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Les tiers-lieux culturels, un outil pour la démocratisation culturelle ? Démarche comparative

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par Emeline PESCHAUD
Université de Cergy-Pontoise - Master 2 Développement culturel et Valorisation des patrimoines 2017
  

Disponible en mode multipage

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Les tiers-lieux culturels, un outil

pour la démocratisation culturelle ?

Démarche comparative

07/09/2018

Emeline PESCHAUD

Encadrement : Luc MARCENAC

Master 2 Développement culturel et Valorisation des patrimoines 2017-2018

2

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Sommaire

Remerciements 3

Résumé 4

Mots-clefs 4

INTRODUCTION 6

Partie 1 : DU TIERS-LIEU COMME FABRIQUE CITOYENNE À FORT ANCRAGE

TERRITORIAL (...) 12

Chapitre 1 : L'aménagement du territoire et les tiers-lieux culturels : une réappropriation (...) 13

Chapitre 2 : (...) par ces tiers-lieux culturels créées par et pour les citoyens (...) 17

Chapitre 3 : (...) en réponse à la paupérisation du champ culturel. 21

Partie 2 : (...) VERS LE TIERS-LIEU INSTITUTIONNEL, OUTIL DE LUTTE CONTRE LA

SÉGRÉGATION CULTURELLE (...) 24

Chapitre 4 : Le tiers-lieu culturel institutionnel : quand l'institution montre au citoyen (...) 26

Chapitre 5 : (...), quand le marketing s'appuie sur le tiers-lieu culturel pour le dynamisme culturel

et territorial (...) 32

Chapitre 6 : (...), quand enfin les institutions s'emparent du tiers-lieu culturel pour lutter contre les

zones blanches culturelles et pour légitimer davantage les politiques culturelles. 35

Partie 3 : (...) JUSQU'À LA RECHERCHE D'UN ÉQUILIBRE. 39

Chapitre 7 : Ré-envisager, apporter du sang neuf dans le champ culturel (...) 41

Chapitre 8 : (...) Pour ensuite s'accorder autour de partenariats, de réseau(x), d'objectifs communs

(...) 46

Chapitre 9 : (...) et parvenir à l'équilibre. 52

CONCLUSION 55

Sigles 60

Bibliographie 61

Table des matières 69

3

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Remerciements

Je tiens à remercier M. L. MARCENAC pour m'avoir suivie et aiguillée durant la préparation de ce mémoire de recherche.

Je tiens aussi à remercier particulièrement les directions culture, sport et tourisme de GPS&O, I. LANDRY QUINETTE, Z. ALRHAM, E. EVANO, E. ROUILLE, A. PERCHEC, A. CRICHTON, I. DRICHEMONT, V. ALVERNY, C. PARIS MESSLER, A. PETIT, R. PEYROT-DES-GACHONS, C. FERNANDEZ, C. ACOSTA, E. BOURRE, V. FIZAMES, E. POILANE, P. GREGE, V. BASSANESE, A. DE ZUTTER, S. CAMPOS, et l'équipe de coordination du CLEA, L. MAHFOUF, N. BILUKIDI, K. VAN ETTINGER, C. GAUTIER, J.-F. BLOMME LEVENNEUR, A. RAULT, pour m'avoir accompagnée et motivée durant tout mon stage.

Merci également à mes proches, parents PESCHAUD, A. PESCHAUD, N. COUCHOT, A. COUCHOT, A. VARILLON, B. NAIDENOV, pour leur aide, leur relecture et leur soutien moral.

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Résumé

Les tiers-lieux culturels sont aujourd'hui ces nouveaux espaces hybrides, au concept un peu flou, avec une diversité incroyable de projets. Ils sont parfois issus d'initiatives citoyennes, ou au contraire nés d'acteurs publics et parfois d'un peu des deux.

L'avènement du numérique ainsi que d'autres facteurs font évoluer les contextes sociaux, économiques et culturels. Les tiers-lieux culturels peuvent intégrer à leurs objectifs la démocratie et la démocratisation culturelles. Qu'en est-il ? Est-ce un modèle viable ou voué à l'échec ? Comment appréhender l'hybridation dans le champ culturel ?

4

Mots-clefs

Ascendance, citoyen, collectivités publiques, démocratie culturelle, démocratisation culturelle, descendance, éphémère, équilibre, expérimentation, gouvernances, hybridation, innovation, modèles, pérenne, tiers-lieux, tiers-lieux culturels.

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

INTRODUCTION

De tous temps, la cité des Hommes a toujours créé des lieux dédiés à l'innovation : laboratoires, observatoires, expériences, études des langues, réservés aux « chercheurs, savants et ingénieurs du monde entier »1. Les villes les plus illustres de cette innovation sont Babylone, Athènes, Bagdad, Pékin ... Les acteurs de ces espaces dédiés étaient isolés du reste de la population2, comme en témoignent les monastères du Moyen-Âge3 mais aussi les modèles plus récents des « campus universitaires » et des « technopôles » : « On retrouve l'idée de créer des espaces de savoir isolés, auto-suffisants et éloignés des tourments de la vie moderne »4. Avec la mutation du monde tel que nous commençons à le vivre aujourd'hui, avec notamment la hausse de la place du numérique dans la vie quotidienne, les espaces de savoirs, d'expérimentation et d'innovation évoluent eux aussi. Nous sommes aujourd'hui dans un monde qui se tourne de plus en plus vers une économie de la connaissance5. C'est le cas par exemple de l'hybridation des lieux en notamment tiers-lieux. Ces tiers-lieux souvent positionnés au coeur des villes, cherchent à s'ouvrir, à diffuser et à partager les innovations et les connaissances avec le reste de la Cité6.

Ainsi, récemment, la chaîne de café états-unienne Starbucks a été l'une des premières à mettre en place le wifi gratuit pour accueillir des travailleurs, mais aussi à proposer des espaces aménagés pour être « favorables à l'échange et à la discussion tout comme à la lecture et au travail »7. On parle alors de tiers-lieu : un lieu qui n'est ni le domicile, ni le lieu de travail8,9. Instinctivement, un tiers-lieu se définit comme un espace hybride, dans lequel les relations hiérarchiques ne sont pas présentes comme au travail, lieu de diffusion des connaissances, de pluridisciplinarité, d'incitation au do it yourself10 et à l'apprentissage11, lieu d'expérimentation et d'innovation. Il existe plusieurs natures de tiers-lieux, dont les tiers-lieux culturels : « notre hypothèse est que nous assistons à l'émergence d'une nouvelle catégorie de tiers-lieux, les tiers-lieux culturels »12. Par ailleurs, A. BURRET mentionne le fait qu'un tiers-lieu peut être créé de toute part artificiellement, pouvant être aussi bien physique que virtuel,

1 Les tiers-lieux, une notion à expérimenter et co-construire, R. BESSON

2 IBID

3 IBID

4 IBID

5 Les tiers lieux culturels - Chronique d'un échec annoncé, R. BESSON

6 IBID

7 Les tiers-lieux, espaces d'émergence et de créativité, P. GENOUD, A. MOECKLI

8 The great good place Ray OLDENBURG

9 Annexe 1 : portrait de R. OLDENBURG

10 Faire soi-même (traduction)

11 Les églises protestantes haïtiennes de Martinique : des tiers lieux d'éducation et d'intégration ?, M. BLAISE

12 Supra 5

6

7

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

comme les réseaux sociaux sur Internet13. Nous choisissons ici de ne mobiliser que les tiers-lieux culturels physiques.

Il est donc légitime d'aborder ce nouvel objet culturel (ou non) qu'est le tiers-lieu et de s'interroger sur sa potentialité à devenir un outil de démocratisation culturelle, ou non, à l'ère de la révolution numérique.

La littérature scientifique s'intéresse à l'aspect social des nouveaux lieux culturels, comme les friches industrielles et autres lieux qui n'étaient pas originellement dédiés à la création. Toutefois, la recherche universitaire et scientifique autour de ces lieux reste assez floue et peu fournie14. Quelle est donc la définition d'un tiers-lieu si les différents acteurs qui y sont liés ne tendent que difficilement à s'accorder sur sa définition ? Cette notion englobe tous les lieux qui ne sont pas consacrés à une seule activité, avec des caractéristiques communes. Les tiers-lieux peuvent avoir une multitude de formes : un FabLab qui mobilise surtout la notion de do it yourself, un makerspace ou un espace de coworking, espaces consacrés au travail ou encore naître de la mutation d'une friche en tiers-lieu. Les tiers-lieux peuvent être vus comme des outils répondant à diverses vocations : l'agriculture, l'économie, le social etc. Le tiers-lieu n'est donc pas uniquement à vocation culturelle15. L'une des spécificités du tiers-lieu est le croisement des disciplines : « les tiers-lieux ne sont pas restreints à un secteur particulier ». L'horizontalité des relations entre les personnes fréquentant ces lieux caractérise les tiers-lieux. Ainsi, la vie en communauté et la réduction voire la suppression des relations hiérarchiques fait partie de l'innovation sociale du lieu. Les tiers-lieux sont des espaces d'échanges, des lieux différents des autres lieux publics de passage comme une gare16.

Ces « espaces inédits »17 n'ont pas encore de terminologie propre puisque les politiques culturelles actuelles ne parviennent pas à s'accorder sur une nomenclature. On parle alors de friches culturelles, de friches industrielles, de lieux intermédiaires, de lieux alternatifs etc. Ces lieux permettent davantage de création et d' « expression citoyenne ».

La question d'institutionnaliser les lieux alternatifs se pose aujourd'hui à des collectivités publiques : comment sortir des « schémas institutionnels »18 classiques ? La singularité des projets semblent être l'un des principaux obstacles à cette reconnaissance par les politiques publiques culturelles de ces nouvelles formes d'expressions dans des lieux `alternatifs'. De plus, les artistes ont tendance à s'approcher de ces lieux pour acquérir une certaine forme de liberté, et pouvoir être indépendants et

13 Refaire le monde en tiers lieu, A. BURRET

14 Annexe 16 : entretien avec R. BESSON

15 Annexe 10 : infographie sur la création de tiers-lieux

16 Les tiers-lieux, espaces d'émergence et de créativité, P. GENOUD, A. MOECKLI

17 Introduction Culture & Musées : Friches, squats et autres lieux : les nouveaux territoires de l'art ?, E. MAUNAVE

18 IBID Questions à F. LEXTRAIT

8

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

autonomes pour émettre une critique de la société. Ces tiers-lieux sont aussi un moyen de réintégrer leur environnement en côtoyant les des populations, qui peuvent alors à leur tour exprimer leur propre culture. Ce phénomène de nouveaux lieux touche à la fois l'espace urbain et l'espace rural.

Afin de poursuivre cette étude des tiers-lieux culturels et leur aspect d'outil à la démocratisation culturelle, des choix dans la définition de notre objet d'étude ont dû être effectués. Ainsi, A. IDELON19 restreint sa liste des lieux pouvant être qualifiés de tiers-lieux culturels, à la différence de « faux amis »20 : « [...] ateliers, résidences, squats d'artistes, friches culturelles, lieux intermédiaires et `nouveaux territoires de l'art' » , « ni galerie, ni musée, mi espace de création, mi lieu de diffusion, ces espaces hybrides peuvent emprunter les traits caractéristiques des tiers-lieux sans en être pour autant »21. Cependant, R. BESSON22 considère que les friches peuvent être intégrées dans la catégorie des tiers-lieux23. A cela peut s'ajouter la citation d'A. BURRET24 dans Tiers lieux et plus si affinités (2015) : « [...] être plus précis serait prendre le risque d'exclure », ainsi qu'une référence à l'ancien Tiers-Monde qui regroupait des éléments hétérogènes sous un tout25. Cette autre remarque de R. BESSON est à noter : « leur spécificité réside dans leur capacité à les articuler et à intégrer les trois dimensions essentielles de l'innovation : la dimension spatiale des coworking spaces, la dimension sociétale des Living Labs et la dimension productive des Fab Labs »26. Deux conditions sont requises, toujours selon R. BESSON : la communication et le travail coopératif entre les membres du tiers-lieu, mais aussi vers l'extérieur (d'autres tiers-lieux), afin de stimuler les interactions sociales et l'interrogation de la production27 (« le processus prime sur le résultat »28). Le choix est donc arrêté de considérer comme des tiers-lieux l'ensemble des lieux hybrides, nouveaux et innovants, hors des modèles institutionnels ou classiques. Ce choix pourra être contredit/discuté lorsque la recherche des sciences humaines sur cet objet aura avancé.

19 Co-fondateur du collectif curatorial BLBC à Manchester, Arnaud IDELON travaille auprès de nombreux tiers-lieux culturels du Grand Paris (Station-Gare des Mines, le 6b, DOC...). Il a fondé Ancoats, coopérative d'entrepreneurs culturels et de consultants en fundraising, afin d'accompagner des tiers-lieux dans leur développement économique.

20 Tiers- lieu : enquête sur un objet encore bien flou (1/2), A. IDELON

21 IBID

22 Expert en socio-économie urbaine et docteur en sciences du territoire (laboratoire PACTE, université de Grenoble). En 2013, il fonde "Villes Innovations", un bureau d1études localisé à Madrid et Grenoble, spécialisé sur les thématiques des villes innovantes et créatives et des Tiers- Lieux. Rattaché au laboratoire PACTE, ses travaux de recherche portent sur les stratégies d'innovation urbaine, les politiques socioéconomiques et culturelles.

23 Annexe 16 : entretien avec R. BESSON

24 Doctorant en socio-anthropologie et l'un des créateurs de la Poc Foundation et de Movilab

25 Tiers- lieux et plus si affinités, A. BURRET, p.73

26 Les tiers-lieux, une notion à expérimenter et co-construire, R. BESSON

27 IBID

28 Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA

9

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Comme cela a été mentionné, il sera question d'une recherche autour des tiers-lieux culturels, et de leur lien potentiel avec la démocratisation culturelle, la démocratie culturelle mais aussi la lutte contre les zones blanches culturelles29.

La démocratisation culturelle et la démocratie culturelle sont deux locutions proches. La démocratisation culturelle concerne la volonté de donner accès à la culture remarquable au plus grand nombre ; la démocratie culturelle, c'est l'égalité de toutes les cultures et leur droit à s'exprimer et à être diffusées. Les zones blanches culturelles se définissent comme suit : « [...] zones blanches du service public culturel. Il s'agit de 86 bassins de vie dans lesquels il y a moins d'un équipement culturel public, 1 pour 10 000 habitants. Le ministère en fera des « territoires culturels prioritaires », vers lesquels seront déployés de nouveaux moyens au service d'une politique publique de circulation des artistes et des oeuvres »30.

Par innovation, ici, s'entend l'introduction de nouveautés dans des processus, des organisations, des marchés, dans le but d'une amélioration des biens et services. L'innovation peut ainsi être sociale, technique, économique, organisationnelle par exemple. La notion de nouveauté est prépondérante dans sa définition31. L'hybridation des activités d'un lieu peut entrer dans cette définition, ainsi que le nouveau rapport des artistes à la société32, des citoyens à la culture et à l'art33. L'innovation est aujourd'hui fortement liée au numérique. Dans le secteur culturel, le numérique est un nouvel outil pour produire des oeuvres34 ou réinterpréter des oeuvres35, en plus d'être un moyen de communication et de diffusion de la culture36. Il sera également question de la fracture numérique à laquelle la population est parfois confrontée. Elle « désigne le plus souvent l'inégalité d'accès aux technologies numériques, (dont principalement l'ordinateur,) et parfois le clivage entre " les info-émetteurs et les info-récepteurs " »37. Nous verrons quels sont les liens possibles entre la culture et cette fracture numérique/digitale, ainsi qu'une possibilité de solution.

Ainsi, plusieurs questions doivent être soulevées : comment la Culture est-elle appréhendée par le citoyen et par l'institutionnel, dans sa conception sacralisée ou sanctuarisée ? Quels sont l'importance et l'impact de l'ancrage territorial d'un tiers-lieu ? Quels sont les liens entre le public/privé/associatif pour faire vivre un tel lieu ? Comment les acteurs culturels se sont-ils accaparé ce nouvel outil/objet ?

29 Plan Culture près de chez vous OEuvres et artistes sur les routes de France, Ministère de la Culture

30 IBID

31 Définition innovation toupie.org

32 Partie 2 et 3

33 Partie 1

34 Annexe 2 : OEuvre numérique (Château Ephémère, Carrières-sous-Poissy)

35 Annexe 3 : Exposition Imagine Van Gogh

36 Annexe 4 : Application smartphone Louvre

37 Définition fracture numérique techno-science.net

10

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Les réponses à ces questions permettent de tenter d'apporter un retour à une interrogation plus globale : comment un tiers-lieu culturel, citoyen ou institutionnel, peut-il devenir un outil de la démocratisation et de la démocratie culturelle ?

La recherche a été menée selon trois méthodes de travail qui se sont avérées complémentaires.

? La littérature (scientifique, de presse Internet, de blogs, d'entretiens réalisés par d'autres, d'ouvrages etc.). La lecture, tout le long du travail de réalisation, a permis d'étudier le sujet, d'affiner la problématique, d'affûter les notions mobilisées, de creuser des propos ;

? L'étude de terrains. C'est se rendre sur des tiers-lieux et se positionner en tant qu'observateur. C'est relever ses propres impressions, les consigner et les analyser. Les terrains observés ont été le Centquatre de Paris, le Château Ephémère de Carrières-sous-Poissy, Les Grands Voisins de Paris38, la Médiathèque aux Mureaux, principalement. Les sorties de terrain se sont déroulées soit dans le cadre d'une visite personnelle soit durant les visites de presse organisées par les sites. Pour des raisons logistiques et géographiques, il ne m'a pas été possible de me rendre dans un tiers-lieu culturel citoyen ;

? Les entretiens. Ils permettent d'interroger un panel d'acteurs culturels et de croiser leurs regards sur les tiers lieux culturels. Ont été interrogés dans le cadre de ce travail de recherche ; R. BESSON, B. RIDOUX, J. LECORBEILLER, L. KHARJA, M. ROBERT, H. BEUNON, S. CAMPOS.

Pour répondre à cette interrogation, une démarche comparative de différents lieux a été menée. Elle consiste en l'évocation de plusieurs exemples de tiers-lieux culturels. L'avantage de l'étude comparative permet de faire le lien entre la typologie et la théorie. A l'issue du travail de recherche, la théorie voudrait que justement, les typologies de tiers-lieux et la théorie exposée (sur la démocratisation culturelle) coïncident39. Ainsi, l'enquête (à la fois sur le terrain et dans les lectures) permettra de « mettre en regard divers cas empiriques »40. Le but de la comparaison est surtout qu'une généralisation soit mise en exergue autour de la question initiale : la démocratisation culturelle est-elle possible par les tiers-lieux culturels, « tout en rendant compte des spécificités de chaque cas »41 ? Cette démarche peut rencontrer des difficultés notamment sur la collecte des données et la mise en relation

38 Annexe 24 : visite guidée/de presse par le personnel : la visite m'a fait prendre conscience que ce lieu est surtout un tiers- lieu social puisque son activité d'origine et principale est consacrée à l'hébergement de personnes qui sont dans le besoin.

39 De l'étude de cas à l'analyse comparative fondée sur une typologie : le `typological theorizing', D. BAYART

40 S'inscrire dans une démarche comparative L. VERDALLE, C. VIGOUR, T. LE BIANIC

41 IBID

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

de celles-ci42. Il est nécessaire de dépasser la production de monographies : la comparaison fait ressortir des similitudes et des différences pour aboutir à une montée en généralité.

L'échantillon étudié est relativement faible (onze lieux et un réseau détaillés) mais reste cependant représentatif. De nombreux points communs sont relevés, et ce, même parmi les tiers-lieux culturels qui auront été mis de côtés durant la recherche et l'écriture de ce mémoire43. Le tiers-lieu culturel est un espace qui prend des formes diverses ; le terme hétéroclite convient à cette recherche autour de la démocratie culturelle et des moyens mis en place pour y parvenir ou pour tenter d'y parvenir. Les cas choisis l'ont été pour trois raisons principales : leurs sites Internet officiels sont complets, ils sont représentatifs de leur `catégorie' et finalement, sont intéressants à étudier.

La réponse à la problématique autour du lien tiers-lieu culturel/démocratisation culturelle, s'articule en trois axes.

Dans un premier temps, le tiers-lieu comme fabrique citoyenne avec un approfondissement sur les apports de ces nouveaux lieux aux pratiques culturelles. Dans un second temps, le tiers-lieu plus institutionnel vu parfois comme un outil répondant à une difficulté rencontrée par les pouvoirs publics (Etat et collectivités territoriales principalement). Enfin, la recherche d'un équilibre entre ces deux modèles de tiers-lieux, faisant un focus sur les conditions nécessaires des tiers-lieux culturels pour qu'ils fonctionnent.

11

42 S'inscrire dans une démarche comparative L. VERDALLE, C. VIGOUR, T. LE BIANIC

43 Annexe 28 : tableaux comparatifs de différents tiers-lieux (culturels) (section D)

12

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Partie 1 : DU TIERS-LIEU COMME FABRIQUE CITOYENNE À FORT ANCRAGE TERRITORIAL (...)

Les lieux réunis sous le terme de tiers-lieux culturels sont souvent le fruit d'une initiative citoyenne. Ils sont en quelque sorte les héritiers des anciens foyers d'éducation populaire et des jeunes. Ils permettent aux citoyens initiateurs d'exprimer dans un premier temps leur possible manque de reconnaissance dans les autres lieux dédiés à l'art et à la culture : « c'est plutôt une forme d'inadéquation avec les institutions (formelles et informelles) »44. En effet, le poids des tiers-lieux est visible dans l'espace, dans l'aménagement des quartiers45 mais aussi dans la vie politique locale (principe de démocratie participative46) : « [...] que les citoyens puissent s'impliquer dans le design des politiques publiques »47. Les tiers-lieux culturels citoyens cherchent aussi à lutter contre la distance grandissante entre « les élites politiques et administratives, et la société civile »48. Ainsi, les tiers-lieux culturels citoyens investissent leur espace de vie, leur espace vécu. À cela s'ajoute le constat que les lieux investis par les citoyens ont une mémoire forte pour l'ancrage territorial.

Deux points principaux peuvent être développés ici pour saisir l'importance de tels lieux dans la vie citoyenne : tout d'abord, l'aménagement du territoire par le citoyen autour de l'émergence de tiers-lieux culturels ; ensuite, la position centrale du citoyen dans les projets. Ces deux points conduisent à produire une réponse citoyenne à la paupérisation du champ culturel en raison du retrait des politiques publiques dans ce domaine.

44 Tiers-lieux et plus si affinités, A. BURRET (p.73)

45 La caisse des dépôts souhaite savoir comment un tiers-lieu peut changer « la face d'un quartier » (à Guéret) (annexe 18 : entretien B. RIDOUX)

46 « Ensemble des dispositifs et procédures qui permettent d'augmenter l'implication des citoyens dans la vie politique et d'accroître leur rôle dans les prises de décisions » (définition toupie.org)

47 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

48 Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », R. BESSON

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 1 : L'aménagement du territoire et les tiers-lieux culturels : une réappropriation (...)

L'aménagement d'un territoire, à l'échelle locale, peut se définir ainsi : « les sociétés humaines aménagent l'espace dans lequel elles vivent, produisent, échangent. (...) L'aménagement est l'une des formes de l'appropriation d'un territoire »49.

L'un des objectifs des tiers-lieux est de créer du lien social entre les différents individus qui fréquentent un même espace, un lieu qui leur est propre et qui est bien plus qu'un simple lieu de passage : « Ces lieux ne sont pas les espaces publics habituels (aéroports, gares, parcs) qui voient passer une foule hétérogène. Ce sont des endroits plus localisés et dont l'espace, favorisant les liens et les échanges, a été accaparé par les individus »50. C'est une réponse au contexte de crise qui a une nette tendance à creuser les inégalités sociales entre les individus51. R. BESSON a mis en lumière le cas des Laboratorios ciudadanos52 madrilènes53, lieux « d'innovation citoyenne »54, qui ne sont pas nés des volontés d'aménagement du pouvoir public, intégrant de manière « systématique les dimensions artistiques et culturelles »55. Autre exemple de projet du même type, le projet Archipel 2156 : « le projet Archipel 21 de l'artiste Pierre Estève se présente comme « un laboratoire pour repenser le monde. On y étudie et questionne des sujets sociétaux disruptifs avec la perspective d'expérimenter et d'imaginer des solutions citoyennes concrètes favorisant l'inclusion, l'innovation, l'autonomie, la durabilité et la résilience dans une perspective systémique globale. »57.

Ces lieux nouveaux, comme les Laboratorios ciudadanos de Madrid, ont profité d'espaces laissés « vacants » et « n'ont pas fait l'objet d'une stratégie de planification de la ville »58 : ils sont davantage issus de « l'élan spontané de citoyens ordinaires et de collectifs souvent très qualifiés »59. Le travail commun avec la complémentarité de différentes compétences autour du projet est un aspect primordial60.

Ainsi la naissance de ces lieux permet de mettre en place une nouvelle manière de répondre aux besoins d'aménagement émis par les citoyens. C'est aussi une nouvelle manière de combiner ensemble l'aménagement et la culture (pratique et diffusion). Cela donne à voir que les villes sont construites

49 Définition aménagement du territoire geoconfluences.fr

50 Les tiers-lieux, espaces d'émergence et de créativité P. GENOUD A. MOECKLI

51 Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », R. BESSON

52 Annexe 26 : carte de la typologie et localisation des Laboratorios ciudadanos dans Madrid

53 Supra 51

54 IBID

55 IBID

56 Cet exemple à nuancer, puisqu'Archipel 21 est issu d'un réseau, c'est un modèle de projets type one-shot.

57 http://artscience21.org/archipel-21/

58 Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », R. BESSON

59 IBID

60 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

par des personnes61. On peut noter ici la réhabilitation et/ou la rénovation d'espaces laissés vacants par la crise comme un outil de réappropriation. Prenons ici l'exemple du Café Boissec à Larbey (dans les Landes). L'association Sac de billes a ré ouvert ce lieu en 2012 après avoir entièrement rénové cet ancien café de la commune qui était jusqu'alors le lieu de rendez-vous des habitants de la commune. Il a été successivement une boulangerie, un restaurant, une station essence et vide. Il appartient depuis des générations à une famille de particuliers. L'un des objectifs de l'association qui l'a réinvesti est l'éducation populaire, c'est-à-dire l'éducation de chacun par chacun, une éducation qui ne s'apprend pas dans les universités par exemple62. L'association souhaite également mettre en place une éducation culturelle et durable pour tous. Concernant le bâtiment qui accueille actuellement le tiers-lieu culturel, Sac de billes a souhaité investir un lieu historique de la commune, plutôt que de construire de toutes pièces un nouvel espace63. D'ailleurs, le nom du café est le même depuis 1885. En somme, ce Café Boissec est réellement implanté localement puisque c'est l'un des enjeux sous-jacents de l'association : « c'était important de montrer qu'on ne vient pas là faire la révolution et changer toutes les coutumes de Larbey et des environs. On souhaitait proposer des choses en fonction de ce que les habitants avaient envie »64. La réhabilitation65 du café (c'est-à-dire son amélioration du point de vue du confort, de son économie d'énergie etc.) lui a permis de conserver la mémoire forte du lieu.

Bien souvent, la réhabilitation de lieux, de bâtiments, est liée au patrimoine industriel66. Ce patrimoine particulier et récemment reconnu, est synonyme d'abandon en raison des contextes économiques et sociaux difficiles. Les anciens sites industriels, tels que les moulins, les gares ont bénéficié d'une protection patrimoniale. Cette idée d'abandon se recoupe avec l'idée de la fin de l'Etat Providence des années 1970. Jusqu'alors, l'Etat et les travailleurs étaient en synergie67 : accompagnement social et sanitaire afin de propulser l'essor industriel du pays tout entier. Cet Etat se positionne donc comme le garant du bien-être minimum des populations. Le retrait de l'Etat de certains sites industriels contribue fortement au sentiment d'abandon tout en laissant de forts souvenirs dans les lieux de travail avant leur fermeture. On peut évoquer l'exemple de l'usine Michelin dans le

61 IBID

62 Quand des jeunes font revivre des territoires ruraux : le Café Boissec et l'Eco-lieu Jeanot https://www.youtube.com/watch?time continue=540&v=bpD-iiZnlBk

63 IBID

64 IBID

65 La réhabilitation fait qu'un bâtiment conserve son aspect extérieur.

66 Définition : « Le patrimoine industriel comprend les sites, les constructions, les complexes, les territoires et les paysages ainsi que les équipements, les objets ou les documents qui témoignent des procédés industriels anciens ou courants de production par l'extraction et la transformation des matières premières ainsi que des infrastructures énergétiques ou de transport qui y sont associées. Il exprime une relation étroite entre l'environnement culturel et naturel puisque les procédés industriels anciens ou modernes dépendent de ressources naturelles, d'énergie et de voies de communication pour produire et distribuer des biens sur les marchés. Ce patrimoine comporte des dimensions immatérielles comme les savoir-faire techniques, l'organisation du travail et des travailleurs ou un héritage complexe de pratiques sociales et culturelles résultant de l'influence de l'industrie sur la vie des communautés et sur la mutation des sociétés et du monde en général. » ( culture.gouv.fr)

67 Pourquoi parle-t-on de crise de l'Etat Providence ?, vie-publique.fr

15

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Puy de Dôme. Cette usine de pneus parfois qualifiée d'usine paternaliste, a créé des cités ouvrières pour les employés, une école pour leurs enfants et même une clinique. Cela montre que les lieux industriels ont une histoire avec les travailleurs, que ces lieux ont été investis au-delà du simple travail. Aujourd'hui68 le site a ouvert un musée au public afin de retracer son Histoire.

Cependant, cette protection induit des coûts au(x) propriétaire(s) en entretien et en fonctionnement. Pour les citoyens, ils sont comme des toiles vierges, notamment pour des citoyens qui possèdent une idée de projet mais qui n'ont pas l'espace nécessaire pour le réaliser. Peut alors se poser la question suivante : pourquoi ne pas réhabiliter, rénover, plutôt que restaurer ? La réhabilitation permet parfois de passer au-dessus du sentiment d'abandon, généré par la transformation en friche industrielle urbaine69 d'un site. En un mot, les anciens sites industriels ayant cessé leurs activités sont en recherche de nouveaux usages70 qui ne soient pas synonymes de crise ni de difficultés. Une fois encore, la ville de Madrid fournit un bon exemple d'aménagement du territoire par une initiative citoyenne autour d'un espace laissé vacant par la crise. En effet, il semble possible d'affirmer que le vide effraie, qu'un espace ne peut rester sans occupation ni activité durant trop longtemps. Depuis 2003, La Tabacalera, ancienne fabrique de tabac est sous la gestion du Ministère de l'Éducation, de la Culture et des Sports. Ce site est l'un des premiers exemples architecturaux industriels de Madrid avec une très forte connotation sociale, puisque une grande partie de la population de Lavapiés y a travaillé71. En 2007, l'Etat espagnol décide de créer un Centre national des Arts visuels ; le projet n'aboutira jamais en raison des coûts trop élevés et de la crise économique. Il faut toutefois noter qu'avant la prise en main par l'Etat, des activités culturelles de toutes sortes étaient déjà présentes, comme le street art: « tout le monde pouvait faire plus ou moins ce qu'il voulait dans cet espace » 72 . Le tissu associatif du quartier de Lavapiés va alors entrer en contact avec les collectivités afin d'obtenir l'autogestion d'au moins une partie du bâtiment. L'association Tabacalera de Lavapiés devient alors le programmateur culturel et social du lieu73, bien que l'atmosphère de « squat artistique » créée par les citoyens, ne soit plus tout aussi présente qu'à la création du lieu. La Tabacalera à Madrid est également perçue et façonnée à l'image d'un laboratoire citoyen ouvert. Ce lieu se veut être accessible à tous : « LTBC ne peut pas être la ressource de quelques personnes bien connectées ou privilégiées »74. C'est de la « culture libre » qui prédomine dans ce centre, ce tiers-lieu culturel.

68 Michelin 120 ans d'aventures industrielles, D. BASTIEN

69 « [...] aujourd'hui la ruine des bâtiments et des maisons ouvrières, décrépitude qui accentue le sentiment d'abandon et de vide. » La France du vide, R. BETEILLE

70 Apic.com chapitre 2

71 La Tabacalera de Lavapiés: Welcome to Madrid's Most Culturally Diverse Space, J. JONES (traduction Anglais/Français)

72 IBID

73 Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », R. BESSON

74 http://latabacalera.net/

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Comme cela a été mentionné à plusieurs reprises, le tiers-lieu culturel implanté dans un ancien site industriel joue de la forte mémoire du lieu et de son ancrage territorial75 et bien souvent social.

Le tiers-lieu permet donc une réappropriation de son espace vécu, avec une dimension culturelle et artistique. La démocratie participative ainsi que la démocratie culturelle, qui sera davantage développée par la suite, sont les deux notions liées à l'aménagement du territoire (urbain ou rural ou même périurbain et rurbain par ailleurs). Ces lieux permettent à la participation citoyenne d'opérer et d'être visible dans le paysage des habitants de l'espace vécu. Ces derniers peuvent d'ailleurs, par leurs propres initiatives et projets, le façonner à leur gré.

Cette idée de à l'image des citoyens conduit à entrer plus au coeur du tiers-lieu culturel, le lieu par lui-même.

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75 Chapitre 2

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 2 : (...) par ces tiers-lieux culturels créées par et pour les citoyens (...)

L'idée de la réappropriation de leur espace conduit les citoyens vers l'envie de décider de leur propre chef de leur manière de faire/produire de la culture. Ainsi, comme l'introduction le mentionne, le tiers-lieu a pour condition la mise en avant du do it yourself, d'activités directement proposées et conçues pour la population de proximité, de la mise en commun de toutes sortes de choses (aussi bien palpables que de connaissances), l'entre-aide notamment face à une société de plus en plus numérique. En un mot, le tiers-lieu est la promotion d'une culture ascendante. Ces tiers-lieux, à l'image de La MYNE (Villeurbanne), deviennent des « laboratoires citoyens ouverts »76, « au service de l'expérimentation et du développement de projets de recherche citoyens »77. Ce tiers-lieu est davantage un lieu de travail qu'un espace dédié au champ culturel, avec la présence d'un espace de co-working en réseau, d'un hacklab. Pour autant, « les projets supportés78 par La MYNE sont à l'interface entre technique, technologie, art, science et société ». Le secteur culturel est lié directement ou indirectement à La MYNE et aux projets qui y sont développés notamment par l'aspect open source ou bien encore par la volonté de développer l'apprentissage entre pairs79. Le projet de La MYNE est aujourd'hui `dirigé' par un conseil collégial suite à la dissolution du conseil d'administration en 2015 ; la gouvernance du tiers-lieu se veut « ouverte », avec la possibilité pour tous les projets d'être présentés au conseil collégial. Le poids des citoyens dans le façonnage du projet de La MYNE est réellement important puisqu'elle est « en constante mutation car elle est ré-appropriable par tout nouvel arrivant »80. La MYNE, au moment de sa création, a été le réceptacle des activités de l'association Paillasse de Saône.

Pour en revenir au do it yourself81, c'est une technique liée à l'utilisation de plus en plus démocratique des nouvelles technologies et techniques, notamment dans le milieu de la création. Cette notion est née du mouvement punk dans les années 1970, en opposition avec la société de consumérisme82. Ce même mouvement est dérivé du mouvement de l'underground, qui date des années 1960. En effet, les personnes se revendiquant comme appartenant à ces mouvements luttaient contre la culture de masse à grande échelle, souhaitaient alors pouvoir jouer leur musique hors des scènes traditionnelles « pour assurer la liberté de performance »83. Plus que du simple bricolage et débrouillardise, le do it yourself incarne une véritable philosophie. En effet, dans le champ culturel, le

76 https://www.lamyne.org/about/

77 IBID

78 Annexe 7 : exemples de projets supportés à La MYNE

79 La MYNE : pour une capacité d'agir citoyenne, Entretien avec B. CHOW-PETIT et C. CHOW-PETIT, Propos recueillis par L. PIGNOT

80 IBID

81 Partie 3, chapitre 7

82 Article do it yourself, wikipedia

83 IBID

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

citoyen devient non plus consommateur passif mais acteur de la culture lors de son passage dans le tiers-lieu : « [...] l'inclusion de l'utilisateur tout au long de la chaîne de création de valeur. Celui-ci passe d'un rôle purement passif à un rôle plus actif dans lequel il devient un acteur de la création des produits, des contenus et des services qu'il désire utiliser »84. Généralement, les tiers-lieux culturels proposent des activités de do it yourself tournées autour de techniques ou des nouvelles technologies85. Par exemple, le Café Boissec propose des ateliers tournés autour du bricolage et du travail du bois. Ce sont des ateliers qui sont à la fois guidés, selon l'envie, ou libre d'accès pour les plus expérimentés.

L'accompagnement (médiation) dans les tiers-lieux culturels passe donc essentiellement par l'envie de rendre le spectateur acteur dans la création, à la différence d'autres lieux qui se donnent davantage la mission de donner l'accès à la culture et non de produire la culture86 : « les nouveaux laboratoires citoyens ne se donnent pas comme fonction principale de donner accès et propager des initiatives, mais plutôt de se concentrer sur une offre de plateformes qui facilitent la participation des usagers dans les processus d'expérimentation de et de développement de projets »87. Ce nouveau type d'accompagnement conduit à l'innovation sociale voulue et souhaitée dans les tiers-lieux citoyens, à l'innovation d'inclusion ouverte88. Pour autant, ni La MYNE, ni le Café Boissec ou La Tabacalera ne mentionnent directement l'idée de médiation89 ; c'est quelque chose qui leur est naturel, qui peut se retrouver dans l'idée de « culture pour tous/démocratie »90. La médiation est ici l'équivalent de l'accompagnement du citoyen au sein du tiers-lieu.

Le tiers-lieu culturel évite donc le rôle passif que peut jouer un visiteur de musée ou d'exposition. Cela passe par l'insertion du citoyen dans la création et par la médiation auprès de lui. D'ailleurs, cette médiation peut permettre de ne pas ressentir un sentiment de honte91 lorsque l'on est face à une oeuvre que l'on ne comprend pas. Chacun peut créer ou être témoin du processus de création lors de son passage dans le tiers-lieu. Le processus de création est parfois plus important que la diffusion en elle-même92. Une des actions que le citoyen peut mener est la diffusion sur les réseaux sociaux d'une oeuvre découverte dans le tiers-lieu culturel.

L'un des aspects et l'une des conditions de création d'un tiers-lieu culturel est l'ancrage territorial dans l'espace. Un tiers-lieu culturel se veut proche des populations de proximité (proximité par rapport à la mesure de distance géographique et non sociale). Le lieu doit s'adapter et être adapté à son contexte géographique, il peut même être construit par le territoire et pour le territoire. C'est une nouvelle fois

84 Les tiers-lieux, espaces d'émergence et de créativité, P. GENOUD A. MOECKLI

85 IBID

86 Partie 2 et Partie 3

87 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

88 IBID

89 Annexe 28, tableau A3

90 IBID, tableau A9

91 Partie 2

92 Partie 3

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

un rappel de la démocratie culturelle. Cela conduit à l'innovation sociale, car l'ensemble des personnes habitant aux alentours doivent pouvoir se retrouver dans cet espace. Il peut y avoir une relation à double sens : faire exister le lieu par le territoire et faire exister le lieu grâce à son territoire d'implantation.

Les tiers-lieux culturels tendent généralement à développer ce qu'on appelle l'économie circulaire, c'est-à-dire consommer moins, jeter moins, tout en réussissant à produire. La notion de recyclage est très liée à ce type d'économie. On peut aussi relier l'économie solidaire à l'innovation. C'est la mise en place d'un cercle vertueux de la consommation, entre le tiers-lieu culturel et les citoyens qui visitent et qui contribuent à la vie du site et plus largement à la vie de la Cité. L'économie circulaire est un exemple d'innovation sociale créée dans les tiers-lieux culturels.

De manière plus générale, les tiers-lieux culturels sont destinés à être des « lieux de forte inclusion sociale »93, souhaitant « permettre une participation citoyenne la plus large possible », comme c'est le cas des Laboratorios ciudadanos madrilènes. La participation citoyenne peut se distinguer de certains lieux parfois considérés comme des tiers-lieux culturels tels que les squats94, dans la mesure où ils ne sont pas réservés à des experts : ce sont des « espaces ouverts » à tous95. C'est également valable pour les projets, puisque tout citoyen doit être en mesure de participer d'une manière ou d'une autre à ces projets ouverts. Cela tient de l'innovation organisationnelle.

Chaque citoyen est contributeur de la culture présentée et créée dans le tiers-lieu culturel qu'il fréquente. Les pratiques culturelles se veulent à l'échelle locale : on produit/diffuse des locaux96 plutôt qu'une culture qui ne ressemble pas aux communautés de proximité.

Les populations sont donc mises à contribution dans les projets de tiers-lieux culturels, fabriques citoyennes. Cette mise à contribution recoupe l'idée de mise en commun des connaissances des citoyens, afin de construire un projet global qui leur ressemble : « chacun peut être en capacité d'exprimer sa propre culture »97. Les exemples mobilisés, le Café Boissec, la MYNE et la Tabacalera, veulent être des lieux de partage d'espace. La MYNE et la Tabacalera vont même jusqu'à le préciser dans leurs descriptions de fonctionnement : « Il s'agit de catalyser les savoirs (être et faire) et compétences de chacun »98, « un centre culturel qui comprend la culture comme une notion qui englobe les capacités créatives et sociales des citoyens »99. Ce partage de l'espace permet un brassage des différentes personnes qui composent la communauté du tiers-lieu et met en place de l'émulation

93 Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », R. BESSON

94 Tiers lieu culturel, refonte d'un modèle ou stratégie d'étiquette ?, A. IDELON

95 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

96 Partie 3

97 Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA - paragraphe sur l'implication des populations.

98 https://www.lamyne.org/about/

99 http://latabacalera.net/c-s-a-la-tabacalera-de-lavapies/

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

pour la création d'idées, la coopération : « les méthodes de créativité des Tiers-Lieux permettent en outre de favoriser les pratiques collectives et le partage des connaissances »100. Le tiers-lieu culturel a vraiment dans son ADN la volonté de créer des sortes d'écosystèmes citoyens, pour mettre en place des projets collectifs et collaboratifs, dans lesquels chaque citoyen peut et doit trouver sa place sur la chaîne de production. La mise en commun au sein des tiers-lieux culturels passe aussi par la transversalité de différents champs de connaissances. Ainsi des scientifiques peuvent rencontrer des artistes, chose qui a tendance à être réduite, puisqu'un fossé est né entre la culture et la science. Le tiers-lieu joue alors le rôle de vecteur entre ces deux domaines qui sont à première vue aux antipodes : « les laboratoires citoyens tentent de répondre à deux des grands défis de notre temps. [...] l'autre est de connecter différents domaines de connaissance, en fournissant un environnement qui facilite les liens entre divers mondes: artistique, scientifique et technologique, professionnel et amateur, académique, social et activiste »101. On peut donc être en capacité d'affirmer que la mise en commun des savoirs est créatrice de lien social (et cela correspond à l'évocation du lien social présent dans chacun des cas étudiés102). Rendre la connaissance de chacun accessible à tous (et gratuitement) montre l'évolution par rapport à l'Histoire103, qui souhaitait alors que seuls quelques membres de la Cité aient accès aux connaissances. La diffusion à large échelle est l'un des enjeux de la mise en commune au sein des tiers-lieux culturels. Mais par diffusion, ici c'est surtout une référence à la démocratie culturelle plutôt que la démocratisation culturelle. En effet, chacun possède une culture propre et qui est légitimement diffusable à d'autres personnes qui ne sont pas du même groupe social, religieux, ethnique, générationnel etc. Et chaque citoyen peut être récepteur de la culture des autres pour élargir ses propres connaissances.

Les tiers-lieux culturels citoyens sont donc voués à créer une culture venant des citoyens, de l'underground. Cela répond à une logique d'ascendance. Les cas des laboratoires citoyens de Madrid, comme la Tabacalera, en sont de bonnes illustrations. Ils sont dans la logique de « faire avec plutôt que de penser à la place de »104. C'est une motivation que doivent avoir les citoyens : prendre des « initiatives ascendantes »105 pour participer au projet du tiers-lieu. Ainsi, le tiers-lieu culturel n'est pas préconçu par des personnes étrangères au lieu, comme des élus ou des experts, il permet aux citoyens formant la communauté d'être libres dans la fabrique de leur culture.

100 Tiers lieux et fabrique des villes contemporaines, R. BESSON

101 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

102 Annexe 28 : tableau A3

103 Introduction

104 https://www.lamyne.org/about/

105 Une notion à expérimenter et à coconstruire, R. BESSON

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 3 : (...) en réponse à la paupérisation du champ culturel.

Plusieurs exemples de tiers-lieux culturels ont été évoqués et mobilisés précédemment : La MYNE à Villeurbanne, le Café Boissec à Larbey et la Tabacalera à Madrid principalement. Ces trois exemples permettent de dégager des similitudes entre des tiers-lieux culturels considérés comme citoyens et de servir de points d'appui quant à la potentielle réponse à la paupérisation du champ culturel. Par paupérisation, on entend ici la baisse des soutiens publics en termes de financement et également la baisse des fréquentations du public des lieux culturels106. Le comparatif107 des lieux permet d'avoir un premier aperçu du croisement des caractéristiques des tiers lieux culturels citoyens : certaines se retrouvent dans l'ensemble des tiers lieux étudiés tandis que d'autres non. Chaque projet de tiers-lieu est unique, puisqu'il est né à un instant t, avec une communauté pré existante ou non, dans un pays X ou Y, avec des moyens qui diffèrent.

Qu'en ressort-il ? La notion de « dimension sociale » peut ainsi être recoupée avec le critère « donner à faire au visiteur/au citoyen », qui définissent ensemble le tiers-lieu. Ce sont de véritables lieux de création/production et de diffusion en parallèle avec la volonté de devenir de véritables lieux de vie pour le territoire sur lequel le site est implanté. La volonté de démocratie culturelle est prégnante. Rappelons-le, chaque citoyen est spectateur mais est aussi intégré dans le processus de création, comme cela semble être surtout le cas à La Tabacalera. On veut faire de la culture avec chacun. Autre similitude : les tiers-lieux citoyens cités en exemple ici ne semblent pas appartenir à des réseaux de tiers-lieux.

Les différences concernent davantage les activités : tous les lieux évoqués ne sont pas orientés vers le numérique, comme le Café Boissec, ou vers l'envie d'être un véritable outil pour le territoire, comme La MYNE.

On remarque également que ces trois tiers-lieux ne possèdent pas de Fablab : on peut imaginer que cette technologie a un coût trop important pour de telles structures culturelles et que par conséquent le Café Boissec, La MYNE et La Tabacalera trouvent d'autres moyens pour produire, innover et expérimenter en incluant les citoyens. C'est une recherche de production culturelle, ou non, grâce à des moyens alternatifs. Ils pallient aux difficultés financières des structures culturelles citoyennes qui n'ont pas nécessairement d'argent à investir dans les technologies mais plutôt dans d'autres pôles, comme le développement de l'aspect convivial. Par ailleurs, cette recherche de financement n'est pas fixe, puisque le Café Boissec n'impose pas de prix prédéterminé pour une participation aux soirées organisées.

106 Partie 2

107 Annexe 28 : tableaux comparatifs de tiers-lieux culturels

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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L'analyse de ce comparatif nous permet, malgré le faible échantillon, de nous acheminer vers l'idée que chaque projet de tiers-lieu culturel est unique, que ces tiers-lieux culturels répondent véritablement à une problématique propre à la communauté d'usagers ainsi qu'à l'importance de l'ancrage territorial. On peut aussi évoquer la notion d'adaptabilité du lieu au contexte. Ainsi, la mise en place du Café Boissec est absolument différente en comparaison de la création de La Tabacalera. Le premier est implanté en zone rurale tandis que le second est en zone urbaine. Le Café Boissec souhaite redonner une dynamique à un territoire, tout en respectant les « traditions locales » tandis que la motivation de la création de La Tabacalera relève de l'aménagement du territoire suite à la faillite d'un précédent projet culturel soutenu à ce moment-là par la municipalité. De plus, ces deux tiers-lieux culturels ne se situent pas dans le même pays : des différences de cultures mais aussi de juridiction peuvent impacter la création de tels lieux. Les moyens mis à disposition, les flux de citoyens, les réseaux sont donc différents en fonction du degré d'urbanité dans lequel s'est implanté le projet de tiers-lieu culturel.

Pour en revenir à la paupérisation du champ culturel, les tiers-lieux culturels peuvent mutualiser les ressources de chacun, notamment les connaissances et les savoirs comme c'est le cas à La MYNE ou à La Tabacalera. Comme le mentionne le rapport d'Y. PADILLA108, ces nouveaux territoires de l'expérimentation, notion présente dans chacun des cas d'étude de cette partie, permettent à la culture de s'exprimer ailleurs que dans les lieux prévus : « offrant des lieux de fabrication ponctuels, des espaces de diffusion et des modes de production inventifs ». Chaque tiers-lieu culturel citoyen semble posséder son propre modèle d'implantation et de développement, et par conséquent répondre aux besoins spécifiques de chaque communauté, chaque individu animant le tiers-lieu.

Ces modèles de tiers-lieux culturels citoyens permettent également à tous les individus de s'exprimer et surtout d'avoir accès à la culture d'autres citoyens qui peuvent être des voisins ou de simples visiteurs de passage, puisqu'en plus de la création, la diffusion est l'une des activités communes (La Tabacalera et le Café Boissec). Les lieux culturels et le soutien aux projets culturels par les collectivités territoriales publiques subissent une sorte de retrait des pouvoirs publics, se traduisant par une réduction des subventions accordées ; le tiers-lieu culturel peut alors être qualifié de lieu alternatif. En effet, deux des trois lieux étudiés ne reçoivent pas de subventions publiques pour leur fonctionnement et leur investissement (La MYNE, le Café Boissec). Bien que dans la recherche aucun tiers-lieu culturel n'en ait fait l'objet, la paupérisation peut se contourner par le système du crowdfunding109. Ainsi, à La Roche-de-Rame (Hautes Alpes), l'association Les Croquignards a pour ambition de créer un « lieu culturel et social autogéré » en rénovant une bâtisse110. Si le projet aboutit

108 Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA

109 « Le crowdfunding est un terme anglais pour désigner un « financement participatif ». Cela signifie qu'un grand nombre de personnes sont amenées à participer à l'élaboration, en termes économiques et financiers, d'un projet. » https://www.crowdlending.fr/le-crowdfunding-definition-reglementation-avantages-et-inconvenients/

110 Création d'un lieu culturel et social autogéré. Par LES CROQUIGNARDS

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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(donc si les dons provenant de sources privées et généreuses sont suffisants pour financer le projet global), il devrait y avoir entre autre : une « salle de vie avec un café associatif, lieu convivial de proximité et de rencontres et son coin enfants », « une bouquinerie, avec des livres militants, des livres d'occasion de tous horizons et un accès à des médias libres numériques », « une résidence d'artistes, pour développer la création culturelle dans les Hautes Alpes », ... Il serait alors possible de compléter la liste des tiers-lieux culturels citoyens avec ce projet. Car on remarque que de nombreux termes utilisés font partie des caractéristiques des tiers-lieux culturels et de la définition d'un tel lieu (dans la mesure où cette définition existe111). On notera ici que la mise en place d'une cagnotte via un site Internet montre que les tiers-lieux culturels sont en capacité de surfer sur la vague du numérique, malgré l'absence notable d'un Fablab par exemple.

En conclusion, les tiers-lieux culturels citoyens sont façonnés à leur image et répondent à leurs besoins directs en termes de culture. La démocratie culturelle est la réponse à la paupérisation, dans le sens où les finances publiques diminuent, et est même une réponse (autre débat) au manque de reconnaissance de toutes les cultures112. L'engouement citoyen pour ce plus ou moins nouveau type de lieu culturel est suffisamment important pour être remarqué par les institutions publiques, les collectivités territoriales et même l'Etat, au point d'être repris pour leurs propres projets culturels.

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111 Introduction

112 Partie 2

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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Partie 2 : (...) VERS LE TIERS-LIEU INSTITUTIONNEL, OUTIL DE LUTTE CONTRE LA SÉGRÉGATION CULTURELLE (...)

Par lieu institutionnel et par conséquent institution113, on entend ici les administrations nationales ou locales et les collectivités territoriales ; ce sont des pouvoirs qui relèvent de l'Etat. On parle alors de pouvoirs publics, qui « déterminent l'action politique »114. De manière sommaire, ce sont des organes représentant le gouvernement au pouvoir, gouvernement par ailleurs élu au suffrage universel et suivant un régime démocratique (on ne parle ici que du cas de la France).

La culture possède des institutions publiques, chargées de plusieurs missions, comme par exemple la DRAC qui est née du mouvement suite à la déconcentration dans les années 1960. Depuis peu, l'Etat souhaite traiter le défi des zones blanches culturelles115 et de la lutte contre la ségrégation culturelle. La ségrégation, ici « sociale » peut être définie ainsi : « mise à l'écart d'une population formant un sous-groupe religieux ou racial, qui subit en outre des discriminations de nature politique, juridique ou économique »116. Les zones blanches culturelles ont été identifiées récemment (2018) par le Ministère de la Culture. Elles s'apparentent aux zones blanches de la téléphonie, des zones dans lesquelles le débit n'est tout simplement pas optimal. Ainsi, une zone blanche culturelle est une zone dépourvue d'équipement culturel public en direction des habitants de cette zone. Fort de cette constatation, le Ministère de la Culture souhaite alors travailler autour de ce nouvel enjeu qu'il nomme depuis A. MALRAUX la démocratisation culturelle. Quelle(s) politique(s) culturelle(s) est/sont susceptible(s) d'y palier et par quel outil ?

Le tiers-lieu culturel commence à être identifié par les pouvoirs publics, à différents échelons. Grâce à sa popularité grandissante (cela marche), il est maintenant repérable par les pouvoirs publics. La politique culturelle publique peut parfois se servir de projets de tiers-lieux culturels afin de diffuser la culture117. On parle dans ce cas d'upperground, du haut vers le bas (descendance). Cet espace hybride qu'est le tiers-lieu culturel peut aussi devenir un outil de marketing pour des territoires en perte de dynamisme. Enfin, le tiers-lieu culturel, de plus en plus remarqué, commence à se soumettre à un

113 Au moins valable pour le cas de la France.

114 Définition de pouvoirs publics, toupie.org

115 Plan Culture près de chez vous OEuvres et artistes sur les routes de France, Ministère de la Culture

116 Définition ségrégation, par D. PUMAIN, hypergeo.eu

117 « `La démocratisation de la culture repose sur deux postulats implicites : seule la haute culture, valeur sacralisée, mérite d'être diffusée, et il suffit qu'il y ait rencontre entre l'oeuvre et le public (indifférencié) pour qu'il y ait développement culturel - Augustin GIRARD Géneviève GENTIL Développement culturel. Expériences et politique (1972, ouvrage commandité par l'UNESCO) » La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, A. CHATZIMANASSIS

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

processus d'institutionnalisation118. Les différents tiers-lieux culturels qui seront ici évoqués sont : le concept des Micro Folies (réseau), La FabricA à Avignon et le Centquatre à Paris.

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118 La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, A. CHATZIMANASSIS

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Chapitre 4 : Le tiers-lieu culturel institutionnel : quand l'institution montre au citoyen (...)

Le Ministère de la Culture119, à sa naissance en 1959, sous le nom de Ministère des Affaires Culturelles, sous A. MALRAUX, s'est octroyé comme mission la démocratisation culturelle, c'est-à-dire « [...] rendre accessibles les oeuvres capitales de l'humanité, et d'abord de la France, au plus grand nombre possible de Français ; d'assurer la plus vaste audience à son patrimoine culturel ; de favoriser la création des oeuvres de l'art et de l'esprit qui l'enrichissent ».

Par cette définition, on peut supposer que le « plus grand nombre possible de Français » comprend les Français se rendant volontiers sur ces lieux de culture mais également les Français qui n'y vont pas. On parle alors de publics empêchés, de non-public et de non-initiés, pour les personnes qui ne se déplacent pas vers les lieux dédiés à la culture. Les premiers publics sont les personnes handicapées, hospitalisées et emprisonnées. Les deux autres catégories sont les personnes qui subissent voire même s'imposent d'elles-mêmes une barrière symbolique : « On peut donc supposer que les « freins », les obstacles trouvent en partie leur origine dans les représentations de la culture que construisent les acteurs sociaux »120 . Cette barrière peut s'expliquer par une certaine appréhension entre soi et la culture savante, la haute culture. Cette dernière peut être liée à l'idée d'élitisme. Par élitisme, on entend l'idée qu'un groupe social est mis en avant du point de la politique ou ici, de la culture, au détriment d'autres groupes pouvant appartenir à la classe populaire et à la culture de masse. Il existerait dans le monde de la culture une hiérarchie des cultures121 qui tend à muter avec une fois encore, l'intervention du numérique dans les pratiques culturelles. Il y aurait une dichotomie entre la haute culture et la basse culture, notamment dans les sociétés des pays industrialisés comme la France. Chacune de ces cultures a ses propres valeurs, même si l'existence de modèle d'opposition semble être aujourd'hui dépassée122. La démocratisation culturelle serait le processus qui fonctionne pour ces sphères sociales en capacité de recevoir cette culture, mais pas de facto l'ensemble de la population123. La posture des institutions classiques semble être la culture pour tous et non la culture avec tous, comme le préconise la démocratie culturelle124.

L'une des raisons évoquées à propos de la non `participation à la vie culturelle', serait la suivante, si on mobilise l'exemple des populations immigrées ou des enfants d'immigrés : tous les groupes

119 Anciennement le Ministère des Affaires Culturelles

120 Le non-public et la culture, Une étude de cas en banlieue, C. GHEBAUR

121 Peut-on encore distinguer haute culture et basse culture ?, Q. MATARO

122 IBID

123 Le CESE a adopté son avis sur la démocratie culturelle

124 IBID

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

sociaux ne se reconnaissent pas dans les manifestations culturelles125 organisées par les collectivités. Le fait d'appartenir à la classe populaire, par opposition ici aux classes supérieures, peut paraître pour les non-publics une des raisons les empêchant de participer à des manifestations culturelles mises en place par leur commune par exemple. Les populations ne se sentent ni intégrées ni le récepteur de la culture. En 2008, le Ministère en charge de la Culture a mené une enquête quant à la fréquentation des classes plutôt populaires (notamment ouvrières) vers des lieux culturels classiques (salles de concert pour de la musique classique, musées, monuments historiques...) et a constaté qu'en 2008, ils étaient 65% contre 54% en 1973126 à ne pas fréquenter ce type de lieux. L'un des facteurs de cette baisse de la fréquentation est la hausse des inégalités économiques entre les classes, qui induit un poids des dépenses `obligatoires' du type logement, alimentation, charges, plus important dans le budget des classes les plus populaires et qui réduit par conséquent la part du budget consacrée aux loisirs et à la culture. En somme, le manque de fréquentation des lieux qui diffusent la haute culture peut s'expliquer par plusieurs raisons : raisons physiques (personnes handicapées), raisons économiques (coûts trop élevés et manque de moyens) et raisons sociales (pas de mélange des classes).

Conscient de cette réticence à aller vers la culture et ses lieux de diffusion classiques, l'Etat a mis en place depuis janvier 2017 le concept de la Micro Folie. Sa prise de conscience le conduit à mener des activités différentes et ailleurs que dans des lieux culturels classiques, afin que « rentrer dans un musée, dans un opéra devienne quelque chose de banal »127. Il en existe actuellement sept (dont une en Turquie et une en Birmanie) ; environ deux cents nouvelles devraient être créées durant l'année 2018128. L'accueil d'une Micro Folie sur un territoire est à la charge de l'Etat et de la commune accueillante. Le principe de la Micro Folie est simple : il s'agit d'un « musée numérique de proximité », à des fins de « démocratie culturelle129 et d'accès ludique aux oeuvres des plus grands musées nationaux »130. L'ensemble des Micro Folies implantées constitue un « projet global »131, en partenariat avec des établissements culturels prestigieux, des « grands opérateurs du Ministère de la Culture (...) »132 : Musée du Louvre, Centre Pompidou, Musée du Quai Branly-Jacques-Chirac, Festival d'Avignon, Institut du Monde Arabe, Musée d'Orsay, Opéra national de Paris, Musée Picasso, Château de Versailles, Philharmonie de Paris, RNM Grand Palais, Cité des Sciences. Les Micro Folies sont pilotées par La Villette de Paris. La Villette est un parc parisien situé sur d'anciens abattoirs dans le 19ème arrondissement. Les Micro Folies se sont inspirées du style architectural du parc, créé par B. TSCHUMI dans les années 1980. La programmation du parc se veut

125 Annexe 17 : entretien J. LECORBEILLER : « Il faut amener des choses de la culture des gens, s'adapter à la demande. Les gens viennent voir leur culture ».

126 Culture de masse ou cultures de classes ?, N. DUTENT

127 Le CESE a adopté son avis sur la démocratie culturelle

128 Les Micro-folies, musées numériques de proximité : déploiement national, culture.gouv.fr

129 Sur le site Internet des Micro Folies, on y parle plutôt de « démocratisation culturelle »

130 Les Micro-folies, musées numériques de proximité : déploiement national, culture.gouv.fr

131 http://www.micro-folies.com/les-micro-folies/

132 « [...] et rappelle ainsi leur dimension nationale » http://www.micro-folies.com/les-micro-folies/

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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pluridisciplinaire : on peut alors émettre l'idée que le parc de La Villette est presque précurseur des futurs tiers-lieux culturels institutionnels.

Grâce à la numérisation des oeuvres, les publics se rendant dans une Micro Folie peuvent découvrir près de chez eux des oeuvres mythiques, comme La Joconde, l'un des plus illustres exemples. Ces déploiements de l'art sont généralement en direction des quartiers défavorisés (éloignement social de la culture) et des zones rurales (éloignement plus géographique cette fois) : « Ici, c'est une autre façon de se réapproprier l'art, de le rencontrer. L'idée de départ, c'est qu'une partie des populations se sent coupée de la relation avec les institutions culturelles, et notamment les jeunes qui vivent dans des quartiers défavorisés »133. Cela suit la logique suivante : c'est la culture qui vient à vous. Cela peut aussi avoir pour objectif à plus long terme de donner aux spectateurs des Micro Folies l'envie et la curiosité de se déplacer dans ces musées et de voir réellement les oeuvres de ces lieux.

Lorsque l'on prend connaissance de comment se fait la mise en place d'une Micro Folie, on se rend compte que ces lieux culturels soutenus par les pouvoirs publics répondent aux caractéristiques des tiers-lieux culturels. Ainsi, les Micro Folies possèdent plusieurs modules qui sont un musée numérique qui vient d'être évoqué, un Fablab et un café pour la dimension conviviale du lieu. De plus, les arguments forts sont : « favoriser la création », « animer les territoires », en plus d' « offrir les trésors de la nation aux populations »134 (argument placé en première position par ailleurs). Comme les tiers-lieux culturels citoyens, les Micro Folies « sont différentes et s'adaptent aux réalités de chaque territoire »135. Les deux principales réalités mentionnées concernent les classes sociales qui seront sensibles au tiers-lieu culturel et les capacités d'équipement accueillant136. On peut ajouter le fait que l'innovation est bien présente : « faire circuler vos initiatives locales avec les institutions partenaires ». Une autre hypothèse peut être soulevée à savoir que les musées restent réservés aux élites tandis que la Micro Folie et ses modules sont pour les autres classes de la population. La Micro Folie est un outil de diffusion de la culture qui fait preuve d'adaptabilité de forme mais pas nécessairement de fond de diffusion.

On l'aura bien compris, en s'emparant d'un nouvel outil culturel, l'Etat et les collectivités territoriales tendent à suivre la préconisation de la culture pour tous, qui est par ailleurs une loi de la Constitution française137 : « Article 140 : « L'égal accès de tous, tout au long de la vie, à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs constitue un objectif national. Il permet de garantir l'exercice effectif de la citoyenneté. [...] L'Etat, les collectivités territoriales, les organismes de protection sociale, les entreprises et les associations contribuent à la réalisation de cet objectif. Ils

133 L. BAYLE, directeur de la Philharmonie

134 http://www.micro-folies.com/les-micro-folies/

135 https://lavillette.com/micro-folie/ - Annexe 8 : dossier de presse de la Micro Folie aux Mureaux

136 La Micro Folie est intégrée généralement dans un équipement culturel déjà existant, comme à La FabricA ou bien encore à la Médiathèque aux Mureaux.

137 Loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions

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peuvent mettre en oeuvre des programmes d'action concertés pour l'accès aux pratiques sportives et culturelles. Au titre de leur mission de service public, les établissements culturels financés par l'Etat s'engagent à lutter contre les exclusions ». Pour cela, A. MALRAUX a imposé trois objectifs à son Ministère des Affaires culturelles : la démocratisation, la diffusion et la création138.

Après avoir pris connaissance des présentations officielles de chacune des Micro Folies, on se rend compte que la diffusion est davantage mise en avant par rapport à la création, et même à l'innovation et l'expérimentation. On peut ici mobiliser un autre exemple de tiers-lieu institutionnel, le Centquatre139 à Paris. Ce « laboratoire artistique » est situé sur les anciennes pompes funèbres de Paris, rue d'Aubervilliers. En 1998, le site cesse toutes ses activités industrielles autour des pompes funèbres (menuiserie pour les cercueils, peintres, couturiers etc.). De 1998 à 2004, le bâtiment de quelques 39 000 m2 et inscrit aux monuments historiques, n'est plus occupé. En 2004, la Mairie de Paris lance un appel à projet afin de trouver une équipe de direction du lieu, un lieu culturel dépassant son passé lié à la mort. En 2009, une fois les travaux terminés et après son inauguration, l'objectif principal est le suivant, pour ce nouveau Centquatre : « créer un foisonnement et démocratiser la culture. Plus qu'un simple lieu de rencontres artistiques, le Centquatre a pour objet l'insertion sociale à travers l'art »140. Il est aujourd'hui pensé comme une plateforme artistique collaborative, qui met en contact le public avec l'oeuvre et la création, en observant des artistes s'exercer dans les halles. Le Centquatre possède une sorte de module appelé 104Factory, qui s'avère être une pépinière d'entreprises. On note aussi la présence d'une maison pour les petits. Ce lieu est aujourd'hui qualifié de fabrique innovante tant du point de vue de la culture que de l'art. La direction, sous J.-M. GONCALVES, souhaite également mettre en avant l'expérimentation autour de la culture et de l'art. Il y a, selon le site officiel, une réelle volonté de travailler avec le tissu associatif présent autour du site. En se rendant au Centquatre, il est possible de se restaurer, de visiter des expositions, de participer à des activités de bien-être, de se rendre à des concerts etc. Les artistes résidents peuvent aussi créer du contact avec le public en ouvrant les portes de leurs ateliers et « montrer le cheminement de l'art »141. Au contraire des Micro Folies, la création libre est fortement présente au Centquatre. Cependant, les lieux d'expositions restent tout à fait semblables à des lieux de diffusion classiques142. Et concernant la pratique dans les halles, les artistes expérimentent, mais le spectateur reste toujours un spectateur passif et n'a pas de contact avec ces performeurs, il n'y a pas non plus de médiation autour de ces pratiques artistiques visibles par tous. Le Centquatre met en avant l'expérimentation grâce à l'accès libre pour les artistes amateurs de s'exercer dans les halles ou bien encore de louer des salles de répétition. De plus, le

138 Les politiques culturelles d'André MALRAUX à Jack LAND : ruptures et continuités, histoire d'une modernisation, A. GIRARD

139 Parfois orthographié « 104 ».

140 Ce qu'il faut savoir sur le 104, L. BEAUDONNET

141 http://www.104.fr/presentation.html

142 Annexe 16 : visite de terrain `personnelle' lors d'un vernissage d'exposition

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Centquatre met en place des évènements tournés autour de l'innovation, comme en décembre 2017 : Pratiquez l'art et l'innovation, avec la présence des start-ups travaillant dans l'incubateur 104Factory.

Le fait que l'Etat souhaite montrer aux citoyens ce qui est à voir repose probablement sur son envie de mettre en place et en valeur une culture, sur un territoire. Cela revient à exercer comme un contrôle sur les contenus créés et diffusés. L'une des motivations envisageables est le fait que la France suive la ligne directrice suivante : favoriser une culture pour les Français, à la défaveur des cultures locales et ultramarines. On parle dans ce cas de l'exception culturelle à la française : la mise en avant d'une culture française unie/unitaire. Ce concept évolue dorénavant en concept de diversité culturelle. Cependant, on entend par diversité ici se différencier par rapport à d'autres nations et territoires. C'est pourquoi les politiques culturelles publiques rassemblent toute leur énergie pour que la même culture française couvre l'ensemble du territoire, aussi bien en métropole que dans les territoires situés en Outre-mer. Prenons l'exemple de la langue : la France, avec un fort sous-entendu France = métropole, impose le Français comme langue officielle de l'administration. Pourtant, certaines populations, par exemple les Amérindiens de Guyane, ne parlent pas cette langue couramment et luttent pour s'en imprégner. La langue française devient ainsi un frein à la culture française. En somme, la France met davantage en avant la démocratisation culturelle, dans le sens où tous les Français de son territoire doivent être en capacité de partager la même culture. Au-delà de cela, la culture est aussi considérée comme « bien public »143 : c'est un enjeu pour les pouvoirs publics. Plus précisément, la culture doit être protégée (contre l'uniformisation des moeurs par exemple) et doit être transmise. Cela reste possible grâce à la diffusion de la culture, qui s'apparente dans ce cas à la démocratisation culturelle jusqu'à, peut-être, lisser la culture française : « [...] il m'est peu à peu apparu que la logique de démocratisation culturelle visait surtout à imposer à tous une certaine culture : la culture classique, celle des élites, les domaines surtout fréquentés par les classes supérieures de la population »144. En somme, il est possible de proposer l'hypothèse suivante : la haute culture a-t- elle tendance à lisser et à uniformiser les cultures locales et autochtones ?

Tout comme l'ensemble des lieux culturels nés sous l'impulsion des pouvoirs publics, les tiers-lieux culturels institutionnels ne sont pas à 100% libres dans leur programmation. En effet, toute action visible dans le paysage public est le fruit d'une politique commanditée par les décideurs politiques. Ils suivent des directives politiques, qu'ils transforment en objectifs, comme le souligne la définition des pouvoirs publics. De plus, les tiers-lieux culturels institutionnels se différencient des tiers-lieux culturels citoyens par la non spontanéité de montage de projet. Ainsi, le tiers-lieu institutionnel est déposé sur un territoire, tandis que le tiers-lieu citoyen émerge du territoire.

143 Décret N°59-889 du 24 juillet 1959, citation prise dans Limites et possibles de la démocratisation culturelle, A. COURCHESNE, F. COLBERT

144 La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, A. CHATZIMANASSUS

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Même si les objectifs des instances politiques laissent peu de place aux idées novatrices ou autres, l'axe « donner accès à la culture » trouve vraiment réponse avec ce type de lieu ; grâce aux modules mis en place dans les Micro Folies par exemple, ou bien grâce au donner à voir au Centquatre. Un autre exemple de tiers-lieu culturel à venir, La FabricA145 , contribue également à soutenir l'axe dont il est ici question grâce à la volonté d'ouvrir aux publics et cela, même en dehors des périodes de répétitions des artistes pour le festival d'Avignon. Concernant La FabricA, il est à noter que le festival d'Avignon avait tendance à ne valoriser que le théâtre comme art ; avec l'installation de la Micro Folie en son sein, d'autres arts et cultures sont exposées aux visiteurs du lieu. Cela répond donc à une logique de lutte contre la ségrégation culturelle et l'hégémonie d'un art sur les autres dans un lieu, et en un sens presque un pas vers la démocratie culturelle. Avignon est une ville qui attire principalement durant la période estivale, pour son festival tourné autour du théâtre depuis 1947 sous J. VILAR. Fondée en 2004, le tiers-lieu culturel La FabricA permet de mettre en place un espace pour les habitants, avec l'appui d'une Micro Folie. Géographiquement, le site se trouve dans des quartiers populaires de la ville, afin d'attirer davantage les publics qui ne participent habituellement pas au festival. La direction de La FabricA mène également un travail sur l'éducation artistique dans ces quartiers. Au moment du festival, le lieu devient l'un des lieux de représentation grâce à son espace scénique.

Après avoir constaté la volonté de démocratisation culturelle au sein des politiques publiques, nous verrons que le marketing territorial autour des tiers-lieu culturels est une des stratégies mise en place pour atteindre celle-ci.

145 Chapitre 5 : présentation du lieu ; La FabricA sert de lieu de répétition pour les artistes qui se produiront durant le festival d'Avignon.

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Chapitre 5 : (...), quand le marketing s'appuie sur le tiers-lieu culturel pour le dynamisme culturel et territorial (...)

Les territoires, aussi bien à l'échelle des quartiers qu'à l'échelle nationale et internationale, subissent aujourd'hui des concurrences de captation de flux de toutes natures (économiques, de connaissances, de migrations de populations, ...). En effet, aujourd'hui, les territoires tendent à devenir des marques comme tout objet marketing, souhaitant communiquer sur une image de modernité et d'attractivité, mais aussi sur leur identité territoriale afin de rayonner et devenir visible. On peut alors parler de marketing territorial, ce qui relève d'une véritable mise en place de stratégies. Le marketing territorial pourrait se définir comme une volonté de valorisation du territoire. Il est en direction des publics, donc des usagers d'un espace. Cette approche du territoire est purement géographique et est généralement commanditée par des acteurs publics. Le marketing territorial est lié à la communication autour de l'attractivité d'un territoire. L'un des objectifs est d'impulser le développement au sein du territoire, par l'implantation de nouvelles entreprises par exemple, de retenir la classe créative146.

Les tiers-lieux culturels et l'idée de modernité qu'ils véhiculent peuvent faire partie des stratégies des collectivités territoriales pour se donner l'étiquette de territoire attractif : « les tiers-lieux sont en train de devenir un outil marketing »147. Se donner une image de marque permet d'accroître la concentration géographique d'individus créatifs sur un même territoire, donc d'augmenter le développement local par l'installation, par la suite, d'entreprises et donc d'améliorer la compétitivité du territoire dont il est question148.

La culture au sein d'un territoire est liée à la communication : elle en est dépendante pour pouvoir rendre perceptibles ses évènements mais permet aussi de contribuer à la visibilité d'un territoire à large échelle. En effet, si culturel il y a sur un territoire, alors naît assez rapidement et intuitivement l'idée que ce territoire est vivant. La communication autour de la culture développée par un territoire permet de mettre en avant sa différenciation par rapport à d'autres territoires, de procurer un sentiment d'être unique et au-delà, un sentiment d'identité. Les réseaux sociaux sont un vecteur du développement des stratégies de marketing territorial et reposent sur un principe de démocratie participative149.

146 De la communication publique vers le marketing des territoires : approche microsociologique de la fabrication de l'image de marque, C.-E. HOULLIER-GUIBERT

147 La coopérative Tiers Lieux : peut-on faire école des tiers lieux ?, L. AIGRON L. MANUEL

148 Supra 146

149 De la communication publique vers le marketing des territoires : approche microsociologique de la fabrication de l'image de marque, C.-E. HOULLIER-GUIBERT

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Durant plusieurs années, la compétence Culture était rattachée au Ministère de la Culture et de la Communication, de 1997 à 2017. Ainsi, les institutions porteuses de projets culturels souhaitent communiquer autour de leurs évènements ; la communication évènementielle est l'une des stratégies du marketing territorial. Plus la communication touche des populations, parfois à un échelon plus large que le territoire, plus on comptabilise des personnes sensibles à la culture proposée. On comprend donc que la communication autour des tiers-lieux culturels se fait à large échelle et doit rayonner, sans toucher uniquement des publics spécifiques puisque dans le cas du marketing culturel et des tiers-lieux culturels, l'objectif est d'attirer le plus de personnes possibles venant de tous horizons.

La culture peut parfois, de manière superficielle, donner l'impression d'être dans l'air du temps. Ainsi, les tiers-lieux culturels institutionnels souhaitent probablement attirer les publics les plus influents. C'est le cas du Centquatre, qui d'ailleurs a connu des crises et polémiques en raison du manque de fréquentation du lieu durant la première direction. Le vernissage150 d'une exposition semble être un lieu de rendez-vous pour « être vu et pour voir » pour certaines catégories sociales ; en revanche, ce n'est visiblement pas le lieu de rendez-vous des personnes habitantes du quartier. De plus, la carte du restaurant par exemple propose des menus très attrayants avec une cuisine à la mode.

Accueillir un lieu nouveau et culturel comme un tiers-lieu implique plusieurs aspects, toujours liés au marketing territorial : « [...] lorsque le projet est porté par un acteur public, le choix du lieu `totem', sa localisation et son apparence répondent à des enjeux de développement et d'attractivité territoriale, d'aménagement, voire de marketing territorial »151. Ainsi donc, l'ancrage territorial du tiers-lieu est déterminant ; celui-ci doit être en capacité d'être accueilli par le territoire (ici, à petite échelle) et doit vivre pour que le projet ne soit pas un échec. Un échec de tiers-lieu culturel pourrait communiquer sur l'idée que les politiques publiques n'ont pas su appréhender les demandes et attentes des populations dans lequel le tiers-lieu culturel a été monté. Il faut pour cela que le lieu puisse attirer ; sans doute cela passe-t-il par des démarches de diagnostic territorial, avec un questionnement sur les habitudes culturelles des habitants, leurs besoins en termes de culture etc.

Les acteurs publics sont aujourd'hui conscients de ce que peut être pour leur territoire l'implantation d'un tiers-lieu culturel : « [...] c'est tout aussi valorisant pour une commune de pouvoir se prévaloir de posséder ce type de structure »152. Cette réponse provient d'une élue questionnée sur la motivation d'avoir un tel lieu sur son territoire. Des communes, comme Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), pâtissent parfois d'une image de mauvaise presse, ce qui tend à empêcher des personnes extérieures à la commune à se rendre sur place. C'est un manque économique potentiel. Ainsi, le tiers-lieu culturel peut devenir une source d'attractivité et sur le long terme, une manne économique. Pour cela, le tiers-

150 Annexe 22 : visite de terrain `personnelle' lors d'un vernissage d'exposition

151 Le tiers lieu en territoire rural : un lieu unique aux impacts multiples, S. PLION, V. LECOMPTE

152 Annexe 15 : entretien L. KHARAJA

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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lieu culturel doit diffuser la culture qui peut sensibiliser bien plus que les populations de la commune ; il faut potentiellement être en capacité d'attirer des élites sur son territoire.

Il est intéressant de savoir que les DOC des collectivités territoriales intègrent la volonté de développer un projet de tiers-lieu culturel sur leur territoire, lors de la présentation aux acteurs de la politique culturelle de ces collectivités153. La connectivité est un axe sur lequel les politiques publiques peuvent s'appuyer afin de toucher le plus grand nombre grâce au numérique. Un territoire éloigné de Paris peut par exemple se vanter de posséder des oeuvres remarquables grâce à la numérisation de ces dernières. La culture numérique des tiers-lieux culturels institutionnels devient alors un outil politique.

En résumé, la communication autour de la culture permet de la rendre tangible pour le plus grand nombre, de toucher différents publics selon les axes stratégiques de communication choisis. Ces derniers se dirigent vers l'axe suivant : « donner l'accès au plus grand nombre, à tous ». Evoquons ici à nouveau l'exemple de La FabricA souhaitant s'ouvrir aux publics du quartier dans lequel elle est implantée, l'intégration d'une Micro Folie pour augmenter les jours et horaires d'ouverture.

La combinaison de l'upperground et du marketing territorial autour des tiers-lieux culturels sont les faire-valoir de la lutte contre la ségrégation culturelle. En effet, être gestionnaire de tels lieux contribue à repenser le maillage du territoire en équipements culturels publics.

153 Ou dans leur réseau d'équipements culturels communautaires (24/05/18, Présentation officielle du Grand Pari culturel de GPS&O aux acteurs culturels du territoire).

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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Chapitre 6 : (...), quand enfin les institutions s'emparent du tiers-lieu culturel pour lutter contre les zones blanches culturelles et pour légitimer davantage les politiques culturelles.

L'Etat et l'ensemble des pouvoirs publics semblent avoir pris conscience de l'engouement autour des tiers-lieux culturels, des lieux hybrides de diffusion, de création, d'apprentissage. Par conséquent, des collectivités ont décidé de lancer des projets de tiers-lieux culturels sur le territoire français (et même à l'étranger) : les Micro Folies, le Centquatre et La FabricA notamment, qui servent d'exemples concrets de tiers-lieux culturels institutionnels. Ces deux lieux et réseau ont des modèles de projets différents, tout comme les tiers-lieux culturels citoyens d'ailleurs. Ainsi, les Micro Folies forment un concept de lieux accueillis par des communes au sein d'un lieu culturel déjà existant (par exemple la Micro Folie intégrée à la Médiathèque aux Mureaux) ; le Centquatre est un site ouvert toute l'année et la FabricA est une sorte d'annexe du Festival d'Avignon qui rassemble les professionnels de la culture et les citoyens. Ces deux établissements et ce réseau sont sous gestion publique et possèdent des financements publics ; la programmation culturelle dépend donc d'acteurs publics. Leur activité tourne autour de la production, et de la diffusion (sauf pour La FabricA), avec la volonté d'être des espaces conviviaux. Il faut noter que ces deux lieux et ce concept, qui forment l'échantillon (faible), ne mentionnent aucune fois le terme de laboratoire à la différence d'autres tiers-lieux culturels avec divers modèles de fonctionnement. En plus de cela, la médiation auprès des publics ne semble pas être une priorité154. Ainsi, les activités sont en direction des publics mais sans obligation de faire avec les publics (au Centquatre les artistes citoyens viennent librement s'exercer, peuvent louer des salles mais sans médiateurs du site ; à La FabricA, ce sont surtout des artistes qui viennent répéter en juillet, en vue de leurs prestations au festival d'Avignon). Ces deux lieux et réseau se situent dans des zones urbaines et périurbaines. Ils sont destinés à perdurer, ce qui laisse suggérer que ce sont des investissements territoriaux et non des lieux de transition155. Etant subventionnés, ces tiers-lieux culturels institutionnels obtiennent peut-être plus facilement les moyens financiers de développer des activités autour du numérique, avec notamment des Fablabs (Micro Folies, qui ont en plus de cela un musée numérique dans leurs modules, et La FabricA par conséquent) ; le Centquatre organise une conférence sur le numérique Le Rendez-Vous des métiers du numérique en novembre 2018. Il y a donc une volonté de créer des lieux attractifs, qui peuvent toucher une grande partie de la population grâce au numérique, malgré l'existence de la fracture numérique156. Cela se traduit par une volonté de donner accès aux nouvelles technologies à tous, de familiariser les publics à ces outils du numérique.

154 Partie 2 : choix de la Médiathèque aux Mureaux comme tiers-lieu équilibré - Annexe 19 : entretien avec M. ROBERT - Annexe 28 : tableau B3

155 Partie 3, urbanisme transitoire

156 Partie 3

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Les pouvoirs publics ont pris conscience de l'hétérogénéité de la répartition des établissements culturels sur le territoire français (métropole et territoires ultramarins), mais aussi de la répartition de l'argent consacré par citoyen pour la culture : « en Île-de-France, le ministère de la Culture dépense 10 fois plus qu'en région soit 139 euros par habitant et par an contre 15 euros par habitant et par an hors Île-de-France »157. L'inégalité de la répartition est souvent liée à l'inégalité des ressources des territoires en termes de financements consacrés à la compétence culture principalement. Par exemple, la Région Île-de-France lance durant l'été 2018 un appel à projet pour le développement de tiers-lieux en zone francilienne, suite au constat du manque d'égalité entre la capitale, la petite couronne et la grande couronne158. Les zones politiques de la ville tendent aussi à subir les inégalités de développement de lieux culturels et de tiers-lieux, malgré la volonté d'implanter des Micro Folies dans ces territoires.

Mettre en place de nouveaux lieux culturels (diffusion et création) est une solution potentielle pour les territoires, notamment ruraux, qui sont en déperdition de dynamisme culturel : « ils [les tiers-lieux] renforcent l'attractivité du territoire auprès de certaines catégories d'actifs, ce qui pourra se traduire indirectement par une contribution au maintien d'équipements et de services publics (exemple : l'ouverture de classes) »159 ; « Ils apparaissent comme des points névralgiques pour (ré)activer les ressources des territoires ruraux et ancrer de nouvelles formes d'innovation et de développement, en dehors des contextes métropolitains. Plus fondamentalement, les tiers-lieux sont conçus par les pouvoirs publics comme de nouveaux outils au service de la régénération des territoires de faible densité (CGET 2015) »160. Pour les institutions, ces tiers-lieux culturels permettent de diffuser la culture, d'évoluer dans leurs formes. De plus, les lieux de la lecture publique, médiathèques et bibliothèques, sont aussi des tiers-lieux culturels, voire troisièmes lieux, qui sont les plus institutionnalisés et qui peinent encore à produire leurs propres contenus culturels (bien que certains établissements tentent d'aller au-delà de la simple diffusion d'information). Les tiers-lieux culturels offrent l'idée d'être des espaces avec des moyens de diffusion de la culture, peut-être celle considérée comme la culture diffusable.

Les tiers-lieux, et notamment les tiers-lieux culturels, sont des lieux hybrides. Cet aspect hybride se traduit souvent par la transversalité des projets, la pluridisciplinarité, la présence de plusieurs modules. Pour le cas des lieux institutionnels, s'ajoute la transversalité des ministères porteurs de politiques différentes161 qui peuvent se retrouver dans les tiers-lieux culturels. Ainsi, les Micro Folies sont

157 Plan Culture près de chez vous OEuvres et artistes sur les routes de France, Ministère de la Culture

158 « De plus, le déséquilibre dans la répartition géographique des tiers-lieux se traduit par une inégalité d'accès à cette offre. » Appel à projet de la région Île-de-France

159 Le tiers lieu en territoire rural : un lieu unique aux impacts multiples, S. PLION, V. LECOMPTE

160 La régénération des territoires ruraux par les tiers lieux. Le cas des tiers lieux creusois, R. BESSON 161Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA : « l'hybridation passe aussi par la transversalité entre les politiques qui dépendent alors de différents ministères ».

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portées par le Ministère de la Culture, mais sont à destination de quartiers dits prioritaires, quartiers politiques de la ville, avec donc un aspect social plus développé que si seule la culture avait été le moteur du projet. Ainsi, le concept de la Micro Folie162 semble le plus abouti pour lutter contre la ségrégation culturelle et les zones blanches culturelles. Ce concept est implantable partout, attire les publics, à la différence de La FabricA qui peine encore à trouver son public : « La FabricA est un lieu de vie pour les artistes mais pas encore pour les habitants du quartier »163. Ainsi, la Micro Folie devient une couverture pour l'ensemble du territoire, « unique » et « déclinable » sur tous les territoires.

D'autres dispositifs, assimilables aux tiers-lieux culturels sans pour autant posséder cette appellation, peuvent être mentionnés ici. Les institutions intègrent au sein d'établissements culturels publics des modules innovants comme des Fablabs ou des moments, des évènements, comme des Museomix164 ou des hackatons. Un hackaton est un moment de création intense, souvent en une ou deux journées, durant lesquelles des équipes pluridisciplinaires s'affrontent pour développer un projet, en partageant des connaissances et des compétences (ce qui fait forcément référence à l'idée des tiers-lieux et d'écosystème autour du développement et de l'innovation). « Ce processus d'institutionnalisation se caractérise aussi par le développement de tiers-lieux au sein d'institutions culturelles, comme des Fablabs et livinglabs à la Cité des Sciences, les expériences Muséomix dans de nombreux musées, ou des incubateurs comme celui mis en place récemment au Centre des Monuments Nationaux »165. Ainsi, ces dispositifs permettent de démocratiser la culture en s'approchant d'autres compétences, celles de professionnels qui ne sont pas issus de ce champ précisément.

Savoir innover, s'inspirer de ce qui se fait hors des sentiers battus est parfois perçu comme une mutation des politiques culturelles publiques : « les tiers-lieux apparaissent clairement à la fois comme un moyen de re-légitimation mais aussi de transformation de l'action publique [...] »166. Les tiers-lieux culturels peuvent être un tremplin pour les politiques publiques culturelles afin de rebondir. C'est ce qui s'est produit avec la première équipe de gestion au Centquatre : le lieu ne vivait pas et n'attirait pas de visiteurs et était alors perçu comme un véritable échec. En 2010, Les Inrocks le qualifiaient même de « Titanic culturel »167. Forte de ce constat, la Mairie de Paris décide alors de mettre en place une

162 Annexe 29 : schématisation de la diffusion culturelle par l'Etat

163 La FabricA, un rêve nécessaire, Entretien avec P. RODIN, propos recueillis par J.-P. SAEZ

164 http://www.museomix.org/accueil/ « Créer de nouveaux moyens de médiation pour les musées de demain. »

165 Dynamiques organisationnelles, modes de gestion et institutionnalisation de différents tiers lieux culturels, N. AUBOUIN

166 La FabricA, un rêve nécessaire, Entretien avec P. RODIN, propos recueillis par J.-P. SAEZ

167 Le Centquatre à la recherche d'une nouvelle direction, A. LARTIGUE

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

nouvelle direction afin d'être davantage en phase avec ses objectifs, comme intégrer le projet à la dynamique du quartier168.

En conclusion, le tiers-lieu culturel est un outil accaparé par les politiques publiques (collectivités territoriales locales et Etat), afin de redorer le blason des territoires en perte de vitesse, de donner de la visibilité et de l'attractivité à des territoires. C'est un nouveau maillage territorial, que tous les échelons souhaitent mobiliser afin que tout le territoire français soit doté en tiers-lieux culturels169. Avoir créé le concept de la Micro Folie permet de répondre aux deux enjeux, ici : être un outil du marketing territorial puisque celui-ci est lié à de grandes institutions culturelles françaises connues internationalement, et bien souvent parisiennes ; mais aussi être un moyen de garder le contrôle sur les contenus diffusés dans ces espaces. Enfin, les tiers-lieux culturels institutionnels sont implantés dans des territoires, en quelque sorte reçus par ces derniers et par les habitants du quartier par exemple (à la différence des tiers-lieux culturels citoyens qui eux sont nés par le territoire ou en même temps170).

A l'image des tiers-lieux culturels citoyens qui répondent à leurs propres attentes, les politiques publiques montent des projets de tiers-lieux culturels qui répondent à leurs propres objectifs à atteindre en matière de démocratisation culturelle et de diffusion de la culture aux citoyens.

L'étude des tiers-lieux culturels et de leur lien fort en direct avec les enjeux des droits culturels pour tous et avec tous, de la démocratie culturelle, de la démocratisation culturelle, pourrait aboutir à une sorte de dichotomie entre le tout citoyen et le tout institutionnel. Les territoires devraient alors faire un choix entre ces deux modèles. Cependant, une troisième forme de tiers-lieu culturel émerge, qui fait davantage preuve de diversité entre tous les exemples développés par la suite, mais qui fait tout de même preuve d'équilibre entre le poids du citoyen et des acteurs publics concernant le montage du projet et de son suivi.

38

168 Annexe 22 : visite de terrain `personnelle' lors d'un vernissage d'exposition

169 Le tiers lieu, objet transitionnel pour un monde en transformation, C. LIEFOOGHE

170 Partie 1

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Partie 3 : (...) JUSQU'À LA RECHERCHE D'UN ÉQUILIBRE.

Nous venons de voir que les tiers-lieux sont des sites gérés par et pour des citoyens ou bien par les pouvoirs publics, avec d'une part cette tendance à aller vers la démocratie culturelle pour les tiers-lieux culturels citoyens, et d'autre part cette tendance à la démocratisation culturelle pour les tiers-lieux culturels institutionnels. Il existe un entre-deux qui combine ceci, que l'on appellera ici les tiers-lieux culturels équilibrés. Ce sont des lieux relevant du domaine public, par exemple, mais avec une gestion libre, dans la programmation essentiellement. C'est à nouveau une recherche d'hybridation, entre la fabrique citoyenne et l'institutionnel. La meilleure définition revient à R. BESSON : « les tiers-lieux culturels se positionnent comme des interfaces entre l'upperground des Institutions culturelles, et l'underground des habitants, usagers et des sphères culturelles et artistiques émergentes et alternatives »171. Les exemples sélectionnés pour illustrer cette partie sont le Château Ephémère (fabrique sonore et numérique) de Carrières-sous-Poissy, La Quincaillerie de Guéret, la Condition Publique de Roubaix, la Médiathèque aux Mureaux et le Medialab Prado de Madrid. Grâce aux similitudes et aux différences entre ces établissements, mais aussi avec de brefs rappels des cas évoqués en amont, il sera possible de dégager des critères, de manière non exhaustive, quant aux conditions nécessaires au fonctionnement d'un tiers-lieu culturel dans ses missions de démocratie et démocratisation culturelles. Ces conditions nécessaires peuvent découler de trois étapes : (se) réinventer, (s') accorder et (s') équilibrer.

Au préalable, il est nécessaire ici de justifier le choix de placer une médiathèque dans la catégorie des tiers-lieux culturels équilibrés. Après avoir pris connaissance des enjeux liés aux bibliothèques notamment en milieu rural, on s'aperçoit que la bibliothèque et la médiathèque sont comme à part. Ce sont des lieux de vie pour les citoyens, qui sont un point de rendez-vous, d'échanges, notamment grâce à la fréquentation des jeunes publics et des personnes plus âgées qui sont toutes proches géographiquement172. Le personnel de telles structures doit avoir fait « un énorme travail sur l'accueil et sur sa posture par rapport à l'usager »173.

La Médiathèque située aux Mureaux est entrée dans le réseau des équipements culturels de la Communauté urbaine GPS&O en 2016, lors de la fusion de six EPCI. Elle se veut structurante du réseau des établissements de la lecture publique. Plusieurs activités y sont animées, comme la présence d'un pôle linguistique, des sessions de révisions pour les futurs bacheliers, des résidences d'auteurs (récemment Lucie Félix), des initiations en informatique pour les débutants, des activités pour les jeunes publics ...174 La Médiathèque existe depuis maintenant une vingtaine d'années. La gestion de la

171 L'hypothèse des tiers-lieux, R. BESSON

172 Annexe 19 : entretien M. ROBERT

173 Annexe 20 : entretien H. BEUNON

174 http://mediatheque.lesmureaux.fr

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Médiathèque revient en intégralité à la direction culture de la Communauté urbaine GPS&O. Le fait que la Médiathèque aux Mureaux puisse entrer dans deux catégories différentes montre bien le flou qui entoure l'objet du tiers-lieu culturel. Cet établissement de la lecture publique possède l'aspect institutionnel descendant offrant des cours d'apprentissage du français à des personnes désireuses d'assimiler la culture française175.

C'est également un lieu de vie qui revitalise176 le territoire, et donc va au-delà du marketing territorial. De plus, la direction de l'établissement met en avant la nécessité de la médiation auprès des publics divers qui fréquentent le lieu, qui échangent avec le personnel177. Le choix de placer la Médiathèque et la lecture publique ici plutôt que parmi les tiers-lieux culturels institutionnels est délibéré. En effet, bien que ces lieux soient parfois des objets politiques servant d'appui pour le marketing territorial et pour l'attractivité, et qu'ils soient en posture de montrer (descendance)178, ils mettent aussi au coeur de leurs projets d'établissement le citoyen, mutualisent les moyens humains et techniques et oeuvrent pour le développement du lien social par de l'apprentissage entre pairs179 : « le fonctionnement des bibliothèques troisième lieu est centré sur les usagers, et fait une place significative aux outils numériques et aux nouveaux modèles d'apprentissage (imprimantes 3D, serious games, plateformes collaboratives, etc.) »180.

40

175 Annexe 19 : entretien M. ROBERT

176 Les bibliothèques rurales, un enjeu pour la vitalité des territoires, A. JACQUET

177 Annexe 20 : entretien H. BEUNON

178 Supra 175 : Les primo arrivants recherchent cette position d'élève/enseignant, notamment dans l'apprentissage de la langue française et de l'assimilation de la culture française.

179 IBID

180 L'hypothèse des tiers-lieux culturels R. BESSON

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 7 : Ré-envisager, apporter du sang neuf dans le champ culturel (...)

Donner une nouvelle dimension à la culture est lié à l'émergence de nouvelles technologies, comme cela a déjà été mentionné en amont. Les tiers-lieux culturels équilibrés possèdent souvent de nouvelles technologies notamment pour la création. Par exemple, le Château Ephémère possède un FabLab, appelé le Vanderlab181, et met à disposition des médiateurs. Ces derniers interviennent à la fois auprès des artistes, en « les accompagnant dans leur prototypage de dispositifs » et auprès des citoyens, dans le but de les aider à « acquérir des compétences artistiques », de les « sensibiliser aux usages créatifs du numérique », de réduire la fracture numérique. On peut notamment voir les médiateurs guider le public dans l'emploi de la découpeuse laser et/ou de l'imprimante 3D182. Leur Un FabLab est une forme de tiers-lieu qui peut entrer dans la catégorie des makerspaces, c'est-à-dire des tiers-lieux de fabrication numérique. Au Château Ephémère, il y a la volonté de lier l'usage de ces technologies à la création sonore : « le Vanderlab a pour vocation de populariser l'accès et les usages des nouvelles technologies, tout en ajoutant une dimension nouvelle liée aux pratiques sonores ». Ouvert à la fois aux créateurs et au public, on y retrouve la philosophie du do it yourself : « l'espace est convivial et y règne l'esprit `Do It Yourself' ». Le Fablab est parfois considéré comme le module caractéristique du classement du site dans la catégorie des tiers-lieux183. Les tiers-lieux culturels sont une manière de « fixer les innovations numériques »184, de sensibiliser aux usages du numérique. Le Château Ephémère présente une thématique tournée vers l'art numérique. Il possède un Fablab mais aussi des studios d'enregistrement, un restaurant, des aménagements paysagers (potager, land-art, installations autour des arts numériques et de la botanique). La gestion de l'établissement est menée par une équipe de trois personnes quant à la coordination générale et de cinq personnes formant une équipe permanente. Le projet du Château Ephémère est issu du projet de réhabilitation du château de William K. Vanderbilt par l'association Caserne Ephémère, après le lancement d'un appel à projet émis par l'ancienne CA2RS en 2012. En partenariat avec l'EPAMSA, la CA2RS « se dote d'une volonté de transformer le site en espace culturel multifonction tourné vers les arts numériques »185. Le Château Ephémère se revendique comme un « laboratoire de création numérique » mais également comme un « lieu d'échange qui interroge les enjeux liés aux nouvelles technologies ». Le bâti, de style anglo-normand, appartient à la Communauté urbaine GPS&O et le fonctionnement est assuré par une DSP, ce qui est un équilibre dans la gestion du tiers-lieu culturel.

Aujourd'hui, il semble qu'une une nouvelle vision de la culture et du patrimoine émerge ; cette nouvelle vision peut apporter de nouveaux modèles de lieux culturels, et parallèlement de

181 https://chateauephemere.org/vanderlab/

182 Annexe 21 : entretien S. CAMPOS

183 Annexe 16 : entretien R. BESSON

184 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

185 https://chateauephemere.org/le-projet/presentation-et-acteurs/

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

nouveaux modèles de tiers-lieux culturels. Par exemple, des friches industrielles mutées en lieux culturels tendent à « défendre une vision dynamique du patrimoine culturel »186. Cette mutation peut trouver son origine dans les contextes de « restriction économique et sociale » : « nouveau concept susceptible de guider l'intervention publique en matière de culture : la démocratie culturelle, et avec une nouvelle conception de la culture, moins restrictive, moins élitiste, et moins hiérarchisée »187. Conception encore au stade d'hypothèse, les chercheurs tendent néanmoins à penser qu'une convergence des modèles, des motivations et des objectifs est en train de s'opérer. D'ailleurs, cela est mis en place à La Condition Publique puisque son directeur, J.-C. LEVASSOR, a déclaré : « la contrainte économique et le contexte urbain et social nous poussent à innover pour réinventer notre modèle culturel et devenir un lieu de rayonnement, tout en associant le quartier à notre projet »188. Ce « laboratoire créatif »189 et lieu de vie, de travail et de diffusion est un EPCC, dont les membres du conseil d'administration sont des personnels de la Région Hauts de France, de la Métropole Européenne de Lille, de la Ville de Roubaix et le département du Nord. Ce lieu existe depuis maintenant quatorze ans. Avant 2016, il y avait une friche industrielle « réhabilitée en manufacture culturelle »190. Le nouveau projet a pour axe principal sa transformation en un « laboratoire créatif, pluridisciplinaire, au croisement entre art, créativité, urbanisme et développement durable ». Pour cela, l'établissement s'appuie sur des « démarches collaboratives avec les acteurs culturels ainsi qu'avec les acteurs économiques, associatifs, universitaires, écologiques, sportifs, sociaux ou de l'urbanisme ». La Condition Publique a permis de mailler le quartier en mettant en place la participation citoyenne, une économie collaborative, une pépinière d'entreprises, ... Ce tiers-lieu culturel est intégré dans « le réseau métropolitain et régional de l'innovation ».

Les mutations des lieux culturels sont en quelque sorte le reflet de la mutation du monde aujourd'hui : le social, l'économique, la consommation, l'éthique, les réseaux sociaux, la communication etc. Cette idée de mutation est appuyée par le propos de l'élue à la culture de Chanteloup-les-Vignes, L. KHARJA : « avec la digitalisation et le développement des réseaux sociaux, la culture entre dans les foyers et n'est plus nécessairement destinée à une élite »191. On peut citer ici le Medialab Prado qui met en place des « espaces192 ouverts de réflexion critique sur les technologies numériques et leur impact sur la société »193. Les objectifs du Medialab Prado sont tournés autour du citoyen, autour de la mise en place de « projets concrets » grâce à la rencontre de personnes de différents « mondes », « favoriser une atmosphère de coopération et d'échange » ... Ce tiers-lieu culturel porte une volonté

186 L'hypothèse des tiers-lieux, R. BESSON

187 La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, A.CHATZIMANASSIS

188 L'avenir est dans la friche. Etats généreux de la culture, Y. OREMIATZKI

189 http://www.laconditionpublique.com/

190 http://www.laconditionpublique.com/le-lieu/le-projet/

191 Annexe 15 : entretien L. KHARAJA

192 Annexe 9 : les différents `Labs' du Medialab Prado

193 https://www.medialab-prado.es/medialab/mas-informacion/que-es

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

forte sur le numérique, notamment la culture numérique : « sa vision de la culture numérique est que les outils et les pratiques numériques de la culture libre peuvent servir d'inspiration et favoriser une culture accessible et construite par tous ». Il est important de mentionner que le Medialab Prado se voit comme un laboratoire citoyen, ce qui aurait pu suggérer l'idée ne pas le considérer comme un tiers-lieu culturel équilibré. Néanmoins, son lien avec la municipalité de Madrid conduit à le classer ainsi. En effet, le Medialab Prado doit « développer des projets transversaux avec d'autres domaines de la Mairie de Madrid ». Ce tiers-lieu existe depuis 2013 ; la mairie de Madrid a toujours souhaité faire de ce lieu un espace culturel, avant l'aboutissement à la forme de tiers-lieu culturel194.

Les bibliothèques et médiathèques se comptent en effet parmi les meilleurs exemples de ce changement global des fonctionnalités des lieux culturels et d'apprentissage. La lecture publique et ses établissements ont « subi »195 l'essor exponentiel du numérique dans le quotidien et dans l'accès rapide à l'information, à portée de main (littéralement et concrètement, avec les smartphones devenus accessibles à tous). Ils ont dû s'adapter, et créer de nouveaux services aux usagers196. Par exemple, la Médiathèque aux Mureaux accueille aujourd'hui une Micro Folie dans son enceinte197.

En somme, la culture aujourd'hui a besoin d'innover pour « attirer, bien que cela ne soit pas facile »198. C'est un souhait émis par les pouvoirs publics et par la vie citoyenne que de faire bouger les systèmes. Ainsi, une coopération entre les acteurs qui souhaitent réussir la transition est envisageable et doit être envisagée : « [...] faire évoluer les systèmes, donc c'est bien d'être dedans pour le faire »199. On peut alors évoquer l'idée de « décloisonner et réinventer la culture »200. Créer de l'art « ailleurs » devient possible dans de « nouveaux lieux de fabrication » comme les anciennes friches.

La transformation des champs économiques et sociétaux a des conséquences directes et visibles dans l'espace et notamment dans les zones urbaines. C'est ainsi qu'est née une nouvelle forme d'urbanisme : l'urbanisme transitoire. Il est le résultat des attentes de décisions des pouvoirs publics par rapport à des espaces vacants et dans lesquels parfois des activités culturelles se sont installées201. « Pour l'IAU, « l'urbanisme transitoire englobe toute initiative qui vise, sur des terrains ou bâtiments inoccupés, à réactiver la vie locale de façon provisoire, lorsque l'usage du site n'est pas déterminé ou

194 https://es.wikipedia.org/wiki/Medialab-Prado#Historia

195 Internet et le numérique ont fait vivre une crise aux bibliothèques puisqu'Internet est un accès direct à l'information. Or, c'était la mission principale des bibliothèques ; « face à cet essoufflement, il devenait essentiel de renouveler le modèle » Les bibliothèques, des troisièmes lieux culturels à forte valeur humaine ajoutée, M. SERVET

196 Chapitre 8

197 Partie 2

198 Annexe 17 : entretien J. LECORBEILLER

199 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

200 L'avenir est dans la friche. Etats généreux de la culture, Y. OREMIATZKI

201 Partie 1

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

que le projet urbain ou immobilier tarde à se réaliser » »202. Ainsi, les tiers-lieux, qui sont souvent dans ce cas éphémères comme l'Aérosol à Paris203, trouvent des lieux d'implantation. Ils sont des « acteurs de la transition »204. Le projet de l'Aérosol prend à coeur son rôle à jouer dans la phase de construction du nouveau quartier : « notre objectif est de faire de cette occupation temporaire sur ce site industriel, un espace permettant à la fois de s'interroger collectivement sur la manière de réinventer le quartier, de construire un trait d'union entre La Chapelle et Rosa Parks afin d'amorcer la transformation en véritable quartier de ville »205. Les tiers-lieux culturels éphémères permettent aux acteurs publics de choisir la mise en place un lieu culturel temporaire afin d'apporter une valorisation à des quartiers. Dans le cas de l'Aérosol, c'est le thème de la street culture qui est mis en avant, une culture encore peu diffusée par les institutions culturelles publiques mais qui est populaire, dans le sens où une grande partie de la population française y est sensible. Ce site propose aujourd'hui des activités autour de l'apprentissage du graff, des visites dans le musée (dont certaines oeuvres prêtées sont visibles sur le site Internet de l'Aérosol), un mur de graffitis de libre expression ...

La culture est alors vue sous un angle inédit et apporte de nouvelles valeurs notamment autour de l'économie de connaissances. Ainsi, l'innovation dans le domaine culturel qui s'opère depuis quelques années déjà, a permis aux territoires de créer de la valeur autour du développement social, culturel et économique, grâce à « l'exercice de la citoyenneté » dans les tiers-lieux culturels206. Les artistes peuvent par exemple prendre une nouvelle position dans la société207.

Le tiers-lieu est un moyen de réaliser ses « utopies », « l'utopie qui consistait à croire qu'il y a des voies hors des chemins battus, l'utopie qui permet de songer que l'on peut sortir de la compétence ordinaire et juridiquement très encadrée d'une collectivité [...] »208. La place à l'expérimentation et au « bidouillage »209 est donc mise en avant pour tous les tiers-lieux culturels équilibrés : à la Médiathèque (Fablab), à La Quincaillerie (« montrer qu'il y a d'autres moyens de faire, c'est l'essence même des tiers lieux »210), au Château Ephémère (Fablab), au Medialab Prado (« lieu qui autorise l'expérimentation »211) et à la Condition Publique. L'expérimentation peut donner naissance à des « métissages des pratiques culturelles »212, notamment entre la culture et les sciences213, objectif remis au goût du jour par les politiques culturelles publiques. Le Medialab Prado souhaite également

202 Pourquoi l'urbanisme transitoire est à la mode ?

203 Annexe 5 : liste des projets d'urbanisme transitoire de SNCF Immobillier

204 La coopérative Tiers Lieux : peut-on faire école des tiers lieux ?, L. AIGRON L. MANUEL

205 http://www.laerosol.com/

206 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

207 Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA

208 Mot du Président de la Communauté d'Agglomération du Grand Guéret

209 Les « tiers lieux », des microcultures innovantes ?, O.CLEACH, V.DERUELLE, J.-L. METZGER

210 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

211 Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec M. GARCIA Propos recueillis par R. BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

212 Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA

213 Annexe 16 : entretien R. BESSON

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

travailler le lien entre les sciences et la culture grâce à la médiation : « [le Medialab Prado et d'autres exemples de tiers-lieux culturels cités] réinventent leurs modèles de médiation aux sciences »214. C'est une nouvelle fois la volonté de conduire le spectateur à s'interroger « sur l'apport et les contenus scientifiques »215 dans la société.

Le tiers-lieu culturel est un « amplificateur et catalyseur d'initiatives » (R. BESSON) : tous les citoyens peuvent tenter leur chance pour `réveiller l'artiste qui sommeille en eux'. Ainsi, La Condition Publique est née en 2004 comme une fabrique culturelle. Aujourd'hui le directeur veut aller plus loin et en faire un laboratoire, terme plus propice à l'expérimentation et au faire actif. Les acteurs et porteurs de tiers-lieux culturels équilibrés mettent ainsi en place des démarches alternatives afin d'atteindre les objectifs imaginés et conçus, comme permettre aux citoyens de mieux appréhender la culture (démocratie et démocratisation culturelles).

Le renouveau passe par de nouvelles organisations, innovation organisationnelle, comme c'est le cas au Medialab Prado : « à une époque de grands changements, de nombreux acteurs font la promotion d'autres modèles d'institutions dans lesquels les citoyens sont actifs »216. Ainsi, émerge l'idée que les citoyens sont plus que des destinataires d'une culture déconnectée de leurs préoccupations et de leur existence217. Le Château Ephémère suit également cette piste, de rendre le citoyen actif pour plusieurs raisons : le partage des connaissances, des savoir-faire, « et l'émergence d'une culture commune »218. Le Medialab souhaite faire de la démocratie directe avec le citoyen219. C'est de l'innovation organisationnelle expérimentée dans les tiers-lieux culturels. En pratique, La MYNE220 a dissous son conseil d'administration afin que le lieu ne soit géré que de manière collégiale (« conseil collégial »). De plus, les tiers-lieux culturels prônent la diminution des hiérarchies sociales entre les usagers et entre les employés.

Une fois la transformation et la mutation de la vision culturelle des acteurs acceptées, vient le moment de s'accorder autour des moyens et objectifs à agencer pour les tiers-lieux culturels équilibrés.

214 L'hypothèse des tiers-lieux culturels

215 IBID

216 « Le Medialab se situe dans ce contexte et veut jouer un rôle dans la transformation des institutions culturelles » (traduction Espagnol/Français) https://www.medialab-prado.es/medialab/mas-informacion/que-es

217 La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, A. CHATZIMANASSIS

218 Annexe 21 : entretien S. CAMPOS

219 Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec M. GARCIA Propos recueillis par R. BESSON traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

220 Partie 1

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 8 : (...) Pour ensuite s'accorder autour de partenariats, de réseau(x), d'objectifs communs (...)

Dans l'optique de mettre en pratique toutes ces pistes de nouveautés et d'aboutir à « réinventer les modes traditionnels d'intervention des collectivités »221, il est nécessaire pour les acteurs de tous bords, de trouver des axes communs d'intervention. S'accorder signifie ne pas « nuire au caractère ascendant » des tiers-lieux culturels citoyens et signifie élaborer des politiques de soutien aux projets. En effet, un poids trop important de l'acteur public peut « compromettre la neutralité politique (au sens politicien) du projet »222.

Les tiers-lieux culturels à portage public peuvent devenir des services à part entière, sans tomber dans l'externalisation des missions de service public. C'est le cas de La Quincaillerie223. Les salariés du tiers-lieu travaillent pour le développement territorial et pour l'animation numérique du territoire, sur l'appui de laboratoire224. Les pouvoirs publics peuvent émettre le souhait de se doter d'un tel lieu, comme la Friche Belle de Mai (Marseille), le subventionner mais sans gérer le fonctionnement, à la différence du Centquatre225. A l'inverse, des porteurs de projets issus de la société civile ont la possibilité d'aller à la rencontre des élus locaux pour proposer un projet culturel, comme Archipel 21.

La coopération entre acteurs et la mutualisation de ressources est nécessaire pour qu'un tiers-lieu culturel équilibré s'épanouisse. Ainsi, les établissements de la lecture publique, dénomination sous laquelle sont regroupées principalement les médiathèques et les bibliothèques226, se voient « métissés par de nouveaux services et irrigués par l'apport de nouvelles compétences »227, comme l'accompagnement vers l'insertion numérique. Les médiathèques et bibliothèques répondent bien à la définition de tiers-lieu, bien qu'OLDENBURG ne les mentionne pas directement (en revanche, le sociologue R. PUTMAN le fait)228. Pour aller plus loin, on peut ajouter que la lecture publique entrerait davantage dans la notion de tiers-lieu que d'autres sites, si l'on se réfère à l'article Les bibliothèques, des troisièmes lieux culturels à forte valeur humaine ajoutée de M. SERVET229. Les bibliothèques et médiathèques proposent aujourd'hui de nouvelles « fonctionnalités »230 à leurs usagers mais aussi avec leurs usagers. Ainsi, nous prendrons ici l'exemple de la fracture numérique et de l'accompagnement des usagers vers la maîtrise informatique. Cet apprentissage de l'informatique

221 Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », R. BESSON

222 Supra 218

223 Annexe 6 : services proposés à La Quincaillerie de Guéret

224 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

225 Partie 2

226 Bien sûr, il existe des établissements de la lecture publique qui sont associatifs, mais nous choisissons de considérer ici les établissements à gestion publique uniquement.

227 Les bibliothèques, des troisièmes lieux culturels à forte valeur humaine ajoutée, M. SERVET

228 IBID

229 Observatoire des politiques culturelles, N°52

230 Supra 208

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E. PESCHAUD

est possible grâce à la démocratisation de l'accès aux nouvelles technologies et aux ressources de l'informatique. Certains établissements, et même des réseaux de lecture publique, souhaitent accompagner les habitants d'un territoire dans leurs démarches administratives qui sont la plupart du temps aujourd'hui dématérialisées. Ainsi, le réseau lecture publique de GPS&O, avec à sa tête de réseau la Médiathèque aux Mureaux, propose de mettre en place pour l'année scolaire 2019-2020 une aide aux personnes souhaitant inscrire leurs enfants au CRD de Mantes-la-Jolie, autre établissement culturel (et d'enseignement) de la Communauté urbaine GPS&O. Les démarches concernant la CAF peuvent aussi faire l'objet d'un accompagnement étant donné la complexité des démarches, et surtout la difficulté pour les populations ne maîtrisant pas la langue française. Par ailleurs, la Médiathèque a mis en place des cours de français pour ses/ces populations et les a inscrites en 2017-2018 dans le dispositif CLEA231.

Les pouvoirs publics ont ainsi pris conscience qu'ils devaient proposer un outil adapté, un « environnement protecteur » à l'échelle du citoyen, pour lutter contre des problèmes de société liés à l'intégration de tous. Il y a là la véritable vocation à « remettre l'humain » au coeur des projets d'établissement232. Mise à part la fracture numérique et l'insertion numérique, les établissements de la lecture publique peuvent aider à la recherche d'un travail, être des salles de co-working ou de télétravail. Du côté des collectivités, la crise économique et la réforme territoriale poussent à repenser les services et par conséquent à la « mutualisation interservices »233.

A. BURRET va plus loin en défendant la position que les tiers-lieux sont une « nécessité pour les territoires et pour les générations à venir »234. La coopération entre acteurs est vitale235 pour les territoires mais également pour les tiers-lieux eux-mêmes. En effet, les charges de fonctionnement sont trop importantes pour qu'un acteur privé les supporte seul236 ; dans ce cas, la coopération se fait sur plan financier. Du point de vue culturel, les tiers-lieux peuvent permettre « d'ancrer la culture dans les territoires »237, notamment par la co-production. La coopération est possible lorsque les gestionnaires du lieu parviennent à des compromis suite à des critiques de la politique238, par exemple. « Les liens doivent être solides avec les investigateurs du projet, donc il y a toujours des enjeux à être en de bons termes avec les pouvoirs publics »239.

L'hybridation d'un tiers-lieu culturel équilibré repose sur un objectif social « affirmé » avec le mélange de « participation citoyenne » et d'« action publique ». Ces deux visions permettent alors de

231 Lien avec l'assimilation de la culture française par les primo arrivants

232 Les bibliothèques, des troisièmes lieux culturels à forte valeur humaine ajoutée, M. SERVET

233 Les bibliothèques rurales, un enjeu pour la vitalité des territoires, A. JACQUET

234 Tiers lieux et plus si affinités, A. BURRET

235 Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Y. PADILLA

236 Le tiers lieu en territoire rural : un lieu unique aux impacts multiples, S. PLION, V. LECOMPTE

237 Les tiers lieux culturels - Chronique d'un échec annoncé, R. BESSON

238 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

239 Annexe 21 : entretien S. CAMPOS

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

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répondre à des enjeux de société auxquels les acteurs faisant vivre ledit tiers-lieu culturel sont confrontés. En guise d'exemple, La Quincaillerie souhaite comprendre quels sont les besoins des associations240, souhait qui est par ailleurs l'un des moteurs du tiers-lieu et qui est aussi mentionné dans ses objectifs.

L'urbanisme transitoire241 est un des exemples concrets qui montre que le tiers-lieu culturel semble apporter une solution adaptée au cadre de la coopération entre l'action publique et l'action citoyenne, avec la culture comme vecteur. Une entité publique mettant à disposition l'un de ses espaces libres pour des actions culturelles permet d'éviter des squats illégaux ou des frais de gardiennage. C'est donc bien ce qui s'est passé avec l'Aérosol à Paris : SNCF Immobilier242 a fait confiance à Polybrid Production et Maquis'art pour créer un lieu éphémère. En plus de lieux intermédiaires, l'urbanisme transitoire donne naissance à de nouveaux métiers, « qui mettent en relation les propriétaires d'espaces vacants et les acteurs culturels associatifs »243 .

Ainsi, la culture devient une sorte de prétexte pour dynamiser le territoire. Le territoire est structuré autour d'acteurs différents, pour différentes populations. Le tiers lieu culturel combine les besoins de tous et participe implicitement à la démocratisation culturelle et à la démocratie culturelle.

La coopération et le partenariat prennent la forme de réseaux. Ces réseaux de tiers-lieux culturels maillent les territoires, avec comme modèle économique l'ESS244. Une coopération est érigée entre les tiers-lieux245. Créer un réseau de tiers-lieux est l'une des volontés de la métropole lilloise, lorsque Lille était en 2004 la capitale européenne de la Culture. Dans cette métropole, il existe un tiers-lieu culturel équilibré, La Condition Publique. Appartenir à des réseaux permet alors la professionnalisation et la structuration des tiers-lieux246. La Quincaillerie, quant à elle, est inscrite dans le réseau des tiers-lieux creusois247 et dans le réseau de La Coopérative des Tiers-lieux en Nouvelle Aquitaine. Le Medialab Prado de Madrid est aussi dans cette optique de « réseautage »248. Cette capacité à intégrer des réseaux est une des conditions nécessaires pour le développement voire même pour sa survie : « la viabilité économique des laboratoires citoyens dépendra de leur capacité à faire partie de réseaux de collaboration avec d'autres organisations locales, étatiques et internationales. Pour cela, le soutien simultané de différentes institutions publiques et privées est considéré comme important »249. Les tiers-lieux culturels, modèles et concepts fragiles, ont la nécessité d'obtenir des financements, et

240 Supra 238

241 Chapitre 7

242 Annexe 5 : liste des projets d'urbanisme transitoire de SNCF Immobilier

243 Grands Voisins, Halle Papin, 6B... Et le squat devient fréquentable, E. CHAUDIEU

244 La coopérative Tiers Lieux : peut-on faire école des tiers lieux ?, L. AIGRON L. MANUEL

245 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

246 AMO pour le développement d'un réseau de Tiers Lieux à l'échelle métropolitaine, R. BESSON

247 Annexe 27 : carte des tiers-lieux creusois

248 https://www.medialab-prado.es/medialab

249 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

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comme nous l'avons vu, le financement uniquement issu d'acteurs privés est probablement voué à l'échec en raison du manque de soutenabilité des lieux. Par conséquent, la recherche de leur financement se tourne vers les collectivités territoriales, ce qui « conduit à l'institutionnalisation »250.

Les politiques confrontées à l'urbanisme transitoire cherchent donc à leur tour, à redynamiser des quartiers, ce qui va au-delà de l'activation de l'attractivité territoriale. Les quartiers prochainement façonnés intègrent parfois déjà les projets de tiers-lieux, comme le futur éco quartier dans lequel se situent les actuels Grands Voisins de Paris251. Le tiers-lieu culturel devient alors un outil structurant d'un futur quartier, grâce à la démocratie culturelle possible grâce à l'action menée en plus de la diffusion culturelle. Certaines entités ont pris conscience de l'impact d'un tiers-lieu culturel dans un quartier, puisque par exemple la Caisse des Dépôts souhaite entrer en contact avec le tiers-lieu culturel de Guéret, La Quincaillerie252. La Caisse des Dépôts est curieuse de comprendre le fonctionnement de son développement territorial. Cette structuration territoriale autour de et par le tiers-lieu culturel est notamment visible dans les zones rurales, grâce à la « dimension multifonctionnelle et sociale » de ces tiers-lieux ruraux253. Les bibliothèques et médiathèques sont aussi des espaces qui contribuent à la dynamisation et à la mutualisation de moyens au sein des zones rurales. Lorsque la bibliothèque est portée par la municipalité, elle peut être la source du soutien du « dynamisme et de l'économie locale », de « recréation du lien social »254.

De plus, ces tiers-lieux ruraux, comme le cas de La Quincaillerie à Guéret255, peuvent être sources d'innovation pour le territoire, voire même devenir des « points névralgiques »256 et « palier à la désertification »257. La Quincaillerie de Guéret est née en 2012 d'une proposition de projet citoyen soumise au Président de la Communauté d'agglomération Grand Guéret, qui a été séduit par ce concept de tiers-lieu culturel. Monsieur E. CORREIA qualifie cette idée de départ « d'utopie ». La Quincaillerie est aujourd'hui un service au sein de cette communauté, proposant lui-même différents services258 comme de la médiation numérique, du co-working, un Fablab etc...Ce tiers-lieu culturel souhaite répondre à différents objectifs, en lien avec une « approche sociologique »259 du territoire dont « fédérer autour de ces pratiques innovantes les acteurs locaux de l'éducation populaire, les médias associatifs et la population », « croiser les médias associatifs locaux (Polymédia Local de

250 « Les friches culturelles sont un acte de reconquête du territoire » Françoise Luchini (géographe, université de Rouen), H. GIRARD

251 Annexe 28 : tableaux D1 à D9

252 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

253 « Ils sont en effet souvent portés par une ambition politique de revitalisation des centres-bourgs. » La régénération des territoires ruraux par les tiers lieux. Le cas des tiers lieux creusois, R. BESSON

254 Le tiers- lieu en territoire rural : un lieu unique aux impacts multiples, S. PLION V. LECOMPTE

255 Ou bien la bibliothèque tiers- lieu à Lezoux (annexe 19 : entretien M. ROBERT)

256 La régénération des territoires ruraux par les tiers- lieux. Le cas des tiers- lieux creusois, R.BESSON

257 Supra 252

258 Annexe 6 : services proposés à La Quincaillerie de Guéret

259 https://www.laquincaillerie.tl/

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Proximité) [...] Plus globalement, cela permet la mutualisation de moyens humains techniques et technologiques »260 ...

En somme, le tiers-lieu est une porte d'entrée aux nouvelles populations, que ce soit des néo-ruraux261 ou des primo-arrivants262. Ces tiers-lieux culturels offrent la possibilité à ces personnes de mieux appréhender le nouveau territoire dans lequel ils seront amenés à vivre et/ou travailler.

La somme de tous ces arguments aboutit à l'idée d'une liberté plus grande, puisqu'un commun accord est trouvé : autorisation officielle à l'expérimentation et à la recherche d'expérimentation pour davantage de création de valeurs. C'est le cas des résidences artistiques accueillies au Château Ephémère ou peut-être prochainement à La Quincaillerie263. Les résidences présentent l'avantage d'avoir moins de fixité dans ce qui est attendu d'une commande publique plus classique, notamment le 1% artistique. Une résidence artistique peut se définir comme tel : « l'accueil d'artistes dans un lieu où sont mis à leur disposition les moyens et les outils qui leur permettent de mener à bien un travail de création artistique. Cet accueil se fait dans un désir de partage de compétences et donc de réciprocité »264. Les financements publics laissent, dans le cadre des résidences, plus de place à l'expérimentation. Cela a été le cas avec un collectif intervenu au sein du CLEA de GPS&O en 20172018, un collectif issu de l'association Wheeldo, tournée vers un Fablab. Ce collectif s'est d'ailleurs produit au Château Ephémère lors d'un temps de diffusion du CLEA, c'est-à-dire la présentation de leur art au public. Les résidences ne subissent pas la contrainte des programmations culturelles.

Le tiers-lieu culturel et sa capacité à expérimenter dans plusieurs domaines laissent une libre expression à tous avec comme porteur de projet un acteur public ou privé. De plus, ce porteur de projet peut potentiellement ne pas relever du domaine culturel, ce qui laisse une encore plus ample liberté aux artistes. C'est le cas de la SNCF Immobilier, porteuse de projets culturels, spécifiquement dans le cadre de l'urbanisme transitoire.

Partager, mutualiser, « créer un vivier d'échanges »265, se fédérer permettent aux tiers-lieux culturels de s'assurer une sorte de pérennité en dépit de leur modèle encore précaire. Les citoyens et les acteurs publics peuvent ainsi compter les uns sur les autres, pour apporter chacun leur expertise dans le champ culturel parfois élargi au champ social. Les partenaires apprennent les uns des autres, à l'image des volontés ancrées dans les tiers-lieux culturels. Ainsi, combiner des forces permet de mieux

260 IBID

261 Supra 252

262 Supra 255

263 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX : « avoir une résidence c'est peut-être dans un plus long terme »

264 Accueillir une résidence, réflexions et propositions, Le Transfo

265 Annexe 15 : entretien L. KHARJA

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appréhender les difficultés que peuvent rencontrer certaines politiques et certains projets pour rendre possibles la démocratie culturelle et la démocratisation culturelle.

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Chapitre 9 : (...) et parvenir à l'équilibre.

L'équilibre des tiers-lieux dont il est question ici peut être défini par la citation suivante : « Ces tiers-lieux se sont inscrits, dès leur origine, dans les interstices des mondes de l'art, entre lieu public et lieu privé, entre un lieu ouvert et fermé, à travers des démarches qui portaient à la fois une dimension politique - comme acteurs agissant pour la vie de la cité - et artistique »266. Toute l'hybridité y est mentionnée : entre le public et le privé, entre l'art et le politique. Le tiers-lieu culturel est donc un lieu stratégique qui touche l'ensemble de la « Cité ».

Les acteurs publics et les acteurs issus de la vie civile peuvent donc s'entendre pour développer la culture et son accès au plus grand nombre, grâce aux tiers-lieux culturels équilibrés. Cela peut notamment éviter l'entre soi et une institutionnalisation d'un lieu à fonctionnement entièrement public. Ceci est visible par exemple au niveau du financement, comme à La Quincaillerie qui est autonome dans la recherche de partenaires financiers. Elle est chargée de faire de la veille afin d'obtenir des subventions à hauteur de 80% ; les 20% restants sont issus de la Communauté d'Agglomération porteuse du projet267.

Les projets de tiers-lieux culturels tendent ainsi à réduire les distances entre les institutions publiques et les citoyens, « en créant un modèle d'établissement proche et ouvert, dont les communautés se sentent membres »268. Le Medialab Prado parle de réduction de distance entre les producteurs de contenu culturel et les récepteurs, mais aussi de réduction de distance entre l'institution, la culture et le citoyen269. Le rôle passif du visiteur est évoqué : c'est dorénavant le but de la politique du Medialab Prado, ancien centre d'art numérique, que de faire participer le visiteur-spectateur à la création.

Désormais, la place des tiers-lieux culturels dans les collectivités dépasse le simple marketing territorial270, puisque les espaces hybrides ont une « place centrale dans les politiques culturelles des villes européennes »271. L'enjeu, s'adapter à la demande272 citoyenne et aux enjeux politiques, est tel que le tiers-lieu culturel semble être le meilleur compromis équilibré. Savoir écouter ce qui plaît est un enjeu politique qui participe à la démocratie citoyenne. En effet, le tiers-lieu concilie l'aspect du lieu de vie, qui donne à son tour le sentiment de convivialité, et l'outil de territoire273. Par exemple, le Château Ephémère organise régulièrement des after-works, des moments conviviaux ouverts au

266 Dynamiques organisationnelles, modes de gestion et institutionnalisation de différents tiers lieux culturels, N. AUBOUIN

267 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

268 Laboratorios ciudadanos: espacios para la innovación ciudadana [1] (traduction Espagnol/Français)

269 Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec M. GARCIA Propos recueillis par R. BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

270 Partie 2

271 Ville et création artistique. Pour une autre approche de la géographie culturelle, B. GRESILLON

272 Annexe 17 : entretien J. LECORBEILLER

273 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

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public, durant lesquels il est possible de visiter le site, de se restaurer et d'apprécier un évènement artistique274. De plus, les lieux tels que La Quincaillerie ou le Château Ephémère autorisent la diffusion et l'expérimentation. Ainsi, les résidents du Château Ephémère sont sélectionnés par un comité composé d'acteurs publics et privés ; on peut en conclure qu'un consensus entre les différents jurés s'opère au moment des délibérations.

L'accès à la culture relève de la compétence des pouvoirs publics, mais est en quelque sorte ancrée dans l'ADN des tiers-lieux275. Les tiers-lieux culturels, s'ils sont construits dans l'idée d'un lieu ouvert à tous sans distinction, inspirent la confiance propice à la démocratie culturelle, plutôt qu'à la démocratisation culturelle susceptible de rester une forme de culture sacralisée et sanctuarisée. Entrer en contact avec une culture qui nous ressemble276 est un moyen de se cultiver, et le tiers-lieu culturel semble être le meilleur moyen pour y parvenir. Ainsi, le Medialab Prado, né d'une initiative publique au début des années 2000 a décidé de mettre en avant les termes de « laboratoires citoyens » et de bannir d'autres termes, tels que « éducation », « culture » qui sont pour M. GARCIA « trop marqués conceptuellement et institutionnellement »277.

L'underground et l'upperground ont été cités plus haut ; les tiers-lieux culturels peuvent maintenant répondre à la logique du dit middleground, une notion née du milieu économique et du management de l'innovation278. Ce dernier peut avoir le rôle de « transfert »279 de connaissances entre les deux autres. Le middleground est lié à l'idée de la « ville créative », à la relation qui peut exister entre le formel et l'informel. Cette notion a été reprise par les tiers-lieux280. Cependant, les acteurs des tiers-lieux culturels évoqués ici ne semblent pas encore s'être saisis pleinement de l'idée du middleground.

Les tiers-lieux culturels permettent la rencontre afin d'augmenter la créativité de tous les acteurs (« c'est mélanger l'économique, le social, le culturel »281), et afin de diffuser des cultures.

Les tiers-lieux culturels équilibrés ne sont pas des « externalisations de la fonction publique »282 mais bien des lieux à part entière avec leurs missions qui leur sont propres. On a ainsi relevé les cas du Château Ephémère, de La Condition Publique, de La Quincaillerie, la Médiathèque

274 Annexe 25 : after-work et visite guidée du Château Ephémère par S. CAMPOS

275 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX : « [...] l'accès aux droits culturels sans le vouloir, c'est notre nature »

276 Annexe 17 : entretien J. LECORBEILLER

277 Supra 237

278 Annexe 16 : entretien R. BESSON

279 Underground, upperground et middle-ground : les collectifs créatifs et la capacité créative de la ville, L. SIMON

280 Supra 278

281 Supra 275

282 Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec M. GARCIA Propos recueillis par R. BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

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aux Mureaux et du Medialab Prado. Ces exemples de tiers-lieux équilibrés présentent de nombreuses similitudes dans leurs caractéristiques283.

Tous ces tiers-lieux culturels, ou lieux intermédiaires (c'est ainsi que se définit le Médialab Prado284) sont ancrés dans leur territoire d'accueil : aussi bien pour le dynamiser et/ou le structurer que pour mener à bien des projets en direction des populations de proximité. Et ce, que le lieu soit dans une zone urbaine ou rurale (voire périurbaine pour le cas du Château Ephémère). La participation citoyenne est présente ; les visiteurs de ces cinq tiers-lieux culturels ont la possibilité de collaborer aux projets de création menés, mais aussi d'assister à des temps de diffusion (excepté pour le Medialab Prado). On comprend alors que la dimension sociale est nécessaire pour que le tiers-lieu devienne un véritable lieu de vie foisonnant et structurant la vie culturelle des habitants. L'importance du numérique semble dépendre des affinités que le lieu entretient avec cette notion, puisque deux lieux sur cinq le considèrent comme important (La Quincaillerie et le Château Ephémère). Le Château Ephémère en a même fait sa thématique phare (Château Ephémère, fabrique sonore et numérique). Toutefois, ces cinq tiers-lieux culturels soumettent des projets et des activités orientés vers de l'expérimentation et se revendiquent comme des laboratoires.

L'étude des tiers-lieux culturels équilibrés montre qu'ils combinent toute la diversité des modes de fonctionnement et des objectifs qui puissent exister. L'équilibre se fait du point de vue du lien qui existe entre l'autogestion citoyenne et la gestion publique totale. L'objectif de toucher une diversité de publics proches est commun. Cette prise de conscience d'aller vers l'équilibre montre la volonté de ces tiers-lieux culturels de « sortir d'une vision élitiste et diffusionniste de la culture des savoirs »285. Cela indique bien que, consciemment ou inconsciemment, la démocratie et la démocratisation culturelles, et la lutte contre la ségrégation culturelle est bien inscrite au coeur des projets des tiers-lieux culturels équilibrés.

54

283 Annexe 28 : tableaux C1 à C9

284 IBID

285 L'hypothèse des tiers-lieux culturels R. BESSON

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CONCLUSION

Après avoir analysé et comparé plusieurs exemples de tiers-lieux culturels, il nous est maintenant possible de répondre à notre problématique de départ, à savoir comment un tiers-lieu culturel peut jouer un rôle dans la démocratisation culturelle. L'étude de différents tiers-lieux culturels (différents par leur fonctionnement, leurs thématiques, leurs usagers ...) fait prendre conscience que des caractéristiques communes sont récurrentes, bien que la diversité des tiers-lieux et de leurs projets soient un enjeu de ce plus ou moins nouvel objet d'étude pour les sciences humaines. On peut alors évoquer la mutation des lieux et des contextes286 : « de nombreux lieux se transforment sous l'effet des mutations du numérique, de la baisse des finances publiques et du caractère stratégique des savoirs dans une économie de connaissance ». Ces espaces de rencontre sont donc intimement liés au numérique et aux nouvelles technologies, mais aussi aux mutations de l'économie. Ils ont aussi un lien plus proche avec le citoyen qui est spectateur/visiteur du tiers-lieu. L'ancrage territorial est mentionné de façon récurrente dans les descriptions de ces lieux, que ce soit des lieux citoyens ou institutionnels. Ce sont des lieux d'expérimentation en tous genres : expérimentation dans la création ou bien encore dans les modes de gouvernance. Cependant, en fonction du porteur de lieu ou de projet, les objectifs divergent : on peut aller de la démocratie culturelle au marketing, de la démocratisation culturelle au do it yourself mais avec très souvent en filigrane la notion de lien social et de convivialité. La recherche nous a permis de comprendre que les tiers-lieux culturels peuvent vivre grâce à la communauté de personnes, de véritables acteurs de ce lieu social287 : « ce qui fait tiers-lieu, ce sont les gens qui y vivent: SDF, réfugiés ET entrepreneurs », « c'est un espace au sens large avec friction des cultures et lieu social ».

Les tiers-lieux culturels ont d'ailleurs tendance aujourd'hui à devenir de véritables institutions, notamment grâce ou à cause de leur reconnaissance par les collectivités publiques : « alors que les tiers-lieux se situent en rupture avec les cadres institutionnels, ils deviennent aujourd'hui des institutions à part entière », « d'abord parce que de nombreux tiers-lieux ont été reconnus et soutenus par les collectivités territoriales [...]. »288.

Les tiers-lieux culturels se dévoilent alors comme des critiques constructives ou des remises en cause de modèles de la haute culture : « à l'inverse des politiques de diffusion de la culture et des savoirs vers le `grand public', tout est pensé pour que les visiteurs s'interrogent sur l'apport et les limites des contenus scientifiques, technologiques et culturels [...] »289. Ces remises en question peuvent aussi

286 L'hypothèse des tiers-lieux, R. BESSON

287 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX

288 Dynamiques organisationnelles, modes de gestion et institutionnalisation de différents tiers lieux culturels, N. AUBOUIN

289 Supra 286

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bien émerger de tiers-lieux culturels citoyens que de tiers-lieux culturels équilibrés, comme c'est le cas à Madrid au Medialab Prado290. L'objectif commun est aussi de réduire cette distance entre les institutions publiques culturelles et le citoyen, mais aussi de présenter ou de suggérer toutes les formes de cultures (démocratie culturelle) : « ils [« nouveaux lieux culturels] opèrent par ailleurs un rapprochement intéressant entre les cultures écrites, numériques et techniques des savoirs et une variété de connaissances, qu'elles soient académiques, tacites, pratiques, expertes ou profanes »291.

Pour obtenir et exposer de tels résultats de recherche, il a été nécessaire d'étudier deux modèles de tiers-lieux culturels qui paraissaient de prime abord antagonistes, à savoir les tiers-lieux culturels nés d'initiatives citoyennes et des tiers-lieux culturels créés par des institutions publiques. Enfin, la recherche a conduit à découvrir qu'il existait des tiers-lieux culturels en équilibre entre ces deux modèles. En regard de tout cela, il devient manifeste que tous les différents modèles (de fonctionnement, d'émergence) sont susceptibles d'apporter une ou des solutions par différents moyens à la problématique de la démocratisation/démocratie culturelle, à ces « politiques culturelles de l'accès ». En effet, que le citoyen se positionne de manière active face à la culture et à la création d'art ou bien qu'il lui soit montré sur son territoire de vie des oeuvres qu'il ne pourrait pas découvrir en vrai292 est une véritable prise de conscience. Il faut en conséquence muter les modèles de diffusion, de médiation en prenant comme appuis principaux le numérique et l'hybridation des lieux : « de nombreux lieux culturels sortent progressivement d'une logique d'équipement pour repenser leurs modes de médiation, s'ouvrir à de nouvelles cultures et fonctions, et s'inscrire davantage dans la vie de la Cité »293.

Avant de prendre connaissance de l'implantation des tiers-lieux et plus précisément des tiers-lieux culturels, il existe une sorte de préconçu qui stipule que ces espaces d'expérimentation et d'innovation ne se situent que dans les tissus urbains : « penser le fait culturel comme une composante du fait urbain »294. L'étude de l'historique de ces lieux, de cas particuliers comme le café Boissec et des lieux de la lecture publique (médiathèques et bibliothèques) pousse à élargir le concept des lieux culturels et par conséquent celui des tiers-lieux culturels. Se situant dans des espaces de « zones blanches culturelles »295, ces lieux hybrides peuvent apporter de la culture dans tous types de territoires, du très urbanisé au plus rural296.

290 Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec Marcos GARCIA, Propos recueillis par Raphaël BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

291 Les tiers lieux culturels - Chronique d'un échec annoncé, R. BESSON

292 Publics empêchés et la barrière mentale sociale

293 Supra 291

294 Ville et création artistique. Pour une autre approche de la géographie culturelle, B. GRESILLON

295 Plan Culture près de chez vous, Ministère de la Culture

296 « Les villes moyennes en déclin, le monde rural trop éloigné des métropoles, les quartiers défavorisés à fort taux de chômage vont être dotés en tiers lieux, au nom de la revitalisation mais aussi pour aider leurs

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Cet élargissement volontaire et sémantique297 vers les bibliothèques et médiathèques peut bousculer l'idée que les tiers-lieux culturels se voulaient éphémères, notamment lorsqu'il s'agit d'occupation temporaire d'espaces vacants dans la ville298. Cette interrogation est à poser sûrement à la naissance du projet, sur le modèle (économique), qui sera mis en place. Ainsi, certains lieux prédisposés à être éphémères se voient pérennisés tant leur impact sur le territoire et sur les usagers est important299 ; a contrario, d'autres resteront dans une logique d'urbanisme transitoire300. Bien que la recherche n'ait pas porté sur ce type de tiers-lieux culturels, l'éphémère et le pérenne peuvent se croiser dans les tiers-lieux culturels lorsqu'il s'agit d'évènements : « de nouveaux lieux culturels évènementiels et éphémères se sont développés au coeur des villes ces dernières années »301 . L'exemple le plus pertinent reste celui de La FabricA, à Avignon302.

L'hypothèse selon laquelle le tiers-lieu culturel est un outil de territoire est vérifiée, particulièrement si l'on se place du point de vue des pouvoirs publics. En effet, ils peuvent offrir à certains territoires l'opportunité d'être « résilients » et ainsi « réussir leur transition numérique »303 par exemple ; « [...] attirer la curiosité des pouvoirs publics qui voient dans ces objets hybrides des outils de développement des territoires »304.

Comme cela est exposé en introduction, le tiers-lieu culturel est à la fois un espace (physique ou virtuel), un concept et un modèle. Comme tout modèle et concept, des limites peuvent lui être attribuées. L'un des risques que pointe R. BESSON concerne les « promesses » faites par ces espaces hybrides et la « réalité » de terrain305, puisque leur ambition est « immense » : « et par conséquent vouée à l'échec ». R. BESSON mobilise ici l'exemple de l'Université. L'Université reste dans « des logiques de diffusion de connaissances scientifiques », sans être un lieu de dialogue entre scientifiques et citoyens. Elle reste un lieu d'entre soi, entre les chercheurs enseignants et les étudiants. Or, comme cela a été dit, le tiers-lieu (culturel et non culturel) cherche à s'ouvrir à la société civile.

populations à s'adapter culturellement à la grande transformation écologique et numérique. » Le tiers lieu, objet transitionnel pour un monde en transformation, C. LIEFOOGHE

297 Tiers- lieux culturels, refonte d'un modèle ou stratégie d'étiquette ?, A. IDELON

298 Partie 1

299 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX « Les élus veulent un projet pérenne » / déménagement de La Quincaillerie vers une friche commerciale qui a été achetée par la Communauté d'Agglo (1000m2 avec une « vraie » salle de concert, une salle de spectacle vivant (jauge de 80 personnes assises ou 150 debout, un FabLab en deux parties, un bar associatif) avec comme intention de « faire évoluer les modules »

300 Cas de L'Aérosol (annexe 5 : liste des projets d'urbanisme transitoire de SNCF Immobilier)

301 Les tiers- lieux culturels - Chronique d'un échec annoncé, R. BESSON

302 La FabricA, un rêve nécessaire, Entretien avec P. RODIN, propos recueillis par J.-P. SAEZ

303 Le tiers- lieu, objet transitionnel pour un monde en transformation C. LIEFOOGHE

304 IBID

305 Supra 301

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D'une part, un tiers-lieu culturel pourrait n'être qu'une sorte de leurre306 au défi de la culture pour tous mais d'autre part, il pourrait être un outil de transition voué à être remplacé par un modèle plus pérenne et moins « fragile », du point de vue de son ancrage et de son modèle.307

Une autre limite, toujours évoquée par R. BESSON, concerne l'aspect pluridisciplinaire et l'hybridation des lieux. Ainsi, les tiers-lieux culturels poussent à la rencontre de toutes les disciplines artistiques et les croisements avec les sciences. On peut cependant s'interroger sur la « déspécialisation »308 : à force d'être pluridisciplinaire, le tiers-lieu culturel n'en devient-il pas un lieu imprécis au point de freiner la création ? Ce risque tenterait certaines politiques publiques à s'emparer de cet objet pour se soustraire à leur devoir de service public309. Elles pourraient utiliser cette locution tiers-lieu culturel pour en faire une catégorie « fourretout »310, interprétant le terme tiers, qui comme la définition du tiers-lieu l'explique, regroupe tout ce qui n'est pas intégré dans un système « binaire ». Comme évoqué, le champ culturel subit actuellement des coupes budgétaires, au niveau des subventions ; c'est pourquoi se cacher derrière le tiers-lieu peut être une tentation pour les politiques publiques culturelles311.

Malgré tout l'engouement (fig. 1) que peuvent manifester le public et les collectivités territoriales pour les tiers-lieux, le fait que le tiers-lieu devienne un objet de mainstream peut conduire à un potentiel essoufflement312. En revanche, ce modèle trouvera sa voie, se stabilisera et diffusera313 son modèle sur d'autres espaces. Ce qui est d'ailleurs remarquable avec la mise en place des réseaux de tiers-lieux314.

306 « L'action des tiers-lieux culturels se réduit souvent au développement de solutions adaptatives et partielles aux défis des transitions culturelles » IBID

307 La coopérative Tiers- Lieux : peut-on faire école des tiers lieux ?, L. AIGRON, L. MANUEL

308 Les tiers- lieux culturels - Chronique d'un échec annoncé, R. BESSON

309 « Il ne faudrait donc pas que cela soit perçu par la municipalité comme un moyen de ne plus assumer certaines missions de service public. » Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec M. GARCIA, Propos recueillis par R. BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

310 Tiers- lieu culturel, refonte d'un modèle ou stratégie d'étiquette ?, A. IDELON

311 Supra 308

312 « Avec le danger, qu'à terme, ils se vident de leur substance, à l'image des Maisons des jeunes et de la culture (MJC), qui se sont progressivement éloignées d'une conception civique et politique de la culture. » IBID

313 Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec M. GARCIA, Propos recueillis par R. BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ

314 Exemples de réseaux : Réseau Français des Fablabs, La Coopérative des Tiers-Lieux

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Fig. 1 Evolution de la recherche de termes liés aux tiers-lieux (culturels et non culturels) sur le moteur de recherche GOOGLE depuis 2004

Source : Google, 2018

On constate grâce à ce graphique une hausse importante à partir de 2009-2010 de la recherche sur la notion de Fablab, hausse correspondant à l'augmentation du nombre de Fablabs ouverts. Cependant le graphique ne permet pas de savoir si les recherches effectuées ne concernent que les Fablabs implantés sur le territoire français. On peut toutefois être en mesure de remarquer l'intérêt réel porté sur l'objet du Fablab (mais aussi des espaces de co-working avec une hausse, peut être liée à la pratique de plus en plus fréquente du télétravail).

Le tiers-lieu culturel possède les atouts pour devenir un des outils de la transition des modèles des politiques culturelles, notamment face aux enjeux du numérique. Les objectifs à atteindre concerneraient alors la revalorisation des territoires, la stimulation de l'attractivité de certains lieux et espaces culturels, l'attribution au visiteur-spectateur d'une nouvelle place plus active face à la culture. De plus, sa popularité grandissante chez différents acteurs comme les collectivités ou même les entreprises privées, risque de remettre en cause les caractéristiques propres aux tiers-lieux, lieux avant tout de rencontres, de productions diverses, de convivialité. Mais pour l'heure, le tiers-lieu culturel semble un dispositif encore perfectible avec cette impression de mouvement toujours sous-jacent.

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E. PESCHAUD

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Sigles

AMO : Assistant à Maîtrise d'Ouvrage

CA2RS : Communauté d'Agglomération des 2 Rives de Seine

CAF : Caisse d'Allocations Familiales

CLEA : Contrat Local d'Education Artistique

CRD : Conservatoire à Rayonnement Départemental

DOC : Document d'Orientation Culturelle

DRAC : Direction Régionale des Affaires Culturelles

DSP : Délégation de Service Public

EPCC : Etablissement Public de Coopération Culturelle

EPCI : Etablissement Public de Coopération Intercommunale

EPMASA : Etablissement Public d'Aménagement du Mantois Seine Aval

ESS : Economie Sociale et Solidaire

GPS&O : Grand Paris Seine & Oise

IAU : Institut d'Aménagement et d'Urbanisme

SCIC : Société Coopérative d'Intérêt Collectif

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E. PESCHAUD

Bibliographie

Ouvrages

The great good place : Cafes, Coffee Shops, Bookstores, Bars, Hair Salons, and Other Hangouts at the Heart of a Community, Ray OLDENBURG - Editions Da Capo Press, 1989, 384 pages

Tiers lieux et plus si affinités, Antoine BURRET - Editions Fyp, 2015, 175 pages

La France du vide, Roger BRETEILLE - Litec, 1981, 252 pages

Articles scientifiques

Les églises protestantes haïtiennes de Martinique : des tiers lieux d'éducation et d'intégration ? Max BELAISE - Revue en ligne Etudes Caribéennes, mise en ligne en 2010, https://journals.openedition.org/etudescaribeennes/4600

Introduction, Emmanuelle MAUNAYE - (Fait partie d'un numéro thématique : Friches, squats et autres lieux : les nouveaux territoires de l'art ? (sous la direction de Emmanuelle MAUNAYE), Culture & Musées, 2004, P.13

Les tiers lieux culturels - Chronique d'un échec annoncé, Raphaël BESSON - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.17

Refaire le monde en tiers lieu, Antoine BURRET- Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.50

La coopérative Tiers Lieux : peut-on faire école des tiers lieux ? Lucile AIGRON, Léonor MANUEL- Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.65

De l'étude de cas à l'analyse comparative fondée sur une typologie : le `typological theorizing', Denis BAYART - AEGIS Le Libellio ( hal.archives-ouvertes.fr), 2007, P.10, https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00281123/document

Les tiers lieux, espaces d'émergence et de créativité, Patrick GENOUD, Alexis MOECKLI - SEES / Revue économique et sociale, N°2 juin 2010, http://www.ot-lab.ch/wp-content/uploads/2010/07/Les tiers-lieux espaces d emergence et de creativite RES2010.pdf

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E. PESCHAUD

Les laboratoires citoyens madrilènes : la fabrique des « communs urbains », Raphaël BESSON - urbanews.fr, 2016, https://www.urbanews.fr/2016/01/11/50396-laboratoires-citoyens-madrilenes-fabrique-communs-urbains/

Archipel 21 : un laboratoire pour repenser le monde, Pierre ESTEVE - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.36

Tiers lieu culturel, refonte d'un modèle ou stratégie d'étiquette ?, Arnaud IDELON - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.27

La MYNE : pour une capacité d'agir citoyenne, Entretien avec Benjamin CHOW-PETIT et Connie CHOW-PETIT, Propos recueillis par Lisa PIGNOT- Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.53

Le Medialab Prado de Madrid - Du centre culturel au laboratoire citoyen, Entretien avec Marcos GARCIA, Propos recueillis par Raphaël BESSON, traduction de S. MARCELLY FERNANDEZ - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.75

Les bibliothèques, des troisièmes lieux culturels à forte valeur humaine ajoutée, Mathilde SERVET - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.71

Tiers lieux et fabrique des villes contemporaines, Raphaël BESSON - Revue en ligne Echo sciences, 2014, https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01726391/document

Une notion à expérimenter et à co-construire, Raphaël BESSON - Revue en ligne Echo sciences

Grenoble, 2013, https://www.echosciences-grenoble.fr/articles/les-tiers-lieux-une-notion-a-
experimenter-et-co-construire

Dynamiques organisationnelles, modes de gestion et institutionnalisation de différents tiers lieux culturels, Nicolas AUBOUIN - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.39

Les politiques culturelles d'André MALRAUX à Jack LANG : ruptures et continuités, histoire d'une modernisation, Augustin Girard - Hermès, La Revue 1996/2 (n° 20),P. 27-41

La régénération des territoires ruraux par les tiers lieux. Le cas des tiers lieux creusois, Raphaël BESSON - urbanews.fr, 2017, https://www.urbanews.fr/2017/09/18/52487-la-regeneration-des-territoires-ruraux-par-les-tiers-lieux-le-cas-des-tiers-lieux-creusois/

La FabricA, un rêve nécessaire, Entretien avec Paul. RODIN, propos recueillis par Jean-Pierre SAEZ - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.62

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E. PESCHAUD

Les bibliothèques, des troisièmes lieux culturels à forte valeur humaine ajoutée, Mathilde SERVET - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.71

Les bibliothèques rurales, un enjeu pour la vitalité des territoires, Amandine JACQUET - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.83

Ville et création artistique. Pour une autre approche de la géographie culturelle, Boris GRESILLON - Annales de Géographie, N°660-661 2008, P.179, https://www.cairn.info/revue-annales-de-geographie-2008-2-page-179.htm

Les « tiers lieux », des microcultures innovantes ?, Olivier CLEACH, Valérie DERUELLE, Jean-Luc METZGER - Revue en ligne Recherches sociologiques et anthropologiques, mis en ligne en 2016, https://journals.openedition.org/rsa/1526

Le tiers lieu, objet transitionnel pour un monde en transformation, Christine LIEFOOGHE - Observatoire des politiques culturelles, N°52 été 2018, P.9

Le non-public et la culture, Cosmima GHEBAUR - Revue en ligne Terrain, N°58, mis en ligne en 2014, https://journals.openedition.org/terrain/14684#quotation

De la communication publique vers le marketing des territoires : approche microsociologique de la fabrication de l'image de marque, Charles-Edouard HOULLIER-GUIBERT - Revue Gestion et Management Public, Volume I/n°2, 2012, https://www.cairn.info/revue-gestion-et-management-public-2012-2-page-35.htm

Underground, upperground et middle-ground : les collectifs créatifs et la capacité créative de la ville, L. SIMON - Revue Management International, Volume 13, 2009, p.37-51, https://www.erudit.org/en/journals/mi/2009-v13-nmi3096/037503ar/

Articles divers (presse, blogs, ...)

Tiers lieu : enquête sur un objet encore bien flou (1/2), Arnaud IDELON - MAKERY, le média de tous les labs, 2017, http://www.makery.info/2017/10/10/tiers-lieu-enquete-sur-un-objet-encore-bien-flou-12/

Laboratorios ciudadanos: espacios para l'innovación ciudadana, (pas d'auteur) - Innovación

Ciudadana en Iberoamérica, Laboratorios Ciudadanos,
https://www.innovacionciudadana.org/labsciudadanos/

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E. PESCHAUD

La Tabacalera de Lavapiés: Welcome to Madrid's Most Culturally Diverse Space, Jessica JONES - Culture trip, 2018, https://theculturetrip.com/europe/spain/articles/la-tabacalera-de-lavapies-welcome-to-madrids-most-culturally-diverse-space/

En do-ocratie, concilier responsabilités et pouvoir d'agir, dans le même temps, Emmanuelle ROUX,

2017, https://medium.com/@emmanuelle.roux/en-do-ocratie-concilier-responsabilit%C3%A9s-et-
pouvoir-dagir-2aa6aabd7b2c

La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, Alice CHATZIMANASSIS - Politiques de la culture, Carnet de recherches du Comité d'histoire du ministère de la Culture sur les politiques, les institutions et les pratiques culturelles, publié en 2016 et mis à jour en 2016, https://chmcc.hypotheses.org/675

Le tiers lieu en territoire rural : un lieu unique aux impacts multiples, Sylvia PLION Vincent LECOMPTE - caissesdesdepots.fr, pas de date de parution, https://www.caissedesdepots.fr/le-tiers-lieu-en-territoire-rural-un-lieu-unique-aux-impacts-multiples

L'hypothèse des tiers-lieux, Raphaël BESSON - epochtimes.fr (version originale de l'article publiée sur Theconversation.com), 2018, https://www.epochtimes.fr/lhypothese-des-tiers-lieux-culturels-218279.html

« Les friches culturelles sont un acte de reconquête du territoire »Françoise LUCHINI (géographe,

université de Rouen), Hélène GIRARD - lagazettedescommunes.com, 2012,
http://www.lagazettedescommunes.com/120690/%%AB-les-friches-culturelles-sont-un-acte-de-reconquete-du-territoire-%%BB-francoise-lucchini-geographe-universite-de-rouen/

Grands Voisins, Halle Papin, 6B... Et le squat devient fréquentable, Emmanuelle CHAUDIEU - telerama.fr, Urbanisme transitoire, 2018, https://www.telerama.fr/sortir/grands-voisins,-halle-papin,-6b...-et-le-squat-devient-frequentable,n5588351.php

L'avenir est dans la friche, Yohav OREMIATZKI - telerama.fr, Etats généreux de la culture, 2016, https://www.telerama.fr/etats-genereux/l-avenir-est-dans-la-friche,149068.php

Création d'un lieu culturel et social autogéré. Par LES CROQUIGNARDS https://www.helloasso.com/associations/les-croquignards/collectes/creation-d-un-lieu-culturel-et-social-autogere-1

La Micro Folie, les nouvelles Maisons de la culture, Sarah TISSEYRE, rfi.fr/culture, 2018, http://snip.ly/3g1e4#http://www.rfi.fr/culture/20180226-micro-folie-maisons-culture-mureaux

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E. PESCHAUD

Le Centquatre à la recherche d'une nouvelle direction, Aurore LARTIGUE, lesinrocks.fr, 2010, https://www.lesinrocks.com/2010/05/11/arts/le-centquatre-a-la-recherche-dune-nouvelle-direction-1130840/

Peut-on encore distinguer haute et basse culture ?, Quimera MATARO, courrierinternational.com, 2010, https://www.courrierinternational.com/article/2010/09/09/peut-on-encore-distinguer-haute-et-basse-culture

Pourquoi parle-t-on de crise de l'Etat Providence ?, vie-publique.fr - http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/protection-sociale/etat-providence/pourquoi-parle-t-on-crise-etat-providence.html

Michelin 120 ans d'aventures industrielles, Daniel BASTIEN, lesechos.fr, 2012, https://www.lesechos.fr/20/08/2012/LesEchos/21251-040-ECH_michelin-120-ans-d-aventures-industrielles.htm

Culture de masse ou cultures de classes ? (par Philippe Coulangeon*), Nicolas DUTENT, blogs.mediapart.fr, 2012, https://blogs.mediapart.fr/edition/la-revue-du-projet/article/281112/culture-de-masse-ou-cultures-de-classes-par-philippe-

Ce qu'il faut savoir sur le 104, Laure BEAUDONNET, lexpress.fr, 2008, https://www.lexpress.fr/culture/ce-qu-il-faut-savoir-sur-le-104 586803.html

Pourquoi l'urbanisme transitoire est à la mode ?, infos.trouver-un-logement.fr, 2018, https://infos.trouver-un-logement-neuf.com/achat-neuf/dossiers/la-mode-urbanisme-transitoire-6227.html

Histoire du Medialab Prado (Madrid), es.wikipedia.org, https://es.wikipedia.org/wiki/Medialab-Prado#Historia

L'hypothèse des tiers-lieux culturels, Raphaël BESSON, lagazettesdescommunes.com, 2018, http://www.lagazettedescommunes.com/577481/lhypothese-des-tiers-lieux-culturels/

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E. PESCHAUD

Vidéos

Quand des jeunes font revivre des territoires ruraux : le Café Boissec et l'Eco-lieu - https://www.youtube.com/watch?time continue=540&v=bpD-iiZnlBk

Vers la démocratie culturelle - CESE - https://www.youtube.com/watch?v=tIIf36BCi8M // https://www.lecese.fr/content/le-cese-adopte-son-avis-sur-la-democratie-culturelle

Rejoignez Museomix, Nicolas PASCARIELLO - http://www.museomix.org/accueil/

Sitographie

Définition de Démocratie participative sur toupie.org -

http://www.toupie.org/Dictionnaire/Democratie participative.htm

Définition de Fracture numérique sur techno-science.net -

http://www.culture.gouv.fr/Presse/Dossiers-de-presse/Culture-pres-de-chez-vous-OEuvres-et-artistes-sur-les-routes-de-France

Définition d'Aménagement du territoire sur geoconfluences.fr - http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/amenagement-du-territoire

Définition de Patrimoine industriel sur culture.gouv.fr - http://www.culture.gouv.fr/Regions/Drac-Pays-de-la-Loire/Politique-et-actions/Monuments-historiques2/Patrimoine-industriel-scientifique-et-technique-PIST

https://www.lamyne.org/about/

Définition de Do it yourself sur fr.wikipedia.org - https://fr.wikipedia.org/wiki/Do_it_yourself https://chateauephemere.org/

http://artscience21.org/archipel-21/

http://latabacalera.net/c-s-a-la-tabacalera-de-lavapies/

Définition du crowdfunding sur crowdlending.fr - https://www.crowdlending.fr/le-crowdfunding-definition-reglementation-avantages-et-inconvenients/

Définition de pouvoirs publics sur toupie.org -

http://www.toupie.org/Dictionnaire/Pouvoirs_publics.htm

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E. PESCHAUD

Définition de ségrégation par D. PUMAIN sur hypergeo.eu

-

http://www.hypergeo.eu/spip.php?article372

https://lavillette.com/micro-folie/

Les Micro-folies, musées numériques de proximité : déploiement national - http://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Culture-et-territoires/Plan-Culture-pres-de-chez-vous/Micro-folies

http://www.micro-folies.com/les-micro-folies/ http://mediatheque.lesmureaux.fr

http://www.laerosol.com/

https://www.laquincaillerie.tl/

http://www.laconditionpublique.com/

Divers

Chapitre 2 : Patrimoine industriel : l'exo genèse de solutions de réhabilitation - APIC315 : Patrimoine

Industriel, pas de date de parution, http://www.patrimoineindustriel-
apic.com/bibliotheque/universite/dess%20h%20faucher/hf5.pdf

Plan Culture près de chez vous OEuvres et artistes sur les routes de France, Ministère de la Culture - 2018, http://www.culture.gouv.fr/Presse/Dossiers-de-presse/Culture-pres-de-chez-vous-OEuvres-et-artistes-sur-les-routes-de-France

Décret N°59-889 du 24 juillet 1959, citation prise dans Limites et possibles de la démocratisation culturelle, André COURCHESNE François COLBERT dans HEC Montréal

Rapport d'activités du Centquatre Paris, 2016, http://www.104.fr/media/professionnels-culture/rapport-activites-2016.pdf

Pratiques artistiques en renouvellement, nouveaux lieux culturels, Yolande PADILLA - Rapport commandité par le Ministère de la Culture et de la Communication, 2003, http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/044000155.pdf

315 Association pour le Patrimoine industriel de Champagne-Ardenne et du Grand Est

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E. PESCHAUD

Limites et possibles de la démocratisation culturelle, André COURCHESNE François COLBERT, HEC Montréal, https://www.gestiondesarts.com/media/wysiwyg/documents/Courchesne_Colbert.pdf

Aide à la création de tiers lieux, appel à projet de la région Île-de-France, https://www.iledefrance.fr/aides-services/aide-a-la-creation-de-tiers-lieux

AMO pour le développement d'un réseau de Tiers Lieux à l'échelle métropolitaine, Expertise, Raphaël BESSON, 2018, http://www.villes-innovations.com/non-classe/amo-developpement-dun-reseau-de-tiers-lieux-a-lechelle-metropolitaine

Accueillir une résidence, réflexions et propositions, Le Transfo, non daté, http://www.fill-livrelecture.org/images/documents/accueillir une residence transfo.pdf

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Table des matières

REMERCIEMENTS

RESUME

MOTS CLEFS

SOMMAIRE

Introduction

Partie 1 : Du tiers-lieu comme fabrique citoyenne à fort ancrage territorial (...)

Initiatives citoyennes

Chapitre 1 : L'aménagement du territoire et les tiers-lieux culturels : une réappropriation (...)

Tiers-lieux, plus que des lieux de passage

Requalification d'espaces publics, réponse aux besoins d'aménagement

Présentation du Café Boissec

Patrimoine industriel, mémoire forte des lieux

Présentation de La Tabacalera

Chapitre 2 : (...) par ces tiers-lieux culturels créées par et pour les citoyens (...)

Do it yourself

Présentation de La MYNE

Underground

Accompagnement des visiteurs (médiation)

Ancrage territorial, culture pour tous

Economie circulaire

« Inclusion sociale »

Mise en commun, partages

Gouvernances et culture ascendante

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 3 : (...) en réponse à la paupérisation du champ culturel. Comparaison Café Boissec, La MYNE, La Tabacalera

Adaptabilité des projets au(x) contexte(s)

Mutualisation des ressources

Partie 2 : (...) vers le tiers-lieu institutionnel, outil de lutte contre la ségrégation culturelle (...)

Compétence publique

Chapitre 4 : Le tiers-lieu culturel institutionnel : quand l'institution montre au citoyen (...)

Descendance

Publics empêchés, non-publics, non-initiés // élitisme

Dichotomie entre les cultures

Baisse de fréquentation

Présentation du concept de la Micro Folie

Diffuser plutôt qu'expérimenter

Présentation du Centquatre

Exception culturelle à la française

Présentation de La FabricA

Chapitre 5 : (...), quand le marketing s'appuie sur le tiers-lieu culturel pour le dynamisme

culturel et territorial (...)

Marketing territorial

Lien entre la culture, le marketing territorial et la communication

Attirer

Choix stratégique de l'ancrage territorial du lieu

Relation culture/politique

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 6 : (...), quand enfin les institutions s'emparent du tiers-lieu culturel pour lutter contre les zones blanches culturelles et pour légitimer davantage les politiques culturelles.

Comparaison Centquatre, La FabricA, Micro Folie(s)

Répartition hétérogène des équipements culturels sur le territoire

Réponse à la déperdition de dynamisme, au niveau des territoires ruraux notamment

Transversalité des ministères

Autres formes d'hybridations

Institutionnalisation du concept de tiers-lieu culturel, nouveau maillage du territoire

Partie 3 : (...) jusqu'à la recherche d'un équilibre.

Existence d'un entre deux, entre la fabrique citoyenne et l'importation d'un projet institutionnel de tiers lieu culturel

Focus sur le cas de la Médiathèque aux Mureaux (et présentation), et plus largement des établissements de la lecture publique

Chapitre 7 : Réinventer, mettre un coup de sang neuf dans la culture (...)

Nouvelles technologies

Présentation du Château Ephémère

Nouveaux modèles

Présentation de La Condition Publique

Mutation du monde

Présentation du Medialab Prado

Urbanisme transitoire

Présentation de l'Aérosol

Place de l'expérimentation

Innovation(s) organisationnelle(s)

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Chapitre 8 : Pour ensuite s'accorder autour de partenariats, de réseau(x), de mêmes objectifs

(...)

Mission de service public

Mutualisation et coopération entre les acteurs porteurs de projet

Lecture publique : lutte contre la fracture numérique

Dynamiser le territoire par l'urbanisme transitoire : création de l'éphémère culturel

Création de lien social

Présentation de La Quincaillerie

Liberté augmentée, les résidences artistiques

Chapitre 9 : (...) et finir par être équilibré

Hybridité : public/privé, art/politique

Lieu stratégique pour l'ensemble de la « Cité »

Compromis entre le tout institutionnalisé et l'entre soi

Réduction de la distance entre les citoyens et les institutions (culturelles)

Middleground

Lieux à part entière

Comparaison Château Ephémère, La Quincaillerie, La Médiathèque, MedialabPrado, l'Aérosol

Conclusion

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

ANNEXES*

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* Les annexes sont classées par catégories, sans toujours suivre un ordre chronologique dans le corps du mémoire. Ce classement par nature d'annexe paraît cohérent pour le lecteur.

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E. PESCHAUD

Partie 1 : Les illustrations

Annexe 1

Portrait de Ray OLDENBURG

 

Ray OLDENBURG, sociologue états-unien, a été le premier a véritablement étudier les tiers-lieux. Son ouvrage paru en 1989 The great good place lui a demandé huit années de rédaction. Il considère l'ensemble des lieux publics propices à l'échange : bibliothèques, églises, cafétérias d'entreprises etc. comme des tiers-lieux. Ces lieux sont différents des autres lieux publics de passage.

Source : www.steelcase.com

 
 

Annexe 2

Exemple d'oeuvre numérique (Château Ephémère à Carrières-sous-Poissy)

Source : www.chateauephemere.org

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« Cette oeuvre est une installation interactive. Elle augmente l'espace physique d'une salle et la relation que le spectateur peut avoir avec un environnement délicat. Différents types de capteurs sensoriels discrets transforment les murs, les meubles, le sol de la salle d'exposition en interface délicatement sensible et réactive. Cette oeuvre est comportementale et ne se dévoile que si le spectateur entre dans l'espace en étant à l'écoute de ce qui s'y passe. Dans cette situation qui mettra en miroir le corps, il s'agira de dessiner un espace organique dont les passages, les interventions des spectateurs laisseront des empreintes visuelles et sonores. Le projet et le travail spécifiquement réalisé au

Château Éphémère. » (Source :
https://chateauephemere.org/la-maison-sensible-maison-empathique-scenocosme-gregory-lasserre-et-anais-met-den-ancxt-lola-and-yukao-meet-lym/)

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E. PESCHAUD

Annexe 3

Exemple d'exposition utilisant le numérique : Imagine Van Gogh

 

« Pour la première fois, la Grande halle de La Villette ouvre ses portes à Vincent Van Gogh pour une expérience immersive qui emmène le spectateur dans un voyage au coeur des toiles de l'artiste.

IMAGINE VAN GOGH, UN PROJET CULTUREL

UNIQUE » (source : http://www.imagine-
vangogh.com/page/a-propos/)

Source : E. PESCHAUD - La Villette Paris (05/08/17)

 

Annexe 4

Exemple d'un musée (Louvre) ayant son application pour smartphone

 

« Le guide, c'est vous ! Avec l'application mobile Louvre : ma visite, le guide c'est vous !

-60 000 m2 modélisés en 3D pour une meilleure appréhension

des espaces
-trouvez une oeuvre, une collection ou un service en suivant

l'itinéraire qui vous sera proposé
-toutes les informations pratiques indispensables et l'accès à la programmation culturelle (expositions, auditorium, ateliers, etc.)

- 600 fiches synthétiques d'oeuvres et de salles historiques du musée

- 600 commentaires sonores sur les oeuvres et les salles du musée disponibles en achat intégré payant » (source : description de l'application sur l'Applestore)

Source : application pour smartphone Louvre (Applestore)

Source : https://www.laquincaillerie.tl/

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E. PESCHAUD

Annexe 5

Liste des projets d'urbanisme transitoire de SNCF Immobilier

Source : http://www.presse-sncf-immobilier.fr/accueil/sites-artistiques-temporaires/

Annexe 6

Services proposés à La Quincaillerie de Guéret

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E. PESCHAUD

Annexe 7

Exemples de projets supportés à La MYNE

Source : https://www.lamyne.org/project/

Annexe 8

Lien du dossier de presse de la Micro Folie aux Mureaux : http://lesmureaux.micro-folies.com/wp-content/uploads/sites/7/2016/12/DP-MICRO-FOLIE-LES-MUREAUX.pdf

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E. PESCHAUD

Annexe 9

Les différents `Labs' du Medialab Prado

Source : https://www.medialab-prado.es/en/laboratories

Annexe 10

Infographie sur la création de tiers-lieux

Ce document peut donner une idée au lecteur de la complexité de l'appréhension de l'objet tiers-lieu en voyant le nombre de choix à faire pour créer un tiers-lieu ; on comprend aussi pourquoi chaque projet est unique.

Source : http://www.cedille.pro/comment-creer-un-tiers-lieu-une-belle-infographie-pour-co-construire-son-projet/ (le document est disponible en format PDF en entier et lisible)

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E. PESCHAUD

Partie 2 : les grilles d'entretiens et les comptes rendus d'entretiens

Annexe 11

Grille d'entretien pour les responsables/directeur-trices et personnels de tiers-lieux culturels. Cette grille a pour enjeu de saisir les modes de fonctionnement des tiers-lieux culturels, leurs objectifs, leur vision de la culture... grâce à une vision interne.

Acteur interrogé :

Fonction :

Date et lieu de l'entretien :

Qu'apporte/ qu'a apporté ce lieu aux pratiques culturelles ?

Les lieux hybrides sont-ils une manière de contourner l'aspect sacralisé de la culture et de son accès ? Pourquoi et comment ?

À quel point l'ancrage territorial est-il nécessaire pour qu'un tiers-lieu puisse fonctionner et survivre ? Quels sont les critères absolument nécessaires pour qu'un tiers-lieu se développe ?

Intégrer des réseaux plus institutionnalisés, est-ce perdre son âme ?

À quel degré un tiers-lieu doit-il créer des liens avec les institutions et/ou le(s) pouvoir(s) public(s) ?

Annexe 12

Grille d'entretien pour les directeur-trices de services culturels de collectivités territoriales. Cette grille a pour enjeu de saisir la vision qu'on les techniciens de la fonction publique territoriale sur les tiers-lieux culturels et le potentiel intérêt qu'ils y voient à propos de l'accès aux droits culturels.

Acteur interrogé :

Fonction :

Date et lieu de l'entretien :

Comment qualifieriez-vous un tiers-lieu ?

Votre commune/votre collectivité soutient-elle des lieux qualifiés de tiers-lieux ?

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Votre commune/votre collectivité a-t-elle déjà pensé à soutenir des lieux qualifiés de tiers-lieux ? Si oui, de quelle manière ? Partenariat financier, soutien institutionnel ?

Que pensez-vous des pratiques culturelles qui évoluent aujourd'hui ? / Comment intégrer dans les politiques culturelles la notion d'innovation ?

Quelle doit être la motivation pour une entité publique d'accueillir sur son territoire un lieu hybride tel qu'un tiers-lieu ?

Annexe 13

Grille d'entretien pour les adjoints à la culture de collectivités territoriales. Cette grille a pour enjeu d'envisager la dimension politique d'un tiers-lieu culturel sur un territoire et comment est saisie par la politique de l'enjeu de la ségrégation culturelle.

Acteur interrogé :

Fonction :

Date et lieu de l'entretien :

Comment qualifieriez-vous un tiers-lieu ?

Votre commune/votre collectivité soutient-elle des lieux qualifiés de tiers-lieux ? Si oui, y-at-t-il des tiers-lieux culturels parmi eux ?

Si oui, de quelle manière ? Partenariat financier, soutien institutionnel, aide en moyens humains ou matériels ?

Que pensez-vous des pratiques culturelles qui évoluent aujourd'hui ? / Comment intégrer dans les politiques culturelles la notion d'innovation ?

Quelle doit être la motivation pour une entité publique d'accueillir sur son territoire un lieu hybride tel qu'un tiers-lieu ?

A quel point un équipement culturel devient-il un objet politique ?

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Annexe 14

Grille d'entretien pour les scientifiques. Cette grille a été élaborée afin d'appréhender la définition de ce qu'est un tiers-lieu culturel, les enjeux et objectifs mais aussi de voir comment les sciences humaines s'emparent de cet objet d'étude.

Acteur interrogé :

Fonction :

Date et lieu de l'entretien :

Existe-t-il un concept unique de ce qu'est le tiers-lieu culturel ?

Est-ce que la vocation d'un tiers-lieu culturel est la même qu'un autre tiers-lieu ?

Comment l'innovation organisationnelle peut-elle être mise en place lorsque le tiers-lieu est institutionnel ? Comment s'y inscrit le citoyen ?

Qu'est-ce que le middleground ?

La lutte contre la ségrégation culturelle est-elle un enjeu pour les tiers-lieux culturels ?

Annexe 15

Compte-rendu d'entretien avec Latifa KHARJA Acteur interrogé : Latifa KHARJA

Fonction : Adjointe au maire en charge de la Politique culturelle et associative de Chanteloup-les-Vignes

Date et lieu de l'entretien : 23/04/18 ; échange de mails

Le tiers-lieu est un espace de rencontre et d'échanges entre les différents publics. Grâce aux tiers-lieux, il est possible de recréer du lien, du partage, et de la solidarité, « dans une société qui s'individualise ». Il est cependant difficile à mettre en place dans certaines communes des projets de tiers-lieux, en raison des difficultés financières par exemple. Pour autant, il est possible de penser à créer des maisons des associations afin de créer un vivier d'échanges. Un projet de tiers-lieu est valorisant pour un territoire : « pouvoir se prévaloir de posséder ce type de structure ».

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Avec la digitalisation et le développement des réseaux sociaux, la culture entre dans les foyers et n'est plus nécessairement destinée à une élite. En s'appuyant sur cette évolution, il serait judicieux d'intégrer toute nouvelle innovation dans les politiques culturelles via ce mode de communication.

Annexe 16

Compte-rendu d'entretien avec Raphaël BESSON Acteur interrogé : Raphaël BESSON

Fonction : Expert en socio-économie urbaine et docteur en sciences du territoire (laboratoire PACTE, université de Grenoble)

Date et lieu de l'entretien : 03/05/18 ; entretien téléphonique

Le tiers-lieu est un concept très flou, puisque les ZAD peuvent être considérées comme des tiers-lieux. On peut également mentionner les friches qui tendent à devenir des tiers- lieux. Pour autant, un tiers-lieu n'est pas forcément quelque chose d'alternatif. Les porteurs de projets sont très différents, les montages aussi. Ainsi, la friche du Centquatre se transforme, pour s'inscrire dans le quartier par une nouvelle entrée. L'essence d'un tiers-lieu repose sur la capacité d'un lieu à faire cohabiter différents écosystèmes, faire se rencontrer des oppositions. C'est du travail avec de l'horizontalité. Il peut y avoir également l'intégration de start-ups. Le numérique est un aspect primordial pour les projets de tiers-lieux puisqu'il « rend l'utopie réalisable » et participe au côté empirique des tiers-lieux.

La notion de tiers-lieu n'est pas encore une notion abordée par les scientifiques et par les universitaires. Les institutions sont en train de stabiliser cette notion, en accordant par exemple des subventions en regard de certains critères qu'elles posent.

Chaque tiers lieu possède sa vocation. Toutefois, R. BESSON procède à une hiérarchisation de celles-ci. La première vocation est le co-working. Il y a quelques 12 000 de ces espaces à travers le monde. La 2ème vocation concerne le Fablab afin de produire de l'innovation en temps réel. La vocation peut concerner le service public, la transition écologique et d'autres encore. Par exemple, certains tiers-lieux veulent augmenter leur création de valeur comme Bouygues innovation. Finalement, l'aboutissement de ces tiers-lieux est de créer des espaces afin d'agir sur les transitions.

Les tiers-lieux culturels, quant à eux, sont apparus plus récemment, « ils sont très nouveaux et émergents ».

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

La culture scientifique est transformée par les tiers-lieux. Les institutions s'appuient sur les tiers-lieux afin de s'approprier de nouveaux modes de travail. C'est d'ailleurs aux institutions de s'adapter aux tiers-lieux et non l'inverse. Selon R. BESSON, les institutions doivent s'appuyer sur des tiers-lieux déjà existants, créer des porosités, et non créer le leur. En Grande Bretagne, les universités ont essayé de monter leurs tiers-lieux mais n'y sont pas parvenues.

La notion de middleground vient de l'économie et du management de l'innovation. Cela concerne des personnes qui sont capables de faire se rencontrer l'upperground et l'underground afin de créer de la valeur. Cette notion a été reprise par les tiers-lieux.

Les tiers-lieux culturels ne possèdent pas forcément un objectif de démocratisation culturelle, ni même un unique objectif au moment de leur création. Plutôt que s'intéresser aux objectifs des tiers-lieux, il vaut peut-être mieux s'intéresser aux moyens d'actions qu'ils mettent en place. Par exemple : pour faire venir les publics éloignés, les tiers-lieux peuvent être une réponse mais pas la seule. Par leurs outils, les tiers-lieux peuvent faire reculer la ségrégation culturelle, leur donner simplement cet objectif est voué à l'échec. Il faut accéder autrement à la culture, par exemple en intégrant le numérique dans les bibliothèques pour le jeune public.

Annexe 17

Compte-rendu d'entretien316 avec Jean LECORBEILLER

Acteur interrogé : Jean LECORBEILLER

Fonction : Elu en charge de la Culture et du Patrimoine de Rosny-sur-Seine Date et lieu de l'entretien : 13/06/18 ; Mairie de Rosny-sur-Seine

Le concept de tiers-lieu lui échappe ; une fois celui-ci expliqué, l'élu comprend qu'il s'agit de lieux hybrides, aux activités diverses. Selon lui, l'Hospice Saint Charles317 pourrait être un tiers-lieu culturel.

Selon lui, toute la culture a sa place pour être représentée, autant la culture française que les cultures issues de l'extérieur. C'est en s'appuyant sur cet apport de l'extérieur que les gens peuvent s'intéresser à la culture et venir participer aux manifestations culturelles organisées par Rosny-sur-Seine. Le fait

316 L'entretien a dévié plusieurs fois entre l'objectif du mémoire et ma position de stagiaire à ce moment-là au sein de GPS&O, intercommunalité dans laquelle est inscrite la commune de Rosny-sur-Seine.

317 Equipement communautaire GPS&O

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

que les enfants soient dans les manifestations culturelles est aussi un moyen d'attirer les parents et autres pairs à ces moments.

Pour lutter contre la ségrégation culturelle, la ville de Rosny-sur-Seine s'appuie surtout sur la lecture, avec notamment la mise en place d'un dispositif qui consiste à offrir un livre aux enfants tous les ans, de 0 à 3 ans. Il faut aussi s'adapter à la demande des populations, en donnant à voir la culture qui les intéresse. Cependant, c'est quelque chose de complexe, notamment à Rosny-sur-Seine puisqu'il y a peu de moyens financiers (par ailleurs la ville a eu une `menace' de mise sous tutelle de l'Etat il y a peu). L'innovation est aussi un moyen d'attirer les populations, bien que cela soit difficile à mettre en place. La ville de Rosny-sur-Seine tente de mettre en place des actions en direction des publics qui ne viennent pas, de faire des « choses qui ne se sont jamais faites ». Le numérique est notamment un moyen pouvant attirer les jeunes.

Rosny-sur-Seine ne soutient pas d'initiatives de projets de tiers-lieux culturels ou toute autre forme de tiers-lieu. La ville a en effet des problèmes liés à la mobilité des publics et les faire adhérer à de tels projets, sans le leur imposer. Une structure type tiers-lieu pourrait amener des gens à Rosny-sur-Seine, notamment des touristes. Ces derniers ont tendance à se rendre à Giverny, sans passer par la commune de Rosny-sur-Seine, qui en pâtit. Un lieu doit pouvoir proposer différentes activités ; à Rosny-sur-Seine c'est autour des activités touristiques que la réflexion se fait.

Annexe 18

Compte-rendu d'entretien avec Baptiste RIDOUX Acteur interrogé : Baptiste RIDOUX

Fonction : Coordinateur à La Quincaillerie, tiers-lieu de la Communauté d'Agglomération du Grand Guéret

Date et lieu de l'entretien : 21/06/18 ; entretien téléphonique

La Quincaillerie à Guéret est un tiers-lieu culturel soutenu par la Communauté d'agglomération du Grand Guéret. Le projet a été initié en 2012. Cette année-là, l'association de La Radio Guéret fêtait ses 5 ans, mais subissait des problèmes de désertification. Un travail en bonne intelligence s'est opéré entre l'association et La Ressourcerie, afin de palier au processus de désertification. Ainsi est né le projet de créer un nouveau lieu, qui sera La Quincaillerie. L'idée était de partir d'un lieu associatif. Le projet a été présenté au Président de l'agglomération qui a été séduit rapidement par le projet présenté. Ce tiers-lieu culturel est « atypique » puisqu'il est né d'une

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

association, un collectif citoyen, et constitue tout un service de la Communauté d'agglomération. Aujourd'hui, trois salariés de la collectivité travaillent à La Quincaillerie, pour le développement territorial. Pour autant, ces salariés ne se sentent pas institutionnalisés car ils n'ont pas le sentiment d'être « muselés ». Le numérique a une place prépondérante dans le projet global de La Quincaillerie, notamment dans l'optique d'être un animateur numérique du territoire, d'être un laboratoire et un écosystème de compétences. La Quincaillerie « fixe les innovations numériques » et prend en parallèle en considération les besoins des associations. Ce tiers-lieu est également un lieu de travail partagé.

Le tiers-lieu permet de montrer qu'il y a d'autres moyens de faire, ce qui est l'essence même des tiers-lieux. Ce qui fait tiers-lieu, ce sont les gens qu'il y a dedans. Par exemple à La Quincaillerie, il y a des SDF, des réfugiés et des entrepreneurs. C'est un espace au sens large, avec une friction des cultures, c'est également un lieu social.

La Quincaillerie possède un plateau circulaire de 300m2, un espace de médiation pour les séniors, les enfants ... De nombreux publics se rendent dans ce tiers-lieu. Il y a aussi un Fablab, comme lieu ouvert à tous pour apprendre aux gens. La Quincaillerie est un « espace cool » avec des canapés pour l'aspect de convivialité. Il y a un accueil d'associations, comme par exemple Radio Guéret. La Quincaillerie organise également des évènements ; il y a une zone d'exposition (rotation toutes les trois semaines avec mise en avant d'artistes locaux), des conférences (souvent sur le numérique), des débats, pour une petite jauge, des showcases de 60 personnes maximum, des ateliers avec parfois des contributeurs. C'est ici la notion de biens communs qui est mise en avant.

Les élus veulent faire de La Quincaillerie un projet pérenne, avec un projet de déménagement. D'ailleurs, certains d'entre eux fréquentent le lieu. La Communauté d'agglo a acheté une friche commerciale de 1000m2 avec une vraie salle de concert, une salle de spectacle vivant d'une jauge de 80 personnes assises et 150 debout, un Fablab en deux parties, un bar associatif. Il y a la volonté de faire évoluer les modules.

La Quincaillerie fait partie du réseau des Tiers-Lieux Solidaires et est soutenu par la Fondation Orange. La Caisse des dépôts veut savoir comment un tiers lieu peut « changer la face d'un quartier ».

A La Quincaillerie, l'économique, le social, le culturel sont mêlés. C'est un véritable lieu de vie, un vrai outil de territoire. 80% du financement proviennent de subventions, les 20% restants sont à la charge de l'agglo.

C'est un nouveau lieu de diffusion. Il y a une volonté de faire évoluer les pratiques de la radio et de travailler autour du numérique.

Les populations savent qu'elles peuvent être exposées facilement. « Une petite mamie qui avait trop bu de rosé au bar du coin nous a dit qu'elle peignait et elle a fini par être exposée à La Quincaillerie. »

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

La Quincaillerie donne « accès aux droits culturels sans le vouloir, c'est notre nature ». Le tiers-lieu travaille également avec des lieux qui font de la résidence d'artistes. Avoir une résidence est à voir sur le plus long terme.

Les tiers-lieux sont aussi des portes d'entrée pour découvrir le territoire pour les néo ruraux. Dans les zones rurales, les gens se regroupent plus que dans des plus grandes villes.

Un tiers-lieu appartient à la politique au sens noble : vie de la cité. Ce n'est pas le tiers lieu qui attire, ce sont les personnes qui y sont qui attirent.

Le tiers-lieu est un outil de développement territorial avec des liens partout ailleurs. Il y a une notion de réseautage, c'est tout un vivier de compétences. Il y a un besoin de ressources humaines pour faire se développer le tiers-lieu.

La Quincaillerie appartient à des réseaux de tiers-lieux, comme par exemple en Creuse où il y en a treize, ou encore à la Coopérative des Tiers-Lieux en nouvelle-Aquitaine. Il y a également le réseau Tela qui est sociétaire de la Coopérative. Cela permet un échange de compétences entre les tiers-lieux, de la coopération. Pour l'instant « on ne perd pas notre âme », même si quelques petits compromis doivent être faits. Le Président donne carte blanche pour faire évoluer les systèmes. « Donc c'est bien d'être dans ces systèmes pour pouvoir le faire ». Le tiers-lieu est un mode de vie.

Annexe 19

Compte-rendu d'entretien avec Marie ROBERT318

Acteur interrogé : Marie ROBERT

Fonction : Responsable de la Médiathèque aux Mureaux

Date et lieu de l'entretien : 07/08/18 ; Médiathèque aux Mureaux

Pour définir un tiers-lieu, il faut vraiment réfléchir au modèle, c'est-à-dire répondre à la question « on met quoi derrière ? ». La Médiathèque n'est pas tellement un tiers-lieu pour M. ROBERT car elle n'est pas une réponse à « l'explosion du monde » notamment face au numérique. Cependant, la bibliothèque à Vélizy est un tiers-lieu. A propos du numérique, un poste informatique sur trois (de la Médiathèque aux Mureaux) est occupé par une personne dans le besoin : aide à la

318 L'entretien a peut-être été biaisé du fait que M. ROBERT a été ma collègue lorsque j'étais stagiaire au sein de la Communauté urbaine GPS&O.

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

relecture d'un CV, démarches administratives. Beaucoup de gens viennent aussi pour l'éducation : apprendre à lire et à écrire. C'est un lieu d'apprentissage de la citoyenneté, moins qu'un lieu de culture. La Médiathèque est un lieu pour changer les modes d'apprentissage. On apprend avec nos pairs, on partage les savoirs. Ce n'est pas « terrible » à la Médiathèque (aux Mureaux) pour ce qui est du partage des savoirs car le public est en demande de la position d'élève face au professeur, afin d'atteindre l'objectif de l'assimilation de la culture française.

La culture est quelque chose que l'on construit, c'est aussi une porte d'entrée ; la médiathèque est l'endroit institutionnel pour avoir les codes de cette culture. Pourtant, pour M. ROBERT, la Médiathèque peut être un moyen pour contourner l'aspect sacralisé de la culture, cet aspect qui peut effrayer les publics. Il faut pour cela être « le plus accessible possible ». Cela passe par la médiation, des horaires plus étendus et adaptés. Il faut noter que la médiation « n'est pas quelque chose de trop institutionnelle ». Contourner l'aspect sacralisé sera long, cela prendra peut-être dix ans pour « trouver le bénéfice », vingt/trente ans « pour que ça change ».

Concernant l'ancrage, il est nécessaire : « c'est mieux que les gens se connaissent » même si ce n'est que de vue. Cela aide aussi dans les recommandations entre pairs, les demandes de conseils. Pour l'apprentissage, les publics doivent être proches géographiquement ; les personnes âgées et les jeunes publics ont besoin de cette proximité.

Les établissements de la lecture publique peuvent être des objets politiques, notamment pour acquérir une certaine réputation. « En termes d'image, les bibliothèques arrivent à être novatrices », comme à Lezoux319.

89

319 https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/puy-de-dome/ouverture-lezoux-63-mediatheque-nouvelle-generation-1269389.html

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Annexe 20

Compte-rendu d'entretien avec Hélène BEUNON320

Acteur interrogé : Hélène BEUNON

Fonction : Responsable du réseau de la Lecture publique de GPS&O Date et lieu de l'entretien : 07/08/18 ; échange de mails

Le tiers-lieu est un lieu d'accueil sans vraiment d'image précise ; cela permet aux publics de « se sentir chez eux ». Le personnel d'une telle structure doit avoir fait « un énorme travail sur l'accueil et sur sa posture par rapport à l'usager ». Ainsi, les personnels de La Médiathèque n'ont pas la même posture face aux usagers que dans d'autres bibliothèques « plus classiques ». De plus, il existe une forme de tension avec l'administration du type « ce n'est pas dans vos missions » par rapport à des activités menées au sein de La Médiathèque. Pourtant, la posture des agents est le critère primordial pour qu'un tiers-lieu culturel se développe.

Les tiers-lieux culturels peuvent être un moyen de contourner l'aspect sacralisé de la culture, bien que cela ne « résolve pas tout ». Cela est particulièrement difficile en France, par rapport aux pays anglo-saxons ou nordiques, car la mission d'intégration sociale ne se « remplit » pas facilement, même si cela semble se faire « très lentement ».

Les équipements culturels sont des objets de tensions politiques, « on en a un bel exemple aux Mureaux ». C'est aussi évident dans l'idée même des tiers-lieux. Pour de nombreuses villes du territoire de GPS&O, les équipements culturels sont le reflet de la vision des politiques. « Les payeurs sont les patrons et on ne fait rien contre eux ».

Un tiers-lieu culturel doit avoir des liens avec les institutions pour les financements, car il est difficile de vivre de ses propres revenus. A moins que ce ne soit « pour un public très ciblé, ce qui est semble-t-il contraire aux tiers-lieux culturels ».

320 L'entretien a peut-être été biaisé du fait que M. ROBERT a été ma collègue lorsque j'étais stagiaire au sein de la Communauté urbaine GPS&O.

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Annexe 21

Compte-rendu d'entretien avec Sébastien CAMPOS Acteur interrogé : Sébastien CAMPOS

Fonction : Responsable du Château Ephémère

Date et lieu de l'entretien : 29/08/18 ; échange de mails

Les médiateurs, notamment dans le Vanderlab jouent plusieurs rôles : « accompagner les artistes dans leurs prototypages de dispositifs, ou d'objets etc. », « sensibiliser les habitants aux usages créatifs du numérique », « réduction de la fracture numérique (accès aux techno) », « acquisition des compétences artistiques : développer et aiguiser ses connaissances et des compétences plastiques et visuelles », « favoriser l'estime de soi et sa place au sein d'un groupe », « l'émancipation (DIYourself), « favoriser les liens intergénérationnels ».

Le Château Ephémère suit une approche de rendre le citoyen actif dans les démarches de pratiques culturelles pour plusieurs raisons : « favoriser l'imagination individuelle et collective, donc des mises en perspectives originales pour faire progresser la société », « favoriser l'expression libre et des zones de dialogues, donc l'émergence d'une culture commune », « partage des savoirs et savoir-faire ».

Le Château Ephémère accueille des artistes en résidence. Cet engouement peut s'expliquer par le fait que c'est « un lieu à part », sans réel équivalent en France ou même à l'étranger. Les thématiques « numériques, sonores et musicales » y sont pour beaucoup, ainsi que les outils mis à disposition ou bien encore « le mode de gestion rare ou unique ». Le fait que les résidents obtiennent une bourse en fin de résidence, ou bien encore répondre à un appel à projet font également partie des motivations à venir en résidence au Château Ephémère.

Chaque tiers-lieu a son propre modèle de fonctionnement : « équipe, budget, vision, lien ou pas avec le territoire ». « Chaque lieu à son modèle économique, structurel, sa part d'autonomie éco-politique, ses propos, ses règlements intérieurs, ses chartes etc. ». Les tiers-lieux sont souvent gérés par des associations, qui ont elles aussi leur propre modèle de fonctionnement : « démocratiques ou bien fermés, incluant ou pas de politiques dans leurs bureaux / conseil d'administration ». Souvent ces lieux sont dans des réseaux professionnels : ACTIF sur IDF, ou sur des réseaux spé artistique.

Les tiers-lieux ne sont pas des lieux récents : « les tiers-lieux de l'ère industriels existent depuis le 19ème siècle avec notamment les phalanstères ... porté par les industriels eux-mêmes ». « Depuis la fin des années 1990, il y a surement de grosses mutations, notamment avec la généralisation de l'outil numérique ou encore de politiques culturelles en faveur des tiers lieux (rapport Lextrait). »

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

L'entre soi est une histoire de réseau restreint ou fermé, parfois de manque de savoir-faire et d'ouverture, bien souvent accentué par des réalités sociales du territoire donné... Il y a effectivement un risque si le lieu par ses offres et pratiques est mono culturel et cloisonné. Son assise dans le temps offre plus de chance à une mixité de publics. Un lieu comme le Château Ephémère a un objectif d'ouverture et de mixité des publics. Mais compte tenu de sa situation et de sa jeunesse, « nous savons que cela va nous prendre encore pas mal de temps ».

Les structures gestionnaires sont assez grandes pour tout mettre en oeuvre pour que le projet demeure cohérent. La collectivité peut néanmoins offrir un regard extérieur intéressant, mais il peut aussi compromettre la neutralité politique (au sens politicienne) du projet.

Le Château Ephémère a apporté « pluri, multi, transdisciplinaire = rencontre entre praticiens, collaboration entre artiste parfois, échanges de savoirs et de savoirs faires » aux pratiques culturelles.

Le tiers-lieu culturel permet de contourner l'aspect sacralisé de la culture. Il est possible de venir au Château Ephémère pour faire du jardinage et découvrir la danse contemporaine japonaise dite BUto. On peut également se rendre au Fablab pour faire une maquette d'avion et découvrir un dispositif sonore innovant. « Il y a des rencontres surprises et de l'inattendu du coup... de cette manière cela contribue à la désacralisation, ce qui est bien ».

« Hybride = multi activités ou bien pluridisciplinaire ? Bon, pour les 2 ça marche ».

Concernant l'ancrage territorial, le Château Ephémère donne une métaphore de l'approche de cette notion : « technique de l'escargot : ancrage local, même fragile et progressivement consolider autour de soi ». Cependant, l'établissement avait déjà une ambition internationale et même une « petite identification à l'étranger », bien qu'il ne soit « toujours pas connu du tiers de la population de sa ville ».

Plusieurs critères sont nécessaires pour que le tiers-lieu culturel se développe : « résilience et enthousiasme de l'équipe, « confiance du propriétaire et des 1ers partenaires », « excellente gestion du budget », « inventivité et ouverture (open attitude) », « créer de l'actu régulière, du mouvement ».

Intégrer un réseau institutionnel ne contribue pas à perdre son âme, tant que « l'on garde son intégrité, notamment sur l'artistique ». A propos des relations avec les pouvoirs publics, voici la réponse de S. CAMPOS : « Les liens avec les institutionnels sont incontournables, que ce soit un propriétaire privé ou pas. Un maire, c'est le Sherif d'une ville... on a toujours un vis à vis. Pour ne pas dire besoin, je n'aime pas être dépendant, mais on l'est toujours un peu. Les liens doivent être solides avec les investigateurs du projet, donc il y a toujours des enjeux à être en de bon terme avec les pouvoirs publics...Maintenant de là à manger à tous les râteliers, à demander l'aumône et à perdre son identité sous la pression du politique, je sais ce que j'ai choisi !! ».

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Partie 3 : Les visites de terrains

Annexe 22

Centquatre : Visite de terrain `personnelle' lors d'un vernissage d'exposition le 19 mai 2018

Impressions

Le bâtiment est incroyablement lumineux et clair. Dans ce qui semble être une nef, des artistes s'exercent à plusieurs disciplines : différentes danses, théâtre, arts du cirque...

Déjeuner au restaurant du site : La carte propose des plats très à la mode, comme qui dirait instagrammables321. La clientèle est âgée entre vingt et cinquante ans.

L'exposition : C'est celle de Vihls, intitulée Fragments urbains. Ce jour-là, elle est gratuite et deviendra payante une fois le vernissage passé. Elle semble visitée par des bobos parisiens, si je me fie à la simple apparence et aux styles vestimentaires. Les visiteurs donnent l'impression de se montrer et montrer `qu'ils étaient là'. Tout ceci peut donner la sensation de se trouver dans un lieu d'exposition parisien tout à fait classique, voire même me donne l'impression de ne pas être à ma place parmi eux. L'exposition en elle-même est vraiment intéressante, avec du travail autour de l'urbanisme, de la vidéo, des visages etc.

Conclusion : Je n'ai absolument pas eu le sentiment d'être dans un lieu où les barrières sociales sont abolies. J'ai au contraire ressenti l'aspect sacralisé de la culture. J'ai eu l'impression de gentrification du quartier autour de ce site : le territoire (à l'échelle du quartier) est populaire, ce qui paraissait peu cohérent avec les visiteurs du site. En revanche, on remarque vraiment l'aspect du processus de création mis en valeur avec des espaces de pratiques, de répétition ouverts à tous. Le Centquatre ne présente pas d'éléments sur le processus de construction de l'exposition Fragments urbains. Une oeuvre de l'artiste est gracieusement présente dans la nef.

93

321 En lien avec le réseau social Instagram

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Annexe 23

Centquatre : Visite guidée par le personnel (Sonia) des relations publiques le 6 juin 2018 Impressions et prises de notes diverses

Le rendez-vous, organisé spécialement pour les étudiants (selon le site Internet et la prise de RDV par mail), s'avère être une visite guidée des lieux. La visite est assez lissée voire même expéditive.

On apprend tout de même que les murs du Centquatre appartiennent à la Mairie de Paris, qui verse 8 millions d'euros de subvention (sans précision sur la fréquence de ce financement). La gestion se fait en EPCC.

Selon Sonia, le nouveau directeur est libre dans sa programmation car la mairie est socialiste.

Il y a un nouveau directeur, donc un nouveau projet. Ce nouveau projet s'ancre dans le territoire (18ème et 19ème arrondissements) et a la volonté de faire de ce lieu un endroit vivant.

Le Centquatre accueille des résidences, un incubateur de start-ups, le Cinq, qui est un lieu dans lequel les particuliers louent durant 1h des salles contre 2 euros. C'est un lieu réservé à la pratique amateure, ce ne sont pas des cours.

Annexe 24

Grands Voisins : Visite guidée/de presse par le personnel (de l'association Aurore) le 22 juin 2018 Impressions et prises de notes diverses

La Saison 1 s'est étendue de fin 2014 à septembre 2015 ; l'ouverture au public s'est prolongée jusqu'en décembre 2017. Pour la Saison 2, il y a une perte d'emprise sur une partie du bâti ; il a fallu reloger une partie des personnes habitantes du site. Cela a provoqué une mobilisation citoyenne qui dénonce les coupes budgétaires : Sans toit pas sans nous. La Saison 2 devrait se terminer en juin 2020. Elle présente une programmation avec différentes thématiques.

Trois associations gèrent le site : Yes We Camp, Aurore et Plateau Urbain. Chaque structure, en plus des autres associations qui y sont résidentes, a ses propres ambitions par rapport aux Grands Voisins.

Les structures résidentes répondent à un appel à candidatures. Parmi les critères de sélection on trouve : « faire des actions en direction des résidents de l'hébergement », « faire des choses nouvelles ». Il y a 1000 sélectionnés. 45% des présents à la Saison 2 l'étaient aussi à la Saison 1.

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Aurore est une « vieille » association qui touche 90% de ses subventions de la part de l'Etat. En effet, elle rappelle que l'hébergement est à la charge de celui-ci. Les Grands Voisins repensent les manières de faire du travail social. Il est l'un des seuls projets à avoir le social et l'insertion en son coeur.

Le projet présente une volonté d'ouverture du lieu vers l'extérieur, de créer des espaces partagés.

A l'origine, le projet n'envisageait pas de dynamiser le quartier ; aujourd'hui il « préfigure le futur quartier ». Le nouveau quartier sera un éco-quartier.

Ce sont tous les usagers du lieu qui ont permis de développer ses/ces projets. Il y a la volonté de « faire cohabiter le public », de le « rendre humain ».

Le projet se doit d'être adapté à son contexte territorial.

Les revenus proviennent des loyers perçus, des recettes commerciales (bar, restaurant, privatisations). Ces revenus servent à financer le projet global, comme les salaires par exemples.

Les visiteurs du site viennent pour beaucoup du quartier et de Paris. Les Grands Voisins sont « identifiés comme un spot cool en terrasse » le weekend. Cela n'a pas l'air de les ravir. C'est un problème puisque ces visiteurs viennent faire la fête et ne se « rendent pas compte que c'est un centre d'hébergement ».

Une équipe de programmation gère énormément de demandes pour se produire. Une sélection s'opère donc : il faut que la proposition soit en adéquation avec la programmation du site. Si ce n'est pas le cas, il est toujours possible de se produire mais en privatisant un espace et n'est donc pas ouvert au public.

Conclusion : Ce site est plutôt tourné autour du social que du culturel, c'est pourquoi il n'a pas été `retenu' pour faire partie des cas d'études de cette recherche autour des tiers-lieux culturels.

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Annexe 25

Château Ephémère : after-work et visite guidée par S. CAMPOS le 5 juillet 2018

Impressions

L'after-work est un moment très convivial (c'est le 2nd auquel j'ai pu assister dans ce lieu, le premier datant de l'année dernière). C'est un lieu de rendez-vous pour diverses personnes, dont le personnel de la Communauté urbaine GPS&O. Une buvette et un Dj sont installés pour participer à la convivialité, en plus de la présence de sièges et mange-debouts.

Le responsable du Château accueille les personnes venant pour la première fois et propose une visite guidée du bâtiment. Il commence par raconter l'Histoire du Château puis comment est né le projet de tiers-lieu et son mode de fonctionnement en lien avec l'ex CA2RS et le nouveau GPS&O. Le Château possède entre autre : un Fablab, une imprimante 3D, un espace de co-working pour les artistes et autres résidents, des studios d'enregistrement réalisés par des chantiers d'insertion et utilisables par des citoyens lambda, un restaurant etc.

Conclusion : Ce lieu est agréable, on se sent chez soi et `en confiance'. C'est un autre lieu de rendezvous plus informel pour retrouver des collègues de travail. L'after-work organisé ce soir-là correspondait parfaitement à la définition d'un tiers-lieu : entre le travail et la maison.

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Partie 4 : Les éléments graphiques

Annexe 26

Carte de la typologie et localisation des Laboratorios ciudadanos dans Madrid

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E. PESCHAUD

Annexe 27

Carte des tiers-lieux creusois

Source : R. BESSON, 2017

Annexe 28

Tableaux comparatifs de différents tiers-lieux (culturels) [Ces tableaux ont été construits à l'aide d'informations glanées durant les entretiens, la lecture d'articles de presse, la consultation des sites Internet des établissements etc.]

Tiers-lieux culturels citoyens

Tableau A1

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E. PESCHAUD

Tableau A2

Tableau A3

Tableau A4

Tableau A5

Tableau A6

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau A7

Tableau A8

Tableau A9

Tiers-lieux culturels institutionnels

Tableau B1

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau B2

Tableau B3

Tableau B4

Tableau B5

Tableau B6

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau B7

Tableau B8

Tableau B9

Tiers-lieux culturels équilibrés

Tableau C1

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau

Tableau C3

Tableau C4

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau C5

Tableau C6

Tableau C7

Tableau C8

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau C9

Autres Tableau D1

Tableau D2

Tableau D3

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau D4

Tableau D5

Tableau D6

Tableau D7

Tableau D8

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Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Tableau D9

Source : E. PESCHAUD, 2018

Annexe 29

Schématisation de la diffusion culturelle par l'Etat

Ce schéma est un moyen de simplifier la lecture de la diffusion culturelle ; il a surtout permis à la compréhension du lien entre les institutions et les pouvoirs publics. C'est un document de travail.

Tiers-lieux exemple : concept des Micro Folies

Publics

empêchés ; non-publics

Diffusion

(( alternative »

Expositions, Musées etc.

MINISTERE DE LA CULTURE

Diffusion

(( classique »

Publics

« avertis »

Pas ou peu de contrôle de l'Etat ou des collectivités publiques

Tiers-lieux indépendants

Tous types de publics
(« avertis », empêchés
et non-publics)

Source : E. PESCHAUD, 2018

Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ?

E. PESCHAUD

Annexe 30

Schématisation des missions du tiers-lieu culturel

Ce document de travail permet de visualiser quelles sont les missions des tiers-lieux culturels, vis-à-vis de la diffusion culturelle. Il a été élaboré en partie grâce à l'article Les musées nationaux : quelles ressources pour quelles missions ?322 et aux lectures et entretiens effectués en parallèle. Le schéma a pour but de montrer que les tiers-lieux culturels vont plus loin dans leurs missions, en comparaison du cas des musées nationaux.

Conserver, restaurer, étudier
et enrichir leurs ressources

Concevoir et mettre en

oeuvre des actions d'éducation et de diffusion visant à assurer l'égal accès

de tous à la culture

Rendre leurs ressources
accessibles au public le plus large

Contribuer aux progrès de
la connaissance et de la
recherche ainsi qu'à leur
diffusion

Participation citoyenne

Mission propre aux tiers-lieux culturels

 

Mission des lieux culturels classiques

Démocratisation
culturelle

Légende :

Démocratie culturelle

Restauration de lieux
(dans certains cas, ce
n'est pas systématique)

Tiers-lieu culturel

 

Source : E. PESCHAUD, 2018

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322 Rapport d'information n° 574 (2013-2014) de M. Yann GAILLARD, fait au nom de la commission des finances, déposé le 4 juin 2014






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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle