteurs va plonger l'Afrique dans une situation de crises de basses intensités mais interminables.

L'Afrique, après les guerres de libération, renoue avec une recrudescence de la violence. Cette violence résulte soit de la contestation du pouvoir central par un groupe d'insurgés, soit des actes de groupes incontrôlés qui bradent les richesses nationales. L'intensité et la médiatisation de la violence dépendent en grande partie du contrôle de richesses nationales. Ce sont les guerres de rentes. Ainsi la capacité des groupes ou coalitions rebelles à combattre ou à résister aux forces gouvernementales dépend étroitement des gisements passés sous leur contrôle. Ces gisements constituent les sources de financement de leur action. C'est ce qui explique l'éclosion des mouvements rebelles en Angola, en République démocratique du Congo, au Libéria, en Sierra Leone où le diamant, l'or, le cobalt et autres matières premières ont permis d'alimenter les différents fronts des conflits.

Contrairement à leurs homologues d'Angola, du Libéria, ou de la République Démocratique du Congo, les rebelles au Tchad n'ont pas de ressources minières sous leur contrôle77(*). Ce n'est pas que les ressources n'existent pas, mais elles ne sont pas encore exploitées. Par ailleurs, celles qui sont exploitées (l'or de Pala, le pétrole de Doba ou celui du Bassin de Mogo) sont sous le contrôle du gouvernement. Les rebelles ne peuvent donc pas s'auto-financer. Ils dépendent toujours des financements extérieurs, qu'ils proviennent des Tchadiens vivant à l'extérieur ou des bailleurs étrangers, le plus souvent des pays voisins. Cette dépendance financière, surtout des pays voisins, fait que les rebelles n'ont pas souvent assez de marges de manoeuvres dans leurs décisions. Le plus souvent, ils sont soumis au diktat des bailleurs qui ne rentrent pas forcement dans leur logique de lutte. Les rebelles se trouvent face à un dilemme : continuer à guerroyer avec les finances du bailleur pour ses visées ou cesser la lutte armée et regagner la légalité.

En général, c'est la seconde option que beaucoup de mouvements choisissent. Mais étant donné que le retour à la légalité ne se fait pas de manière automatique, il faut un accord de réconciliation entre les insurgés et le gouvernement.

Le but avoué et affiché des accords de réconciliation reste la résolution du conflit par les moyens pacifiques. La réconciliation est un acte courageux qui profite beaucoup à la population civile victime des différentes atrocités liées aux affrontements. Cependant, la lecture des accords de paix varie suivant que l'on se situe du côté du gouvernement ou des rebelles.

Pour le gouvernement, les accords de paix sont considérés comme une tactique visant à affaiblir les rebelles en créant des tensions au sein des formations rebelles. Par contre, bien des chefs rebelles trouvent dans les accords de paix un moyen de se faire entendre et d'obtenir certains avantages qu'ils ne peuvent avoir par la prise des armes.

C'est ainsi que la question de partage de postes ministériels et autres avantages occupent une place prépondérante lors des négociations. Preuve en est, la quasi-totalité des chefs rebelles ont été promu ministres lorsqu'ils ont accepté de rendre les armes. La classe dirigeante de la formation ayant signé l'accord est récompensée par les postes de responsabilité (direction des douanes, direction des impôts, direction de la police) et par des rétributions monétaires. Certains combattants ralliés sont d'office affectés dans les effectifs des officiers de police ou de la gendarmerie, d'autres par contre vont grossir les rangs de la fonction publique et ce, sans aucune véritable qualification. La kalachnikov permet de gravir plus rapidement les échelons de l'Etat que l'école ou le stylo. La rébellion devient un ascenseur social ; c'est ce qui facilite le recrutement massif des enfants78(*). Cette pratique tend à s'institutionnaliser au Tchad. Elle n'est certes pas nouvelle79(*), mais sous Idriss Déby, elle se produit de manière récurrente.

Une fois les postes partagés, le gros des combattants est laissé à son triste sort dans les camps de cantonnements. Les chefs ont pour préoccupation l'adoption de la loi d'amnistie synonyme d'impunité.

· B-L'acte de réconciliation comme un acte producteur de l'impunité.

Dans le processus de signature des accords de paix, deux aspects retiennent particulièrement l'attention des chefs rebelles : la question du partage du pouvoir, nous l'avons analysée ci-dessus, et la question de l'amnistie.

En effet, afin de montrer sa volonté de régler le différend et permettre une nouvelle vie commune dans la société, le gouvernement, dans les accords de paix, accorde une amnistie aux anciens rebelles.

Dans le Vocabulaire Juridique80(*), l'amnistie est « une mesure qui ôte rétroactivement à certains faits commis à une période déterminée leur caractère délictueux ». L'amnistie n'efface pas les faits mais leur fait perdre leur caractère délictueux ; ils ne sont plus punissables, ne constituent plus une première infraction pour les récidives. L'amnistie est, selon Stéphane Gacon, « un processus juridique surprenant par l'effet radical qu'il impose : on oublie tout, rien ne s'est passé »81(*). Et dans cette logique, elle doit être l'émanation du peuple, ce qui justifie son origine législative. C'est la loi d'amnistie qui est votée par le parlement. Elle est un acte du parlement qui a pour but d'exonérer de toutes responsabilités les rebelles pour les actes commis dans la rébellion afin d'éviter d'éventuelles poursuites. Notion de droit public pénal, l'amnistie se distingue de la grâce présidentielle qui permet au président de la République, dans certaines conditions, d'accorder la remise ou la modération des peines définitives.

Selon les termes de Stéphane Gacon82(*), « l'amnistie a une utilité première et immédiate, celle de la pacification définitive, de la volonté affirmée d'un retour à la normale ». Il est admis que les effets de l'amnistie participent à la réconciliation du corps social, et constituent un artifice pour pouvoir vivre ensemble après la lutte ; mais les effets de l'amnistie font apparaître une autre question, celle de l'impunité.

En effet, il faut admettre que de graves soupçons de détournement de deniers publics et de violations massives des droits humains pèsent sur certains chefs rebelles. Et le retour à la vie normale expose beaucoup de leaders politico-militaires aux poursuites si aux termes de leur rébellion ils n'ont pas bénéficié d'une loi d'amnistie. C'est pourquoi dans les accords de paix qu'ils signent, la question de l'amnistie apparaît aussi cruciale que celle du partage des postes.

Par l'effet de l'amnistie, ils ne seront ni jugés, ni condamnés. Et partant des exemples antérieurs de « va et vient » des rebelles, on constate que l'amnistie apparaît pour les rebelles comme un moyen de se mettre à l'abri des poursuites.

Au lieu d'être un acte de pacification, l'amnistie au Tchad bascule plutôt vers l'impunité, car les accords de paix durent seulement le temps que les uns et les autres affinent leurs nouvelles stratégies. Pour les victimes des exactions commises par les rebelles, l'amnistie apparaît comme un déni de justice, car leurs causes ne seront jamais élucidées. L'impunité tend donc à devenir une règle car on peut tuer, voler et se rebeller pour voir ses fautes absoutes.

Dans cette logique, l'acte de réconciliation ne peut pas apporter le sentiment de retour à la normale mais participe à installer la méfiance au sein de la communauté où, parfois, la justice privée est vivante.

§2 Les déçus des accords de paix.

Plusieurs foyers de tensions existent aujourd'hui en Afrique, mais ne reçoivent pas forcément les mêmes audiences. Certains sont beaucoup médiatisés et d'autres le sont moins. Cela s'observe dans les moyens mis en oeuvre par la communauté internationale pour faire cesser telle ou telle crise. On voit comment l'Organisation des Nations Unies (ONU) s'active dans les conflits en République démocratique du Congo (RDC) ou en Côte d'Ivoire. L'implication active de cette dernière, même si elle connaît des difficultés, contribue de toute façon à la construction de la paix. Ainsi, l'Onu prend activement part au processus de désarmement démobilisation et réinsertion des ex-combattants en Côte d'Ivoire par exemple. Elle tente de convaincre la communauté internationale de financer le processus de construction de la paix à l'oeuvre dans certains pays africains. La continuité de ces conflits dans lesdits pays constitue une menace pour la paix et la stabilité en Afrique en général et dans le monde.

Le conflit tchadien, contrairement à ceux qui s'observent en Côte d'Ivoire ou RDC, ne retient pas l'attention jusqu'à l'éclatement du conflit au Darfour83(*). Devant ce désintéressement, les conflits restent une affaire tchado-tchadienne ; exceptées les interventions des traditionnels voisins et parrains, la Libye et le Soudan. Ceci explique que les accords de paix soient le plus souvent conclus sous l'égide de la Libye ou du Soudan. Les efforts déployés par ces voisins dans la résolution de ce qu'on appelle « le cancer tchadien »84(*) sont considérables, il n'en demeure pas moins que les accords de paix signés sous leurs houlettes ne produisent pas de grands résultats.

En effet, les actes de réconciliation signés mettent l'accent sur le désarmement, la démobilisation et la réinsertion (DDR). Mais dans ces accords, la question des mécanismes de suivi des accords semble être éludée. Cette situation aboutit le plus souvent à la négligence du processus de DDR ; négligence imputable tant aux chefs rebelles qu'au gouvernement.

Du côté de la rébellion, les chefs rebelles, une fois accédé aux fonctions ministérielles et autres postes juteux de l'Etat, oublient la cause pour laquelle ils ont pris les armes. Ils délaissent ainsi leurs combattants cantonnés pour la plupart dans une zone en attendant le déclenchement du processus de DDR. Ces ex-combattants livrés à eux-mêmes vivent dans des conditions misérables. Dans cette situation, les arnaques de la population se multiplient ainsi que l'intensification du phénomène de « coupeurs de routes ». Beaucoup de ces ex-combattants, sous la direction de certains responsables, finissent par dénoncer l'accord et se rallient une nouvelle fois à un autre groupe rebelle ou se constituent en une nouvelle faction ; d'où les sigles « Rénové », « Tendance », « ailes » observés ça et là dans les formations rebelles tchadiennes. Ils sont les déchus de l'acte de réconciliation. C'est un cycle infernal où l'on est gagnant que pour un temps relativement court.

Cependant les chefs, loin de transformer leur mouvement en une formation politique, préfèrent fusionner avec le parti au pouvoir, le MPS. Cette option leur permet de conserver les privilèges qu'ils viennent d'obtenir.

Du point de vue gouvernemental, c'est l'éternelle question de finance qui est mise en avant pour ne pas procéder au programme de DDR. S'il est vrai que les finances font parfois défaut, il n'est pas à exclure la mauvaise volonté des dirigeants à respecter les accords de paix. Sinon comment comprendre que tous les accords de paix signés sous Idriss Déby ont connu ou connaissent pratiquement le même sort ? Il apparaît que les accords de paix s'analysent beaucoup plus du côté gouvernemental, comme une stratégie de guerre visant à affaiblir ou à dissuader toutes tentatives de nouvelles rébellions.

Et comme il n'existe pas de cadre de suivi des accords, il est impossible d'évaluer l'évolution des anciens accords pour voir si le fait de signer un accord au Tchad est synonyme de rétablissement de la paix ou plutôt un facteur engendrant l'instabilité.

Au demeurant, les accords de paix constituent une porte d'accès à la richesse nationale pour beaucoup de groupes rebelles. Par contre, la rébellion apparaît parfois comme un acte de vengeance pour d'autres groupes.

Chapitre 4 Les rébellions : entre logique de revanche et contribution à la pérennisation du régime d'Idriss Déby

Si l'époque de la prise du pouvoir par les armes au Tchad semble revoulue comme le font remarquer Jean Marc Balencié et Arnaud de la Grange85(*), on se pose la question du bien fondé de la naissance tout azimut de mouvements rebelles au Tchad aujourd'hui. Il est vrai que l'aboutissement de la prise du pouvoir par un mouvement armé résulte de la combinaison de plusieurs facteurs : la bonne organisation du mouvement, l'aide extérieure, le programme politique, etc.

Cependant se rebeller peut aussi suivre d'autres logiques si les facteurs sus cités ne sont pas réunis. C'est la logique revanche (Section 1). Mais la naissance de la rébellion peut aussi s'analyser comme une oeuvre ou une stratégie élaborée par le régime pour pérenniser son règne (section 2).

Section1 La rébellion comme logique de revanche.

Le pouvoir reste un site de contestation par excellence. La contestation peut émaner de la population, de la société civile, des organisations internationales mais aussi des personnes impliquées dans la gestion du pouvoir. Cette dernière forme de contestation, lorsqu'elle se fait entendre, résonne le plus souvent comme un acte de revanche de certains alliés ou supposés dauphins (§1).

Elle commence de l'intérieur pour aboutir à des actes violents conduisant à la rébellion. Mais parfois, la logique de revanche peut aussi provenir d'un ancien parrain sans lequel le régime ne serait jamais établi (§2). Elle vient généralement de l'extérieur et s'analyse à des actes entrepris par le parrain pour se défaire de son mentor.

§1 -La revanche des anciens alliés et anciens dauphins du régime de N'djamena

La construction du régime d'Idriss Déby s'est faite en deux temps. Il a d'abord été construit sur l'alliance de Bamina, puis sur la solidarité Béri. Mais ces phases successives de sédimentation du régime n'ont pu résister aux ambitions personnelles de certains caciques et à la volonté de Déby d'être le seul maître à bord. De cette situation, chaque acteur se positionne en vue de reprendre le devant de la scène politique nationale ; d'où le climat ambiant de revanche dans le pays.

D'abord, le climat de revanche apparaît des « associés de Bamina. Ce sont les « Baministes86(*) » qui ont tenté de s'emparer du pouvoir, mais en vain (les tentatives des coups d'Etat de Abbas Koty, Maldoum Bada Abbas et de Hissein Dassert). Officiellement les « baministes» reprochaient à Déby de s'être trop écarté de leurs logiques de départ en faisant de l'administration publique un domaine presque exclusif de son ethnie ainsi que de l'armée. Leur action s'inscrit dans la logique d'une punition à l'égard d'un ancien associé devenu nuisible pour la poursuite du projet de Bamina dont ils sont porteurs. Leurs différentes actions n'ont pas abouti car Idriss Déby a pu les éliminer (Abbas Koty, Maldoum Bada Abbas) et éloigner au maximum Hissein Dassert. Ce dernier continue toujours de poursuivre la lutte armée mais peine jusque là à être réellement crédible faute de moyens financiers et de soutiens extérieurs. Le pouvoir de N'djamena considère que Dassert ne représente que l'ombre de lui-même.

Puis vient l'affaiblissement de la solidarité Béri. En effet, le régime d'Idriss Déby repose en grande partie sur la solidarité Béri. Cette même solidarité lui avait permis de recruter les Kobé du Soudan lors de son avancée sur N'djamena en 1990. Curieusement les cinq ou six dernières années, on note un effritement dans le cercle clanique de Déby. Les kobé et les Bideyat, majoritaires au sein de la garde présidentielle, font défection pour tenter de renverser le régime depuis l'éclatement du conflit au Darfour. Cette divergence inter zaghawa peut certes s'expliquer par l'ambiguïté d'Idriss Déby dans la gestion de la crise du Darfour. Mais elle révèle davantage une volonté affichée de certains barons zaghawa de remplacer leur parrain. Mais devant l'impossibilité d'obtenir la place du parrain par les voies légales (la prise de la tête du parti MPS par exemple), Idriss Déby pouvant briguer autant de mandats qu'il le souhaite depuis la modification constitutionnelle, certains barons zaghawa ont préféré les armes pour opérer leur vengeance afin d'obtenir le changement.

Dans cette atmosphère de revanche des « Baministes » d'une part et de certains barons zaghawa de l'autre, il apparaît de manière établie que tous en veulent à Idriss Déby parce que tous ont le rêve de devenir président. Il n'existe aucun projet politique solide, comme nous l'avons analysé dans le chapitre précédent, chez les mouvements rebelles. C'est de l'antipathie pure et simple. Sinon comment comprendre que ces chefs rebelles qui connaissent bien le régime et qui disposent d'hommes bien placés dans le système n'arrivent pas à le faire basculer après de sérieuses incursions aux portes de la capitale tchadienne ? Comment expliquer la non-adhésion de la population à la cause rebelle nonobstant les critiques, vraisemblablement fondées, formulées contre Idriss Déby ?

Il apparaît de toute évidence, et tirant les enseignements des échecs des tentatives de fédérations des forces rebelles, que ce sont les ambitions personnelles de certains chefs rebelles qui prédominent et non la cause nationale. C'est pourquoi il serait plus à propos de parler des actions de certains mouvements rebelles comme des actes de revanche des anciens alliés et anciens dauphins du régime de N'djamena. Cette volonté revancharde rencontre celle du parrain qui veut aussi se débarrasser du poulain devenu depuis lors encombrant.

§2- La revanche de l'ancien parrain

Le pouvoir de Khartoum avait été le parrain de Déby lors de sa conquête du pouvoir. C'est dans les confins du Soudan que Déby s'est installé pour s'organiser et se lancer à l'assaut du pouvoir à N'djamena. Il a puisé une partie importante de ses combattants dans le milieu Béri soudanais. Déby apparaît au début de son règne et jusqu'en 2003 comme le protégé de Khartoum. Tout a été mis en oeuvre par le Soudan pour mettre fin à toutes velléités tendant à nuire au régime de N'djamena.

Mais la situation a changé depuis que le Soudan fait face à l'insurrection armée dans le Darfour. En toute logique, le Soudan compte sur son poulain Déby pour l'aider à venir à bout des insurgés. Ce dernier, compte tenu de ses attaches ethniques le liant à certains chefs des insurgés, se trouve dans une position assez ambiguë que Khartoum a du mal à comprendre.

Entre soutenir Khartoum et céder à la pression des cercles Béri, Idriss Déby choisit la solidarité Béri. Ce choix est ressenti par Khartoum, et particulièrement par le président Oumar El-Bechir, comme un acte d'insoumission d'un protégé. Khartoum élabore une stratégie, celle d'installer un nouvel homme au palais présidentiel de N'djamena qui convienne aux aspirations du Soudan. C'est le changement de poulain qui se dessine.

Où trouver le nouvel homme providentiel ? C'est naturellement du côté des différents chefs rebelles en activité qu'il faut regarder pour déceler celui qui ferait les affaires de Khartoum au Tchad. C'est cette option de changement qui explique les nombreuses tentatives de structurations des rebelles par Khartoum que nous avons analysées dans la première partie de ce travail.

Dans ce changement, Khartoum veut faire d'une pierre deux coups, c'est à dire installer un nouveau régime à N'djamena et à charge pour ce dernier de l'aider à vaincre la rébellion au Darfour alimentée par la solidarité Béri. Sans l'appui des forces françaises et les querelles sourdines qui traversent les coalitions des mouvements armés tchadiens, la stratégie aurait pu porter ses fruits.

Mais une question vient à l'esprit quand on regarde le paysage des rebelles tchadiens aujourd'hui. Les rebellions actuellement en activité ne sont elles pas une stratégie élaborée par le pouvoir d'Idriss Déby pour se pérenniser au Pouvoir ?

Section 2 La contribution à la pérennisation du régime d'Idriss Deby ?

L'analyse des structures des rebellions et de leur capacité à opérer un changement de régime nous livre beaucoup de leçons. Ces leçons résultent des facteurs propres aux organisations rebelles. C'est le caractère aléatoire et éphémère des alliances rebelles (§1) qui contribue à hypothéquer les chances de l'option armée pour opérer un changement de régime. A ces facteurs organisationnels des rebelles viennent se greffer certains facteurs extérieurs qui jouent en défaveur des rébellions (§2) et renforcent le pouvoir Déby.

§1- Le caractère aléatoire et éphémère des alliances rebelles : quelques éléments d'explications.

Comme toutes les organisations humaines, les rebellions tchadiennes connaissent de nombreux problèmes qui nuisent de manière significative à leurs actions. Nous ne pourrions faire une analyse détaillée de tous ces problèmes, nous nous focaliserons sur le problème de leadership (A) et les conflits inter ethniques qui minent (B) les rebellions.

· A-Le problème de leadership

Tous les chefs de mouvements rebelles en activité aujourd'hui au Tchad ont été des courtisans, voire des proches collaborateurs d'Idriss Déby. A ce titre, ils connaissent mieux que quiconque les tares de la gestion et le fonctionnement du pouvoir d'Idriss Deby. Et les déceptions qu'ils éprouvent à l'encontre de Deby sont profondes et justifient, au delà des griefs personnels, le désastre que traverse le pays. Mais, en dépit de cette bonne connaissance du régime, ces chefs rebelles reproduisent à l'identique les maux du régime qu'ils combattent.

En effet, à regarder de près les faits qui justifient l'échec des coalitions rebelles, on trouve la querelle des personnalités entre certains chefs des mouvements rebelles et leurs ambitions personnelles.

Données difficiles à saisir puisque souvent inavouées, les querelles de personnes et les ambitions personnelles occupent une place importante dans l'analyse des échecs des coalitions rebelles tchadiennes. Tous les chefs rebelles inscrivent leur lutte dans le combat pour l'instauration de la démocratie, lutte contre l'arbitraire, le clanisme, la corruption et le respect des droits humains, etc. Mais l'aboutissement de cette lutte nécessite parfois des concessions, des sacrifices, et aussi une mise entre parenthèse des ambitions personnelles.

Or, on s'aperçoit que dans le monde rebelle tchadien, faire des concessions relève de la pure spéculation. Chaque chef rebelle se positionne. Il estime toujours être celui qui peut représenter au mieux toutes les autres sensibilités lorsqu'il s'agit de fédérer les différentes factions rebelles en une alliance ou coalition. Chacun se voit chef et oublie que c'est dans l'union qu'il est possible de constituer une alternative crédible au régime en place. Et cette situation s'observe facilement depuis le début du règne Deby.

Quelques exemples méritent d'être circonscrits. La première coalition des insurgés zaghawa n'a pas tenu, suite aux querelles de leadership persistantes entre Timane Erdimi, Yaya Dillo (aujourd'hui rallié au pouvoir) et Abakar Tollimi. Les deux premiers étant Bidéyat et le second Borogate.

La deuxième coalition créée en avril 2006 entre le FUC et le RAFD n'a pas non plus durée. Elle fut courte car le FUC avait choisi en avril 2007 d'attaquer seul N'djamena sans tenir compte de l'avis des autres forces composantes de la coalition.

Après la défaite du FUC, une coalition regroupant l'UFFD, L'UFFD-F, le RFC, L'UFCD et la CNT vit le jour. Elle s'est très vite fissurée après les accords de Syrte en Libye. Al-Jineid, chef de la CNT, quitte la coalition et regagne N'djamena. Aux conflits de leadership, s'ajoutent les clivages ethniques.

· B- Les clivages ethniques

L'une des accusations récurrentes du pouvoir de Déby est la base clanique ou ethnique de son pouvoir. Tous ses détracteurs s'accordent à reconnaître qu'Idriss Déby assoit son pouvoir sur son ethnie, son clan ; ce qui explique les mécontentements tous azimut dont il est l'objet.

Curieusement, toutes ces personnes qui dénoncent la volonté de Deby à avoir comme critère important de sa gouvernance l'ethnie, n'échappent elles non plus à cette logique.

En effet, il n'est de secret pour personne que toutes les rebellions actuellement au Tchad ont leurs bases et leurs fiefs dans les régions dont sont issus leurs chefs respectifs. De même, tous les postes de commandements de factions rebelles se trouvent soit entre les mains des cousins et frères du chef du mouvement, soit dans le cercle de l'ethnie. Cette configuration ethnique des rébellions explique les difficultés qu'éprouvent celles-ci à harmoniser leur point de vue et à avoir une audience nationale. Nous sommes loin de la lutte armée comme une continuité de la lutte politique par d'autres moyens, postulat cher à Clausewitz.

Par ailleurs, la configuration ethnique obéit parfois à des antagonismes historiques qui règnent entre telle ou telle ethnie. Cette situation apparaît de plus en plus établie depuis que l'aire géographique de la rébellion se concentre vers le Nord-Est et l'Est du pays. Cette concentration de la rébellion dans cette partie du pays trouve ses sources dans l'histoire du peuplement de cette partie du territoire87(*). A titre d'exemple, nous prenons le tandem Tama - Zaghawa.

En effet, l'animosité entre les Tama, (vivier producteur des combattants du FUC) et les Zaghawa (au pouvoir et en rébellion) trouve ses origines dans la conscience collective de rejet mutuel de ces deux couches de population. Ces deux communautés véhiculent des préjugés qui sont tenaces. Ces préjugés alimentent et compliquent la situation du conflit actuel. A Iriba (considéré comme fief des zaghawa) les Tama sont vus comme des esclaves et les serviteurs des zaghawa. A Guereda (capitale du Dar Tama) les zaghawa ont une réputation de voleurs, de paresseux et de cupides88(*).

A cette considération de mépris réciproque entre les deux communautés vient s'ajouter le fait que c'est un zaghawa qui est au pouvoir central au Tchad. Cet élément va exacerber le climat déjà morose et délétère qui règne au sein de ces deux communautés. Fort des appuis de leurs frères installés au palais à N'djamena, certains zaghawa n'hésitent pas à commettre des exactions contre la population civile d'origine Tama. Ces actes ne seront jamais punis et engendrent des frustrations au sein de la communauté Tama. C'est en réponse à ce climat « d'impunité » et « supériorité » des zaghawa que certains officiers Tama se rebellent. C'est l'explication première que l'on pourrait fournir à la naissance des mouvements rebelles d'obédiences Tama (de l'ANR à RDL puis FUC). Ce climat explique aussi les difficultés de Mahamat Nour, responsable du FUC, à avoir une entente solide avec les rebellions d'obédience zaghawa (le RFC, le SCUD) d'une part, et à consolider la paix avec Idriss Deby quand il avait signé l'accord de paix, de l'autre.

Vient ensuite le tandem Zaghawa- Gorane. L'animosité Zaghawa- Gorane remonte à la perte du pouvoir des seconds au profit des premiers. En effet, sous Hisseine Habré, les Goranes avaient tous les privilèges. Mais cette situation n'existe plus depuis que le pouvoir s'est déplacé chez les zaghawa. Les Goranes qui le digèrent très mal veulent à tout prix reconquérir le pouvoir. Et les conflits Goranes-Zaghawa sont mûs par cette logique de revanche. C'est pourquoi les chefs rebelles issus du milieu zaghawa conçoivent très mal d'être sous le commandement Mahamat Nouri pour évincer un autre zaghawa du pouvoir. L'échec des attaques menées par la coalition (Alliance Nationale) dirigée par Mahamat Nouri aux portes de N'djamena en février 2008 résulterait de ces antagonismes ethniques sourdines qui traversent la coalition.

En effet, sur le plan tactique, l'attaque lancée par l'UFDD sur N'djamena devrait bénéficier du soutien de RFC. Mais la rivalité entre Nouri (Gorane) et Timane (Zaghawa) a commencé à être visible lorsque la victoire semblait être à portée de main. Timane Erdimi avait donné un contre ordre pour ne pas engager ses troupes en soutien des autres forces de la coalition89(*). Cette division peut s'expliquer par le fait que les rebelles ne se sont pas entendus sur celui à qui devait échoir la présidence.

Et le porte-parole de la coalition, Abderamane Koulamalah avait reconnu, quelques jours après l'échec de la coalition sur les antennes de la Radio France Internationale, que «l'opposition avait commis une erreur historique en ne s'entendant pas sur un gouvernement d'unité nationale avant de prendre N'djamena »90(*). L'échec est également dû au caractère circonstanciel, voire forcé, de la coalition qui a été relayé par les rebelles eux mêmes91(*). Par exemple, Timane Erdimi se voyait très mal contribuer à aider un Gorane à prendre le pouvoir qui se trouvait entre les mains d'un zaghawa. Il préfère les disputes au sein du clan Bideyat à ceux l'opposant à des Goranes. De plus, peut être qu'un beau jour viendra où la solidarité zaghawa trouvera une issue à ses différends et lui permettrait de sauver la face. L'échec de l'attaque de la coalition UFDD révèle aussi l'épineuse question de la synchronisation des forces rebelles. Cette synchronisation sans laquelle les rebelles ne parviendront pas à renverser la situation.

L'histoire des coalitions rebelles sous Idriss Déby montre qu'il n'y a jamais eu une intégration des différentes factions lorsqu'elles sont parties à une coalition. En outre le plan de stratégie adopté dans la coalition ne rencontre pas souvent les considérations des officiers de certaines factions qui hésitent parfois à mobiliser leurs troupes.

Le constat qui s'impose aujourd'hui est que le conflit tchadien est un conflit de certaines communautés à l'échelle local qui prend des proportions nationales du fait de son instrumentalisation par les acteurs. Les rebellions comme projet national n'existent presque pas. C'est pourquoi toutes les tentatives de fédérer les forces sont des échecs annoncés, car les relents ethniques sont trop prégnants dans les stratégies des rebelles. Et Idriss Déby ne peut que jouer sur ces aspects pour pouvoir diviser afin de mieux conforter sa position dominante.

§2- Les facteurs exogènes comme obstacle à l'éclosion des mouvements rebelles.

Depuis la disparition du monde bipolaire, certains conflits intra-étatiques n'attirent plus beaucoup l'attention des grandes puissances ; exceptés ceux mettant en jeu le contrôle des matières premières.

Mais la montée et le positionnement de la Chine dans certains conflits peuvent produire aujourd'hui des effets significatifs. Ainsi, dans le conflit tchadien, le rétablissement des liens diplomatiques (A) par les autorités de N'djamena avec les autorités de Pékin peut être une donnée non négligeable dans le renversement de la situation des rebelles ; quand il est apparu que ces derniers reçoivent, par Soudan interposé, le soutien chinois.

Aussi faut-il rappeler que le Soudan et le Tchad, depuis l'éclatement de la crise du Darfour, se font une guerre par rebelles interposés. Mais dans cette guerre il est difficile de désigner le gagnant et le perdant. Il faut admettre que l'effet de la crise du Darfour peut être analysé comme un élément favorable au régime de N'djamena. C'est à travers le mandat d'arrêt international lancé contre le président soudanais que se décline cet effet (B).

· A- Le rétablissement des liens diplomatiques avec la Chine comme une nouvelle stratégie du pouvoir de N'djamena.

Soucieuse de sécuriser ses approvisionnements énergétiques, la Chine déploie depuis 2000 une véritable diplomatie pétrolière en Afrique. Cette diplomatie conduit la Chine à s'intéresser à tous les fournisseurs potentiels, et le Tchad entre dans cette catégorie depuis que le pétrole y a été trouvé et exploité. Mais la Chine, compte tenue des liens diplomatiques rompus avec le Tchad depuis 1997, se sert du Soudan pour atteindre le Tchad.

Le Soudan reste son partenaire privilégié où il investit massivement en dépit du boycott opéré par les compagnies américaines et canadiennes au motif du non respect des droits humain. Représentant 7% du brut des exportations chinoises, le Soudan est l'allié sûr qui concentre les investissements chinois. 13 des 15 sociétés étrangères les plus importantes92(*) qui exploitent le brut soudanais sont chinoises.

La China National Petrolium Corporation (CNPC), par exemple, a investit plus de trois milliards de dollars, le plus important projet chinois à l'étranger, pour la mise en route du champs de Muglad (500000 barils/ jour), une affinerie (capacité de 2 500 000 tonnes /an) et d'un oléoduc de long de 1500 kilomètres pour l'exploitation de brut à partir d'un terminal sur la mer rouge.

Mais étant donné que les liens diplomatiques sont suspendus entre N'djamena et Pékin, ce sont les rebelles qui seront visés par la Chine grâce aux services soudanais. L'aide chinoise à Khartoum et, directement ou indirectement, aux oppositions armées tchadiennes n'est sans doute pas le fruit d'un lobbying de Khartoum. Elle s'inscrit dans une posture classique de la Chine populaire depuis plus d'une dizaine d'années de ramener Taiwan sous son aile et de punir ses appuis internationaux de quelque manière que ce soit. Et cette logique a fortement joué en défaveur d'Idriss Déby lorsqu'il s'est allié à Taiwan. Elle oblige ce dernier à revoir son positionnement, compte tenu des capacités de nuisances dont ont fait preuve les coalitions rebelles tchadiennes aux portes de la capitale N'djamena.

En août 2006, le Tchad décide de normaliser ses relations diplomatiques avec la Chine Populaire en renonçant à la reconnaissance de l'indépendance de Taiwan. Cette reconnaissance taiwanaise, faut-il le souligner, avait permis au régime d'Idriss Deby de bénéficier des pétrodollars taiwanais. Le retour à la Chine populaire revêt plusieurs aspects, mais deux retiendront notre attention.

En renouant les relations avec la Chine, le régime d'Idriss Déby réaffirme d'abord une amitié qui date de 1972 entre les deux Républiques. Au-delà de ce côté symbolique, Idriss Déby amène la Chine à se désintéresser des rebelles pour se tourner vers le pouvoir de N'djamena. Ce désintéressement doit se traduire concrètement par le non soutien logistique et financier des rebelles par la Chine via le Soudan. Par cette stratégie, Idriss Déby compte ainsi tarir les possibles sources de financements des rebellions pour les obliger à revenir à la table des négociations.

Ensuite, ce réchauffement des liens diplomatiques et consulaires rencontre l'intérêt de la Chine qui peut, à partir de maintenant, s'ériger en acteur dans le schéma de l'exploitation pétrolière au Tchad. C'est ainsi que la Chine par le truchement de China National Petrolium Corporation (CNPC) est très active aujourd'hui au Tchad. La CNPC est engagée dans la construction du gazoduc dans la partie sud-ouest qui permettra d'ici 2011 le transport du brut du champ de pétrole de Kouldawa Djarmaya à la raffinerie située aux alentours de N'djamena . Ce projet vise à réduire la dépendance en gaz et pétrole du Tchad de ses pays voisins (le Nigeria et le Cameroun). Par ce retour à la normale, Pékin trouve ce qu'elle cherche en tentant de financer les rebelles, et permet au pouvoir de Déby de prendre l'ascendant sur ses rivaux. Ce revirement opéré par Déby vient fragiliser quelque peu les calculs des rebelles ainsi que les positions soudanaises.

· B- Le mandat international contre le président Oumar El-Béchir.

En février 2003 éclate dans la région du Darfour un conflit situé à l'ouest du Soudan. Le Darfour compte 6 millions d'habitants dont les principaux tribus sont : les Four, les Masalit et les Zaghawa. Au départ, le gouvernement soudanais considère ce conflit comme un dérapage bénin, d'escarmouches tribales, menées par des cavaliers armés de lances, et se querellant pour des rituelles histoires de puits et de pâturages. Mais très vite, cette considération s'estompe car les racines du conflit sont profondes. Elles sont politiques ; car la population se sent délaissée depuis près d'un demi siècle par les autorités de Khartoum. Et c'est pour revendiquer une répartition des ressources et des richesses du pays que sont nés les mouvements armés tel que l'armée de Libération du Soudan (ALS)93(*) et le mouvement pour la justice et l'égalité (MJE)94(*).

Bien que le conflit soit politique, les principaux acteurs mobilisent les facteurs identitaires, notamment ethniques pour recruter les combattants. Devant la volonté du gouvernement de Khartoum de venir à bout de ces mouvements par tous les moyens, le conflit prend de l'ampleur et fait beaucoup de victimes. Selon les sources des Nations unies, le conflit au Darfour a fait plus de 300 000 morts et plus de 2 millions de réfugiés au Tchad. L'arrive massive des réfugiés soudanais constitue une autre source de problèmes pour le Tchad déjà très instable politiquement. Ce conflit déborde et demande une intervention internationale. Et devant cette situation, la communauté internationale, par le biais de l'ONU, avait réagi en septembre 2007 par la Résolution 1778 (2007) pour permettre à la force européenne (EUFOR) de se déployer dans la zone du Darfour. Elle fut remplacée par les forces onusiennes depuis le mois de mars 2009 car son statut de force humanitaire ne lui permettait pas de résoudre le conflit.

En dépit de la mobilisation de la communauté internationale, le conflit du Darfour est loin de connaître une issue. C'est dans ce contexte de l'escalade de la violence au Darfour que la Cour Pénale Internationale a lancé le 4 mars 2009 un mandat d'arrêt internationale contre le président soudanais Oumar el-Bechir pour crime de guerre et crime contre l'humanité. Le monde entier a prêté attention et les réactions positives95(*) et négatives96(*) se sont multipliées. L'annonce de ce mandat d'arrêt résonne comme un coup de massue dans le monde rebelle tchadien, car le parrain doit dorénavant faire attention à ses engagements même s'il prétend n'avoir pas peur du mandat d'arrêt international. La coalition des rebelles tchadiens de l'union des forces pour la résistance (UFR), par la voix de son porte parole Abdermane Koulamalah, exprime leur solidarité avec le président soudanais. Il affirme « ce mandat d'arrêt est injuste et disproportionné. Le véritable coupable de la crise du Darfour est Idriss déby Itno (le président du Tchad) qui a soutenu et organisé la rébellion au Darfour et a causé des dégâts par un règne calamiteux. Oumar el-Bechir n'a fait que se défendre »97(*). Ces mots traduisent bien un sentiment d'inquiétude chez les rebelles, car le mandat d'arrêt influencerait dorénavant la position d'Oumar el-Bechir. De plus, l'existence d'une force onusienne à l'Est du Tchad constitue un autre frein pour le développement de la rébellion.

La conjugaison de tous ces éléments forcent à croire que la logique de l'agression soudanaise brandie par Idriss Déby Itno semble porter ses fruits. De ce fait, la rébellion n'a pas beaucoup d'autres solutions que de négocier avec Déby. Abdermane Koulamalah n'exclut pas l'opportunité quand il déclare « nous ne renonçons pas à notre ambition démocratique par la voie du dialogue ou par la voie des armes. Nous privilégions encore le dialogue. »98(*) Cette déclaration fait apparaître la prise de conscience de la rébellion d'un certain nombre de facteurs qui jouent en leur défaveur en sus des divisions internes qui traversent les mouvements rebelles.

Si Oumar el-Bechir opère un revirement de ses positions et veut coopérer avec la communauté internationale, afin de faire lever le mandat d'arrêt, les rebelles tchadiens n'auront pas beaucoup de cartes en main. Privés d'appuis chinois et de soutiens soudanais, les rebelles tchadiens se trouvent dans une véritable impasse et risqueraient fort de signer n'importe quel accord de paix pourvu qu'il leur accorde une amnistie.

Conclusion générale

Le contexte de la guerre froide et les régimes dictatoriaux qui se sont succédés au pouvoir au Tchad ont été des facteurs ayant aidé les différents chefs rebelles qui se sont lancés à la conquête du pouvoir. Mais depuis la fin de la bipolarisation et l'amorce du processus de la démocratisation enclenché au Tchad, les rebelles n'arrivent pas à conquérir le pouvoir central nonobstant les capacités de nuisances dont ils font preuve. C'est dans ce contexte que nous avons voulu comprendre les sources des motivations des actions rebelles aujourd'hui au Tchad.

Pour nous permettre de mener notre analyse, nous avons, en guise d'hypothèses, affirmé que les rebellions participent beaucoup plus à la logique d'accumulation de richesses et de revanche qu'à un véritable désir de conquête du pouvoir.

En effet, l'analyse des mouvements ou coalitions rebelles sous le régime d'Idriss Déby renferme beaucoup de problèmes. Le travail documentaire nous a permis de saisir certains maux qui minent le monde rebelle tchadien d'aujourd'hui. Ces maux se trouvent dans la base ethnique des formations rebelles, les ambitions personnelles des leaders politiques militaires au détriment de la cause nationale, les alliances fantaisistes, les accords d'opportunités sous fond de calculs d'intérêts des chefs rebelles, les soutiens logistiques et financiers.

Outre les questions d'organisation et de positionnement des différentes formations rebelles, vient se greffer l'absence de programme politique. De tous les mouvements ou coalitions rebelles évoqués dans notre analyse, le travail politique reste une question qui ne constitue pas une préoccupation primordiale des rébellions. Les rébellions comptent beaucoup plus sur les victoires militaires. Or une victoire militaire ne peut produire d'effets durables que si elle est assise sur un programme politique qui reçoit une adhésion populaire. L'absence de cette adhésion populaire est souvent l'origine de la détérioration des rapports rebelles et populations dans les zones passées sous le contrôle des rebellions.

A cela s'ajoute la répression des forces gouvernementales qui fait craindre le pire à la population civile pour leurs supposés soutiens aux rebelles. Tous ces éléments viennent en défaveurs des rebelles qui subissent déjà le contexte international de la fin de la bipolarisation.

Par ailleurs, l'analyse du monde rebelle permet de mettre en exergue l'utilisation des réseaux transnationaux existants entre le Tchad et le Soudan. Ces réseaux font que les gouvernements du Tchad et Soudan se font la guerre par mouvements rebelles interposés. L'utilisation des réseaux des acteurs non étatiques permet de comprendre la dimension qu'occupent ces derniers dans la compréhension et l'analyse des relations internationales actuelles et plus précisément de l'instabilité politique tchadienne et la crise du Darfour.

Aussi faut-il souligner que Idriss Déby a, jusqu'à aujourd'hui, su tirer son épingle du jeu grâce à un dosage du contexte de la crise du Darfour et à la tactique de la division interne des rébellions par les accords de paix sans lendemain qu'il développe.

Ainsi, toutes considérations nous conduisent à dire que les rébellions actuelles au Tchad constituent un fonds de commerce et continuent de réduire les potentialités du pays en matière de développement. C'est le partage des postes juteux dans l'administration publique, et la course pour l'accès aux richesses nationales qui prédominent dans les naissances des rébellions. Nous sommes dans la logique de jeu du « cache-cache ».

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3- Rapports

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* FIDH, Le comité des droits de l'homme des nations unies préoccupés par l'inaptitude du Tchad à lutter contre l'impunité, Rapport consultable sur le site www.fidh.org

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-Tchad : un nouveau cadre de résolution du conflit, Rapport Afrique n°144 Nairobi/ Bruxelles Septembre 2008, 54p

-To Save Darfur, Rapport Afrique, n°105 Nairobi/ Bruxelles, Mars 2006, 54p

-Tchad : la poudrière de l'Est, Rapport Afrique n°149 Nairobi/Bruxelles, Avril 2009, 53p

4- Cours

Cumin David,

- Séminaire de Stratégie, 2008-2009

- Acteurs non gouvernementaux, 2008-2009

Joubert Jean Paul, Dossiers de Séminaires et Travaux de Recherche, 2008-2009

Ramel Frédéric, Les théories contemporaines de la sécurité, 2008-2009

5- les sites consultés

http/www.alwihdainfo.com

http/ www.amnesty.asso.fr

http/www.atd-tchad.com

http/www.ialtchad.com

http/ www.fidh.org

http/www.jeuneafrique.com

http/ www.librafrique.com

http/ www.rfi.fr

http/www.tchadforum.com

http/www.tchadien.com

http/www.yaltchad.com

Tables des matières.

Remerciement a

Acronymes b

Dédicaces c

INTRODUCTION GENERALE 2

A-Contexte 3

B-La revue de littérature 4

C-Problématique 7

D-Hypothèses 8

E-Méthodologie 8

1-Modèle d'analyse 8

2-Justification du choix de l'étude 9

3- Technique d'investigation 9

Articulation du travail 10

PARTIE I : DE LA FROMATION AUX STRUCTURES DES REBELLIONS 11

SOUS LE REGIME D'IDRISS DEBY 11

Chapitre1 : Les rebellions de la période 1990 à 2000. 12

Section1 Les facteurs de l'émergence des rébellions dans la périonde1990-2000. 12

§1 - La survivance des rebellions antérieures. 13

A-La survivances des rebellions antérieures. 13

B-Les férus de Hissein Habré. 15

§2- La gestion du pouvoir politique par « les associés de Bamina ». 15

A-Les associés de Bamina à l'épreuve de la gestion politique. 16

B-Les exclus du pouvoir. 19

Section 2- Les Mouvements ou formations rebelles en activité dans la période de1990 à 2000. 20

§1-Les structures des mouvements rebelles. 20

A-La localisation des mouvements rebelles. 21

1-Le Mouvement pour la Démocratie et le Développement -Forces Armées Nationales Tchadiennes (MDD-FANT). 21

2-Le Mouvement pour la Démocratie et le Développement- Forces armées Occidentales (MDD FAO) 21

4-Le conseil national de redressement(CNR) 23

5- Le Forces Nationales de Résistance (le FNR) 23

6-Le Conseil de Sursaut National pour la Paix et la Démocratie CSNPD 24

7 -Le Mouvement pour la Justice et la Démocratie au Tchad (MDJT). 25

B-Le parcours de certains leaders rebelles 25

1-Abbas KOTY  CNR 25

2-Mahamat Garfa du FNR 26

3-Ketté Nodji Moïse ,chef CSNPD. 26

4- Youssouf Toigoimi chef du MDJT. 26

§2- Les coalition de rebellions. 27

A-L'alliance nationale de la résistance (ANR) 27

B-La Coordination des Mouvements Armés et Partis Politiques (CMAP) 27

Chapitre 2 L'éclosion des mouvements rebelles de 2001-2008 29

Section1 Les nouveaux facteurs de l'émergence des rébellions. 29

§1- Les facteurs endogènes 30

A- La difficile mise en oeuvre du processus démocratique. 30

B- La question de la gouvernance 33

§2- Les facteurs exogènes. 33

A-La posture d'Idriss Déby dans la gestion de la crise du Darfour 33

B-Khartoum et les rebelles tchadiens. 34

Section2 Les formations rebelles 35

§1- Les différentes formations et coalitions. 36

A-Les différentes factions rebelles. 36

1-Front Populaire pour la Renaissance Nationale (FPRN) 36

2-Concorde Nationale du Tchad (CNT) 36

3-Le Rassemblement pour la Démocratie et les Libertés ou RDL 37

4-Front pour le Salut de la République ou le FSR 37

B-Les coalitions éphémères des rebellions 37

1-Le Front Uni pour le Changement (Démocratique). FUC ou FUCD 38

2-Union des Forces pour la Démocratie et le Développement ou UFDD. 38

3-UFDD- Fondamentale. 39

4-Alliance nationale ou AN 39

5-Rassemblement des forces pour le changement/ Rassemblement des forces démocratiques ou RFC/RAFD. 39

§2- La figure des chefs rebelles. 40

1-Mahamat Nour  Abdelkerim. 40

2-Mahamat Allatchi Nouri dirigeant de l'UFFD 41

3-Ahmat Hassaballah Soubiane 41

4-Les frères ERDIMI : Tom et Timane ou les ex- idéologues du régime Déby 42

PARTIE 2 LES LOGIQUES A L'OEUVRE DANS LES MOUVEMENTS REBELLES TCHADIENS. 43

Chapitre3 Les rébellions comme logique d'accumulation de richesse 44

Section1 Les facteurs conduisant à la conclusion des accords. 44

§1- Le manque de travail politique des rébellions. 44

§2 Le rapport population et rebelles dans les zones sous contrôle rebelle. 47

Section 2- Les accords de paix comme droit d'accès aux richesses nationales 49

§1- L'acte de la réconciliation nationale. 49

A-L'acte de réconciliation comme droit d'accès aux richesses. 49

B-L'acte de réconciliation comme un acte producteur de l'impunité. 51

§2 Les déçus des accords de paix. 53

Chapitre4 Les rébellions : entre logique de revanche et contribution à la pérennisation du régime d'Idriss Déby 55

Section1 La rébellion comme logique de revanche. 55

§1 -La revanche des anciens alliés et anciens dauphins du régime de N'djamena 55

§2- La revanche de l'ancien parrain 57

Section 2 La contribution à la pérennisation du régime d'Idriss Deby ? 58

§1- Le caractère aléatoire et éphémère des alliances rebelles : quelques éléments d'explications. 58

A-Le problème de leadership 58

B-Les clivages ethniques 59

§2- Les facteurs exogène comme obstacle à l'éclosion des mouvements rebelles. 62

A- Le rétablissement des liens diplomatiques avec la Chine comme une nouvelle stratégie du pouvoir de N'djamena. 63

B- Le mandat international contre le président Oumar El-Béchir. 64

Conclusion générale 67

Bibliographie 69

1-Ouvrages 69

2 Articles et Revues 70

3-Rapports 71

4 Cours 71

5- les sites consultés 71

* 1 BUIJTENHUJS R. La Conférence Nationale Souveraine, Paris, Karthala, p.15.

* 2 Jean NICOLAS, La Rébellion française. Mouvements populaires et consciences sociales 1661-1789 p.21

* 3 Albert CAMUS, L'homme révolté, Paris, Gallimard,1951

* 4 Albert CAMUS, L'homme révolté, p. 377

* 5 Jean NICOLAS op. cit. p.19

* 6 Robert BUIJTENHUIJS, Le Frolinat et les révoltes populaires au Tchad (1965-1976). Paris, La Haye, Mouton ,1978 ; Le Frolinat et les guerres civiles au Tchad( 1977-1984). La révolution introuvable, Paris, Karthala/ASC,1984

* 7 Front de Libération Nationale du Tchad

* 8 Olivier FILLIEULE et Cécile PECHU, Lutter ensemble. Les théories de l'action collective. L'Harmattan p.14. Sur le même sujet lire aussi Erik NEVEU, Sociologie des mouvements sociaux. La Découverte 1996.

* 9 L'expression est de Bayart Lire Politique africaine n°1

* 10 Denis Martin Coulon , Les objets politiques non identifiés.

* 11 Nebardoum DERLEMARI, Les labyrinthe de l'instabilité politique au Tchad, Paris ,L'Harmattan,1998

* 12 Mohamed Tétémadi BANGOURA, Violence politique et conflit en Afrique. Le cas du Tchad. Thèse, Paris, L'Harmattan, 2006. Lire également Bernard LANNE « conflits et violence au Tchad » Afrique Contemporaine n°80/1996

* 13 Yves RABIER, « Politique internationale du conflit tchadien 1960-1990. guerre civile et mondiale », Journal des africanistes, 1994, vol 64 n°1

* 14 Jean Marc BALENCIE et Arnaud de La GRANGE, Les nouveaux mondes rebelles. Conflits, terrorismes et contestations. Paris, Michalon, 2005 p.165

* 15 idem

* 16 Jean-Marc BALENCIE et Arnaud de LA GRANGE(sous dir.), Mondes rebelles. Acteurs, conflits et violences politiques. Paris, Michalon, 1996, pp.481-514

* 17 Robert BUIJTENHUIJS, Le Frolinat et les révoltes populaires au Tchad (1965-1976). Paris, La Haye, Mouton ,1978 ; Le Frolinat et les guerres civiles au Tchad (1977-1984). La révolution introuvable, Paris, Karthala/ASC, 1984

* 18 Le clan béri se subdivise en sous clan kobé, bideyat, borogate et kapka. Le terme zaghawa est une appellation d'origine arabe pour désigner les Béri. Et l'appellation zaghawa s'est imposé dans le domaine scientifique comme le souligne René Lémarchand. Lire R, Lémarchand « où va le Tchad », Afrique contemporaine n°215/2005/3 . Nous utilisons le clan Béri par rapport à la nomenclature de la division linguistique faite par Marie-josé Tubiana, Carnets de route au Dar-for (Soudan)1965-1970, Paris, Sépia, 2006.

Cette nomenclature rend compte de manière édifiante les structures de la société et les systèmes de dons chez les groupes Béri tant au Tchad qu'au Soudan. Elle permet de comprendre l'implication des soudanais dans les conflits tchadiens et vice versa.

Lire aussi Jérôme Tubiana, La guerre par procuration entre le Tchad et le Soudan et la « darfourisation » du Tchad : mythe et réalités, Document de travail, institut de hautes études internationales et du développement, Genève, 2008 87p

* 19 Thierry Michalon « les vrais blocages de l'Afrique » ,article inédit septembre 2001,cité dans le Rapport n°144 de International Crisis Group, Tchad : un nouveau cadre de résolution de conflit,24 septembre 2008,p.3

* 20 Pendant longtemps la Coton Tchad fut dirigé par les frères Erdimi Timane neveu de Deby, aujourd'hui en rebellions, la SNER par Daoussa Déby, le grand frère de Déby .

* 21 Il convient d'observer qu'au Tchad le pouvoir se décline presque toujours sous l'appellation de l'ethnie dont est issu le Président de la République. On est parti du pouvoir des Sara au temps de Ngarta à celui des Goranes avec Habré pour aboutir à celui communément appelé pouvoir des Zaghawa au temps de Deby.

* 22 Sur la question du dialogue lire International Crisis group, Tchad : un nouveau cadre de résolution du conflit, Rapport n°144, semptembre, 2008

* 23 Gata Nder « les incertitudes de l'après Habré », N'djamena-Hebdo n°10 décembre 1990

* 24 Lire N'djamena -Hebdo n°16 du 14 mars 1991

* 25 Marchés Tropicaux et Méditerranéens, n°2390,1991. Pour un aperçu Lire Robert Buijtenhuijs, La conférence nationale souveraine du Tchad. Une histoire immédiate, Paris, Karthala,1993

* 26 Triaud,J.L, « Au Tchad : la démocratie introuvable » Le Monde Diplomatique, février, 1992

* 27 Senen Andriamirado « Tchad : un éternel champs de bataille », Jeune Afrique, n°1643 du 2 au 8 juillet 1992

* 28 Alladoum,R, « Un congrès redouté », N'djamena Hebdo n°26 du 25 juillet 1991

* 29 N'djamena Hebdo, n° 69,du 7 janvier 1993

* 30 Pour les raisons de sa démission lire N'djamena Hebdo n° 65, du 3 décembre 1992

* 31 Jean Marc BALENCIE et Arnaud de la GRANGE, Mondes rebelles. Acteurs, conflits et violences politiques. Tome1. Amériques, Afrique, Paris, Michalon,1996, p.502-511

* 32 Mohamed Tétémadi BANGOURA, violences politique et conflits en Afrique : le cas du Tchad, op. cit.

* 33 Ce ralliement a été rendu possible suite à l'accord de N'djamena du septembre 1992.

* 34 Hassabalah fonde alors le MDD-Conseil National pour la démocratie et la révolution.

* 35 Allatchi fait scission pour former un MDD- Originel.

* 36 Echec de l'accord de Libreville du 24 juin 1992 et celui de Niamey du 11 décembre de la même année.

* 37 Mouvement populaire de libération du Tchad.

* 38 Les autorités nigérianes ont arrêté le leader Medella et son état major qu'ils ont transféré à N'djamena en février 1992. Ils auraient pour la plupart été exécutés. Pour amples informations, lire Ngarléjy Yorongar, Le Tchad, le procès de Déby, témoignage à charge, Paris L'harmattan, 2003.

* 39 Les accords d'Abéché du 5 septembre 1992 et celui d'El-Geneina du 31 octobre 1992.

* 40 Lire, Monde rebelles op. cit. p.504

* 41 Les accords de en septembre, et de Moundou en novembre 1992.

* 42 Forces armées de la République Fédérale. Elle a pour zone d'action la région de Doba et Moundou. Elle doit ses exploits à son chef Bardé réputé pugnace. Elle connaîtra aussi, comme toutes les autres formations politico militaires, une petite vie et disparaît après la mort de son leader.

* 43 International Crisis Group, Tchad : vers le retour de la guerre ? Rapport Afrique n°111, Juin 2006, p5

* 44 Mohamed Tétémadi Bangoura, violence politique et conflits en Afrique : cas du Tchad, op. cit. p392

* 45 A l'est comme au sud du Tchad, Habré n'a pas hésité à utiliser son appareil répressif contre les populations civiles afin de décourager toute tentative de soutien aux contestataires. Cela a été le cas en 1984 au sud, en 1987 dans le Guera contre les Hadjaraï, mais aussi en 1990 dans le Biltine à l'encontre des zaghawa.

* 46 Les illustrations sont les cas de Abbas Koty, Mahamat Garfa, Kette Nodji Moise, Mahamat Nour, Yaya Dillo, Hassane Al Djineid dont le pouvoir a obtenu le ralliement. Excepté le cas Koty, tous ces leaders sont en retour promus ministres.

* 47 Lire International Crisis Group, Tchad : vers le retour de la guerre ? Rapport Afrique n°111, juin 2006, p.9. Il faut noter par ailleurs le rôle joué par les frères Timane et Tom Erdimi dans la prévarication et l'impasse du régime d'Idriss Déby. Nous reviendrons dans la section 2 sur la présentation de ces deux personnages.

* 48 Pour amples informations se reporter au rapport n°111 op. cit.

* 49 Pour prendre seulement l'exemple de la Coton Tchad. Les Directeurs généraux successifs après Timane ont été promus à des postes importants au sein du gouvernement. Haroun Kabbadi fut premier ministre de 2002 à 2003. Son successeur Moussa Faki à la Coton Tchad a été premier ministre en 2003. Il est actuellement ministre des affaires étrangères.

* 50International Crisis Group, Tchad : Un nouveau cadre de conflit, op. cit. p.4

* 51 Tranparency International a classé le Tchad parmi les pays les plus corrompus de la planète au cours des trois dernières années. De 145éme sur 149 en 2004, à 162ème sur 162 en 2005, il a occupé la 160ème sur 166 en 2006. cf. site de Transparency.

* 52 Loi N°1 du 11 janvier portant sur la gestion du revenu pétrolier. Cette loi identifie les ressources financières et oblige le gouvernement à les inscrire intégralement au budget de l'Etat.

* 53 Loi N°2 du 11 janvier 2006.

* 54 Lire Cheik Yérim SECK « Idrss Déby Itno « Je ne suis pas un tueur ni un dictateur », Jeune Afrique N°2531 du 12 au 18 juillet 2009 pp.21-26

* 55 Lire la Revue Outre Terre le numéro 20/3 2007. Dans ce numéro plusieurs articles traitant la crise du Darfour donnent d'importants liens de connexions du conflit tchadien et soudanais.

* 56 Tanner, Victor et Jérôme Tubiana, Divided they fall. The fragmantation of Darfour's rebel group, HSBA working paper n°6, 2007.

* 57 Bachar Idris Abu Garba le numéro deux du mouvement (vice président et secrétaire général), et Jamal Idris-ed-Din, tous deux zaghawa du Soudan.

* 58 Il faut observer que bien des documents font état du soutien financier de Daoussa Déby, le grand frère de Idriss Deby, au JEM. Khalil Ibrahim, responsable de JEM est lié à Timan Déby par sa mère. Cf. International Crisis Group, Tchad. Vers un retour de la guerre ? Op. cit. ET Jérôme Tubiana, la guerre par procuration entre le Tchad et le Soudan, op. cit.

* 59 Cf. Buijtenjhuis ,Robert, Frolinat et les guerres civiles au Tchad, op.cit.

* 60 Al-Jineidi est aujourd'hui Secrétaire d'Etat à la défense nationale, chargé des anciens combattants et des victimes de guerre dans le gouvernement d'ouverture de Youssouf Saleh Abbas, lui aussi un ancien du MDJT.

* 61 Au moment où nous rédigeons ce travail, Soubiane a déjà regagné la légalité en signant un accord avec le gouvernement.

* 62 Les données que nous utilisons dans les développements ci après sont celles figurant dans Jérôme Tubiana, la guerre par procuration, op.cit

* 63 Un groupe Bideyat très proche des Goranes et dont le chef rebelle principal est Abakar TOLLI.

* 64 Yaya Dillo Djerou a rallié le régime depuis novembre 2007 et est actuellement Ministre des Mines et de l'énergie dans l'actuel gouvernement

* 65 Gerad Prunier, « Armed Movements in Sudan » op .cit pp 7-8

* 66 Jean Marc Châtaigner « le modèle de l'effondrement libérien ou la tentation de la déconstruction en Afrique de l'Ouest », Afrique contemporaine , n°199/2001

* 67 Gérard Chaliand cité par David Cumin, séminaire de stratégie, Master2 science politique Parcours Sécurité Internationale et Défense, 2008-2009, policope, p51

* 68 Déclaration de l'ancien porte-parole de FUC et aujourd'hui président du Rassemblement Démocratique pour la Paix et les Libertés (RDPL), Docteur Albissaty Saleh Allazam propos recueilli par Abbas Kayangar « étonnantes déclarations et aveux : Docteurr. Albissaty Saleh Allazam se vide le coeur » , consultable sur www.librafique.com

* 69 Dr Allazam ibidem

* 70 Visiter les sites suivants : www.ialtchad.com; www.librafique.com; www.tchadactuel.com; www.tchadforum.com; www.alwihdaino.com; www.tchadien.com; www.tchadforum.com. Sur ces sites on peut lire tout sur la vie politique tchadienne principalement sur les rebellions des dernières années. On y trouve des analyses intéressantes comme celles dépourvues de considérations. Malheureusement ces sites ne restent pas accessibles au public tchadien au niveau national du fait de l'accès à l'Internet au Tchad.

* 71 Nous utilisons l'expression « copier coller  » pour exprimer les mêmes arguments évoqués par les différents mouvements rebelles. Tous parlent du régime tyrannique, clanique et corrompu d'Idriss Déby. Cependant aucun projet de société ne figure explicitement dans leur statut, mise à part l'instauration de la démocratie, lutte contre la corruption. On se demande bien si les combattants connaissent ce pourquoi ils luttent.

* 72 Docteur Allazam op.cit.

* 73 L'impôt parallèle peut être l'argent prélevé sur les commerces, l'obligation qui est faite aux paysans de verser plutôt aux rebelles les taxes qu'ils doivent payer à l'autorité établie. Il peut aussi prendre la forme de l'engagement au côté de la rébellion

* 74 Fédération Internationale des Droits de L'Homme, Liste de préoccupation sur la situation des droits de l'homme au Tchad, 94eme session du Comité des droits de l'homme,13-31 decembre2008, Genève, Rapport. Consultable sur le site : www.hrw.org

* 75 Lire Robert Buijtenhuijs, la conférence nationale souveraine, op. cit. p133 et suivant.

* 76 International Crisis Group , Tchad : la poudrière de l'Est, Rapport Afrique n°149, avril 2009.

* 77 Cette considération est à atténuer car depuis 2005 les soutiens de la Chine à certaines forces rebelles s'expliquent par les promesses de contrat de l'exploitation de pétrole passées entre les rebelles et la Chine. Toutefois, il convient de souligner que cette situation s'est estompée depuis que le pouvoir de N'djamena a renoué les relations diplomatiques avec la Chine populaire.

* 78 Remadji Beguy, « les enfants soldats. Le phénomène persiste », Tchad et Culture, n° 258

* 79 L'histoire politique du Tchad recèle d'exemples, à ce sujet lire Mohamed Tétémadi Bangoura, violence politique op. cit.

* 80 Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henry Capitant, Paris, PUF, édition de 1992.p.49

* 81 Stéphane Gacon et Suzanne Citrou « Amnistie - Les contraintes de la mémoire officielle », in Oublier nos crimes : amnésie nationale, spécificité française ? p.100

* 82 Stéphane Gacon, ibidem.

* 83 Même avec la crise du Darfour, c'est beaucoup plus la connexion de certains facteurs qui fait que de temps en temps on évoque la situation tchadienne. Par ailleurs, si on vient à en parler, c'est lorsque les rebelles sont à la porte de N'djamena. Mais le processus de réconciliation tchado-tchadien n'est guère intéressant. C'est beaucoup plus la situation soudano tchadienne qui reste préoccupante eu égard aux conséquences humanitaires.

* 84 François Soudan, « le cancer tchadien », Jeune Afrique du 12 au 18 février 2008 pp17-18

* 85 Jean Marc Balencié et Arnaud de la Grange, les nouveaux mondes rebelles, op.cit p.165

* 86 Baministe est le terme utilisé pour désigner ceux qui étaient à l'origine de la victoire du 1er décembre 1990, ceux ayant pris part au congrès de Bamina et qui ont signé l'acte constitutif du MPS.

* 87 Gérard- François Dumont, « géopolitique et populations au Tchad »,Outre-Terre,2007/3 n° 20 pp.263-288

* 88 Pour plus d'informations, lire Jérôme Tubiana, la guerre par procuration entre le Tchad et le Soudan et la « Darfourisation » du Tchad : mythe ou réalité, op.cit . Ou encore lire Crisis Group, Tchad : la poudrière de l'Est, Rapport n°149, 15 avril 2009, p.5-8.

* 89 Lire les notes de la page17 du Rapport n°144 de Crisis group

* 90 Voir Interview de Koulamalah, le 21 mars 2008. « Tchad, le manque cohésion a coûté la victoire aux rebelles », www.rfi.fr.

* 91 les chefs rebelles reconnaissent que l'enjeu de la coalition voulu par le parrain était de « faire tomber Idriss Deby » et pour la suite « on verra ». voir Jeune Afrique, www.jeuneafrique.com/ n°5116

* 92 David Mascré, « course aux hydrocarbures, crise du Darfour, déstabilisation régional : le Tchad entre jeux pétrolier et jeux guerriers », Working paper, Institut Thomas More, n°9 avril 2007 p.4

* 93 ALS a pour principaux dirigeants Abdel Wahid Mohamed Ahmed Nur, Khamis Abdallah Abakar et Minni Arkoi Minawi.

* 94 Le mouvement est dirigé par Khalil Ibrahim Mohamed.

* 95 Le point des organisations de défense des droits de l'homme, communiqué de la FIDH sur le mandat d'arrêt contre le président soudanais, www.fidh.org

* 96 La position de l'Union africaine relayée par le site d'Amnesty International, consultable sur www.amnesty.org

* 97 AFP cité dans le Jeune Afrique n°2535 du 9-15 août 2009.

* 98 cf. Jeune Afrique op.cit.






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