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Les créances en souffrance des etablissements bancaires


par Michaella Esther Ndjang Mvotto
Université de Dschang - Master II 2019
  

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AVERTISSEMENT

i

« L'université de Dschang n'entend donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans le présent mémoire ; celles-ci doivent être considérées comme étant propres à son auteur qui en assure l'entier responsabilité. »

DÉDICACE

ii

À mes chers parents, Brigitte et Magloire NDJANG, pour leur sacrifice, leurs encouragements, leur accompagnement et leurs prières tout au long de mes études.

REMERCIEMENTS

iii

Je tiens à exprimer ma profonde gratitude et ma reconnaissance :

- À Dieu, pour m'avoir comblée de ses grâces jour après jour ;

- À Monsieur NJEUFACK TEMGWA René, Professeur agrégé à la faculté de droit, qui en sa qualité de directeur m'a accompagnée tout le long de ce travail et n'a cessé de veiller à sa progression effective ;

- À la Commercial Bank Cameroon, particulièrement à Monsieur NGUEKAM Jean de Dieu du service de recouvrement, pour ses renseignements qui ont été précieux dans l'avancée de ce travail ;

- À Messieurs LADJEU Arnold et TOMI TOMI Clément, doctorants en droit privé à la faculté de sciences juridiques et politique à l'université de Dschang, pour leur disponibilité et leur précieuse aide dans la réalisation de ce travail ;

- À Madame MAGNE Linda, doctorante en droit privé à la faculté de sciences juridiques et politique à l'université de Dschang, pour ses précieux conseils et sa sollicitude à mon endroit tout au long de ce travail ;

- À mes chères soeurs, NDJANG NKUICHOU Brigitte Tabita, NDJANG NANGA Marie-Madeleine, NDJANG NZOUATOU Anne, PAMEN Laurette et BOLDRINI Solange pour leur amour quotidien et leurs encouragements ;

- À mes chers frères, NDJANG Daniel et NDJANG FONGA Jérémie, pour la confiance qu'ils mettent en ma personne qui est pour moi une raison de me surpasser ;

- À mes amis et promotionnaires, en particulier TEDONGMEZA TCHIEKUO Emmanuel, MELATIWA Evahill, MEMO Claude Yannick, ATCHICK NGANSO Benie, MEKEME KENNE Briceno, NGANGUEM GANGOUA Arnold, NGOUNOU TCHAKOUA Brigitte Naelle, NANA BATAKE Régis Lionel, ANTOINE TAIKO Aba, KANA Abé Fabrice, EBELLE ELONG Noe, NGOUPOU Raissa Ines, MBELLA EPANDONG Franklin, GAMAINI TCHAPPI Kelianne BEKU KENGNE Natacha, pour la bonne humeur qu'ils rependent autour de moi quotidiennement.

RESUMÉ

iv

Le crédit est la principale activité des banques, si son octroi est toujours soumis à la volonté du banquier, il n'en est pas ainsi de son remboursement. Lorsque le remboursement d'un crédit bancaire ne s'effectue pas conformément aux dispositions contractuelles, la créance née de ce crédit devient une créance en souffrance. Elles sont différentes des autres types de créances bancaires, et ont un régime adapté à leurs spécificités.

Les créances en souffrance sont classées minutieusement et soumises à des règles pour protéger le banquier contre leur perte éventuelle. Cependant le banquier doit procéder à leur recouvrement. Il dispose de plusieurs moyens pour cela, le recouvrement amiable avec la restructuration de la créance, les modes alternatifs de réalisation des suretés, les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d'exécution. Mais de nombreuses lacunes tant institutionnelles que pratiques entachent le recouvrement des créances en souffrance et il est récurent qu'elles se transforment en pertes. Le banquier est alors obligé de les reclasser en créances irrécouvrables, ensuite en perte. La perte des créances en souffrance a un impact négatif sur la banque. Elle crée un manque à gagner pour la banque, et peut être source de sanctions pour cette dernière allant des mesures d'assainissement à la liquidation de l'établissement de crédit. À une plus grande échelle, la perte des créances en souffrance peut fragiliser l'économie de tout un pays. Au regard du nombre inquiétant des créances en souffrance au Cameroun, le législateur camerounais a institué des sanctions pour les débiteurs insolvables de mauvaise foi. Cet effort supplémentaire dans l'encadrement des créances en souffrance, révèle le souhait du législateur Camerounais d'en débarrasser les banques. Malheureusement de nombreux facteurs tels que la teneur de certaines règles procédurales et la difficile exécution des décisions de justice au Cameroun bloquent La réalisation de ce voeu.

ABSTRACT

v

Loan is the main activity of banks. If its grand is always submitted to the will of bankers, it is not the case for its reimbursement. When the reimbursement of a bank loan is not done according to rules and regulations. Debt that comes out of that loan becomes outstanding receivables. They are different from others bank claims, that is why they have a specific procedure.

Outstanding receivables are carefully classified and are submitted to rules which protect bankers from potential loss. Nevertheless, the banker most enforce their recovery. He has many means to do it: the amicable dept recovery procedure with the restructuring of dept, the alternative modes performance of securities, simplify collection procedure and execution means. But many institutional and practical weaknesses taint unpaid depts recovery and it is recurrent that it turns into losses. The banker is therefore obliged to classify them to unrecoverable dept then into loss. The loss of outstanding receivables has a negative effect on banks. It produces a shortfall in the bank and could be a reason for sanction, starting from reorganization measures to liquidation of loan establishment. To a larger scale, loss of outstanding receivables can weaken the economy of a whole country. Looking at their increasing number in Cameroon, the Cameroonian parliament established sanctions for unsolved debtor of bad faith. This added effort to handle outstanding receivables shows the willingness of the Cameroonian parliament to help banks to get rid of it. Unfortunately some rules of procedure and the difficult enforcement of Cameroonian judgments are obstacles to the accomplishment of this wish.

PRINCIPALES ABBREVIATIONS

vi

CEMAC : communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale

BEAC : Banque des États de l'Afrique centrale

COBAC : Commission bancaire de l'Afrique centrale

UEMOA : Union économique et monétaire Ouest Africaine

OCDE : Organisation de coopération et de développement économique

AUS : Acte uniforme portant organisation des suretés

AUPCAP : Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du

passif

AUPSRVE : Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement

et voies d'exécution

AFF : Affaire

OP CIT : Opere citato (ouvrage précité)

OBS : Observations

P. : page

pp : de page... à page ...

DIR : direction

SOMMAIRE

vii

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIERE PARTIE : DES CRÉANCES NON PERDUES 10

Chapitre 1 : Des créances soumises à des r?gles particuli?res 12

Section 1 : Les crit?res des créances en souffrance 12

Section 2 : Le provisionnement des créances en souffrance 18

Chapitre 2 : L'existence pour le banquier des moyens de préservation de la creance 26

Section 1 : Les garanties comme protection du banquier contre les créances en

souffrance ..26

Section 2 : Le réamenagement consensuel de la créance 32

PARTIE II : DES CRÉANCES GREVÉES DE LOURDES CONTRAINTES DE

RECOUVREMENT 40
Chapitre1: Les complications de la procédure de recouvrement des créances en

souffrance ..42

Section 1 : Le recouvrement des créances en souffrance 42

Section 2 : Les difficultés de recouvrement des créances en souffrance 51

Chapitre 2 : L'incertitude du recouvrement des créances en souffrance 59

Section 1 : Le reclassement des créances 59

Section 2 : Les conséquences de la violation de la réglementation en mati?re de créances en

souffrance 64

CONCLUSION GÉNÉRALE 72

INTRODUCTION GÉNÉRALE

1

2

« Le volume des créances en souffrance, c'est-à-dire des crédits accordés et non remboursés s'accroit dangereusement. Il est même à un niveau incompatible avec les règles de bonne gestion dans le secteur. Cette situation est due à la mauvaise foi du débiteur », dixit Louis-Paul MOTAZE, ministre des finances de la république du Cameroun1. Les chiffres illustrent à souhait ces propos du ministre. En 2016 déjà, avec 489 milliard de FCFA de créances en souffrance dans les banques commerciales et 106 milliard dans les microfinances, le Cameroun a compté à lui tout seul 79% des créances douteuses de la zone CEMAC2. Et avec un taux de créances en souffrance de 19,6% des créances totales en Mai 2019, la situation ne s'améliore pas3.

Cette situation menace l'équilibre du système bancaire camerounais et ne laisse pas indifférentes les autorités. C'est ainsi que le 20 février 2020 le premier président de la cour suprême camerounaise, Daniel MEKOBE SONE plaide auprès des magistrats pour une plus grande implication dans le recouvrement des créances en souffrance qui selon lui pèsent environ 500 milliards de Francs CFA en décembre 20194.

Lorsque, dans ce contexte, survient la crise sanitaire liée à la Covid-19 qui s'est très rapidement transformée en crise financière, il y'a lieu de se préoccuper sur l'état des créances bancaires. Cette préoccupation est d'autant plus grande que des pans entiers de l'économie ont été touchés, affectant par le même coup la capacité de remboursement des débiteurs.

Les créances en souffrance matérialisent la réalisation d'un des multiples risques qui peuplent le paysage bancaire : le risque de crédit. C'est le risque pour un établissement de crédit que les débiteurs n'honorent pas totalement leurs engagements. Autrement dit, il est le risque de perte consécutive au défaut d'un emprunteur d'honorer un engagement de remboursement des dettes (prêts bancaires) qu'il a contractées5 ; le risque de crédit se décline en deux variantes : le risque de non remboursement et le risque d'immobilisation6.

Le risque de non remboursement est le risque le plus redouté par les banquiers. Il apparait quand le client en raison d'une dégradation de sa situation financière ou par mauvaise foi, n'est plus en mesure ou refuse tout simplement de rembourser les prêts qui lui ont étés

1 BOUNOUNG (Y.), « Fraudes dans le paiement des crédits bancaires : le remboursement sera forcé », cameroon tribune, 09 décembre 2019, [en ligne], https://cameroon-tribune.cm consulté le 22 juillet 2020.

2 Cameroun24.net « le taux des créances bancaires en souffrance gonflé de près de 20% à cause de la suspension des activités de la SONARA.», https://cameroun24.net consulté le premier Avril 2020.

3 Idem.

4 ZRA (D.), « rentrée judiciaire à la cour suprême : protéger les techniques de paiement », 20 Février 2020, [en ligne] www.crtv.com consulté le 11 Aout 2020.

5 KHAROUBI (C.), THOMAS (P.), analyse du risque de crédit : banques et marchés, la revue banque, 2016 p.10.

6 MAGADJI (M.), la gestion du risque de crédit par la méthode RAROC : application à Eco-Bank Cameroun, Université catholique d'Afrique Centrale mémoire de Master II en comptabilité finances 2010, p19.

3

octroyés. Le risque d'immobilisation est un risque proprement bancaire, un simple retard dans le remboursement d'une créance ou le décalage entre les ressources et les emplois peut être préjudiciable à la banque. Si ce retard ou ce décalage venait à se généraliser à cause de la mauvaise gestion de la distribution des crédits, il pourrait résulter une forte immobilisation de capitaux. Celle-ci se traduirait par un grave déséquilibre de la trésorerie et mettrait la banque en état de cessation de paiements7. C'est pour prévenir cela que nous menons une étude sur les créances en souffrance.

L'étude des créances en souffrance des établissements bancaires, nécessite une parfaite maitrise des concepts contenus dans le thème, car comme le souligne Marcel MERLE : « sans un minimum d'outillage conceptuel, le chercheur se trouve en face d'une masse indistincte de faits dont il est hors d'état de se servir »8. Au préalable, il convient de préciser que l'activité bancaire dans la communauté monétaire et économique de l'Afrique centrale9 est contrôlée et réglementée par la commission bancaire de l'Afrique centrale10 créé le 16 octobre 1990.

Dans son sens commun, une créance est le droit de celui qui peut exiger la prestation de la part du débiteur ou encore le titre qui établit ce droit11. Le lexique des termes juridiques12 va un peu plus loin lorsqu'il définit la créance comme le droit de réclamer une somme d'argent ou la condition principale de saisie. Le règlement COBAC R2018/01 du 16 Janvier 2018 relatif à la classification, au provisionnement et la comptabilisation des créances des établissements de crédit, définit à son tour les créances comme l'ensemble des engagements au bilan et hors bilan détenus par un établissement de crédit sur une contrepartie (personne physique ou morale). Elle peut être sous plusieurs formes. Entre autres de crédits par décaissement ou avances en compte, quels qu'en soient la nature, la forme et le terme. Les engagements par signature donnés de manière irrévocable (tels que cautions, avals, acceptations, engagements de financement irrévocables, etc.) en faveur de la contrepartie. Des titres de créance émis par la contrepartie et détenus par l'établissement. Et enfin sous forme de crédit-bail mobilier et immobilier13.

Est considérée comme contrepartie, toute personne physique ou morale bénéficiaire de crédits par décaissements ou d'engagements par signature de la part d'un établissement de crédit

7 MAGADJI (M.), op.cit. p.20.

8 MERLE (M.), sociologie des relations internationales, Dalloz 1982, p.114.

9 En abrégé CEMAC.

10 En abrégé COBAC.

11 LAROUSSE dictionnaire 2005

12 GUINCHARD (S.), lexique des termes juridiques, éditions Dalloz 2017-2018.

13 Article 3 Alinéa 1 du Règlement COBAC R-2018/01 relatif à la classification à la comptabilisation et au provisionnement.

4

ou émettrice de titres de créances détenus par un tel établissement.14.Dans le cadre de cette étude, nous allons nous en tenir à la définition du règlement CEMAC.

Il existe plusieurs classification des créances, elles peuvent être en fonction de l'échéance du terme, on distingue alors les créances à court, moyen et long terme15. Elles peuvent également être en fonction des difficultés de recouvrement il s'agit dans ce cas des créances saines, sensibles, en souffrance et irrécouvrables.

Le règlement COBAC 2018/01 n'a pas défini les créances en souffrance, il s'est contenté d'énumérer leurs différentes catégories. Dans son acception commune, le mot souffrance désigne un état prolongé de douleur physique ou morale16. Pour le lexique juridique, la souffrance est un état d'attente dans lequel se trouve un objet17 la locution « En souffrance » qualifie les affaires qui souffrent de retard18, ou celles qui sont en suspens, en attente19.Unie au terme créance, les créances en souffrance expriment l'état d'un droit de recouvrement torturé dans son exercice ou en suspens. Le règlement suscité fait état de 3 types de créances en souffrance, les « créances immobilisées », les « créances impayées » et les « créances douteuses »20.

Les créances immobilisées sont les créances directes sur l'Etat ou garanties par ce dernier, échues depuis plus de 90 jours dont le remboursement final sans être compromis ne peut être effectué immédiatement par l'Etat ou le débiteur garanti .Ou un compte courant ou ordinaire débiteur de l'Etat ou garanti par celui-ci, où, bien que le recouvrement du solde ne soit pas compromis, on n'observe pas de mouvements créditeurs significatifs depuis plus de 90 jours21.

La nature des créances immobilisées rend leur recouvrement assez particulier, l'immunité d'exécution dont bénéficie l'État rend malaisé à son égard toute mesure d'exécution forcée selon l'alinéa 1 de l'article 30 de L'acte uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et aux voies d'exécution 22. Le législateur OHADA pour contourner cette difficulté a institué la compensation comme mode d'extinction des créances envers les personnes morales de droit public au 2e alinéa du même article.

14 Article 3 Alinéa 2 règlement COBAC op.cit.

15 Les créances à court terme sont exigibles au bout de 2ans, celles à moyen terme dans l'intervalle de 2 à 7ans et celle à long terme à plus de 7 ans.

16 LAROUSSE Dictionnaire, 2005.

17 Lexique juridique de juritravail, https://www.juritravail.com.

18 Dictionnaire Notre famile [en ligne], www.notrefamille.com .

19 Reverso Dictionnaire [en ligne], www.mobiledictinary.reverso.net .

20 Articles 6, 7, 8, 9, ibid.

21 Article 7, ibid.

22 En abrégé AUPSRVE, Cet article dispose en son alinéa 1er que « l'exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution ».

5

Les créances impayées sont les sommes non payées à l'échéance contractuelle pour une période inférieure ou égale à 90 jours pour les crédits non immobiliers et 180 jours pour les crédits immobiliers, les dépassements par rapport aux limites de crédits autorisées dans les comptes courants non régularisés dans un délai inférieur ou égal à 90 jours , les intérêts et/ou principal des titres de créances échus et impayés pendant une durée inférieure ou égale à 90 jours23 .

Les créances douteuses sont des créances de toute nature même assorties de garanties, qui présentent un risque de non-recouvrement total ou partiel24.

Ces dernières créances sont des créances sur des clients probablement insolvables. Elles peuvent avoir maintes causes, telles que la mauvaise constitution de garantie par le banquier, les difficultés ultérieures rencontrées par le débiteur ; comme la perte d'emploi pour les particuliers ou la faillite pour les entreprises. Le caractère hétéroclite de leurs causes complexifie le régime du traitement des créances douteuses. Le banquier se trouve dans l'obligation d'aménager des solutions au cas par cas. Selon la nature des difficultés rencontrées, les parties peuvent faire recours à leur guise à divers mécanismes de recouvrement à l'amiable25 avec l'adoption d'un nouveau plan d'amortissement. Il existe des cas où le banquier peut faire recours à la constitution d'une hypothèque forcée judiciaire26 pour garantir sa créance. Le législateur OHADA a également prévu la saisie conservatoire au bénéfice des créanciers dont les débiteurs font face à des circonstances de nature à menacer le recouvrement de la créance27. Lorsque les difficultés du débiteur sont avérées, il peut être soumis à une procédure collective d'apurement du passif28, le banquier fera dès lors partie de la masse des créanciers dont le régime est prévu par l'acte uniforme des procédures collectives d'apurement du passif. Les créances douteuses font également l'objet d'un traitement comptable adapté à leur situation.

Une grande partie des créances en souffrance se retrouvent dans les établissements bancaires. Les établissements bancaires sont une catégorie d'établissement de crédit, les établissement de crédit sont définis par l'article premier du règlement R- 2009/02 du 1 er avril

23 Article 8 règlement COBAC 2018/01 op.cit.

24 Article 8 règlement COBAC 2018/01 op.cit.

25 On entend par là le recours à des concessions réciproques afin de permettre au client de rembourser son crédit en tenant compte des difficultés auxquelles il fait face.

26 A cet effet l'article 213 de l'acte uniforme portant organisation des suretés dispose : « pour sureté de sa créance, en dehors des cas prévus par les articles 210 à 212 du présent acte uniforme, le créancier peut être autorisé à prendre inscription provisoire d'hypothèque sur les immeubles de son débiteur en vertu d'une décision de la juridiction compétente au domicile du débiteur ou du ressort dans lequel sont situés les immeubles à saisir ».

27 Articles 54 à 63 de l'AUPSRVE.

28 Le législateur OHADA a réglementé les procédures collectives par l'acte uniforme du 10 septembre 2015 portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif en abrégé AUPCAP.

6

2009 comme des organismes qui effectuent à titre habituel des opérations de banques qui comportent les établissements bancaires et les établissements financiers. Le règlement COBAC suscité ne donne pas de définition fixe de l'établissement bancaire, aussi on l'assimile communément à la banque. Le dictionnaire Larousse définit la banque comme un Établissement financier qui, recevant des fonds du public, les emploie pour effectuer des opérations de crédit et des opérations financières, et est chargé de l'offre et de la gestion des moyens de paiement. Dans le même sens, le lexique des termes juridiques regroupe sous le vocable de banque tout établissement de crédit habilité à recevoir de façon générale des fonds à vue ou à moins de deux Ans de terme, et effectuer toutes les opérations de Banque. Ces définitions bien que correctes ne distinguent pas assez les établissements bancaires des établissements proches.

C'est pourquoi dans le cadre de ce travail nous avons adopté la définition donnée par le Professeur Rachel KALIEU. Elle désigne l'établissement bancaire comme l'établissement de crédit de Droit commun. Qui comprend deux sous-catégories : la banque universelle et les banques spécialisées29, et qui doit avoir un capital social minimum fixé à 10.000.000.000 FCFA30.

La banque universelle est, conformément à l'article 9 du Règlement COBAC R-2009/02, un établissement bancaire habilité d'une façon générale à recevoir tout fonds du public, à effectuer toutes opérations de banque sans restriction et toutes opérations connexes ainsi que les opérations non bancaires. Plus précisément, elle a pour vocation de recevoir du public des dépôts de fonds à vue et à terme et d'effectuer les opérations de crédit. Il n'y a donc pas en principe de limitation dans ses activités .L'une des particularités de la banque universelle tient aussi à la limitation de la possibilité de prendre des participations dans les sociétés. Toutefois, cette limitation ne s'applique pas aux participations prises dans d'autres banques et établissements financiers ou dans les sociétés nécessaires à son exploitation et chargées de la gestion soit de son patrimoine immobilier soit des services d'étude relevant de la profession bancaire.

Les banques spécialisées ont une mission plus précise. Il ressort l'article 10 du Règlement suscité que ce sont des établissements bancaires, dont l'activité est nécessairement

29 L'article 8 du règlement R-2009/02 portant fixation des catégories des établissements de crédit dispose à cet effet que « les établissements de crédits sont agrées en qualité de banques universelle, banque spécialisée, établissements financiers ou société financière » ces quatre catégories pouvant être regroupées en deux groupes, les établissements bancaires d'une part et les établissements financiers d'autre part.

30 KALIEU ELONGO (Y.R), « la classification des établissements de crédit dans la CEMAC » 2016,[en ligne] https://kalieu-elongo.com , consulté le le 22 janvier 2020, p3.

7

limitée soit par rapport à certaines opérations déterminées (crédit à long terme, prises de participation), soit par rapport à une clientèle ou un secteur d'activité déterminé (crédit agricole, crédit au commerce extérieur, crédit aux PME, etc.). Du fait de cette limitation, elles peuvent bénéficier d'un statut spécial. Elles sont habilitées d'une façon générale à recevoir tout fonds du public mais se distinguent par le caractère spécifique ou restrictif de leur champ d'activité. Elles réalisent les opérations de banques dans la limite de la décision d'agrément qui les concernent ou des dispositions statutaires, législatives et réglementaires qui leur sont propres dans le respect toutefois des prescriptions communes de la réglementation bancaire.

De manière brève, les établissements bancaires sont une catégorie d'établissement de crédit ayant vocation de recevoir des dépôts de fonds à vue et à terme et d'effectuer des opérations de crédit, ayant un capital d'au moins 10.000.000.000 de FCFA. Ils sont Différents des établissements financiers31 qui ne peuvent recevoir des fonds du public, et disposent d'un capital social minimum de 2.000.000.000 FCFA.

Il aurait été infructueux de mener une étude sur des concepts dont on ignore la signification ; aussi, après avoir compris les différents termes autour desquels est axée la recherche, il convient d'en déterminer l'intérêt qui est en réalité la raison d'être de toute recherche scientifique. La présente recherche est d'une importance capitale, les créances en souffrance pullulent dans la sous-région CEMAC en général, et au Cameroun en particulier. Leur croissance est une inquiétude constante, et les éliminer est au coeur des préoccupations actuelles des autorités nationales. Ceci en raison du rôle important que jouent les banques dans la santé économique du pays. Cela explique pourquoi au-delà des efforts de régulation menés par le législateur communautaire, le législateur camerounais mène une politique d'incitation au recouvrement. Que ce soit du point de vue fiscal32 ou répressif33 un accent particulier est porté sur la question dans le pays. D'où l'attention que nous portons aux créances en souffrance des établissements bancaires spécifiquement au Cameroun.

L'étude des créances en souffrance permet également d'appréhender les différentes règles organisant le traitement et l'identification des créances en souffrance. De les apprécier, et d'en détecter les failles.

31 Il existe deux catégories d'établissements financiers, les sociétés financières et les institutions financières spécialisées.

32 La Loi n°2019/023 du 24 décembre 2020 portant loi des finances de la république Cameroun pour l'exercice 2020 contient des mesures fiscales incitatives au recouvrement.

33 Désormais, la Loi n° 2019/021 du 24 Décembre 2019 fixant certaines règles relatives à l'activité de crédit pénalise le non remboursement de mauvaise foi des emprunteurs des établissements de crédit.

8

De façon plus pratique, cette étude sera une aide précieuse pour le banquier dans les procédures à suivre pour l'exercice de son droit de recouvrement. Au-delà, elle l'aidera également à neutraliser, sinon minimiser au mieux les effets néfastes des créances en souffrance sur la banque. Elle sera en outre une mise en garde pour les emprunteurs, les édifiants sur les sanctions auxquelles les exposent le non remboursement des crédits .

La pierre angulaire de tout travail de recherche est la problématique, elle donne un but au chercheur, lui permet de se focaliser sur la réponse à la question qu'il s'est posée et lui évite de se perdre dans les différents contours du sujet. Michel BEAUD explique à cet effet que la problématique « c'est l'ensemble construit autour d'une question principale, des hypothèses de recherche et des signes d'analyse qui permettront de traiter le sujet choisi »34.

C'est partant de ce constat que cette étude se propose de répondre à la problématique de savoir quel est le régime des créances en souffrance des établissements bancaires ?

L'hypothèse est une esquisse de réponse à la question posée qu'on s'attèlera à vérifier et justifier tout au long du travail. À la question de savoir quel est le régime des créances en souffrance, nous répondons que les créances en souffrance ont un régime différent de celui des créances saines et des créances irrécouvrables. Qu'il est possible de les recouvrer, mais la délicatesse de leur processus de recouvrement peut conduire à leur fin tragique et à une transformation en pertes, ce qui est lourd de conséquences pour les banques.

Des études ont déjà été menées autour des créances bancaires, les unes sur la gestion du risque de crédit35, les autres sur le recouvrement des créances bancaires36 sous l'égide du règlement COBAC 2014/01 relatif à la comptabilisation et au provisionnement des créances des établissements de crédit .Depuis, le Règlement de 2018 et les innovations du législateur Camerounais sont venus modifier les règles applicables en matière de créances bancaires. Nous avons décidé de jeter un regard nouveau sur les créances en souffrance des établissements bancaires à la lumière de la législation en vigueur. C'est à cette fin que nous étudierons le régime des créances en souffrance, plutôt que la classification, ou le recouvrement des créances en souffrance.

34 BEAUD (M.), l'art de la thèse, Paris, La Découverte, 1997, P32.

35 NOUTEKA KAMDEM (L.M.), le risque de crédit, mémoire pour l'obtention du master II en droit, université de Dschang 2016 ; MAGADJI (M.), la gestion du risque de crédit par la méthode RAROC : application à Eco-Bank Cameroun, Université catholique d'Afrique Centrale, mémoire de Master II en comptabilité finances 2010 ; NGOMOE (G.), la gestion du risque de non règlement lié au crédit documentaire dans les établissements de crédits : le cas d'Afriland first Bank rapport DESS, droit des affaires internationales et fiscalité, Université de Dschang 2005.

36TALATO SAFIATOU (K.), procédure de recouvrement et gestion des créances en souffrance, institut supérieur d'informatique et de gestion Ouagadougou, DUT finances comptabilité 2015.

9

Ces approches ont étés écartées, la première ne présente aucun intérêt pratique dans la mesure où elle ne mène pas une analyse sur le recouvrement des créances en souffrance. Et la deuxième parce qu'elle élimine des pans très importants du sujet, à savoir le traitement comptable des créances en souffrance et l'hypothétique perte de celles-ci. On aurait également pu étudier la causalité des créances en souffrance. Procéder ainsi aurait été se limiter à exposer les origines et les méfaits des créances en souffrance, chose déjà connue par les acteurs du système. Apres le choix de notre approche, il est capital d'utiliser les méthodes adaptées pour l'explorer au mieux.

La méthode est l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre les objectifs qu'elle poursuit, les démontre et les vérifie. Les méthodes appliquées ici sont les méthodes exégétiques, casuistiques et le droit comparé.

La méthode exégétique qui consiste en l'interprétation et l'explication des règles de droit contenues dans les lois a été précieuse dans l'étude de l'ensemble des règles de droit positif applicables en matière de créances37. La méthode casuistique38 quant à elle est une forme d'argumentation consistant à résoudre les problèmes pratiques par une discussion entre d'une part les principes généraux ou des cas similaires, et d'autre part la considération des particularités des cas étudiés. Le droit comparé est une méthode auxiliaire de la critique législative qui consiste à apprécier et juger la loi nationale en la comparant aux lois similaires et aux institutions analogues des autres pays39.

En utilisant ces méthodes nous avons acquis deux certitudes, les créances en souffrance ne sont pas des créances perdues (première partie), mais il n'en demeure pas moins qu'elles sont grevées de lourdes contraintes de recouvrement (deuxième partie).

37 GRAWITZ (M.), méthodes de sciences sociales, Paris, Dalloz, 9e édition, 1993, p.364.

38 GRAWITZ (M.), op.cit,p 365.

39 BARRAUD (B., « le droit comparé `)», in la recherche juridique ( les branches de la recherche juridique), l'Harmattan, coll. Logiques juridiques, 2016, p. 91.

PREMIERE PARTIE : DES CRÉANCES NON

PERDUES

10

11

Le traitement des créances en souffrance implique la maitrise de leur nature. Certes elles ne sont pas des créances perdues, encore moins des créances saines. Il ne suffit pas de connaitre ce que les créances en souffrance ne sont pas, il faut encore connaitre ce qu'elles sont. On s'intéresse dès lors à ce qui permet de les reconnaitre et de les distinguer. À ce qui les différencie non seulement des créances perdues, mais également des autres types de créances bancaires comme les créances saines et sensibles. Il s'agit donc pour nous de parcourir les critères des créances en souffrance (chapitre 1), en fonction desquels on peut mener un effort derecouvrement(chapitre2).

CHAPITRE 1 : DES CRÉANCES SOUMISES À DES R?GLES PARTICULI?RES

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Les règles qui gouvernent les créances en souffrance sont relatives à leur organisation, elle n'est pas laissée à la discrétion du banquier. Par organisation on fait référence aux critères d'identification et aux règles de provisionnement des créances en souffrances.

Le règlement R 2018/01 qui traite de la classification des créances n'a pas établi stricto sensu des critères d'identification des créances en souffrance. Mais à partir de la classification qui est faite des créances en souffrance, on peut déduire leurs critères d'identification (section 1). Le législateur a par contre pris soin de préciser méticuleusement les règles de provisionnement applicables à ces créances (section 2).

SECTION 1 : LES CRIT?RES DES CRÉANCES EN

SOUFFRANCE

Les critères des créances en souffrance sont les caractères ou signes qui permettent de les distinguer. Ces caractères sont en rapport avec deux indicateurs cumulatifs: l'échéance et le recouvrement. En principe, les créances en souffrance sont des créances échues et non encore recouvrées (paragraphe 1), mais il peut arriver que certaines créances sur la base d'autre critères soient classées parmi les créances douteuses (paragraphe 2).

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe