WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La restructuration de l'habitat précaire: de l'ostracisme a l'inclusion des habitants le cas d'Arafat et Grand Medine a Dakar


par Mouhamadou DIENE
Université Paris Est Marne La Valllée - Master 2015
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

    LA RESTRUCTURATION DE L'HABITAT PRECAIRE :

    DE L'OSTRACISME A L'INCLUSION DES HABITANTS

    LE CAS D'ARAFAT ET GRAND MEDINE A DAKAR

    Réalisé par Mouhamadou DIENE

    Sous la direction d'Armelle CHOPLIN

    Année universitaire : 2014/2015

    2

    Sommaire

    Résumé 4

    Introduction 5

    Partie I : Historique et contexte de la planification au Sénégal 10

    1- Les premières initiatives de planification au Sénégal 10

    2- Le développement urbain 11

    2.1- Des villes secondaires concentrées dans l'Ouest du pays 11

    2.2- La croissance spatiale de l'agglomération dakaroise et ses effets 13

    3- Le projet du Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar 15

    3.1- Contexte et objectif de l'étude 15

    3.2- Le périmètre d'étude 16

    3.3- La genèse du projet 17

    3.4- La promotion des pôles urbains comme stratégie d'accompagnement de

    l'urbanisation 19

    4.- Un contexte institutionnel marqué par des mutations structurelles 22

    4.1- l'Acte III de la décentralisation 22

    4.2- Le Plan Sénégal Emergent 23

    Partie II : Le PPAB un programme ambitieux et inclusif 24

    1- Présentation du programme 24

    2- L'approche inclusive du PPAB 26

    3- Le Sénégal, un choix pertinent dans un contexte de forte urbanisation 27

    4- Les quartiers cibles du PPAB : deux quartiers intégrés au tissu urbain de

    Dakar 28

    4.1- La restructuration d'Arafat, un projet repris trente ans après une

    première initiative 29

    4.2- la restructuration urbaine à Grand Médine 32

    3

    4.3- Le montage des structures locales bénéficiaires du projet 34

    5- Le volet opérationnel de la restructuration 35

    5.1- Arafat, la restructuration d'un quartier fortement urbanisé 35

    5.2- Grand Médine, un quartier aux allures d'interstice urbain 37

    5.3- Le recasement des ménages impactés 39

    6- Les acteurs institutionnels 41

    6.1- l'Equipe pays 41

    6.2- Le comité technique 41

    6.3- La mobilisation communautaire 42

    7- Le financement 44

    8.- Les perspectives d'une adaptation du programme à l'échelle nationale 44

    Partie III : La formation des quartiers précaires : un problème qui relève de

    facteurs politiques et stratégiques 46

    1- Blocages liés au projet 46

    1.1- La politisation des enjeux comme facteur contreproductif 46

    1.2- Une approche peu systémique de la restructuration 46

    2- Une absence de politique sociale du logement 47

    2.1- La léthargie des sociétés publiques de promotion immobilière 47

    2.2- Les coopératives d'habitat, un dispositif alternatif 48

    2.3- La cherté du prix des matériaux de construction 49

    2.4- Les lenteurs dans la régularisation foncière 49

    3- Analyse réflexive du stage 51

    Conclusion 53

    Bibliographie 55

    Annexes 56

    4

    Résume

    Les villes d'Afrique subsaharienne connaissent un rythme d'urbanisation très soutenu préfigurant une Afrique en majorité urbaine d'ici une quinzaine d'années. Mais ces villes attirent sans pouvoir loger. Elles exercent une attraction et un intérêt de plus en plus importants sans pouvoir nécessairement proposer un habitat décent. Cette carence en logements a entrainé l'occupation anarchique des extensions urbaines, non planifiées, par une partie des ménages dont la demande en logements n'arrive pas à être satisfaite par le secteur formel. Les bidonvilles au Sénégal abritent plus de 3 000 000 d'habitants. Le plus souvent, ceux ci sont confrontés à des conditions de vie précaires, un accès limité aux services urbains et équipements de base. En raison d'une absence totale de planification, ces zones sont trop souvent difficiles d'accès et se sont régulièrement développées sur des sites impropres à l'habitat. Face aux quartiers précaires, la réponse des gouvernements a souvent été l'expulsion des habitants et la volonté d'éradiquer ce type d'habitat car seules les questions d'insécurité, de salubrité, et d'illégalité étaient mis en avant. Une politique du bulldozer a été menée jusqu'au début des années 80 et intensément avant 1970. Elle consistait à raser manu militari les quartiers précaires pour y édifier des cités planifiées destinées à une classe moyenne pour une affirmation de la puissance de l'Etat. Par la suite, les politiques d'ajustement structurel promus par les institutions de Breton Woods ont davantage conduit à considérer le logement comme un secteur dans lequel l'Etat doit se désengager pour l'assainissement des finances publiques et l'équilibre budgétaire. Aujourd'hui sous la pression de ces mêmes partenaires internationaux et aussi au regard du potentiel électoral de ces quartiers précaires et denses, la vision des pouvoirs publics a changé. Il s'agit désormais de trouver des statuts de propriété sécurisés pour que les populations améliorent elles-mêmes leur quartier. Les opérations sont menées de manière participative comme c'est le cas à Arafat et Grand Médine pour leur restructuration dans le cadre du Programme Participatif d'Amélioration des Bidonvilles lancé par ONU HABITAT. Programme qui voit la participation du gouvernement, des collectivités locales, des entreprises publics et des populations pour une meilleure efficacité de la restructuration et pour un résultat satisfaisant.

    5

    Introduction

    Selon les projections démographiques des Nations Unies, il y aura une population de 1,5 milliard d'habitants pour le continent africain, dont plus de 1,3 milliard pour l'Afrique subsaharienne à l'horizon 2030. La répartition de la population va évoluer profondément pendant cette période du fait du processus d'urbanisation. Le taux d'urbanisation, qui était d'environ 30 % au début de la décennie 1990, va passer à 50 % en 2030 selon UN-HABITAT 20081. L'Afrique subsaharienne connaît le rythme de croissance urbaine le plus élevé de la planète. Cette forte urbanisation évoque parallèlement des enjeux plus urgents à propos de la croissance des zones d'habitat précaire. En effet, il y a 187 millions de personnes qui vivent dans les bidonvilles dans le monde. Ce qui représente 61% des urbains au niveau mondial et 40% en Afrique de l'Ouest avec des écarts importants en fonction des zones géographiques et des pays.

    Au Sénégal, la population urbaine est passée de 23 % en 1960 à 40 % en 1988 et 45 % en 2013. Cette croissance urbaine corrélée à une offre insuffisante de logements, est responsable en grande partie de la prolifération de quartiers spontanés et précaires aussi bien en zone urbaine centrale que dans les fronts d'urbanisation. Le déficit de logements est en partie satisfait par la construction d'habitat spontané estimé à 30% des superficies habitées à Dakar. Lorsque les pouvoirs publics ne mettent pas en place une planification efficace et une politique de l'habitat, ce sont les populations elles même qui planifient leur espace et définissent leur mode d'habiter. Le nombre d'habitats spontanés n'a cessé de croître lorsqu'on connait le potentiel l'attractivité économique de Dakar.

    Des politiques de déguerpissements à l'oeuvre dans les années 1950 jusqu'au début des années 1980, le traitement des bidonvilles par l'Etat sénégalais a été tout simplement de déplacer les résidents pour y installer de nouveaux occupants dans un environnement planifiées car l'Etat avait besoin de se constituer une classe moyenne émanant de son administration. Ce qui en réalité ne faisait que différer les problèmes des quartiers précaires au niveau des périphéries urbaines. Périphéries qui se sont retrouvées aujourd'hui au coeur du tissu urbain dakarois. A partir des années 1980 sous la pression de partenaires internationaux, institutions internationales et surtout avec la coopération allemandes, la question des bidonvilles n'est plus perçue par les autorités comme de l'habitat indigne tout simplement mais comme une

    1 Paulais, financer les villes d'Afrique, l'enjeu de l'investissement local, 2012

    6

    situation née de l'absence planification généralisée et de politique inefficace du logement. Les habitants des bidonvilles ont finalement droit à la ville. Dans le cadre de programmes de restructuration en oeuvre aujourd'hui, il s'agit de trouver des statuts de propriété sécurisés pour que les populations améliorent eux-mêmes leur quartier. Les opérations sont menées de manière participative et la caution solidaire des bénéficiaires est le garant de l'opérationnalité des actions à entreprendre. Ainsi un Programme d'amélioration des bidonvilles a été lancé par ONU HABITAT (Organisation des Nations Unies pour les Etablissements Humains) en 2008 et deux grands quartiers de Dakar ont été choisis pour en bénéficier.

    Dans le cadre de mon stage au sein d'ONU HABITAT, j'ai participé à la mise en oeuvre stratégique et opérationnelle du PPAB (Programme Participatif d'Amélioration de Bidonvilles) au Sénégal

    Lancé en 2008, le PPAB est destiné à l'amélioration des conditions de vie des populations défavorisées en milieu urbain conformément aux Objectif du Millénaire pour le Développement, le point 7, notamment.

    Le PPAB vise à renforcer la capacité de tous les acteurs urbains y compris les agences gouvernementales nationales et locales, la société civile et les habitants des bidonvilles eux-mêmes à travailler ensemble pour améliorer les conditions de vie dans les bidonvilles et la durabilité des villes concernées, par le biais de l'analyse situationnelle des bidonvilles, l'analyse des politiques, le développement de stratégies d'amélioration des bidonvilles à l'échelle de la ville et de mobilisation des ressources et la mise en oeuvre participative de projets pilotes2.

    Pour relever ces défis, le programme vise à travailler avec les intervenants locaux et nationaux sur les principaux projets d'amélioration des bidonvilles. Deux quartiers à Dakar, Arafat dans la commune de Grand Yoff et Grand Médine dans la commune de Patte d'Oie ont été ciblés pour accueillir la phase pilote du programme de restructuration et de régularisation foncière. Je suis intervenu plus particulièrement dans la phase de montage des comités consultatifs de quartier, dans l'élaboration du plan de restructuration avec les populations jusqu'à la validation des étapes franchies depuis le début du programme. J'ai intégré le comité technique de suivi du PPAB en tant que représentant d'ONU HABITAT au sein d'une équipe composée de représentants de la FDV (Fondation Droit à la Ville) qui est maitre d'oeuvre du programme, de la DUA (Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture) et de la ville de Dakar. Ces différents acteurs constituent le comité technique et se réunissent

    2 www.monppab.org

    7

    régulièrement afin de suivre l'état d'avancement du projet et de prendre en compte les demandes formulées lors des consultations avec les populations.

    J'ai pris part aux rencontres entre les différents acteurs du PPAB aussi bien dans la cadre de l'équipe pays élargie à tous les acteurs institutionnels qu'au niveau du comité technique restreint. Cela concerne également les rencontres avec les populations bénéficiaires à travers les structures qu'elles ont-elles même constituées.

    J'ai mené des échanges et rédigé des comptes-rendus que je transmettais au coordonateur du programme au sein d'ONU HABITAT à Nairobi sous la supervision de mon maitre de stage. J'ai eu à participer à la conception et à la formulation des documents qui entrent dans le cadre de la mise en oeuvre du PPAB (note conceptuelle, documents de projets, stratégie de communication).

    L'apparition de l'habitat précaire en milieu urbain est autant la résultante d'une incapacité physique de la ville à accueillir et loger les nouveaux citadins, autant elle relève d'une absence de planification économique et territoriale à long terme et d'une politique de l'habitat inefficace et discriminante. Ces leviers d'intervention à la main des autorités politiques sont décisifs d'autant plus qu'il impulse le type de paysage urbain, la qualité du cadre de vie et l'attractivité économique d'une ville.

    Dans un premier temps nous présenterons le cadre législatif et l'état de la planification urbaine au Sénégal, le contexte de la planification urbaine, le système d'acteur, les documents de planification existant et notamment celui en cours de conception qui concerne le PDU 2035. Dans un second temps il sera question d'entrer plus en détail sur le déroulement du PPAB. Autant sur l'organisation institutionnelle qui pilote sa mise en place, le contexte urbain des quartiers cibles, la démarche participative et son déroulement ainsi que le volet opérationnel de la restructuration urbaine et la régularisation foncière. Enfin nous apporterons un regard plus distant vis-à-vis des missions effectuées pour soulever un certain nombre d'éléments qui entravent le bon déroulement du programme. On apportera également des observations sur l'organisation et le déroulement opérationnel du projet ainsi que la pertinence du projet sur et son impact réel à long terme. Par ailleurs nous évoquerons certains facteurs politiques et structurels qui ont favorisé la naissance des quartiers spontanés au Sénégal

    8

    Structures d'accueil et missions principales du stage

    Vieille de 40 ans, ONU HABITAT est une organisation des Nations Unies pour les Etablissements Humains qui aide les citadins pauvres en transformant les villes pour en faire des lieux plus sûrs, plus sains et plus verts offrant davantage d'opportunités et où chacun peut vivre dans la dignité. ONU HABITAT collabore avec des organisations à tous les niveaux, dans toutes les sphères gouvernementales, la société civile et le secteur privé en vue de construire, gérer, planifier et financer le développement urbain durable.

    Aujourd'hui face à l'enjeu de taille d'une population plus importante dans les agglomérations urbaines, son ambition est de faire en sorte que les établissements humains dans les villes, répondent à un minimum de standard en termes de cadre de vie, de confort mais aussi en termes de besoin d'infrastructures et de services. Elle veille à ce que ces établissements soient plus respectueux de l'environnement et fassent recours à de l'énergie propre et moins polluantes. ONU HABITAT s'inscrit dans une démarche de soutien aux efforts que déploient les pouvoirs publics et la société civile pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement en matière d'amélioration des services d'eau et d'assainissement dans les zones urbaines et d'amélioration des taudis.

    Parallèlement à ma mission dans le cadre du déroulement du PPAB, j'ai été associé au projet de révision du Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar et ses environs Horizon 2035. C'est un projet qui a démarré en Mai 2014 et qui est menée par l'Agence Internationale de Coopération Japonaise (JICA) puisque je travaillais au sein de la Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture, maitre d'ouvrage de ce projet

    La DUA m'a associé au projet de révision du Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar horizon 2035 notamment dans le cadre du suivi des restitutions hebdomadaires de l'équipe de la JICA.

    La DUA est une direction ministérielle qui dépend du Ministère du Renouveau urbain, de l'Habitat et du Cadre de Vie. La mission du Ministère est ainsi définie : «Préparer et mettre en oeuvre la politique définie par le Chef de l'Etat dans les domaines de l'urbanisme, de la restructuration et de rénovation urbaine, de l'habitat et de la construction». Le Ministre est chargé de la planification urbaine sous réserve des compétences dévolues aux collectivités locales, veille à l'aménagement des villes et des agglomérations, notamment par une action concertée avec le Ministère chargé de l'Aménagement du Territoire et les Collectivités Locales en matière d'espaces verts et de loisirs.

    Il est chargé de la mise en oeuvre de la politique de l'habitat. A ce titre, il veille à la qualité des habitations construites au Sénégal, à leur adaptation au milieu dans lequel elles sont réalisées ainsi qu'au respect des normes de construction et d'architecture prédéfinies, en rapport avec les maires.

    Le ministère comporte plusieurs directions3:

    > La Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture ;

    > La Direction de la Promotion de l'Habitat social ;

    > La Direction du Cadre de Vie et des Espaces verts urbains ;

    > La Direction de la Surveillance et du Contrôle de l'Occupation du Sol ;

    > La Direction de la Construction ;

    > La Direction de l'Aménagement et de la Restructuration des zones d'inondation ;

    > La Direction de l'Administration générale et de l'Equipement.

    > Autres administrations rattachées au ministère :

    > l'Agence de Construction des Bâtiments et Edifices publics ;

    > La Fondation Droit à la Ville ;

    > Le Projet de construction de logements sociaux et de lutte contres les bidonvilles ;

    > l'Office National de prévention des Inondations.

    > La Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture est composée des divisions

    suivantes :

    > la Division Planification et Règlementation Urbaine ; > la Division des Opérations d'Aménagement ;

    > la division de la Cartographie et des Statistiques Urbaines ; > la Division de l'Architecture.

    Les services déconcentrés que sont les Divisions Régionales de l'Urbanisme et de l'Habitat et les Services Départementaux de l'Urbanisme sont placés sous la tutelle technique de la Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture.

    9

    3 Extrait du Programme d'Appui au Renouveau Urbain du Sénégal, PARUS

    10

    Partie I : Historique et contexte de la planification au

    Sénégal

    1- Les premières initiatives de planification au Sénégal

    C'est en 1830 que les premières règles du droit foncier sont apparues au Sénégal. Ce régime dit hypothécaire, applicable dans les zones urbaines, n'intéressait qu'une infime partie du territoire (1 %). En 1902, alors que Roume est Gouverneur de l'Afrique occidentale française (AOF) et du Sénégal, Dakar est choisie comme capitale de l'empire. La première réglementation s'appliquant à l'ensemble du territoire fut instituée par décrets n° 55-580 du 20 mai 1955 et 56-704 du 10 juillet 1956 organisant la procédure de constatation de certains droits fonciers (droit coutumier)4. Ce régime n'était pas applicable aux dépendances du domaine public et aux terres placées sous le régime du Code civil. Dans les zones rurales par contre, deux régimes se superposaient :

    ? Un droit de caractère seigneurial traditionnel, le Lamanat ;

    ? Un droit d'usage détenu par l'occupant effectif qui n'est qu'un simple détenteur précaire, pouvant être soumis au paiement de redevances

    Le long processus de l'immatriculation, entamé au Sénégal en 1900, (décret du 20 juillet 1900) et achevé en 1949 n'était applicable qu'au domaine public et au domaine privé de l'État. Il permit néanmoins de réglementer le domaine public, d'organiser le régime de l'aliénation et de l'exploitation des terres domaniales, notamment dans la région de Dakar, de prescrire la division en lots des terrains du quartier Tound et de permettre l'affectation et l'occupation du lotissement de Dagoudane-Pikine

    Ce foisonnement de textes et la diversité des régimes fonciers créèrent une situation complexe à laquelle il fallut remédier dès l'accession du pays à la souveraineté internationale. L'État engagea alors une réflexion qui déboucha sur :

    - La loi n° 64 du 17 juin 1964 instituant le domaine national (avec les textes d'application)

    - La loi n° 64-49 du 27 juillet 1966 portant sur le Code de l'urbanisme (abrogée et remplacée par la loi n° 88-05 du 20 juin 1988, puis par la loi 2008- 43 du 20 août 2008)

    4 UN HABITAT, profil du secteur du logement au Sénégal, 2012

    11

    - La loi n° 76-66 du 2 juillet 1976 portant sur le Code du domaine de l'État (et son décret d'application)

    - La loi n° 76-67 du 2 juillet 1976 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique5

    Ce cadre juridique, malgré sa clarté, ne couvre pas totalement le champ de l'urbanisation réelle (notamment celui de la gestion de l'habitat spontané).

    Figure1 : Carte administrative du Sénégal

    Source : Agence Nationale de l'Aménagement du Territoire

    2- Le développement urbain

    2.1- Des villes secondaires concentrées dans l'Ouest du pays

    Le Sénégal a connu, ces dernières années, une situation de forte croissance urbaine non planifiée qui a engendré des problèmes et des dysfonctionnements en matière d'aménagement et d'urbanisme, un déficit en logements et équipements ainsi qu'une détérioration progressive du cadre de vie (assainissement, transport, mobilité, etc.). Ce tableau peu reluisant de la situation urbaine est en partie lié à une faible prise en charge du secteur par les pouvoirs publics et à une réduction drastique des moyens qui lui sont alloués.

    5 UN HABITAT, profil du secteur du logement au Sénégal, 2012

    12

    La situation urbaine montre des disparités territoriales à l'intérieur et entre les localités. Malgré les efforts fournis par l'Etat, seuls 26 % des communes étaient dotées de plans d'urbanisme en 2012. Le reste des localités, malgré le statut communal, ne dispose pas de documents de planification spatiale de référence et quelquefois là où ils existent ces documents sont dépassés et ne sont pas appliqués.

    Une tendance de l'urbanisation au Sénégal est la domination de la région de Dakar comme ville principale et quelques centres urbains régionaux dispersés et soutenant chaque arrière-pays. La figure 2 présente la capitale nationale et les capitales régionales en fonction de la taille de la population.

    Figure 2 : Capitales régionales selon la taille de la population (Source: Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie)

    La région de Dakar avec une population de 3 137 000 habitants en 2013 représente un centre urbain exceptionnel au Sénégal. Elle sert de capitale économique, politique et administrative du Sénégal et constitue une passerelle internationale pour les activités de commerce et d'affaires internationales.

    Un groupe de pôles urbains secondaires est dispersé plus ou moins en masse à l'Est de Dakar dont Thiès, Diourbel, Fatick et Kaolack et vers le nord dont Saint Louis et Louga. Ces centres urbains situés dans la partie occidentale du Sénégal constituent les noeuds fournissant divers services urbains transférant des produits agricoles de l'arrière-pays vers d'autres zones. La partie Occidentale du Sénégal est plus favorable à l'agriculture avec de riches ressources en eaux souterraines, et dispose donc d'une plus grande capacité d'attraction des populations.

    13

    Compte tenu de ces caractéristiques, les quatre régions de l'arrière-pays immédiat de Dakar, que sont Thiès, Diourbel, Fatick et Kaolack, sont plus densément peuplées dans une zone représentant seulement 12% du territoire national avec une population équivalente à 37% du Sénégal6. Deux grandes agglomérations urbaines sont observées dans la partie orientale du Sénégal: Tambacounda et Matam. Tambacounda se trouve dans une position très stratégique où se croisent les routes nationales RN-1, RN-6 et RN-7. Il est également situé sur la voie du chemin de fer menant à Bamako au Mali. C'est un point important pour le trafic routier en provenance et à destination de la Casamance qui regroupe trois régions coupées du reste du pays par la Gambie.

    Ces centres urbains, qui ont montré une forte croissance démographique, étaient Kaolack (5,3% / an), Tambacounda (3,6% /an) et Thiès (3,2% / an), Dakar (3,0% / an) et Saint Louis (3,0% / année7). Ces centres urbains sont alignés le long de l'axe de transport ouest-est menant à Bamako, au Mali. Combinées au riche potentiel agricole de l'arrière-pays, ces villes ont un potentiel de croissance avec le renforcement de cet axe Ouest-Est. L'agro-industrie pourrait être promue dans un premier temps pour stopper les importations de produits agricoles, ensuite pour la promotion des exportations non seulement vers l'Europe et l'Asie via Dakar mais aussi vers les pays enclavés comme le Mali à travers le chemin de fer rénové.

    2.2- La croissance spatiale de l'agglomération dakaroise et ses effets

    Historiquement, l'expansion de Dakar s'est toujours faite vers l'Est, comme le montre la figure 3, recevant l'afflux de populations en provenance des zones rurales. Le taux de croissance a été particulièrement rapide après l'accession du pays à l'indépendance en 1960. Une série de sécheresses a entraîné une migration massive des populations rurales qui se sont établies en particulier dans les bas-fonds de la capitale. Avec le retour d'une pluviométrie régulière à partir de 2005, ces quartiers ont commencé à subir des inondations récurrentes. Les inondations de 2009 ont affecté environ 360.000 personnes, avec une perte économique estimée à près de 100 millions de dollars.

    L'étalement urbain incontrôlé a créé une structure urbaine déséquilibrée avec la concentration des fonctions commerciales au centre-ville de Dakar, entrainant une forte congestion de la

    6 Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie

    7 ibidem

    circulation aux heures de pointe de la matinée et de la soirée. Le développement d'infrastructures et d'établissements publics ne s'est pas fait au rythme de l'urbanisation rapide, et le décalage ainsi créé a conduit à la détérioration du cadre de vie des populations

    (1) Ca. 1900(pop de 100,000) (2) Ca. 1967(pop de 500,000)

    14

    (3) Ca. 1986(pop de 1.25 mil.) (4) 2009(pop de 2.5 mil.)

    (5) 2013 (pop à 3 mil.)

    Figure 3 : Evolution spatiale et démographique de l'agglomération de Dakar

    (Source: JICA)

    L'urbanisation s'est poursuivie autour du centre-ville (Plateau) situé à l'extrémité de la presqu'île. Le Plateau regroupe l'administration nationale et régionale, le secteur commercial, les industries manufacturières et la logistique.

    La forte concentration entraîne une demande excessive en infrastructures alors qu'une importante partie de la zone urbaine est aménagée sur des terrains inappropriés tels que des terres exposées aux inondations, aux marées hautes et à l'érosion côtière. L'urbanisation a été observée dans les zones écologiquement sensibles et les zones agricoles favorables aux cultures de rente. Les forêts classées et les zones forestières existantes sont confrontées à

    15

    l'empiètement lié à la forte urbanisation et les zones d'habitation font face à des menaces causées par les carrières de ciment, les usines et la logistique situées les unes à côté des autres, en raison des manquements notés dans contrôle de l'occupation du sol. Enfin les parcs et espaces verts n'occupent qu'une superficie de 0,1% du territoire soit 47,0 ha8. Ce qui est largement insuffisant pour qu'il y ait une qualité de vie et un cadre de vie acceptable.

    Face à ces problèmes, un certain nombre de projets sont actuellement en cours de mise en oeuvre et de planification. Parmi ces projets figurent l'Aéroport International Blaise Diagne, l'extension de l'Autoroute Dakar-Diamniadio, le développement du pôle urbain de Diamniadio, le développement de la Zone Economique Spéciale de Diass, et la construction du nouveau port de Sendou. Parmi ces projets en cours figure aussi le Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar, horizon 2035. Projet dans lequel j'ai participé à travers des réunions hebdomadaires de coordination et de validation des principales étapes dans le processus de formulation du plan.

    3- le projet du Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar 3-1- Contexte et objectif de l'étude

    Le PDU 2035 a été réalisé sur la base d'orientations du Plan Directeur 2025. Ce dernier n'a pas été à la hauteur des attentes du point de vue de l'implication des autorités locales mais aussi du fait qu'il soit livré tardivement (l'occupation du sol ayant évolué avant la publication du plan). En outre, le manque de participation des collectivités locales et des populations au processus de planification a empêché les auteurs dudit plan de saisir les enjeux d'un tel projet. Selon les responsables de la DUA, le plan directeur horizon 2025 n'a pas été une réussite du point de vue du contrôle de la gestion urbaine, car n'ayant pas été en mesure de suivre le rythme de l'étalement urbain rapide. Les insuffisances suivantes ont été identifiées comme étant les points faibles dudit Plan directeur.

    ? Insuffisance de l'approche de planification participative et de diffusion de l'information

    ? Insuffisance des ressources destinées à la gestion urbaine, y compris la planification urbaine

    8 Rapport intérimaire, PDU de Dakar 2035, RECS International Inc., Juillet 2015

    16

    ? Manque de soutien et d'engagement politiques pour organiser le développement urbain de façon intégrée

    Les objectifs de l'étude sont les suivants:

    ? Préparer le plan directeur d'urbanisme de la région de Dakar et ses environs Horizon 2035.

    ? Préparer un plan de détails pour au moins une zone choisie comme outil pour réaliser le Plan Directeur Horizon 2035.

    ? Mener les études de préfaisabilité sur les projets prioritaires à choisir comme outils pour réaliser le Plan Directeur Horizon 2035.

    ? Entreprendre un développement des capacités de la Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture (DUA), des ministères, structures concernées et des collectivités locales, renforçant les capacités de leurs personnels afin qu'ils soient en mesure de gérer convenablement le développement urbain.

    3.2- Le périmètre d'étude

    La zone d'étude cible est la Région de Dakar et la zone aux alentours de l'Aéroport International Blaise Diagne dans la région de Thiès, avec une superficie d'environ 820 km2 comme indiqué sur la figure 4 qui montre les limites administratives des régions, départements et communes de la zone d'étude. Bien que le cadre administratif ait été modifié suite à l'amendement de la loi de 2014 sur la décentralisation, les limites administratives ne sont pas encore révisées. La figure a été faite sur la base de la dernière carte administrative disponible.

    17

    Figure 4 : Zone couverte par le PDU (source: Mission d'étude de la JICA)

    3.3- La genèse du projet

    Dans ce contexte, le Gouvernement du Sénégal a adressé une requête au Gouvernement du Japon pour étendre la coopération technique à travers la révision du Plan Directeur d'Urbanisme Horizon 2025. Après une série de discussions, l'Agence japonaise de coopération internationale (JICA), le bras exécutif du gouvernement japonais en matière de coopération technique et financière et le gouvernement du Sénégal ont convenu et signé le projet relatif à la révision du Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar Horizon 2035 le 5 mai 2014 à Dakar. La JICA et le Gouvernement du Sénégal, ont choisi un consortium de consultants dirigé par RECS International Inc. pour mener l'Etude.

    L'étude a été lancée en août 2014. Les premières activités comprennent les discussions avec la DUA sur l'avant-projet de rapport de commencement, la mise à disposition de locaux à usage de bureaux pour le projet, aménagés et équipés par la DUA et le lancement de la collecte de données9. Les experts de la Mission d'Etude de la JICA ont commencé la collecte de données dans leurs domaines respectifs vers la fin du mois d'août. Les domaines couverts par l'étude sont les suivants: le développement régional, l'analyse de la durabilité, l'occupation du sol, l'urbanisme, le développement des capacités, l'atténuation des inondations, les ressources en eau, le Plan d'Urbanisme de Détails, l'analyse socio-économique, le développement économique / développement industriel, les transports, les infrastructures logistiques,

    9 Rapport intérimaire, PDU de Dakar 2035, RECS International Inc., Juillet 2015

    18

    l'approvisionnement en eau, l'assainissement, la gestion des déchets solides, l'électricité / les énergies renouvelables, les risques et catastrophes urbains, l'hydrologie et l'hydraulique, l'environnement, la consultation publique, l'analyse économique et financière, la cartographie topographique et les bases de données SIG. Au total 30 experts ont été affectés au projet.

    Un séminaire de lancement s'est tenu le 22 septembre 2014 dans le but de présenter le champ d'intervention du projet aux membres du comité de pilotage et du comité de coordination technique. Les participants, plus de 120 au total, ont activement échangé sur la base des présentations faites par le Directeur de l'Urbanisme et de l'Architecture et le Chef de la Mission d'Etude de la JICA. Un certain nombre d'études ont été menées sur la base de contrats de sous-traitance passés avec des entreprises sénégalaises de septembre 2014 à janvier 2015. Elles comprennent des levés topographiques pour le Plan Directeur (1/20.000), un profil en travers pour un modèle de simulation d'inondation, une audience publique sur la situation des inondations, une enquête de référence sur les conditions environnementales et sociales pour le Plan Directeur et la création d'une base de données SIG.

    La première série de réunions des acteurs a été organisée en septembre et octobre 2014 dans les cinq départements couverts par le PDU: Dakar, Pikine, Guédiawaye, Rufisque et Diass. Elles visent à présenter un aperçu du projet actuel aux participants y compris les agents de l'administration locale, les représentants des populations et le secteur privé, afin de recueillir leurs opinions, en particulier sur les problèmes auxquels ils font face et leur vision future. Un voyage d'étude a été organisé au Japon du 6 au 21 décembre de 2014, pour les homologues sénégalais. Cinq homologues au total, dont trois de la DUA, un du département de Guédiawaye et un autre de la commune de Diass, ont participé à la formation organisée à Tokyo, à Yokohama, à Chiba et à Kitakyushu ville, sur un certain nombre de thèmes relatifs au développement urbain. Des réunions hebdomadaires se sont tenues tous les mercredis matin afin de discuter de l'état d'avancement des travaux, d'obtenir le feedback des homologues de la DUA et de promouvoir le renforcement de leurs capacités. Les deuxièmes réunions du comité de coordination technique et du comité de pilotage ont été convoquées pour discuter les résultats intérimaires de l'Etude les 3 et 5 mars respectivement. Un résumé du Rapport Diagnostic a été distribué lors de ces deux réunions. Par la suite le Rapport d'Avancement complet a été remis aux membres du Comité de Coordination Technique et du Comité de Pilotage en fin mars. Le rapport d'avancement présente les résultats intermédiaires du projet jusqu'en mi-février 2015, y compris notamment les thèmes suivants :

    ? Situation actuelle de la Zone d'étude ;

    ? Analyse préliminaire de la durabilité ;

    19

    > Evaluation environnementale stratégique;

    > Analyse de la durabilité préliminaire et évaluation environnementale stratégique ;

    > Visions, politiques, stratégies et scénarii ;

    > Cadre de développement;

    > Sélection de la zone du Plan d'Urbanisme de Détails ;

    > Liste de projets menés dans le cadre de l'étude de préfaisabilité.

    3.4- La promotion des pôles urbains comme stratégie d'accompagnement de l'urbanisation

    Suivant les orientations discutées pour le cadre de développement spatial, la future structure

    urbaine est élaborée pour montrer le modèle d'urbanisme envisagé. Les conditions suivantes

    sont prises en compte :

    > Promotion de l'expansion urbaine de l'Est vers le Sud Est avec les pôles urbains de

    Diamniadio et Daga-Kholpa ;

    > Promotion du développement le long du transport public de masse;

    > Suppression de l'urbanisation en zones à risques;

    > Conservation de la zone des Niayes, et des zones de forêts classées;

    > Création d'une ceinture verte couvrant toute l'agglomération;

    > Création de grandes routes internationales et de routes urbaines pour relier les centres

    urbains ;

    > Transformation des zones industrielles le long du littoral à usage public ;

    > Différenciation des pôles urbains et des centres urbains avec des fonctions uniques

    20

    Figure 5 : Structure urbaine globale envisagée
    (Source JICA)

    Le pôle urbain de Diamniadio ou nouvelle ville de Diamniadio a été identifié comme le projet national qui va améliorer la structure urbaine dans la région de Dakar (voir figure 6) en créant un nouveau pôle urbain capable de rivaliser avec le plateau, seul pôle urbain existant. Diamniadio est situé dans un carrefour stratégique où se retrouvent deux routes nationales. La nouvelle ville est destinée à accueillir l'administration, l'enseignement supérieur et les établissements de santé. La délégation à la promotion des pôles urbains de Diamniadio et du Lac Rose supervise le projet de Diamniadio en tant qu'établissement public d'aménagement. En raison du développement de Diamniadio et du nouvel aéroport international, la partie centrale et orientale de la zone d'étude sont devenues des zones potentiellement capables de créer un équilibre démographique avec Dakar. L'APIX (Agence de Promotion des Investissements et des grands Travaux) a démarré l'aménagement d'une Zone Economique Spéciale autour du nouvel aéroport international.

    Cette zone de planification périurbaine fait partie du département de Rufisque où l'expansion urbaine est devenue un sérieux problème car elle qui envahit les terres agricoles les zones et naturelles. En outre, il y existe d'autres secteurs porteurs de développement économique tels que l'exploitation minière et le tourisme. Les orientations et les considérations liées au développement de cette zone prévoient la promotion et le développement de Diamniadio comme pôle urbain à travers quelques orientations :

    21

    ? Fournir des services urbains de classe mondiale et suffisamment d'infrastructures pour soutenir les fonctions urbaines du pôle urbain; il s'agit entre autres de fonctions relatives à l'administration nationale et à la mise en place de centres commerciaux/d'Affaires, d'hôtels, de centres de conférence, etc.

    ? Promouvoir des « Centres de connaissances » attractifs dotés de nouvelles villes-campus ainsi que d'institutions de recherche-développement et de développement des ressources humaines.

    ? Promouvoir l'émergence d'une « Cité médicale » grâce à la prestation de services médicaux de classe mondiale ciblant le marché national et régional de l'Afrique de l'Ouest.

    Figure 6 : Plan de développement de pôles urbains à l'Est de Dakar

    (Source : JICA)

    22

    4.- Un contexte institutionnel marqué par des mutations structurelles

    Ces projets urbains apparaissent dans un contexte de mutations institutionnelles notamment sur l'organisation des collectivités locales mais aussi dans un contexte marqué par un plan de restructuration de l'économie nationale à travers le Plan Sénégal Emergent (PSE)

    4.1- l'Acte III de la décentralisation

    La réforme de l'administration locale appelée « Acte III de la décentralisation » lancée officiellement le 19 Mars 2013, est une option pour la refondation majeure de l'action territoriale qui va permettre de bâtir le développement du Sénégal à partir des opportunités, atouts et potentialités de chaque territoire. La réforme consiste à avoir des territoires plus viables et porteurs de développement durable à travers une nouvelle politique de décentralisation par la création d'une nouvelle carte administrative de collectivités. Toute cette initiative, fondée sur la territorialisation des politiques publiques, va permettre la mise en place d'un projet de développement économique et social dans chaque territoire.10

    Trois axes sont retenus : construire une cohérence territoriale par une réorganisation de l'espace et l'émergence des pôles de développement ; assurer la lisibilité des échelles de gouvernance territoriale et améliorer les mécanismes de financement du développement territorial et la gouvernance budgétaire. Il est attendu de la réforme :

    ? Une transformation des communautés rurales en communes. C'est la communalisation intégrale.

    ? L'érection du département en collectivité territoriale avec un conseil départemental élu au suffrage universel ;

    ? L'émergence des pôles de développement économiquement viables constitués du maintien des régions actuelles

    ? Un transfert d'une nouvelle génération de compétences aux collectivités locales (agriculture, pêche assainissement...)

    ? La mise en place d'un mécanisme de financement plus pertinent et plus efficient.

    10 Demba SY, droit administratif, 2014

    23

    4.2- Le Plan Sénégal Emergent

    Le PSE (Plan Sénégal Emergent) est un ambitieux programme de développement économique et humain. Il intègre un PAP (Plan d'Actions Prioritaires 2014 - 2018) et fait appel au Partenariat Public Privé. Il concerne tous les secteurs de la vie politique, économique et sociale, à commencer par les institutions, la paix, la stabilité et la démocratie ; la bonne gouvernance et l'aménagement dynamique et équilibré des territoires.

    L'ambition de l'Etat du Sénégal à travers le PSE est de favoriser une croissance économique à fort impact sur le développement humain. Pour ce faire, il s'agira de consolider les acquis, notamment en matière de gouvernance démocratique, et de recentrer les priorités dans la perspective de garantir durablement la stabilité économique, politique et sociale. La réalisation de cette ambition repose sur la mise en oeuvre d'un important programme d'investissements dans les secteurs porteurs, à même d'impulser une dynamique de croissance forte et soutenue11.

    Cette aspiration à un mieux-être se décline en une vision qui est celle d'un Sénégal Emergent en 2035 avec une société solidaire dans un État de droit12. Les orientations stratégiques qui guideront les initiatives à prendre pour traduire cette vision en actions et résultats tangibles pour le bénéfice des populations, s'appuient sur trois axes visant:

    ? Une transformation structurelle de l'économie à travers la consolidation des moteurs actuels de la croissance et le développement de nouveaux secteurs créateurs de richesses, d'emplois, d'inclusion sociale et à forte capacité d'exportation et d'attraction d'investissements. Cet axe s'inscrit dans une option de développement plus équilibré, de promotion de terroirs et des pôles économiques viables afin de stimuler le potentiel de développement sur l'ensemble du territoire ;

    ? Une amélioration significative des conditions de vie des populations, une lutte plus soutenue contre les inégalités sociales tout en préservant la base de ressources et en favorisant l'émergence de territoires viables ;

    ? Le renforcement de la sécurité, de la stabilité et de la gouvernance, de la protection des droits et libertés et de la consolidation de l'État de droit afin de créer les meilleures conditions d'une paix sociale et de favoriser le plein épanouissement des potentialités.

    11 http://pse-officiel.com/le-pse/

    12 Plan Sénégal Emergent, document de préparation, Février 2014

    24

    Partie II : Le PPAB un programme ambitieux et inclusif

    1- Présentation du programme

    En 2008, l'Organisation des Nations Unies pour les Etablissements Humains ONU-HABITAT a lancé le Programme Participatif d'Amélioration des Bidonvilles (PPAB), en partenariat avec le Groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), sur financement de la Commission Européenne.

    l'objectif global du PPAB est de contribuer à l'amélioration des conditions de vie des populations défavorisées en milieu urbain et de contribuer à l'objectif du millénaire pour le Développement (OMD) 7, notamment la cible C, qui vise à réduire de moitié, d'ici à 2015, la proportion de personnes sans accès durable à l'eau potable et à l'assainissement de base et la cible D qui vise à une amélioration significative des conditions de vie d'au moins 100 millions d'habitants des bidonvilles d'ici 2020 13 . Actuellement, il y a 34 pays et 63 villes parmi les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique participant au programme (voir figure 7).

    Il s'agit également de renforcer la capacité des institutions locales, centrales et régionale et les principaux intervenants dans les établissements humains et l'amélioration des bidonvilles à travers la bonne gouvernance et les approches utilisées en gestion ainsi que les projets pilotes. Il contribue également, au cas échéant, à élaborer les politiques et réaliser les cadres institutionnels, législatifs, financiers, normatif, et de la mise en oeuvre. Ce processus se fera par le biais de l'analyse situationnelle des bidonvilles, de la mobilisation des ressources nécessaires et de la mise en oeuvre de stratégies appropriées pour l'amélioration des bidonvilles.

    Afin d'institutionnaliser l'approche participative dans les politiques et stratégies de planification urbaine, le PPAB a mis en oeuvre en trois grandes phases d'exécution :

    ? le pilotage urbain participatif ;

    ? la planification participative de l'action et la formulation du programme ; ? la mise en oeuvre participative du projet.

    13 www.monppab.org

    25

    Phase 1: Profilage urbain

    Au cours de la première phase, les villes entreprennent des évaluations rapides, participatives, transversales, multisectorielles, et des actions dans le but de cerner les défis et les mécanismes de réponses. Certaines des méthodes appliquées lors du profilage comprennent la revue des ouvrages existants, entretiens avec les acteurs clés et les consultations nationales. Les thèmes principales analysés sont : gouvernance urbaine, sécurité urbaine, logement, le foncier, genre, développement économique local, services urbains de base, gestion des catastrophes, changement climatiques et l'environnement.

    Phase 2: Planification des actions et élaboration du document pour le programme Durant la deuxième phase, construite sur les résultats du profilage urbain, les villes formulent des priorités pour les interventions au niveau des quartiers et analysent la planification ainsi que les cadres du développement pour l'amélioration et la prévention des bidonvilles. En outre, les réseaux pour l'amélioration des bidonvilles sont établies, les renforcements des capacités sont mises en oeuvres et les autorités sont facilitées pour identifier les ressources.

    Phase 3: Mise en oeuvre du projet

    Au cours de la troisième phase, les autorités des communes, les autorités régionales et les gouvernements centraux sont facilités pour la mise en oeuvre des projets concrets identifiés.

    26

    Figure 7 : Cartographie des pays bénéficiaires du PPAB

    (Source : monppab.org)

    2- L'approche inclusive du PPAB

    La participation des acteurs locaux (collectivités locale et habitants) est un principe majeur du PPAB. Les partenaires PPAB, reconnaissant que le développement urbain est inéluctable, s'efforceront à mobiliser les forces positives d'une urbanisation durable, grâce à la mise en oeuvre de politiques urbaines inclusives et fondées sur le respect des droits. Dans la même mesure, ils adopteront une approche participative à l'échelle de la ville pour satisfaire une ou plusieurs des cinq carences caractérisant les bidonvilles : le manque d'eau potable, d'accès à

    27

    l'assainissement, de durabilité du logement, le surpeuplement et la sécurité foncière. Les principes qui sous-tendent la formulation du PPAB sont soulignés en plusieurs points :

    > Aucune expulsion forcée ou illégale des habitants des bidonvilles ne se produira dans les quartiers PPAB ciblés.

    > Des stratégies directes et tangibles seront conçues pour autonomiser les communautés des bidonvilles défavorisées en allouant 10% du financement PPAB à des interventions de développement gérées par les communautés.

    > Le PPAB sera mis en oeuvre sur la base des principes de la bonne gouvernance urbaine, de la transparence dans la gestion, de la responsabilité, de la participation et de la décentralisation. Ces principes sont inclus au niveau des priorités nationales et dans la Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide au développement.

    > Les ressources locales, nationales et internationales suffisantes seront mobilisées pour les activités d'amélioration des conditions de vie des populations des bidonvilles. Ils devront reconnaître que la conception de stratégies pour améliorer la mobilisation de ces ressources constitue l'élément essentiel pour la résolution des problèmes des bidonvilles à moyen et à long terme.

    > Les partenaires PPAB au sein des gouvernements nationaux et locaux s'engageront en mettant à la disposition du programme des allocations budgétaires nationales et en participant au cofinancement des projets pilotes du PPAB.

    > Les partenaires PPAB poursuivront les stratégies participatives d'amélioration des bidonvilles par l'intégration de l'approche PPAB fondée sur les Droits de l'Homme, qui comprend : les droits des habitants à un accès aux services urbains de base, le droit à un logement convenable et le droit à la participation au processus de prise de décisions, à l'équilibre entre les genres, en ciblant divers groupes communautaires et en particulier les femmes et les jeunes.

    > Le PPAB adoptera une approche de gestion axée sur les résultats de l'analyse situationnelle pour la conception, la mise en oeuvre et le suivi des objectifs nationaux qui ont été identifiés.

    Les ateliers de planification participative occupent une place importante dans la communication avec les bénéficiaires du Programme. Ils permettent de présenter d'abord aux populations un état des lieux de la situation des quartiers avec toutes les contraintes qui entravent leur développement économique et social. Ensuite de proposer les différents projets

    28

    retenus (voierie, assainissement, adduction d'eau, équipements...) qui ont pour objectif principal l'amélioration de leur cadre de vie. Ils constituent pour les populations des moments de prise de conscience des problèmes de leur environnement, d'expression de leurs besoins, de partage et de prises de solutions collectives.

    3- Le Sénégal, un choix pertinent dans un contexte de forte urbanisation

    La croissance urbaine au Sénégal s'est traduite par une occupation non planifiée de l'espace donnant naissance à plusieurs quartiers non planifiés aussi bien en zone urbaine centrale que dans les fronts d'urbanisation. Ainsi les conséquences de cette urbanisation sont entre autres une extension démesurée des espaces urbains, un accroissement des besoins en services urbains de base, une demande en moyens de transport, une demande exponentielle en logements (le déficit en logements est estimé en 2010 à 125.000 unités), une occupation anarchique des extensions urbaines et zones non constructibles sachant que les zones d'habitat spontané représentent plus de 30% de l'habitat dans l'agglomération dakaroise et abritent plus de 3 000 000 d'habitants. Cette situation a accru les problèmes des villes avec comme corollaire, une croissance démographique rapide et une extension démesurée des espaces urbains.

    Cette carence en logements a entrainé l'occupation anarchique de certains quartiers non planifiées, par une partie des ménages dont la demande en logements n'arrive pas à être satisfaite par le secteur formel. Le plus souvent, les habitants de ces zones sont confrontés à des conditions de vie précaires, un accès limité aux services urbains et équipements de base (eau, électricité, assainissement, éducation, santé...). En raison d'une absence totale de planification, ces zones non planifiées présentent des risques d'inondations qui surviennent chaque année durant l'hivernage.

    4- Les quartiers cibles du PPAB : deux quartiers intégrés au tissu urbain dakarois

    Le présent projet va concerner les quartiers d'Arafat (40ha) dans la commune de Grand Yoff et celui de Grand Médine (22ha) dans la commune de la Patte d'Oie situées tous les deux dans

    29

    la ville de Dakar (voir figure 8). La commune de Grand Yoff comptait en 2010 une population estimée à 154.291 habitants avec un taux d'accroissement moyen de la population de 2,12%. Celles de la commune de la Patte d'Oie sont estimées à 32.495 habitants durant l'année 2010 avec un taux d'accroissement moyen de 2,13%. C'est donc une population cumulée supérieure à 186.786 habitants au minimum qui bénéficiera des retombées directes et indirectes du projet.

    Tous ces deux quartiers sont constitués d'un type habitat non planifié qui ne favorise pas l'implantation des infrastructures nécessaires pour la fourniture correcte des services de base. Les populations qui y vivent, sont pour la plupart dans l'insécurité foncière car ne disposant pas de titre de propriété. Tout cela constitue un frein aux investissements individuels et collectifs car la plupart de ces bénéficiaires n'ont pas accès aux systèmes structurés de financement et de prêts qui leur permettent d'améliorer leurs conditions de vie. Ces quartiers mal préparés à recevoir les investissements nécessaires, sont occupés par des habitants qui participent difficilement au développement de leur localité du fait de l'enclavement, du manque d'infrastructures et d'équipements. Même les activités microéconomiques ne peuvent y prospérer du fait de la promiscuité et de l'insécurité.

    Figure 8 : Localisation des quartiers cibles (Source : Google Map)

    30

    4.1- La restructuration de Arafat, un projet repris trente ans après une première initiative

    Arafat se situe dans la Commune de Grand Yoff. Il est limité à l'Ouest par la Route des

    Niayes, au Nord par la Cité Millionnaire, à l'Est et au Sud par la Route venant du Camp Pénal (voir figure 9).

    « Le quartier Arafat dans la ville de Grand Yoff est un vaste quartier ouvrier dans la proche banlieue de l'agglomération dakaroise et réunit des occupants de nature et d'origine diverse. La réalisation de nouveaux programmes d'habitat planifié dans la zone et la mise en place d'infrastructures routières ont propulsé le quartier dans la hiérarchie des établissements urbains dakarois. La rapidité des rythmes de construction est lié au statut encore irrégulier de certaines zones qui font l'objet de nombreuses transactions foncières. Les effets urbanisant de Grand Yoff sont manifestes ; l'embryon d'équipement mis en place est responsable de l'occupation rapide des zones attenantes. »14

    C'est à la suite des opérations de déguerpissement de 1985, que les autorités du Sénégal avaient décidé de procéder à la restructuration et à la régularisation foncière d'Arafat par le biais du Projet DUA/GTZ dans les années 1990. Les organes du GIE avaient été officiellement reconnus et un compte avait été ouvert à la Banque de l'Habitat du Sénégal (BHS) pour le dépôt des sommes versées par ses membres et destinées à la régularisation foncière pour la contribution aux frais d'aménagement de la zone. La fin du Projet DUA/GTZ en Décembre 1999 avait entraîné l'arrêt des activités du programme à Arafat. Cependant, le bureau du GIE mis en place depuis 1995, continuait de gérer les affaires courantes du quartier. En 2012, la Ville de Dakar et ONU-HABITAT ont donné mandat à la Fondation Droit à la Ville de reprendre les activités de restructuration et de régularisation foncière à Arafat. C'est ainsi que :

    ? Un nouvel état des lieux a été réalisé ;

    ? Un nouveau plan parcellaire a été élaboré ;

    ? Un nouveau recensement des ménages et du bâti a été refait ;

    ? Un renouvellement des organes du GIE a été effectué ;

    ? Les Groupements de Promotion Féminins de Arafat ont été identifiés, répertoriés et conviés à une rencontre d'informations et de partage des objectifs et recommandations du PPAB.

    14 TALL, 2009, Investir dans la ville africaine : Les émigrés et l'habitat à Dakar

    31

    ? Une rencontre a réuni les bureaux des Associations Sportives et Culturelles et

    Economiques d'Arafat (ASCE) autour desquelles évoluent les jeunes de la localité. Ils ont été informés et sensibilisés sur l'importance des opérations de restructuration et de régularisation de leur zone d'habitation. Ils ont par la suite eu à apprécier la pertinence de la démarche pour leur implication et ont réaffirmé leur engagement à travailler aux côtés des autres acteurs pour la réussite du programme

    L'habitat est essentiellement fait de matériaux en dur classiques briques, bétons, ciment... (Voir image 1). Ce qui signifie qu'on n'est pas dans un quartier d'habitat spontané fait de matériaux de récupération. Cela signifie également qu'il y a une stabilité de la trame urbaine et que le squat est quasiment inexistant vu que toutes les emprises destinées à l'habitat sont occupées. Les types d'habitation quelquefois en étage sur plusieurs niveaux et destinés à la location sont caractéristiques du paysage urbain dakarois et témoignent d'une demande immobilière qui ne cesse de croître. Le quartier bénéficie des services de base tels que le réseau d'eau potable, l'assainissement, le réseau électrique, l'éclairage public et même le réseau de téléphone.

    Figure 9 : Arafat, un quartier qui s'est intégré dans le tissu urbain environnant. Par contre la trame
    viaire à l'intérieur du quartier se caractérise par son irrégularité

    (Source Google Map)

    32

    Image 1 : Quelques rues à Arafat (Sources : FDV)

    La voirie reste malgré tout relativement étroite et n'est pas bitumée, ce qui est caractéristique des quartiers populaires. L'accessibilité est par conséquent difficile pour les automobilistes. Par ailleurs on remarque que plusieurs interstices sont occupés par des cantines faits de matériaux comme le zinc et destinés à des activités d'artisanat, de menuiserie, de restauration, de vente de pain, de charbon de bois... On peut en déduire effectivement que la non planification de ce quartier par les pouvoirs publics ou du moins l'occupation spontanée du quartier n'a logiquement pas pris en compte des zones destinées aux activités économiques, commerciales de moindre envergure ou aux équipements. Par conséquent ces activités sont confinées dans des petits ateliers qui occupent pour la plupart la voie publique.

    4-2- La restructuration urbaine de Grand Médine

    Le quartier se situe dans la Commune de Patte d'Oie. Il est limité à l'Ouest par le Stade Léopold Sédar SENGHOR, au Nord par les Parcelles Assainies, au Sud par l'Autoroute, et à l'Est par la Route des Niayes (Voir figure 10).

    Le quartier a été fondé en 1963. Il faut dire que cette localité située à coté du stade Léopold Sédar Senghor a été mis sur pied par les déguerpis de Baye Gaïndé, une localité qui abrite l'actuel marché HLM. Depuis sa création, le quartier Grand Médine est secoué par plusieurs difficultés notamment les inondations, le problème du lotissement, d'éclairage, etc.

    La restructuration et la régularisation foncière de ce quartier ont été entamées par la Ville de Dakar qui avait confié le programme au Bureau d'Etude ENGESAHEL en 2000/2001. C'est ainsi que des études préliminaires ont été réalisées: état des lieux, plan parcellaire, enquêtes socio-économiques, recensement des ayants droit et du bâti, mise en place des organes du GIE des bénéficiaires de parcelles. Des ateliers de planification participative ont aussi été

    33

    organisés. Cependant, à cause de l'indisponibilité du financement prévu, la réalisation du programme de restructuration et de régularisation foncière a été suspendue.

    En 2012 la Ville de Dakar et ONU-HABITAT ont donné mandat à la Fondation Droit à la Ville pour reprendre les activités de restructuration à Grand Médine.

    Le renouvellement et la mise en place des organes du GIE ont été effectués. Il reste l'ouverture du compte bancaire pour le dépôt et la gestion des contributions financières des bénéficiaires de parcelles pour la régularisation foncière et pour les participations aux frais d'aménagement. Les Groupements de Promotion Féminine ont été identifiés, répertoriés et conviés à une rencontre d'information et de partage des objectifs et recommandations du Programme Participatif pour l'Amélioration des Bidonvilles.

    Les représentants des Associations Sportives Culturelles et Economiques ont été rencontrés, informés et sensibilisés sur l'importance des activités de restructuration et de régularisation de leur zone d'habitation.

    Figure 10 : Situation géographique de Grand Médine (Sources : Google Map)

    Image 2 : Quelques rues à Grand Médine (Source : FDV)

    34

    A Grand Médine, un quartier aux rues très étroites et en grande partie inaccessibles aux automobilistes. Les habitations se limitent pour la plupart en rez-de-chaussée. En plus de cela, certains bouts de rue sont occupés par des habitations faits de matériaux de récupération qui s'insèrent dans la trame urbaine. (Voir image 2).

    L'omniprésence de matériaux de constructions (briques, sable et béton) dans la rue (Voir image 2) témoigne de l'activité intense de transformation, construction et rénovation, en cours dans les quartiers. Par ailleurs les enclos de moutons font partie intégrante du paysage et ont tendance à empiéter sur les voies de passage et l'existence de petites activités économiques (ventes de nourriture) est assez fréquente dans ce quartier.

    35

    4.3- Le montage des structures locales bénéficiaires du projet

    Après l'identification de la zone à restructurer, un état des lieux est élaboré. Il constitue la base sur laquelle le plan parcellaire sera établi. Un recensement total de la population et de l'habitat ainsi qu'une collecte de données sont alors effectués pour identifier d'une part les propriétaires qui sont les bénéficiaires directs des projets de restructuration et de régularisation foncière et qui sont organisés en Groupement d'Intérêt Economique (GIE). D'autre part, les Groupements de Promotion Féminins (GPF), les Associations Sportives, Culturelles et Economiques (ASCE) et le comité des sages sont intégrés au processus. Le plan de restructuration élaboré par la Fondation Droit à la Ville, est soumis à l'avis du comité des résidents au niveau des ateliers de planification; du conseil municipal et à celui du comité départemental d'urbanisme pour approbation. L'étape suivante est l'organisation d'assemblées générales d'informations et de sensibilisation à laquelle les résidents du quartier sont conviés pour partager les grandes lignes du programme et à exprimer leurs interrogations, leurs besoins, leurs attentes, leurs suggestions. Ces rencontres sont mises à profit pour désigner les représentants de sous quartiers au comité de gestion et au comité des sages. Le quartier est alors découpé en zones ou sous quartiers homogènes et facilement gérables à la tête desquels sont élus certains membres de la collectivité. La mise en place officielle du bureau du GIE est l'Assemblée Générale Constitutive qui est une cérémonie protocolaire à laquelle les autorités de l'Etat et des Collectivités Locales sont invitées à prendre part à l'installation des nouveaux bureaux du GIE et des sages, et à l'adoption des statuts réglementaires régissant son fonctionnement. Suite à cela, les actions suivantes sont menées :

    ? Organisation et mise en oeuvre du système de recouvrement des contributions financières des bénéficiaires de la régularisation foncière ;

    ? Gestion des fonds collectés et déposés dans le compte du GIE ;

    ? Mobilisation des fonds pour les formalités foncières et fiscales auprès des Services des Domaines et du Cadastre ;

    ? Versements des montants des contributions financières des ayants droit aux frais d'aménagement dans le compte du FORREF (Fonds de Restructuration et de Régularisation Foncière) ouvert par l'Etat à la Banque de l'Habitat du Sénégal.

    36

    5- Le volet opérationnel de la restructuration

    5-1- Arafat, la restructuration d'un quartier fortement urbanisé

    Le comité technique a identifié des actions prioritaires qui, une fois réalisées, pourront concourir à l'amélioration du cadre et des conditions de vie des populations de Arafat et de Grand-Médine. Ces actions ont été retenues sur la base de l'expression de requêtes soulevées dans les ateliers de planification participative. Ainsi, les actions ci-après ont été proposées et validées par l'équipe pays et les communautés des résidents :

    Pour Arafat, au vue de l'irrégularité de la trame urbaine, et de l'étroitesse de la voirie, il faudra :

    > Libérer des voies et accès obstrués par des habitations qui sont bâties au travers de la rue ;

    > Elargie la voirie afin de rendre celle-ci praticable par les véhicules ;

    > Renforcer l'accessibilité et le désenclavement du quartier à travers l'amélioration des voies de circulation internes et traversantes ;

    > Connecter les voies de circulation en tenant compte de leur hiérarchie pour un réseau viaire efficace et fonctionnel ;

    > Améliorer la lisibilité des espaces publics et du cadre de vie ;

    > Améliorer et restaurer le réseau d'assainissement au regard des fréquentes inondations qui ont lieu dans le quartier ;

    > Mettre en conformité les réseaux d'adduction d'eau potable, d'électricité, de l'éclairage public et de la téléphonie ;

    > Déplacer 14 ménages dont les habitations seront détruites puisque impactées par les travaux d'élargissement.

    37

    Figure 11 : Plan de restructuration d'Arafat
    (Source : FDV)

    Image 3 : Exemple d'impasses et de voies étroites rencontrées dans le quartier

    (Source : FDV)

    Image 4 : Les populations sont souvent sans abris en cas de forte pluie suivie d'inondation (source : xibar.net, presse en ligne)

    38

    5.2- Grand Médine, un quartier aux allures d'interstice urbain

    Pour Grand Médine, le plan de restructuration a été élaboré de manière consensuelle et concerne la requalification et la restructuration de deux grandes voies principales perpendiculaires qui traversent le quartier d'Est en Ouest et du Nord au Sud. Au-delà du désenclavement du quartier, l'idée est de relier à travers ces voies nouvellement élargies, les quartiers environnants sans contourner Grand Médine dont l'intérieur reste d'ailleurs difficilement accessible en voiture. La trame urbaine assez régulière par ailleurs, n'a pas, faute de planification, laissé place à de la voirie adéquate permettant une circulation automobile. Par conséquent il est impossible d'avoir des zones d'activité ou commerciales de grande envergure et le foncier est peu valorisable.

    Il y a lieu de remarquer que le quartier est bordé par de grands réseaux routiers, (autoroute ou route de l'aéroport au Sud, route des Niayes à l'Est et une troisième voie qui est la limite Nord du quartier) et un grand équipement sportif en l'occurrence le stade international Léopold Sédar Senghor. Paradoxalement, ces infrastructures contribuent à enclaver celui-ci puisqu'ils constituent une frontière physique. L'idée de la création de ces deux grandes voies intra-quartier est d'améliorer l'accessibilité du quartier à travers des voies larges et praticables mais aussi de contribuer à son désenclavement à travers une mobilité plus efficace et sensiblement améliorée. Cela se justifie dans la mesure où les voies permettant une circulation automobiles sont extrêmement faibles (Voir image 5).

    Pour un quartier de 22 ha de superficie, seule celle traversant le quartier d'Ouest en Est et mesurant 400 m de long en assez large pour accueillir des véhicules même si à certains endroits la voie se rétrécit puisque certaines habitations empiètent sur la voirie. La voie qui traverse le quartier du Nord au Sud induira plus de charge de travail, de maisons à remembrer et fera l'objet d'un élargissement du simple au double de la largeur de la voie. A ce propos, la question de la largeur de la voie a fait l'objet d'intenses débats lors de la dernière réunion avec les habitants de Grand Médine.

    Par ailleurs il sera procédé au remembrement de certaines habitations pour libérer des voies obstruées.

    En résumé les travaux de restructuration à Grand Médine concerneront :

    ? La création de deux principales artères en élargissant leurs emprises actuelles. La première d'un linéaire de 400m d'Ouest en Est. La seconde de 550m selon l'axe Nord Sud. L'objectif est de connecter le quartier avec les grands axes routiers environnants.

    39

    ? Le remembrement de 35 maisons pour élargir ces deux artères afin de libérer les emprises

    ? Déplacement de certaines habitations pour créer des percées et libérer des portions de voies obstruées

    ? Mise en conformité des réseaux d'adduction d'eau potable, d'électricité, d'éclairage public et de téléphonie ;

    Figure 12 : Plan de restructuration de Grand Médine (Source : FDV)

    40

    Image 5 : Les rues étroites de Grand Médine témoignent du caractère non planifié du quartier

    (Source : FVD)

    Ces actions de restructuration, au-delà de l'amélioration du cadre de vie, du paysage urbain et du caractère fonctionnel des équipements, évoquent d'autres enjeux tout aussi importants comme :

    ? Des enjeux de santé publique : L'absence d'assainissement entraine des problèmes de santé publique à cause des nombreuses maladies qu'elle engendre. La mauvaise gestion des eaux usées entraine la propagation des maladies à transmission féco-orale (diarrhées, choléra, fièvre typhoïde, hépatite) et parasitaires (paludisme). En effet, les eaux usées ménagères sont régulièrement déversées sur la voie publique ainsi que les produits de vidange des fosses domestiques.

    ? Des enjeux de sécurité : L'absence de voierie adéquate et la présence d'impasses constituent un danger dès lors que certains sinistres comme les incendies s'y déclarent. En effet les véhicules d'intervention des sapeurs pompiers ne peuvent pas y accéder car certaines voies sont trop étroites.

    5.3- Le recasement des ménages impactés par la restructuration

    Trente six ménages identifiés seront déplacés puis relogés dans une zone de recasement identifiée à Grand Médine (voir figure 13). Ces ménages seront indemnisés par quartier à hauteur de 120.000.000 FCFA pour Arafat et 90.000.000 FCFA pour Grand Médine.

    La zone de recasement initiale d'une surface d'environ 12 ha est située au Sud du quartier de Grand Médine entre le quartier même et la route de l'aéroport. Elle est destinée à accueilli les ménages déplacés de Grand Médine ainsi que ceux d'Arafat.

    Dernièrement, la zone de recasement a fait l'objet d'une préemption de la part de l'Etat sénégalais pour réaliser un échangeur. Ainsi a été identifiée une seconde zone de recasement à proximité immédiate de celle initiale pour accueillir les ménages à déplacer (voir figure 14).

    41

    Actuellement cette option fait l'objet de discussion entre les partie prenantes du PPAB et l'Etat d'une part et entre la FDV et les institutions locales de Grand Médine puisque cette zone empiète sur un terrain de football.

    Figure 13 : Plan de « l'échangeur de l'émergence » (source FDV)

    Figure 14 : emprise de l'échangeur

    (Source M. Diene)

    42

    6- Les acteurs institutionnels

    Dans le but de formaliser la phase III du PPAB (volet opérationnel de la restructuration), l'arrêté portant création de l'équipe pays N° 01719 du 06.02.2015 a été signé, par le Ministre du Renouveau Urbain, de l'Habitat et du Cadre de Vie, le 06 février 2015. L'équipe pays, chargée du pilotage et du suivi du PPAB, regroupe l'ensemble des acteurs qui oeuvrent dans le développement urbain durable. Par ce même arrêté, un comité technique a été institué pour assurer le suivi opérationnel et la mise en oeuvre du PPAB.

    6.1- L'équipe-pays

    Il concerne les institutions partenaires au vue de leur légitimité politique et organisationnelle dans le processus de restructuration. Il s'agit de la Présidence de la République, la Primature, le Ministère du Renouveau Urbain, de l'Habitat et du Cadre de Vie, le Ministère Délégué Chargé de la Restructuration et de la Requalification des zones inondables, le Ministère de l'Economie, des Finances et du Plan, le Ministère de la Gouvernance Locale et de la Décentralisation, le Ministère de l'Environnement et du Développement Durable, les Services Déconcentrés de l'Etat (préfectures et sous-préfectures), l'Association des Maires du Sénégal, l'Association des Elus Locaux du Sénégal, la Société de Distribution des Eaux, la Société Nationale d'Electricité, l'AGEROUTE, l'Ordre des Architectes du Sénégal et l'Ordre des Géomètres Agréés du Sénégal.

    6.2- Le comité technique

    Il assure le suivi direct du programme, conçoit les documents nécessaires (budget, stratégie de communication, note conceptuelle, supports de discussion avec les GIE, organisation des rencontre avec les structures communautaires et les acteurs institutionnels. Ce comité est composé de :

    M. Mansour TALL puis Mouhamadou DIENE, représentant ONU Habitat

    Mme Fatim LAM, représentant la Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture

    M. Abdoulaye SYLLA, représentant la Mairie de Dakar

    M. Ousmane MBODJI représentant la Fondation Droit à la Ville

    43

    6.3- La mobilisation communautaire

    A propos de la mobilisation communautaire, il y a lieu de distinguer deux types de populations cibles :

    Les cibles primaires qui sont constituées par les propriétaires, généralement chefs de famille qui sont les plus concernés et qui doivent mieux s'impliquer dans les actions du programme. Les cibles secondaires sont composées par des personnalités et de leaders d'opinion capables d'influencer les primaires à davantage s'approprier le programme (délégués de quartier, conseillers municipaux, chefs religieux, notables, groupements de femmes, groupements de jeunes).

    Après les travaux techniques qui concernent l'élaboration des plans d'état des lieux et du parcellaire, le recensement des propriétaires d'impenses et du bâti a été effectué en 20112012. Les activités de mobilisation communautaire vont continuer et les démarches entamées auprès des concessionnaires et autres entreprises pour leur apport dans la mise en oeuvre de cette phase pilote seront finalisées. Dès la mise à disposition des fonds, les protocoles seront signés avec les ayants droit et les travaux de remembrement pourront démarrer, lançant ainsi le démarrage officiel de la phase III du PPAB.

    Image 6 : Explication du processus de restructuration à Grand Médine par le directeur technique de la
    FDV puis prise de parole des résidents (Source M. Diène)

    44

    Tableau 1 : Bilan des activités réalisées avec les structures locales

    ACTIVITÉS

    DESCRIPTIF

    DATE

    QUARTIER

    Arafat

    GM

    Elaboration des plans d'état des lieux et du parcellaire

     
     

    X

    X

    Recensement des

    propriétaires d'impenses et du bâti

     

    2011-2012

    X

    X

    Ateliers de planification participative avec les GIE

    - Identification des priorités (équipements et réseaux) par les représentants des populations et la FDV

    - Approbation des plans de restructuration par les organes dirigeants des GIE

    2012

    X

    X

    Convocations et réunions d'assemblées générales d'information et de sensibilisation de la population

    - Assemblées générales de sous quartier

    - Désignation des représentants de chaque sous quartiers au niveau du GIE de manière à garantir la participation de tous

    03 au 21 mars 2015 1er au 17 avril 2015

    X

    X

    - Election et mise en place des bureaux du GIE et des sages

    13 mai 2015

    04 juin 2015

    X

    X

    Partage des recommandations avec les Groupements de Promotion Féminins (GPF)

    - Réunion avec les GPF

    25 mars 2015

    X

    X

    - Mise en place des bureaux de coordination de leurs activités

    13 mai 2015

    5 juin 2015

    X

    X

    Partage des

    recommandations avec les jeunes réunis en ASC

    - Réunion avec les jeunes

    25 mars 2015

    X

    X

    Réunion élargie du bureau municipal

    - Co-présidée par le Sous-préfet des Parcelles Assainies et le Maire de Grand Médine, en présence de :

    - la ville de Dakar

    - la FDV

    - ONU-Habitat

    - Directeur du Stade de l'Amitié

    - les délégués de quartiers et des imams de Grand Médine

     
     
     

    Réunion de mise en place du Comité de Développement de Quartier (CDQ)

    - Composition: représentants de toutes les franges actives dans la zone du projet pour faciliter la participation de tous

    29 mai 2015
    09 juin 2015

    X

    X

    45

    7- Le financement

    La Direction de l'Urbanisme et de l'Architecture (DUA) et la Fondation Droit à la Ville (FDV), chargées respectivement de la coordination et du pilotage technique seront renforcées dans leurs interventions par toutes les autres structures présentes dans l'équipe pays (directions techniques, sociétés concessionnaires, etc.). Les différents partenaires vont contribuer financièrement pour l'exécution des activités du programme:

    - ONU HABITAT à hauteur de 200.000.000 FCFA (305.000 euros)

    - la ville de Dakar à hauteur de 120.000.000 FCFA (183.000 euros)

    - l'Etat du Sénégal à hauteur 80.000.000FCFA (122.000 euros)

    Les contributions respectives des communes de Grand Yoff et de la Patte d'Oie à hauteur de 5.000.000 FCFA chacune sont prises en charge par la ville de Dakar.

    Par ailleurs, il est prévu la mobilisation de ressources sous d'autres formes. En effet, il est attendu des directions techniques et sociétés concessionnaires, la prise en charge de certains volets du programme dans leur intervention : alimentation en eau potable, réseau d'électricité, l'aménagement de la voirie, etc.

    Le coût estimatif total des études et travaux est de 5 368 000 000 FCFA (8.195.000 euros), répartis comme suit :

    Phase 1: 200 000 000 FCFA (305.000 euros)

    Phase 2: 5 168 000 000 FCFA (7.900.000 euros)

    La phase III du PPAB porte sur la conception et la mise en oeuvre d'un des priorités exprimées par les résidents et répondant à l'amélioration des conditions de vie en termes de sécurité foncière, de durabilité du logement, d'espace de vie adéquat et d'accès à l'eau potable et à l'assainissement (voir annexe 2).

    8.- Les perspectives d'une adaptation du programme à l'échelle nationale

    La perspective envisagée à l'issue de cette phase III et préconisée par ONU HABITAT est le développement d'une stratégie de mise à l'échelle municipale et nationale du PPAB à savoir la mise en place d'un Programme National d'Amélioration des Bidonvilles. Programme destiné à l'amélioration participative des bidonvilles et la réduction de la pauvreté urbaine à partir des connaissances et leçons apprises lors de la mise en oeuvre du PPAB. Cela permettra non seulement une valorisation de l'expérience acquise, mais aussi de développer une

    46

    stratégie nationale pour une cohérence institutionnelle pour un programme de ce type à l'échelle nationale. C'est-à-dire que la FDV pourrait être l'ANRU de la rénovation urbaine au Sénégal. Le projet sera réalisé dans un contexte de décentralisation, notamment avec un transfert de compétence en matière d'urbanisme et d'habitat aux collectivités locales.

    Par ailleurs, le déroulement du projet en lui-même soulève un certain nombre de problèmes qui peuvent entraver son déroulement de manière efficace. En attendant plusieurs avancées ont été réalisées comme:

    ? La signature de l'accord de contribution en présence des représentants d'ONU HABITAT, de la FDV et de la DUA. La contribution de la Ville de Dakar d'un montant de 120.000.000 FCFA est mise à disposition. Il y a également des négociations en cours pour explorer la possibilité d'une participation financière plus accrue de la ville de Dakar pour une phase IV du PPAB à travers le pavage des rues libérées, l'éclairage public et la mise en place d'infrastructures de proximité.

    ? La validation politique de la phase II du PPAB qui a eu lieu le 27/08/2015 à la ville de Dakar. La validation politique présidée par le 2eme adjoint au maire de la ville de Dakar, a vu la participation de l'équipe pays regroupant le comité technique, les acteurs institutionnels et les sociétés concessionnaires. Cette validation politique lance le démarrage de la phase III du PPAB qui concerne le volet opérationnel de la restructuration

    Partie III : la formation des quartiers précaires :
    un problème qui relève de facteurs politiques et stratégiques

    47

    1- Blocages liés au projet

    1.1- La politisation des enjeux comme facteur contreproductif

    La particularité du Sénégal est que la politique se retrouve souvent à tous les niveaux de l'intervention publique mais aussi dans les rapports entre l'Etat central et les collectivités locales mais aussi entre les élus locaux et les populations. Il ressort souvent lors des discussions et consultations avec les populations locales, beaucoup de conflits anciens ou actuels liés aux partis politiques des uns et des autres. Ce sont soit des remerciements dignes de meetings politiques ou des critiques aux relents politiques. Dans l'imaginaire populaire sénégalais, on est avec ou contre le pouvoir et toutes les actions publiques sont perçues à tord ou à raison comme couvertes d'intentions électoraliste. Les deux maires de Grand Yoff sont tous les deux, membres du parti socialiste ; le même parti que le maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall qui vient non seulement de débloquer sa contribution à hauteur de 110.000.000 mais aussi celle des deux communes à hauteur de 10.000.000. D'ailleurs, durant les dernières élections municipales au Sénégal, le « duel majeur » qui a cristallisé toutes les attentions se jouait dans la commune de Grand Yoff entre Khalifa Sall et la premier ministre d'alors, Aminata Touré. La victoire du premier a installé un malaise relativement profond entre le parti au pouvoir et la ville de Dakar. Pour ne pas arranger les choses, la contribution financière de l'Etat du Sénégal pour le PPAB à hauteur de 80.000.000 FCFA n'a à ce jour pas été débloqué.

    1.2-Une approche peu systémique de la restructuration

    La restructuration aura un impact réel en termes de désenclavement et d'accessibilité des quartiers bénéficiaires. Par contre au vu du projet de restructuration et du plan défini pour les deux quartiers, on ne peut manquer de s'étonner de la simplicité avec laquelle le plan de restructuration a été élaboré. En effet il ressemble plus à un projet d'élargissement et de la

    48

    voirie urbaine qu'un projet avec un réel impact sur les conditions de vie des populations et la qualité de leurs habitations. Les plans de restructuration des deux quartiers ne prévoient pas une emprise foncière destinée à accueillir des équipements publics puisqu'il y en a très peu dans les quartiers ou encore des zones d'activité. Cela se justifie d'autant plus que la principale cause d'occupation de la voirie concerne des ateliers d'artisanat, de menuiserie ou des cantines commerciales. Le plan de restructuration provient sans doute des séances de consultation avec les habitants puisque celui-ci doit se faire de manière collégiale. Cependant les questions des équipements publics et des zones d'activités auraient pu faire l'objet d'une attention particulière

    2- Une absence de politique sociale du logement

    2.1- la léthargie des sociétés publiques de promotion immobilière

    Le marché du logement urbain au Sénégal en général et à Dakar en particulier est marqué par une très forte demande et une offre assez faible en dépit du boom du secteur du bâtiment depuis quelques années, notamment dans le haut de gamme. On constate une insuffisance chronique de logements sociaux aussi bien à Dakar que dans les villes de l'intérieur du pays. L'orientation très marquée des nouvelles constructions vers le logement de luxe, inaccessible à la grande majorité des demandeurs, conduit à un déficit de logements sociaux que les politiques publiques ont du mal à résoudre15. Les programmes immobiliers de logements sociaux sont encore très insuffisants et atteignent difficilement la cible que représentent les ménages urbains à faibles revenus.

    Bien que disposant de réserves foncières attribuées généralement par l'État, les sociétés publiques que sont la SNHLM et la SICAP SA livrent, à elles deux, moins de 200 logements par an16. La SNHLM a livré en moyenne par an, entre 2003 et 2011, 100 logements et 1 300 parcelles aménagées.

    Depuis un demi-siècle, deux promoteurs publics majeurs marquent de leur présence le secteur du logement urbain: la SICAP et la SNHLM (ex-DHM). Les logements produits par la SICAP sont inaccessibles pour la grande majorité des ménages du fait de leur prix et de leurs conditions d'accès. Ceux de la SNHLM, qui profitaient à la classe moyenne à leur début, sont devenus rares et hors de portée pour cette catégorie sociale. Cette situation a favorisé

    15 UN HABITAT, profil du secteur du logement au Sénégal, 2012

    16 CAUS- PDU de Dakar 2025

    49

    l'irruption dans le secteur du logement de nouveaux types d'acteurs : les promoteurs privés, et les coopératives d'habitat. Ils sont confrontés à la rareté des ressources foncières, à l'insuffisance de financement et à la lenteur des procédures administratives.

    Tableau 2. Production de logements et de parcelles par différents promoteurs publics et privés

    Acteurs formels

    Logements

    Parcelles viabilisées

    SNHLM (moy. 2003 - 2011)

    100

    1300

    SICAP (moy. 2003 - 2011)

    75

    -

    Promoteurs privés (2009)

    232

    584

    Coopératives (1988 - 2000)

    405

    292

    Source : UN HABITAT, profil du secteur du logement au Sénégal, 2012

    2.2- Les coopératives d'habitat, un dispositif alternatif

    Expression la plus visible de la société civile dans le domaine du logement au Sénégal, les coopératives d'habitat sont des groupements sociaux ou professionnels, organisés en sociétés anonymes coopératives sans but lucratif, dont l'objectif social est de faciliter l'accès à la propriété de leurs membres. Le financement des projets coopératifs revêt deux aspects : la collecte de l'épargne et le crédit promoteur. Depuis quelques années, il a été choisi comme l'option de financement du logement social à partir des ressources nationales, en particulier celles des ménages, collectées essentiellement sous forme d'épargne notamment par la BHS. Ainsi plus de 250 coopératives ont été agréées et parmi celles-ci, plus de la moitié ont fourni une épargne supérieure à sept milliards de francs CFA pour l'habitat. Cette épargne est placée à la BHS qui leur accorde la grande part des crédits à des taux de remboursement préférentiels. A travers ces prêts, plusieurs chefs de famille ont pu bénéficier de logements et de parcelles viabilisées, ce qui reste encore très faible par rapport à la demande exprimée.

    Cependant, l'intervention des coopératives d'habitat, qui a permis aux couches moyennes généralement salariées d'accéder au logement, s'est aujourd'hui essoufflée à cause des contraintes dans l'accès aux ressources foncières. Les ménages issus du secteur informel sont rarement inclus par les programmes des coopératives d'habitat. La politique de l'État en direction du logement urbain ne profite qu'à une portion infime des populations urbaines et exclut la quasi-totalité des travailleurs du secteur informel, majoritaires dans les villes sénégalaises. Ainsi, seuls 5,5 % des coopératives d'habitat au Sénégal relèvent du secteur

    50

    informel, représenté par les femmes en particulier. Le secteur public et le secteur privé formel en représentent respectivement 50 et 44,5 % 17

    L'accès difficile à la propriété foncière et immobilière légale oblige les ménages à faibles revenus à recourir à l'habitation dans les quartiers informels dépourvus d'infrastructures et de services sociaux de base. L'insécurité foncière qui caractérise ces quartiers empêche l'investissement sur le bâti qui est aussi confronté aux difficultés propres aux sites.

    2.3- La cherté des prix des matériaux de construction

    Les coopératives d'habitat ainsi que les particuliers qui souhaitent construire leur maison, subissent le contrecoup des prix très élevés des matériaux de construction. Cela induit nécessairement une répercussion sur le prix des loyers dans les aires urbaines, un recours plus important aux matériaux de récupération ou de moindre qualité dans les quartiers d'habitat précaire. Cela induit également une mise en friche de beaucoup de terrains par leur propriétaire lorsque les capacités financières ne permettent pas l'achat des matériaux de construction. Enfin dans le paysage urbain à Dakar les maisons à moitié achevées sont omniprésentes et celles-ci deviennent souvent habitées dès que les conditions minimales fonctionnelles sont réunies. L'enduit extérieur, la peinture et le carrelage attendront. On peut en tirer la conclusion selon laquelle le prix des matériaux de construction malgré la venue de deux autre producteurs de ciment au Sénégal (Cimenteries de Sahel et Dangote en plus de la SOCOCIM), reste élevé pour des personnes à revenus modestes. Raison pour laquelle, la politique de l'État pour promouvoir l'habitat social en faveur des classes défavorisées manque souvent de cohérence. La demande ne cesse d'augmenter, dans un contexte où il est de plus en plus difficile d'accéder à un logement.

    2.4- Les lenteurs dans la régularisation foncière

    Le secteur du logement urbain est aussi marqué par la présence et l'intervention d'une multitude d'acteurs institutionnels aux logiques d'opération différentes en plus de pratiques corruptives signalées. A travers les Ministères chargés de l'habitat, de la construction et de l'hydraulique, de l'urbanisme et de l'assainissement, de l'économie et des finances, ce ne sont pas moins de 12 directions centrales qui jouent des rôles clés dans les processus de production

    17 N HABITAT, profil du secteur du logement au Sénégal, 2012

    51

    et d'affectation du foncier et du logement. Cette fragmentation explique en grande partie les lenteurs (voir tableau 3), l'explosion des coûts de régularisation, le défaut d'application des lois et règlements, et l'existence des pratiques informelles. En effet, une opération de promotion immobilière initiée par une coopérative d'habitat peut prendre 5 ans pour être menée à terme.

    Tableau 3 : Exemple de décompte des lenteurs administratives dans la promotion immobilière18

    Actions

    Durée

    Identification du site

    1 mois

    Certificat d'urbanisme

    1 mois

    Autorisation de transaction

    1 mois

    Avant-projet architectural

    2 mois

    Permis de construction préalable

    2 mois

    Permis de construire

    6 mois

    Plan des réseaux de viabilisation

    2 mois

    Dossier d'exécution

    2 mois

    Plans de béton armé

    1 mois

    Appels d'offres

    2 mois

    Agrément du programme immobilier

    2 mois

    Visa des plans de réseau par les sociétés concessionnaires

    2 mois

    Passation des marchés

    1 mois

    Déclaration d'ouverture de chantier

    1mois

    Cumul avant travaux

    26 mois

    Durée des travaux

    14 mois

    Procès-verbal de réception

    3 mois

    Cadastre

    Parcellaire

    SONES

    Réseau d'adduction d'eau

    SENELEC

    Réseau d'électrification

    TP Cap vert

    Voirie

    ONAS

    Réseau d'assainissement

    Certificat de conformité urbanisme

    1 mois

    Autorisation de morcellement des parcelles

    2 mois

    Autorisation de transactions avec les acquéreurs

    6 mois

    Création des titres fonciers individuels

    6 mois

    Exonération décennale du foncier bâti

    2 mois

    Cumul après travaux

    20 mois

    18 Source: Fall, 2009

    52

    3- Analyse reflexive du stage

    Une expérience professionnelle dans une institution comme ONU HABITAT permet d'avoir une vision transversale des questions urbaines. En effet j'ai pu durant le stage aborder plusieurs thématiques au delà de la restructuration de l'habitat précaires. Il a été question de formuler un programme de développement territorial des pôles urbains des fleuves Sénégal et Gambie en partenariat avec l'OMVS (Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal). Il a été également question de suivre entre autres un programme d'amélioration et de promotion de l'éco-construction au Sénégal à travers une intégration des concepts de durabilité dans le code de la construction du Sénégal. Ces diverses thématiques montrent à quel point l'urbanisme est une question transversale et nécessite une vision politique préalable pour que les stratégies puissent être déclinées et les projets formulés. A ce propos, ONU HABITAT s'inscrit davantage dans l'appui technique aux institutions et projets nationaux que dans le simple financement de ces projets en tant que bailleur. Raison pour laquelle il est nécessaire que les partenaires soient réactifs pour leur part aux différents niveaux d'intervention. Réactivité qui n'est pas souvent au rendez-vous de même que la rigueur dans l'exécution de certaines activités.

    Cependant des difficultés liées aux conditions pratiques du stage sont à relever. De manière synthétique elles peuvent être résumées ainsi :

    - Manque d'outil de communication pratique et efficace (intranet, Webmail, téléphone fixe) : Les moyens de communication représentent un facteur décisif dans toute structure dans la mesure où ils facilitent la coordination des activités et par conséquent l'efficacité de l'action publique. Certains services ne disposant pas de téléphone fixes, les échanges se faisaient par téléphone mobile généralement.

    - Manque de réactivité des correspondants lors d'échanges de mails ;

    - Coupures intempestives d'électricité : cette question de l'énergie très sensible est en quelque sorte le défi permanent des régimes qui se succèdent au Sénégal. Les coupures d'électricité sont un facteur de frustration et de ras-le-bol social dans la mesure où elles handicapent sérieusement l'activité économique et elles jouent un rôle non négligeable dans le confort des ménages.

    - Coupure fréquentes de la connexion internet et wifi ;

    53

    - Questions de ponctualité lors des rendez-vous : c'est un défaut bien ancré dans les habitudes des uns et des autres au Sénégal. Les retards (des autorités généralement) dans le démarrage de certaines activités pèsent énormément sur leur efficacité.

    - Changements institutionnels (limogeage du directeur de l'urbanisme) qui fait traîner les projets en cours en partenariat avec la direction de l'urbanisme : sur ce dernier point, l'instabilité institutionnelle au niveau de l'administration centrale est à fustiger. En effet, il est fréquent que l'interlocuteur change suite à un réaménagement des postes et que la nouvelle équipe mette beaucoup de temps à comprendre et à intégrer les enjeux et processus déjà en cours. Même si le noyau administratif ne change pas, les chefs de services peuvent avoir des sensibilités et une implication différente de celles de leur prédécesseur.

    Le métier d'urbaniste est assez peu connu au Sénégal. Et cela s'explique pour plusieurs raisons. Premièrement il n'y a pas d'école d'urbanisme à Dakar et les seuls urbanistes encore au ministère de l'urbanisme (dont la plupart sont aujourd'hui en retraite) ont été formés en France à la fin des années 1980 avec des bourses du gouvernement sénégalais. Deuxièmement il y a très peu de cabinets d'urbanisme au Sénégal et ce sont les architectes et ingénieurs en génie civil qui font généralement le travail de l'urbaniste même si le résultat n'est pas souvent à la hauteur des attentes en termes d'approche systémique. Il ne fait nul doute que pour un urbaniste dans un pays en développement il y a du travail et un travail conséquent à faire pour améliorer ce qui peut l'être. La profession d'urbaniste évoque chez les gens que je côtoie, la personne qui pourra mettre de l'ordre dans l'anarchie qui règne dans l'occupation de la voie publique, l'irrégularité de la trame urbaine, l'occupation des trottoirs par les commerçants, l'absence d'espaces verts, la récurrence des inondations, la congestion à Dakar...

    Le constat d'une nécessaire planification de nos villes n'échappe à personne. Sachant que d'ici 15 ans les citadins représenteront 50% sur le continent africain, les défis pour les autorités locales en matière de planification, de réalisation d'infrastructures et de services urbains sont à prendre très au sérieux et surtout anticiper.

    54

    Conclusion

    Les spécialistes s'attachent aujourd'hui à déconstruire les idées reçues sur les quartiers précaire (souvent perçus comme dangereux, insalubres, squattés) et à lutter contre les injonctions visant leur éradication, solution non durable si aucune alternative n'est proposée19 L'inclusion des habitants dans la restructuration de leur quartier a montré des résultats significatifs en termes d'efficacité fonctionnelle. Elle permet d'éviter la déstructuration des liens sociaux, de renforcer leur implication dans la gestion des équipements publics et de les responsabiliser sur l'entretien et le bon usage des équipements collectifs. Par conséquent on est sûr de réaliser des habitats fonctionnels et répondant à leurs exigences et confort (cour familiale, enclos d'animaux domestiques, aire de jardinage...)

    Aujourd'hui le changement d'approche dans la perception des bidonvilles est le fruit d'efforts de conscientisation de la part des institutions internationales depuis Habitat I, mais aussi depuis 1991 avec l'érection de l'accès à un logement décent comme un droit humain fondamental par les Nations Unies.

    La tendance de forte urbanisation actuelle qui a lieu dans les villes en développement nécessite une approche différente et une évolution sur le plan institutionnel (décentralisation et autonomisation des collectivités locales), sur le plan environnemental (une approche durable dans l'action publique) et sur le plan social (le droit à l'information et la capacitation des populations locales). Les politiques d'ajustement structurel promus par les institutions de Breton Woods ont eu un fort impact dans l'intervention de l'Etat dans le secteur du logement considéré jadis comme un des secteurs sociaux pour lesquels celui ci doit se désengager pour l'assainissement des finances publiques et l'équilibre budgétaire. Cela a entrainé un abandon progressif du secteur et l'invention de solutions alternatives avec les coopératives d'habitat et la promotion immobilière privée. Celle-ci va davantage entrainer le développement de quartiers précaires.

    Arrêtons-nous un peu sur le terme de « bidonville », « quartier précaire » ou « habitat spontané ». La perception et les représentations que les habitants des quartiers bénéficiaires du PPAB à Dakar ont de leur quartier peuvent être souvent décalées par rapport aux définitions d'institutions internationales. En tant que dakarois, il m'était difficile de considérer les quartiers d'Arafat et de Grand Médine comme des bidonvilles car l'image du bidonville renvoyait pour moi aux ghettos sud-africains, à des slums indiens ou encore aux

    19

    55

    favelas « dangereux » du Brésil. Au fond si l'on s'arrête à l'exemple de ces trois pays l'on se rend compte que finalement les bidonvilles ne sont pas qu'une question de planification et de politique de l'habitat. L'existence de bidonville évoque des questions plus fondamentales d'intégration sociale. Cela se justifie d'autant plus que l'Afrique du Sud avait un régime d'apartheid profondément discriminatoire et l'Inde est marquée par une stratification sociale réifiée et très rigide.

    Aujourd'hui, la volonté clairement affichée de l'Etat du Sénégal est de passer d'un urbanisme réglementaire à un urbanisme de projet. Le PDU 2035 en cours d'élaboration traduit cette vision qui consiste à promouvoir l'urbanisation dans des zones qui jusque là étaient occupées par des zones naturelles. Au-delà de la volonté de créer un équilibre territorial face à une hyperpolarisation des activités économiques et politiques à Dakar, le développement du pôle urbain de Diamniadio en cours permettra premièrement de faire baisser la tension immobilière et foncière qui existe à Dakar du fait de la rareté des terrains disponibles. Dans un second temps de grandes infrastructures comme l'aéroport de Diass et l'autoroute à péage permettront une valorisation foncière dans les zones rurales où elles seront réalisées. Un urbanisme plus volontariste qui nécessite davantage d'investissements et le partenariat public-privé est un élément nécessaire à mettre en place. L'urbanisme réglementaire se limitait davantage à des prescriptions souvent improductives et une volonté de sanctuariser le foncier à travers les règlements. Aujourd'hui le réglementaire est toujours pris en considération mais les nouveaux projets urbains cristallisent davantage les attentions et les ressources. Aujourd'hui, les villes secondaires sont mises au devant de la scène car elles feront l'objet des grands points qui seront discutés durant Habitat III. La croissance urbaine en Afrique subsaharienne se fera pour l'essentiel dans les villes secondaires qui ne cesseront de se multiplier et de s'étendre. Par conséquent il est nécessaire que les décideurs donnent à ces villes les moyens de se développer en évitant une explosion urbaine comme c'est le cas dans les métropoles actuellement. Il faudrait également une planification qui assure l'équilibre territorial sur le plan économique. Ces pôles urbains destinés à être des villes secondaires, sont aujourd'hui une réponse face aux problèmes que connaissent les métropoles des villes du Sud qui ont longtemps monopolisé l'attention et les moyens de ceux qui interviennent sur les questions urbaines.

    56

    Bibliographie

    Ouvrages

    - Lefebvre Henri, 1968, le droit à la ville, Paris, éditions anthropos

    - Paulais Thierry, 2012, financer les villes d'Afrique, l'enjeu de l'investissement local, Paris, AFD, banque mondiale

    - Sy Demba, 2014, 2ème revue corrigée et argumentée, Droit administratif, Dakar, éditions l'harmattan

    - Tall Mansour, 1994, Les investissements immobiliers à Dakar des émigrants sénégalais, Revue européenne des migrations internationales

    Revues

    - De Vancouver à Quito, quarante ans de discours sur la ville, A. Choplin, bulletin des professionnels de ADP villes en développement, n°100-101

    - De la lutte contre l'éviction au droit à la ville, L. Zarate, bulletin des professionnels de ADP villes en développement, n°100-101

    - Intégrer les quartiers précaires aux villes de demain, M.Chaboche, A. Dukhan, I. Salenson, revue questions de développement, AFD, Nov. 2014

    Rapports

    - Projet du Plan Directeur d'Urbanisme de Dakar et ses environs horizon 2035, rapport

    intérimaire, RECS international, Juillet 2015

    - Réduire de moitié le nombre d'habitants des bidonvilles d'ici 2020, ONU HABITAT, ACP

    - L'impact de la restructuration et de la régularisation foncière de l'habitat spontané à Dakar, le

    cas du quartier de Dalifort, Rasmus Precht, Mémoire de maîtrise de Géographie, 2001

    - Profil du secteur du logement au Sénégal, ONU HABITAT, 2012

    - L'état des villes africaines, réinventer la transition urbaine, ONU HABITAT, 2014

    - Audit urbain de la ville de Diamniadio, Agence de Développement Municipal (ADM),

    Septembre 2003

    - Le Plan Sénégal Emergeant, Ministère de l'économie et des finances, Février 2014

    Ressources numériques

    - monppab.org

    - Xibar.net

    - pole-urbain-de-diamniadio.com/

    57

    Annexes

    Annexe 1 : Chronogramme

    Annexe 2 : Budget de mise en oeuvre






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry