WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Déterminants de la dénutrition chez les détenus de la prison centrale de Kamina


par Robi MBUYA DYANDA
Ecole de santé publique de Kamina - Licence 2022
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Tableau XVII. Relation entre la dénutrition et les ressources d'approvisionnement, les confessions religieuses, les cuisines personnelles et la contraction de la maladie en prison

Sources d'approvisionnement alimentaire 

Etat nutritionnel

 
 

Dénutris

Normal

Confession religieuse

n=52(%)

n=95(%)

OR [IC95%]

P

Non

26(52)

24(48)

2,958 [1,449-6,041]

0,00

Pas necessaire

 
 
 
 
 

Cuisine personnelle

 
 
 
 

Non

24(53,3)

21(46,7)

3,020 [1,456-6,264]

0,00

Oui

28(27,5)

74(72,2)

 
 

Contraction d'une maladie en prison

 
 
 
 

Oui

32(51,0)

31(49,0)

3,30 [1,633-6,680]

0,00

Non

20(24,0)

64(76 ,0)

 
 

Une association statistiquement significative était retrouvé entre la dénutrition et le non approvisionnement alimentaire par les confessions religieuses OR=2,958[1,449-6,041] p=0,002 ; cuisine personnel OR=3,020[1,456-6,264] p=0,002 ainsi que la contraction d'une maladie infectieuse en prison OR=3,020[1,633-6,680].

Analyses multi variées

Tableau XVIII. Déterminants de la dénutrition.

Déterminants de la dénutrition

B

E.S.

Wald

pa

Exp(B)

IC pour Exp(B) 95,0%

Inférieur

Supérieur

Age =46 ans

1,261

0,364

12,032

0,001

3,530

1,731

7,201

Nombre des repas pris par jour (1 vs 2 repas

1,162

0,435

7,142

0,008

15,195

6,363

89,489

Appréciation sur la nourriture en quantité (insuffisante vs suffisante)

1,391

0,395

12,370

0,000

4,018

1,851

8,723

Contraction d'une maladie en prison (Oui vs non)

1,186

0,552

,114

0,003

25,205

3,408

70,558

Constante

-,813

0,416

3,827

0,050

0,443

 
 

Légende : B : coefficient de régression ; E.S : erreur standard du coefficient de régression ; Wald : test de Wald ; pa : p-valeur ajustée ; Exp(B) : Odds Ratio ajusté, IC pour Exp(B) : Intervalle de confiance de Exp(B).

Les déterminants de la dénutrition chez les détenus dans notre milieu d'étude sont l'âge =46 ans (ORa=3,530 ; IC95%= [1,731-7,201] ; pa=0,001) ; la prise d'un seul repas par jour (ORa=15,195 ; IC95%= [6,363-89,489] ; pa=0,008) ; l'appréciation sur la nourriture en quantité (insuffisante vs suffisante) (ORa=4,018 ; IC95%= [1,851-8,723] ; pa=0,000)  ainsi que la contraction d'une maladie en prison (ORa=25,205; IC95%= [3,408-70,558] ; pa=0,003)

CHAPITRE V. DISCUSSION DES RESULTATS

Les résultats de cette étude montrent que sur un total de 147 détenus ayant constitué notre échantillon, 52 soit 35,4% étaient malnutris. Nos résultats se rapprochent à ceux de l'ONG « Terre des hommes-lausanne » (à Conakry) qui rapportait, chez les détenus, la proportion de la dénutrition de 36,2% (ONG Terre des hommes, 2011). Nos résultats sont supérieurs de ceux de la MONUSCO qui avait noté une fréquence de 23,75% des détentions à la MAC de Mbuji-Mayi. Le contexte sociopolitique et économique peut contribuer à expliquer ces différences. En effet, le contexte sociopolitique est plus difficile à Kamina.

L'étude a indiqué une prédominance des détenus dans la tranche d'âge comprise entre 19 et 45 ans (78,2%). Les résultats relatifs à l'âge pourraient traduire une délinquance accrue, ou une justice plus sévère, avec l'augmentation de l'âge. En effet, en 2017 en France, 54,8%, 41,1% et 2,4% des détenus condamnés étaient âgés respectivement de plus de 20 ans (Razafindranovono Tiaray, 2017). Il convient de noter toutefois que l'âge de la responsabilité pénale en République Démocratique du Congo est de 18 ans et plus. Ce qui justifie la faible représentativité des mineurs (7,6%) dans notre échantillon.

Les résultats de cette étude montrent également une prédominance masculine (91,2%) parmi les détenus de la prison centrale de Kamina. Nos résultats sont semblables à ceux de Bado au Burkina qui notait une prédominance des hommes dans les milieux carcéraux (92,5%). Même constat pour Brisset qui notait en France que les garçons représentaient environ 96% de personnes en détention (Brisset C., 2014). Cette prédominance masculine a été également rapportée par Walmsley R (2006), qui notait que le sexe féminin contribue seulement pour 2 à 9 % de la population carcérale mondiale. A cet effet, Combessie P (2011) affirmait que « la variable sociologique la plus discriminante en matière de criminalité est assurément le sexe ». Cliveti M, membre de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille de l'assemblée européenne disait ceci : « le fossé entre les sexes est sans doute l'un des aspects les plus remarquables de la criminalité. En général, le crime est l'apanage des hommes, si bien qu'en survolant l'histoire des femmes en prison, l'on retrouve les mêmes inégalités » (Conseil de l'Europe, 2008). Dans nos sociétés les hommes sont plus exposés aux comportements délinquants car plus prompts à se retrouver dans la rue où l'influence des autres est déterminante. En effet, comme le disait Kvaraceus W, là où sévît la délinquance on retrouve des `bandes de jeunes' qui se recrutent habituellement parmi les adolescents instables, sans attaches et sans emploi, qui se retrouvent le plus souvent dans la rue (Kvaraceus William C, 2014). Or, les filles s'intègrent moins dans cette culture parce que, dans les catégories populaires concernées, elles reçoivent la charge d'aider leurs mères dans les tâches ménagères, et sont donc moins tournées vers l'extérieur.

Au regard de cette étude, nous disons que le risque de dénutrition augmentait avec l'âge, il était très élevé chez les détenus qui avaient plus de 35 ans. Au regard de nos résultats, nous pouvons dire que le risque de dénutrition augmente avec l'âge. Plusieurs auteurs ont tenté d'expliquer ce phénomène à l'instar de Martin A et al (2011) qui stipulent que dans le vieillissement normal, des modifications de l'organisme favorisent la survenue de la dénutrition. L'avancée dans l'âge peut s'accompagner de troubles de l'appétit pouvant conduire à une consommation alimentaire insuffisante. Selon Dinkins et al (2019) on observe chez les personnes âgées des modifications du métabolisme protéique conduisant à une diminution progressive de la masse maigre au profit de la masse grasse. Ce mécanisme appelé sarcopénie conduit à la dénutrition chez la personne âge de 40 ans et plus surtout en état de détresse.

Nous avons noté une association significative entre la prise de moins de deux (2) repas par jour ; la mauvaise appréciation sur la nourriture en quantité et la dénutrition chez les détenus. Une étude menée au Bénin par Sinnaeve O, et al (2016) avait mis en évidence l'association significative entre la dénutrition et le défaut quantitatif de la ration alimentaire de 24 dernières heures. Ceci peut s'expliquer par le fait qu'une bonne alimentation doit respecter quelques conditions dont une bonne qualité, une quantité suffisante et une fréquence de prise des repas acceptable.

Dans notre série statistique, une association statistiquement significative a été trouvée entre la dénutrition et le non accès à l'eau potable. Selon Alassane Traore (2018), si la dénutrition ou la sous-nutrition ne peut être considérée comme une maladie hydrique au sens propre, on estime qu'elle est associée dans 50% des cas à des diarrhées, elles-mêmes provoquées par l'ingestion d'eau insalubre et de mauvaises pratiques d'hygiène. Cette théorique peut expliquer ma relation trouvée dans notre étude entre la dénutrition et le non accès à l'eau potable. Certaines études ont obtenu des résultats similaires. Une étude Egyptienne menée par Mohamed-Hussein AA et al (2021) a montré également une relation entre la dénutrition et le non accès à l'eau potable. Une autre étude réalisée aux États-Unis a pour sa part décelée que le risque de dénutrition était très élevé chez les détenus qui n'avaient pas accès à l'eau potable.

Signalons que dans cette étude, la durée d'incarcération supérieure à une année augmentait 2,48 fois le risque de dénutrition chez les détenus. Ces résultats rejoignent ceux d'autres auteurs qui ont constaté un lien significatif entre la durée du séjour en prison et l'accroissement du risque de la dénutrition. Dinkins et al (2019) ont montré par exemple que dans les prisons d'Haïti, les détenus bien nouris à leur arrivée en prison présentaient un risque deux fois plus élevé de développer la malnutrition après un an de détention. De même, selon Aerts et al (2020) au Gabon, les prisonniers incarcérés pendant au moins deux ans seraient plus à risque de développer la malnutrition que ceux qui avaient été détenus pendant moins d'un an.

La relation entre la dénutrition et la contraction d'une maladie infectieuse en prison OR=3,020[1,633-6,680] paraît controversée. La relation entre ces deux pathologies est sujette à des nombreuses controverses : certains auteurs avaient trouvé que la dénutrition favoriserait les maladies infectieuses (Unicef, 2010) alors que d'autres soutiennent que ces sont les maladies infectieuses qui entraineraient la dénutrition (OMS, 2008), là où les autres pensent, enfin, qu'il n'existerait aucune relation statistiquement prouvée (Verhoef H et al., 2012). Dans le cadre de nos résultats, cette relation s'expliquerait par le fait que les infections, surtout si elles s'accompagnent de fièvre, entraînent souvent une perte d'appétit et donc une diminution de la ration alimentaire. Certaines maladies infectieuses provoquent généralement des vomissements, ce qui revient au même. En effet, des nombreux auteurs stipulent que la synergie entre malnutrition et maladies infectieuses est maintenant reconnue et a été prouvée par les expérimentations sur les animaux. La présence simultanée de la malnutrition et de l'infection a des conséquences plus sérieuses pour l'hôte que si les deux fonctionnent séparément. Les infections aggravent la malnutrition et une mauvaise nutrition accentue la gravité des maladies infectieuses. Le nombre d'infections virales, bactériennes et parasitaires tend à augmenter et chaque type d'infection peut avoir des répercussions négatives sur l'état nutritionnel des enfants et des adultes. Une situation similaire existait en Amérique du Nord et en Europe entre 1900 et 1925 ; les maladies infectieuses courantes ont eu un impact sur la nutrition et ont entraîné des taux élevés de mortalité.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld