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Les rébellions sous le régime d'Idriss Déby (1990-2008)

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par Eugène Le-yotha NGARTEBAYE
Université Jean Moulin Lyon 3 -  Master 2 sciences politiques, option: sécurité et défense 2008
  

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Chapitre 2 L'éclosion des mouvements rebelles de 2001-2008

Pendant la première décennie de son règne, Idriss Deby a dû affronter plusieurs sortes de conflits. D'abord, il fait face, dès sa prise du pouvoir, aux caciques du précédent régime d'Hisseine Habré qui souhaitent revenir sur le devant de la scène politique.

Il est ensuite confronté au phénomène d'empilement des allégeances qu'il avait lui-même utilisé pour conquérir le pouvoir. De plus, son noyau militaire vole très rapidement en éclats à cause de la marginalisation dont sont victimes les militaires qui l'avaient préalablement soutenu. Il faut noter également qu'il a surmonté durant cette période la fronde de la population et de certains groupes d'officiers qui n'ont cessé de critiquer sa gestion du pays.

Mais, en dépit de tous ces tumultes, il a résisté et s'est même constitué un autre soutien, celui de son clan zaghawa. Grâce au soutien de ce clan et de ses alliés, Idriss Deby pense assurer la pérennité de son régime.

Cependant, ce soutien clanique, pour des raisons de partage du pouvoir, va lui aussi voler en éclat. De ces dissensions claniques entre Zaghawa naîtront la majeure partie de la seconde vague de rebellions. Ces dernières viendront grossir le rang des anciens mouvements qui continuent toujours de mener la lutte armée contre le pouvoir. Si ce recours à la lutte armée contre le régime d'Idriss Deby n'apparaît pas comme un fait nouveau, de nouveaux facteurs entrent en jeu dans la formation de ces rebellions (section 1). La présentation de ces facteurs nous aidera dans l'identification de ces nouvelles rébellions et coalitions rebelles (section 2).

Section 1 Les nouveaux facteurs de l'émergence des rébellions.

Un observateur averti de la scène insurrectionnelle tchadienne pourrait dire qu'il n'y a pas véritablement de changement dans les causes qui expliquent la naissance de cette seconde vague de rébellions. La nature des revendications et les acteurs n'ont pas profondément changé depuis FROLINAT jusqu'à aujourd'hui. On retrouve toujours en filigrane la question du partage du pouvoir, de la forme de l'état, de l'éthnitisation du pouvoir.

Toutefois, depuis le début de l'année 2000, on peut noter une relative mutation dans les revendications des rébellions ainsi que l'apparition de nouveaux acteurs. Cette mutation des revendications s'explique dans une certaine mesure par l'ouverture démocratique voulue par le régime de N'djamena et la gestion des revenus du pétrole. Notons par ailleurs l'implication active du gouvernement soudanais dans l'émergence de ces nouvelles rebellions. Ces éléments font que les facteurs qui légitiment la prise des armes aujourd'hui au Tchad sont tant endogènes (§1) qu'exogènes (§2).

§1- Les facteurs endogènes

Les opposants au régime d'Idriss Deby peuvent trouver plusieurs raisons pour justifier leur recours aux armes. Nous ne pourrons malheureusement pas, au cours de cette analyse, toutes les identifier. Nous nous limiterons aux questions relatives à la difficile mise en oeuvre du processus démocratique (A) et à la mauvaise gouvernance (B).

· A- La difficile mise en oeuvre du processus démocratique.

Une observation attentive de la manière avec laquelle Idriss Déby règle les questions des mouvements rebelles, pendant la première décennie de sa gestion du pays, fait apparaître de façon éloquente l'issue des accords de paix signés avec les différentes factions rebelles.

En effet, dans le but d'instaurer la paix et la cohésion sociale, plusieurs formations rebelles ont signés des accords de paix avec le gouvernement. Pour la plupart, ces accords se résument à la mutation de la branche armée en parti politique, à l'intégration des anciens rebelles dans les forces armées gouvernementales et à l'insertion de ceux qui le désirent dans la vie socio-professionnelle.

Mais très vite, il est apparu que ces accords sont devenus une stratégie politique du président Déby visant à diviser les rebellions et à atténuer leur ardeur. A la différence d'Hisseine Habré qui répondait à toute dissidence, velléitaire ou ouverte, par une répression aveugle visant indistinctement l'ensemble du groupe ethnique concerné45(*), Idriss Déby a en revanche tempéré l'usage de la force et a privilégié le recours aux moyens financiers pour diviser les dissidents. L'échec de la plupart des alliances entre dissidents est le résultat de cette tactique. Il s'est maintenu en rachetant des anciennes allégeances temporaires passées entre dissidences ou en créant de nouvelles dans l'entourage adverse46(*). Cette tactique a jusque là porté ses fruits et a permit au régime de surmonter les défis des mouvements rebelles. Elle a aussi occasionné le retour de nombreux combattants du maquis au sein des forces gouvernementales. C'est ce qui explique en partie une nette floraison des formations rebelles dans la période allant de 2001 à 2008.

Outre la question de la gestion des accords, se trouve l'épineux problème de la consolidation du processus démocratique. En effet, le processus de démocratisation enclenché en 1990 avec la venue d'Idriss Déby n'a pas produit les résultats escomptés. Dès le début de la conférence nationale jusqu'aux consultations référendaires, législatives et présidentielles qui se sont succédées, les contestations n'ont pas cessé de grandir. Et la démocratie apparaît comme une simple vitrine vivant à donner bonne conscience au régime.

Devant les critiques de la population et les nombreuses réserves émises par la communauté internationale, Idriss Déby s'est engagé à respecter la constitution en promettant de ne pas la modifier pour briguer un troisième mandat. Cette promesse sonne comme une voie de succession ouverte dans le cercle des dirigeants du MPS et de l'Etat.

A partir de 2002, des cercles de réflexion zaghawa planchent sur la question de succession et le nom de Timane Erdimi est évoqué comme une alternative47(*). Mais au congrès du MPS de 2003, le débat tourne autour d'un troisième mandat et d'une éventuelle modification constitutionnelle. Paradoxalement, deux éminences grises du MPS, les frères Erdimi, étaient absents à ce congrès48(*). La proposition de loi de la révision fût adoptée par l'Assemblée Nationale (majoritairement issu du MPS) le 23 mai 2004. Un referendum va avaliser la modification constitutionnelle le 6 juin 2005. Cette modification permet à Idriss Déby de briguer un troisième mandat et de se représenter sans aucune limitation.

Cette situation va être perçue par certaines élites zaghawa (au rang desquelles figurent les frères Erdimi), ainsi que par certains barons du MPS qui aspiraient à remplacer Idriss Deby (Hassaballah Soubiane), comme un coup d'Etat. Ces derniers préfèreront l'option militaire à celle d'un dialogue démocratique avec Idriss Deby. Cette volonté de pérenniser son pouvoir, et face aux différentes contestations va faire resurgir la question de la bonne gouvernance.

* 45 A l'est comme au sud du Tchad, Habré n'a pas hésité à utiliser son appareil répressif contre les populations civiles afin de décourager toute tentative de soutien aux contestataires. Cela a été le cas en 1984 au sud, en 1987 dans le Guera contre les Hadjaraï, mais aussi en 1990 dans le Biltine à l'encontre des zaghawa.

* 46 Les illustrations sont les cas de Abbas Koty, Mahamat Garfa, Kette Nodji Moise, Mahamat Nour, Yaya Dillo, Hassane Al Djineid dont le pouvoir a obtenu le ralliement. Excepté le cas Koty, tous ces leaders sont en retour promus ministres.

* 47 Lire International Crisis Group, Tchad : vers le retour de la guerre ? Rapport Afrique n°111, juin 2006, p.9. Il faut noter par ailleurs le rôle joué par les frères Timane et Tom Erdimi dans la prévarication et l'impasse du régime d'Idriss Déby. Nous reviendrons dans la section 2 sur la présentation de ces deux personnages.

* 48 Pour amples informations se reporter au rapport n°111 op. cit.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore