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L'habitat participatif: programme alternatif de logement stratégie d'une SEM d'aménagement: la SERL, en matière d'habitat participatif


par Anthony FERARD
Polytech Tours - Ingénieur en aménagement 2016
  

Disponible en mode multipage

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L'HABITAT PARTICIPATIF :

PROGRAMME ALTERNATIF DE

LOGEMENT

Stratégie d'une SEM d'aménagement : la SERL, en matière d'habitat participatif

2015 - 2016

Directeur de recherche Sabine Guitel

FERARD Anthony

II

L'HABITAT PARTICIPATIF : PROGRAMME

ALTERNATIF DE LOGEMENT

Stratégie d'une SEM d'aménagement : la SERL, en matière d'habitat

participatif

III

2015 - 2016

Directeur de recherche

FERARD Anthony

Sabine Guitel

iv

AVERTISSEMENT

Cette recherche a fait appel à des lectures, enquêtes et interviews. Tout emprunt à des contenus d'interviews, des écrits autres que strictement personnel, toute reproduction et citation, font systématiquement l'objet d'un référencement.

L'auteur de cette recherche a signé une attestation sur l'honneur de non plagiat.

v

FORMATION PAR LA RECHERCHE ET PROJET DE FIN D'éTUDES EN

GENIE DE L'AMENAGEMENT

La formation au génie de l'aménagement, assurée par le département aménagement de l'Ecole Polytechnique de l'Université de Tours, associe dans le champ de l'urbanisme et de l'aménagement, l'acquisition de connaissances fondamentales, l'acquisition de techniques et de savoir faire, la formation à la pratique professionnelle et la formation par la recherche. Cette dernière ne vise pas à former les seuls futurs élèves désireux de prolonger leur formation par les études doctorales, mais tout en ouvrant à cette voie, elle vise tout d'abord à favoriser la capacité des futurs ingénieurs à :

Accroître leurs compétences en matière de pratique professionnelle par la mobilisation de connaissances et de techniques, dont les fondements et contenus ont été explorés le plus finement possible afin d'en assurer une bonne maîtrise intellectuelle et pratique,

Accroître la capacité des ingénieurs en génie de l'aménagement à innover tant en matière de méthodes que d'outils, mobilisables pour affronter et résoudre les problèmes complexes posés par l'organisation et la gestion des espaces.

La formation par la recherche inclut un exercice individuel de recherche, le projet de fin d'études (P.F.E.), situé en dernière année de formation des élèves ingénieurs. Cet exercice correspond à un stage d'une durée minimum de trois mois, en laboratoire de recherche, principalement au sein de l'équipe Ingénierie du Projet d'Aménagement, Paysage et Environnement de l'UMR 6173 CITERES à laquelle appartiennent les enseignants-chercheurs du département aménagement.

Le travail de recherche, dont l'objectif de base est d'acquérir une compétence méthodologique en matière de recherche, doit répondre à l'un des deux grands objectifs :

Développer toute ou partie d'une méthode ou d'un outil nouveau permettant le traitement innovant d'un problème d'aménagement

Approfondir les connaissances de base pour mieux affronter une question complexe en matière d'aménagement.

Afin de valoriser ce travail de recherche nous avons décidé de mettre en ligne sur la base du Système Universitaire de Documentation (SUDOC), les mémoires à partir de la mention bien.

vi

REMERCIEMENTS

Ce PFE s'est déroulé dans le cadre d'un contrat de professionnalisation réalisé à la SERL. Je tiens en premier lieu à remercier sincèrement Audrey Delaloy et Clara Thomas pour avoir encadré ce travail mais surtout pour m'avoir offert la chance d'effectuer ma première grande expérience professionnelle au sein de la SERL.

Un grand merci également à l'ensemble des salariés de la SERL pour l'accueil que vous m'avez réservé

Je tiens à remercier Sabine Guitel tutrice sur ce projet pour son aide précieuse, ses conseils et sa gentillesse.

Je tiens également à remercier toutes les personnes que j'ai rencontré lors de mes entretiens et qui ont accepté de me livrer leurs expériences sur le sujet de l'habitat participatif.

Dernièrement, je remercie Lucie et Nicolas pour leurs relectures et leurs conseils toujours avisés.

7

SOMMAIRE

Sommaire

Introduction générale

7

9

 

1.

Définition de l'objet de recherche

9

 

2.

Origines et motivations de l'étude

10

 

3.

Question de recherche

11

 

4.

Méthodologie

11

 

5.

Structure du travail

12

I)

L'HABITAT participatif : de quoi parlons-nous ?

14

A)

 

Différentes formes d'habitat participatif

14

 

1.

Quelle(s) définition(s) pour l'habitat participatif '

14

 

2. Quelles sont les formes juridiques d'habitat participatif '

16

 

B)

État des lieux de l'habitat participatif

20

 

1.

L'habitat participatif à l'étranger, quelles influences pour le(s) modèle(s) français '

20

 

2.

L'habitat participatif en France, portrait-robot d'un modèle qui peine à se développer.

27

 

3.

La France, le choix d'une politique d'accès au logement différente

37

 

C)

 

La loi ALUR et l'hp quelles conséquences ?

39

 

1.

Genèse de cette loi en lien avec l'habitat participatif

39

 

2.

Les nouveaux statuts juridiques et leurs conséquences

39

 

3.

Les décrets attendus pour 2016

42

 

II)

 

La SERL et la métropole Lyonnaise, deux acteurs institutionnels à la

 

recherche d'innovations en matière d'offre de logement.

46

A)

 

La SERL, un aménageur qui innove dans sa gestion de projet

47

 

1.

Étude sur les caractéristiques de la SERL

47

 

2.

Les différentes étapes et les caractéristiques économiques d'un contrat de concession

49

 

3.

La question de la gestion financière d'un projet d'aménagement

53

 

B)

 

La SERL, un aménageur intimement lié à un territoire, la métropole Lyonnaise

59

 

1.

La Métropole Lyonnaise, une institution en mouvance

59

 

2.

La Métropole de Lyon, vers un modèle « Bottom-Up » '

61

 

3.

La SERL, une structure qui s'adapte aux évolutions de la Métropole de Lyon

62

C)

 

La métropole Lyonnaise, un territoire fertile pour le développement de l'habitat

 

participatif ? 64

1. La Métropole Lyonnaise, territoire d'une expérience emblématique en matière d'habitat

participatif, le village vertical 64

2. L'influence d'Habicoop sur le développement de l'habitat participatif à Lyon 69

3. Quel(s) avenir(s) pour l'habitat participatif sur le territoire métropolitain ' 71

III) Quelle(s) stratégie(s) pour la SERL en matière d'habitat participatif ? 79

A) L'habitat participatif quelles conséquences sur un projet urbain ? 79

1. L'habitat participatif, quelles conséquences sur l'accession au logement ' 80

2. L'habitat participatif, quelles conséquences pour la durée et le coût d'un projet ' 82

3. L'habitat participatif, des projets plus risqués ' 85

B) Quelles expertises la SERL peut-elle mettre au profit de la consolidation des

opérations d'habitat participatif ? 88

8

 

1.

La SERL des capacités importantes pour le développement de l'H.P

88

 

2.

L'habitat participatif, quelles conséquences pour le métier d'aménageur ?

88

 

3.

Des expériences infructueuses (à ce jour) en matière d'habitat participatif

90

 

C)

 

Proposition d'un modèle opérationnel pour développer l'Habitat Participatif.

92

 

1.

Identifier la parcelle, dimensionner le projet, adapter son planning

92

 

2.

Associer un bailleur social au projet

93

 

3.

Adapter ses procédures

95

Conclusion 97

Bibliographie 99

Annexes 103

Table des figures 103

Entretiens 105

Journée thématique 105

M.Chanal 107

S.GOLFOUSE 111

M.Combourieu 114

B.Pont 117

Mind-Mapping sur le sujet 120

9

HABITAT PARTICIPATIF : MONTAGE

ALTERNATIF DE LOGEMENT

INTRODUCTION GÉNÉRALE

1. Définition de l'objet de recherche

C

o-working, co-voiturage, crowdfounding, économie collaborative,
entrepreneuriat social, colunching, couch surfing, etc... on assiste depuis

quelques années à une véritable révolution dans notre société. Avec l'explosion des réseaux sociaux liée à l'avènement d'internet, c'est toute la vision classique de l'économie qui devrait être bouleversée. C'est en tout cas la vision de Jérémy Rifkin, économiste américain, auteur de la troisième révolution industrielle qui expose en 2014 dans la nouvelle société du coût marginal zéro, sa vision future d'une « société basée sur l'échange » où « l'économie aura une forme hybride entre capitalisme et partage ». Si cette vision peut paraître utopiste, elle trouve un écho de plus en plus important au sein de notre société. En témoigne, le succès grandissant des plateformes collaboratives comme oui share, dont D. Filippova, (connector1 de la plateforme) faisait état en 2014, lors des conférences TEDx (organisation autoproclamée « propagateur d'idée »), en annonçant l'avènement prochain de multiples formes de démocraties participatives2.

Le marché de l'immobilier n'échappe pas à cette évolution. S'il reste en France traditionnel avec la quasi-totalité des productions immobilières assurées par les particuliers, les opérateurs d'habitation à loyer modéré (HLM) et promoteurs privés3, une nouvelle forme d'habiter semble émerger.

Il existe une multitude de mots et expressions pour qualifier ce mouvement, nous avons choisi d'utiliser dans cette étude le terme d'« habitat participatif ». Il renvoie à l'idée d'un « engagement collectif [...] de la conception à la gestion de l'ensemble immobilier » (Devaux, 2015), engagement fondé sur « la participation et la coopération, replaçant le citoyen et l'habitant au centre des préoccupations et de l'action » (R.Pointelin, 2016). L'habitat participatif doit bien être compris dans cette

1 Connector est le mot utilisé pour décrire les membres les plus impliqués dans la plateforme.

2 L'engagement citoyen face au mythe du plein emploi | Diana Filippova | TEDxParis - YouTube. 2016. Disponible sur: https://www.youtube.com/watch?v=PX4DUIuJhjs. [Visionnée le 05 Mars 2016].

3 Entre 2000 et 2010, la construction neuve s'est décomposée de cette façon 40 000 unités HLM, 90 000 promotion immobilière privée, 160 000 particuliers ( Driant, 2010)

10

étude comme un terme générique et ne doit pas faire oublier les autres expressions parfois utilisées lorsque l'on parle d'alternative aux formes classiques de logement4.

La notion d'alternative est primordiale dans la production d'habitat participatif, c'est pour cette raison qu'il est souvent présenté comme la « troisième voie d'accès au logement »5, les deux premières étant les logements privés et les logements sociaux, qui sont en France les formes classiques de logements.

L'habitat participatif ne représente pour le moment quasiment rien sur le marché du logement français (Devaux, 2015). En effet, on dénombre seulement entre 300 et 400 projets6 en cours ou réalisés sur le territoire7. Néanmoins ce sujet fait l'objet d'un nombre de plus en plus important de thèses, d'articles, de séminaires, de journées thématiques qui illustrent un intérêt de plus en plus fort pour cet outil de production. On assiste également à une institutionnalisation de cette « troisième voie » pour le logement. Si à l'origine, ce mouvement était cantonné à un cercle de militants il s'étend et intéresse de plus en plus le monde professionnel (S.Bresson, 2014).

2. Origines et motivations de l'étude

Le présent travail est un exemple de cet intérêt des professionnels pour l'habitat participatif. En effet, cette étude est à l'origine une volonté de la SERL, société d'économie mixte de la Métropole de Lyon depuis 1957. Cet aménageur intervient le plus souvent comme maître d'ouvrage dans des opérations de renouvellement urbain ou de création de nouveaux pôles de centralité, dans des projets urbains8.

Ce PFE a été initié en septembre 2015 et vient conclure ma formation d'ingénieur de l'aménagement et de l'environnement effectuée à Polytech Tours. Il a la particularité d'avoir été réalisé à l'issue d'une année effectuée en alternance dans le cadre d'un contrat de professionnalisation avec la SERL, pendant laquelle j'ai eu la fonction d'assistant d'études.

4 Nous reviendrons de manière délibérée dans la partie I sur la raison du choix de l'expression habitat participatif, ainsi que sur la définition précise de cette notion.

5 Habitat participatif, la "copro" de demain ?. 2016. Habitat participatif, la "copro" de demain ?. [WEB] Disponible sur : http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/11/16/habitat-participatif-la-copro-de-demain 3514984 3234.html. [Accès 17 March 2016].

6 Les Français découvrent l'habitat participatif. 2016. Les Français découvrent l'habitat participatif. [WEB] Disponibles: http://www.lemonde.fr/logement/article/2015/07/20/les-francais-decouvrent-l-habitat-

participatif 4690840 1653445.html. [Accès le 17 Mars 2016].

7 Il faut préciser qu'il est difficile d'avoir des données sur le nombre de projet en habitat participatif. Cet enjeu a d'ailleurs été fléché comme un besoin fondamental lors des Rencontres nationales de l'habitat participatif en juillet 2015. La mise en place de cette base de donnée doit intervenir courant 2016.

8 Il s'agit issue que d'une introduction très succincte de la SERL. Son rôle, son mode de fonctionnement ses particularités et son domaine d'intervention feront l'objet d'une partie complète dans ce mémoire. Partie II

11

Ce sujet de PFE n'est pas seulement une demande de la part de la SERL, il s'inscrit à plus grande échelle dans une thématique générale qui m'apparaît fondamentale, celle de la concertation et de l'intégration des habitants dans le processus de production de la ville.

Si la thématique n'a pas évolué, l'approche a fait l'objet de nombreux soubresauts et réorientations. Ces changements sont le fruit de lectures, de rencontres mais surtout d'échanges sur la thématique de l'habitat participatif avec les membres de la SERL.

3. Question de recherche

La question suivante guidera le travail de recherche :

Comment la SERL, acteur opérationnel de l'aménagement, peut elle appréhender une forme innovante de création de logement : l'habitat participatif ?

Cette problématique est une synthèse de plusieurs interrogations :

· Qu'est-ce que l'habitat participatif ?

· Quel contexte de développement en France ?

· Quelles expertises la SERL peut elle mettre au profit de la consolidation des opérations d'habitat participatif ?

· Quel(s) avenir(s) pour l'habitat participatif sur le territoire de la Métropole de Lyon ?

· Qu'est-ce que l'habitat participatif suppose comme : compétence, savoir-faire, réseau, ... ?

4. Méthodologie

Afin de répondre à cette question, j'ai développé une stratégie basée sur la mise en relation et le plus souvent la confrontation des points de vue : entre habitants, universitaire, associations défenseurs de l'habitat participatif et professionnels de l'aménagement.

Cette approche est justifiée par le cadre de cette étude. Ayant réalisée celle-ci durant une année en contrat de professionnalisation, mon approche du métier à énormément évoluée, entre le début de cette étude effectuée dans un cadre universitaire et la fin de celle-ci au sein de la SERL.

Ce travail s'est fait de manière itératif, plusieurs rencontres ont fait évoluer mon point de vu :

·

12

Sylvette Denefle, professeur des universités en sociologie. Université de Tours

· Participation à une journée conférence organisée par la SCET (Société Centrale pour l'Équipement du Territoire) et la Caisse de dépôts avec pour thématique « Habitat participatif : nouveau levier de développement pour les aménageurs et les bailleurs »

· Benjamin Pont, créateur de la structure Graine d'idée, accompagnateur de groupe d'habitants en habitat participatif

· Martine Chanal, chargée de mission habitat Grand Lyon

· Stéphanie Golfouse, Rhône Saône Habitat, Responsable développement et patrimoine

· Conférence organisée par Habicoop sur la thématique du vieillissement

· Conférence de la coopérative Chamarel

· De nombreux échanges avec Audrey Delaloy, référente renouvellement urbain à la SERL

La diversité de ces rencontres : personnes du monde universitaire, de l'associatif, du monde professionnel, ont fortement influencé ce travail. Elles m'ont permis de venir confronter des approches souvent opposées. Les conclusions de ce travail sont les résultats de ces rencontres et d'une approche entre étude universitaire et analyse professionnelle.

5. Structure du travail

Au fur et à mesure de l'avancée de ce travail de recherche il paraissait de plus en plus évident de préciser un certain nombre de points relatif à l'habitat participatif et aux missions de la SERL. Ces éléments ont permis de structurer les différentes parties de ce mémoire.

Partie 1 : Comprendre l'habitat participatif

La première question, la plus évidente mais pas la plus simple, celle de la définition de l'habitat participatif. Nous allons le voir par la suite le terme d'habitat participatif est une expression générique et reste encore difficilement définissable.

L'absence d'une unanimité sémantique a d'ailleurs rendu les recherches difficiles, il a fallu être vigilent sur la signification des notions mobilisées par les différents auteurs. En effet, certains parlent d'habitat participatif, d'habitat alternatif, d'autres d'habitat coopératif... avec à chaque fois des significations biens différentes.

À l'issue de ce travail de définition du thème de recherche, nous effectuerons un état des lieux de l'habitat participatif en France. Comme nous le verrons, le contexte français du développement de l'habitat participatif est fortement lié à la mise en place

13

de la loi ALUR, nous consacrerons donc une partie aux modifications apportées par cette loi.

Partie 2 : La SERL et la Métropole Lyonnaise, deux acteurs institutionnels à la recherche d'innovations en matière d'offre de logement

La deuxième partie introduit l'aménageur : la SERL ainsi que son commanditaire : la Métropole de Lyon. Il s'agira ici de faire une description du rôle de cet aménageur, ainsi que ses particularités et plus particulièrement comprendre sa manière de monter une opération d'aménagement. Cette étude sera contextualisée à l'espace géographique d'intervention de la SERL, la Métropole Lyonnaise. Nous verrons ainsi que ce territoire est en constante évolution et que la SERL participe grandement à celle-ci. L'objectif de cette partie est de venir faire le lien entre l'habitat participatif, la SERL et la Métropole afin de définir quelles sont les opportunités d'introduction de ce type de produit immobilier à l'échelle du Grand Lyon.

Partie 3 : Quelle(s) stratégie(s) pour la SERL en matière d'habitat participatif ?

La troisième partie consiste en une analyse du montage opérationnel en habitat participatif. L'objectif est ici de faire état des risques liées à ce type d'opération et de la capacité de la SERL à venir en appui de ce type de montage. Enfin, nous viendrons proposer un modèle permettant le développement de l'habitat participatif. Ce modèle est le résultat de l'ensemble des éléments de cette étude.

Conclusion

La conclusion engage une discussion sur l'utilisation future de ce travail pour la SERL et propose des stratégies ainsi que des pistes d'évolution sur le développement de l'habitat participatif.

14

I) L'HABITAT PARTICIPATIF : DE QUOI PARLONS-NOUS ?

C

ette première partie a pour objectif de définir et de dresser un état des lieux de l'habitat participatif. Dans cette optique nous aborderons les questions suivantes : Qu'est ce que l'habitat participatif ? Quelles sont les caractéristiques de ce type de montage ? Quelles sont les formes juridiques de ce type d'habitat ? Comment l'habitat participatif est-il apparu ? Quel développement en France et à l'étranger ?

Cette analyse sera structurée en trois parties. Dans un premier temps nous définirons l'habitat participatif en identifiant les caractéristiques de cette forme d'habitat et sa définition juridique. Ensuite, nous dresserons un état des lieux de l'habitat participatif en France, nous verrons ainsi que pour comprendre le modèle qui se développe dans notre pays, une action de benchmarking est indispensable. Pour finir, nous analyserons les conséquences de la loi ALUR sur le développement de l'habitat participatif en s'interrogeant sur une probable institutionnalisation du mouvement.

A) DIFFÉRENTES FORMES D'HABITAT PARTICIPATIF

1. Quelle(s) définition(s) pour l'habitat participatif ?

H

abitat groupé ; auto-promotion ; habitat partagé ; habitat participatif ; cohousing ; coopératives d'habitants ; habitat coopératif ; habitat collectif choisi... Il existe une multitude de termes pour définir notre sujet d'étude ce qui témoigne d'une diversité en la matière. L'emploi des uns ou des autres, peut s'expliquer, comme nous allons le voir par la suite, par différents éléments liés aux caractéristiques propres de chaque projet, que ce soit la structure juridique utilisée ou bien le rôle du groupe d'habitants dans ce processus. L'habitat participatif en France peut être comparé à une nébuleuse dans l'offre de logement du parc immobilier, ni logement social, ni logement privé, ni logement collectif, le caractère hybride de cette forme de logement rend sa définition très complexe.

Dans cette étude, nous avons choisi d'utiliser l'expression d'« habitat participatif » pour qualifier notre sujet. Ce choix s'explique par son utilisation par le législateur dans loi ALUR de 2014. Ce cadre réglementaire participe aujourd'hui à la clarification du mouvement participatif et permet la fédération des acteurs de ce domaine autour d'une même expression.

Réclamée depuis des années, la loi ALUR a donné en plus d'une définition, un cadre juridique à ce type de logement. Elle définit l'habitat participatif comme « une démarche citoyenne qui permet à des personnes physiques de s'associer, le cas échéant avec des personnes morales, afin de participer à la définition et à la conception de leurs logements et des espaces destinés à un usage commun, de

15

construire ou d'acquérir un ou plusieurs immeubles destinés à leur habitation et, le cas échéant, d'assurer la gestion ultérieure des immeubles construits ou acquis. »

Étant donné le caractère générique de cette définition, nous avons choisi d'effectuer une précision sur cet élément et définissons l'habitat participatif à partir de l'analyse faite par Camille Devaux pour cadrer notre étude. Cette auteure a publié plusieurs ouvrages sur le thème de l'habitat participatif dont « L'habitat participatif, de l'initiation habitante à l'action publique » qui fait état des lieux du processus d'institutionnalisation du mouvement de l'habitat participatif. C'est sur la base des critères développés par cette auteure que nous définirons dans notre analyse les opérations d'habitat participatif qui se caractérisent par :

· L'engagement volontaire des ménages dans le projet,

· Une participation à la conception et/ou à la gestion du projet,

· Une vocation collective attribuée au projet par les futurs habitants,

· L'existence d'espaces communs,

· L'existence d'un socle commun de valeurs faisant écho au partage, au lien social et/ou à l'écologie,


· Un objectif économique secondaire.

Définir l'habitat participatif à partir de ces six points nous permet d'avoir une définition plus précise et opérationnelle que celle fournit par la loi ALUR. On voit ainsi à partir de ces caractéristiques plusieurs éléments qui se dégagent.

En premier lieu, l'aspect participatif qui place les habitants au coeur du projet. Ce qui sous-entend plusieurs éléments, ils participent à la conception du projet, pas seulement à son terme mais dès l'origine de celui-ci. Cette participation se poursuit également après la construction du projet avec la nécessité d'une intégration au processus de décision du groupe via un mode de prise de décision démocratique.

L'habitat participatif sous-entend également un aspect collaboratif dans le mode de vie avec l'existence de pièces communes, buanderie, chambre d'amis, espaces extérieurs etc. Un dernier point dans la compréhension de l'habitat participatif, c'est l'importance des espaces privatifs. Vivre en habitat participatif, ne-sous entend pas la suppression de toutes notions de propriété privée, mais plutôt une gestion collective de certains espaces et une participation à la vie collaborative du groupe.

16

Figure 1 : Infographie de l'habitat participatif. Réalisation personnelle

2. Quelles sont les formes juridiques d'habitat participatif ?

Décrire la forme juridique de développement de l'habitat participatif demeure un point délicat de l'analyse de cette forme de logement. En effet, jusqu'à la mise en place de la loi ALUR (Voir partie I-C) aucun statut ne permettait la mise en place de manière efficiente d'un collectif d'habitat participatif.

La présente partie consiste à décrire ces statuts et d'effectuer une synthèse comparative des modèles juridiques existants. En raison de l'importance de l'introduction de la loi ALUR et des nouveautés qu'elle apporte, une partie exclusive sera consacrée aux nouveaux statuts juridiques introduites par cette loi.

Jusqu'à présent les collectifs utilisaient des formes juridiques classiques qu'ils adaptaient en fonction des volontés du groupement et qui évoluaient parfois au fur et à mesure de l'avancement du projet.

1. L'indivision et/ou copropriété

L'indivision est un modèle juridique permettant à plusieurs personnes d'être propriétaire d'un même bien, sans nécessairement recourir à la création d'une personne morale. Les habitants sont ainsi propriétaires à hauteur de leur contribution financière via un système de quotes-parts. Ce statut nécessite peu de démarches administratives en raison de la non-création d'une personnalité morale.

A première vue ce modèle semble très simple, cependant la gestion quotidienne rend difficile la pérennité de ce modèle sur le long terme. En effet, pour toutes prises de décision au quotidien la majorité des 2/3 des droits indivis est nécessaire, ce qui entraîne bien souvent des blocages importants dans la gestion au quotidien des biens meubles.

17

Cette forme juridique n'est pas conçue pour perdurer dans le temps, en effet la gestion des départs et des arrivées est rendue impossible par le droit français. En effet, selon l'article 815 du Code Civile, « nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage [É] à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention », un des propriétaires s'il le souhaite peut donc décider de la vente du bien et donc entraîner la fin de l'indivision.

C'est pour cette raison que l'indivision évolue souvent en copropriété à l'issue de la réception des logements. Cette forme juridique est très classique dans le modèle français. Ici, les habitant se regroupent en syndicat de copropriété, l'organisation et le fonctionnement étant fixés dans le règlement de copropriété.

Si ce modèle est pour le moment largement utilisé, c'est avant tout en raison de l'absence de forme juridique réellement adaptée à l'habitat participatif. En effet, la copropriété est un modèle très rigide et selon M.Combourieu, notaire lyonnaise, « peu adaptée aux valeurs de l'habitat participatif ».

2. Les sociétés civiles immobilières (SCI)

La société civile est un statut qui introduit au montage une personne morale. Ainsi, c'est la société qui devient propriétaire du terrain et des constructions et non pas les habitants, comme dans le modèle précédent. Il permet d'avoir un bien détenu par un collectif de personnes. Deux modèles apparaissent et semblent être le plus couramment utilisés par les groupes d'habitat participatif.

Société civile d'attribution (SCIA)

Ce statut juridique peut être utilisé pour la construction ou l'acquisition d'un bien meuble. Contrairement à un modèle classique de propriété, les habitants ne sont pas propriétaires mais ont la jouissance du bien. Dans ce système la société est propriétaire du bien, mais la jouissance est réservée aux groupes de propriétaires des parts sociales. Une division de l'immeuble va être réalisée et consignée dans l'état descriptif de division, ce document fait foi de la division et est couplé à un règlement de jouissance. A chaque lot va correspondre un groupe de parts sociales de la société. Chaque associé est donc propriétaire de parts sociales et aura la jouissance du lot qui est rattaché à son groupe de parts.

Lorsqu'on quitte la société (donc son logement) on cède ses parts, les autres associés ont un droit de préemption, c'est-à-dire une priorité d'achat. S'il ne souhaite pas acheter, il y a une procédure d'agrément pour un nouvel entrant qui doit être accepté par l'ensemble des occupants.

Un choix libre est effectué par le groupement en ce qui concerne la possibilité d'effectuer une plus-value lors de la revente de son logement.

18

A l'origine ce montage avait pour objectif de permettre une construction à plusieurs. Ce statut était effectif le temps de la construction et devait se transformer automatiquement en copropriété à l'issue de cette étape. Le règlement de jouissance devenant par la même occasion règlement de copropriété. L'utilisation en habitat participatif n'est donc qu'une adaptation du modèle d'origine pour ce type de projet.

Société civile avec création d'une association.

Cette structure juridique est également une adaptation de la SCI classique aux valeurs de l'habitat participatif. Dans ce modèle, on constitue également une société personne morale propriétaire du bien. À la différence de SCIA on met en place en parallèle de la société une association constituée des mêmes membres. Pour rentrer dans cette association il faut acheter des parts sociales donnant un droit de jouissance du bien. L'association va détenir 90% de la société et les 10% restants sont acquis par les membres de l'association mais sous leurs noms propres. Chaque personne est donc propriétaire d'une faible valeur et pourra revendre cette part lorsqu'elle quittera le logement. Dans ce modèle il y a généralement la volonté d'introduire un principe de non-spéculation.

Contrairement à la SCIA, dans ce modèle il n'y a pas de division du bien immobilier, le bien est propriété de l'ensemble des associés. La difficulté de ce modèle est d'obtenir des garanties auprès des banques qui ne sont pas rassurées par la multitude d'acteurs et la possibilité de garantie financière. Il nécessite donc d'avoir des apports assez importants avant de s'engager dans ce type de projet.

3. Les autres montages

Il existe une multitude d'autres formes de montages qui sont utilisés par les groupements d'habitants. Ces autres formes sont des détournements par rapport à l'objet initial. On observe par exemple des groupements qui ont utilisé l'association de loi 1901. On observe également à la marge l'utilisation de montages qui sont des hybridations de plusieurs structures, par exemple la SCCI (Société Coopérative Civile Immobilière) ou SCA (Société Civile de construction et d'Attribution). Ces modèles sont utilisés à la marge et ne sont pas optimaux à la réalisation de projet participatif.

La diversité des montages juridiques observés illustre bien toutes les possibilités existantes pour monter un projet en habitat participatif. Néanmoins, nous venons de le voir les groupes d'habitants en France rencontrent de nombreuses difficultés liées notamment à l'absence d'un véritable statut juridique qui reconnaît cette forme de conception et d'habitat de logement. Nous allons le voir dans la partie suivante, ce n'est pas le cas dans de nombreux pays européens qui ont fait de l'habitat participatif, une véritable stratégie en matière de politique du logement.

19

INFORMATiONS CLéS

L'HABITAT PARTICIPATIF C'EST :

· L'ENGAGEMENT VOLONTAIRE DES MéNAGES DANS LE PROJET

· UNE PARTICIPATION à LA CONCEPTION ET/OU à LA GESTION DU PROJET

· UNE VOCATION COLLECTIVE ATTRIBUéE AU PROJET PAR LES FUTURS HABITANTS MAIS UN RESPECT DE L'ESPACE PRIVé

· L'EXISTENCE D'ESPACES COMMUNS

· L'EXISTENCE D'UN SOCLE COMMUN DE VALEURS FAISANT éCHO AU PARTAGE, AU LIEN SOCIAL ET/OU à L'éCOLOGIE

· UN OBJECTIF éCONOMIQUE SECONDAIRE LES FORMES JURIDIQUES :

· PAS UN MODèLE UNIQUE MAIS UN CHOIX SELON LES VALEURS DU GROUPE

· AVANT LA LOI ALUR

- INDIVISION

DIVISION CLASSIQUE SUIVANT LES APPORTS DE CHAQUE MEMBRE

COMPLEXE POUR LA GESTION, MEMBRE QUI QUITTE LE GROUPE, RECRUTEMENT NOUVELLE PERSONNE...

- SOCIéTé CIVILE IMMOBILIèRES

DEUX FORMES LE PLUS SOUVENT UTILISéES, SCIA : PAS DE PROPRIéTé, LES HABITANTS ONT LA JOUISSANCE DU BIEN PROPORTIONNELLEMENT à L'APPORT DE CHAQUE MEMBRE.

LA SOCIéTé CIVILE AVEC CRéATION D'UNE ASSOCIATION, SIMILAIRE MAIS PAS DE DIVISION DU BIEN, L'ASSOCIATION EST PROPRIéTAIRE DE L'ENSEMBLE DU BIEN.

· LA LOI ALUR

DONNE UN CADRE JURIDIQUE à LA COOPéRATIVE ET AU STATUT D'AUTOPROMOTION. (VOIR PARTIE C)

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B) ÉTAT DES LIEUX DE L'HABITAT PARTICIPATIF

1. L'habitat participatif à l'étranger, quelles influences pour le(s)

modèle(s) français ?

C

ontrairement à ce qu'on peut observer en France, l'habitat participatif est un modèle très largement développé dans certains pays étrangers. Si pour certains, il est la résultante de caractéristiques culturelles, il est pour d'autres la conséquence de l'absence d'une offre suffisante en logements sociaux. Pour Olivier David, président d'Habicoop et membre du labo de l'Économie Sociale et Solidaire, « dès lors que l'État ne va pas subvenir aux besoins de développement de logements accessibles, c'est la population qui va se mobiliser pour développer sa propre offre »9. On retrouve ce constat dans les pays d'Europe du nord, mais également en Amérique du Nord.

La France, qui dispose d'une offre de logements sociaux très importante, environ 15 % des résidences principales10, a choisi une autre forme de développement de son offre de logement. Néanmoins, on observe aujourd'hui un foisonnement de projets sur l'ensemble du territoire ainsi qu'un intérêt de plus en plus fort de la part des ménages pour l'habitat participatif. Cet attrait s'observe plus particulièrement chez les jeunes couples vivant en zones tendues (O.David, 2016) qui cherchent un logement abordable et une autre forme d'habitat.

La présente partie de ce document consiste à étudier trois modèles qui influencent aujourd'hui la vision française de cette « nouvelle voie » au logement. L'objectif est ainsi de comprendre sur quoi se base le développement de l'habitat participatif en France. Nous aborderons ainsi trois formes d'habitat participatif : l'habitat coopératif au Canada, le modèle Suisse et enfin Le Baugruppen en Allemagne.

Trois modèles emblématiques d'habitat participatif : 1. Le modèle canadien de l'habitat coopératif

Le Canada est sans doute le pays au monde qui a le plus développé ce modèle d'habitat. Apparu dans les années 70, il existe aujourd'hui plus de 2000 coopératives au Canada. La seule province de Québec recense plus de 50 000 personnes vivant en habitat participatif. Elles revendiquent des valeurs communes, à savoir non-

9 Avec Jean-Philippe Magnen du Labo de l'ESS / France Inter. 2016. Avec Jean-Philippe Magnen du Labo de l'ESS /

France Inter. Podcast t: http://www.franceinter.fr/emission-carnets-de-campagne-avec-jean-philippe-magnen-du-labo-de-less. [Accès 3 février 2016].

10 Au 1er Janvier 2013, on comptait en France 4,6 millions de logements sociaux, soit 15 % des résidences principales. Source Insee.fr

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spéculation, initiative, participation et contrôle des coopérateurs sur les projets. S'il existe plusieurs formes de coopératives au Canada, nous avons choisi de nous concentrer sur le modèle le plus répandu à savoir « les coopératives d'habitation locative à possession continue ».

Ici la coopérative est constituée de membres qui se rassemblent autour d'un projet partagé afin d'accéder à un logement abordable et de qualité. La coopérative est alors propriétaire des unités de logements, les locataires sont donc à la fois propriétaires individuellement de leur logement et collectivement de l'immeuble en raison de l'adhésion à la coopérative. Cette adhésion est appelée parts sociales à la coopérative. La gestion et le contrôle de celle-ci est alors assurée par leurs membres. La taille des opérations peut varier de 10 à 220 logements avec des constantes, une localisation majoritairement dans un tissue urbain ou péri-urbain et une volonté d'inscrire ce projet dans une dimension de développement durable.

Le développement de l'habitat coopératif est fortement lié à une politique volontariste de l'état et à des subventions très importantes. Ces subventions sont justifiées par le caractère social des programmes de logement. En effet, les futurs membres de la coopérative sont sélectionnés selon des critères de revenus, justifiant les aides publiques très importantes versées aux coopératives pour faire baisser le prix des logements.

Afin de se structurer, les coopératives bénéficient de l'appui d'organisations locales et nationales, on peut par exemple citer la Confédération Québécoise des Coopératives d'Habitants (CQCH) et les Fédérations de l'Habitation Coopérative du Canada (FHCC). Ces organismes peuvent aussi bien appuyer les groupes sur la formation des membres, sur l'aide à l'obtention de financements mais effectuent également un travail important de lobbying auprès des instances gouvernementales.

Figure 2 : Les 155 ménages de la Coopérative Le coteau vert et l'OBNL Un toit pour tous, quartier Petite-Patrie à Montréal. batirsonquartier.com

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Bien que le modèle québécois d'habitat participatif qui se développe depuis plus de trente ans soit un des plus aboutis au monde, il est aujourd'hui confronté à des défis importants, le vieillissement de son parc ainsi que celui des habitants.

2. Le modèle Suisse de l'habitat participatif ou l'habitat coopératif d'utilité publique

Le mouvement suisse de l'habitat participatif s'est surtout développé et structuré à partir des années 70-80 en raison de l'apparition au sein de la société civile de critiques sur les grands ensembles ainsi qu'une prise de conscience des conséquences de l'étalement urbain et de l'apparition des mouvements squats à Genève (Golluccio, 2015).

Ce modèle est resté marginal jusqu'en 1990 et la création de la Centrale d'émission pour la Construction du Logement (CCL). L'apparition de cette organisation intervient dans un contexte les taux d'intérêts étaient aux plus hauts et que les banques entrainant une frilosité des banques à accorder des prêts. Trois associations faîtières11, l'Association Suisse pour l'Habitat (ASH), l'Association suisse des Coopératives d'habitation Radicale (ACR) et l'Association Suisse pour l'encouragement à la Construction et à la Propriété (ASCP), vont ainsi créer la CCL. C'est ainsi que va être adoptée la « charte des maîtres d'ouvrage d'utilité publique de la Suisse » qui va fixer l'organisation et le développement de l'habitat coopératif. Ainsi cette forme d'habitat doit :

· Être non spéculative,

· Fournir des logements abordables de bonne qualité et durables,

· Intégrer des foyers modestes,

· Faire participer les locataires.

La mise en place de cette charte a été faite en partenariat avec l'Office Fédéral du logement. L'objectif global étant de « garantir à tous un logement à des conditions abordables, [car] les lois du marché ne suffisent pas, il faut l'action des maîtres d'ouvrage d'utilité publique, soit en particulier des coopératives de construction et d'habitation »12. Cette mise en place est une date importante dans le développement

11 L'association faîtière est un modèle d'organisation très développé en Suisse, il s'agit d'une structure qui va regrouper une multitude de petites structures associatives. Cette association faîtière va ainsi défendre les intérêts de ses membres et va permettre de mettre en place des actions de lobbying à l'échelle nationale.

12 Charte des maître d'ouvrage d'utilité publique, 2013

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du modèle suisse de l'habitat participatif car elle institutionnalise le mouvement et le garantit d'utilité publique. Ce mouvement s'est conforté ensuite en 2003 avec l'adoption de la loi fédérale sur le logement (LOG) qui encourage les habitats à des prix et des loyers modérés. Aujourd'hui l'habitat coopératif représente environ 5% de l'ensemble du parc immobilier suisse. À Zurich il représente 25% du parc immobilier avec un objectif d'ici 2025 d'atteindre une proportion de 33% des logements.13 Le succès du logement coopératif en Suisse s'explique par des loyers en moyenne 20% inférieurs aux prix du marché locatif (A.Golluccio, 2011). Comparé au modèle français, le modèle suisse a atteint une envergure impressionnante. En effet la plupart des coopératives sont d'environ 100 logements et peuvent représenter des quartiers entiers comme le projet d'Hunziker où 35 coopératives se sont regroupées pour créer un quartier de 450 logements !

Figure 3 : Projet Hunziker, un quartier de 35 coopératives soit 450 logements. duplex-architekten

Les instruments d'aide au logement Coopératif en Suisse

Il existe deux échelons d'aide aux logements en Suisse. Le premier échelon est celui de la commune, qui est un interlocuteur particulièrement important dans la logique d'obtention d'un terrain. Elles peuvent ainsi vendre un terrain bon marché aux coopératives, accorder un droit de superficie, dans ce cas la collectivité reste propriétaire et met à disposition un terrain en échange d'une redevance annuelle et enfin elles peuvent prêter gratuitement un terrain.

Le second échelon est celui de la confédération qui va apporter une aide financière, via le cautionnement de prêts auprès de la coopérative CCL. Comme on peut le voir sur le schéma ci dessous, la CCL va se procurer des capitaux sur les marchés à des

13Zurich: l'incroyable dynamisme des coopératives de logement [en ligne]

https://www.espazium.ch/zurich-lincroyable-dynamisme-des-cooperatives-de-logement (accès le 16.03.16).

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conditions très favorables en raison du cautionnement de la confédération. Seuls les maîtres d'ouvrages d'utilité publique peuvent solliciter un financement de la CCL, qui doivent adhérer aux valeurs de la CCL et s'acquitter d'une cotisation annuelle. Ce montage financier permet à tout groupement souhaitant se lancer dans un projet participatif de disposer d'un financement particulièrement important avec des taux particulièrement intéressants. Cette garantie financière est un des éléments les plus importants pour comprendre l'essor et la vitalité du modèle coopératif suisse.

Figure 4 : Structure des logements coopératifs en Suisse

Un modèle qui inspire Lyon

C'est cette structure qui a influencé celle défendue depuis dix ans par l'association lyonnaise Habicoop. Cette association indique que c'est à partir d'un voyage réalisé par certains membres en Suisse que l'idée de développer ce modèle en France est apparu. Ce souhait s'est plus ou moins matérialisé à Villeurbanne. C'est ce que nous verrons à travers l'étude du projet du village vertical

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3. Le modèle Allemand du Baugruppen ou l'autopromotion

Avec 20% de ses logements neufs en immeuble participatif, l'Allemagne est considérée comme un pays d'Europe pionnier dans ce domaine. Ce modèle s'est popularisé à partir des années 90, sous l'impulsion de villes comme Fribourg et Tübingen. Les Baugruppen, (littéralement « groupement de construction »), représentent un groupe de futurs habitants qui vont collectivement faire appel à un architecte/maître d'oeuvre afin de concevoir un immeuble ou un quartier d'habitat collectif en autopromotion.

On parle ici d'autopromotion car les ménages engagés sont leurs propres promoteurs, l'objectif de ces groupements est ainsi d'économiser sur la rémunération habituellement réservé aux professionnels. Néanmoins, le collectif ne disposant pas nécessairement des compétences nécessaires à la construction d'un projet, il va s'associer à une structure spécialisée dans l'accompagnement de son projet d'autopromotion.

Contrairement au modèle français, la politique allemande en matière de logement social est très largement décentralisée, en effet celle-ci passe en grande partie par des subventions d'initiatives privées remplissant des conditions d'accessibilité à la propriété. Par ce mécanisme les Baugruppen jouent un rôle important dans la politique du logement ainsi que dans la pérennisation des loyers modestes (S.Trudelle, 2010).

Quel statut juridique ?

Il existe deux structures juridiques dans le fonctionnement des Baugruppen. Le choix de la forme appartient au groupe d'habitant et dépend en grande partie de sa philosophie. La première structure existante est celle du GbR (Geselschaft b·rgerlichen

Rechts) elle équivaut à la société civile française. Dans ce modèle, il y a un partage de l'immeuble en copropriété entre les associés, un règlement est édité précisant les modalités de gestion des parties communes, le retrait ou l'intégration d'une personne au projet, ainsi que le mode de gouvernance.

Le second modèle est celui du Genossenschaft, qui se rapproche de la société coopérative. Ici, les personnes se regroupent en coopérative, La personnalité morale construit et reste propriétaire des logements, les habitants eux reversent un loyer à la coopérative. Là aussi un règlement propre au groupe est édité avec quasiment le même contenu que pour le GbR.

Le déroulement

Le processus de mise en place d'un groupement en autopromotion se fait en trois phases avec un degré d'implication de plus en plus fort au fur et à mesure de l'avancement du projet.

Étape 1 : Constitution du groupe

À ce stade, le groupe de base, le noyau dur, va s'organiser afin de définir des objectifs, éventuellement rechercher des nouveaux membres et va commencer à définir des critères de recherche pour un terrain. C'est à cette étape que le groupe va recruter un prestataire d'accompagnement spécialisé dans le montage opérationnel de ce projet. Les habitants n'étant pas forcément des spécialistes de l'immobilier, ce recrutement est particulièrement important. Ce prestataire va assister le groupe tout au long du projet, de la définition du projet à l'élaboration du règlement de vie. Ces sociétés vont se rémunérer à hauteur de 3 à 4% du montant de l'investissement total hors terrain (S.Trudelle, 2010).

Étape 2 : Phase d'étude

Le groupe va se constituer en société, s'engager financièrement à hauteur de 500 à 1000 € (S.Trudelle, 2010). Elle va ensuite rechercher des financements puis gérer les autorisations d'urbanisme.

Étape 3 : La réalisation du projet.

Comme dans un projet classique, à ce stade, il y a une consultation avec choix des entreprises, un suivi des travaux et enfin la réception.

Un modèle qui a inspiré les projets strasbourgeois.

Comme toute opération immobilière, la maîtrise foncière est la clé du démarrage du processus d'un projet. En Allemagne, la politique volontariste des villes dans la réservation de foncier a constitué un facteur majeur du développement de l'autopromotion. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, dans ce modèle, les groupements ne bénéficient pas forcément de subventions publiques concernant le foncier. Les Baugruppen peuvent en revanche bénéficier, comme tout projet, d'aides à la construction ou de financements privilégiés du secteur bancaire en fonction des caractéristiques de celui-ci (efficacité énergétique, choix des matériaux, choix des entreprises...). Ce modèle s'est fortement développé à Fribourg, qui compte aujourd'hui plus de 150 projets et a très largement inspiré, proximité géographique oblige, le développement de l'habitat participatif à Strasbourg (P.Greboval, 2013). En 2007, la ville a lancé son projet « d'autopromotion à la strasbourgeoise » avec l'aménagement du projet Eco-Logis, trois ans plus tard, 30 personnes se sont installées dans cet immeuble

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2. L'habitat participatif en France, portrait-robot d'un modèle qui peine à se développer.

En France, le mouvement de l'habitat participatif en est encore à ses balbutiements. Compte tenu des débats sémantiques et de l'absence de centralité des mouvements, il est très difficile de connaître de manière pertinente le nombre d'opérations d'habitat participatif sur le territoire. L'association éco-sol a entrepris cette tâche et recense à ce jour environ 400 projets d'habitat participatif avec uniquement une trentaine d'entre eux arrivés à leur terme. Alors que la France compte plus de 28 millions de résidences principales, on peut légitimement dire que l'habitat participatif ne représente quasiment rien sur le marché du logement.

Paradoxalement, cette manière d'habiter ne cesse d'agiter le monde de l'immobilier. À l'origine cantonné à un milieu militant, l'habitat participatif semble être sur la voie progressive d'une démocratisation voire d'un mouvement d'institutionnalisation (Devaux, 2012), en témoigne le nombre de plus en plus importants de parutions, sujets de recherches ou rencontres de professionnels sur cette thématique. Si ce mouvement était à l'origine impulsé par les habitants, il sort progressivement du cercle des initiés pour toucher les acteurs institutionnels de la production de l'habitat.

Cet intérêt de plus en plus fort pose la question du futur de ce mouvement, est-il voué à mourir de lui même ou à s'institutionnaliser ? (Devaux 2012) En d'autres termes, la question d'un effet de mode peut se poser. Sous l'impulsion d'associations, notamment le groupe lyonnais Habicoop, qui depuis dix ans effectue une véritable action de lobbying auprès des acteurs politiques en faveur de l'habitat coopératif, les collectivités s'engagent en faveur du développement de cet habitat.

À la recherche d'innovations dans les programmes d'habitations, notamment en matière d'intégration des habitants, d'utilisation d'espaces partagés, d'architecture, d'environnement, certaines collectivités ont décidé de se lancer dans la production d'habitat participatif.

Sous l'impulsion de deux villes motrices, Strasbourg et Montreuil, a été créé en 2010 le « Réseau National des collectivités pour l'Habitat Participatif », l'ambition de cette structure est « de créer une plate-forme d'échanges entre les collectivités qui sera dédiée au partage des expériences et des outils en matière d'habitat participatif ». Ce réseau mobilise une quinzaine de collectivités14, dont l'engagement s'est traduit par des actions en faveur de l'habitat participatif. Parmi celles-ci, on peut citer l'inscription dans le Programme Local de l'Habitat (PLH) « d'actions en faveur de

14 Les premiers signataires sont : Besançon, Bordeaux, Grenoble, Lille, Montreuil, Paris, Rennes, Saint-Denis et Strasbourg, les communautés urbaines d'Arras, Grand Lyon, Grand Toulouse, ainsi que les régions Ile-de-France et Rhône-Alpes.

mode d'habiter ». C'est le cas pour la plupart des grandes collectivités française (Grand Lyon, Grenoble-Alpes métropole, CUM Strasbourg, Paris, etc.). Cet engagement se traduit aujourd'hui par le lancement de nombreux appels à projets sur des terrains identifiés par les collectivités, le plus souvent à des prix inférieurs au marché.

L'implication forte de collectivité française de taille importante participe à l'essor de l'habitat participatif en France. Il convient de citer quelques exemples emblématiques pour illustrer ce propos.

1. Montreuil : une ville en faveur des initiatives citoyennes

Montreuil est une ville où la place de l'habitat participatif est particulièrement importante. Cette caractéristique s'explique en grande partie par une tradition importante en matière d'autopromotion. Depuis les années 50 et le développement du mouvement des Castors, auto-constructeurs de leurs habitats, de nombreux projets coopératifs ont vu le jour dans cette ville. Deux exemples emblématiques pour illustrer cet engagement.

Diwan (2008)

ANNéE EMMéNAGEMENT 2008

SURFAcE 1 011 M2 SURFAcE HABITABLE

NOMBRE dE LOGEMENTS 8 - 29 HABITANTS

MONTAGE JURIdIQUE SCI

COUT dE cONSTRUcTION 1 376 € M2 SHAB

Initié en 1998 ce projet aura mis 10 ans à se concrétiser. Le groupe a traversé énormément de difficultés et a évolué à de nombreuses reprises. Il s'est structuré en SCI de construction avec vente en VEFA lors de la phase de construction et a évolué en copropriété-coopérative pour la gestion. En 2011, 21 adultes et 8 enfants vivaient dans ce collectif de 5 appartements, 3 maisons de ville et un local d'activité. Chaque habitant a géré individuellement le financement de logement pour un coût moyen de 2900 € du m2 soit 20% de moins que le prix du marché.

Ce coût a été rendu possible par l'achat du foncier à un prix largement inférieur au marché auprès de la ville de Montreuil. La durée très importante du projet s'explique en grande partie par le choix à l'origine du groupe d'assurer elle même la maîtrise d'ouvrage de l'immeuble. Mais les difficultés rencontrées, notamment pour trouver des financements, ont obligé le groupe à se constituer sous une forme plus classique de promotion immobilière. C'est un promoteur professionnel Fiderim qui a donc assuré la construction et a permis une montée en compétence et une

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professionnalisation du groupe, sans pour autant limiter le rôle des habitants à de simples acquéreurs. Ce projet, l'un des premiers en France est aujourd'hui installé en coeur de ville et participe à la vie du quartier « largement autour des enfants qui occupent un rôle central dans la construction de ces sociabilités de proximité »15.

Figure 5: Les habitants du projet Diwan dans un des espaces partagés. www.architectes.org

Les Babayagas (2012)

ANNéE EMMéNAGEMENT 2012

SURFAcE 990 M2 SURFAcE HABITABLE

NOMBRE dE LOGEMENTS 21

MONTAGE JURIdIQUE /

COUT dE cONSTRUcTION 3 800 € M2 SHAB

Né de l'initiative de Thérèse Clerc, militante féministe, le projet des Babayagas tend à proposer un modèle alternatif au vieillissement. L'objectif de ce groupement composé exclusivement de femmes est de « vivre collectivement leur vieil âge dans un lieu géré en autonomie et fondé sur l'autogestion, la solidarité, la citoyenneté et

15 Ville de Montreuil. L'habitat participatif à Montreuil. Une histoire, des initiatives collectives, une Dynamique. 2011 . [ONLINE] Available at: http://www.est-ensemble.fr/sites/default/files/recueil_dexperiences_dhabitat_participatif_a_montreuil.pdf. [ Accessed 11 April 2016].

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l'écologie 16». Ce projet a mis dix ans à voir le jour, initié par la création d'une association, l'aboutissement du projet tient dans l'implication de deux acteurs fondamentaux, la ville de Montreuil qui a mis à disposition le terrain et l'office public de l'HLM qui devient maître d'ouvrage.

Cet immeuble est mixte et comporte 25 logements sociaux, 21 pour les Babayagas et 4 pour des jeunes de moins de 30 ans. L'attribution des logements se fait de manière classique par l'OPHLM, mais en accord avec les valeurs de l'association, c'est-à-dire, trouver des locataires femmes à la retraite avec des revenus faibles et qui acceptent la « charte de vie des Babayagas », qui régit la vie collective de ce collectif.

Figure 6 Les membres des Babayagas. Libération.fr

Ce collectif se veut « laboratoire de réflexion sur le vieillissement », en effet de nombreuses manifestations sont organisées au sein de cet immeuble sur la thématique du vieillissement. Cette ouverture sur le quartier se matérialise notamment par l'organisation de l'UNISAVIE, « l'UNIversité populaire du SAvoir des VIeux », afin de « vieillir intelligemment ».17

16 Ville de Montreuil. L'habitat participatif à Montreuil. Une histoire, des initiatives collectives, une Dynamique. 2011 . [ONLINE] Available at: http://www.est-ensemble.fr/sites/default/files/recueil_dexperiences_dhabitat_participatif_a_montreuil.pdf. [ Accessed 11 April 2016].

17 Les Babayagas, la silver solidarité au quotidien - Libération. 2016. Les Babayagas, la silver solidarité au quotidien - Libération. [WEB] Disponible sur : http://www.liberation.fr/futurs/2014/02/02/les-babayagas-la-silver-solidarite-au-quotidien 977239. [Accès le 11 April 2016].

Figure 7 : Immeuble des Babayagas. sophieloubaton.photoshelter.com

2. Strasbourg : la municipalité à l'initiative des projets

Afin de favoriser le développement de l'habitat participatif à Strastourg, la communauté urbaine a fait le choix d'une consultation. Ainsi 10 terrains répartis dans toute la ville appartenant à la municipalité ont été vendus à des groupes d'habitants. Cette consultation marque une volonté forte de la part de la collectivité. Pour Roland Ries, Maire de Strasbourg et Vice président de la Communauté urbaine de Strasbourg depuis 2008, ce « programme répond aux besoins en logements pour tous, aux différentes étapes de la vie, a également comme orientation de contribuer à des aménagements urbains innovants et un habitat durable, en prenant en compte la santé et le bien-être des habitants »18. Les terrains mis à disposition de la ville sont tous situés en proximité directe du centre ville et sont également desservis par les transports en commun.

Figure 8 : Durée de la procédure de la consultation. Source : Dossier de consultation. Modification AF

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18 Cahier des charges du projet, 10 terrains, 10 immeubles durables à Strasbourg.

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Figure 9 : les 10 terrains vendus par la collectivité. Source: Strasbourg.eu

En se lançant dans ce type de projet la ville de Strasbourg fait le choix de l'innovation dans sa politique de logements. Cette aide de la collectivité permet également un raccourcissement des délais de l'opération. Comme on le voit sur la frise ci-dessus, du lancement de la consultation à la fin des travaux, 5 années se sont écoulées. Par l'intervention de la communauté urbaine de Strasbourg, un cadre est donné à l'opération, ce qui rassure les banques et autres institutions de financement.

Il faut également noter en plus de la ville de Strasbourg l'importance de plusieurs acteurs institutionnels dans le bon déroulé de cette opération :

· Relais associatif : l'association Écoquartier qui fait la promotion d'un urbanisme durable depuis 2001 et a inscrit l'habitat participatif comme levier d'action. Elle a principalement oeuvré dans la mise en relation des acteurs de ce programme, ainsi que dans le processus d'acculturation à ce modèle d'habitat.

· AMO : Une assistance à maîtrise d'ouvrage a été rendue obligatoire à la suite des premières phases de consultation, en raison des nombreuses difficultés rencontrées par les groupements.

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Eco-Logis (2010)

ANNéE EMMéNAGEMENT 2010

SURFAcE /

NOMBRE dE LOGEMENTS 13 LOGEMENTS, 30 HABITANTS

MONTAGE JURIdIQUE SCIA

COUT dE cONSTRUcTION 2 950 € M2 SHAB

Le projet Eco-logis est le premier des immeubles livrés. Il s'inspire des Baugruppen, l'architecte est d'ailleurs allemand, Michael Gis, choisi en raison de son expérience sur le modèle développé outre-Rhin. La municipalité, maître d'ouvrage sur l'opération a imposé l'utilisation d'une SCIA, le nombre de parts détenu par chacun dépend de la surface des prestations propres à son logement. Les bâtiments sont conçus sur 5 étages, au total 11 logements sont disponibles dans cette structure allant du studio au 6 pièces, 30 personnes vivent dans le bâtiment et 2 familles sont locataires. On y trouve des espaces communs, une chambre d'amis ainsi qu'un grand atelier et une buanderie commune. Le bâtiment est BBC, il consomme moins de 65 KWh/m2/an et produit de l'énergie via 20 m2 de panneaux solaires.

Figure 10 : Bâtiment Eco-Logis. Source: lyon.archi.fr

Consultation II & III

En 2015, Strasbourg a lancé sa troisième consultation pour développer de l'habitat participatif sur 5 nouveaux sites. Au total depuis 2008, 22 terrains ont été mis en consultation pour développer de l'habitat participatif dans la ville strasbourgeoise. Le développement de ce « nouveau » mode d'habiter, fait aujourd'hui partie intégrante de la politique de la ville. En apportant sa contribution, la ville de Strasbourg montre qu'il est possible de développer à grande échelle des projets participatifs, sous

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réserve d'un engagement fort des politiques en attribuant des terrains jusqu'à présent propriété de la ville. Cet engagement financier se traduit également par un système de décote en fonction des performances énergétiques du bâtiment (de 150 à 200 / m2 SHON) et également si on introduit du logement social au bâtiment (vente entre 150 et 200 € du m2). La ville effectue également l'ensemble des travaux de raccordement de manière à effectuer une vente de terrain à nu.

3. Montpellier : De l'habitat participatif en ZAC, le projet MasCobado

Le projet MasCobado a la particularité d'être développé au sein de la ZAC des Grisettes. ZAC de 20 hectares où 1500 logements sont créés ainsi que des bureaux, des commerces, des équipements scolaires et un pôle de santé.

Figure 11 : Plan Mass de la ZAC. En rouge les deux lots de la ville dédiées à l'habitat participatif. Source : Agence Dubus Richez

L'émergence de ce projet est l'aboutissement d'un concours « logement design pour tous » lancé par le PUCA (Plan Urbanisme Construction Architecture) qui a pour objectif d'« initier une nouvelle dynamique pour programmer, concevoir et réaliser des opérations de logement »19. Une association d'habitants créée en 2011 a remporté ce concours, ce qui lui a permis de bénéficier de l'appui d'une mission AMO du PUCA, qui a accompagné la programmation et les études opérationnelles afin de mettre au point le montage juridique. Parallèlement la ville de Montpellier confirme

19 20PUCA. Novembre 2014. Logement design pour tous. Habitat participatif à Montpellier. Le projet MasCobado. En ligne. http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/MasCobado web.pdf.

Figure 12 : Perspective du projet. Source : Toits de choix

son intérêt en Novembre 2011, pour favoriser l'implantation d'un habitat participatif sur l'agglomération. Le choix d'implantation se fera sur la ZAC des Grisettes où la SERM (Société d'Équipement de la Région Montpelliéraine) réalise une opération d'aménagement. Conjointement, la ville et l'aménageur décident de réserver deux lots de cette ZAC au développement de projets en habitat participatif.

Envisagée dès l'origine du projet, la construction d'un partenariat avec un bailleur social répond pour le groupement à un impératif : celui d'offrir à tous la possibilité d'accéder à la propriété. De plus associer un bailleur social permet « d'asseoir la crédibilité du projet et facilite les relations avec les élus »20. C'est finalement Promologis qui sera choisi par la SCA avec pour engagement de la part du bailleur de porter plusieurs logements en location-accession ou en location sociale. À l'origine il devait être constituée une SCA en co-maîtrise d'ouvrage avec Promologis, mais les difficultés pour obtenir des garanties financières obligent un passage de relais au Bailleur. À l'issue d'une phase de conception dirigée par les habitants et coordonnée avec le bailleur social, c'est Promologis qui a pris en charge toutes les opérations de l'acquisition du terrain à la construction du bâtiment. Les rapports entre Promologis et les habitants sont formalisés par une convention partenariale annexée à tous les documents concernant l'acquisition du terrain et les contrats de vente.

Ensuite les logements ont été attribués à l'issue d'une VEFA (Vente en l'État Futur d'Achèvement) pour 11 logements ou d'un contrat de location-accession PSLA pour 7 logements. En ce qui concerne la gestion des relations entre les accèdants et le bailleur social, c'est le régime de la copropriété qui sera mis en place. Enfin, en ce qui concerne la réattribution des logements sociaux, le bailleur s'est engagé à sélectionner des nouveaux adhérents qui respectent une charte mis en place par les habitants du MasCobado.

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36

 

Le programme est constitué de deux bâtiments avec au total 23 logements dont 5 sociaux et 7 en location-accession. Les appartements vont du T1 au T5 et les

habitants partagent 3
chambres d'amis, une salle polyvalente, une buanderie ainsi qu'une grande terrasse commune et un jardin avec un potager partagé.

 

Figure 13 : MasCobado 1 et 2, mutualisation des espaces. Source : Toits de choix

4. Paris 2014, Appel à projets en Habitat participatif.

L'exemple de l'initiative de Paris est intéressant, en effet il témoigne de l'intérêt des acteurs institutionnels pour le développement de l'habitat participatif. Mais son intérêt le plus important, c'est sûrement la couverture médiatique qu'elle apporte à ce type d'habitat. En effet, le succès rencontré par cette initiative a offert à ce mouvement de nombreux articles dans les médias nationaux (Le Monde, Libération, Le Parisien, les InrocksÉ) ce qui participe à la formalisation de ce mouvement. Sur le modèle de Strasbourg, Paris a décidé de lancer un appel d'offre sur trois parcelles situées dans le 19ème et dans le 20ème arrondissement. Dans un contexte de pression foncière très forte, cette initiative a rencontré un succès important. Plus de 200 personnes ont manifesté leur intérêt à l'origine du projet. L'appel à projet se déroule en trois phases :

· Phase 1 : projet de vie

· Phase 2 : Projet d'habitat

· Phase 3 : Projet de construction

À l'issue de chacune des phases un jury composé de professionnels étudie les propositions et sélectionne les meilleurs groupements. Le processus d'appel d'offre devrait aboutir au second semestre 2016. À chacune des phases les groupements bénéficient de subventions afin de financer les frais de maîtrise d'ouvrage et de maîtrise d'oeuvre (27 500 € maximum de subventions en phase 3 par association)

37

3. La France, le choix d'une politique d'accès au logement différente

En France à l'heure actuelle le niveau d'organisation ne permet pas de rivaliser avec les pays cités précédemment. Ces différences s'expliquent par des différences culturelles et contextuelles, plus particulièrement à propos des politiques de logement.

En effet au Canada comme en Suisse, l'absence d'une politique forte en matière de logement social est compensée par l'habitat participatif qui devient en un sens de fait un « logement social » (Devaux, 2015). Au Canada la politique particulièrement libérale en matière de logements, laisse quasiment uniquement la place aux secteurs privés. Au Québec, les coopératives ont un fonctionnement qui les place à l'intermédiaire du logement social et privé français. Elles sont occupées par des ménages plutôt modestes qui souhaitent s'impliquer dans la gestion de leur logement. Pour Bouchard (Bouchard, 2005) la coopérative est un « patrimoine permanent de logements abordables : ils ont logé, logent et logeront des ménages à revenu modeste pour les décennies à venir ». Le modèle suisse est sensiblement différent, son caractère reconnu d'utilité publique, ce qui veut dire que les coopératives renoncent à maximiser leurs profits, permet aux groupements d'obtenir des prêts et des terrains beaucoup plus abordables que dans un modèle classique. Selon une estimation du bureau des statistiques de Zurich de 2004, les loyers de ces logements sont 20 à 30% moins élevés que sur le marché classique. En France, le secteur du logement social est très structuré avec des organismes HLM qui produisent plus de 100 000 logements par an et l'État qui subventionne très largement ce développement via l'exonération ou l'allègement de taxes notamment.

Le second élément important dans la compréhension de ces différences de développement est la place laissée à la société civile dans le développement de l'offre de logement. À l'opposé la Suisse, le Canada et l'Allemagne partagent une importante tradition de la participation et de la prise d'initiative de la société civile. « En France, les expériences participatives sont plutôt menées dans une logique de régulation des problèmes sociaux que d'encouragement de l'auto-développement des populations » (C.Devaux, 2015).

Ces différences tant d'un point de vue culturel que contextuel expliquent les écarts de développement de l'habitat participatif en France. Néanmoins, malgré ces différences, les initiatives observées à l'étranger représentent une source d'information très importante lorsqu'on développe des outils tels que le Benchmark. C'est d'ailleurs bien souvent à l'issue de ce genre travail et/ou de voyages d'observation que des groupes se sont formés pour développer leurs modèles. Il ne faut pas non plus négliger l'absence de cadre juridique français pour comprendre, comme nous allons le voir par la suite, le développement peu important du logement participatif en France.

38

POiNTS CLéS

ÉTAT DES LIEUX DE L'HABITAT PARTICIPATIF :

· EN FRANCE L'HABITAT PARTICIPATIF C'EST : - UNIQUEMENT 300/400 PROJETS,

· À L'éTRANGER, ALLEMAGNE, SUISSE, CANADA, UN MODèLE DE DéVELOPPEMENT COMMENT EXPLIQUER CET éCART ?

- LA FRANCE A CHOISI DE DéVELOPPER LE LOGEMENT SOCIAL, 15 % DES RéSIDENCES PRINCIPALES - À L'éTRANGER :

L'HABITAT PARTICIPATIF FAIT PARTIE DE LA POLITIQUE DE LOGEMENT SOCIAL, IL EST RECONNU D'UTILITé PUBLIQUE + SECTEUR TRèS STRUCTURé AVEC SOCIéTéS FAîTIèRES, ACCOMPAGNATEURS.

MAIS

· UN DéVELOPPEMENT DE PLUS EN PLUS IMPORTANT EN FRANCE QUEL(S) MODèLE(S) ?

· UNE CROISSANCE QUI S'INSPIRE DES MODèLES éTRANGERS

· CONSÉQUENCE TROIS MODÈLES SE DÉVELOPPENT EN FRANCE - L'AUTOPROMOTION

- LA COOPÉRATIVE

- UN MODÈLE QUI REGROUPE L'HABITAT PARTICIPATIF ET LOGEMENT SOCIAL

39

C) LA LOI ALUR ET L'HP QUELLES CONSÉQUENCES ?

1. Genèse de cette loi en lien avec l'habitat participatif

R

éclamées par de nombreux acteurs de l'habitat participatif, les dispositions concernant ce type d'habitat dans la loi ALUR sont le résultat d'un long processus de réflexion sur le cadre futur de cette troisième voie de l'habitat. Ils sont le fruit d'une consultation entre acteurs spécialisés dans ce domaine. Il en ressort des éléments primordiaux dans l'évolution future de l'habitat participatif. La mise en place d'un cadre concernant l'habitat participatif est le résultat d'un constat simple, celui d'un vide juridique concernant ce modèle d'habitat. En effet, la loi Chalandon de 1971 qui interdit la location coopérative a rendu très compliqué le développement de projet d'habitat participatif. La plupart des groupes d'habitants se sont ainsi heurtés à cette absence de cadre, utilisant des structures juridiques insuffisamment sécurisées. Ainsi faute de statut approprié, les opérations sont restées longues et coûteuses, excluant par la même occasion les populations plus fragiles ainsi que celles en situation d'urgence par rapport au logement.

La première avancée concernant l'habitat participatif a été d'offrir une définition juridique à ce mouvement. Ainsi selon l'article 47 un projet d'habitat participatif « est une démarche citoyenne qui permet à des personnes physiques de s'associer, le cas échéant avec des personnes morales, afin de participer à la définition et à la conception de leurs logements et des espaces destinés à un usage commun, de construire ou d'acquérir un ou plusieurs immeubles destinés à leur habitation et, le cas échéant, d'assurer la gestion ultérieure des immeubles construits ou acquis. » Cette définition est volontairement non restrictive, elle ne vise pas nécessairement à restreindre le cadre de l'habitat participatif mais à compléter les outils mis à la disposition des groupes d'habitants.

2. Les nouveaux statuts juridiques et leurs conséquences

La loi ALUR vient créer deux nouveaux statuts juridiques pour la mise en place d'habitat participatif, ces statuts ne suppriment pas les anciens mais arrivent en complément des formes sociales offertes par la loi. L'objectif du législateur était d'apporter des réponses aux attentes des partisans de l'habitat participatif, à savoir ; la propriété collective, les mécanismes anti-spéculatifs, la prise en compte des espaces communs et la possibilité de les exploiter (Ferrus et Leveneur, 2014). Les dispositions prises par la loi ALUR en matière d'habitat participatif ont également pour objectif de garantir une certaine sécurité juridique et financière pour les concepteurs de projet. Les deux nouveaux statuts créés sont la société coopérative d'habitants et la société d'attribution d'autopromotion. Ces deux statuts juridiques ont des dispositions communes :

· Dans tous les cas il s'agit d'une société à capital variable, de forme civile ou commerciale.

· Cette société est constituée pour une seule opération immobilière et destinée à accueillir la résidence principale des associés.

· Il est également possible d'associer à ces structures des organismes de logements sociaux, dans la limite de 30% du capital ou des droits de vote, qui bénéficieront de la mise à disposition des logements proportionnellement à leur participation.

· Les sociétés pourront développer des activités et services aux membres et à des tiers non associés. (ex : location d'un salle commune, installation d'un cabinet médical...)

· Il devient obligatoire de mettre en place une charte fixant les règles concernant l'immeuble et plus particulièrement les parties communes. Cette charte devra être adoptée en assemblée générale et signée par l'ensemble des locataires avant l'emménagement.

1. La société coopérative d'habitants

La société coopérative a pour objet de « fournir à leurs associés personnes physiques la jouissance d'un logement au titre de résidence principale et de contribuer au développement de leur vie collective »21. Cette forme de société promeut l'idée de propriété collective de l'habitat participatif (Ferrus et Leveneur, 2014), avec ce type de société, on supprime la notion de propriété au profit de celle de jouissance du logement et des espaces communs, le propriétaire étant la société et non les associés. Le contrat passé par les copropriétaires précise le montant de la redevance dont ils devront s'acquitter à l'entrée dans le logement. Cette redevance est composée d'une part locative permettant de profiter du bien et d'une part acquisitive permettant d'acquérir des parts sociales de la société. Cette acquisition se fait de manière différée, en effet les associés remboursent graduellement les sommes prises en charge par la société au moment de la construction.

· Calcul de la redevance

Lorsque le projet est livré, la coopérative rembourse les prêts grâce à la redevance, celle-ci est dissociée de la valeur du bien et est calculée selon les modalités fixées par le groupe. Elle permet également de provisionner les obligations de propriétaire (taxes foncières, charges diverses, provisions pour les réparations, vacances et impayés...).

40

21 Article L.201-2 du code de la construction et de l'habitation

· Comment quitter son logement ?

Tout coopérateur peut quitter son logement. À son départ il récupère ses apports initiaux pondérés au coût de la vie, ici la logique de non spéculation prime voilà pourquoi on est sur un prix indépendant du marché. Lors de son départ, le coopérateur peut également récupérer une partie de ses redevances, on parle alors de part acquisitive. Le choix d'une nouvelle personne est soumis à l'accord de l'assemblé générale selon les termes régis au règlement de la structure.

2. La société d'attribution d'autopromotion

Cette société a pour objet d'Ç attribuer aux associés, personnes physiques, la propriété ou la jouissance d'un logement à titre de résidence principale, et d'entretenir et d'animer les lieux de vie collective »22. La différence avec la coopérative d'habitants c'est qu'avec ce montage les habitants peuvent acheter leurs logements et la jouissance des espaces communs. Dans ce modèle, les associés devront dès le départ faire le choix entre attribution en jouissance ou en propriété des futurs logements. Dans le modèle de l'attribution en propriété cette société aura vocation à disparaître à la fin de la construction pour se transformer en copropriété classique, puisque les habitants sont propriétaires de leur espace privatif grâce à une attribution en propriété. À l'inverse, si le modèle de la jouissance est choisi celle-ci reste en place. Les associés devront, à l'inverse du modèle coopératif, participer au financement de l'opération dès le stade de la construction. On est donc ici dans un modèle où les associés disposent de moyens financiers suffisants pour au départ assumer un investissement conséquent. La sortie du modèle participatif apparaît comme plus simple par ce modèle par rapport à la coopérative par l'existence d'un état descriptif de division ainsi que des dispositions concernant les conditions de dissolution de la société.

· Que paye l'associé ?

L'associé paye une redevance qui est nécessairement liée à la valeur de son bien. Il doit également payer une participation qui correspond aux frais de charges liées là aussi à la valeur de son bien.

· Comment quitter son logement ?

Dans le cas d'une attribution en propriété, un associé peut quitter son logement de manière libre, à condition que l'AG a constaté l'achèvement de l'immeuble. Dans ce modèle la revente de ces parts n'est pas nécessairement soumis à une indexation.

41

22 Article L.202-2 du CCH

42

La logique de non-spéculation n'est pas obligatoire et est à la décision du groupement.

3. Les décrets attendus pour 2016

Votée en 2014, la loi ALUR sera précisée au cours de l'année 2016 par des décrets notamment en ce qui concerne les garanties financières d'achèvement de l'immeuble, ainsi que des éléments sur le financement des projets. La loi ALUR devrait être précisée courent 2016 par deux autres décrets, concernant les modalités d'achèvement de l'immeuble et l'apport en industrie dans la construction d'un bâtiment.

Décret relatif à la garantie financière d'achèvement

Un décret viendra préciser la garantie financière d'aménagement qui rendra obligatoire la souscription d'une garantie financière d'achèvement lorsque le vendeur d'un immeuble d'habitation n'opte pas pour une garantie de remboursement23

Décret relatif à l'apport en industrie

Ce décret viendra préciser la possibilité d'entrer au capital de la société via un apport en industrie. En d'autres termes, il s'agit là de valoriser la participation des habitants dans le processus de construction ou bien dans l'apport de service auprès des autres usagers.

23 Vallat, thierry (2016) Garantie financière en cas de vente en l'état futur d'achèvement : Disponible at: http://www.thierryvallatavocat.com/2016/03/garantie-financiere-en-cas-de-vente-en-l-etat-futur-d-achevement-le-decret-du-25-mars-2016.html (Accès 18 Avril 2016).

COMPARAISON ENTRE LA SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE / SOCIÉTÉ

D'ATTRIBUTION D'AUTOPROMOTION

Coopérative Autopromotion

Qui est La coopérative La société ou chaque

propriétaire ? copropriétaire

Sur autorisation de l'assemblée générale

Que détient l'associé ?

Que paye l'associé ?

Départ d'un

associé

Attribution en jouissance des logements

· Parts sociales (sans lien nécessaire à la valeur du bien)

· Loyer (permanent)

· Possible apport en travail manuel

Attribution en jouissance des logements ou propriété pleine et entière

· Parts sociales (liées nécessairement à la valeur du bien)

· Participation (permanente) aux charges liées nécessairement à la valeur relative du lot

Prix de cession Prix de revente des parts

sociales indexé sur l'indice de référence des loyers. Modification possible à l'unanimité

Pas de limite statutaire

 

43

Gouvernance 1 personne = 1 voix 1 personne = 1 voix

ou proportionnel

44

POiNTS CLéS

LES ARTICLES DE LOI ALUR CONCERNANT L'HABITAT PARTICIPATIF C'EST :

· LA CONSÉQUENCE DU DÉVELOPPEMENT DE L'HABITAT PARTICIPATIF EN FRANCE

· LA CONSÉQUENCE D'UN VIDE JURIDIQUE DEPUIS LA LOI CHALANDON DE 1971

· UNE VOLONTÉ DE DÉFINIR JURIDIQUEMENT L'HABITAT PARTICIPATIF ET D'ASSURER UN CADRE AUX INITIATIVES LES FORMES JURIDIQUES :

· DEUX MODÈLES POUR DÉVELOPPER UN HABITAT PARTICIPATIF

- COOPÉRATIVE

LA COOPÉRATIVE EST PROPRIÉTAIRE DES LOGEMENTS

ATTRIBUTION EN JOUISSANCE DES LOGEMENTS, VIA LE PAIEMENT D'UN LOYER À LA COOPÉRATIVE

VOLONTÉ DE NON SPÉCULATION, REVENTE DE PARTS SOCIALS ET NON DU LOGEMENT

- AUTOPROMOTION

PROPRIéTé PLEINE ET ENTIèRE, NÉCESSITE DES APPORTS CONSÉQUENTS PAIEMENT DE CHARGES COURANTES À LA SOCIÉTÉ

PAS DE VOLONTÉ ANTISPECULATIVE, REVENTE DU LOGEMENT

45

CONCLUSION

C

omme nous venons de le voir, l'habitat participatif est un mouvement qui prend de l'ampleur en France. À l'origine cantonnée à un cercle d'initiés issus du militantisme, cette forme de logement gagne aujourd'hui du terrain. La France semble aujourd'hui emboîter le pas aux pays étrangers qui depuis de nombreuses années ont su développer ce modèle basé sur le partage et la volonté de s'impliquer dans la conception de son logement. Ce mouvement d'institutionnalisation est accompagné par une prise de conscience des politiques de l'intérêt de guider le développement de l'habitat participatif. En légiférant sur ce modèle, la loi ALUR vient donner un cadre juridique à l'habitat participatif. Elle vient également légitimer cette forme d'habitat auprès des groupes d'habitants, mais surtout auprès des acteurs institutionnels et financiers de la construction. Cet intérêt de plus en plus fort des acteurs du développement de la ville est la conséquence directe de cette étude. En effet, comme nous allons le voir dans la partie suivante, la SERL, aménageur depuis plus de 50 ans de la métropole Lyonnaise, dans une volonté perpétuelle d'innover dans ses projets urbains, souhaite comprendre ce type de montage. C'est donc pour cette raison quelle a souhaité cette étude sur l'habitat participatif. C'est pourquoi nous développerons cette seconde partie en parallèle, le rôle de la SERL et le cadre géographique sur lequel elle intervient, avant de nous interroger sur la place de l'habitat participatif dans la métropole Lyonnaise. A l'issue de cette seconde partie, nous pourrons dresser des hypothèses sur le potentiel développement de l'habitat participatif sur la métropole Lyonnaise.

46

II) LA SERL ET LA MÉTROPOLE LYONNAISE, DEUX

ACTEURS INSTITUTIONNELS À LA RECHERCHE

D'INNOVATIONS EN MATIÈRE D'OFFRE DE LOGEMENT.

A

vec la volonté d'être proche des habitants et de développer des projets en lien avec le développement durable, la SERL cherche continuellement à

 

innover dans la manière d'appréhender ses projets urbains. C'est ainsi qu'elle a su développer à son corps de métier - la maîtrise d'ouvrage - des compétences supplémentaires qui viennent compléter l'offre que peut apporter la SERL dans la gestion de ses projets. Cette volonté d'innover justifie le lien entre la SERL et l'habitat participatif et donc la pertinence de cette étude. La SERL est également indissociable de son territoire d'action, la Métropole Lyonnaise.

En effet depuis près de soixante ans, la SERL rend opérationnels les projets de la Métropole de Lyon. La présente partie a pour objectif de comprendre, comment la SERL et la Métropole Lyonnaise pourraient intégrer dans leurs projets, de l'habitat participatif ?

Pour répondre à cette question nous avons divisé notre travail en trois parties. En premier lieu, il convient de comprendre comment la SERL appréhende ses projets. Cette étape passe par la définition des caractéristiques des montages opérationnels qu'elle développe. Ce qui sous-entend de définir les étapes d'un projet, ainsi que la notion de risque en aménagement. Nous le verrons, cette notion est particulièrement importante et nous permettra de faire la liaison avec l'évolution du métier d'aménageur et la mise en concurrence par les décideurs des projets.

La seconde partie sera consacrée à la politique de la Métropole de Lyon en matière de logements. Travail qui se conclura par le développement d'une vision prospective, afin de voir où peut se situer l'habitat participatif dans cette politique.

Ainsi, dans la troisième partie de ce chapitre, nous analyserons la place de l'habitat participatif sur le territoire. Ce chapitre se base en grande partie sur des retours d'expériences, ainsi que sur des entretiens menés tout au long de cette étude et fait le lien avec le dernier chapitre consacré à la stratégie à adopter en matière développement de l'habitat participatif.

A) LA SERL, UN AMÉNAGEUR QUI INNOVE DANS SA GESTION DE PROJET 1. Étude sur les caractéristiques de la SERL

L

a SERL est une SEM (Société d'Économie Mixte) d'aménagement. À ce titre, elle est soumise aux dispositions du livre II du code de commerce et aux

 

articles L. 1521-1 à L 1523-3 du code général des collectivités territoriales (Sevino, 2015). Elle intervient dans un contexte économique particulier, l'économie mixte qui est « la traduction institutionnelle d'une des caractéristiques essentielles de la plupart des économies modernes [et se présente] comme une troisième voie entre la domination du marché et celle de la modération » (G.Durand, 1995). À ce titre elle permet à une collectivité territoriale d'associer lors d'une opération d'aménagement des personnes privées et « remplace la confrontation par une logique de coopération et de travail en commun » (J-D Lafay, 1992). La mise en place d'une société d'économie mixte doit être justifiée par l'intérêt général et donc être « dictée par des circonstances socio-économiques particulières afin que cette intervention ne porte pas atteinte au principe de la liberté du commerce et de l'industrie »24. La mise en place d'une structure de ce type ne peut donc être justifiée qu'en raison d'une défaillance du secteur privé dans un domaine d'intervention.

La SERL a été créée en 1957 avec cette volonté d'assister les collectivités tout au long d'un projet « qu'il s'agisse de la définition des enjeux, des objectifs et des outils qu'il conviendra de mettre en oeuvre, sans oublier la réalisation ou encore la gestion d'équipement ou de site »25. Elle intervient sur un territoire particulier : celui de la Métropole Lyonnaise. Cas unique dans le fonctionnement institutionnel français, « Lyon est la seule Métropole assumant la quasi-totalité des compétences territoriales possibles sur l'ensemble de son territoire urbain. » (G.F. Dumont, 2013). C'est dans ce contexte métropolitain qu'évolue depuis 50 ans la SERL, se voulant le trait d'union entre le privé et le public. L'organisation territoriale se retrouve dans la structure capitalistique de la SERL. Son statut de SEM, lui procure un actionnariat particulier composé majoritairement de structure publique et se répartit de la façon suivante :

24 Les sociétés d'économie mixte locales (SEML) | Collectivités locales. 2016. Les sociétés d'économie mixte locales (SEML) | Collectivités locales. [ONLINE] Disponible sur: http://www.collectivites-locales.gouv.fr/societes-deconomie-mixte-locales-seml. [Accès le 04 April 2016].

47

25 Document interne édité par la SERL, concernant les missions et l'historique de cet aménageur.

5%

7%

4%

18%

16%

Actionnariat de la SERL

50%

Grand Lyon la métropole

Caisse des dépôts et des consignations

Caisse d'épargne Rhônes-Alpes

Lyonnaise de Banque

CCI Lyon

Autres (OPAC, SAFIDI, SFIG, DEXIA É)

48

Figure 14: Actionnariat de la SERL. Source : Rapport d'activité 2016

Ce maître d'ouvrage pilote majoritairement des ZAC aux caractéristiques multiples et complexes : centralité urbaine, développement économique, immobilier d'entreprises et services. On la retrouve dans des projets de renouvellement urbain majeur : la ZAC des Minguettes à Vénissieux, le centre ville de Vaulx-en-Velin, l'emblématique projet de la Duchère, des références fortes en aménagement : ZAC Gratte-ciel (Villeurbanne), ZAC des Girondins (Lyon 7), qui permet à la SERL d'évoluer comme acteur majeur de l'aménagement sur le territoire métropolitain lyonnais.

Les caractéristiques des projets de la SERL.

Lorsqu'une collectivité identifie un besoin en matière d'aménagement, elle peut mobiliser différents outils. La SERL a la caractéristique d'avoir développé et de maîtriser ces différents modes opératoires de passation de contrat avec ses clients qui sont :

· La concession d'aménagement

La SERL va assurer la maîtrise d'ouvrage des équipements et travaux du projet urbain, ainsi que les missions intrinsèques à son aboutissement. Nous développerons ce mode d'opération dans une partie suivante.

· L'assistance à maîtrise d'ouvrage

Dans ce mode opératoire la SERL est prestataire de service et intervient pour assister son client, qu'il soit public ou privé, dans l'étude, la réalisation d'une opération d'aménagement ou une construction. Le recours à l'AMO est particulièrement utilisé dans le cadre de mission ponctuelle complexe ne pouvant être assurée par le maître d'ouvrage, qui va ainsi avoir recours à un tiers.

·

49

Le mandat de travaux

Dans ce processus la collectivité reste maître d'ouvrage du projet, elle va seulement déléguer une partie de la réalisation du projet. Par exemple dans le cadre d'une ZAC elle peut mandater une société, dans notre cas SERL, pour réaliser un équipement public. Contrairement à la concession il n'y a aucun processus de délégation, la personne publique reste maître de son projet 26.

La SERL se démarque depuis de nombreuses années par sa capacité à innover et sa manière d'appréhender les projets urbains. En effet depuis 2007, la SERL a mis en place 4 filiales avec pour objectif d'intervenir sur l'ensemble des domaines de l'aménagement :

· SERL Aménagement : coeur de métier de la SERL, elle assure les fonctions d'aménageur dans les grands projets urbains et assure la promotion du développement métropolitain durable. Ces missions concernent aussi bien les missions d'aménagement de renouvellement urbain, de construction et superstructures, de développement économique ainsi que d'ingénierie foncière.

· SERL Énergies : chargé du développement du photovoltaïque, cette filiale a pour objectif de faciliter l'implantation de centrales photovoltaïques dans ses projets.

· SERL Immo2 : a pour fonction la gestion immobilière d'opérations telles que les villages d'entreprises ou pôles de services aux entreprises.

· SERL Services : est en charge de la gestion au quotidien et des services aux entreprises, dans le cadre de la maintenance technique des bâtiments et des services aux entreprises.

2. Les différentes étapes et les caractéristiques économiques d'un contrat de concession

Comme nous venons de le voir, la SERL intervient à la fois comme aménageur urbain, mais également dans la réalisation d'équipements. Aujourd'hui, lorsqu'elle construit des équipements, ce sont principalement des équipements publics, type superstructure culturelle, sportive, hôpital, EHPAD et groupement scolaire. La SERL a notamment réalisé dans ce cadre le Musée des Confluences.

Elle n'intervient pas dans la conception de logements privés. En effet, aujourd'hui l'offre en matière de construction privée est suffisante sur la métropole Lyonnaise. Une intervention de la SERL dans ce domaine irait à l'encontre du principe directeur

26 Ministère du logement et de l'égalité. Loi ALUR : Les conventions de mandat d'aménagement. [en ligne].Territoire.gouv. http://www.territoires.gouv.fr/IMG/pdf/ALUR_fiche_convention_de_mandat.pdf.(Pa ge consultée le 9/03/2016)

de l'économie mixte : la défaillance du secteur privé dans un domaine. Pour cette raison nous avons choisi de nous concentrer sur le cas de la concession d'aménagement et de ne pas étudier la SERL comme maître d'ouvrage de projets privés.

Pour cet aménageur, la concession représentait en 2015, 60 % de ses réalisations 27, qui sont à la fois des grandes opérations de renouvellement urbain mais également le réaménagement de quartiers de ville. Il va donc falloir comprendre comment intégrer un montage de type habitat participatif dans une concession d'aménagement. Pour ce faire il faut analyser les conséquences ainsi que l'ingénierie qui devra nécessairement être mobilisée pour développer ce type de projet. Avant de passer à cette étape il est essentiel de bien comprendre le processus d'une concession d'aménagement.

Cette forme de montage va définir la relation contractuelle entre l'aménageur et la collectivité. Elle intervient dans les cas où la collectivité renonce à une intervention en régie directe et décide de concéder la réalisation d'une opération.

1. La phase d'étude du projet

La première étape du projet est menée par la collectivité et concerne la définition des caractéristiques de l'opération avec la réalisation des études préalables, ainsi que la définition du projet et la mixité attendue. Cette phase comprend également l'étude de faisabilité de la concession d'aménagement, ainsi que la procédure de mise en concurrence et la méthodologie de choix du candidat. On parle à ce stade de l'établissement du dossier de création qui sera le document de base pour la mise en place de l'étape suivante de mise en concurrence.

2. La mise en concurrence

Depuis 2005, les directives européennes obligent la mise en concurrence des aménageurs avant la signature du contrat de concession. L'aménageur va alors passer par une phase de sélection avec définition d'un projet, méthodologie, estimation financière et planning, qui seront soumis au choix de la collectivité. La définition de ce projet se fait à partir du dossier de création établie par la collectivité. L'aménageur va reprendre les éléments du projet en effectuant une analyse plus poussée mettant en oeuvre des éléments de programmation de logement.

50

27 Rapport d'activités, SERL 2015.

51

3. La mise en place du contrat de concession

Une fois la décision prise de la part de la collectivité, un contrat de concession va alors être passé entre l'aménageur et la collectivité à partir du programme proposé et enrichie lors de la phase d'appel d'offre. Il devra comprendre :


· Les missions confiées à l'aménageur

· Les modalités d'acquisition du foncier par l'aménageur (notamment les possibilités de recours à l'expropriation et à l'utilité publique)

· Le programme des équipements publics à réaliser

· Les modalités de réalisation du Programme des Espaces Publics (PEP)

· Les conditions administratives et financières (le bilan) de réalisation du projet

· Les délais de réalisation

4. La réalisation du projet urbain

Une fois la signature du contrat de concession l'aménageur va piloter la réalisation du projet urbain. Lors de la réalisation de ce projet, plusieurs missions vont se superposer et s'enchaîner durant l'ensemble du processus de l'opération.

4.1 Procédures d'urbanisme : le dossier de réalisation

Le dossier de réalisation reprend les éléments présentés par l'aménageur lors de la procédure de l'appel d'offre. En effet, il s'agit d'une adaptation du mémoire technique avec mise à jour des éléments en fonction de l'évolution du projet et va comprendre :

  Le programme des équipements publics à réaliser dans la zone,   Le programme global des constructions à réaliser dans la zone,

  Les modalités prévisionnelles de financement, échelonnées dans le temps,

  Les modifications à apporter éventuellement à l'étude d'impact.

52

4.2 Les acquisitions foncières

Lors de la mise en place du traité de concession, l'aménageur s'engage à acquérir l'ensemble de l'emprise foncière de l'opération, le domaine public ainsi que le domaine privé. Cette procédure peut être plus ou moins longue et dépend en grande partie de la procédure choisie à l'origine du projet et notamment la mise en place ou non d'une procédure de DUP (Déclaration d'Utilité Publique).

4.3 Les missions opérationnelles

En raison de la taille des opérations, les phases de développement vont se faire par lot, qui sont des divisions du périmètre total de l'opération. Sur chacun de ces lots seront réalisées des opérations qui le plus souvent se divisent de la manière suivante :

· La réalisation des études d'avant projet de conception des espaces publics.

· La désignation de l'ensemble des prestataires,

· La réalisation des travaux de démolition et de dépollution des terrains,

· La consultation de l'opérateur commercial,

· La consultation opérateurs pour la réalisation des logements et vente de ces emprises

· La réalisation des espaces publics 5. La clôture de l'opération

Une fois les aménagements réalisés, l'aménageur va liquider et clôturer son opération ce qui passe par plusieurs étapes :

· Remise des ouvrages et revente des équipements aux collectivités dans les conditions fixées par le contrat,

· Rétrocessions foncières,

· Bilan de clôture et liquidation comptable.

53

3. La question de la gestion financière d'un projet d'aménagement

L'évolution juridique de 2005 en plus d'avoir introduit l'obligation de mise en concurrence des aménageurs lors d'une procédure de concession, a fait évoluer la notion de risque dans le projet. Auparavant, la collectivité portait quasiment l'ensemble des risques financiers du projet. Aujourd'hui c'est l'aménageur qui va assumer ces risques financiers, les modalités étant prévues lors de l'établissement du contrat de concession entre l'aménageur et la collectivité. Échelonné dans le temps, c'est le bilan d'opération qui va permettre le suivi financier du projet. Année par année les dépenses et recettes de l'opération sont mises à jour en fonction de la mobilisation des financements nécessaires à la poursuite du projet ainsi que les frais financiers associés à l'opération. Ce bilan fait l'objet d'une publication au CRAC, (Compte Rendu Annuel à la Collectivité) qui permet un suivi de la part de la maîtrise d'ouvrage. Le bilan d'opération est l'un des éléments le plus important pour l'aménageur, qui doit bien veiller à son suivi. En effet, à l'issue de l'opération un partage du solde, qu'il soit négatif ou positif, a lieu entre l'aménageur et la collectivité, d'où la nécessité de faire une estimation pertinente (montant de l'investissement en début d'opération) et de réaliser un suivi rigoureux tout au long de celle-ci. Les éléments du bilan sont mis à jour annuellement et font régulièrement l'objet de discussion entre l'aménageur et la ville. Les projets urbains étant des opérations très longues et soumis à des aléas importants ont introduit à ce bilan la notion de risque.

54

1. Les éléments d'un bilan d'opération

Figure 15: Bilan d'un aménageur. Réalisation personnelle

2. La notion de risque dans une opération d'aménagement

Depuis 2005, lorsque la mise en place d'un traité de concession est décidée, on intègre la notion de risques liés aux aléas d'une opération d'aménagement. On parle ainsi de marge pour risque. Il s'agit ici de définir le potentiel d'occurrence sur ces risques afin de déterminer la somme qu'on va bloquer dans cette catégorie. Si le risque se produit, l'aménageur va pouvoir puiser dans cette ressource, sinon elle est conservée. Ces risques sont partagés entre l'aménageur et la ville et sont définis dans ce traité qui se présente de la manière suivante :

NOMENCLATURE DES RISQUES

Risques liés aux sols
· Réalisation de fouilles archéologiques

· Mauvaise qualité géotechnique du sol

· Pollution du sol

Risques liés aux
· Montant des acquisitions plus élevé que prévu au

acquisitions foncières bilan

· Acquisitions foncières plus longues que prévu

Risques liés aux
· Montant des études plus élevé que prévu

études générales

Risques liés aux
· Nécessite d'amener ou de renforcer les réseaux

réseaux

Risques liés aux
· Montant des études plus élevé que prévu à

travaux prestations égales

55

Commercialisation
· Montant de la charge foncière moins élevé que prévu

· Non atteinte de la SDP prévue

· Rythme de commercialisation plus faible que prévu

Risques liés aux frais
· Évolution des taux d'intérêts

financiers

Figure 16 : Nomenclatures des risques. Réalisation personnelle. Source : SERL, 2014

56

Le traité de concession n'est pas un élément figé, il est susceptible d'évoluer de nombreuses fois au cours de l'avancée du projet. Cependant ces évolutions ne doivent pas remettre en cause le projet urbain défini au préalable. Il est donc particulièrement important pour la SERL d'identifier les risques liés à un projet urbain dans ces éléments de programmation. L'implication d'un programme d'habitat participatif au sein d'un projet urbain de plus grande envergure n'échappe pas à cette règle. C'est pour cette raison que nous allons intégrer dans la partie consacrée aux conséquences de l'intégration d'un groupe d'habitants dans un projet urbain des éléments sur les risques liés à ce type de montage opérationnel (Partie II-B). L'objectif consistera à dresser l'ensemble des éléments de réflexion sur le risque potentiel d'intégrer de l'habitat participatif dans un projet urbain.

3. Le partage du solde de l'opération

Depuis 2005, les directives européennes, en plus d'avoir introduit la notion de risque dans un projet, ont fait évoluer le partage du solde d'une opération. A l'issue de celle-ci est effectué un partage du solde d'une opération suivant les modalités suivantes :

Figure 17: Partage du solde dans une opération d'aménagement. Réalisation personnelle. Source : SERL, 2014

C'est dans ce cadre qu'évolue actuellement la SERL lors de ses missions d'aménagement. L'aménageur est essentiel au bon suivi d'un projet urbain, de sa capacité à optimiser l'enchaînement des procédures, à veiller à la coordination des acteurs en place ainsi qu'à un suivi financier rigoureux dépend la réussite finale d'une opération d'aménagement. La procédure dans laquelle évolue la SERL est complexe et induit la maîtrise d'une ingénierie du projet très technique.

Par son organisation la SERL se démarque par sa capacité à innover dans ses projets urbains. Elle a la volonté de ne pas être seulement investisseur mais également producteur et service de la ville.

C'est dans ce processus qu'intervient cette étude sur l'habitat participatif. Comme nous avons pu le voir précédemment, les opérations immobilières en habitat

57

participatif restent pour le moment très minoritaires en France. Cependant, la SERL a été confrontée sur plusieurs opérations à des candidatures de groupes d'habitants qui souhaitaient développer un projet participatif. L'absence de référence pour le moment sur ce sujet, a rendu difficile l'analyse de ces propositions. L'objectif de cette étude n'est pas à très court terme pour la SERL de lancer un projet en habitat participatif mais d'être « sachant » sur le sujet, afin d'appréhender au mieux une éventuelle candidature d'un groupe d'habitants sur une opération urbaine menée par elle-même. La partie présente était indispensable à notre étude sur l'habitat participatif. En effet, pour savoir comment la SERL peut appréhender cette forme de création de logement, il faut nécessairement comprendre le fonctionnement de cet aménageur. Comme nous avons pu le voir, cet aménageur intervient dans un cadre très formalisé. Sa structure en économie mixte lui confère des responsabilités importantes et fixe la recherche de l'intérêt général comme élément directeur de sa réflexion. Les projets menés sont très longs et le risque est un élément déterminant dans le processus de mise en place d'un projet, d'autant plus que les montants financiers engagés sont colossaux. Il est donc important pour l'aménageur de mesurer de la manière la plus précise possible les risques qu'il va prendre dans son projet. La partie suivante a pour objet d'expliquer les conséquences de l'introduction du groupe d'habitants dans le montage opérationnel. Il s'agit là d'avoir la vision la plus claire et précise possible en se plaçant dans un cadre théorique afin d'anticiper au mieux les conséquences de l'intégration d'un projet d'habitat participatif au sein d'un projet mené classiquement par la SERL. Cette partie est le fruit de nombreux échanges avec des professionnels de l'aménagement qui sont intervenus sur des opérations d'habitat participatif ou qui projettent de le faire, elle intervient également à l'issue de participations à des réunions et à une journée thématique consacrée à ce sujet et organisée par la SCET (Société Centrale pour l'Équipement du Territoire

28).29

28 La société centrale pour l'équipement du territoire est une structure créée par la caisse des dépôts en 1957 et anime le réseau des structures spécialisées dans l'économie mixte.

29 L'ensemble des réunions font l'objet d'un compte rendu disponibles en annexe.

58

POiNTS CLéS

LA SERL :

· éVOLUE DANS LE CADRE DE L'éCONOMIE MIXTE. INTERVIENT EN CAS DE DéFAILLANCE DU SECTEUR PRIVé

· MAJORITAIREMENT :

- OPéRATIONS CONCéDéES (ZAC GRATTE-CIEL, ZAC LA DUCHèRE,)

- OPéRATIONS CONSTRUCTIONS ET SUPERSTRUCTURES (MUSéE DES CONFLUENCES, CENTRE UNIVERSITAIRE, SIèGE

RéGION RHôNE ALPES)

· OPéRATIONS CONCéDéES MAJORITAIREMENT PAR LE GRAND LYON, ACTIONNAIRE à 50% DE LA STRUCTURE ÉVOLUTIONS :

· DEPUIS 2005, MISES-EN CONCURRENCE ET éVOLUTIONS DU VOLET FINANCIER

· NéCESSITE DE S'ADAPTER à LA COMMANDE DU CLIENT

L'HABITAT PARTICIPATIF PEUT êTRE UNE DEMANDE DE LA MéTROPOLE DONC LA SERL DOIT MAîTRISER CE MODèLE

· NéCESSITE D'INNOVER PAR RAPPORT à LA CONCURRENCE

L'HABITAT PARTICIPATIF PEUT êTRE UNE SOURCE D'INNOVATION DONC LA SERL DOIT MAîTRISER CE MODèLE

· LA SERL DOIT éGALEMENT éVALUER PRéCISéMENT LA NOTION DE RISQUE D'UN PROJET

· LE RISQUE VA INFLUENCER LE BILAN D'AMéNAGEMENT DE L'OPéRATION

CETTE NOTION DE RISQUE, LA SERL DOIT êTRE CAPABLE DE LE MESURER DANS LE CADRE D'UN PROJET EN HABITAT PARTICIPATIF

B) LA SERL, UN AMÉNAGEUR INTIMEMENT LIÉ À UN TERRITOIRE, LA MÉTROPOLE LYONNAISE

1. La Métropole Lyonnaise, une institution en mouvance

Figure 18 : Territoire de la Métropole du Grand Lyon : http://data.grandlyon.com/utiliser-smart-data/ Réalisation personnelle

L

a Métropole de Lyon est née le 1er janvier 2015,

 

cette collectivité territoriale

unique en France est le résultat de la fusion de la Communauté Urbaine de Lyon et du Conseil général du Rhône, elle se compose de 59 communes.

Ce changement d'échelle est la conséquence de la loi MAPAM

(Modernisation de l'Action

Publique territoriale et
d'Affirmation des Métropoles). Dotée d'une clause de

compétence générale, la
Métropole de Lyon règle par délibération toutes les affaires d'intérêt métropolitain.

59

Depuis le 1er Janvier 2005, la Métropole a élargi le champ de ses compétences, elle est ainsi en charge des 5 grandes compétences suivantes :

· Développement économique

· Éducation, culture et loisirs

· Solidarités

· Cadre de vie

· Gestion au quotidien

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Quelles conséquences pour la politique d'aménagement ?

En matière d'aménagement territorial, l'évolution vers la Métropole Lyonnaise élargie à la fois le territoire d'intervention et les moyens à dispositions pour cette collectivité territoriale. Selon Gérard Collomb, sénateur, Maire de Lyon et Président de la Métropole, dans les prochaines années un « plan pluriannuel d'investissement, prévoit 3,5 milliards d'euros pour financer 1175 projets, qui va ainsi permettre à ce territoire de continuer à se transformer »30.

Le président de la Métropole, place l'aménagement du territoire au coeur de la stratégie économique de cette collectivité. La fusion de la Communauté urbaine et du Conseil général réunie deux compétences, « hier la Communauté Urbaine était chargée de créer des emplois, mais c'était le Conseil Général qui suivait les personnes les plus éloignées de l'emploi. Réunir les deux compétences nous permet de rapprocher le monde économique et monde de l'insertion »31. G.Collomb souhaite ainsi faire de ce territoire la « Métropole de l'innovation sociale ».

Cet objectif passe par un renforcement des politiques en matière d'action sur les quartiers paupérisés « pour résorber la fracture spatiale, qui est au coeur de la fracture spatiale ». C'est pour cette raison qu'après les opérations réalisées sur les quartiers de la Duchère, Mermoz, Vaux-en-Velin, Venissieux, la Métropole de Lyon va poursuivre sa politique de renouvellement urbain.

Dans le cadre du NPNRU (Nouveau Programme National pour la Rénovation Urbaine), 14 sites ont d'ores et déjà été identifiés par l'ANRU (Agence Nationale de Renouvellement Urbain) et bénéficieront des fonds débloqués dans le cadre de ce programme.

La SERL, en temps qu'aménageur de la Métropole Lyonnaise jouera un rôle déterminant dans ce processus. La fusion de la Communauté Urbaine et du Grand Lyon a eu en effet pour conséquence, une évolution dans la composition de l'actionnariat de la SERL, la Métropole est désormais actionnaire à 50% de la SERL.

Plus que jamais, dans ce cadre et dans un contexte où la concurrence est de plus en plus importante, la SERL se doit de répondre et/ou d'anticiper les besoins de la Métropole dans les futurs projets urbains de ce territoire.

30 A.L, Décembre 2015, Vers une Métropole de l'innovation sociale, Urbanisme, l'individu créateur de ville, Métropole de Lyon, 55.

31 Idem.

61

2. La Métropole de Lyon, vers un modèle « Bottom-Up » ?

Il est aujourd'hui difficile de dire quelle stratégie sera décidée par la Métropole de Lyon dans les prochaines années. Néanmoins, au regard des articles étudiés et des rencontres réalisées tout au long de ce travail, une volonté semble se mettre en place : renforcer l'intégration de l'habitant dans le processus de conception de la ville.

Cette stratégie se rapproche de la vision « Bottom-Up ». Cette logique s'oppose à la conception « Top-Down », il s'agit d'un concept qui renvoie « aux dispositifs de type participatif » ou « chacun « apporte une partie fondamentale de l'édifice qu'elle cherche à produire » 32. Cette intégration de l'habitant est mobilisée par la Métropole de Lyon depuis de nombreuses années, à travers notamment des réunions publiques et de la concertation. La Métropole lyonnaise souhaite renforcer ce processus de participation des habitants. Pour Michel le Faou33, Vice-président de la Métropole de Lyon, cette évolution doit être portée par les acteurs politiques et opérationnels de l'aménagement, selon lui « il ne faut pas avoir peur de ces transitions mais les prendre à bras-le-corps. »

Cette analyse est renforcée par les conclusions de la 36è rencontre des agences d'urbanisme qui a eu lieu à Lyon en Octobre 2015 et qui avait pour thème, « l'individu, créateur de ville ». À travers cette rencontre organisée par la FNAU (Fédération Nationale des Agences d'Urbanisme) le constat est sans appel, l'intégration des habitants transforme les métiers de l'aménagement. Ces évolutions aussi minoritaires et peu visibles soient-elles, interpellent les élus et tous les professionnels. Les besoins sont là, son expression prend de l'ampleur, les pratiques s'en trouvent modifiées. Pour Jean Paul Delevoye34« les citoyens ne veulent plus obéir mais adhérer et il faut susciter en eux la gourmandise du futur ».

On retrouve cette volonté aussi bien à l'échelle de la ville qu'à l'échelle de son logement. De nombreux acteurs de l'immobilier s'interrogent notamment sur le futur de l'habitation. La Métropole de Lyon à l'issu d'un travail de prospective via une grande enquête auprès de la population lyonnaise a livré ses conclusions lors de l'atelier « Désirs d'habiter et modèles économiques ». Pour la collectivité à l'échelle

32 Muriel Frisch MCF Sciences de l'éducation - Didactique des disciplines et didactique professionnelle-12 septembre 08

33 Adjoint au maire de Lyon et vice-président de la Métropole de Lyon, président de l'Agence d'urbanisme de l'aire métropolitaine Lyonnaise

34 Président du conseil économique, social et environnemental

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de ce territoire les enjeux sont « d'assurer une réponse au vieillissement de la population, favoriser la mixité sociale, tout en s'ajustant aux attentes des habitants, à celle des élus locaux et des acteurs de la construction »35.

L'habitat participatif, est un bon outil pour favoriser la mixité sociale et générationnelle, elle répond également à la volonté des élus de proposer un modèle qui vient intégrer les habitants à la conception de la ville. La Métropole de Lyon en se positionnant sur ce point annonce son ambition d'innover sur son modèle de conception urbaine.

Nous allons le voir dans la partie suivante l'idée de développer l'habitat participatif sur la Métropole de Lyon est une stratégie réaliste étant donnée les caractéristiques de ce territoire.

3. La SERL, une structure qui s'adapte aux évolutions de la Métropole de Lyon

La SERL depuis le projet de la Duchère jusqu'à l'aménagement de la ZAC Gratte-ciel en passant par le musée des Confluences a toujours répondu aux volontés de son donneur d'ordre la Métropole de Lyon. Il est donc nécessaire pour notre structure de s'interroger sur la volonté de la Métropole de placer l'habitant au coeur du processus urbain. On peut bien sûr se dire que cette velléité n'est qu'un effet d'annonce, mais les discours tenus ainsi que les actions engagées sur différentes opérations de la Métropole de Lyon nous poussent à croire en un engagement fort dans les prochaines années.

La SERL en 2013, a engagé une étude sur la concertation urbaine dans les projets urbains, les conclusions de cette démarche interne montraient déjà l'importance d'un développement de cette pratique. L'analyse faite aujourd'hui démontre la même nécessité.

Il y a de grande chance pour que dans un futur proche, la SERL s'engage sur un projet participatif, que se soit en raison d'une demande de la Métropole ou bien une volonté de la SERL. En effet par son caractère participatif, cet habitat est un outil d'une stratégie plus globale de « Bottom-up », vers quoi souhaite tendre la Métropole. De plus, nous allons le voir dans la partie suivante ce territoire réuni tout les ingrédients pour voir émerger de nombreux projets de ce type dans les années à venir.

35 Thierry Roche, Décembre 2015, Désirs d'habiter et modèles économiques, Urbanisme, l'individu créateur de ville, Métropole de Lyon, 55.

63

POiNTS CLéS

LA MéTROPOLE DE LYON, C'EST :

· UNE INSTITUTION EN MOUVEMENT

· UNE STRATéGIE BASéE SUR LE DéVELOPPEMENT DE L'INTéGRATION DES HABITANTS AU PROCESSUS DE CONCEPTION DE LA VILLE

· DE NOMBREUX PROJETS DANS LES ANNéES à VENIR. L'HABITAT PARTICIPATIF

· UN MODE DE PRODUCTION DU LOGEMENT QUI INTèGRE LES HABITANTS

· DONC POTENTIELLEMENT UN AXE DE STRATéGIE DE DéVELOPPEMENT POUR LA MéTROPOLE LYONNAISE POUR LA SERL

· LA NéCESSITé DE S'ADAPTER AUX STRATéGIES DE LA MéTROPOLE

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C) LA MÉTROPOLE LYONNAISE, UN TERRITOIRE FERTILE POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'HABITAT PARTICIPATIF ?

1. La Métropole Lyonnaise, territoire d'une expérience emblématique en matière d'habitat participatif, le village vertical

L

e Village Vertical est à l'échelle lyonnaise et nationale un projet emblématique de l'habitat participatif. En effet, ce projet est novateur, il est le premier qui a

 

développé le modèle de la coopérative en France et il a la particularité d'intégrer une SA coopérative d'HLM, Rhône Saône Habitat, dans son montage. La médiatisation très importante de ce projet contribue également à présenter le Village Vertical comme une référence sur le plan national.

Le projet du Village Vertical

Ce projet débute en 2005, comme souvent il naît de la volonté d'un groupe d'habitants de développer une forme innovante de logement. Très vite le groupe noue un partenariat avec l'association Lyonnaise, Habicoop, qui promeut depuis 2005 le développement de l'habitat participatif (voir partie suivante). Habicoop, va offrir ses services gratuitement au titre du caractère expérimental de la démarche, elle accompagnera le groupe tout au long du processus. En 2007 le groupe s'associe avec RSH dans l'idée de développer une coopérative d'habitation. Ce premier contact s'est fait de manière très informel avec un entretien entre le groupe alors constitué et le directeur général de la structure Benoît Tracol. RSH a décidé de se lancer dans cette aventure pour le coté innovant du projet sans forcément être à la base spécialiste de l'habitat participatif.

À ce stade, le groupe n'avait encore aucun projet il a donc fallu le mettre en place. Avec l'aide d'Habicoop et de RSH, le groupe a identifié un terrain susceptible de pouvoir accueillir le village dans la ZAC de la maison neuve à Villeurbanne. L'accès à ce foncier a pu aboutir uniquement grâce à la ville de Villeurbanne et du Grand Lyon qui ont mis à disposition du groupe un terrain au prix du logement social qui à l'origine était fléché pour de la promotion privée.

65

 

Le développement du projet a duré 7 ans entre la constitution du groupe et la livraison du bâtiment. Cette durée très longue explique notamment la rotation très importante des personnes qui habitent dans le village vertical, en effet du groupe originel il ne reste qu'une seule personne. Cette rotation s'explique également par la complexité du projet et son caractère novateur. L'absence de cadre législatif et de projet similaire a obligé la mise en place d'une structure juridique assez complexe qui a évolué au fur et à mesure des difficultés rencontrées.

Figure 19 : Chronologie V.V. Source: RSH

 

Le montage du Village Vertical

Figure 20 : Montage du jardin de Jules . Réalisation personnelle

L'association entre RSH et l'association du Village Vertical a pour conséquence un montage particulier. En effet, l'opération comporte 2 maîtres d'ouvrage, RSH pour les 24 logements en accession sociale et le village vertical pour les 14 logements de la coopérative, le tout formant le Jardin de Jules, nom donné à l'opération. Le village vertical est structuré en SAS, (société par actions simplifiée), les habitants ne sont pas propriétaires de leurs logements mais locataires auprès de l'association. À ce titre, ils payent chaque mois une redevance, qui correspond au remboursement du

prêt, plus une participation aux charges de gestions. Pour devenir locataire du logement il faut être membre de la société, en entrant dans le capital, investissement que l'on récupère en quittant celui-ci. Afin de mettre en place cette structure, c'est l'association qui effectue le prêt pour la construction des logements, montage qui permet à des personnes aux revenus plus modestes de devenir propriétaire. L'inconvénient de ce modèle, c'est la difficulté pour une banque à garantir ce prêt.

Devant les difficultés rencontrées par le groupe, c'est RSH qui a effectué le portage financier jusqu'à l'obtention du prêt PLS par la coopérative d'habitants (Juin 2013). Prêt locatif social qui a pu être obtenu grâce à l'introduction d'un plafond de revenu pour les futurs locataires. Fait rarissime, RSH est garant du village vertical pour les 50 prochaines années. En cas de défaillance de paiement d'un des locataires, le bailleur devient propriétaire du logement. À noter dans ce montage une participation de la caisse des dépôts et consignations via l'obtention d'un prêt PLA-I, en raison des 4 logements étudiants du village vertical.

Figure 21 : La garantie d'emprunt du jardin de Jules. Réalisation personnelle

Le bâtiment

Figure 22 : Le Jardin de Jules. Habicoop.fr

66

 

Figure 24 : Espaces partagés. Présentation SCET.2015

 

67

Le bâtiment est un immeuble unique de 38 logements, la partie Ouest est réservée à l'accession sociale, la partie Est au Village Vertical. Extérieurement, à la demande de RSH cette division est invisible et partage des prestations communes : un ascenseur commun, un sous-sol commun, une chaufferie bois-gaz commune.

Figure 23 : Organisation du bâtiment. Présentation SCET 2015

Côté Village Vertical, chaque ménage dispose d'espaces privatifs importants, clé de la réussite d'un projet d'habitat participatif. Les « villageois » partagent une salle commune en rez-de-chaussée, une buanderie et 4 chambres d'amis destinées à accueillir ponctuellement, voire à servir de local d'activité. Parmi les 14 logements du Village Vertical, 4 sont des résidences sociales, construites via un bail emphytéotique de 50 ans et animées par AILOJ, association qui s'occupe du logement de jeune en difficulté.

Le bâtiment réalisé représente une surface habitable (SHAB) de 2752 m2 dont 1741 m2 pour les 24 logements en accession sociale et 1011 m2 pour les 14 logements du Village Vertical. Au total le prix revient global de l'opération est de 6 250 000 € HT soit 2 270 € HT par M2 SHAB. A noter un coût du terrain inférieur au prix du marché de 200 € HT / m2 SP, grâce à une subvention Grand Lyon de 50 € HT / m2 pour le Village36.

Bilan et retour d'expérience

Le retour d'expérience est très variable selon les acteurs. En ce qui concerne les habitants, l'expérience semble très positive, pour le moment l'ensemble des personnes du groupement habitent encore dans le Village Vertical. En revanche, l'exposition médiatique très importante ainsi que les demandes de rencontres conséquente, ont obligé le groupement à dorénavant refuser toutes les sollicitations. Néanmoins l'association garde un contact privilégié avec Habicoop et ses membres participent régulièrement à des rendez-vous organisés par l'association.

Pour Habicoop la réussite est totale, puisqu'avec ce projet abouti de coopératives elle se positionne comme un acteur majeur (voir par la suite).

Pour RSH cette expérience est mitigée. Elle est très positive professionnellement parlant, dans la manière de gérer un groupe et également dans l'aventure humaine. Cependant, l'investissement horaire, 2 réunions par mois pendants 5 ans, sans compter le temps passé à la gestion du projet fait que RSH ne souhaite pas renouveler l'expérience sous ce format. De plus, l'engagement financier très important ainsi que la prise de risque dans le montage de la part du bailleur sont également des éléments qui justifient la réflexion de la part de RSH à s'engager dans le futur sur ce modèle.

Malgré des réticences, RSH est aujourd'hui convaincu du futur et de la nécessité pour les bailleurs de s'investir dans le développement de l'habitat participatif, vecteur important du développement de la mixité sociale. C'est à ce titre que RSH est engagé dans un groupe de réflexion à l'échelle nationale de bailleurs pour le développement de l'habitat participatif. Malgré tout selon ce bailleur l'habitat participatif ne se décrète pas, ce mode d'habiter ne peut pas correspondre à tout le monde et obéit à des convictions fortes de partage et de vivre ensemble.

À ce jour, RSH intervient sur le programme de rénovation d'un immeuble de 5 logements en habitat participatif, la Gargouse (Lyon 7ème) en garantie financière en cas de défaillance éventuelle d'un des habitants. L'aspect financier est selon RSH

68

36 Données Rhône Saône Habitat. Présentation SCET. 12/2015

69

l'enjeu majeur du développement de ce type d'habitat, qui peine à trouver des garanties financières, en raison du caractère novateur de ces projets.

2. L'influence d'Habicoop sur le développement de l'habitat participatif à Lyon

Le challenge le plus important pour favoriser le développement de l'Habitat participatif, c'est la nécessité d'acculturer les populations à ce modèle si particulier. Comme nous avons pu le voir tout au long de cette étude le modèle de l'habitat participatif apporte des changements importants dans la notion de propriété qui au premier abord semble être diamétralement opposé à la vision classique de l'habitat. Ce processus de sensibilisation au modèle de l'habitat participatif, l'association Habicoop l'a entrepris tout d'abord à Lyon auprès des citoyens puis à une échelle nationale en entreprenant une action de lobbying auprès des pouvoirs politiques.

L'association Habicoop naît en 2005 de l'association de plusieurs membres issues du monde de l'économie sociale et solidaire, de la politique et de l'architecture, qui à l'issue de visites de coopératives habitantes en Allemagne et au Québec décident de développer ce mouvement en France37. L'association a en premier lieu travaillé sur la sensibilisation des personnes à ce modèle par l'organisation d'ateliers sur la définition de l'habitat participatif, ateliers qu'elle continue d'organiser très régulièrement sur la Métropole Lyonnaise. Parallèlement, l'association a rencontré le groupe du Village-Verticale et en juin 2006, un partenariat se crée pour effectuer une mission d'accompagnement du projet. Le Village Vertical est ainsi devenu le projet pilote, avec lequel s'est construit le montage juridique, financier et partenarial dans une logique de reproductibilité (voir partie précédente). Aujourd'hui l'association se place comme accompagnateur de projet en s'inspirant de ce qui se fait à l'étranger et plus particulièrement au Québec. L'association souhaite se placer comme Groupe Ressource Territoriale avec pour missions38 :

· Ressources habitants, en mettant en commun des documents de recherches et en mettant en relation des porteurs de projets et des habitants afin de favoriser la constitution de groupes en habitat coopératif.

· Ressources professionnelles, permettre la mutualisation des compétences et des outils d'accompagnement entre les membres du GRT afin de proposer des missions d'assistance.

· Ressources recherches, participer à des groupes de travail dans la rédaction et la diffusion de documents sur l'habitat participatif. Effectuer de la diffusion auprès des collectivités et professionnels de l'aménagement.

37 Site de l'association : Habicoop.fr

38 Missiones issus des objectifs listés par l'association Parasol, GRT Ouest. Parasol35.org

70

Le projet du Village Vertical a permis à l'association de légitimer son rôle et en fait aujourd'hui un acteur majeur du développement de l'habitat participatif à Lyon comme sur le territoire national. En effet, l'association est un acteur majeur du lobbying auprès de l'État (C.Devaux, 2015), qui s'est concrétisé par l'adoption de statuts juridiques propre à l'habitat participatif dans la loi ALUR. Cette action est le fruit d'un travail de prospective entamé en 2008, qui a mis en lumière « la possibilité de développer ce modèle, mais qui nécessitait des changements législatifs puis réglementaires » (Lyon, réunion publique). Pendant 5 ans l'association a développé son action auprès des gouvernements successifs, publiant dans les revues spécialisées et utilisant largement les réseaux sociaux (C.Devaux, 2015) afin de faire connaître leur mouvement. Le Village Vertical a sans nul doute eu une portée très importante dans la diffusion et la connaissance de l'habitat participatif. En effet, cette coopérative, la première en France est une vitrine pour l'association Habicoop qui lui a permis également une légitimité forte sur ce sujet, où peu de professionnels se sont pour le moment imposés.

Comme nous venons le voir, le rôle d'Habicoop est primordial dans le développement de l'habitat participatif à l'échelle de la Métropole. En effet, l'organisation régulière de réunions d'informations participant à l'acculturation des populations ainsi que l'action de lobbying auprès des politiciens pour faire entrer dans le droit français le statut de coopérative d'habitants ont permis à cette association d'être identifiée comme acteur majeur de l'habitat participatif. Ce constat est particulièrement vrai à l'échelle de Lyon, où l'ensemble des projets d'habitat participatif en cours est suivi par Habicoop. Cette légitimité, l'association la doit en grande partie au Village Vertical et à ces retombées médiatiques qui fait de l'association un acteur essentiel au développement éventuel de l'habitat participatif à Lyon.

71

3. Quel(s) avenir(s) pour l'habitat participatif sur le territoire métropolitain ?

Avec la mise en place du Village Vertical, un engouement fort aurait pu être créé sur la Métropole de Lyon. En effet, les retombées médiatiques particulièrement importantes ainsi que le travail de terrain réalisé par le secteur associatif ont engendré les ingrédients d'une popularisation du mouvement. Cependant, comme nous allons le voir dans cette partie la réalité est relativement différente.

Un engagement politique à deux vitesses

La position de la Métropole du Grand Lyon depuis l'émergence du projet du Village Vertical est assez ambivalente. En effet, on a à la fois le sentiment que la collectivité désire s'impliquer dans le processus de réflexion autour du développement de l'habitat participatif et dans le même temps on constate qu'elle ne souhaite pas s'engager dans la phase opérationnelle de ces projets. À partir d'entretiens formels et informels ainsi que de participations à des rencontres sur le sujet, il semblerait que cette position tiraillée trouve son explication dans la gestion de l'après Village Vertical.

La métropole de Lyon s'est engagée dans divers organisations afin de promouvoir le développement de l'habitat participatif. Depuis 2010, la métropole de Lyon est membre du Réseau National des Collectivités pour l'Habitat Participatif : groupement qui s'est engagé dans la constitution de « cet outil opérationnel et engagé pour faire de l'habitat participatif une composante des politiques publiques, mais aussi un levier de lobbying 39È. C'est au titre de cette participation que la Métropole de Lyon a participé à la réflexion autour du cadre juridique de l'habitat participatif qui a abouti à l'adoption de la loi ALUR.

La Métropole de Lyon est une des rares collectivités à avoir inscrit à son PLH son ambition de développer l'habitat participatif dans une logique d'innovation pour le logement aidé40.

La Métropole de Lyon a également mené une réflexion importante autour d'un projet resté aujourd'hui sans suite. L'ambition était de créer un modèle pour ensuite l'étendre afin de pouvoir créer du logement participatif. Cet outil opérationnel, inscrit au PLH du Grand Lyon, était basé sur le modèle suisse afin de créer une faîtière en mettant en place un fond d'investissement permettant de venir en appui des groupements. Un travail a été effectué avec la caisse des dépôts, la région et trois

39 Charte d'orientation du Réseau National. Novembre 2010.

40 Cette action est introduite dans la fiche d'action n°13 du PLH du Grand Lyon. Disponible sur : http://www.grandlyon.com/fileadmin/user upload/media/pdf/habitat/plh/20110404 gl plh t2 progdacti on.pdf

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fondations, fondation Abbé Pierre, Macif et Fondation de France. Le modèle évoqué était de permettre à cette société d'investir dans le logement privé diffus pour réhabiliter des immeubles en lien avec des coopératives qui occuperaient ces logements. La mise en place de cette structure est demeurée sans suite, faute d'un portage politique et de sources de financement insuffisantes.

De l'avis de nombreux acteurs de l'habitat participatif Lyonnais, l'expérience d'un projet participatif dans le quartier de Confluence marque un tournant dans la stratégie politique de la Métropole de Lyon. À la suite du projet du Village Vertical, un autre groupe se monte sur Confluence, la collectivité est alors d'accord pour se lancer dans ce programme, mais émet des réserves suite à l'expérience du Village Vertical. La collectivité souhaite d'emblée que le groupement s'associe avec un bailleur social, afin notamment d'avoir une garantie financière, puisque le bailleur va alors s'engager à racheter le logement en cas de défaillance du groupement.

La suite est assez floue ce qui rend difficile d'affirmer connaître la cause exacte de l'échec de ce groupement. D'après une étude menée par M.Sirieix, plusieurs raisons peuvent expliquer l'échec du groupement. Pour un des coopérateurs c'est une « action malhonnête d'un des partenaires » qui explique l'échec du projet. Pour une autre source c'est le « caractère trop amateur du projet qui a conduit à l'arrêt des négociations », enfin certains pointent « une arnaque et le groupe s'est fait avoir »41. Toujours est-il que le groupement a fini par éclater et l'opération n'a jamais vu le jour.

Cette mauvaise expérience marque pour beaucoup la fin de la volonté de la municipalité de s'engager de manière offensive dans ce type de projet42. La posture du Grand Lyon est aujourd'hui de répondre aux groupes intéressés, pour le moment la ville n'est pas dans une logique d'appel à projet comme le font Grenoble, Paris ou Lille...

À partir du moment où un groupe sollicite le Grand Lyon, la collectivité répond et oriente vers différents acteurs de l'habitat participatif. Son objectif n'est pas pour le moment de flécher des fonciers susceptibles d'être mis à disposition d'un groupe. Cette absence de stratégie forte se retrouve également dans les moyens mis en place en faveur du développement de l'habitat participatif. En effet, ils sont aujourd'hui assez faibles, voire quasi-inexistants, il n'y a d'ailleurs aucune personne qui soit en charge exclusivement de définir une stratégie et de développer ce secteur.

41 Sirieix Marion. Le mouvement Lyonnais de l'habitat coopératif, un nouvel acteur du changement social ? Soutenu en septembre 2012 à l'Institut lumière Lyon 2.

42 Analyse de M.Chanal, chargée de mission habitat Grand Lyon, voir compte rendu de son entretien en annexe et confirmé par le travail de M.Sirieix.

73

Cartographie des projets à l'échelle de la Métropole

Figure 25 : Carte des projets et initiatives en habitat participatif à l'échelle de la métropole Lyonnaise. Réalisation personnelle.

Projet aboutit

1 - Le Village Vertical

Année

emménagement

Surface

2015

1 011 m2 surface habitable

Nombre de logements 14

Montage juridique Coopérative

Cout de construction 1 335 € M2 SHAB

Projets en développements

Septembre 2017

2 - Chamarel

Année

d'emménagement

Surface /

Nombre de logements 16

Montage juridique Coopérative

Cout de construction /

3 - La Gargousse

Année

d'emménagement

/

Surface /

Nombre de logements 6

74

Le projet Chamarel propose un habitat assez unique en France, il s'agit ici de la première coopérative d'habitants pour personnes vieillissantes. L'objectif de cette coopérative est de permettre aux habitants de vieillir ensemble, sur la base de la solidarité. Ce groupement vient de poser la première pierre d'un bâtiment entièrement écologique.

Montage juridique Coopérative

Cout de construction /

Le projet de la Gargousse est situé au coeur du quartier de la Guillotière (Lyon 7). Le groupement est en phase d'acquisition du bâtiment. Il s'agit d'un immeuble à rénover qui appartient à la ville de Lyon. Le collectif de 4 personnes deviendra propriétaire via un bail emphytéotique de 70 ans.

4- Les choux lents

Année

d'emménagement

2017

Surface /

Nombre de logements 7

Montage juridique SCIA

Cout de construction /

Le projet des choux lents se situe à Saint Germain en Mont D'or, le groupement a investi dans une maison bourgeoise et une grange qu'elle partage. Actuellement le site est en travaux mais une partie des habitants ont déjà investi les lieux.

/

5- Groupe du 4 mars

Année

d'emménagement

Surface /

Nombre de logements 13

Montage juridique SCIA

Cout de construction /

75

Groupe situé à la Croix-Rousse qui utilise un montage intéressant. Ils ont fait le choix de monter le projet avec Alliade-Habitat, Entreprise Sociale pour l'Habitat. Une signature de contrat d'étude a été mise en place sous la forme d'une VEFA participative. Le groupement avance très vite et devrait entamer très prochainement la construction du bâtiment.

76

Projets qui ont échoué

La liste ci-dessous est non-exhaustive, elle fait état des projets qui n'ont pas abouti sur le territoire Métropolitain. Les raisons ne sont pas toujours connues, mais dans l'ensemble des cas, un échec a engendré l'explosion du groupe.

6- Projet de Confluence

Comme nous avons pu le voir précédemment dans ce cas, les raisons de l'échec sont multiples, groupe débutant, refus politique, action malhonnête... Le groupe n'a pas souhaité continuer ce projet.

7- Projet Gratte-ciel

Le groupement HaCoNovi s'est dit intéressé par un projet sur la ZAC Gratte-Ciel, d'après l'association un « refus politique a poussé le groupe à abandonner cette option È.

8- Projet Croix Haute

Ce groupe de 8 foyers a décidé d'abandonner ses recherches, faute d'opportunité dans le 4ème arrondissement, le groupe a été dissout.

On constate à travers les projets d'habitat participatif en développement sur la Métropole Lyonnaise qu'ils sont pour le moment peu nombreux et de tailles assez modestes, pas plus de 20 logements. En revanche, on observe une diversité dans la forme, le type, les valeurs de ces résidences, ce qui témoigne des multiples possibilités d'initiatives en matière d'habitat participatif.

77

POiNTS CLéS

L'HABITAT PARTICIPATIF À LYON, C'EST :

· AVANT TOUT L'EXPéRIENCE DU VILLAGE VERTICAL, PREMIèRE COOPéRATIVE EN FRANCE

· HABICOOP, ASSOCIATION QUI PROMEUT L'HABITAT COOPéRATIF ET AIDE LES GROUPES DANS LE DéVELOPPEMENT DE PROJETS

· UNE POLITIQUE AMBIVALENTE DE LA PART DE LA MéTROPOLE

- UNE INSCRIPTION DE L'HABITAT PARTICIPATIF À LA STRATéGIE DU PLH, UN INVESTISSEMENT DANS LE RHNP - MAIS PAS DE POLITIQUE VOLONTARISTE

POURQUOI ?

· IL SEMBLE QUE DES EXPéRIENCES AVORTéES ONT DONNé UNE MAUVAISE RéPUTATION AU MOUVEMENT DE L'HABITAT PARTICIPATIF ALORS QUE

· TRAVAIL D'ACCULTURATION TRèS IMPORTANT DE LA PART D'HABICOOP

· PROJETS EN COURS ET GROUPES FORMéS SUR LE TERRITOIRE

78

CONCLUSION

A

travers l'étude de l'expérience Lyonnaise en matière d'habitat participatif, on se rend compte que ce territoire nourrit une position paradoxale. En effet, Lyon fait jusqu'à présent figure de ville moteur en matière de développement d'habitat participatif. Cette position s'explique en grande partie par sa participation au RNHP (Réseau National de l'Habitat Participatif) et par l'importance de son tissu associatif qui favorise l'acculturation à cette innovation. Enfin, on ne peut pas évoquer l'habitat participatif à Lyon sans parler du Village Vertical qui est l'expérience emblématique à l'échelle du territoire français.

Lorsqu'on s'intéresse à ce projet, on se rend très vite compte que les analyses effectuées se placent le plus souvent du côté des habitants. Nous avons effectué le choix dans ce travail de se placer du côté des professionnels. Comme nous avons pu le voir cette position permet d'avoir une vision très différente puisque le retour d'expérience montre que ce type de projet nécessite des améliorations importantes.

Comme le montre les divers projets en cours, la métropole de Lyon semble aujourd'hui dans une position d'attente et ne dispose pas d'une stratégie propice au développement de l'habitat participatif. C'est cette position qui est paradoxale car nous avons pu le voir, ce territoire semble propice au développement de cette forme d'habitat. En effet, d'un côté les associations et plus particulièrement Habicoop effectuent un travail très important d'acculturation, étape indispensable à la formation de groupe, permettant aux collectivités d'initier des projets. Mais cet élément propice à l'essor à grande échelle de l'habitat participatif est freiné par l'absence d'une volonté de la part des politiques de développer cette troisième voie pour le logement. En effet, il semblerait que des expériences passées non concluantes ont remis en question la stratégie inscrite au PLH du Grand Lyon en 2007 visant à développer de l'habitat participatif dans une logique d'innovation pour développer le logement aidé43.

Nous allons le voir dans la partie suivante, la sécurisation des risques et la professionnalisation de l'habitat participatif est un des enjeux les plus importants pour le développement et l'institutionnalisation de ces projets [C.Devaux, 2005]. La partie suivante sera ainsi consacrée à l'étude des projets en habitat participatif, nous verrons donc les enjeux liés à l'intégration d'habitat participatif sur un projet urbain, ainsi que l'apport de la SERL dans la mise en place de ces projets. Cette analyse nous permettra de définir un modèle opérationnel qui pourrait permettre à la SERL de développer de l'habitat participatif dans ces projets urbains.

43 Cette action est introduite dans la fiche d'action n°13 du PLH du Grand Lyon. Disponible sur : http://www.grandlyon.com/fileadmin/user upload/media/pdf/habitat/plh/20110404 gl plh t2 progdacti on.pdf

79

III) QUELLE(S) STRATÉGIE(S) POUR LA SERL EN MATIÈRE

D'HABITAT PARTICIPATIF ?

A) L'HABITAT PARTICIPATIF QUELLES CONSÉQUENCES SUR UN PROJET URBAIN ?

L

'innovation de l'habitat participatif concerne essentiellement les processus et les rapports entre les acteurs. C'est pourquoi les phases de la programmation

 

et de la conception sont profondément modifiées par la présence des futurs usagers''.

Il est important dans l'éventualité pour la SERL de développer ce type de projet d'avoir une connaissance large des caractéristiques d'un montage opérationnel d'habitat participatif. En effet, comme nous avons pu le voir dans la partie précédente, la notion de risque est particulièrement importante dans le fonctionnement d'un aménageur qui doit donc les anticiper de la meilleure des manières afin de tenir un bilan financier le plus constant possible.

À travers cette partie, nous allons aborder les différentes caractéristiques induites par l'intégration d'un projet d'habitat participatif dans le montage opérationnel d'un projet urbain. Nous avons identifié trois types de conséquences propres à l'intégration d'un projet d'habitat participatif :

· Conséquences sur l'accession au logement,

· Conséquences sur le coût d'un projet,

· Conséquences sur la durée d'un projet.

44 Hab-Fab - Quelle stratégie pour commencer ?. 2016. Hab-Fab - Quelle stratégie pour commencer ?. [en ligne ] Disponible sur : http://www.hab-fab.com/collectivites/quelle-strategie-pour-commencer. [Accès le 15 Mars 2016].

80

1. L'habitat participatif, quelles conséquences sur l'accession au logement ?

« L'habitat participatif est un bon outil de démocratisation de l'accès aux logements » ? (Réunion publique, Habicoop, 2016).

On est en droit de s'interroger sur cette affirmation qui est un des arguments utilisés par les défenseurs de ce type de projet.

Au vu de notre analyse, ce type d'habitat est aujourd'hui encore réservé à une certaine catégorie sociale qui s'inscrit dans une démarche militante issu des Professions et Catégorie Socioprofessionnelles supérieurs (professions intermédiaires, professions intellectuelles supérieures...). On va ainsi retrouver le plus souvent dans ces groupements des architectes, des instituteurs, des retraités de la fonction publique, des personnes issues du secteur associatif voire du militantisme.

Cette constitution des groupes trouve sa raison dans le caractère même de l'habitat participatif. En effet, comme nous avons pu le voir depuis le début de cette étude, ces projets sont complexes et défendent le plus souvent des valeurs telles que la non spéculation, la non propriété et le partage. Il semble donc légitime de trouver dans ces groupes des personnes prêtes à s'engager dans ce type d'habitat qui va dans une direction différente des modèles classiques.

Véronique Biau45 en 2012 s'interrogeait déjà sur le futur de l'habitat participatif selon elle ce mouvement était à un « point critique ». Soit ces projets, pour l'instant diffus et réservés à une certaine catégorie sociale s'installeront, réussiront et enclencheront, un processus d'amplification ; soit ils conserveront cette échelle expérimentale et n'existeront jamais à une plus grande envergure.

La mise en place de la loi ALUR combinée à l'implication de plus en plus importante des collectivités contribuent à un processus d'institutionnalisation qui selon C. Devaux ne peut se faire que par une implication plus grande du politique dans ce processus, en incitant et en favorisant le développement de cette forme d'habitat. Comme nous n'avons cessé de le rappeler dans cette étude, l'habitat participatif n'est pour le moment en France qu'à ses prémisses.

Cependant, le nombre de projets de plus en plus important en France (voir partie II-B) ainsi que l'engagement des acteurs institutionnels pour le développement de

45 Véronique Biau est architecte-urbaniste en chef de l'État, docteur en sociologie, chercheuse à l'École nationale supérieure d'architecture de Paris-Val de Seine, directrice du Centre de Recherche sur l'Habitat.

81

l'habitat participatif témoignent de l'engouement suscité par cette « troisième voie » du logement.

L'habitat participatif vecteur de mixité sociale ?

La notion de mixité sociale est aujourd'hui primordiale en aménagement. Recherchée dans les projets urbains, elle est au coeur du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain (NPNRU) et participe à la notion de vivre ensemble ainsi qu'à la création de la ville durable.

L'habitat participatif peut être un vecteur de mixité sociale pas seulement à la macro-échelle du quartier, mais également à la micro-échelle du bâtiment. Cependant, elle être atteinte que si l'on intègre un bailleur social au projet. En effet, incorporer cet acteur permet de développer de la mixité via la construction de logements sociaux au sein du projet participatif.

Deux formes d'intégration de logements sociaux nous semblent pouvoir alors être mises en place :

Sous la forme de lots séparés

C'est le modèle qu'on retrouve sur l'opération du Village Vertical, où le bâtiment le Jardin de Jules est divisé entre les logements du bailleur HLM (24 logements) et la coopérative d'habitants (15 logements). Les deux groupements partagent les coursives communes et ont accès aux espaces communs du Village Vertical (buanderie, pièce commune) moyennant une adhésion à l'association.

Sous la forme de lots mixés

Intégrer le logement social de manière mixée dans un bâtiment participatif est pour le moment un choix assez peu répandu. Il s'agit de disposer les logements sociaux sans distinction dans le bâtiment. C'est sur ce modèle que souhaite se développer la coopérative du 4 Mars à Lyon qui s'associe avec Alliade, entreprise sociale pour l'habitat, qui assurera la location des logements sociaux à des locataires qui devront adhérer à la charte des valeurs de la coopérative.

L'habitat participatif, nous venons de le voir est une opportunité pour introduire de la mixité sociale à l'échelle du bâti, mixité particulièrement intéressante puisqu'elle n'est pas subie mais choisie, ici le voisin n'est pas ressenti comme une menace qu'il faut tenir à distance, mais au contraire intégré au quotidien. Afin d'atteindre cet objectif de mixité sociale, il apparaît primordial d'intégrer un bailleur social dans l'opération, ce qui va permettre d'inclure au projet des logements sociaux et va participer à la démocratisation de l'habitat participatif, jusque-là réservé à une certaine population.

82

2. L'habitat participatif, quelles conséquences pour la durée et le coût d'un projet ?

L'habitat participatif, des projets plus longs que l'accession classique ?

L'ensemble des projets analysés sont caractérisés par une durée très longue avant leur concrétisation. Selon différentes études observées, la durée de montage d'un projet participatif nécessite pour le moment 2 à 5 ans de plus qu'un projet classique. Cette durée varie en fonction de la taille des groupes, l'opportunité foncière ou de la réservation de parcelles par des collectivités ou des aménageurs.

La professionnalisation du mouvement montre actuellement une tendance à la diminution de cet écart, mais les caractéristiques des projets participatifs font qu'ils ne seront jamais aussi concurrentiels que la promotion immobilière.

Selon une étude menée par l'union sociale pour l'habitat ce délai supplémentaire s'explique par 4 éléments :

La construction du collectif

Le groupe passe souvent du temps sur la définition de ces valeurs qui vont fonder le collectif.

La volonté des futurs habitants de maîtriser leurs projets

L'acculturation nécessaire pour suivre la mise en place de son habitat nécessite un investissement fort de la part des futurs habitants.

La recherche de financement

Là encore, généralement peu au fait des démarches à réaliser, les futurs habitants y consacrent beaucoup de temps.

La définition des besoins du groupe Ð le programme architectural

Un travail très important doit être effectué entre l'architecte et le groupe d'habitants qui doit définir les besoins tout en respectant un cadre budgétaire. Plus le groupe est important, plus les aller-retours entre l'architecte et le groupe sont nombreux.

L'étape introductive au projet est la période où les ambitions seront fixées, elle est assez longue mais forme la base du groupe et conditionne la réussite du projet. C'est cette période qui diffère par rapport à l'accession classique et explique en grande partie des projets assez longs dans l'habitat participatif.

HABITAT PARTICIPATIF

DU PROJET À LA RÉALISATION

 
 
 

commune ou collectivité locale

groupe d'habitants potentiel ou en formation

structure d'accompagnement (médiation

et programmation participative)

opérateur social

 
 

Mobilisation des coeurs

 
 
 
 
 
 

Cption sur un terra

définition du nombre de logements

bilan des ressources et moyens des habitants

choix d'une maîtrisa d'ouvrage et des statuts de la propriété

définition des modes de financement appropriés

 
 
 
 
 
 

Définition du montage juridique et financier adapté

 
 
 
 

Contractualisation des rdation entre acteurs

 
 

PROGRAMMATION

une charte

Construction du groupe

des règles de cooptation et dedédsion

PÉRIODE 1 (6 à 8 mois)

Élaboration du programme

Validation du programme

méthodologies de programmation assistance à la maîtrise d'ouvrage

vérification de l'adéquation du programme avec les moyens et les modes de financement

ETUDES

ARCHITEC I URALES

Pd fIJDd 2 (d a 8 rroi l:)

Choix de la maîtrise d'oeuvre

consultation concours

Suivi de la maîtrise d'oeuvre (phase esquisse)

Validation d'une esquisse

Dessin et validation des logements

Validation de l'Avant Projet Sommaire

assistance à la maîtrise d'ouvrage

Dépôt de permis de construire

Engagement forma des membres du groupe

83

 
 

assistance
à la maîtrise
d'ouvrage

EIUDES

ARCHITECTURALES

PÉRIODE 3 (18 à 24 mois)

 

Création des structuresjuridiques et achat du terrain

 
 
 

Construction

 
 
 
 
 
 
 
 

F ceptionet emménagement

 
 
 
 
 
 
 

Gestion commune

commissions thématiques

 

Figure 26 : Différentes étapes d'un projet participatif. Extrait du guide méthodologique pour la création SCIAPP.
AERA. Réalisation personnelle

84

L'habitat participatif, une réduction des coûts ?

L'habitat participatif est présenté comme l'opportunité de réaliser des réductions importantes sur le coût de production des logements. Nous allons le voir cette affirmation est difficilement quantifiable et vérifiable.

En effet, on trouve dans la littérature plusieurs estimations d'économie réalisées. Elles tournent en général autour de 10 % dans une fourchette comprise entre 5 et 18 %46. Le livre blanc de l'habitat participatif propose notamment une comparaison de différents montages participatifs et d'une opération classique, l'économie se situe entre 9,89 % et 17,5%, mais la méthode utilisée est critiquable, en effet ni les sources ni la méthode ne sont précisées47.

On peut néanmoins démontrer que les caractéristiques propres à l'habitat participatif engendrent des sources d'économie.

Économie liée au montage

La première source d'économie s'explique du fait du recrutement des futurs habitants en amont de l'opération, le coût lié à la commercialisation est donc naturellement nul.

Cette absence de commercialisation permet également une levée de fond plus importante étant donnée que l'ensemble des réservataires sont connus, ce qui entraîne une baisse de l'emprunt et des frais financiers48.

Économie liée au coût de conception

Au-delà des économies permises par le montage financier, la conception de projet en habitat participatif permet une réduction des coûts sur la construction des logements. En effet, la mutualisation des chambres d'amis, buanderie, jardin, etc. permet d'économiser de l'espace dans les logements et divise le coût de ces espaces.

Économie sur l'usage

Le choix de la conception du bâtiment permet de réaliser des économies sur le long terme. En effet, une des caractéristiques des projets en habitat participatif, c'est la dimension écologique des bâtiments et plus particulièrement la consommation énergétique de ces derniers. Dans la quasi-totalité des projets étudiés, on observe

46 CEREMA. Habitat participatif et logement abordable. Note problématique. 2015.

47 Ouvrage collectif. Le livre blanc de l'habitat participatif, 2011.

48 Idem

85

une consommation en énergie très faible des bâtiments ce qui permet de réaliser des économies sur le long terme.

Des sources d'économie sont également observées tout au long de la vie du projet, notamment, en ce qui concerne la mutualisation de services qui dépasse les liens classiques entre voisins et permet d'éviter le recours à des services externes.

Il est donc difficile d'affirmer que les logements en habitat participatif sont sources d'économie, pour le démontrer il faudrait mettre en place une étude avec un protocole fixe qui permettrait de comparer deux projets l'un en accession classique et l'autre en participatif, avec les mêmes surfaces et les mêmes caractéristiques techniques or l'habitat participatif se distingue par le caractère multiforme des projets qui sont le fruit de la réflexion des habitants. Le livre blanc de l'habitat participatif affirme ainsi que « c'est au cours de la vie du bâtiment que les économies sont les plus grandes ». Cette affirmation fait référence au coût global : « la solidarité et l'intelligence collective permettent une meilleure rentabilité économique en coût global : phase de conception, construction, utilisation et entretien ».

3. L'habitat participatif, des projets plus risqués ?

Malgré l'essor du mouvement participatif, de nombreux projets n'aboutissent pas en raison de la complexité des projets.

Ces échecs et contretemps font dire aux professionnels du bâtiment que ces projets sont impossibles à mener. Plutôt que de partir de ce constat, nous allons analyser quelles sont les difficultés rencontrées par les groupes d'habitants.

Nous allons voir à travers trois grandes catégories de risques que la difficulté pour mener à bien un projet en habitat participatif, s'explique par trois grandes raisons : la méconnaissance des institutions, le manque de compétence du groupe et les facteurs humains.

Les risques financiers

Obtenir un prêt de la part d'une banque peut devenir mission impossible pour certains groupes d'habitants. Ces rejets ne sont pas forcément motivés par un manque de ressources des membres mais le plus souvent par le projet en lui-même.

En effet, certaines banques refusent des prêts face à la complexité des dossiers à monter, notamment lorsqu'on intègre des logements sociaux. Mais également lorsqu'il y a méconnaissance des montages juridiques proposés.

Face aux problématiques de financement de nombreux groupes choisissent de s'associer à des professionnels notamment bailleurs sociaux qui apportent une légitimité et une garantie auprès des banques.

Les risques liés aux groupes

Le groupe est un élément sensible, en effet il est la force d'un projet, mais il peut rapidement devenir sa faiblesse.

L'habitat participatif vient donner du poids à la maîtrise d'ouvrage collective des habitants, or ces groupes représentent une somme d'individualité qui n'a pas les mêmes intérêts, envies et traits de personnalité. Plus ce groupe devient important, plus les décisions à prendre sont compliquées et peuvent donner lieu à d'interminable débat.

D'après une étude d'Habicoop49, la taille optimum d'un groupe d'habitants se situe entre 15 et 25 adultes, car cela permet de disposer de compétences internes variées, une répartition des tâches plus efficiente et, à priori, de gérer les situations de départ de manière moins délicate.

Un élément important soulevé par les groupes impliqués dans l'habitat participatif est celui du « Turn-over ». C'est le problème le plus récurrent dans les projets d'habitat participatif, il se pose alors la question du remplacement des ménages et de la gestion au quotidien du groupe.

Les risques techniques et administratifs

Les compétences que les groupes peuvent mobiliser sont l'élément primordial d'explication du succès ou de l'échec d'un projet. Dans la majeure partie des cas les groupes sous-estiment la complexité de mener un projet de cette ampleur.

Il est primordial pour les groupes qui se lancent dans ce type de projet de s'accompagner de professionnels du bâtiment et de l'habitat participatif. Nous allons le voir dans la partie suivante avec le développement de l'habitat participatif émerge de nouveaux métiers que la SERL, si elle décide de favoriser des projets en habitat participatif, devra prendre en compte.

86

49 http://www.habicoop.fr/IMG/pdf/FAQ_210111.pdf

87

POiNTS CLéS

L'HABITAT PARTICIPATIF :

· AU VU DE NOTRE éTUDE L'HABITAT PARTICIPATIF, N'EST PAS FORCéMENT UN OUTIL DE DéMOCRATISATION D'ACCèS à L'HABITAT

· MAIS CETTE FORME D'HABITAT SE DÉMOCRATISE

· LA SERL EN TEMPS QU'ACTEUR OPéRATIONNEL DE L'AMéNAGEMENT, SE DOIT D'ANTICIPER CETTE DEMANDE CE QUI PASSE PAR UNE CONNAISSANCE APPROFONDIE DU MONTAGE ET DE L'éVALUATION DU RISQUE DE CE TYPE DE PROJET

· L'HABITAT PARTICIPATIF EST VECTEUR D'UNE MIXITÉ SOCIALE, SI ELLE INTÈGRE UN BAILLEUR SOCIAL À SON MONTAGE DES PROJETS PLUS LONG

· OUI

· CES PROJETS INTRODUISENT DES DISCUSSIONS, DÉSACCORDS, NÉGOCIATIONS QUI ALLONGENT LA DURÉE DU PROJET DES PROJETS MOINS COÛTEUX `

· OUI & NON

· DIFFICILE D'AFFIRMER QUE LES LOGEMENTS EN HABITAT PARTICIPATIF SONT SOURCES D'éCONOMIES DANS LA PHASE CONSTRUCTION

· MAIS LA MUTUALISATION D'ESPACES ET DE SERVICES ENGENDRENT DES ÉCONOMIES AU QUOTIDIEN

DES PROJETS PLUS RISQUÉS ?

· NON MAIS ...

· LES PROJETS EN HABITAT PARTICIPATIF NE SONT PAS PLUS RISQUÉS MAIS INTRODUISENT UNE COMPLÉXITÉ LE GROUPE

· LE GROUPE REND NéCESSAIRE UNE ADAPTATION DU MODèLE UTILISé CLASSIQUEMENT ET L'APPARITION DE NOUVELLES COMPéTENCES

88

B) QUELLES EXPERTISES LA SERL PEUT-ELLE METTRE AU PROFIT DE LA CONSOLIDATION DES OPÉRATIONS D'HABITAT PARTICIPATIF ?

1. La SERL des capacités importantes pour le développement de l'H.P

E

n temps qu'aménageur, la SERL dispose de compétences importantes pour intégrer de l'habitat participatif dans ses projets.

 

De nombreux projets en développement

La SERL est actuellement aménageur de nombreuses opérations sur le territoire de la Métropole lyonnaise qui pourraient permettre la mise en place d'une expérience en habitat participatif. Cette diversité est un atout puisqu'elle offre la possibilité d'intégrer de l'habitat participatif sur des opérations variées.

Une légitimité sur le territoire de la Métropole Lyonnaise

La SERL depuis plus de 50 ans développe des projets urbains reconnus pour leurs qualités. A travers la ZAC de la Duchère, la rénovation des TONKIN, la gare Part-Dieu, la réhabilitation du quartier des pentes de la Croix-Rousse etc. la SERL est devenue légitime en matière d'aménagement.

L'expérience accumulée est particulièrement intéressante dans l'optique du développement de l'habitat participatif. On peut considérer que si la SERL décide d'expérimenter ce type d'habitat elle apporterait la légitimité manquante à l'habitat participatif auprès des acteurs de la construction.

La perspective d'innover

L'expérience de l'habitat participatif participe à la volonté de la SERL de chercher l'innovation dans son métier d'aménageur. Ainsi la SERL peut très bien, au titre de l'expérimentation lancer une opération pilote sur un des secteurs actuellement en cours d'aménagement.

2. L'habitat participatif, quelles conséquences pour le métier d'aménageur ?

Un projet d'habitat participatif a donc pour conséquence principale d'intégrer dès l'origine du projet un groupe d'habitants. Ce caractère innovant est également un élément primordial pour comprendre les difficultés de développement de l'habitat participatif. En effet, en plaçant au centre du projet l'habitant « celui-ci devient devient l'inconnu du projet » (C.Devaux, 2015). Pour Stéphanie Golfouse, responsable développement et patrimoine pour Rhône Saône Habitat, l'expérience du Village Vertical a montré la nécessité d'un processus d'acculturation de la part des professionnels dans le suivi de ce type de montage.

89

Il induit des compétences professionnelles supplémentaires notamment dans la gestion des groupes d'habitants. Avec le développement de ce type d'habitat, on voit apparaître l'émergence de professionnels spécialisés dans le montage opérationnel d'habitat participatif. L'apparition de cette nouvelle activité s'explique par la complexité des projets immobiliers pour les non-initiés. L'accompagnateur est ainsi chargé de faire l'interface entre l'aménageur et le groupe d'habitants. Les missions de ces professionnels interviennent tout au long du processus de mise en place du projet de la phase de conception du groupe d'habitants, on peut les résumer de la façon suivante :

· Aide à la constitution du groupe, en mobilisant son réseau dans l'apport de nouvelles personnes,

· Animer le groupe et participer à l'amélioration de son fonctionnement,

· Réaliser le cadrage du projet en fixant le calendrier ainsi que les priorités afin d'aider la prise de décision,

· Être à l'interface entre les partenaires publics et privés afin de favoriser la coordination,

· Réaliser le montage d'opération et financier en lien avec le maître d'ouvrage,

· Favoriser la médiation entre le groupe d'habitants et le maître d'oeuvre.

L'ensemble de ces professionnels sont regroupés depuis 2011, au sein de la RAHP (Réseau nationale des Acteurs professionnels de l'Habitat Participatif), l'objectif étant de se structurer et de profiter d'un retour d'expérience entre les acteurs afin de développer les projets participatifs.

Il apparaît essentiel pour la SERL de se doter de cette assistance dans la gestion d'un projet. En effet, ce professionnel permet de créer une véritable interface entre l'aménageur et le groupe d'habitants. De plus, l'accompagnateur amène au projet une véritable expertise et des compétences dans l'ingénierie participative.

Cette compétence fait bien souvent défaut dans la mise en place de projets participatifs et explique pour partie la durée très longue et l'éclatement de nombreux groupements. Il faut néanmoins noter que même si ce métier se développe de plus en plus et se structure par la mise en place d'un réseau de professionnel, Les accompagnateurs bien souvent n'ont que très peu d'expériences, avec pour la plupart un ou deux projets livrés (voire aucun !). Ce manque de référence et le caractère novateur et non structuré augmente le risque de ces projets.

90

3. Des expériences infructueuses (à ce jour) en matière d'habitat participatif

La SERL a eu des approches en matière d'habitat participatif sur des opérations mais qui n'ont pas été au bout de leurs ambitions. C'est au cours de ces expériences qu'il a été décidé de la nécessité de cette étude, afin de comprendre les caractéristiques de ces projets et expliquer les échecs rencontrés.

· Projet Terra cités - ZAC de La Duchère - Lyon / 2013

Dans le cadre de la consultation du lot 23 sur la ZAC de la Duchère, un opérateur, Terra Cités, a proposé un projet qui se rapproche de l'habitat participatif. Il s'agissait pour l'opérateur de construire un bâtiment qui comportait des espaces partagés, principalement la toiture terrasse. Parallèlement, Terra Cités se fixait pour objectif de recruter les futurs habitants groupés en SCIA, société qui s'engageait à l'acquisition du bien via une procédure de VEFA (Vente en État Futur d'Achèvement), c'est-à-dire une vente sur plan, avant la fin de la construction.

L'équipe a atteint la phase 2 de la consultation, qui est l'étape où 3, 4 équipes (tout dépend de la procédure) sont sélectionnées et proposent une esquisse. Terra-cités, après remise de sa proposition, a été placé en liquidation judiciaire. Cette expérience a confirmé la fragilité du secteur naissant de l'habitat participatif.

· Projet Urban Coop - Terrain des Soeurs - Villeurbanne / 2015

Dans le cadre de la consultation du lot 1-3 de l'opération Terrain des Soeurs, l'opérateur Urban coop a atteint la phase 2 en proposant un programme coopératif. Cette SCIC (Société Coopérative d'Intérêt Collectif) proposait une solution d'accès à la propriété en garantissant des prix inférieurs d'achat. Afin d'obtenir des prix de sortie plus bas que le marché, elle proposait notamment aux futurs acquéreurs des appartements où les locataires réalisaient les travaux de finitions eux-mêmes.

Cette équipe n'a pas été retenue pour des raisons diverses, architecture : projet moins aboutit que les autres candidatures... Néanmoins, cette offre a provoqué des interrogations de la part de la SERL, notamment sur la manière d'aborder ce type de projet, qui se revendique comme de l'habitat participatif.

· Initiative Jamel Debbouze pour l'habitat et l'insertion professionnelle dans les quartiers / 2016

Dans le cadre du projet de La Duchère, la SERL en temps qu'aménageur de la ZAC a été sollicité par l'association Jamel Debbouze pour réaliser sur cette opération une « initiative [qui] s'adresse aux habitants des quartiers populaires qui sont exclus du marché du logement, du fait de leur isolement et / ou d'une instabilité face à

l'emploi »50. Cette initiative portée par l'État et la Caisse des dépôts vise à produire de l'habitat participatif, afin de développer un programme reproductible. À l'échelle de la ZAC le projet consiste à la construction de 12 à 15 logements, mais le mode de production des logements, le montage juridique ainsi que l'intégration des habitants au processus de participation ne sont pas encore définis.

Le travail réalisé dans le cadre de mon contrat de professionnalisation va pouvoir permettre d'apporter des éléments d'analyse et de réflexion sur cette initiative qui est pour le moment encore assez floue.

POiNTS CLéS

L'HABITAT PARTICIPATIF ET LA SERL C'EST :

· LA POSSIBILITé DE S'ENGAGER DANS UNE EXPéRIENCE INNOVANTE

· DES PROJETS SUSCEPTIBLES D'ACCUEILLIR DE L'HABITAT PARTICIPATIF

· QUELQUES APPROCHES SUR LE SUJET QUI ONT MONTRé

· LA NéCESSITE D'UNE ADAPTATION DANS LA MANIèRE DE MENER UN PROJET POUR CETTE RAISON

· PROPOSITION D'UN MODèLE DANS LA PARTIE C

91

50 Document interne à la SERL

C) PROPOSITION D'UN MODÈLE OPÉRATIONNEL POUR DÉVELOPPER L'HABITAT PARTICIPATIF.

L

e modèle présenté ci-dessous est l'aboutissement de l'étude réalisée sur l'habitat participatif. La problématique de cette étude est, rappelons-la :

 

Comment la SERL, acteur opérationnel de l'aménagement, peut elle appréhender une forme innovante de création de logement : l'habitat participatif ?

Cette problématique a structuré ce travail. Nous avons ainsi donné une définition à ce mouvement, que nous avons par la suite intégré au contexte de la Métropole lyonnaise. L'objectif fixé au début de cette étude était de dresser une stratégie pour la SERL en matière de développement de l'habitat participatif. Pour ce faire nous avons choisi de développer un modèle.

Ce modèle se base sur les problématiques identifiées d'un projet en habitat participatif : un projet plus long, plus risqué financièrement, plus instable et surtout un nouvel acteur le groupe !

Au regard de cette analyse la SERL peut participer à une opération d'habitat participatif à condition qu'elle respecte les 3 points suivants.

1. Identifier la parcelle, dimensionner le projet, adapter son planning

· Identifier une parcelle pouvant accueillir de l'habitat participatif en début d'opération

Un projet d'habitat participatif, nous l'avons vu précédemment, est plus long qu'un projet en accession classique, on parle généralement d'une durée supérieure, entre 2 et 5 ans. Il est donc nécessaire pour la SERL, d'identifier une parcelle pouvant accueillir un groupe d'habitants au début d'une opération d'aménagement.

En effet, il est important de prendre en considération ce délai supplémentaire pour éviter les risques de dérapage à l'échelle de l'ensemble de l'opération. Il est donc exclu de lancer un projet d'habitat participatif en fin d'opération sur une parcelle non-identifiée et restant à disposition.

L'exemple de Montpellier et du projet MasCobado

Le projet MasCobado mené par la SERM (Société d'Équipement de la Région Montpelliéraine) est un bon exemple de démarche à suivre. Sur la ZAC des Grisettes, l'aménageur a identifié une parcelle pouvant accueillir de l'habitat participatif, celle-ci, trop petite pour une opération de grande envergure a été mise à disposition dès le lancement de la ZAC pour développer de l'habitat participatif.

92

93

Dimensionner le projet

L'habitat participatif ne doit pas être considéré comme un projet classique, sa dimension doit être déterminée en nombre de foyers. Un projet d'habitat participatif dans sa taille optimale doit se situer entre 15 et 25 adultes, car il permet de regrouper des compétences variées, au-delà il est surdimensionné et sa gestion devient trop complexe.

Pour la SERL, une opération de cette envergure n'est pas à l'échelle des projets habituellement réalisés par l'aménageur. Pour cette raison, nous proposons d'associer un bailleur social, qui permet (entre autre) de mettre en place un projet de plus grande ampleur

2. Associer un bailleur social au projet

Les bailleurs sociaux ont un rôle primordial à jouer dans le développement de l'habitat participatif. Ces organismes ont conscience de la place qu'ils ont dans ce processus et des avantages de ce type d'opération. Depuis quelques années la plupart des projets qui se développent associent bailleur social et groupe d'habitants. Les avantages sont multiples.

Permettre un projet d'une plus grande dimension

Nous venons de le voir, l'habitat participatif ne permet pas la création de nombreux logements. Or, pour un aménageur, il est important de développer des projets d'une bonne envergure. Associer un bailleur social permet ainsi de développer un bâtiment de plus grande ampleur. On peut ainsi mettre en place une partie réservée au groupe d'habitants et une autre partie de l'édifice à des logements sociaux. Ce type de montage qui associe logement social et habitat participatif se développe de plus en plus.

L'exemple de Lyon et du projet Village Vertical

Le projet Vertical est un bon exemple de ce type de montage. En effet, il associe un groupe d'habitant et RSH, SA coopérative d'HLM qui ont livré un bâtiment de 38 logements, le Jardin de Jules, qui comprend 24 logements en accession sociale, 4 en résidence sociale jeune et 10 en coopérative d'habitants (Village Vertical)

·

94

Stabiliser et sécuriser l'opération auprès des partenaires

En accord avec le groupe, le bailleur social peut s'engager à reprendre à son compte les logements destinés au groupe d'habitants, en cas d'échec ou de dissolution.

Ce montage sécurise l'opération pour :

· Les banques : qui vont financer une opération classique avec de la vente en VEFA (Vente en État Futur d'Achèvement),

· L'aménageur : Le projet aboutira quoi qu'il arrive. En cas de défaillance du groupe, le bailleur reprend l'immeuble à son compte.

· Les habitants : Ils ont leur financement et ne supportent pas les responsabilités du chantier.

L'exemple de Montpellier et du projet MasCobado

Le groupe s'est chargé de la maîtrise d'ouvrage de conception avec l'architecte, futurs propriétaires et locataires confondus.

Une fois les plans terminés, au moment du dépôt du permis de construire, la maîtrise d'ouvrage a été transférée au bailleur qui s'est chargé des travaux

Il a pris les responsabilités et a revendu via une VEFA aux futurs propriétaires et loue aux locataires les appartements.

· Diminuer les coûts

Réaliser une opération en compagnie d'un bailleur social permet des économies d'échelle. Une opération d'une dizaine de logements seulement peut, en effet, s'avérer très coûteuse pour le groupe d'habitants.

De plus, les futurs habitants sous plafonds de ressources peuvent grâce à ce montage bénéficier des conditions avantageuses des opérations de logements sociaux51.

· Permettre que des ménages à bas revenus participent au projet ; permettre la mixité sociale

51 Accompagner les projets d'habitat coopératif et participatif. Union sociale pour l'habitat. Février 2011.

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En intégrant un bailleur social au montage de ce type d'opération on permet à des ménages, dans le cadre de l'accession sociale de venir s'intégrer à ce type de projet. Une mixité va également se créer entre les habitants des logements participatifs et ceux des logements sociaux.

En revanche, à moins d'obtenir une dérogation, le bailleur ne peut pas identifier les ménages en amont de la définition d'un programme locatif, puisque cela consisterait en un non-respect des règles d'attribution.

3. Adapter ses procédures

· S'entourer d'un accompagnateur-projet en habitat participatif

Au vu de la complexité, d'un projet participatif, il apparaît nécessaire de faire appel à un accompagnateur de groupes. Comme nous avons pu le voir précédemment, l'accompagnement de groupes est un métier qui ne s'improvise pas et qui fait appel à de multiples compétences. Il est nécessaire de s'entourer d'acteurs professionnels, aussi pour le montage des projets que pour la promotion des valeurs de l'habitat participatif.

Le domaine d'intervention est double :

· La SERL, peut faire appel à un accompagnateur pour qu'il assure une mission d'assistance tout au long de l'opération et ainsi faire le lien entre l'aménageur, le groupe d'habitants et le bailleur social.

· La SERL doit imposer lors de la consultation que le groupe soit appuyé d'un accompagnateur. En effet, là aussi l'accompagnateur assure le rôle de liens. Il permet également d'assurer le rôle de modérateur dans le groupe et ainsi prévenir dans la mesure du possible les conflits.


· Adapter son règlement de consultation au groupe d'habitants

Enfin, la SERL doit s'adapter à l'introduction du groupe dans sa manière de gérer un projet. Même si dans ce modèle, nous préconisons une association bailleur social / groupe d'habitants, ce qui limite l'interaction entre les habitants et la SERL, rôle assumé par le bailleur.

En effet, un projet d'habitat participatif ne peut se mener comme un projet classique. La SERL doit donc adapter son règlement de consultation si elle décide de mener un projet participatif. L'assistance d'un accompagnateur, sachant sur le sujet, est important puisqu'il va permettre de fixer les attentes et le règlement de la consultation.

L'introduction du groupe d'habitants dans un projet vient sensiblement modifier la manière dont la SERL mène ses projets. Voilà pourquoi il est important pour cet aménageur de s'entourer de professionnels de l'habitat participatif, afin de mener une

96

consultation dans laquelle l'aménageur, le bailleur et le groupe d'habitants retrouvent leurs intérêts.

L'exemple de Lille, Appel à projet en habitat participatif.

Lors de cet appel à projet lancé en 2012 en partenariat entre la ville de Lille et le bailleur social, Lille Métropole Habitat, il était fortement recommandé de faire appel à un assistant à maitrise d'ouvrage (AMO) spécialisée dans l'habitat participatif. Le le retour d'expérience tend à démontrer que l'intervention d'un professionnel contribue à raccourcir les délais et permet au groupe de se structure52.

POiNTS CLéS

L'HABITAT PARTICIPATIF ET LA SERL C'EST :

· LA POSSIBILITé DE S'ENGAGER DANS UNE EXPéRIENCE INNOVANTE MAIS

· À CONDITION DE RESPECTER LE MODèLE SUIVANT

1- IDENTIFIER LA PARCELLE, DIMENSIONNER LE PROJET, ADAPTER SON PLANNING

POURQUOI ?

· HABITAT PARTICIPATIF, LES PROJETS SONT PLUS LONGS

· HABITAT PARTICIPATIF, LE PROJET DOIT êTRE ENTRE 15 ET 25 ADULTES

2- ASSOCIER UN BAILLEUR SOCIAL AU PROJET

POURQUOI ?

· PERMET DE DéVELOPPER UN PROJET D'UNE DIMENSION PLUS IMPORTANTE

· STABILISE ET SéCURISE L'OPéRATION AUPRèS DES PARTENAIRES

· PERMET DE RéDUIRE LES COUTS

· PERMET QUE DES MéNAGES À BAS REVENUS PARTICIPENT AU PROJET

3- ADAPTER SES PROCéDURES

· S'ENTOURER D'UN ACCOMPAGNATEUR DE PROJET EN HABITAT PARTICIPATIF

· ADAPTER SON RèGLEMENT DE CONSULTATION

52 CAUE DU NORD - Habitat participatif à Lille. 2016. CAUE DU NORD - Habitat participatif à Lille. [ONLINE] Available at: http://www.caue-nord.com/index.php/component/k2/551-habitat-participatif-a-lille. [Accessed 16 avril 2016].

97

CONCLUSION

Ce Projet de Fin d'Études m'a permis d'aboutir à plusieurs conclusions que la SERL doit prendre en considération si elle décide de participer à un projet d'habitat participatif.

Premièrement, l'habitat participatif doit être vu comme une volonté il ne peut être imposé, je retiendrais ainsi cette phrase de S. Golfouse prononcée lors d'un entretien « l'habitat participatif ne se décrète pas, ce mode d'habiter ne peut pas correspondre à tout le monde et obéit à des convictions fortes de partage et de vivre ensemble ». Il est primordial pour la SERL de garder cet élément en tête, car la notion de « vivre ensemble » est la base de ce mouvement.

La seconde conclusion de ce travail tient dans l'évolution de ce mouvement en France. Bien que l'habitat participatif soit encore peu développé comparé à certains pays comme le Canada ou l'Allemagne, il est indiscutable que cette « troisième voie » au logement séduit de plus en plus de ménages. Les perspectives de développement sont donc bonnes, d'autant plus que la loi ALUR vient donner une assise juridique à ce mouvement. Il est néanmoins complexe en l'absence d'études de quantifier cette demande.

Afin de définir la stratégie que la SERL pouvait adopter en matière d'habitat participatif, il était nécessaire de comprendre le cadre d'intervention de cet aménageur. Cet acteur opérationnel intervient en grande partie pour la Métropole Lyonnaise. Il est donc indispensable que la SERL anticipe les demandes de la collectivité en matière d'aménagement. Cette étude montre que la Métropole est en pleine évolution et que des pistes d'innovations sont en cours de développement. Parmi elle, la volonté d'intégrer de plus en plus l'habitant dans le processus de construction de la ville, on parle ainsi de politique bottom-up. L'habitat participatif est un outil de croissance de cette stratégie, accroître les politiques en faveur de ce développement semble donc pouvoir être une piste que la Métropole pourra mener dans les prochaines années.

Enfin l'étude des modes opérationnels de la SERL et des caractéristiques du montage opérationnel d'un projet d'habitat participatif a montré que l'habitat participatif pouvait être développé par cet aménageur, en respectant le modèle développé dans cette étude. C'est-à-dire identifier une parcelle pouvant accueillir de l'habitat participatif et dimensionner le projet dès l'origine de celui-ci, associer un bailleur au montage de ce type d'opération et enfin adapter sa procédure en faisant appel et en imposant au groupe d'habitants un accompagnateur spécialisé dans ce type d'habitat.

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Ë la suite de ce PFE ce modèle de développement va me permettre de présenter à la SERL deux stratégies à adopter en matière d'habitat participatif :

· La première position consiste à attendre une volonté politique de développer de l'habitat participatif sur la Métropole de Lyon. Dans ce cas présent, la SERL doit continuer à affiner ses connaissances sur le sujet, afin de répondre présent dans cette éventualité.

· La seconde stratégie consiste à être force de proposition en matière d'habitat participatif. Il s'agit là pour la SERL d'identifier une parcelle pouvant accueillir de l'habitat participatif et d'initier le projet auprès de la Métropole. Cette position nécessite d'affiner cette étude, notamment en ce qui concerne la demande sur le territoire, la taille d'un projet, la rédaction d'un règlement de consultation et la procédure à adopter.

L'étude réalisée dans le cadre de ce Projet de Fin d'études doit être analysée comme un élément précurseur dans la réflexion de la SERL de s'investir dans un projet d'habitat participatif et ne pourra être précisée que par la réalisation d'une opération d'habitat participatif.

Pour terminer, aborder ce sujet fut passionnant par sa richesse et sa diversité. Le fait de réaliser cette étude dans le cadre d'un contrat de professionnalisation m'a permis de confronter la vision théorique au terrain. Cette approche n'a pas toujours été simple à appréhender mais elle a eu le mérite de faire évoluer ma réflexion sur l'habitat participatif. Mon approche est passée d'une vision idéaliste à une conception pragmatique de l'habitat participatif. Je reste persuadé de la nécessité de développer ce type d'habitat, mais uniquement dans un cadre précis, à petite échelle et surtout à l'initiative de l'habitant.

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BIBLIOGRAPHIE

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- Meyer, Alain. 2007. Pour une autopromotion en France selon l'exemple allemand

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- http://www.cooperativehabitation.coop/

- http://www.habicoop.fr/

- http://www.habitatparticipatif.net/

- https://www.habitat-groupe.be/

- http://www.toitsdechoix.com/

- http://www.rahp.fr/

103

ANNEXES

TABLE DES FIGURES

FIGURE 1 : INFOGRAPHIE DE L'HABITAT PARTICIPATIF. RÉALISATION PERSONNELLE 16

FIGURE 2 : LES 155 MÉNAGES DE LA COOPÉRATIVE LE COTEAU VERT ET L'OBNL UN TOIT POUR

TOUS, QUARTIER PETITE-PATRIE À MONTRÉAL. BATIRSONQUARTIER.COM 21
FIGURE 3 : PROJET HUNZIKER, UN QUARTIER DE 35 COOPÉRATIVES SOIT 450 LOGEMENTS.

DUPLEX-ARCHITEKTEN 23

FIGURE 4 : STRUCTURE DES LOGEMENTS COOPÉRATIFS EN SUISSE 24

FIGURE 5: LES HABITANTS DU PROJET DIWAN DANS UN DES ESPACES PARTAGÉS.

WWW.ARCHITECTES.ORG 29

FIGURE 6 LES MEMBRES DES BABAYAGAS. LIBÉRATION.FR 30

FIGURE 7 : IMMEUBLE DES BABAYAGAS. SOPHIELOUBATON.PHOTOSHELTER.COM 31

FIGURE 8 : DURÉE DE LA PROCÉDURE DE LA CONSULTATION. SOURCE : DOSSIER DE

CONSULTATION. MODIFICATION AF 31

FIGURE 9 : LES 10 TERRAINS VENDUS PAR LA COLLECTIVITÉ. SOURCE: STRASBOURG.EU 32

FIGURE 10 : BÂTIMENT ECO-LOGIS. SOURCE: LYON.ARCHI.FR 33

FIGURE 11 : PLAN MASS DE LA ZAC. EN ROUGE LES DEUX LOTS DE LA VILLE DÉDIÉES À

L'HABITAT PARTICIPATIF. SOURCE : AGENCE DUBUS RICHEZ 34

FIGURE 12 : PERSPECTIVE DU PROJET. SOURCE : TOITS DE CHOIX 35

FIGURE 13 : MASCOBADO 1 ET 2, MUTUALISATION DES ESPACES. SOURCE : TOITS DE CHOIX 36

FIGURE 14: ACTIONNARIAT DE LA SERL. SOURCE : RAPPORT D'ACTIVITÉ 2016 48

FIGURE 15: BILAN D'UN AMÉNAGEUR. RÉALISATION PERSONNELLE 54

FIGURE 16 : NOMENCLATURES DES RISQUES. RÉALISATION PERSONNELLE. SOURCE : SERL,

2014 55
FIGURE 17: PARTAGE DU SOLDE DANS UNE OPÉRATION D'AMÉNAGEMENT. RÉALISATION

PERSONNELLE. SOURCE : SERL, 2014 56
FIGURE 18 : TERRITOIRE DE LA MÉTROPOLE DU GRAND LYON :

HTTP://DATA.GRANDLYON.COM/UTILISER-SMART-DATA/ RÉALISATION PERSONNELLE 59

FIGURE 19 : CHRONOLOGIE V.V. SOURCE: RSH 65

FIGURE 20 : MONTAGE DU JARDIN DE JULES . RÉALISATION PERSONNELLE 65

FIGURE 21 : LA GARANTIE D'EMPRUNT DU JARDIN DE JULES. RÉALISATION PERSONNELLE 66

FIGURE 22 : LE JARDIN DE JULES. HABICOOP.FR 66

FIGURE 23 : ORGANISATION DU BÂTIMENT. PRÉSENTATION SCET 2015 67

FIGURE 24 : ESPACES PARTAGÉS. PRÉSENTATION SCET.2015 67

FIGURE 25 : CARTE DES PROJETS ET INITIATIVES EN HABITAT PARTICIPATIF À L'ÉCHELLE DE LA

MÉTROPOLE LYONNAISE. RÉALISATION PERSONNELLE. 73

104

FIGURE 26 : DIFFÉRENTES ÉTAPES D'UN PROJET PARTICIPATIF. EXTRAIT DU GUIDE MÉTHODOLOGIQUE POUR LA CRÉATION SCIAPP. AERA. RÉALISATION PERSONNELLE .... 83

105

ENTRETIENS

Journée thématique

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GRO uvE

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réseauscet

 

PROGRAMME

Paris le 11 décembre 2015

Lieu : Holiday Inn Paris Gare de Lyon 11-15 rue de Lyon - 75012 Paris

Habitat participatif : nouveau levier de développement
pour les aménageurs et les bailleurs

Journée organisée en association avec le Réseau national des collectivités pour !habitat participatif

9h30

09h Accueil - Café

Introduction

L'habitat participatif : un mouvement en marche dans les territoires, qui requestionne l'aménagement et la production du logement.

Stéphane KEÎTA -- Président directeur général de la SCET

Alain JUND -- Président du réseau national des collectivités pour l'habitat participatif f RNCHP), Adjoint au Maire en charge de l'urbanisme et de la transition énergétique de la Ville de Strasbourg. Vice-président de Strasbourg Eurométropole

10h00 L'habitat participatif : définition, nouveau cadre législatif, rôle des collectivités,

des EPL et des bailleurs

Quelle définition de l'habitat participatif ?

Quelle nouvelle légitimité pour favoriser le développement de ces démarches ? Comment les Lois (ALUR, Macron) et leurs récents décrets donnent-t-elle de nouveaux outils opérationnels et fonciers pour l'habitat participatif ?

Quelle impulsion donnée par les élus (appels à projets, encouragement des EPL et des bailleurs à se lancer dans la démarche) ?

Quels instruments financiers pour porter l habitat participatif et le logement abordable ?

Echange avec :

Audrey LINKENHELD -- Députée du Nord, rapporteur de la Loi ALUR I Philippe MAZENC Direction générale de l'habitat et de la construction -- Ministère du Logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité I Laurent LE CORRE -- SCET Direction des expertises et de l'ingénierie de projets I Alain JUND

Table-ronde animée par Stanislas DENDIEVEL -- SCET Direction de l'animation du réseau et de la communication

11h00 ! Pause : 15 mn

Sous réserve

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11h15 Photographie des expériences pionnières et des modèles d'habitat participatif

Panorama des modèles mis en place en France, â partir des exemples du Réseau national des collectivités pour ! habitat participatif (RNCNF)

Exposé : Pierre ZIMMERMANN - Chargé de mission, Strasbourg Eurométropole, co-animateur du RCNHP

Quelles conditions de réussite d'un projet d'habitat participatif (montage opérationnel, ingénierie immobilière, ingénierie sociale) ? Quels premiers retours d'expérience autour de projets réalisés aujourd'hui ?

Echange avec

Eric HARTWEG - Directeur d'opération, SERS, Strasbourg I Philippe BANULS - Responsable d'opérations. SERM, Montpellier I Stefan SINGER - Directeur de Toits de choix. Directeur général de Hab-Fab, fondateur du Réseau des accompagnateurs de l'habitat participatif (RAHP) I Pierre ZIMMERMANN

Table-ronde animée par Pierre BEULAYGUE - SCET Direction de l'animation du réseau et de la communication

12h45 Pause-déjeuner

14h00

La place de l'aménageur dans le développement de l'habitat participatif : l'habitat participatif, nouveau levier économique pour l'aménagement et la revitalisation des territoires ?

 

Focus sur des expériences de projets urbains participatifs en Suisse, impliquant dès l'amont les coopératives d'habitants dans les opérations d'aménagement

Exposé : Cyril ROPER - Architecte, Président d'Urbamonde

Quelle cartographie des modes de faire et des typologies d'habitat participatif développés par les SEM et les SPL en France ? Quel montages mis en place dans les opérations d'aménagement et quels enseignements ? Comment, entre collectivité et aménageur, favoriser l'émergence de projets ? Quel intérét économique pour les SEM et les SPL d'aménagement ?

Echange avec :

Emilie FLEURY - Chargée de mission habitat innovant, Communauté d'agglomération Est Ensemble, référente du RNCHP I Romain MARCHAND` - 1' Adjoint au Maire d'Ivry délégué à l'urbanisme I Djamel AÏT-AÎSSA* - Directeur opérationnel, SADEV 94 (Ivry) I Arnaud LE LAN - SCET Direction des expertises et de l'ingénierie de projet I Cyril ROPER

Table-ronde animée par Stanislas DENDIEVEL - SCET Direction de l'animation du réseau et de la communication

15h30 Co-produire l'habitat participatif : le rôle des bailleurs

Comment les bailleurs peuvent porter ou être partenaires de projets d'habitat participatif ? Quels modes de travail avec les habitants ? Quels montages opérationnels et financiers possibles ? Quels retours d'expériences en cours ?

Echange avec :

Stéphanie GOLFOUSE - Rhône Saône Habitat (exemple du « village vertical v. Villeurbanne) I Julie XAVIER - Lille Métropole Habitat (exemple des Voisins du quai -, Lille) I Antoine BOUCHEZ - Haute Savoie Habitat (exemple de l'écoquartier de Viry) I Christine RIVIERE - SCET Direction des expertises et de l'ingénierie de projet

Table-ronde animée par Boris HIVERNEL - SCET Direction de l'animation du réseau et de la communication

Synthèse de la journée et perspectives

16h45 L'habitat participatif : la place de la SCET et de son réseau au côté des EPL et des bailleurs

par Marina ALCALDE - Directrice générale adjointe de la SCET

* Sous réserve

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M.Chanal

02/02/16

Lyon Métropole

Chargée de mission habitat Grand Lyon

Éléments de contexte

Martine Chanal est chargée de mission Habitat au Grand Lyon. Elle est identifiée sur la métropole comme une personne essentielle de l'habitat participatif. En effet, de nombreux articles citent cette personne comme une porte d'entrée afin de comprendre l'ambition du Grand Lyon sur cette thématique.

Objectifs de la rencontre

La volonté de rencontrer M.Chanal naît de discussions avec des acteurs du mouvement de l'habitat participatif à l'échelle du Grand Lyon. À l'issue de ces divers entretiens, le nom de cette chef de projets est revenu régulièrement comme étant une des personnes du Grand Lyon sachant sur ce sujet.

Les missions de M.Chanal.

À l'origine M.Chanal est spécialisée dans les gens du voyage. En 2006, par l'intermédiaire d'Habicoop et d'une mission de lobbying très intense, le Grand Lyon décide de laisser une porte d'entrée au projet d'habitat participatif. M.Chanal devient alors porte d'entrée de l'habitat participatif au Grand Lyon. L'idée à la base était d'aider le projet du Village Vertical à trouver écho auprès du Grand Lyon. Très vite il s'est avéré que le projet avait un certain nombre d'éléments bancals, notamment sur le sujet financier. M.Chanal a donc accompagné le Village à voir le jour.

La définition de l'habitat participatif selon M.Chanal.

· L'autopromotion au sens Grenoblois avec la Sablière et le sens Strasbourgeois qui s'inspire du modèle allemand

· La coopérative, qui se développe à Lyon sous l'impulsion d'Habicoop qui s'inspire du modèle Canadien et Suisse.

· L'habitat participatif dans le logement social, porté par des bailleurs sociaux et qui est populaire à Montreuil notamment.

Ces trois formes ont été cadrées par la loi ALUR et ont permis la mise en place d'un socle juridique.

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Pour M.Chanal il est important de faire la distinction entre les promoteurs qui se lancent aujourd'hui dans ce type de projet en raison d'un effet d'aubaine et les accompagnateurs de projets qui apportent une vraie plus-value dans la gestion des projets participatifs. Du fait de l'apparition de ces projets tout azimut, on a également le développement de ces nouveaux métiers. On a le métier d'accompagnateur qui se créé et dans le même temps le métier de promoteur spécialisé dans le participatif.

La contribution à la loi ALUR et au RNHP

A partir de son expérience sur l'opération du Village Vertical, Mme Chanal a participé à l'édition de la loi ALUR, elle représente également le Grand Lyon au RNHP (Réseau National de l'Habitat Participatif).

L'après Village Vertical

L'opération du Village Vertical a été très longue avec un prix de sortie correct mais qui a bénéficié d'un coût du foncier très inférieur au marché avec surtout un effort conséquent de la collectivité. L'opération a été largement subventionnée par la ville et par la région, mais le loyer est très avantageux, avec un coût au m2 de 8€. Cet exemple montre que l'habitat coopératif est un modèle qui permet à des gens qui n'ont pas les moyens de devenir propriétaires, alors que l'autopromotion concerne les personnes qui ont plus les moyens.

Après le Village Vertical un autre groupe se monte sur Confluence, la collectivité est alors d'accord pour se lancer dans ce programme, mais est assez réservée suite à l'expérience du Village Vertical. La collectivité souhaite d'emblée que le groupement s'associe avec un bailleur social, pour divers éléments mais surtout pour la garantie d'emprunt, puisque le bailleur va alors s'engager à racheter le logement en cas de défaillance du groupement. Le groupement qui devait se lancer associé à un bailleur à fait faillite. La coopérative d'accession a fait faillite à Confluence et à partir de ce moment une confusion est apparue et depuis il y a une réticence à développer ce type de projet. Le mot coopératif est banni de Lyon.

Plusieurs projets sont actuellement en cours.

· La Gargousse dans le 7ème qui est une réhabilitation montée à partir d'un bail emphytéotique de 70 ans.

· Le projet du 4 mars avec Alliade qui est un projet très intéressant. Un modèle en coopératif qui pose des questions sur la relation entre le social et les coopérateurs, le logement social étant dans le diffus du bâtiment. Avec la plupart des bâtiments en PLS.

· Le Projet Chamarel, à Vaulx en Velin, qui est une coopérative de jeunes retraités.

·

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Le projet Cité Coop initié également dans le 7ème arrondissement

Pour Martine Chanal ces habitants ont une vraie vocation de création de liens sur le quartier et d'animateur de réseau par leurs actions, leurs volontés et l'implication dans les tissues associatifs.

Il ne s'agit pas de brader du foncier, si ces groupements ont un projet cohérent qui tient la route pourquoi les empêcher de s'installer ?

La position des bailleurs sociaux ?

L'intérêt d'intégrer un bailleur social est multiple :

· Pour le bailleur permet d'apporter de la mixité sociale, via un projet couplé de plus grande envergure (V.V)

· Permet au bailleur d'accéder à des terrains intéressants

· Permet de garantir l'emprunt

· Permet d'accéder à des capacités professionnelles intéressantes

Quel portage politique aujourd'hui ?

Un portage pas très important assez faible de la part de la collectivité.

Aujourd'hui les groupes viennent chercher la collectivité pour obtenir du foncier et avoir des avantages financiers sur cet élément. Ils viennent aussi pour obtenir une aide financière, et enfin la garantie d'emprunt. La posture du Grand Lyon est pour le moment de répondre aux groupes intéressés, la ville n'est pas dans une logique d'appel à projet comme le font Grenoble, Paris... Mais à partir du moment où un groupe sollicite le Grand Lyon, l'institution répond. Les risques sont limités et cette action ne prend pas un temps trop important.

Paradoxalement, Lyon fait aujourd'hui figure de figure nationale en matière d'habitat participatif.

Projet actuellement avec EMH, qui s'appelle OASIS à Saint Priest dans la même lignée que les Babayagas.

Et maintenant ?

A l'origine en 2006, avec la subvention d'Habicoop l'ambition était de créer un modèle pour ensuite l'étendre et pouvoir créer des logements participatifs assez rapidement. Or avec seulement 14 logements sortis depuis on voit que le processus est très long et compliqué. L'ambition d'origine était, sur le modèle suisse de créer une faîtière en mettant en place un fonds d'investissement. Un travail a été effectué avec la Caisse

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des Dépôts, la région et trois fondations, fondation Abbé Pierre, Macif et Fondation de France. Qui ont fait une étude et ont montré qu'il fallait un fond d'investissement participatif. Le modèle évoqué était de permettre à cette société d'investir dans le logement privé diffus pour réhabiliter des immeubles et ensuite louer ces appartements mais sur le modèle de la coopérative. C'est-à-dire de rentrer dans le capital social de la société faitière. On est donc sur un entre deux entre la propriété et la location.

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S.GOLFOUSE

16/02/16

Rhône Saône Habitat

Responsable développement et patrimoine Éléments de contexte

SA coopérative d'HLM, RSH est une structure spécialisée dans la construction de bâtiments destinés à l'accession sociale à la propriété. Elle a livré en 2013 un

bâtiment de 38 logements, le Jardin de Jules, qui comprend 24 logements en accession sociales, 4 en résidence sociale jeunes et 10 en coopérative d'habitants,

le Village Vertical. Cette coopérative est dans sa dimension et dans sa structure la première en France.

Objectifs de la rencontre

Fortement médiatisé par son caractère novateur, le Village Vertical malgré son jeune âge a d'ores et déjà fait l'objet de nombreuses publications au sujet des habitants. L'objectif de cet entretien était de se placer du côté du maître d'ouvrage en recueillant le témoignage de la chef de projet qui a suivi l'ensemble du processus du projet, de la constitution du groupe à la livraison du bâtiment.

Le processus du projet

Le projet a démarré en 2006 avec un groupe qui a contacté RSH avec l'idée de développer une coopérative d'habitation. Ce premier contact s'est fait de manière très informelle avec un entretien entre le groupe alors constitué et le directeur général de la structure Benoît Tracol. RSH a décidé de se lancer dans cette aventure pour le côté innovant du projet sans forcément à la base être spécialiste de l'habitat participatif. À ce stade, le groupe n'avait encore aucun projet il a donc fallu le mettre en place. Ce travail s'est effectué avec l'aide d'Habicoop, association lyonnaise qui milite pour le développement de l'habitat coopératif. Habicoop, qui a offert ses services gratuitement au titre du caractère expérimental de la démarche. Le groupe a identifié un terrain susceptible de pouvoir accueillir le village dans la ZAC de la Maison Neuve à Villeurbanne. L'accès à ce foncier a pu aboutir uniquement grâce à la ville de Villeurbanne et du Grand Lyon qui ont mis à disposition du groupe un terrain au prix du logement social qui à l'origine était fléché pour de la promotion privée.

Le développement du projet a duré 7 ans entre la constitution du groupe et la livraison du bâtiment. Cette durée très longue explique notamment la rotation très importante des personnes qui habitent dans le Village Vertical, en effet du groupe originel il ne

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reste qu'une seule personne. Cette rotation s'explique également par la complexité du projet et son caractère novateur. L'absence de cadre législatif et de projet similaire a obligé la mise en place d'une structure juridique assez complexe qui a évolué au fur et à mesure des difficultés rencontrées.

Le bâtiment

Le bâtiment est un immeuble unique de 38 logements, la partie Ouest réservée à l'accession sociale, la partie Est au Village Vertical. Extérieurement, à la demande de RSH cette division est invisible et partage des prestations communes : un ascenseur commun, un sous-sol commun, une chaufferie bois-gaz commune. Côté Village Vertical, chaque ménage dispose d'espaces privatifs importants, clé de la réussite d'un projet d'habitat participatif. Les « villageois » partagent une salle commune en rez-de-chaussée, une buanderie et 4 chambres d'amis destinées à accueillir ponctuellement, voire à servir de local d'activité. Parmi les 14 logements du Village Vertical, 4 sont des résidences sociales, construites via un bail emphytéotique de 50 ans et animées par AILOJ, association qui s'occupe du logement des jeunes en difficulté.

Le montage d'opération

L'opération comporte 2 maîtres d'ouvrage, RSH pour les 24 logements en accession sociale et le Village Vertical pour les 14 logements de la coopérative.

Le Village Vertical est structuré en SAS, (société par actions simplifiée), les habitants ne sont pas propriétaires de leurs logements mais locataires auprès de l'association. À ce titre, ils payent chaque mois un loyer, qui correspond au remboursement du prêt, plus une participation aux charges de gestion. Pour devenir locataire du logement il faut être membre de la société, en entrant dans le capital, investissement que l'on récupère en quittant celui-ci. Afin de mettre en place cette structure, c'est l'association qui effectue le prêt pour la construction des logements, montage qui permet à des personnes aux revenus plus modestes de devenir propriétaires. L'inconvénient de ce modèle, c'est la difficulté pour une banque à garantir ce prêt. Devant les difficultés rencontrées par le groupe, c'est RSH qui a effectué le portage financier jusqu'à l'obtention du prêt PLS par la coopérative d'habitants. Prêt locatif social qui a pu être obtenu grâce à l'introduction d'un plafond de revenus pour les futurs locataires. Fait rarissime, RSH est garant du Village Vertical pour les 50 prochaines années. En cas de défaillance de paiement d'un des locataires, le bailleur devient propriétaire du logement. À noter dans ce montage une participation de la caisse des dépôts et consignations via l'obtention d'un prêt PLA-I, en raison des 4 logements étudiants du village vertical.

Au final, l'opération aura coûté au total 6 250 000 € HT

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Coût Coût village Coût global

accession vertical
sociale

Investissement € HT

4

300 000

1

950 000

6

250 000

Prix HT / m2

 

2 470 €

 
 

1 930 €

 
 

2 270 €

 

Le retour d'expérience

Pour RSH l'habitat participatif ne se décrète pas, ce mode d'habiter ne peut pas correspondre à tout le monde et obéit à des convictions fortes de partage et de vivre ensemble.

Cette expérience a été très positive professionnellement parlant, dans la manière de gérer un groupe et également dans l'aventure humaine. Cependant, l'investissement horaire, 2 réunions par mois pendant 5 ans, sans compter le temps passé à la gestion du projet fait que RSH ne souhaite pas renouveler l'expérience sous ce format. De plus, l'engagement financier très important ainsi que la prise de risque dans le montage de la part du bailleur sont également des éléments qui justifient la réflexion de la part de RSH à s'engager sur ce modèle.

Malgré ces réticences, RSH est aujourd'hui convaincu du futur et de la nécessité pour les bailleurs de s'investir dans le développement de l'habitat participatif, vecteur important du développement de la mixité sociale. C'est à ce titre que RSH est engagé dans un groupe de réflexion à l'échelle nationale de bailleurs pour le développement de l'habitat participatif.

À ce jour, RSH intervient sur le programme de rénovation d'un immeuble de 5 logements en habitat participatif, la Gargouse (Lyon 7ème) en garantie financière en cas de défaillance éventuelle d'un des habitants. L'aspect financier est selon RSH l'enjeu majeur du développement de ce type d'habitat, qui peine à trouver des garanties financières, en raison du caractère novateur de ces projets.

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M.Combourieu

17/03/16 Notaire

Éléments de contexte

Maître Brun est un notaire lyonnais qui à la suite de rencontre avec des groupes d'habitants a développé des compétences dans la mise en place de projet d'habitat participatif. Il ne se définit pas comme un spécialiste, mais comme un « sachant » sur cette thématique. Son associée, M.Combourieu a suivi la majorité des projets de ce type et est identifiée comme la personne ayant le plus de compétences sur ce sujet au sein de cet office notarial. Cette expérience du montage juridique en habitat participatif ils l'ont acquise grâce aux projets du groupe de Grezieu la Varenne, cTMteau de la Chaudanne et des Choux Lents à St Germain au Monts d'Or.

Objectifs de la rencontre

Deux structures ont été mises en place par ce notaire la SCI et la SCIA. L'objectif de cette rencontre est double : avoir une description du modèle développé par ce notaire ainsi qu'un retour d'expérience des projets mis en place.

Les projets menés

L'ensemble des projets suivis par le notaire est de petite taille, 4 à 6 foyers, avec une base du groupe fondée sur des liens affectifs (famille, amis proches...). Ces groupes ont une âme militante qui désirent s'occuper d'un projet dans son ensemble. Ils développent leurs projets à la campagne et selon ce notaire ne souhaitent pas s'intégrer dans un projet de grand ensemble urbain. Le notaire va alors créer une structure juridique à l'image du groupement d'habitants et surtout des convictions de ces groupes.

Le montage d'opération

Il existe une multitude de structures juridiques qui existent dans ce type de modèle. Ce notaire a développé deux types de structures :

Société civile classique

Dans ce modèle, on constitue en parallèle de la société une association, les deux structures ont les mêmes membres. L'association va détenir 90% de la société et les

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10% restants sont acquis par les membres de l'association mais sous leurs noms propres. Chaque personne est donc propriétaire en son nom propre d'une faible valeur et pourra revendre cette part lorsqu'elle quittera le logement. Dans ce modèle il y a généralement la volonté d'introduire un principe de non spéculation. Contrairement à la SCIA dans ce modèle il n'y a pas de division du bien immobilier, le bien est propriété de l'ensemble des associés. La difficulté de ce modèle est d'obtenir des garanties auprès des banques qui ne sont pas rassurées par la multitude d'acteurs et la possibilité de garantie financière. De même que la nouveauté de ce montage ne rassure pas les institutions financières. Nécessite donc d'avoir des apports assez importants avant de s'engager dans ce type de projet.

Société civile d'attribution

Dans ce modèle on effectue une division de l'immeuble qu'on va consigner dans l'état descriptif de division, document qui divise en lots le bien par un géomètre auxquels on va accoler un règlement de jouissance. A chaque lot va correspondre un groupe de parts sociales de la société. Chaque associé est donc propriétaire de parts sociales et aura la jouissance du lot qui est rattaché à son groupe de parts, mais c'est la société qui est propriétaire du bien. Donc, dans ce système la société est propriétaire du bien, mais la jouissance est réservée au groupe de propriétaire de parts sociales.

Lorsqu'on quitte la société (donc son logement) on cède ses parts, les autres associés ont un droit de préemption, c'est-à-dire une priorité d'achat. S'il ne souhaite pas acheter, il y a une procédure d'agrément pour un nouvel entrant. Le nouvel entrant doit donc être accepté par l'ensemble des occupants.

Dans ce modèle il y a possibilité de faire de la plus-value lors de la revente de son logement.

A l'origine ce montage avait pour objectif de pouvoir construire à plusieurs. Ce statut était effectif le temps de la construction et devait se transformer automatiquement en copropriété à l'issue de cette étape. Le règlement de jouissance devenant par la même occasion règlement de copropriété. L'utilisation en habitat participatif n'est donc qu'une adaptation du modèle d'origine, mais pour le notaire est particulièrement adapté à ce type de projet.

La copropriété classique

Selon les observations de Mme Combourieu la majorité des projets réalisés pour le moment sont des copropriétés qu'on adapte pour convenir à de l'habitat participatif. Mais cette structure est très rigide et contraignante et permet peu de liberté, elle n'est pas selon le notaire le modèle à privilégier.

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Le retour d'expérience

Aujourd'hui, Maître Brun est identifié comme un « sachant » sur ce modèle du participatif, il fait partie des rares professionnels juridiques à s'intéresser à ce modèle de construction. Il reçoit énormément de sollicitations, notamment suite aux RHNP de Marseille en 2015 de groupes qui souhaitent se lancer dans ce type de projet. Cependant il ne peut pas s'occuper, faute de temps de toutes ces sollicitations. En effet, ce type de montage demande énormément de temps en recherche, sans forcément au final aboutir à un projet et n'est donc pas rémunérateur. Pour ce notaire il manque une interface pour aiguiller ces groupes et faire de l'information sur la façon de mener un projet.

La place de la SERL pour le notaire dans ce type de projet

La SERL, si elle se lance dans des projets de si grande envergure doit savoir que le projet sera long et nécessite un temps d'apprentissage assez important. Une des difficultés les plus importantes est qu'aujourd'hui il n'existe quasiment aucun projet finalisé, il est donc difficile de savoir comment les mener de manière la plus efficiente possible.

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B.Pont

29/10/15

Graine d'idée

Éléments de contexte

Benjamin Pont est développeur de la structure graine d'idée qui propose du conseil en environnement et habitat participatif. L'objectif est de développer des prestations d'habitat participatif auprès des professionnels de l'aménagement en associant à chaque fois des habitants et/ou groupe d'habitants dans ces projets. En parallèle il lance habitat et partage association qui va se transformer en SCIC dans les prochains mois, elle intervient dans l'accompagnement des groupes d'habitants. Ces deux structures sont liées dans leur fonctionnement mais n'interviennent pas aux mêmes étapes du projet. Le rôle d'habitat et partage est de travailler avec des professionnels qui ne veulent pas forcément être impliqués directement dans les phases de réflexion et d'accompagnement. L'association a le rôle d'interface entre professionnel et groupe d'habitant. Cela permet de structurer les démarches grâce aux rencontres organisées avec les habitants, qui va permettre de travailler ensemble pour définir un projet puis animer les rassemblements.

Une des caractéristiques de la structure c'est la volonté de développer l'intergénérationalité : pour trois logements séniors construits, un logement jeune avec une location moins élevée est crée. Volonté également d'introduire des activités innovantes comme fab lab, fermes urbaines, crèches participatives, espaces de co-working qui vont favoriser le lien avec les habitants et la population.

Quel déroulement ?

La mise en place du groupe

On va d'abord identifier des personnes intéressées pour la mise en place de ce type d'habitat, puis une réunion d'information va être programmée afin de démarrer des ateliers où ils vont travailler pour faire mûrir un projet, s'interroger sur les valeurs qu'ils souhaitent véhiculer, ainsi que sur leurs attentes. Avec des cas-pratiques de mise en situation d'urgence pour comprendre la personnalité de chaque personne. L'objectif est de créer des liens entre les personnes. Au bout de cinq ateliers on voit se créer des groupes d'affinités, à partir desquels on va pouvoir démarrer un projet.

Première étape de travail consiste à identifier le foncier suivant les attentes des habitants en relation. Le process ne démarre que lorsqu'on a identifié le foncier. Les premiers ateliers se font durant 2 mois, puis 6 mois de recherche. Ensuite lorsqu'on a identifié une zone géographique on va rencontrer les communes et collectivités pour identifier un foncier pas forcément public. En parallèle on met en place une charte du vivre ensemble où est explicitée les valeurs de la structure, les

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compétences proposées entre eux, quels sont leurs implications, comment ils veulent travaillerÉL'objectif de la structure est également de faire respecter les délais, en habitat participatif, l'objectif c'est d'être dans des délais raisonnables, entre 4 ou 5 ans.

Quel montage opérationnel ?

Question sur le foncier :

La prospection n'est pas le coeur de métier de la structure, on est plus sur des opportunités. Soit ils ont déjà identifié un terrain et le propose au groupe d'habitants, ou alors ils vont permettre à ce groupe de rentrer en lien avec les professionnels.

Aujourd'hui ils ont un terrain à Vaux-en-Velin le long de la Rize, un terrain particulier où il est possible de construire un petit habitat de 5 foyers. À Vaise, ils ont un projet de réhabilitation d'un appartement de la part d'une association.

Le montage juridique

Chaque projet se défini en une structure particulière, elle peut être une association, une coopérative, une société immobilière, une société d'attribution. Elle va définir son statut juridique qui va être associé à la SCIC. Une structure très utilisée est celle des coopératives d'habitant qui sont propriétaires de l'ensemble mais reverse une part à la coopérative. Le choix du notaire est très important.

À la différence d'un opération classique ici on effectue le montage avant d'avoir le foncier, se qui fait évoluer les dynamiques d'acteur.

Pour l'aménageur, on est sur des grosses opérations, ils vont acquérir le foncier qui a une valeur il est vendu et on y fait un type de produit.

Une question qui va devoir être posée c'est la propriété, la meilleure des solutions c'est le mode locatif, mais il se trouve qu'en France on est attaché à la propriété et qu'il est difficile aujourd'hui d'aller vers ce système même si on peut dire qu'on observe une évolution des mentalités depuis quelques années.

La question de la spéculation : une des dérives où les collectivités doivent être vigilantes.

Lors de la revente pour les coopératives, l'acquéreur va revendre ses parts au futur habitant, part calculée en fonction du prix de l'immobilier ou de l'inflation, montant calculé en amont du projet.

Les garanties financières

Pour le moment la structure ne peut se porter garant, à cour terme on sera sur du cas par cas, sur le long terme l'association devra se porter garant. En ce qui concerne

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les banques qui se lancent dans l'habitat participatif, le Crédit Mutuel dans le huitième, qui ont déjà travaillé sur ce type de produit, le crédit coopératif, la NEF mais non compétitif en matière de taux d'intérêt. Il y a pour le moment beaucoup de curiosité mais il reste de l'inertie à mettre en place ces projets

La loi ALUR

On attend les décrets pour faciliter le travail et la reconnaissance, en plus de la réforme sur les community land trust, pour le printemps été 2016, qui va permettre au office de foncier solidaire pour que le propriétaire du foncier soit différent de celui propriétaire du bâti. Modèle utilisé au Quêbec et en Suisse.

Quelles relations avec les acteurs de l'aménagement ? Les promoteurs

Aujourd'hui il y a un intérêt grandissant de ces promoteurs pour mettre en place des projets de ce type, ils sont intéressés par l'animation et par la recherche de groupe d'habitant, on leur amène des acquéreurs immédiatement.

Les pouvoirs publics

On observe une reconnaissance de plus en plus forte en matière d'H.P, avec la loi Alur qui évolue pour faire reconnaitre l'H.P. Strasbourg est un parfait exemple en matière d'implication du public dans les projets.

Les bailleurs sociaux

Les bailleurs sont tous globalement intéressés, mais à Lyon la démarche du village verticale qui a été assez longue, chronophage a eu pour effet de donner une mauvaise image de ce type de projet. Avec le recul le bailleur ne souhaite pas s'engager de nouveau sur ce type de projet, mais souhaite avoir une interface, un professionnel entre le groupe et eux-même.

L'avantage des bailleurs sociaux est qu'il permet une garantie financière, en contrepartie il y a une répercussion sur des quotas de logements sociaux, il n'existe pas de règle fixe sur ces questions.

La population

Aujourd'hui on a beaucoup d'architectes qui font parties des groupes de population, vitrine de leur créativité. Une autre « cible » importante c'est celle des séniors, très demandeurs pour vieillir autrement, pour permettre une relation avec les populations plus jeunes. Troisièmement les jeunes couples avec enfants à la recherche d'espace plus important.

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MIND-MAPPING SUR LE SUJET

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PLANNING






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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera