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Famille et abandon scolaire des enfants de 6 à  14 ans en Guinée.


par FranàƒÂ§ois Xavier LAMAH
Institut de Formation et Recherche Démographiques - Master Professionnel en Démographie 2018
  

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CHAPITRE II : CADRE THEORIQUE DE L'ETUDE

Antérieurement, des études fondées sur différents paradigmes ont été réalisées et suggèrent que l'explication de l'abandon scolaire des élèves dépend de deux groupes de facteurs : les facteurs de l'offre d'éducation et les facteurs de la demande d'éducation. L'abandon scolaire des milliers de jeunes a une signification profonde et complexe, et comporte certainement des messages qu'il importe de comprendre et de décoder (B. SAWADOGO et B. SOURA, 2002). En effet, l'abandon scolaire est un long processus cumulatif et hiérarchisé qui s'explique à partir des facteurs personnels mais aussi familiaux et scolaires6 (FORTIN & al, 2005). Ce chapitre est composé de deux sections : la revue de la littérature et le cadre conceptuel.

2.1 Revue de la littérature

Dans ce chapitre, nous allons d'abord passer en revue des approches théoriques développés antérieurement par bon nombre de théoriciens pour comprendre les différences en matière de réussite scolaire, et enfin seront présentés les différents facteurs associés à l'abandon scolaire des enfants relevés à partir des études empiriques antérieures.

2.1.1 Les approches explicatives de l'éducation

Les approches explicatives de l'éducation sont des éléments théoriques visant à donner des orientations en matière de recherche sur les interactions entre la trilogie élève, famille et école. En particulier, pour ce qui est de l'abandon scolaire, elles visent à mettre en exergue les principaux facteurs explicatifs. Il s'agit de l'approche socioculturelle, l'approche psychologique, l'approche économique et l'approche institutionnelle.

2.1.1.1 Approche socioculturelle

Le phénomène de l'abandon scolaire a été clairement analysé sous l'angle sociologique grâce aux travaux de Bourdieu et Passeron, de Boudon et de Bertrand. Partant tous du constat selon lequel il y a des différences de réussite scolaire selon l'origine sociale des enfants : les enfants des cadres réussissent mieux que les enfants des ouvriers. On peut retenir de ces études « Les Héritiers » et « la reproduction » de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron et « L'inégalité des chances » de Raymond Boudon. Ces études expliquent clairement pour le cas de la France, au début de la deuxième moitié du XXème siècle, les différences de réussite scolaire entre les enfants des cadres (des familles riches ou aisés) et les

6 Les facteurs personnels et familiaux relèvent de la demande scolaire alors que les facteurs scolaires sont de l'offre scolaire.

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enfants des ouvriers (des familles pauvres ou modestes) sur la base d'un certain nombre de questionnements : Le système scolaire contribue-t-il à atténuer l'inégalité des chances ? L'aggrave-t-il au contraire ? Quels sont les facteurs extra-scolaires qui déterminent cette inégalité des chances ? Cependant ces études sont basées sur des approches diamétralement opposées : les deux premières sont de la tradition holiste, c'est-à-dire le tout l'emporte sur les parties. La dernière quant à elle, est de la tradition individualiste où on part des individus pour avoir l'ensemble des individus, le tout est formé des éléments.

? Théorie de la reproduction sociale selon Bourdieu et Passeron.

Pierre Bourdieu est de tradition holiste. Il suppose que pour comprendre le fonctionnement de l'école face aux inégalités en matière de réussite, il faut analyser l'ensemble du système scolaire et non pas partir des choix des individus. C'est en 1964 que Bourdieu et Passeron montraient pour la première fois dans « Les héritiers », les inégalités des chances d'accéder à l'enseignement supérieur pour les fils de cadre et les fils d'ouvrier. En 1970, dans « La reproduction », ils insistent à nouveau sur les inégalités de chance de réussite scolaire et dénoncent en même temps une tendance à la « reproduction » des catégories sociales.

Pour eux, l'école est un instrument de reproduction sociale au service des classes dominantes et que de génération en génération, les individus ou les groupes d'individus cherchent à maintenir ou à améliorer leur position sociale : c'est le principe de la reproduction sociale. Cependant les stratégies de reproduction ne sont pas toujours les mêmes, elles varient d'une époque à une autre. Par exemple, dans les sociétés traditionnelles, les stratégies matrimoniales permettaient d'assurer la reproduction sociale. Par contre dans nos sociétés actuelles, c'est le diplôme qui sert de « passeport » indispensable à l'obtention d'un emploi.

? Analyse de Bourdieu et Passeron sur les inégalités liées au fonctionnement de l'école

La réussite scolaire des enfants des classes dominantes ne s'explique pas par leur talent (leur don) mais par leur héritage culturel ainsi que le fonctionnement de l'école. C'est-à-dire que chaque participant au jeu social dispose de ressources assimilables à des capitaux, largement léguées par les parents (Bourdieu et Passeron, 1984).

PARENTS ========================================== > ENFANT CAPITAUX (culturel, économique, social)

Le capital culturel peut être les connaissances, dont la maîtrise de la langue, l'amour de l'Art. Le capital économique quant à elle renvoie aux ressources matérielles, la

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transmission d'un outil de travail par exemple. Quant au capital social, c'est l'étendue des relations sociales, par exemple héritage d'un carnet d'adresse. Les familles transmettent à leurs enfants, un capital culturel que l'école va valoriser car celui-ci est un prérequis des exigences de l'école (culture libre, langage, mode de raisonnement...). L'école en privilégiant des qualités comme l'expression orale ou écrite, la possession d'une culture extra-scolaire conforme à la culture dominante, n'est qu'un habitus pour les enfants des classes dominantes (même valeurs, même goûts culturels...) et les favorisent dans le processus d'apprentissage par rapport aux enfants des classes basses.

Le rôle que va jouer l'école dans la reproduction sociale d'une génération à l'autre, ne favorise pas l'égalité des chances mais elle renforce voire justifie plutôt les inégalités, elle n'est donc pas neutre. Elle ne serve qu'à la reproduction de la classe dominante. Pendant que la socialisation de la famille et la socialisation scolaire se complémentent pour la classe dominante, elles sont en même temps diamétralement opposées pour la classe dominée. On a parfois l'impression de l'égalité des chances, tout en faisant de l'école, un instrument de sélection sociale. Dans ces conditions, les enfants des classes populaires acceptent leur élimination et la considèrent comme normale parce que tout simplement les enfants et leur famille ne maîtrisent pas réellement leur destin scolaire.

Même la démocratisation de l'accès à l'éducation n'entraine pas systématiquement la réduction des inégalités sociale. Dans Les héritiers, les auteurs précisent que « en dehors des inégalités d'accès observées, on peut trouver une preuve de l'importance des obstacles culturels dans le fait que, même après quinze ans ou plus d'homogénéisation par l'école, on remarque chez les étudiants des différences d'attitudes et d'aptitudes liées à l'origine sociale ».

Théorie de l'inégalité des chances selon Raymond Boudon

A l'opposé de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Raymond Boudon est le Chef de file de l'individualisme méthodologique (où on part des individus pour avoir l'ensemble des individus, on fait la somme des comportements individuels, s'inspirant ainsi de Max Weber). Pour lui, contrairement à Bourdieu et Passeron, pour comprendre l'école, il faut partir de la stratégie des individus, il existe dans ce cas ce qu'il appelle un « homo sociologicus », c'est-à-dire un individu rationnel, libre de ses choix et qui fait donc la vie sociale (il est actif, acteur et non pas passif comme Bourdieu). De même, il constate qu'il existe dans notre société une « inégalité des chances » selon l'origine sociale mais, son explication est différente de celle de Bourdieu.

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Boudon part du principe selon lequel l'école est neutre et que les inégalités scolaires ne sont que le résultat des différences des stratégies individuelles par rapport aux origines sociales. Pour lui, l'école est constituée d'un ensemble de points de bifurcation (choix de la langue, des options au collège, choix des filières en première, choix post-bac : fac ou grandes écoles) et qu'à chaque point de bifurcation, ils existent des stratégies individuelles qui varient selon l'origine sociale.

En effet, les élèves et leur famille comparent à chaque décision les coûts et avantages de leurs choix. Où le coût renvoie au temps perdu, l'effort financier consenti, rupture avec la culture du milieu familial, risque d'échec ... et les avantages renvoient au salaire élevé et le niveau social plus élevé. Tant que les avantages sont supérieurs au coût, l'individu continue ses études. Mais dans cette logique, les familles issues de milieux modestes surestiment le coût et sous-estiment les avantages du diplôme alors que c'est le contraire pour les familles issues de milieux privilégiés. Ce qui traduirait évidemment qu'un élève issu d'un milieu modeste choisira plus facilement de s'arrêter au BEPC ou au Bac (c'est déjà une réussite par rapport aux parents) ou des filières courtes (rentabilité immédiate) alors qu'un élève issu d'un milieu aisé s'arrêtera rarement au niveau bac (coût psychologique trop important de l'arrêt des études). Ainsi, les inégalités scolaires s'expliquent par les actions, les stratégies individuelles et des familles dans le système scolaire et non pas par le fonctionnement de l'école que pense Bourdieu.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand