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L'erreur dans les réalisations écrites d'élèves marocains. état des lieux de leurs performances écrites, interrogations sur son statut et sur les modalités de sa gestion dans les documents officiels et dans les pratiques d'enseignement.


par Sarah TAMIMI
Université du Maine - Master 2 Didactique des Langues et l’enseignement du FLE  2019
  

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251501568Chapitre 2 :L'analyse contrastive : quels apports à l'enseignement apprentissage du français langue étrangère ?

Dans le chapitre précédent, nous avons décrit les différentes conceptions de l'erreur, ses causes possibles et ses modalités de traitement dans les différentes formes d'enseignement toutes disciplines confondues, ainsi que l'évolution de son statut dans les différentes méthodologies de l'enseignement des langues étrangères, en particulier du FLE, suivant pour cela un critère chronologique.

Nous n'avons pas abordé jusque-là la question des rapports entre la langue source (ou maternelle) L1 et la langue cible (ou étrangère) L2 dans l'apprentissage de L2, et les problèmes qui pourraient se poser ou être engendrés dans cet apprentissage. Or dès qu'un sujet se lance dans l'apprentissage d'une nouvelle langue L2, surtout lorsque celle-ci diffère substantiellement de sa langue première L1, il fera inévitablement des liens avec celle qu'il maitrise le mieux, en l'occurrence L1, non seulement au niveau de la prononciation, mais aussi dans la structure, dans les modes de communication, dans les représentations culturelles qui y sont liées, etc. Ces liens à la langue native et auxquels le sujet apprenant une langue étrangère a recours ou s'y réfèrent fatalement, s'appellent communément des interférences linguistiques. Pendant les dernières décennies, la problématique des interférences linguistiques est devenue l'une des préoccupations des spécialistes du domaine de l'enseignement/apprentissage des langues étrangères. Ce regain d'intérêt à cette problématique et les travaux de recherche menés dans ce sens ont-ils fini par proposer des solutions « consistantes » aux problèmes rencontrés par l'élève dans son apprentissage d'une langue étrangère ? Apporter des éléments de réponse à cette question est l'objet de ce chapitre.

2.1. Les origines et les visées de l'analyse contrastive

L'analyse contrastive ou différentielle, s'intéresse à la comparaison de la langue source L1 et de la langue cible L2 à des fins pédagogiques, c'est à dire pour des objectifs d'enseignement de la langue étrangère L2. De manière plus précise, le but visé de la comparaison des langues est de faire ressortir les ressemblances et les contrastes pour enseigner les langues étrangères. Cette approche a été développée aux États-Unis et au Canada pendant la période qui allait entre 1945 et 1960. Antérieurement à cela, les comparaisons entre L1 et L2 étaient limités aux aspects linguistiques et constituaient l'objet même de l'enseignement : la traduction, la grammaire comparée, etc.

Selon R. Porquier et B. Py55(*), c'est l'étude du rôle de la langue première dans l'appropriation d'une langue seconde qui a donné naissance à l'analyse contrastive. Elle consiste à comparer la langue première de l'apprenant et la langue cible afin de dégager les différences et les ressemblances pour proposer des exercices structuraux permettant l'éradication de ses faux reflexes. On supposait alors que la langue première L1 de l'apprenant serait la cause principale de ses erreurs.Pourtant, d'après Porquier et Py, la langue première ne constitue pas la seule cause des erreurs.56(*) Elle pourrait même jouer un rôle positif dans l'apprentissage d'une langue étrangère.Rappelons que la périoded'apparition de l'approche contrastive a été marquée par la méthodologie audio-orale, dont l'objectif principal était l'acquisition de L2 comme un système autonome et indépendant de L1, c'est à dire par une vision béhavioriste de l'apprentissage et structuraliste au niveau linguistique. Cette méthodologie considérait l'erreur comme une faute qu'on devait éradiquer à tout prix.

Les premiers travaux d'analyse contrastive n'ont concerné dans un premier temps que les langues apparentées génétiquement et faisant partie de la famille indo-européenne comme l'anglais et le français. Ces travaux visaient à exploiter en classes de langues étrangères les points communs et divergents entre les langues source et cible et à en tenir compte dans l'élaboration des contenus d'apprentissage de la langue étrangère cible. Aux États-Unis par exemple, pour faire apprendre le français à des anglophones, les expériences menées ont porté essentiellement sur l'élaboration d'outils pédagogiques fondée sur des rapprochements lexicaux et syntaxiques. Il en est de même au Canada où les études ont concerné l'apprentissage de l'anglais à un public francophone. Cela peut se comprendre pour ces deux langues car, grâce à l'histoire commune de l'Angleterre et de la France et aux Romains, l'anglais possède énormément des mots qui ressemblent au français (on estime qu'il y a à peu pré 60% de mots d'origine française en anglais).57(*)

Mais de par son principe et son objet d'étude, l'approche contrastive peut s'étendre à des langues de familles distinctes, comme le français et l'arabe, puisqu'il existe toujours une proximité typologique et des correspondances structurelles entre n'importe quelle paire de langues. La flexion verbale, par exemple, existe aussi bien en français qu'en arabe. De même, si l'ordre des constituants de la phrase dans la langue française est en général caractérisé par la structure syntaxique sujet-verbe-objet, celui en langue arabe est généralement caractérisé par la structure verbe-sujet-objet. Ainsi, bien que les langues soient différentes, la théorie du langage est unique ; et c'est là l'un des postulats sur lequel repose cette approche. L'analyse contrastive suppose « l'élaboration d'une sorte de grille universelle(en phonologie, en morphosyntaxe, etc.) pouvant servir de référence pour comparer, par exemple, deux phonologies ou deux morphosyntaxes différentes. » (J-P Robert, 2008, p 50).

Outre ce postulat, d'autres hypothèses sont véhiculées plus ou moins explicitement par l'analyse contrastive. Parmi celles-ci, il y a58(*) :

- Une hypothèse psycholinguistique selon laquelle l'apprentissage d'une langue étrangère L2 ne pose pas les mêmes problèmes que l'apprentissage de la langue maternelle L1 : les recherches contrastives ont été justement entreprises pour répondre aux besoins d'une pédagogie spécifique et différenciée des langues étrangères.

- Une hypothèse psychopédagogiquedite hypothèse forte de la linguistique contrastive. Cette hypothèse avancée par Ladodès 1957 stipule que les comparaisons des deux langues L1 et L2 permettent de prédire tous les problèmes d'apprentissage de la langue étrangère L2, de décrire et d'expliquer les erreurs dues à l'influence de L1, et d'identifier les structures qui ne créeraient pas des difficultés. En fait, bien avant Lado, Weinreich postulait déjà en 1953 que les difficultés d'apprentissage d'une langue cible sont équivalentes aux différences existantes entre cette langue cible et la langue source de l'apprenant, mais c'est l'école de Michigan (Fries et Lado) qui a popularisé cette hypothèse.59(*)

Cette dernière hypothèse a déclenché de multiples travaux sur les comparaisons linguistiques des langues afin de prévoir les erreurs dues à l'influence de la langue source. Les indications apportées par ces comparaisons étaient destinées aux enseignants et aux auteurs de manuels plutôt qu'aux apprenants. Une fois connues les différences entre L1 et L2, il suffirait de concevoir un enseignement fondé sur le renforcement afin d'éviter que les erreurs prévues ne s'installent. Ainsi, « la linguistique contrastive s'est trouvée liée à une pédagogie de la réussite quelque peu béhavioriste, qui considère la faute comme une mauvaise herbe à extirper ; le meilleur parcours pédagogique à proposer à l'élève est en ce cas établi par une progression sans failles, fortement contraignante, où l'on cherche à éviter le contact avec l'erreur. » (F Debyser, 1970, p 33).

Il n'est donc pas étonnant que cette approche ait subi à l'époque des critiques, notamment des adeptes des théories innéistes chomskyennes du langage et de l'apprentissage, ainsi que d'une réflexion psycholinguistique et psychopédagogique déplaçant l'attention sur l'apprenant plutôt que sur les méthodes. D'autres critiques ont été adressées à l'hypothèse forte de « prévisibilité des erreurs » de Lado, bien que ce dernier y ait émis des réserves, à savoir que celle-ci devrait être vérifiée a postériori et que l'interférence n'était pas l'unique source d'erreurs. Cette hypothèse contenait en germe les notions d'interférence et de transfert. Les disparités ou les différences entre la langue source L1 et la langue cible L2 donnent lieu à des transferts négatifs ou interférences, alors que les ressemblances ou les similarités donnent lieu à des facilitations ou des transferts positifs.

* 55Porquier & Py, 2004, p 25

* 56 C'est pour nous quelque chose d'évident, puisque les natifs eux-mêmes commettent des erreurs dans leur propre langue !

* 57 C'est le phénomène d'emprunt dont nous en discuterons plus loin. Le phénomène d'emprunt inverse, c'est à dire de l'anglais vers le français est appelé anglicisme (weekend, football, ketchup, cowboy, ...)

* 58 Francis Debyser, Apprentissage du français langue étrangère, 1970, pp 32-33

* 59 Gilles Bibeau, 1988, p 7.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote