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La production des biocarburants en picardie: quelles perspectives pour là¢â‚¬â„¢agriculture régionale?

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par Christine Cheveau
Université Nanterre Paris X - Master de géographie 2006
  

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INTRODUCTION

La production de biocarburants dans le monde était quasi nulle en 1975, alors qu'en 2004, elle atteignait 35 millions de tonnes. Il s'agit donc d'une industrie récente, qui a connu un développement important ces 30 dernières années. Cependant, ce développement est très inégal : le Brésil est au 1° rang mondial avec 15,28 millions de m3 de bioéthanol produits1(*) en 2004-2005, (soit environ 12 millions de tonnes), et les Etats-Unis sont au 2° rang mondial avec une production de 3 400 millions de gallons d'éthanol en 20042(*) (soit environ 10 millions de tonnes) et de 25 millions de gallons (environ 75 000 tonnes) de biodiesel3(*).

Le développement en Europe est plus récent et moins important : l'Union européenne en 2005 a produit 722 000 tonnes de bioéthanol et 3 184 000 tonnes de biodiesel.

La législation européenne sur les biocarburants a été plutôt faite de déclarations de bonnes intentions dans les années 1980. La Commission a élaboré un projet éthanol dans les années 1980, mais la confrontation des intérêts divergents et les coûts budgétaires l'ont incitée à renoncer fin 1987 à un programme de subvention. Ayant à faire face à la fin des années 1980 au poids financier de la PAC, la CEE ne voulait pas retomber dans un autre système budgétairement lourd. Cependant, les mesures prises pour réduire certaines émissions et supprimer la présence de plomb dans l'essence sont essentielles à la fin des années 1980 pour comprendre le démarrage de la production de biocarburants en Europe4(*). Au même moment, la réforme de la PAC a également rendu possible ce démarrage, avec le système de la jachère industrielle, qui permet aux agriculteurs de continuer à produire des cultures à finalité non alimentaires sur les terres qu'ils auraient dû geler. Ces deux éléments, indépendants l'un de l'autre, ont eu pour conséquence de convaincre au moins partiellement les pétroliers et les exploitants agricoles de l'intérêt des biocarburants.

La filière agricole s'est en effet réellement tournée vers les biocarburants avec l'obligation de geler des terres, mise en place pour réduire les excédents, mal supportée par la profession, et la possibilité pour « échapper » à ce gel de cultiver à des fins non alimentaires. En 1993, R. Lévy écrivait dans son rapport sur les biocarburants: « Nous pensons que notre étude aura montré que le problème posé aujourd'hui n'est pas un problème énergétique, mais seulement un problème agricole. Il s'agit d'atténuer, pour notre agriculture, le choc de la nouvelle PAC et de la mise en jachère »5(*).

2003 marque une rupture dans les directives de l'Union européenne, avec l'adoption de la directive 2003/30/CE « visant à promouvoir l'utilisation de biocarburants ou autres carburants renouvelables dans les transports », et de la directive 2003/96/CE « restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité ». L'Union européenne a fixé des valeurs de référence pour les objectifs nationaux d'incorporation des biocarburants:

- 2%, calculés sur la base de la teneur énergétique, de la quantité totale d'essence et de gazole mise en vente sur le marché à des fins de transport le 31 décembre 2005 au plus tard.

- 5,75%, calculés sur la base de la teneur énergétique6(*), de la quantité totale d'essence et de gazole mise en vente sur le marché à des fins de transport le 31 décembre 2010 au plus tard.

Pour atteindre leurs objectifs, les Etats membres peuvent appliquer des exonérations totales ou partielles ou des réductions du niveau de taxation des biocarburants, avec une modulation effectuée en fonction du cours des matières premières, pour éviter toute surcompensation par rapport aux carburants traditionnels.

A ces deux directives s'ajoute un élément important de la nouvelle réforme de la PAC : la possibilité, dès 2004, de cultiver des terres hors jachère afin de produire des biocarburants, en bénéficiant de la même aide compensatoire aux surfaces que les cultures alimentaires correspondantes et d'une aide supplémentaire de 45€ par hectare dite aide aux cultures énergétiques (ACE ou « crédit carbone »).

Ces deux directives et l'instauration du « crédit carbone » s'inscrivent dans des préoccupations environnementales croissantes et le souci de respecter le protocole de Kyoto en termes de réduction des gaz à effet de serre. Cependant, si elles marquent une rupture, elles ne sont pas une révolution : les objectifs nationaux fixés par la directive européenne ne sont, du moins pour l'instant, que des valeurs de référence7(*). De plus, si ces directives vont bien dans le sens du développement des biocarburants dans l'Union, elles n'interdisent pas que ce développement se fasse à partir d'importations.

Le développement des biocarburants en France n'a débuté qu'après 1992, d'une façon d'abord assez forte, mais avec ensuite un ralentissement net. Depuis 2003, le mouvement pour le développement de la production des biocarburants connaît une relance importante, vu les nouvelles directives européennes. Ceci s'est traduit concrètement par la possibilité pour l'éthanol en mélange direct dans l'essence de bénéficier des exonérations de droits d'accise ainsi que la création, par la loi de finances de 2005, de la TGAP (Taxe Générale sur les Activités Polluantes) : cette taxe est applicable à partir du 1° janvier 2005 sur les carburants dès la première tonne de produit fossile mise à la consommation. Les distributeurs de carburants peuvent s'exonérer de cette taxe en incorporant du biocarburant dans le carburant qu'ils commercialisent. Le montant de la taxe payée est fonction de la différence entre le taux fixé par la loi pour les carburants fossiles et le pourcentage de biocarburants incorporé. Chaque année, il existe donc un taux d'incorporation qui permet au distributeur de ne pas payer de taxe. La loi de finances pour 2005 fixait ce taux à 1,2% pour 2005 et 5,75% pour 2010. Ce système est relativement incitatif, même si le niveau de la taxe pour les pétroliers qui ne respecteraient pas cette obligation a été jugé insuffisant, au moins les premières années, par nombre d'observateurs, notamment de la filière agricole.

Pour l'heure, la production des biocarburants suscite un engouement d'autant plus fort que le prix du pétrole s'est envolé. Après avoir fixé via la TGAP en 2005 un objectif de 5,75% (en valeur énergétique) d'incorporation de biocarburants dans les carburants fossiles pour 2010, le gouvernement a décidé d'accélérer le processus. La loi de finances de 2006 a ramené cet objectif à 2008, et a fixé un objectif de 7% pour 2010. Le taux d'incorporation de biocarburants dans les carburants fossiles en 2004 n'étant que de 0,83%, les objectifs fixés sont réellement ambitieux.

L'enjeu majeur pour les filières de production de biocarburants devient de réussir à répondre à la demande ainsi créée, en un temps très court, tant au niveau des capacités de production industrielle qu'à celui de la production de la matière première agricole. Alors que les cultures destinées aux biocarburants n'occupaient qu'une part marginale de la surface agricole française (moins de 350 000 hectares en 2004), elles doivent pour répondre aux objectifs connaître un accroissement rapide. La production nationale de cultures destinées aux biocarburants devrait occuper plus de 1 500 000 hectares en 2008, et 2 000 000 d'hectares en 2010.

Ce développement des biocarburants est réclamé par l'ensemble du monde agricole, même si les avis divergent sur le mode de développement à adopter. En effet, face à une PAC de moins en moins protectrice, qui veut développer une agriculture tournée vers les marchés, le développement des biocarburants est vécu comme l'émergence d'un nouveau débouché.

Afin de tenter d'analyser dans quelle mesure la production de biocarburants peut devenir un débouché important pour l'agriculture française, nous étudierons ici plus précisément les perspectives de développement des surfaces cultivées pour l'approvisionnement des usines de biocarburants à travers l'exemple de la Picardie. En effet, cette région est particulièrement intéressante, car, région de grandes cultures, elle a participé pleinement au développement depuis 1992 des trois grandes filières de production de biocarburants (bioéthanol blé, bioéthanol betteraves, EMHV), tant au niveau industriel qu'au niveau agricole.

Dans un premier temps, pour comprendre sur quelles bases la relance de la production de biocarburants s'effectue, nous analyserons le degré de développement de la production des biocarburants en 2004-2005, juste avant que les effets du plan biocarburant ne se fassent réellement sentir: nous verrons quels avantages ont permis à la Picardie de développer depuis 1992 des capacités industrielles de production de biocarburants dans les trois filières, et comment l'agriculture régionale répondait à ces besoins et à ceux des usines limitrophes.

La relance du développement des biocarburants devrait introduire un changement d'échelle, tant au niveau industriel qu'agricole : nous étudierons dans un second temps quels sont les débouchés potentiels qui s'ouvrent aujourd'hui pour les cultures à destination des biocarburants, afin de tenter d'évaluer quelle part et quelle importance ces cultures peuvent prendre dans les assolements régionaux à l'horizon 2008-2010.

* 1 Source : UNICA, union des agro-industries de la canne à sucre de Sao Paulo.

* 2 Source : Renewable Fuels Association, Etats-Unis.

* 3 Source : National Biodiesel Board, Etats-Unis.

* 4 Directives européenne 85/210/CEE du Conseil du 20 mars 1985 et 85/536/CEE du Conseil du 5 décembre 1985.

* 5 Cf Les biocarburants, rapport R. Lévy, février 1993, diffusion : Ministère de l'Industrie et du Commerce extérieur.

* 6 1 litre d'éthanol ou d'EMHV n'a pas le même pouvoir calorifique qu'1 litre d'essence ou de gazole.

* 7 Lors des discussions précédent l'adoption de ces directives, certains Etats membres ont refusé l'instauration d'objectifs obligatoires.

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