WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La participation des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne à la vie politique nationale: émergence et consolidation de la citoyenneté à distance

( Télécharger le fichier original )
par Ruth Mireille Manga Edimo
Université Yaoundé II - DEA en science politique 2008
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

A mon très cher père Eyoum-Dina Bruno, décédé le 25 novembre 2005 et ma maman sa très chère épouse Eyoum-Dina née Eyango Dicka Jeannine

A ma mère Dina Françoise Retha

A mes soeurs et frères, tous très chers : Retha, Laurence, Christian, Patricia, Nelly, Hermanne Rose, Hélène, Ilde, Anne-Laure.

____________________________

REMERCIEMENTS

D'abord, louanges au Seigneur Tout Puissant qui m'a, non seulement permis d'arriver à ce niveau de nos études, mais m'a également mise dans des conditions intellectuelles, physiques et morales nécessaires pour l'aboutissement de ce travail.

Mes sentiments de profonde gratitude s'adressent au Professeur Luc Sindjoun qui, en dépit de ses multiples sollicitations, a accepté de diriger ce mémoire. Ses conseils, ses critiques, ses suggestions et surtout ses encouragements ont été d'un grand apport pour la réalisation de ce travail de recherche.

Je tiens également à exprimer mes remerciements au doyen Abel Eyinga sans qui je ne serais pas aisément rentrée en contact avec certains responsables et acteurs politiques, et je n'aurai sûrement pas obtenu certaines données, importantes pour la mise sur pied de ce travail.

Des remerciements particuliers aux Docteurs M.E. Pommerolle et F. Eboko, pour l'accompagnement technique de ces six derniers mois. Merci particulier, également à M. Alexandre Chouala, au Docteur Marcel Nsizoa, qui m'ont encouragée au moment où je prenais encore la décision de travailler sur ce sujet.

Reconnaissance sincère à tous mes enseignants du département de science politique de l'Université de Yaoundé II/Soa. Une mention spéciale est faite à la Fondation Paul Ango Ela, (FPAE) pour la documentation mise à ma disposition et à tous ceux qui ont bien accepté de collaborer en me fournissant des informations relatives à ce travail. Je n'oublie pas ceux qui m'ont toujours honorée de leur camaraderie et de leur amitié. Ils se reconnaissent à travers Madina Kaigama, Ndom Ndjengwes, Patricia Hell, Claude Boum, Wowe Justin, et tous mes camarades de promotion du niveau V que je côtoie depuis mon arrivée à Yaoundé en Octobre 2003.

Enfin, remerciements très particuliers à Jean Lucien Ewangue et à ma ''petite famille'' de Douala, qui m'ont soutenue sur les plan moral et affectif durant toute la rédaction de ce mémoire.

RESUME/ABSTRACT

De prime abord dans un contexte d'exclusion et de disqualification politique (absence du droit de vote, inaccessibilité à la participation politique conventionnelle), les Camerounais de l'étranger parviennent tout de même à construire, lorsque cela est possible, des dynamiques d'entrées dans le champ politique de leur pays. Aussi, le processus de libéralisation politique enclenché au Cameroun en 1989/1990 surgit dans une conjoncture de crise de l'Etat et de l'affaiblissement relatif du principe de territorialité dans les relations entre Etats. Cette situation a davantage favorisé l'investissement des diasporas camerounaises sous des formes très diverses, apparaissant ainsi comme de nouveaux acteurs de la vie politique nationale. Leurs interactions sur les questions politiques internes et avec les instances politiques locales, ont acquis une visibilité inhabituelle et engendré de nouvelles « figures du politiques »1(*).

Cameroonians living abroad are from the first glance considered to be politically excluded or disqualified from participation in politics of their state of origin because, they do not have access to vote and other legal forms of political participation. Despite this situation, they have been, all these recent years, able to construct and produce not only political areas in their space of living, but also , when possible, dynamics which could help them to penetrate the Cameroon political scene. However, it seems important for us to mention that, this has well been possible since the wave of democratisation and liberalisation of the world political arena in general and of Cameroon in particular. In fact, the process when urging, has seriously affected the principle of territory very dear to states, then leaving a great impact on interstates relationships. The situation also gave, more way to political enterprises of Cameroonians abroad under diversified trends. They were then becoming conforted new actors of the Cameroon national political life. Their interactions on internal political questions and with local institutions have got a great visibility leading to new figures of politics.

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

AAGBA Association des amis du village de Gbalebouo

AC Action Citoyenne

ACBF Association culturelle des Bamboutos de France

AEC Association des Etudiants Camerounais

AECF Association des Etudiants Camerounais de France

ALNK Armée de Libération Nationale du Kamerun

ASBL Diaspora Camerounaise pour la Solidarité

ARCAM Assemblée Représentative du Cameroun

BBC British Broadcasting Corporation

BPAS Association Bafoussam Plémet Amitié Solidarité

CCBLA Cercle culturel de Loire- Atlantique

CDC Cameroon Diaspora Coalition

CE Comité Exécutif

CMC Cameroon Music Corporation

CODE Collectif des Organisations Démocratiques et patriotiques de la diaspora

Camerounaise

CRTV Cameroon Radio Television

Cnrr Coalition nationale pour la réconciliation et la résistance

DUDH Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

FEANF Fédération des Etudiants d'Afrique Noire

JDC Jeunesse Démocratique Camerounaise

KNC Kamerun National Congress

KNDP Kamerun National Democratic Party

KKP Kamerun's People Party

LANA La Nationale

LCDH Ligue Camerounaise des Droits de l'homme

MANIDEM Mouvement d'Action Nationale pour l'Indépendance et la Démocratie

MINFOM Ministère des colonies de la France d'Outre-Mer

NUKS National Union of Kamerun Students

NTIC Nouvelles technologies de l'Information et de la Communication

ONG Organisations non Gouvernementales

ONU Organisation des Nation Unies

P. Page

PCF Parti Communiste Français

RDA Rassemblement Démocratique Africain

RDPC Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais

REC Regroupement des Etudiants Camerounais

RFI Radio France Internationale

RGP Recensement Général de la Population

SDF Social Democratic Front

UNC Union Nationale Camerounaise

UNESCO United Nations Educational, Scientific and Cultural Organisation (en français, Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture)

UK United Kingdom

UNEF Union Nationale des Etudiants de France

UPC Union des Populations du Cameroun

Vol. Volume

WWW World Wide Web

TABLEAUX, CARTES ET PHOTOS

Tableau 1 : Quelques associations politiques de Camerounais en France et en Grande-Bretagne 2006..........................................................................................P. 11

Tableau 2 : Bureau France RDPC en 2003 .....................................................P.63

Tableau 3 : Sous-sections RDPC/France en 2003...........................................P. 64

Carte : La présence camerounaise en France en 1999....................................... P. 13

Photos

Photo1 : Des Camerounais de la diaspora qui vont aux '' urnes''..............................P. 78

Photo 2 : Des Camerounais de Paris à la veille des élections présidentielles du 11 octobre 2004 au Cameroun.................................................................................P. 78

INTRODUCTION GENERALE

A. CONTEXTE ET INTERET DE L'ETUDE

Evoquant en premier lieu l'expérience fragmentée et singulière du peuple juif : « persécution, destruction, exode, refuge, exil, survie, retour, reconstruction, mémoire, fidélité, résistance à la destruction, continuité dans l'adversité »2(*), le terme « diaspora » s'utilise aujourd'hui au pluriel pour désigner les migrations des hommes ayant quitté leur pays d'origine. La crise économique et sociale qui sévit au Cameroun à partir des années 1980 a entraîné une accélération des flux migratoires camerounais vers l'Europe, et de plus en plus vers l'Amérique du Nord (Etats-Unis, Canada), en raison notamment du durcissement des procédures d'entrées légales en France3(*). Mais le phénomène d'immigration des Camerounais à l'étranger est très ancien. En effet, des Camerounais se sont installés depuis plusieurs générations dans les pays du Nord, notamment, en France et en Grande-Bretagne. Selon Françoise Bahoken, on peut aujourd'hui distinguer trois groupes de migrants camerounais présents dans les pays du Nord.

Le premier groupe concerne les Camerounais dont le départ calculé visait à pallier le dysfonctionnement du système éducatif, principalement secondaire et supérieur. Celui-ci a conduit les familles aisées -généralement issues de la première vague de migration- à se séparer de leurs enfants, en les envoyant se former dans les pays occidentaux. L'objectif était très souvent de leur permettre de poursuivre leurs études dans les écoles et les universités dispensant un enseignement de qualité. A l'issue de leur formation, ces populations retournaient généralement dans leur pays d'origine. Mais, avec la dégradation des conditions de vie et en l'absence des débouchés professionnels, une partie importante des étudiants camerounais formés dans les pays du Nord a préféré y rester. Ce groupe a constitué la première phase d'une « fuite des cerveaux ». L'accélération de ce phénomène est perceptible depuis les années 1980. Elle est favorisée, d'une part, par des réseaux visant à récupérer localement le retour sur investissement de l'envoi d'un proche en Europe se former, et d'autre part, par un désengagement des autorités camerounaises pour l'avenir de ses ressortissants partis se former à l'étranger.

Le second groupe concerne des populations plus démunies, dont le départ tient plus à la survie qu'à l'acquisition d'une formation supérieure de qualité. Il est constitué davantage des adultes  ''qui partent se chercher devant'' ; ceux qui font tout pour émigrer dans un pays du Nord, parfois au risque de leur vie, même si c'est avec le sentiment de sauver celle-ci. Désespérés, les migrants du second groupe quittent un contexte spécifique de débrouille locale, avec, d'une part, l'idée que l'ailleurs leur sera favorable et, d'autre part, la volonté de ''voir Paris et mourir''. C'est ainsi qu'ils se placent dans un contexte inattendu et insoupçonné de survie à l'étranger - qui présente des réalités différentes - même s'ils conservent malgré tout, l'idée qu'ils sont mieux qu'au pays.

Le troisième groupe, dont une partie se confond avec les membres du second groupe, est plus délicat à cerner. C'est celui des feymen qui émerge dans les années 1990. Il caractérise plus ou moins le groupe de ceux qui, ne s'en sortant pas d'un point de vue légal, basculent dans le système d'activités informelles en vogue appelé feymania.

Les trajets des migrants camerounais suivaient donc d'abord les routes de l'éducation, puis, celles de la prospérité économique et de la sécurité politique. Dans cette perspective, Sophie Bouly de Lesdain met en exergue la dégradation des conditions économiques du pays et ses répercussions sur l'enseignement comme cause principale et cause de l'accélération des flux humains camerounais vers les pays du Nord4(*). Au cours de leurs déplacements, les migrants camerounais ont gardé des liens (tribaux, nationaux, etc.) avec leur pays et leurs familles. Ils n'ont pas manqué de former des ''colonies camerounaises'' et autres « associations de solidarité des ressortissants camerounais », qui sont, au sens de Zaki Laïdi : « des lieux d'expression d'une identité collective, singulière à des fins de différenciation identitaire, de pesée politique... »5(*). Nombreux sont ceux qui ont pu, peuvent ou pourraient se reconnaître dans la définition d'une diaspora, car, ils dégagent dans ces territoires, un ''nous'' construit autour de significations nationales communes. Ils utilisent aujourd'hui ce terme, pour décrire leurs expériences politiques, culturelles ou sociales en terre étrangère et pour revendiquer leurs droits. Pour Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper : « être une diaspora est même devenu un combat, une force, un slogan politique »6(*). L'affirmation d'un « soi collectif distinctif » mobilisant le lien national et communautaire d'origine constitue en quelque sorte l'essentiel de la logique de pénétration des immigrés camerounais dans les espaces sociaux français et anglais. C'est l'hypothèse de l'insertion sociale différentielle des Camerounais dans les sociétés d'accueil européennes. Il s'agit d'une insertion qui combine un processus d'identification en tant qu'auto-intégration des acteurs camerounais dans un ensemble plus vaste dans lequel ils ont tendance à se fondre, et un processus d'identisation en tant que travail de différenciation, de séparation du ''soi collectif distinctif'' des sociétés d'accueil que sont la France et la Grande -Bretagne. Les dynamiques d'insertion sociale des immigrés camerounais ne s'inscrivent nullement dans des stratégies de dilution pure et simple dans les sociétés d'accueil. Elles se dédoublent plutôt d'une action parallèle d'affirmation de la part de ceux-ci, du « droit d'être étranger », c'est-à-dire d'être différent et se prévaloir d'une représentation d'un ''soi collectif distinctif'' digne de considération et de respect7(*).

Le Recensement général de la population (RGP) en France, réalisé en mars 1999, a dénombré 32 541 personnes de nationalité ou d'origine camerounaise, soit presque 1% d'étrangers installés en France, qui représentent 3 263 186 individus, soit 8% du total de la population française. Elle est marquée par une forte présence des femmes dès 1960 représentant ainsi la troisième population en provenance d'Afrique francophone (INSEE 1990)8(*). En 2005, on comptait environ 45 000 Camerounais vivant en France de manière régulière (hormis les doubles nationaux). On estimait à 150 000 le nombre de Camerounais en situation irrégulière9(*).

Les Camerounais résidant en France essayent de s'organiser à travers les groupes culturels et sportifs tels que : le Cercle culturel de Loire- Atlantique (CCBLA) ; la Solidarité des filles Babimbi de France ; l'Association sportive et culturelle des étudiants camerounais de Rennes ; l'Amicale des Camerounais de France ; l'Association des amis du village de Gbalebouo (AAGBA) ; l'Association Bafoussam Plémet Amitié Solidarité (BPAS) ; l'Association culturelle des Bamboutos de France (ACBF) ; etc. Ces différentes associations des Camerounais de France ont généralement pour but de favoriser l'union, la fraternité, la solidarité, l'animation, la communication, la sauvegarde du patrimoine culturel et les échanges culturels entres leurs membres. Le sentiment d'appartenance au Cameroun s'exprime également dans des lieux inédits comme celui de la coiffure ou restauration. S'agissant de ce dernier cas, le restaurant le Kamukera à Paris est devenu depuis quelques années maintenant, un lieu de rencontre et de rassemblement des Camerounais de France.

L'existence de ces associations et lieux de rencontre montre que les immigrés camerounais, une fois dans les sociétés d'accueil s'affirment comme des communautés diasporiques qui, bien que résidant à l'extérieur, ont une partie d'elles-mêmes ailleurs ; un ailleurs qui renvoie au ''chez eux''. Cependant, la réunion des Camerounais présents en France et en Grande-Bretagne ne se fait pas que sur des bases ethno-culturelles, mais elle se fonde également sur des bases politiques. C'est le cas des partis politiques camerounais nés à l'intérieur et qui s'exportent à l'étranger et des mouvements et associations politiques des nationaux qui se déploient en terres d'accueil française et anglaise.

Tableau 1-Quelques associations politiques de Camerounais

en France et en Grande-Bretagne 2006

Noms et Pays ou localités

Noms des représentants/Présidents

Section RDPC/France

Armand Mbarga

Section RDPC/Grande-Bretagne

Atogho Paul Enyi

Section SDF/ UK/Londres

Brice Nitcheu, jusqu'à tout récemment, avant d'être exclu du parti

Cameroon Diaspora Coalition/Londres

Brice Nitcheu

Collectif des Organisations Démocratiques et Patriotiques de la Diaspora camerounaise/Paris

Tene Sop ; Kapet de Bana ; Nguakam Guy Simon; Titti Dingong; Seumo Hugues.

Action citoyenne

Paul Yamga Tientcheu

Diaspora solidaire

Amvouna Atemengue

Source : réalisé à partir des différentes données tirées des sites Web.

A l'ère de la mondialisation, le ``modèle de diaspora'' apparaît comme une référence politique qui franchit les frontières et permet de faire entendre certaines revendications dans l'opinion publique internationale. La vulgarisation du terme s'explique sans doute par les valeurs de solidarité qu'il « proclame et l'alternative qu'il prétend offrir à l'affirmation des identités collectives, passant outre les barrières nationales »10(*). Plus qu'une expérience sociale, les diasporas sont devenues un enjeu politique. Au-delà des migrants, des expatriés et des voyageurs de toutes sortes, sportifs, diplômés, artistes, militants internationaux par exemple, ont pu, ici ou là, être qualifiés de diasporas. En effet, par le jeu de références multiples, on peut s'identifier à telle ou telle diaspora en valorisant tel ou tel de ces critères. Si les rapprochements réels ou virtuels entre les hommes sont plus aisés et les réseaux de relations plus denses, s'ils ont pu confronter l'identification à un destin commun d'exilés, ils n'ont pas aboli pour autant, comme le disent les auteurs précités, « les fractures et les différends », d'où, le caractère pluriel de la diaspora camerounaise de France et de Grande-Bretagne. Leurs identifications se cherchent entre le local, le national et l'international, se recoupent, se croisent et se font écho, mais aussi se mesurent les unes aux autres, rivalisent et parfois même s'affrontent. Désormais, le pont qui unit les hommes est préféré à la porte qui les sépare.

Le développement des recherches sur les groupes ethniques et l'engouement pour le multiculturalisme à partir des années 1970, et 1980, ont mis à l'ordre du jour la thématique des diasporas. L'intérêt des recherches pour l'« excentrique, le différent, l'entre-deux, le marginal, le périphérique, le souterrain, le minoritaire, le non-officiel, le mêlé, le métis »11(*) et la bienveillance avec laquelle on considère désormais ces nouvelles formes de métissage ou de marginalité ont contribué à l'extension de la notion.

Catégorie des situations intermédiaires par excellence, la diaspora permettrait de renouveler la recherche : les outils de la sociologie politique traditionnelle aurait eu une grande tendance à traiter des processus sociaux, notamment politiques, dans le cadre exclusivement national ; la diaspora est censée, comme le pensent Chantal Bordes et Dominique Schnapper, permettre de comprendre tout à la fois les mouvements migratoires décuplés par la mondialisation des échanges, les identités incertaines et fluides, la mobilité incessante des hommes12(*). De plus, là où l'ethnique durcissait les traits de l'Autre, le ''diasporique'' éclaircirait les contours d'une altérité changeante et diffuse. L'attrait des diasporas a grandi avec les interrogations nées de la mondialisation. Au-delà des réalités de plus en plus nombreuses qu'elles sont chargées de désigner, la faveur dont elles font l'objet manifeste aussi l'esprit et les manifestations de notre temps.

La répartition géographique de la population camerounaise vivant en France montre une forte concentration de celle-ci en région parisienne. En 1999 par exemple, 60% des ressortissants camerounais résidaient à Paris, soit un effectif total de 19 819 personnes. C'est le département de Seine-Saint Denis qui en comptait le plus, avec 4 476 personnes (14% de l'effectif régional) dont 68% ayant conservé leur nationalité (3 057 personnes) ; suivi de Paris (13% de l'effectif régional) avec 2 849 personnes, parmi lesquelles 68% ont conservé leur nationalité. La forte majorité de la conservation de la nationalité peut être perçue comme la preuve d'un attachement à la mère-patrie Cameroun.

Carte 1- La présence camerounaise en France en 1999

La diaspora africaine basée au Royaume-Uni s'est tout aussi considérablement diversifiée au cours de ces dernières années. Elle est concentrée à Londres, une des grandes métropoles mondiales. Cette diaspora africaine au Royaume-Uni est structurée sur des bases identitaires (l'ethnie, la terre d'origine, la région). Mais, ces organisations apparemment particularistes, recèlent des connaissances très étendues et constituent des réseaux dynamiques de connaissances13(*).

Loin d'être un examen des conséquences sociales du phénomène migratoire camerounais (fuite des cerveaux, transferts de fonds, gains en expertise, investissements, etc.), notre étude ne vise pas non plus directement l'analyse des implications socio-politiques de l'émigration des Camerounais vers les pays du Nord. Elle consiste à un dépassement des frontières, du territoire national, comme ''cadres exclusifs'' d'analyse du déroulement du jeu politique national. Notre travail se consacre à l'étude des allégeances citoyennes au-delà du territoire national, d'où, notre intitulé : « La participation des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne à la vie politique nationale : émergence et consolidation de la citoyenneté à distance. »

La longue période retenue (1950 à nos jours) se justifie dans la mesure où, c'est à partir de 1950 que des Camerounais de l'Occident en général, de France et de Grande-Bretagne en particulier, majoritairement constitués d'étudiants, commencent à s'organiser par rapport à la vie politique de leur pays. Aujourd'hui, la diaspora camerounaise s'est considérablement diversifiée et son nombre a considérablement augmenté. Cette longue durée (1950-2006) nous a permis de mieux appréhender la question de la participation des Camerounais de l'étranger qui est au coeur de notre problématique.

Le cadre de cette étude est l'Occident en général, la France et la Grande-Bretagne en particulier. Nous devons ce choix à la fois aux liens historiques du Cameroun avec ces deux pays et à la configuration franco-anglophone de notre pays. Cependant, les données ayant été plus accessibles en France qu'en Grande-Bretagne, l'étude lui est largement consacrée dans l'espoir que nous aurons l'occasion d'approfondir la recherche plutard, dans un autre cadre si l'occasion nous est offerte. Par ailleurs, avant toute entreprise scientifique, il importe de préciser nos concepts opératoires.

B. CLARIFICATION CONCEPTUELLE

1. Diaspora

Le terme « diaspora » est un mot d'origine grecque, construit à partir du verbe diaspeirô, et dont l'usage est attesté au Ve siècle avant J.-C. Selon le Petit Larousse, le mot désigne : « l'ensemble des membres d'un peuple dispersés à travers le monde mais restant en relation ». D'après le même dictionnaire, le terme peut également être utilisé pour désigner « l'ensemble des communautés juives établies hors de la Palestine, surtout après l'Exil (VIe siècle), ou qui demeurent en dehors d'Israël depuis la création de cet Etat ». En effet, le mot est resté, pendant des siècles, associé, voire réservé à l'histoire des Juifs.

Les immigrés, envisagés comme des ``diasporiques'' peuvent se définir comme des gens qui, « d'une part fusionnent lieu d'origine et étapes des parcours, et d'autre part, tout en restant fidèles aux liens créés dans leurs antécédents migratoires, se placent en posture d'intégration dans les sociétés qui les accueillent »14(*).

D'usage récent dans les sciences sociales, peu de chercheurs utilisent cette notion dans leurs travaux avant les années 1970. Elle n'avait pas encore été employée pour qualifier des migrations économiques ou les mouvements de réfugiés politiques et les exodes du XXe siècle. Le terme ne désignait pas non plus les migrations massives des travailleurs originaires des pays pauvres du Sud. Le lien entre diaspora et peuple juif restait très fort pour qu'on applique le terme à d'autres groupes sociaux vivant hors de leur territoire d'origine. Dans son usage récent, le terme s'est éloigné de cette référence initiale, de l'archétype juif. A partir des années 1980, il commence à connaître des développements qui culminent en 1990. Les chercheurs ont participé au mouvement général en lui accordant un crédit croissant, d'abord en Amérique du Nord, puis en Europe15(*). Il peut dès lors désigner  la plupart des populations du monde -diaspora britannique, tchétchène, somalienne, tibétaine, antillaise, algérienne, iranienne, latino-américaine, roumaine, russe ou afghane-, des composantes d'une même population nationale -diaspora corse, bretonne, auvergnate ou alsacienne, dans le cas de la France-, ou des groupes professionnels -diaspora des scientifiques, des intellectuels, des ingénieurs ou des footballeurs français ou nigérians-. D'une manière générale, ces nouveaux emplois du terme révèlent les recompositions en cours, des identités qui se construisent en privilégiant la dimension transnationale, dans le cadre d'une globalisation des revendications particulières16(*). On passe d'une logique de « club fermé » à une logique de « fourre-tout»17(*).

Diaspora devient un terme servant à évoquer : « à la fois tout phénomène de dispersion à partir d'un lieu ; l'organisation d'une communauté ethnique ou religieuse dans un ou plusieurs pays ; une population répartie sur plus d'un territoire ; les lieux de dispersion ; tout espace d'échanges non territorial ; etc. »18(*). Selon Pascal Boniface, la « diaspora » désigne toute  « population en situation de dispersion géographique, d'exil politique ou de migration économique »19(*). Il y ajoute que : « de façon stricte, une diaspora est le résultat d'un flux migratoire aboutissant à la constitution d'une population conservant une forte conscience de son identité (linguistique, religieuse...) et des rapports au moins affectifs avec son pays d'origine ». Ce qui est intéressant dans cette définition de l'auteur, c'est la dimension économique.

Gabriel Scheffer a proposé quant à lui une définition du phénomène diasporique en énonçant trois critères qui sont : « le maintien et le développement d'une identité propre au peuple en diaspora ; une organisation interne de la diaspora distincte de celle de son Etat d'origine ou d'accueil ; des contacts significatifs avec sa patrie d'origine sous forme réelle ou mythique »20(*). Cette définition nous a semblé intéressante dans la mesure où elle nous a permis de mettre en exergue des formes nouvelles d'appartenance et d'acceptation communautaire qui en découlent, notamment en ce qui concerne les Camerounais de la diaspora, sans oublier les trames de la citoyenneté transnationale qui progressivement s'instituent comme des réalités socio-politiques.

Nous avons adopté dans ce travail la définition de Steven Vertovec. Pour cet auteur, le terme ''diaspora'' est aujourd'hui de plus en plus usité pour décrire ou qualifier toute population « déterritorialisée ou transnationale » 21(*), qui tire ses origines autre part que son lieu d'habitation et dont les échanges sociaux, économiques, et politiques dépassent les frontières des Etats et par conséquent, couvrent le globe terrestre. La notion peut en effet être perçue sous trois formes distinctes : une forme sociale, une forme spirituelle et une forme culturelle. Le plus intéressant dans cette considération est la dimension sociale d'une diaspora. En tant que forme sociale, la diaspora peut être appréhendée comme une population dispersée à travers plusieurs territoires. L'expérience juive est généralement prise pour exemple dans ce cas. Et par rapport à cette expérience juive, Martin Baumann a suggéré trois points référentiels : le processus de dispersion, une communauté vivant en terres étrangères, et les lieux ou les espaces de dispersion. Mais surtout comme l'ajoute Steven Vertovec, une population restant en relation malgré la dispersion. Vertovec considère la diaspora en tant que forme sociale, comme un groupe d'individus, « résultat d'une migration volontaire ou forcée d'une terre d'origine à au moins deux autres territoires, maintenant consciemment une identité collective, qui le plus souvent, est soutenue par une relation commune ethnique d'origine, des expériences historiques ou des repères géographiques »22(*). Elle devra favoriser l'institutionnalisation des réseaux d'échanges et de communication qui transcendent le territoire des Etats et créent de nouvelles formes d'organisation sur le territoire d'accueil, tout en gardant des liens explicites ou moins implicites avec leur territoire d'origine. Les diasporas développent donc par là des liens solidaires avec des membres d'une même appartenance ethnique ou nationale.

Dans ce travail, il faudra entendre par diaspora camerounaise l'ensemble des Camerounais dispersés à travers le monde et qui, partis de leur territoire pour des raisons économiques, sociales ou politiques gardent un lien plus ou explicites avec le pays d'origine. Pouvant être affectif, culturel, économique ou politique, ce lien est traduit en terre d'accueil par la reproduction d'espaces culturelles et politiques camerounais. Ce qui nous conduit à faire des usages soit singulier ( en référence à l'Etat camerounais en général), soit pluriel (en référence aux différents clivages ethniques et politiques entre les groupes) du terme. Il est également à noter que le caractère transnational des Camerounais de la diaspora et les nouvelles formes d'organisation de ceux-ci donnent à l'expression tout son sens.

2. Participation politique

Selon le dictionnaire Larousse, participer, c'est « s'associer, prendre part à quelque chose ; c'est également collaborer, payer sa part, contribuer, etc. ». La participation serait donc « l'Action, le fait de participer, la collaboration ». Elle peut revêtir plusieurs aspects : politique, économique et social. Sans toutefois négliger l'aspect socio-économique, dans ce travail nous mettons un accent particulier sur la participation politique.

Guy Hermet pense que : « la participation politique constitue le fondement même de la démocratie : à travers l'élargissement du suffrage universel et son extension, à des rythmes différents, d'un pays à l'autre, à tous les membres de la communauté politique, hommes comme femmes, à travers aussi son organisation juridique favorisant la liberté de réunions publiques, l'existence des partis et des associations, le droit d'affichage »23(*).

De manière plus simple, la participation politique peut être définie comme « l'ensemble des activités, individuelles ou collectives, susceptibles de donner aux gouvernés une influence sur le fonctionnement du système politique »24(*). A coté du vote25(*), présenté par les dirigeants comme « un rituel important de la vie politique, moment d'accomplissement de l'identité citoyenne en ce sens qu'il octroie aux membres d'une collectivité le droit de désigner les titulaires des rôles politiques et de choisir leurs représentants »,26(*) il faudra reconnaître d'autres modalités de participation politique telles que celles relevant d'une attention minimale à la chose publique (lecture de la presse, discussions des informations, etc.) ; celles se concrétisant dans l'adhésion à des organisations sociales ou politiques ; celles qui expriment une volonté, plus ou moins intense, de peser sur la décision publique par des grèves et des manifestations de nature à influencer les gouvernants ; et enfin les modalités de participation qui visent à contester les règles du jeu institutionnel normal, en tentant d'y substituer d'autres normes. Ces différentes formes de participation politique nous montrent qu'aux activités traditionnelles de participation, s'ajoutent aussi, dans la perspective de R. Inglehart, de « nouvelles formes d'actions, telles que : l'occupation des locaux, sit-in, boycotts etc., sans compter l'explosion des nouveaux mouvements sociaux »27(*) , qui sont toutes considérées dans ce travail. Par ailleurs, dans les régimes démocratiques où la participation politique serait érigée en « valeur fondamentale », elle est associée au concept de citoyenneté.

3. Le concept de citoyenneté

La citoyenneté a d'abord un sens juridique. Le citoyen n'est pas un individu concret, il est un sujet de droit. Il dispose à ce titre des droits civils et politiques. Il jouit des libertés individuelles : la liberté de conscience et d'expression, la liberté d'aller et de venir, de se marier, d'être présumé innocent s'il est arrêté par la police et présenté à la justice, d'avoir un avocat pour le défendre, etc. Il dispose également des droits politiques : participer à la vie politique et être candidat à toutes les fonctions publiques28(*). En revanche, selon Dominique Schnapper, « il a l'obligation de respecter les lois, de participer aux dépenses collectives en fonction de ses ressources et de défendre la société dont il est membre, si elle se trouve menacée »29(*). De manière générale, la citoyenneté sur le plan juridique, peut être définie comme la jouissance des droits civiques attachés à la nationalité. Elle renvoie à la qualité d'une « personne qui dispose de tous ses droits politiques (jouissance du droit de vote) dans l'Etat dont elle a la nationalité ».30(*) Philippe Braud, rattache cette qualité à « la capacité d'exercer les droits liés à la participation politique de type démocratique »31(*).

Cependant, la citoyenneté est aussi un principe de légitimité politique. C'est-à-dire que le citoyen n'est pas seulement un sujet de droit individuel. Il est détenteur d'une part de souveraineté politique. C'est l'ensemble des citoyens, constitués en communauté politique ou en ``communauté des citoyens'', qui par l'élection, choisit les gouvernants. C'est l'ensemble des citoyens qui est à la source du pouvoir et justifie que les décisions prises par les gouvernants soient exécutées. C'est l'ensemble des citoyens qui contrôle et sanctionne l'action des gouvernants issus de l'élection. Les gouvernés reconnaissent qu'ils doivent obéir aux ordres des gouvernants parce que ceux qui leur donnent ces ordres ont été choisis par eux et restent sous leur contrôle32(*).

La citoyenneté est encore, la source du lien social car, dans la société démocratique moderne, le lien entre les hommes n'est plus religieux ou dynastique, il est politique. Vivre ensemble, comme le note Dominique Schnapper, « ce n'est plus partager la même religion ou être ensemble, sujets du même monarque ou être soumis à la même autorité, c'est être citoyens de la même organisation politique »33(*). Néanmoins, il faudrait noter que nous avons intériorisé l'idée de citoyenneté si bien qu'elle pourrait nous paraître naturelle. Pourtant, les origines de cette idée sont anciennes. C'est bien l'héritage grec qui est à l'origine de ce concept. Pour D. Fustel de Coulanges, on reconnaissait le citoyen de la cité grecque : « à ce qu'il avait part au culte de la cité, et c'était de cette participation que lui revenaient tous ses droits civils et politiques. La participation au culte entraînait donc la possession des droits. Comme le citoyen pouvait assister au sacrifice qui précédait l'assemblée, il pouvait aussi voter »34(*). Avec les cités démocratiques de l'Antiquité grecque, (Ve -IVe siècle avant notre ère), émerge l'idée de participation à la chose publique. Mais la modernité politique, née progressivement dans l'Occident chrétien, qui se serait imposée avec éclat dans les révolutions politiques des XVIIe et XVIIIe siècles en Angleterre, aux Etats-Unis, en France, a introduit une rupture fondamentale. La citoyenneté moderne n'est pas celle de l'Antiquité.

Aujourd'hui, on entend par là, le droit de vote aux consultations politiques, l'éligibilité, l'exercice des libertés publiques qui donnent sens à la participation politique, et enfin l'accès aux fonctions d'autorité dans l'appareil de l'Etat. Dans ce travail, trois grandes catégories de représentations valorisantes associées à la citoyenneté par la culture démocratique35(*), constituent la base de notre définition opératoire : implication politique active, c'est-à-dire attention portée aux affaires publiques, exercice du droit de vote, participation volontaire à des activités d'intérêt général, amour de la patrie, respect de la loi, solidarité avec les membres de la même communauté nationale36(*).

La citoyenneté à distance

Elle peut être définie comme le lien social ou politique qui unit un Etat et ses nationaux à l'étranger. En effet, ce lien citoyen qui a d'abord pour but de sédentariser les populations, conduit les individus, bien qu'étant en dehors de leurs frontières, à mener des activités politiques, économiques ou sociales en direction de leur Etat d'origine. Et dans le cadre de la participation politique, cette notion entraîne la remise en cause des frontières nationales comme cadre exclusif du jeu politique national. Elle nous permet également d'établir le rapport direct entre les Camerounais de l'étranger et leur implication dans la vie politique nationale. Il s'agit de comprendre par là, l'intérêt manifesté par les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne pour la politique de leur pays, à travers le déploiement de différentes activités politiques par celles-ci.

C. REVUE DE LA LITTERATURE

Notre étude n'est pas la première à porter ni sur les diasporas, ni sur la transnationalisation des relations internationales. Cependant, les études qui l'ont précédée ne se sont pas forcément axées sur le même objet, et encore moins sur le même problème.

Hyung -Chan Kim (1977), dans The Korean Diaspora37(*), en faisant une étude historique et sociologique de la communauté coréenne vivant aux Etats-Unis, a mis en exergue les stratégies mises en place par une communauté antérieurement méprisée, pour gagner en respectabilité par sa maîtrise des outils du pouvoir économique. Si les liens évoqués par Hyung-Chan Kim entre les Coréens- américains et leur pays d'origine sont une approche par laquelle nous avons pu expliquer certains comportements au sein des diasporas camerounaises de France et Grande-Bretagne, il n'en demeure pas moins que son travail ne cadre pas directement avec nos préoccupations, qui est la participation politique de celles-ci à partir de leurs lieux de résidence.

Richard Joseph (1986), dans Le mouvement nationaliste au Cameroun38(*), parlant de l'UPC et la politique camerounaise entre 1948 et 1954, évoquait déjà, dans une certaine mesure, des aspects de la transnationalisation de la vie politique camerounaise. Selon l'auteur, dans sa campagne pour mettre un terme à la domination coloniale française au Cameroun, l'UPC n'a pas limité ses activités à l'intérieur du Cameroun. Dès ses débuts en 1948, elle a constamment cherché à développer d'autres bases de soutien en Afrique et dans le monde. Cet ouvrage est intéressant dans la mesure où il est tributaire d'une approche historique qui nous a permis de comprendre que l'internationalisme politique camerounais ne date pas des années 1990, et encore moins d'aujourd'hui. Cependant, ce travail essentiellement historique, ne met pas en exergue des aspects politiques telle que la citoyenneté.

Epifaino San Juan (1998), dans From exile to Diaspora : version of the Filipinos experience in the United States39(*), a étudié le poids de la diaspora philippine aux Etats-Unis, dans le développement des Philippines et la bataille pour sa reconnaissance dans le pays d'accueil. Même si l'histoire du peuple philippin est comparable à celle de notre pays (colonisation, restriction des droits et libertés, crise économique et mondialisation), il n'en demeure pas moins que le cadre de son étude reste américain et économico-centré.

Stéphane Dufoix (2003), dans Les Diasporas40(*), propose une histoire du mot ``diaspora'' et présente une étude des migrations juives, chinoises ou encore arméniennes. Dans cet ouvrage, l'auteur interroge la nature des liens entre les communautés transétatiques et un Etat, un pays, une nation ou une terre. Grâce à cet ouvrage, nous avons pu appréhender la nature, l'histoire et les implications du terme diaspora. Cependant, bien qu'il nous ait été d'un grand apport dans la compréhension du terme diaspora, c'est un ouvrage qui reste axé sur les généralités.

Arjun Appadurai dans Modernity at large : cultural dimensions of globalisation, soutient que l'interpénétration des peuples et les ponts que ces derniers établissent entre eux, constituent une variable importante par laquelle l'on peut rendre compte des relations internationales actuelles. Dans ce sens, il évoque la contribution des diasporas et immigrés dans le commerce international, les relations inter-étatiques, les décisions publiques, mais surtout la reconfiguration du concept de nation (...). Cet ouvrage nous a apporté un éclairage supplémentaire sur la place de la culture dans les relations internationales. Le concept d'ethnoscape offre une perspective dynamique sur les identités en constante redéfinition. Il nous a aussi paru fondamental dans la mesure où la globalisation est appréhendée comme un « processus qui est à l'oeuvre et qui met en cause les dimensions locales et nationales (caractérisant) jusqu'ici le fonctionnement des sociétés » 41(*). Si cet ouvrage nous a permis de mieux comprendre les dynamiques des immigrés, la place que ces individus occupent dans le déroulement de la politique de leur pays reste floue.

Dans son ouvrage Femmes camerounaises en région parisienne. Trajectoires migratoires et réseaux d'approvisionnement42(*), Sophie Bouly de Lesdain met en exergue les principales caractéristiques des trajectoires suivies par les migrants camerounais et de leur présence en France. Montrant leur organisation sur le plan socio-économique, l'accent est mis sur les activités menées par les femmes. Bien que très intéressant parce qu'il nous a renseigné sur le profil de certains individus de la diaspora camerounaise de France, l'aspect politique de leur organisation, très fondamentale pour notre étude, n'en ressort pas.

Juteau Deadjufo Tousse (2005), dans son mémoire de DESS en diplomatie43(*), nous donne déjà une idée sur le mode d'organisation de la diaspora camerounaise aux Etats-Unis, leur réussite en terre d'accueil et le rayonnement de l'Etat d'origine sur la scène internationale à travers les nationaux émigrés ; mais aussi, sur les transferts d'argent dont les Camerounais résidant aux Etats-Unis sont des auteurs, et l'impact de ceux-ci sur le développement de leur pays d'origine. Si cette approche originale nous a renseigné sur l'organisation des Camerounais à l'étranger en général et nous a montré le lien entre diaspora et financements pour le développement du pays dont les membres de la diaspora camerounaise seraient des auteurs, la préoccupation de l'auteur était beaucoup plus d'ordre diplomatique. Ce qui n'est pas forcément le cas dans notre travail. Bien que intéressant sur le plan méthodologique, l'impact de l'organisation est, dans notre travail, perçu sur la vie politique de l'Etat d'origine et non plus, sur la scène internationale, avec pour cadre d'étude, la France et la Grande-Bretagne.

Enfin, Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper (2006), dans Diasporas et Nations44(*), prennent la mesure du phénomène dans toutes ses dimensions (le concept, son développement, les individus, leurs caractéristiques, leur environnement). Si par ses atouts sur le plan théorique cet ouvrage nous a accompagné tout au long de notre étude, ce document ne porte pas directement sur le Cameroun.

D. PROBLEMATIQUE

Evoquant un territoire où réside une population sur qui s'exerce un pouvoir juridiquement organisé qui monopolise la contrainte légitime, l'Etat, en tant qu'institution des relations internationales peut être envisagé comme « une construction objective indépendante des dirigeants et des dominés et subjective intériorisée par les acteurs »45(*).

Max Weber dans sa célèbre définition de l'Etat accorde une importance particulière au « territoire géographique déterminable » à l'intérieur duquel l'Etat s'affirme comme groupement de domination46(*). Et Brubaker d'ajouter que « l'Etat moderne est nécessairement une clôture territoriale traduite sur le plan physique par des frontières »47(*). Or pouvons-nous affirmer que L'Etat-nation qui repose sur « l'isomorphisme entre peuple, territoire et souveraineté légitime » fait encore sens dans la vie politique camerounaise ? En effet, la citoyenneté politique, dans le cadre de la législation camerounaise se définit-elle encore dans le cadre national ? Comment comprendre les différentes activités politiques menées par les Camerounais résidant à l'étranger, notamment en France et en Grande-Bretagne ? En d'autres termes, comment être un Camerounais résidant en France ou en Grande-Bretagne et se sentir pleinement impliqué dans la vie politique nationale ?

Ces différentes questions permettent de fonder la problématique de la citoyenneté à distance comme forme d'expression du rattachement des diasporas camerounaises à leur Etat d'origine. C'est une problématique de réinvention ''diasporique'' de la citoyenneté et de transnationalisation de la vie politique camerounaise.

E. HYPOTHESES

L'hypothèse principale autour de laquelle s'ordonne notre recherche est la suivante : les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne en tant que vecteurs de l'expérience politique camerounaise sont également porteuses de multiples dynamiques de transformations de la citoyenneté, ou tout simplement, de recompositions de l'expérience existentielle des individus qui s'affirment comme des citoyens camerounais à distance.

De cette hypothèse principale, dérivent les micro-hypothèses suivantes : les diasporas camerounaises transnationalisent la vie politique interne en mettant à leur disposition des sites Web. Dans leurs espaces territoriaux, les diasporas camerounaises s'impliquent activement dans le jeu politique national à travers la mise sur pied des structures politiques qui sont, la plupart de temps, des relais ou des prolongements d'associations ou de partis politiques déjà présents sur le territoire national. Pour se faire entendre sur les questions politiques de leur pays, les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne font usage des moyens violents (violence symbolique48(*) ; violence physique) allant des critiques à la contestation.

F. APPROCHE THEORIQUE

Le cadre théorique qui sous-tend notre étude est celui du transnationalisme, de l'individualisme méthodologique et du constructivisme. Le modèle de représentation transnationaliste s'est d'abord imposé à nous par le sujet choisi. En étudiant les stratégies déployées par des citoyens d'un Etat en dehors de leur territoire national, ou encore dans les relations transfrontières, nous tombions directement dans le champ de la théorie transnationale. Celle-ci voit en l'Etat, un acteur parmi tant d'autres des relations internationales. Il y a dans le transnational la transcendance, le dépassement et le contournement de l'Etat ; mais aussi une centralité ou une prééminence de l'étatique qui en est le facteur régulateur et le cadre de déploiement a priori.

1. La théorie transnationaliste

La théorie transnationaliste est née dans le but de dépasser « l'égoïsme des intérêts nationaux par l'intégration de ces intérêts dans une société internationale inédite »49(*). En effet le transnationalisme regroupa quatre écoles distinctes mais unies par le même souci de se différencier du réalisme. Il s'agit du fonctionnalisme, l'école de l'interdépendance complexe, l'école de l'impérialisme, et surtout l'école du mondialisme, puisque c'est cette dernière qui est davantage explorée dans cette étude.

L'école du mondialisme constitua la plus fondamentale remise en cause du réalisme. Inis L. Claude ouvrit la voie en 1962 en publiant Power and International relations, une dénonciation véhémente de la politique de puissance50(*). C'est à sa suite que John Burton formalisa sa théorie de la « société-monde » destinée à briser le monopole étatique. L'auteur posa comme principe que l'Etat ne pouvait plus être considéré comme l'acteur unique, ou seulement essentiel de la vie internationale. Une pluralité d'acteurs aux statuts très divers, allant des organisations aux firmes multinationales, des organisations non gouvernementales aux mouvements de libération nationale entretient des liens multiples qui ne peuvent pas être envisagés à travers l'unique critère défini en terme de puissance. L'idée centrale de J. Burton réside dans la représentation de multiples liens transnationaux sous forme d' « une toile d'araignée », où chaque acteur est uni à tous les autres par un enchevêtrement d'interactions très diverses. Celle-ci permettrait de mieux saisir la multitude des transactions échappant aux rigidités des frontières physiques. De même, son recours aux instruments de la systémique donne la possibilité de diviser la « société-monde » prise dans son ensemble, en petites unités analysables. Les transactions héritées des ''issued systems'' permettent également de s'intéresser aux interactions multiples qui constituent la « toile d'araignée ». La société-monde de John Burton nous a paru intéressante dans la mesure où, l'échange devient le paramètre central de l'analyse et vise à satisfaire les ''besoins fondamentaux'' qui ne sont plus représentés par l'Etat, mais par les individus.

La publication française en 1987 de la « société des individus » de Norbert Elias a réhabilité dans une grande mesure cette « société-monde » trop marquée par le climat intellectuel des années 1960 et 1970. Repensant les rapports entre les individus et la société, la démarche de N. Elias repose sur le postulat selon lequel, « plus large est l'environnement social, plus nombreuses sont les possibilités d'individualisation offertes à l'homme. Le monde que l'auteur décrit n'est pas sans ressemblance avec la « toile d'araignée » de Burton. En prenant l'exemple du filet pour illustrer son propos, N. Elias affirme : « un filet est fait de multiples fils reliés entre eux. Toutefois ni l'ensemble de ce réseau, ni la forme qu'y prend chacun des différents fils ne s'expliquent à partir d'un seul de ces fils, ni de tous les différents fils en eux-mêmes ; ils s'expliquent uniquement par leur association ; leur relation entre eux. Cette relation crée un champ de forces dont l'ordre se communique à chacun des fils, et se communique de façon plus ou moins différente selon la position et la fonction de chaque fil dans l'ensemble du filet. La forme de chaque fil se modifie lorsque se modifient la tension et la structure de l'ensemble du réseau. Et pourtant ce filet n'est rien d'autre que la réunion de différents fils ; et en même temps chaque fil forme à l'intérieur de ce tout une unité en soi, il y occupe une place particulière et prend une forme spécifique »51(*).

Les relations de dépendance réciproque entre les individus et la société se retrouvent à l'échelle planétaire dans l'interdépendance des Etats qui, rapportée à l'échelle des individus, suscite le sentiment d'appartenance à une humanité globale. Téléphones, radios, charters, et tous les réseaux d'interdépendance entre les Etats ont abouti à ce que « les mailles du filet se sont resserrées à vue d'oeil au cours du XXème siècle »52(*).

2. L'individualisme méthodologique

L'individualisme méthodologique, en grande partie issu de la pensée wéberienne a occupé une place fondamentale dans notre étude. Privilégiant l'examen de l'action sociale menée à partir de valeurs multiples et refusant catégoriquement de déduire l'action, par exemple, de la fonction ou de tout autre déterminisme, l'individualisme méthodologique place au centre de sa compréhension du monde social les intentions des acteurs, en rejetant du même coup toute forme de pensée holistique selon laquelle le tout diffère de la somme des parties53(*). Ce paradigme s'est avéré important dans notre étude en ce sens que la transnationalisation de la vie politique camerounaise est une conséquence logique du comportement des individus de la diaspora camerounaise. De même, les structures étudiées dans ce travail ne pouvaient alors avoir une vraie signification qu'à travers une référence aux intentions et projets des acteurs.

3. Le constructivisme

Le constructivisme, approche épistémologique, de parenté phénoménologique, qui insiste sur le primat des représentations socialement constituées du réel, par opposition à une connaissance immédiate de ce réel, nous a permis de déconstruire certains textes et discours politiques et de mieux appréhender les attitudes de nos acteurs politiques des diasporas camerounaises. Le constructivisme est devenu une perspective analytique importante des relations internationales à la suite de la publication des écrits de Nicholas Onuf et Alexander Wendt au tournant des années 199054(*). Selon James March et Johan Olsen, le constructivisme désigne les théories qui s'intéressent à la structure sociale des relations internationales. Ces théories prétendent que les individus, plutôt que de chercher à maximiser les intérêts particuliers objectifs, adoptent le comportement qui leur paraît le plus correct ou le plus approprié dans une situation donnée, compte tenu de leurs liens identitaires avec telle communauté, à tel ou tel moment de leur vie. Les comportements des individus sont donc largement irrationnels, très différenciés et changeants55(*). La réalité des relations internationales est construite ou « coconstituée » selon l'expression de Katzenstein, Keohane et Krasner56(*) par l'interaction des comportements individuels et des institutions. Les structures ou institutions déterminent les identités, les intérêts et le comportement des individus ; mais ces derniers à leur tour créent, reproduisent et changent les structures institutionnelles de la société internationale57(*). Par ailleurs, le constructivisme ayant donné lieu à plusieurs interprétations, il nous semble important de préciser que notre étude est soutenue par le constructivisme social ou institutionnalisme réflexif de Marthe Finnemore58(*). Qualifié de « constructivisme conservateur » par Pettnam59(*), le constructivisme social accepte que les valeurs irrationnelles ou subjectives des individus influencent leurs comportements et les institutions de la société internationale. Il s'intéresse principalement aux aspects concrets ou tangibles de ces comportements qui peuvent être analysés à l'aide des théories rationnelles empiristes60(*).

G. TECHNIQUES DE RECHERCHE

Notre recherche est le fruit d'un ensemble d'entretiens et d'interviews de plusieurs individus (acteurs, observateurs, professionnels, sympathisants, chercheurs) et d'une exploitation intense de documents fondamentaux, généraux et spécialisés.

D'abord, le passage en revue des ouvrages sur la participation politique, le système politique camerounais et des articles de référence sur les diasporas nous a permis de nous imprégner de notre problématique et de faire l'état de la question. Ensuite une série d'entretiens accordés par quelques anciens membres de la diaspora camerounaise nous a donné un aperçu historique de la question. Il s'agit bien évidemment des échanges que nous avons eus avec d'anciens étudiants camerounais en France et membres de l'UNEK, et de la section France de l'UPC. Des données recueillies des sites Web de partis politiques et les interviews réalisées auprès de quelques militants de partis politiques (RDPC, parti au pouvoir et de la majorité présidentielle ; et SDF, principal parti d'opposition) nous ont permis de dresser une organisation de ces deux entreprises partisanes camerounaises en France et en Grande-Bretagne. Enfin, des échanges avec des membres actuels de la diaspora camerounaise de France et d'Allemagne à travers Internet nous ont renseigné sur leurs activités et leurs réseaux.

Cependant, nous n'avons pu rentrer en contact avec aucun membre de l'administration publique, anciens membres de la diaspora camerounaise, disposés à nous parler de leur intégration au sein du système politique camerounais.

Pour acheminer cette étude, nous avons bénéficié de la collaboration de nos professeurs, notamment en ce qui concerne l'encadrement scientifique. Nous avons beaucoup travaillé avec les différents sites Web des mouvements de diasporas camerounaises et quelques partis politiques camerounais représentés à l'étranger, des informations sur l'Afrique et le Cameroun en particulier. Les documents de premières sources ont en effet constitué notre principale base de données. L'éloignement de notre principal objet d'étude (les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne) a constitué un grand handicap à la présentation de l'analyse dans ce travail. Les difficultés d'obtention des données chiffrées, la participation de ''diasporiques'' francophones plus que d'anglophones ont eu un impact majeur dans la présentation de notre travail.

H. ANNONCE ET JUSTIFICATION DU PLAN

Notre hypothèse principale, nous a conduit à privilégier dans ce travail une articulation autour de trois chapitres, comportant chacun deux sections et deux paragraphes.

Le premier chapitre, tremplin et flash-back historique met en exergue le début de l'implication des Camerounais de l'étranger dans la lutte pour l'indépendance de leur pays. Bien que consciente du caractère déjà pluriel de la diaspora camerounaise entre 1948 et 1990, nous avons choisi de nous appesantir sur les rapports entre les étudiants camerounais de France et de Grande-Bretagne avec le mouvement nationaliste au Cameroun dans les années 1950,1960,et 1970. Le choix de cette population est dû au fait qu'elle constituait à cette période, la principale caractéristique des Camerounais de l'étranger.

Le second chapitre vient conforter notre hypothèse principale de la citoyenneté à distance en mettant en relief l'organisation des Camerounais de l'étranger par rapport à la vie politique. Tout en se concentrant sur les années 1990 (période de libéralisation de la vie politique au Cameroun et de l'accélération des flux transnationaux lié au développement des Nouvelles technologies de l'information et de la communication), l'attention est donnée à l'animation dans les partis politiques et quelques mouvements et associations politiques de la diaspora, non sécessionnistes. Cependant nous n'avons pas fait une étude exhaustive de tous les partis et mouvements politiques camerounais représentés à l'étranger. Nous avons observé deux partis politiques dont l'un parti de la majorité présidentielle (RDPC) et l'autre, principal parti d'opposition (SDF). De même, deux mouvements de la diaspora camerounaise ont retenu notre attention. Cependant, la deuxième section de ce chapitre démontre que l'intégration ne fait pas qu'à travers l'animation dans les partis et mouvements associatifs mais également à partir de certaines modalités étatiques.

Enfin, le troisième chapitre tout en confirmant que les Camerounais de la diaspora sont des acteurs de la vie politique nationale, essaie tout de même dégager l'impact aussi bien pratique que théorique de l'investissement des Camerounais de la diaspora dans la vie politique nationale.

CHAPITRE I

MALENTENDU HISTORIQUE ENTRE L'ETAT ET LES DIASPORAS CAMEROUNAISES DE L'OCCIDENT

La compréhension du malentendu historique entre la diaspora camerounaise et l'Etat du Cameroun passe par une étude politique de ladite société entre 1948-1990. Il s'agit, en d'autres termes, d'essayer de comprendre les rapports politiques entre la diaspora camerounaise (qui avait des liens avec le mouvement nationaliste) et le régime politique camerounais à cette période. Un retour à l'histoire politique de notre pays nous permettra d'appréhender et d'analyser les réactions, décisions et actions des acteurs politiques camerounais au sein et en dehors des frontières. Une attention particulière sera consacrée au ''Cameroun français'' d'autant plus que, selon une formule célèbre, le Cameroun anglophone avait été la « colonie d'une colonie », en l'occurrence du Nigeria. Cette situation particulière imprima sa marque au nationalisme et à l'évolution politique de la région, dont le devenir s'affirma moins contre la Grande-Bretagne, que par rapport à ses deux voisins, le Cameroun francophone et le Nigeria61(*).

Entre 1950 et 1970, la diaspora camerounaise était essentiellement estudiantine et liée, notamment en France, à l'Union Nationale des Etudiants du Kamerun (UNEK), ancienne Association des étudiants camerounais (AEC), et mouvement d'obédience progressiste affilié à l'UPC. Lorsque l'on se remémore les conditions qui ont entouré l'accession du Cameroun à l'indépendance et du rôle de l'UPC dans le mouvement nationaliste, on se rappelle que, grâce aux soutiens extérieurs dont elle a bénéficié, le régime de Yaoundé a connu une adversité farouche. Dès lors, « tout Camerounais de la diaspora était devenu suspect »62(*). Cette suspicion a en quelque sorte contribué à refroidir le climat de relations entre les membres de la diaspora camerounaise, notamment de France, combattant pour la cause de leur pays, et les dirigeants politiques, qui ont le devoir de tout contrôler et le droit au monopole sur sa population. C'est donc la tension entre les deux camps dont les positions sont tout à fait légitimes, que nous tentons d'expliquer dans ce premier chapitre de notre travail. Le chapitre est structuré en deux sections qui comportent chacune deux paragraphes. Les paragraphes peuvent cependant être selon les besoins, subdivisés en sous-titres.

Section I : Un désaccord lié au processus de décolonisation

Trois faits importants ont influencé le cours politique du Cameroun après la Seconde Guerre mondiale. Le premier concerne le changement des orientations politiques adoptées à Brazzaville en 1944 et dans la nouvelle constitution française de 1946. Le deuxième porte sur l'ensemble des changements institutionnels entraînés par la nouvelle constitution. Le troisième est l'acceptation par la France de la tutelle des Nations Unies sur le Cameroun. Ces trois faits eurent une portée essentielle dans la formation des forces politiques au Cameroun et notamment, des forces nationalistes qui se développèrent principalement dans la zone francophone. Les réformes appliquées entre 1946 et 1952 fournirent au Cameroun un cadre constitutionnel et institutionnel pour une action politique63(*). La configuration des évènements ayant abouti aux réformes de 1946, donna au Cameroun les éléments essentiels d'un théâtre politique, à savoir : « un corps électoral, une avant-scène représentative, la mise en scène et quelques indications sur le spectacle qui devait s'y dérouler »64(*). Pour ce spectacle, il fallait une intrigue : la création de tutelle par les Nations Unies.

Les promesses ambiguës des accords de tutelle ont constitué l'un des tous premiers points de discorde entre les nationalistes camerounais de la partie méridionale et le régime colonial. En ce qui concerne ce dernier, il faut noter qu'il y eut des « pro-administration coloniale » qui ne partagèrent pas forcément l'idéologie des mouvements de revendications. La tension entre administration et population s'est poursuivie après l'indépendance. Pour dire vrai, après le régime colonial, c'est le régime « néo-colonial » qui commença à être contesté.

La tutelle fut l'un des facteurs déclenchant des mouvements nationalistes, parce que, devant aboutir à une autonomie, voire l'indépendance65(*). Les accords de tutelle et l'acceptation par la France de la Charte des Nations Unies, engageaient la métropole, qu'elle le voulût ou non, à servir les objectifs de la tutelle. Ces objectifs avaient une portée politique beaucoup plus grande que ceux stipulés par le mandat66(*). En outre, une communauté mondiale élargie dans laquelle des puissances coloniales étaient déjà en minorité, surveillerait d'un oeil de plus en plus critique, les activités françaises. En 1950, tous les anciens territoires africains sous mandat qui n'avaient pas accédé à l'indépendance, à l'exception du Sud-Ouest africain, étaient devenus des territoires sous tutelle, en application des dispositions du chapitre XII de la Charte des Nations Unies. L'article 76 de la Charte énonce les objectifs politiques du système de tutelle :

« ...favoriser le progrès politique, économique, et social des populations des territoires sous tutelle ainsi que l'amélioration de leur instruction ; favoriser également leur évolution progressive vers la capacité à s'administrer eux-mêmes ou l'indépendance, compte tenu des conditions particulières à chaque territoire et à ses populations, des aspirations librement exprimées des populations intéressées et des dispositions qui pourront être prévues dans chaque accord de tutelle... »

Dans l'accord de tutelle pour le Cameroun67(*), la France s'engageait à remplir les devoirs de tutelle, conformément aux dispositions de la Charte, et de poursuivre les objectifs fondamentaux de la tutelle, définis à l'article 76. L'accord donnait à la France tous les pouvoirs législatifs, administratifs et juridictionnels sur le Cameroun « conformément aux lois françaises en tant que partie intégrante du territoire français ». Cependant, en application de l'article 5, la France s'engageait à assurer aux habitants locaux une part dans l'administration du territoire en créant des organes représentatifs démocratiques. En outre, la France promit d'organiser en temps opportun, des consultations appropriées pour permettre aux habitants d'exprimer librement leur opinion sur le régime politique et d'assurer ainsi la réalisation des objectifs stipulés à l'article 76(b) de la Charte. La Charte laissait entrevoir une issue : l'indépendance. C'est cette conquête pour l'indépendance qui anima les nationalistes camerounais durant toute la période de tutelle. Or les puissances coloniales, et principalement la puissance française, avait un chronogramme qui lui semblait plus légitime. Ceci créa donc une tension entre les autorités coloniales et les populations camerounaises soutenues par leurs compatriotes de l'étranger.

Paragraphe 1 : Les diasporas camerounaises comme terre d'élection de l'opposition au pouvoir colonial.

A cette période de l'histoire, les membres de la diaspora camerounaise militante étaient pour la plupart des étudiants. Ces étudiants portaient une attention particulière à la vie socio-politique de leur pays. C'est ainsi qu'on a pu les voir s'organiser pour apporter des soutiens aux forces nationalistes de l'intérieur. Pour la majorité, ils étaient réunis au sein de l'UNEK pour la France, et au sein du National Union of Kamerun Students (NUKS) pour le Royaume-Uni. L'Organisation sera donc au centre de notre étude, dans cette première section du chapitre premier.

A. Diaspora camerounaise et mouvement nationaliste au Cameroun

1. La constitution de la diaspora camerounaise d'Occident

Il n'est possible de faire une typologie politique des Camerounais résidant en France au cours des années 1950-1960 que sous forme d'esquisse. Les premiers étudiants boursiers envoyés par le Cameroun en ``métropole'' (1946-1947) ne furent pas beaucoup marqués par la montée de la lutte nationaliste car, l'UPC avait été créée le 10 avril 1948, après leur départ du Cameroun. Ce furent généralement des étudiants brillants parmi lesquels on compte l'un des tous premiers professeurs agrégés camerounais, Jean-Félix Loung, le premier centralien, Marcel Théodore Loung et l'un des premiers experts-comptables de notre pays, Simon Ernest Nguiamba N.68(*) Bien que secrètement patriotes et tous trois influencés par le passage du Dr Félix Moumié à Lolodorf, ces trois Camerounais n'eurent pas d'activité politique en France. Hilaire Mindja Ndjolè, autre cadre de cette même promotion, avait quant à lui une activité militante ouverte. Ingénieur géologue de formation, il a terminé ses études en Tchécoslovaquie et a encadré, dans la clandestinité, plusieurs cadres de l'UPC comme collaborateur de la direction du parti. Entre 1950-1955, l'envoi des boursiers camerounais en France pour poursuivre leurs études supérieures devint plus fréquent. Par ailleurs, des parents fortunés envoyaient aussi leurs progénitures faire des études secondaires.

A partir des années 1950, il y eut aussi un certain nombre de fonctionnaires-étudiants et de stagiaires, pour la plupart des ``clients politiques'' du Dr Aujoulat. Ce ne fut cependant pas le cas du Dr Bebey Eyidi qui n'en était pas un ; il peut être classé parmi ces fonctionnaires étudiants car, en 1950, il avait obtenu une bourse d'études au titre d'anciens combattant, engagé dans les Forces Françaises Libres. C'est dans ce cadre qu'il avait obtenu son doctorat en médecine. Après lui, les fonctionnaires-étudiants se caractérisèrent principalement par une certaine servilité vis-à-vis du colonisateur. Dès 1955-1956, le Cameroun envoya surtout des bacheliers comme boursiers en France. L'UPC obtint plus facilement l'adhésion de nombre d'entre eux, du fait que leur militantisme était déjà amorcé au Cameroun. Aux approches de l'indépendance, des éléments manipulés par le pouvoir colonial devinrent de plus en plus nombreux parmi les étudiants boursiers camerounais. Il en était de même pour les fonctionnaires-étudiants, ``clients politiques'' des colons français au Cameroun. Quelques Camerounais arrivaient en France par leurs propres moyens, à l'aventure. Ils s'efforçaient ensuite à trouver du travail et à faire des études69(*). C'est dire une fois de plus que la diaspora était majoritairement constituée d'étudiants.

2. L'Union Nationale des étudiants du Kamerun (UNEK) et le National Union of Kamerun Students (NUKS)

Au terme d'une décision de l'Assemblée Représentative du Cameroun (ARCAM) datée du 1er semestre 1947, des jeunes camerounais allaient désormais être envoyés en France comme boursiers, pour poursuivre leurs études. Ils étaient répartis en deux catégories : d'une part, les très jeunes qui sortaient du cours moyen deuxième année d'une école primaire. Ils étaient admis en classe de sixième d'un établissement secondaire en France ; d'autre part, les autres déjà majeurs qui allaient en métropole pour subir un perfectionnement de six mois maximum et devaient être intégrés dans l'administration coloniale française au Cameroun.69(*)

L'idée de se regrouper est née du besoin ressenti de réfléchir ensemble aux problèmes de leur séjour à l'étranger et de ``revivre'' certaines de leurs coutumes du pays. Cette volonté commune s'est d'abord concrétisée par une réunion tenue dans un hôtel parisien ayant pour but de « mieux se connaître et fonder une communauté fraternelle ». C'est donc au terme des échanges de vues qu'a été mise sur pied une association dénommée Association des étudiants camerounais de France, (AECF), dont le tout premier président fut le Dr Bebey Eyidi. Cette association allait jouer un rôle important dans la lutte du peuple camerounais pour l'Indépendance et la Réunification70(*).

L'AECF mena des activités diverses dont les plus importantes consistèrent à défendre les dossiers de demandes de bourses ou d'allocations d'études adressées par les étudiants et élèves camerounais au ministère des Colonies ou de la France d'Outre-Mer. L'AECF poursuivit ses activités dans ce sens sans se laisser influencer par le réveil politique qui secouait les colonies françaises sous l'influence du Rassemblement Démocratique Africain.

Au cours d'une de ses assemblées générales tenue en juillet-août 1951, au camp de vacances de Saint-Germain en Laye dans la banlieue parisienne, les étudiants camerounais en France se sont rapprochés de leurs compatriotes qui étudiaient dans les établissements du Royaume-Uni et d'Irlande du Nord et engagèrent un débat sur ``le maintien ou la suppression de la lettre F'' dans le sigle de l'Association. Ceci a permis au comité directeur de prendre contact avec les étudiants camerounais du Royaume-Uni et d'Irlande du Nord en vue de la création d'une organisation commune d'étudiants camerounais. La longue marche vers l'unité des étudiants aboutira en 1958, sous la présidence de Vroumsia Tchinaye71(*).

L'UNEK ou NUKS ont connu des fortunes diverses, suivant qu'elles étaient trop « anti » ou trop « pro » gouvernementale. Du temps du colonialisme pur jusqu'à la loi-cadre, l'AEC avait connu une certaine unité, sinon une unité certaine, malgré quelques avatars. En effet, l'AEC fut secouée par deux tendances : celle de ceux qui affirmaient que l'association étant syndicale, ne devait pas faire la politique et les autres, tout en reconnaissant la priorité syndicale de l'Association, défendaient le point de vue selon lequel les refus ou les suppressions de bourses étaient des mesures politiques. Ils soutenaient par ailleurs que les étudiants dont les écoles et les collèges étaient au Cameroun et les bourses en dehors du Cameroun ne « sauraient se placer à l'écart de la lutte du peuple camerounais pour l'indépendance et l'unification »72(*).

A partir de 1955-1956, l'on vit de plus en plus entrer sur la scène politique les Camerounais eux-mêmes. Ce fut un coup fatal pour la vie de l'AEC qui dût subir les contre-coups de la politique de Yaoundé73(*). Bien plus, lors de la confrontation électorale des deux grands leaders de l'heure sur la scène politique camerounaise, Paul Soppo Priso et André-Marie Mbida, l'on a pu voir se remuer les jeunes Camerounais de l'Occident tout en créant des scissions. En 1956, la vie de l'AEC allait connaître d'importantes luttes d'influence et des tendances qui déchiraient les hommes politiques du Cameroun. Les deux seuls grands leaders lors de l'installation des nouvelles institutions issues de la loi-cadre étaient Mbida et Soppo Priso. Ce dernier, président sortant de l'ARCAM qui était alors une assemblée purement administrative et qu'il avait dissoute, afin de procéder à l'élection d'une assemblée politique, venait de participer, en collaboration avec le haut-commissaire, aux mesures nécessaires pour la mise en place des nouvelles institutions. Quant à Mbida, il était encore couvert du prestige résultant de sa victoire sur le Dr Aujoulat aux élections législatives du 2 janvier 195674(*).

André-Marie Mbida était devenu Premier ministre, Soppo-Priso se cantonna dans l' « opposition légale » : il fallait l'un ou l'autre. Or cette alternative fut une fois de plus fatale à l'unité de l'AEC. A Paris, au cours d'une séance tumultueuse, deux camps se formèrent au sein de l'AEC : les partisans de Soppo Priso opposés aux partisans de Mbida. Lors de la campagne électorale de décembre 1956, Soppo Priso, dans son mouvement d'Union nationale, avait prêché la réconciliation avec l'UPC, alors que Mbida, devenu chef du gouvernement, avait plutôt tendance à suivre vis-à-vis de l'UPC, la même ligne politique que la puissance administrante. D'où l'éclatement de l'AEC : une faction devint le Regroupement des étudiants camerounais (REC) et l'autre fraction l'UNEK75(*).

Aussi, à partir de 1955, des contacts plus sérieux ont pu s'établir entre les Camerounais de France et ceux de Grande-Bretagne. Cette même année, une délégation de l'AEC composée de Balla Benoît, alors président de l'AEC, et d'Eyinga Mvelé Abel, membre actif de la même association, s'est rendue à Londres pour établir le premier contact avec les Camerounais de Londres. Et, c'est au cours de l'Assemblée générale des étudiants camerounais de France, de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord que fut institué le sigle UNEK ou NUKS pour symboliser la réunification du pays « comme le colonisateur allemand avait imaginé »76(*). Cette assemblée de Londres fut marquée par un évènement capital : le problème de l'unité du pays. C'est donc l'UNEK qui allait ardemment soutenir l'action nationaliste au Cameroun tout au long des années 1950, et 1960.

B. L'orientation nationaliste de l'UNEK

Nous l'avons mentionné dans notre introduction, une diaspora se reconnaît par le lien ou l'attachement gardé, malgré la distance, avec le pays d'origine. Pour ce qui est de la manifestation du « nationalisme à distance », Eva Ostergaard-Nielsen définit les pratiques politiques transnationales comme « les différentes formes (par lesquelles) les migrants et les réfugiés participent à la vie politique de leur pays d'origine, directement en passant la frontière, et indirectement, par l'intermédiaire des institutions du pays d'accueil ou des organisations internationales »77(*). L'important ici, c'est que des acteurs s'engagent à distance pour une cause nationale. De manière générale, cet engagement peut entrer soit aux côtés de l'Etat, soit contre l'Etat. Pour ce qui est de l'UNEK ou des étudiants camerounais de France et Grande-Bretagne, l'engagement politique s'est fait contre les régimes en place au Cameroun, d'abord contre le régime colonial, ensuite contre le régime « néo-colonial »78(*).

En 1998, l'historien Benedict Anderson est revenu sur la question nationale à partir du thème de l'exil qui en serait à l'origine79(*). Résumant sa pensée, Dufoix note que c'est de la « confrontation avec l'autre, le non-soi, que naîtrait le nationalisme comme mise en avant de la pureté nationale dans des contextes où toute singularité est menacée par le mélange »80(*). Or, la transnationalisation liée au développement post-industriel favorise les migrations mais aussi le maintien d'un lien qu'Anderson appelle « nationalisme à longue distance »81(*). Les migrants ou descendants de migrants organisent leur présence dans le pays d'accueil selon leur rapport à l'origine et tentent donc d'influencer la politique du pays dont ils se sentent ``parents''. Le refus individuel ou collectif de reconnaître l'autorité du régime en place, dans le pays d'origine ou sur « la terre promise et désirée », entraîne la formation d'un espace politique alternatif constitué par des groupes tous opposés au même ennemi. C'est ainsi que l'UNEK, ancienne AEC, intéressée et très attentive à la politique du moment sur le territoire camerounais, et ne supportant plus la présence des « colonisateurs » dans leur pays, ne tarda pas à se transformer en un mouvement politique82(*). Elle s'affilia d'abord à l'UPC, puis au Front-Uni, pour combattre tour à tour, le régime colonial et l'Etat « néo-colonial ». Dans cette lutte, l'on a donc pu observer une jeunesse camerounaise résidant à l'étranger, s'investir dans la vie politique de leur pays d'origine dans les années 50, 60, 70. Cependant, du fait de leur caractère parfois contestataire, leurs positions politiques n'étaient pas toujours bien accueillies par les autorités publiques.

1. Les objectifs de l'UNEK

A travers sa charte, l'UNEK s'était assignée les tâches suivantes :

« défendre les intérêts et sauvegarder en toutes circonstances les intérêts moraux et matériels présents et futurs de tous ses membres ; concourir à la formation culturelle de ses membres et notamment promouvoir et encourager toutes les réalisations se rapportant aux civilisations kamerunaises ; renforcer le sens de la grande solidarité kamerunaise ; amener ses membres à prendre conscience de leurs droits et devoirs ; étudier les problèmes relatifs au kamerun et tout autre problème connexe ; lutter pour l'indépendance et l'unité africaine ; entretenir les relations avec les autres organisations nationales ou internationales d'étudiants, de jeunesse et de travailleurs sur les bases suivantes : -lutter contre l'impérialisme, lutte pour la paix et l'amitié entre les peuples, coopération et entraide dans la mesure du possible et sous la seule réserve du respect de son indépendance- »83(*).

Il était possible de distinguer des sections territoriales et des sections académiques de l'UNEK. Pour ce qui est des sections territoriales, nous pouvons mentionner celles du Royaume-Uni et d'Irlande du Nord ; d'Irlande du Sud ; du Nigeria ; de la Chine populaire, et de l'URSS.

Au lendemain des évènements tragiques de mai 1955, l'UNEK, prit ses responsabilités en entrant dans l'action. Elle tint un meeting à Paris et en Province pour informer l'opinion française et internationale sur la situation au Cameroun. Le retentissement de ces meetings était tel que le gouvernement français, par l'intermédiaire du Gouverneur Roland Pré, réagit violemment par la suppression des bourses du président de l'AEC, Balla Benoît, et de deux responsables de la section de Montpellier, dont Simo Mbobda, étudiant en médecine. A l'avènement du premier gouvernement camerounais présidé par André Marie Mbida, selon Pierre Nkwengué, ancien président et militant de la dite organisation et auteur de l'ouvrage l'UNEK ou la contribution des africains à la l'émancipation de l'Afrique : «on pouvait légitimement s'attendre (à partir de ce moment), à une amélioration de la situation matérielle des étudiants camerounais et à une compréhension, voire une véritable collaboration avec les étudiants et patriotes camerounais pour une indépendance réelle de ce pays. Bien au contraire, les choses (sont allées) s'empirant davantage jusqu'à une intensification de la répression... ».

En effet, dès sa prise de pouvoir, le gouvernement Mbida se caractérisa vis-à-vis du peuple par une politique presque « anti-nationaliste » se manifestant par une répression féroce des upécistes et de leurs sympathisants ; et vis-à-vis des étudiants, par des mesures rétrogrades et réactionnaires, à savoir : la suppression des bourses de six étudiants de Grenoble, parmi lesquels Meloné Thomas, Sack Joseph, et Folyack E. Pendant ce temps au Cameroun, les patriotes ouvrirent une souscription nationale pour venir en aide aux étudiants victimes de cette situation de suppression de bourse. L'engagement de l'UNEK pour la cause nationaliste était tel qu'elle ne manqua pas de multiplier ses sphères d'influence.

2. Les actions de l'UNEK

- L'UNEK à l'Organisation des Nations Unies

Les premières prises de positions des étudiants camerounais remontent au moment où l'Organisation des Nations Unies (ONU) siégeait au Palais de Chaillot à Paris. La première pétition sur la Réunification et l'Indépendance du pays fut portée à mains propres à l'ONU. En 1957, l'UNEK mandata un jeune étudiant en sciences économiques de l'université de Toulouse et vice-président à l'information de la Fédération des étudiants d'Afrique Noire Francophone (FEANF), Ossende Afanda Castor pour exprimer le point de vue des étudiants camerounais devant la quatrième Commission de l'ONU sur le problème de la réunification et de l'indépendance. Il développa un discours qui fit sensation dans la presse française.

En novembre 1958, la délégation de l'UNEK mena un débat sur la levée de tutelle qui fut renvoyée à la session « spéciale » consacrée uniquement à cette question au 13 mars 1959. Cette délégation soutenait le même point de vue que celui de l'UPC dont la délégation était conduite par le vice-président Ouandié, venant de Conakry. A la session spéciale du 13 mars 1959, l'UNEK envoya une délégation conjointe avec le NUKS composée : de Tchaptchet Njinga, Victor Ngu, et Georgyi Ndinka. Les deux derniers représentaient le NUKS. En effet, il y avait deux camps : le camp des patriotes (UPC, UDEFEC, JDC) conduite par le Dr Félix Roland Moumié et Tchoumba Ngouakeu, et la délégation de l'UNEK et le NUKS conduite par Tchaptchet ; et d'autre part, le camp des colonialistes français comprenant le Premier ministre Ahmadou Ahidjo et le président de l'Assemblée législative, M. Kemga Daniel.

Ces patriotes soutenaient le point de vue selon lequel « l'ONU devait organiser le référendum sur la réunification, ensuite les élections générales avant toute levée de tutelle, tandis que le gouvernement français et ses ``acolytes'' camerounais demandaient la levée de tutelle « pure et simple ». Après deux semaines de débat, la levée de tutelle fut votée au profit de la France et ses « émules ». Le troisième congrès de l'UNEK condamna fermement ce décret84(*).

- l'UNEK face à l'assassinat des leaders nationalistes

Sept mois après la prise de pouvoir par le président Ahmadou Ahidjo, le secrétaire général de l'UPC, Ruben Um Nyobè, fut assassiné, abattu dans le maquis. Ceci conduisit à une manifestation de protestation à la rue 26 Murillo, à Paris, siège de l'ambassade du Cameroun, pendant que le Premier ministre s'y trouvait lui-même. Cette manifestation rassembla une foule nombreuse composée d'étudiants africains et français membres de l'Union Nationale des Etudiants Français (UNEF). La banderole portant les inscriptions « A bas les assassins de Ruben Um Nyobe »85(*) était portée par les membres du Comité exécutif de l'UNEK, dont son président Vroumsia Tchinaye. Cet assassinat fut également la cause d'un refroidissement des rapports entre les autorités camerounaises et la diaspora camerounaise militante de l'Occident, à cette époque.

Aussi, au moment où intervint l'empoisonnement du Dr Félix Roland Moumié, le patriote venait d'étudier avec le président de la section France de l'UPC, Tchaptchet Njinga, les mesures concrètes à prendre pour faire face à la suppression des bourses d'étudiants en faveur de l'indépendance du pays.

Le onzième congrès des étudiants camerounais de l'Occident, en décembre 1960, concrétisa cette radicalisation par l'adoption d'une charte et l'adhésion au Front-Uni anti-colonialiste et anti-impérialiste, créée par les organisations patriotiques. Egalement, ce congrès devait porter à la présidence du Comité exécutif un jeune étudiant licencié es-mathématiques Woungly Massaga, qui fut expulsé de France quelques mois plus tard, en 1961, en même temps que le président de la section France de l'UPC. Il faut dire que si l'UPC manifesta sa confiance envers l'UNEK, c'est que la plupart des ''diasporiques'' sympathisaient naturellement avec ce parti à cause de ses options sur l'avenir du pays.

- Les rapports avec l'UPC

La direction de l'UPC insista constamment sur l'importance des groupes associés, et notamment sur la collaboration des étudiants camerounais de Paris. Elle les considéra comme un moyen vital pour attirer une plus large section de la population camerounaise dans le mouvement nationaliste et, ainsi d'accroître la représentativité de l'UPC devant les Nations Unies. Militant donc au sein de l'UNEK, la diaspora camerounaise de France partenaire du mouvement nationaliste au Cameroun et essentiellement estudiantine, a de manière importante, contribué à la lutte pour l'indépendance du Cameroun.

La plupart des jeunes étudiants camerounais résidant en Occident, et notamment en France et en Grande-Bretagne, sont effectivement devenus militants de l'UPC en 1955, après les massacres de mai et l'interdiction de l'UPC le 13 juillet de cette année-là86(*). Pour la plupart, ils se sont retrouvés au lycée de Clermont-Ferrand, et avec d'autres Camerounais dans les différentes facultés de la même ville. Ils semblaient avoir fait de l'Académie de Clermont-Ferrand, un véritable lieu de repère des jeunes patriotes camerounais87(*). Il y avait là-bas, Gabriel Abolo, qui déjà au pays s'était illustré lors des premières grèves du lycée Leclerc et s'était fait remarquer par ses contacts suivis avec Gaston Donnat88(*). Dès son arrivée à Clermont-Ferrand, il annonça son positionnement, en s'affichant ouvertement comme membre du parti communiste français (PCF). Deux autres Camerounais, nouveaux venus dans la ville, étaient de la même sensibilité politique que lui : les frères Emile et Alexandre Moutymbo. C'est aussi à Clermont -Ferrand que s'installèrent Emah Ottou, Abel Eyinga, et Nicanor Njiawué. S'y installa également Jean-Martin Tchaptchet. C'est en effet, ce dernier, Soba Djallo et Woungly-Massaga qui ont formé un comité de base de l'UPC, selon les dispositions spéciales de la section France. Pour la plupart, la première vision de la politique a été fixée par l'UPC. Le passage des études à la politique s'est apparemment fait le plus naturellement du monde. Les massacres de mai 1955, puis l'interdiction de l'UPC en juillet de la même année, par un décret du gouvernement français qui avait été annoncé à la Radio, en France troublèrent « profondément » les jeunes camerounais. Ils leur fallut alors davantage suivre ce qui se passait au pays.

-Des liens avec la Fédération des étudiants d'Afrique Noire (FEANF)

Les jeunes étudiants camerounais de l'Occident militaient à la fois au sein de la FEANF et de l'UNEK. Cette dernière était une section territoriale de la FEANF. L'UNEK a adhéré au Front-Uni avec les organisations patriotiques : UPC, JDC, UDEFEC. Le rôle politique de la FEANF et des sections territoriales était d'une grande importance. Le gouvernement français avait pour principal souci de récupérer les cadres africains qui se formaient en France et la FEANF, dont l'UNEK était une section territoriale se devait de les aider à prendre conscience de cette réalité pour les empêcher d'y succomber.

Les prises de position de la FEANF exercèrent une pression énorme sur les stratégies de néocolonialisme et marquèrent tout le processus de la décolonisation, de la Loi-cadre aux indépendances. A cet égard, l'Académie de Clermont-Ferrand fut la première en France à déclencher des mouvements d'ampleur nationale dans les universités françaises.

Pour ce qui est de l'UNEK, son rôle syndical se limitait à l'encadrement des élèves et étudiants camerounais pendant les vacances, et ceci, jusqu'aux évènements de mai 1955. Avec la montée des revendications, les autorités du ``Cameroun sous tutelle'' s'étaient rendus compte que des activités « comme les colonies de vacances » risquaient de se transformer en stages de formation politique de jeunes nationalistes camerounais. D'ailleurs, les simples ``ballets africains'' qu'exécutaient les élèves commençaient à être transformés en moyens de récupération des fonds en vue d'organiser les conférences publiques pour populariser les luttes politiques des peuples africains.

Au Cameroun, d'anciens syndicalistes étudiants, anciens présidents ou dirigeants de l'AEC ou de l'UNEK elle-même, ont joué un rôle important comme patriotes : Bebey Eyidi, Vroumsia Tchinaye, Bernard Fonlon notamment, et même Sengat-Kuoh.

L'UNEK, relais des organisations nationalistes du Cameroun

Par organisations nationalistes, il faut entendre essentiellement les divers groupements patriotiques qui se battaient pour la Réunification et l'Indépendance du Cameroun, et avec lesquels l'UNEK finit par constituer, en 1960, un Front anti-impérialiste.

Tout au long des années 1950 et même au-delà, l'UNEK s'est comportée avec le plein accord de la majorité de ses membres, comme une antenne de l'UPC (parti nationaliste le plus totalement acquis à la lutte anti-impérialiste) en France. C'est sans doute la raison pour laquelle les étudiants qui n'avaient pas la fibre patriotique s'en méfiaient, quand ils ne se livraient pas à des opérations centrifuges visant à déstabiliser leur syndicat. M. Abel Eyinga89(*) se souvient avoir assisté, jeune étudiant, en 1954, dans la grande salle des sociétés Savantes à Paris (28, Rue Serpente, au Quartier latin), à un grand meeting organisé par l'AEC et dont le principal animateur était Ruben Um Nyobè. Comme la plupart des autres syndicats étudiants africains, l'UNEK n'a pas suscité l'hostilité des autorités coloniales au moment de sa création. Une loyale collaboration avec celles-ci semble même avoir caractérisé les premières années de l'existence de l'AECF. Ce n'est qu'après s'être convaincues des orientations nationalistes de la direction de l'Association que les rapports ont changé. Par la suite, l'hostilité s'est renforcée en même temps que l'UNEK se consolidait, que ses positions se précisaient et qu'au Cameroun l'irrésistible vague d'organisations patriotiques tendaient à déborder l'administration coloniale.

Paragraphe 2 : Les diasporas camerounaises comme terre d'élection du régime d'opposition

A. La dimension politique de la migration comme facteur explicatif

1. L'exilé, l'étudiant et le contestaire comme caractéristique de la présence camerounaise à l'étranger

L'étudiant d'abord considéré comme ''le symbole de l'avenir'' est aussi un contestataire. Dès l'indépendance l'université camerounaise a été secouée par des grèves accompagnées de répressions policières, doublées d'actions intentées à partir de l'étranger. Um Nyobè rédige les textes de l'UPC à Paris et à New-York et l'on peut se rappeler du rôle joué par l'UNEK. Des grandes figures de l'opposition résident alors à l'étranger90(*).

On peut dès lors comprendre que les diasporas camerounaises ont compté ou compte encore leur sein d'anciens nationalistes radicaux, d'étudiants exilés des années 1990, d'écrivains ayant connu la répression politique tel que Mongo Beti, une bonne partie des membres de la diaspora camerounaise ont partagé une idéologie formellement opposée à celle du régime post-colonial du Cameroun. L'on peut se rappeler les différents rôles joués par les associations telles que l'UNEK, l'UPC-France, et les étudiants, anciens membres du Parlement91(*). Les émigrés camerounais sont donc très souvent perçus comme des ''opposants'' par assimilation aux exilés ou nationalistes qui entre 1955 et 1990 ont alterné au Cameroun entre participation et contestation du/dans le système politique.

D'abord l'UPC qui a conquis sans succès le pouvoir politique ; ensuite les nationalistes et exilés politiques des années 1950 et 1960 ; et enfin les étudiants expulsés des campus universitaires camerounais dans les années 1990. De quoi négativement appréhender une population frustrée et qui a ``soif'' d'une vengeance politique. En effet, l'organisation des Camerounais à l'étranger était tenue par un lobbying politique visant à l'isolement du président de la république, situation que les autorités ne supporteraient pas. Par ailleurs, si la répression néo-coloniale s'est révélée aussi féroce que celle exercée par l'occupant colonial, les positions de certains membres de la diaspora camerounaise, elles aussi, se sont radicalisées.

2. La place du nationalisme

Le nationalisme a produit de part et d'autre une amertume et une tristesse qui charrient le vécu quotidien à la fois des autorités publiques locales et des exilés de la diaspora camerounaise de l'Occident. Une forme de rancune souterraine ne cessait pas de hanter ici et là-bas, les consciences collectives ou individuelles. Comme ''opposants'', les diasporas camerounaises étaient aussi assimilés aux Camerounais ressortissant de l'ex-Cameroun Occidental dont les velléités sécessionnistes étaient considérées par les autorités camerounaises comme extravagantes et non fondées92(*). La présentation de quelques dissidents de la diaspora passée et présente nous donnera une idée sur l'idéologie qu'elle pourrait défendre.

B. Quelques illustres dissidents de la diaspora camerounaise de l'Occident

Nous avons deux exemples d'illustration dont l'un remontant à l'indépendance du Cameroun et l'autre au processus de démocratisation des années 1990.

1. Mongo Beti, écrivain camerounais et ancien membre de l'UNEK

De son vrai nom Alexandre Biyidi Awala, Mongo Beti était un ancien exilé camerounais de France. De son premier texte au dernier, Mongo Beti a dénoncé l'oppression d'où qu'elle émanât. En raison de ses prises de positions contre le pouvoir en place, l'homme fut interdit de séjour dans son pays, dès février 1959. Cet éloignement forcé de son pays ne signifia point désaffection ou désintérêt. Paru au lendemain de sa disparition, l'entretien avec Ambroise Kom montre à loisir que le Cameroun devint une obsession pour cet intellectuel dissident93(*). Entre son métier d'enseignant et l'écrivain, il prit part aux manifestations qui mobilisaient les opposants camerounais à l'étranger contre le régime Ahidjo. Pour lui, il n'était « pas question que s'éteigne la flamme allumée par la clique ``Ruben Um Nyobè, Félix Roland Moumié, trucidés et tous les autres anonymes, femmes et hommes qui effacés, avaient payé de leur vie le rêve de l'indépendance''»94(*). L'arrestation en 1971, suivie de l'exécution du chef de l'Armée de Libération nationale du Kamerun (ALNK), Ouandié Ernest, fut un tournant entre Mongo Beti et le Cameroun. Il fait connaître sa réaction dans son livre Main basse sur le Cameroun95(*). A travers cet ouvrage, ''un coin de voile est levé'' sur les circonstances de l'accession du Cameroun à l'indépendance, sur le système en cours au pays. Mongo Beti est allé jusqu'au bout de sa démarche engagée. Arrivé en 1992, les mots qu'il a pour dépeindre son vécu ne sont pas du tout tendres.

2. Brice Nitcheu, ancien étudiant camerounais à l'université de Yaoundé et ancien président de la section SDF/UK

Etudiant camerounais à la fin des années 1980, Brice Nitcheu fut dans les années 1990 très actif dans les milieux d'opposition à Douala. Il est également un ancien membre du ``Parlement estudiantin'' qui a animé les mouvements de grève à l'université de Yaoundé dans les années 1990. En effet, le ``Parlement'' était un groupe d'étudiants de l'université de Yaoundé qui s'était constitué en association. Il a organisé pendant les années de braise des manifestations de boycott de cours, adressé des pétitions à la chancellerie, réclamé de meilleures conditions d'encadrement et de gestion académique, la bourse pour tous, la démission du chancelier Joël Moulen, du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique Joseph Owona. Le « Parlement » se réunissait assez souvent pour, disait-on, « rendre des jugements et prononcer des peines diverses contre des personnalités de la société civile et militaire, leurs cibles de prédilection étant les journalistes de la CRTV et de  Cameroon Tribune, accusés de tous les maux : mensonge, intoxication, désinformation .96(*)

Aujourd'hui, Brice Nitcheu vit en exil à Londres. Il est le coordonnateur d'une association dénommée « Cameroon Diaspora Coalition » et fut président de la section SDF de Londres, avant d'être exclu du parti tout récemment. La Cameroon Diaspora Coalition est un mouvement politique des Camerounais de la Diaspora qui regroupe nombreuses ONG vouées aux questions de droits de l'homme. Il est très souvent à la tête des manifestations anti-Biya à Londres97(*).

Section II : La traduction législative du malentendu entre l'Etat et la diaspora camerounaise d'Occident

Du fait des différents antécédents historiques énoncés plus haut98(*), l'Etat camerounais a vu et compris la présence de ses ressortissants à l'étranger comme le symbole d'un repli dans les pays de droits devant faciliter leur organisation dans l'éventuel objectif de « destituer le pouvoir en place, de prendre le pouvoir ». Source d'interrogation, la place du Camerounais résidant à l'étranger eut une référence plus ou moins implicite dans l'élaboration de la politique gouvernementale, notamment en ce qui concerne ses droits politiques et civiques. Leur caractère, la plupart de temps contestataire (surtout en ce qui concerne la vague de migrants des années 1960, 1970 et 1980), a conduit les autorités à plutôt les considérer comme ``un ennemi à contrôler de loin''.

Malgré les différentes demandes pour un dialogue entre les différents camps (diaspora exilée et gouvernement camerounais), les positions sont restées plus ou moins radicales, et tout Camerounais de l'étranger plus ou moins « suspect ». L'attitude des autorités camerounaises se trouvant parfois entre « suspicion et indifférence » s'est traduite par la suppression des droits d'accès à une citoyenneté politique légale et l'interdiction de la bi-nationalité.

Paragraphe 1 : L'absence de reconnaissance du droit de vote aux Camerounais de l'étranger

De même que la notion de participation politique est associée à la notion de citoyenneté, de même, le droit de vote doit être une prérogative de tout citoyen. Or, il se trouve que les Camerounais de la diaspora ne votent pas lors des élections dans leur pays, parce que la loi camerounaise ne les y autorise pas encore. Le droit de vote est un aspect important, voire fondamental de l'exercice de la citoyenneté. C'est le caractère même du lien qui existe entre citoyenneté et participation politique99(*). Comme le note Anicet Le Pors, ce sont les institutions qui conditionnent directement l'exercice de la citoyenneté (le lien entre citoyenneté et participation politique étant très étroit, et le vote, une modalité essentielle de la participation politique). En effet, les citoyens possèdent un ensemble de droits et devoirs. Ceux-ci, étroitement associés à la nationalité, doivent également conditionner l'exercice de leur citoyenneté. Dans ce sens, la démocratie locale doit être le cadre privilégié de l'exercice concret de la citoyenneté. Celle-ci doit en principe s'inscrire dans la combinaison de politiques de décentralisation, de déconcentration, et de délocalisation.

A. Le droit de vote comme exercice de la citoyenneté

Parmi les critères d'un processus démocratique, il faut distinguer d'après Robert Dahl une « participation effective de tous les citoyens », c'est-à-dire leur donner les mêmes possibilités d'exposer leurs points de vue ; il faut une « égale et effective possibilité de participer au vote »100(*). En effet, la démocratie doit permettre « une participation réelle, l'égalité de vote, une information assurant une parfaite compréhension des enjeux, le contrôle de l'ordre du jour, l'inclusion de tous les citoyens majeurs »101(*). Le vote, présenté comme acteur et facteur du changement politique et social dans les sociétés en transition politique, le vote est aussi appréhendé comme un rituel du jeu politique qui participe de l' « imposition, de la stabilisation et de l'institutionnalisation des vertus démocratiques. Il doit permettre le choix des gouvernants, et à travers lui, le « jugement d'une politique »102(*). En tant que ''forme minimale'' de la participation politique, le vote est un acte par lequel l'individu affiche sa citoyenneté et constitue en même temps pour l'observateur de la chose publique « la mesure la moins contestable d'un intérêt manifesté pour la politique »103(*). De même, forme la plus répandue de la participation politique, le vote tendrait à mobiliser la majorité des citoyens à la différence des autres activités politiques. Alors si nombre de Camerounais de la diaspora d'avant 1992 étaient considérés comme des opposants au régime, il est clair que leur jugement de la politique gouvernementale du moment ne pourrait qu'être négatif.

.

1. Le statut du citoyen et la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948)

Au-delà de l'acception locale (Loi camerounaise), la notion de citoyenneté sera analysée ici sous l'angle du Droit international.

Les droits civiques

La déclaration des droits de 1789 mêle droits de l'homme et droits du citoyen mais pointe clairement la dimension politique de la citoyenneté dans certains de ses articles. Les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à la formation de la loi, ils sont également admissibles à toutes dignités, toutes places ou tous emplois publics (art.6). S'il est appelé ou saisi en vertu de la loi, le citoyen doit obéir à l'instant, et il se rend coupable par la résistance (art.7). Il ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi (art10). Il dispose d'un droit de regard sur la contribution publique (art14).

Cependant, lorsque l'on se réfère à la Loi camerounaise, il est possible de constater qu'elle s'attache peu à définir concrètement le citoyen. Cependant ses droits et devoirs y sont mentionnés. Par exemple, les principes selon lesquels « Tout homme a le droit et le devoir de travailler ; chacun doit participer, en proportion de ses capacités, aux charges publiques ; tous les citoyens contribuent à la défense de la patrie ; l'Etat garantit à tous les citoyens de l'un ou de l'autre sexes, les droits et les libertés énumérés au préambule de la Constitution »104(*).

2. Les implications

Le droit de vote est un aspect important de la citoyenneté, sinon fondamental de son exercice. C'est le caractère du lien même qui existe entre citoyenneté et participation politique. Dans ce sens, l'absence de reconnaissance du droit de vote aux Camerounais de l'extérieur pourrait dans ce sens apparaître comme un handicap pour son accès la participation politique. Pourtant, la nationalité est porteuse non seulement des droits de l'homme, mais également des valeurs spécifiques qui, bien que situées dans une perspective universaliste, ne sont pas universellement admises. C'est en leur refusant le droit de vote-condition première de la citoyenneté105(*)- d'abord en droit, puis en fait qu'on a pu exclure les Noirs et les Indiens de la vie commune jusque dans les années 1960.

B. La spécificité camerounaise

D'après la situation vécue par les Camerounais de l'étranger en général, et d'Occident en particulier, on relèvera que tous les nationaux sont exclus du droit de vote. Le suffrage universel prévu par la Constitution camerounaise en son article 2 alinéa 3, ne s'est pas encore imposé à eux. Bref, nombre de nationaux camerounais vivant à l'étranger sont exclus de la participation politique conventionnelle. Non seulement les mineurs, mais aussi, les autres catégories sont frappés d'une interdiction civique.

Ces Camerounais interdits d'un droit d'accès à une citoyenneté politique légale, parce qu'exilés, et résidant à l'étranger participent pourtant activement à la vie économique106(*). Le fait que ces ressortissants camerounais installés à l'étranger ne votent pas leur ôterait tout ou presque une partie de leur citoyenneté. Car, ils ne pourraient dans ce sens, légalement prendre part à la vie politique du pays. Cette partie de la citoyenneté qui serait enlevée non pas en raison du coût de l'organisation des procédures électorales, ce que l'on peut comprendre, mais clairement, à des fins de blocage des capacités d'intervention d'une population sur laquelle le Gouvernement n'aurait pas de prise directe du fait de son éloignement géographique, se double d'une absence de la bi-nationalité.

Paragraphe 2 : L'absence de bi-nationalité

La nationalité est un domaine qui relève de la compétence personnelle de l'Etat, étant donné que chaque Etat fixe les critères d'attribution ou de perte de celle-ci. A titre d'exemple, la nationalité camerounaise, est régie par la loi n°68/LF du 11 janvier 1968. Pour ce qui est de la non-reconnaissance de la bi-nationalité, il s'agit de l'exclusivité de la nationalité camerounaise basée sur le Code de la nationalité camerounaise. Celui-ci ne tolère aucune autre nationalité, ni même celle de ses ressortissants bi-nationaux. Sauf dans certains cas spécifiques comme celui des joueurs de football107(*).

Contexte de création de la Loi portant sur le Code de la nationalité camerounaise

Le régime Ahidjo faisait face à la rébellion upéciste soutenue, dans le contexte de la guerre froide par le bloc de l'Est : Union Soviétique, Chine, les pays de l'Europe de l'Est. Se rendre à l'étranger constituait un chemin de croix pour le Camerounais qui devait obtenir un visa de sortie. Du coup, les Camerounais de l'étranger, accusés de sympathie communiste, étaient soupçonnés de collaboration avec l'ennemi. Cette défiance à l'égard de l'immigré camerounais était telle que le fameux article 31 stipulait en son alinéa 3 que « celui qui, remplissant un emploi dans un service public dans un organisme international ou étranger, le conserve, nonobstant l'injonction de le résigner faite par le gouvernement camerounais », perd la nationalité camerounaise. Posture probablement défensive, mais intenable dans un environnement de plus en plus mondialisé et qui se veut ''démocratique''.

En effet, l'acuité des mouvements nationalistes au Cameroun et l'intensité des soutiens qu'ils ont reçus de l'extérieur ont donné à la diaspora camerounaise en général, et celle de l'Occident en particulier, une connotation péjorative. Le nationalisme a rendu suspect la communauté de Camerounais de la diaspora résidant en France et Grande-Bretagne, dont les fidélités restaient transnationales. C'est pourtant au nom du principe nationaliste que furent menées les luttes d'indépendance des pays d'Afrique en général, et du Cameroun en particulier contre les puissances européennes impériales tout au long du XX ème siècle. Etant donné le droit des peuples à disposer d'eux -mêmes, les « divers » peuples avaient le droit de ne pas être soumis à des dirigeants étrangers, de choisir leurs dirigeants dans leur sein. Ce droit à l'autodétermination de chaque collectivité historique était reconnu comme légitime, moralement et politiquement. Pourtant, cela a été un principe « proprement révolutionnaire et une source de conflits », comme l'avait bien vu Renan108(*).

B. Le Code de la nationalité camerounaise proprement dit

Il s'agit de la Loi n°68-LF-3 du 11 Juin 1968 portant code de la nationalité camerounaise. Si dans ses Articles 6, 7, 8, 9,11, ce document précise dans quelles conditions l'on acquiert la nationalité camerounaise, il met également en exergue les conditions dans lesquelles on peut la perdre ou on la perd automatiquement109(*).

1. Nationalité et citoyenneté

Ne sont plus considérés comme étant nationaux, tous les Camerounais majeurs ayant acquis et conservant volontairement une nationalité étrangère ; tous les Camerounais exerçant la faculté de répudier la qualité de Camerounais, conformément au « Code » ; ceux qui, remplissant un emploi dans un service public d'un organisme international ou étranger, le conservent nonobstant l'injonction de le résigner faite par le gouvernement camerounais. De toute évidence, les pouvoirs publics camerounais n'admettent pas le principe de double nationalité. Ceci pose un problème aux membres de la diaspora, qui, du fait de la durée de leur séjour à l'étranger, peuvent avoir acquis une nationalité étrangère. Loin d'être, à partir de ce moment, considérés comme des Camerounais, leur droit à une certaine ingérence dans la vie politique de leur pays d'origine, est remis ou peut être remis en cause par les autorités camerounaises.

Une barrière certes, mais également une situation très difficile vécue par les Camerounais de la diaspora de nationalité étrangère qui veulent pourtant rester Camerounais ! Ancien champion de tennis né en France le 18 mai 1960, d'un père camerounais et d'une mère française, Yannick Noah est un Camerounais. C'est exemple est pris en compte car si l'on part des principes jus solis et jus sanguinis d'offre de la nationalité, l'on se rend compte que Yannick Noah a le droit de se sentir Camerounais et d'être considéré comme tel. Le code la nationalité camerounaise ne reconnaissant pas le principe de la double nationalité, et Yannick Noah ayant un passeport français, la nationalité camerounaise lui est d'office refusée. Le Code de la nationalité camerounaise est très clair à cet égard. En son article 31, alinéa 1, il est indiqué que le « Camerounais majeur qui acquiert ou conserve volontairement une nationalité étrangère », perd la nationalité camerounaise, comme mentionné plus haut. Autant qu'ils le sachent, les Camerounais qui se prévalent d'une double nationalité, voire d'une multiplicité de nationalités sont dans une situation légale plus qu'inconfortable. Ils s'en rendent généralement compte quand il s'agit pour eux de venir au Cameroun. Ils doivent au préalable se munir d'un visa avant de pénétrer le territoire national, leur terre patrie. En réalité, la place du Camerounais qui est à l'étranger constitue toujours une référence plus ou moins implicite dans l'élaboration de la politique gouvernementale camerounaise. L'action des sociétés nationales a eu pour effet d'unifier les populations à l'intérieur des territoires, aux frontières fixes, y compris celles qui voulaient penser leur destin en termes de diasporas ou qui étaient contraintes de le faire. Dans ce sens, la construction du lien national supposerait l'extériorité du non-résidant, de l'externe ou en clair, du Camerounais de l'étranger.

2. Les raisons d'une distanciation à travers les politiques publiques

Les Camerounais de l'extérieur appartiendraient à un ou d'autres pays. Demeurant à l'extérieur, ils seraient perçus comme les ''autres''. En tant que ''diasporiques'', ils font partie d'un peuple dispersé parmi tant d'autres et de surcroît, sont un « fragment de nation dans d'autres nations »110(*). De ce fait les Camerounais de la diaspora s'attireraient une méfiance redoublée. La méfiance quant à elle, résulterait du fait qu'ils semblent appartenir à aucun lieu et sont sans attaches, errant entre les terres de passages. Dans cette perspective, ils évoqueraient des ''êtres sans attaches'' à qui l'Etat ne pourrait accorder sa confiance puisqu'ils seraient à tout moment prêts à repartir, c'est-à-dire, quitter la patrie. Tout membre de la diaspora camerounaise à l'époque monolithique représenterait un élément dont la position interne et l'appartenance impliqueraient tout à la fois l'extériorité et l'opposition. Comme le démontre Dominique Schnapper à propos des juifs, les Camerounais de la diaspora s'inscriraient, notamment à l'époque monolithique, parmi les autres figures de l'errance et du voyage. S'ils ont choisi l'exil, la nation elle, incarne la stabilité. La nation c'est la fin des voyages. Elle implique une sorte de retour sur soi, de fixation en un lieu tangible chargé d'histoire et définitif.

Malgré les différents blocages institutionnels et administratifs, liés au malentendu historique ayant instauré un climat de méfiance entre la diaspora camerounaise et les gouvernements successifs au Cameroun évoqués précédemment, il est possible de constater que : les Camerounais de l'Extérieur en général, et ceux de l'Occident en particulier, d'une manière ou d'une autre, continuent de s'investir dans le jeu politique national. La mondialisation des échanges, associée au développement technologique et à la libéralisation de l'espace politique à la fin des années 1980, début 1990, sont un facteur important qui nous permet aujourd'hui de dépasser le territoire national comme ''cadre exclusif de déroulement de la vie politique d'un pays''. Ainsi donc, les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne pourraient-elles s'inscrire dans un réseau d'échanges politiques mondialisé comme le démontrent les différents partis et associations politiques dont nous parlerons plus bas ?

CHAPITRE II 

CONSOLIDATION DE LA CITOYENNETE A DISTANCE

Comment s'effectue l'entrée des Camerounais de France et de Grande-Bretagne dans le champ politique national à partir des années 1990 ? Ainsi posée, cette question est au coeur des transformations de la citoyenneté qui ne se définit plus seulement sur le plan national, mais également, sur le plan externe. La question rentre également au centre des mutations et des reconfigurations du paysage socio-politique camerounais observées depuis plus de six décennies. C'est surtout l'épineux problème de l'intégration des Camerounais de l'extérieur dans le jeu politique national.

Le rétrécissement de la planète lié aux innovations technologiques joue en faveur des mouvements et des entreprises politiques des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne. La territorialité ne constitue plus un handicap. En effet, en tant que « processus qui est à l'oeuvre et qui met en cause les dimensions locales et nationales (caractérisant) jusqu'ici le fonctionnement des sociétés politiques »111(*), la mondialisation contribue plus ou moins à l'émancipation politique des mouvements diasporiques, notamment de ces Camerounais résidant en France et en Grande-Bretagne qui manifestent davantage leur envie de s'intégrer dans le jeu politique de leur pays d'origine.

Dans ce deuxième chapitre de notre travail, nous mettons en exergue l'organisation des Camerounais de l'étranger principalement de France et de Grande-Bretagne par rapport à la vie politique nationale de leur Etat d'origine. La période retenue est celle des années 1990 à 2006. Celles-ci se caractérisant principalement par la démocratisation du système politique, a favorisé l'éclosion des partis politiques et la pluralisation de l'espace politique camerounais de même qu'une multiplication de lieux d'expression de la diaspora camerounaise. On distingue aussi bien les mouvements que les partis politiques, de gauche comme droite. En ce qui concerne les partis politiques et les mouvements de la gauche politique, nous pouvons à titre d'illustration citer : le National Council of Southern Cameroon (NCSC), mouvement sécessionniste anglophone ; le Collectif des Organisations démocratiques de la diaspora camerounaise (CODE) ; l'Union des populations du Cameroun (UPC) ; l'Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès (UNDP) ; le Social Democratic Front (SDF) et bien d'autres. Comme parti et associations politiques de la diaspora camerounaise positionnés à droite nous aurons principalement la diaspora solidaire (DS), l'Association de la diaspora camerounaise pour la solidarité (ASBL), le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), etc. En effet, des Camerounais de la diaspora de France et de Grande-Bretagne sont des membres actifs, militants et sympathisants de ces différents groupements politiques. Cependant nous allons privilégier dans le cadre de ce travail, l'étude de deux partis politiques et de deux mouvements politiques des diasporas camerounaises. Ceci nous permet de comprendre que, de même que les idéologies politiques camerounaises au sein du territoire national sont controversées, de même, elles le sont à l'extérieur. C'est la configuration politique plurielle des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne.

S'organisant en deux sections, le chapitre privilégie dans sa première section les modalités d'intégration des diasporas camerounaises dans la vie politique nationale par les partis politiques et les mouvements et associations politiques, tandis que la seconde section s'attelle à démontrer l'intégration politique des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne par la production de l'identité de l'Etat d'origine et leur reconnaissance par l'Etat.

Section I : L'organisation des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne par rapport à la vie politique nationale

L'organisation des Camerounais de la diaspora par rapport à la vie politique nationale se fait à travers l'intégration des partis politiques (majorité présidentielle et opposition) et la création de mouvements et associations politiques camerounais en terre d'accueil.

Si la mondialisation peut être perçue comme un « processus de brouillage des frontières et de subversion des repères traditionnels »112(*), c'est bel et bien parce que les pratiques des individus tendent de plus en plus à le confirmer. La pesanteur du territoire ne façonne plus le groupe comme tel. La localité n'est plus synonyme d'une fixation dans l'espace. Ainsi, malgré leur inaccessibilité à une «  citoyenneté politique » institutionnelle et à la bi-nationalité, les Camerounais de l'extérieur, notamment ceux de l'Occident réussissent à contourner les barrières législatives, a priori un handicap, pour faire entendre et vulgariser leurs différents points de vue politiques. Cette aptitude met donc en cause les théories socio-politiques privilégiant les formes classiques de « localisme » ancrées sur le territoire dans le cadre de l'Etat-Nation et met en relief le déploiement d'une citoyenneté à distance de la part de ces Camerounais de la diaspora qui se sentent par là, impliqués dans la vie politique de leur pays.

Une distinction est à faire entre les mouvements politiques des diasporas camerounaises nés à l'extérieur et ceux qui ne sont que des ramifications ou des prolongements des structures politiques déjà existantes au sein du territoire national. Cette première section du chapitre se consacre aux activités menés par les entreprises partisanes camerounaises à l'étranger telles que le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, parti de la majorité présidentiel) et le Social Democratic Front (SDF, principal parti de l'opposition), notamment en France et en Grande-Bretagne.

Paragraphe 1 : L'intégration des Camerounais de l'étranger dans la vie politique nationale par les partis politiques: Les cas du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) et du Social Democratic Front (SDF)

Les partis sont des organisations, relativement stables, qui mobilisent des soutiens en vue de participer directement à l'exercice du pouvoir politique au niveau central ou local. Cette définition renvoie à un certain nombre de critères analysés par diverses écoles scientifiques telles que soulevées par Philippe Braud.

« Organisations, les partis relèvent de la notion d'entreprise politique (Max Weber, Schumpeter). Les individus mettent en commun des ressources pour agir sur la scène politique. Ces entreprises se donnent un minimum d'institutionnalisation, qui conduit à attirer l'attention sur leurs structures juridiques. Les partis ont une ambition de mobilisation. Ils cherchent en effet à s'imposer comme représentatifs d'une population ou porteurs d'un projet de société, d'une grande cause. Il leur faut donc travailler à faire accepter ou partager la justesse de leurs vues, convaincre de la valeur de leurs objectifs ou de leurs programmes. Ce faisant, ils entrent en compétition les uns avec les autres, tout au moins, dans les régimes pluralistes. S'ils se heurtent à la concurrence d'autres organisations, (syndicats, associations), il arrive aussi parfois qu'ils les utilisent ou les suscitent comme relais. Les partis se spécifient enfin en ce que leur action est orientée vers l'accès aux institutions politiques. Ils veulent y exercer le pouvoir, seuls ou coalisés avec d'autres »113(*).

A. Le RDPC en France et Grande-Bretagne

Le RDPC, parti politique de la majorité présidentielle au Cameroun, a succédé à l'Union Nationale Camerounaise (UNC). Cette dernière résulta de la fusion en 1966, de l'Union camerounaise, parti du président Ahidjo (dominant massivement la vie de l'Etat fédéré francophone) et des trois partis politiques anglophones (KNDP, KNC, KPP). La fondation de l'UNC avait pour principal objectif d'affermir le contrôle du régime sur ses populations, notamment sur les intellectuels et les exilés politiques. Encore que, l'ambition principale des partis uniques est le monopole de la vie politique. La « perception de soi comme parti d'avant-garde entraîne un certain nombre d'implications : le langage du parti qui se réfère souvent à une doctrine ferme, sinon rigide, qui légitime la prétention à se considérer comme le porte-parole exclusif d'une dynamique sociale ; l'imposition d'une image de puissance et de cohésion autour d'un projet de société »114(*). Ainsi donc la création de l'UNC en France dans les années 1960, 1970 a eu comme conséquence « la faillite de l'opposition radicale et l'augmentation des soutiens d'Ahidjo »115(*). D'après J-F. Bayart, les pouvoirs publics camerounais « ne s'étaient jamais sentis à l'aise dans un gouvernement sévèrement jugé par la gauche internationale »116(*).

Né à Bamenda le 24 mars 1985, en remplacement de l'Union Nationale Camerounaise, le RDPC remplace les structures existantes de l'UNC en France et en Grande-Bretagne en excroissance de ses structures à l'extérieur des frontières nationales. Le Parti est ainsi apparu comme un réseau d'individus (dirigeants, militants actifs, simples adhérents, exilés politiques) liés entre eux par des rapports d'interactions et disposant dans ces relations des ressources psychologiques, matérielles nécessaires, etc.

1. L'organisation du Parti en France et en Grande-Bretagne

L'organisation du RDPC en France et en Grande-Bretagne suit pratiquement la même logique que celle de sa structuration interne. Cependant, on distingue en France et en Grande-Bretagne une grande section locale, des sous-sections et des cellules. Pour la France, on a la section RDPC/France et la Grande-Bretagne, la section RDPC/Royaume-Uni. La section est dirigée par un bureau élu en conférence de Section. Ce bureau comprend : « un président, un vice-président, un secrétaire, un secrétaire adjoint, un trésorier, un trésorier adjoint, un délégué à l'éducation et à la propagande, un délégué au développement, un délégué aux organisations spécialisées, un délégué aux activités des organes inférieures, deux délégués aux conflits, deux commissaires aux comptes, un conseiller »117(*). La même structuration est respectée par les sous-sections dont les membres du bureau sont élus en conférence de sous-section118(*). La cellule est dirigée quant à elle, par un bureau élu en Assemblée générale des membres de la cellule. Ce bureau comprend : « un président, un secrétaire, deux délégués à l'éducation, à la propagande et au développement ; un trésorier ; un commissaire à l'organisation des femmes ; un commissaire à la jeunesse ; et un délégué aux conflits »119(*). Le bureau RDPC/Royaume-Uni a à sa tête Atogho Paul Enyi, tandis que le bureau RDPC /France est présidé par Armand Mbarga.

Tableau n° 2 -Bureau France RDPC tel que tiré du site Web du parti en 2003

Président

Armand Mbarga

Vice-président

Amvouna Atemengue

Secrétaire

Denise Siakam

Secrétaire adjoint

J-M. Etoundi

Trésorière

Sandrine Ngo Tsoungui

Trésorière adjointe

Chantal E. Mbassi

Délégué à l'éducation et à la propagande

Antoine Ayissi Owona

Délégué au développement

Hilemon Roger Essono Essomba

Délégué aux activités des organes inférieures

Aristide Ndo

Délégués aux conflits

Marie-C. Biaka et Paul Emery

Commissaires aux comptes

Dorothy Akompey et Roger Kingue

Conseiller

Willy Atanga Mbengoua

Source : www.rdpc9.fr

La section France du parti compte quatorze sous-sections, également subdivisées en cellules. Il s'agit de :

Tableau n° 3 -Sous-sections RDPC/France en 2003

Sous-sections

Présidents de sous-sections

Val de Marne

Eloundou Alphonse

Hauts de Seine

Expédit Bala

Paris Nord

Ngoumou Dieudonné

Toulouse

Serge Kanga Nitcheu

Seine et Marne

G. Essoa

Val d'Oise

Mballa Abessolo

Paris Sud

Ernest Ekaney

Lyon

Angeline Akoumba

Nantes

Joseph Nguene

Seine-st Denis

Etoundi J-Marc

Bordeaux

Martin Longo

Nord Pas de Calais

Onane Essam

Marseille

Mme Guikoume

Strasbourg

Enguele

Source : www.rdpc9.fr

La section RDPC/Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord ne possède quant à elle que deux sous-sections. Il s'agit des sous-sections Grande-Bretagne Sud et Grande-Bretagne Nord. La sous-section Grande-Bretagne Sud a à sa tête Jacob Tché.

Les sections extérieures du RDPC se donnent pour objectif majeur le rassemblement et la mobilisation des Camerounais de l'étranger. Et ceci, comme l'a déclaré un membre extérieur du parti ne peut qu'être le résultat de diverses stratégies mises en place.

3. Modes d'action du parti à l'étranger

a. Les activités menées par le parti en France et en Grande-Bretagne

L'international est un « champ depuis toujours sollicité et investi par les partis politiques (...) qui influencent largement la politique étrangère des Etats »120(*). Aussi, le cadre international est davantage sollicité aujourd'hui dans une conjoncture mondiale de la « fin des territoires » 121(*) et de l'émergence d'une civilité politique internationale122(*). En effet, dans un contexte où l'environnement international à travers les réseaux et les différentes configurations qui le structurent, fournit aux groupements politiques des moyens et des ressources leur permettant de s'organiser parallèlement en vue de multiplier leurs pôles de représentation et de mobilisation, on mesure l'enjeu de l'exportation du RDPC en France et en Grande-Bretagne en tant que dynamique et stratégie de mobilisation par celui-ci, des ressources matérielles et symboliques extérieures nécessaires à son positionnement politique.

Les activités peuvent se réduire aux manifestations, célébrations de journées nationales, réception ou échanges avec les autorités en visites sur les questions nationales, organisation de colloques et de conférences-débats sur l'actualité du pays, etc. Il s'agit en d'autres termes de l'intégration des Camerounais de la diaspora dans le jeu politique national à travers l'usage des canaux officiels.

Pour ce qui est des manifestations, elles vont dans le sens de la communion des patriotes de l'étranger, membres du RDPC avec leurs compatriotes de l'intérieur généralement lors de : la célébration des journées nationales, anniversaires du parti, anniversaire de l'ascension du président de la République Paul Biya au pouvoir. A cela, nous pouvons ajouter les mobilisations lors : de la descente sur le terrain d'une autorité (visite du chef de l'Etat) ; d'une réjouissance collective à l'occasion de certaines victoires sportives. A titre d'illustration, nous pouvons mentionner le rassemblement des Camerounais de Londres le 14 février 2004 à l'occasion de la célébration de la fête nationale de la jeunesse célébrée au plan national le 11février. C'est une manifestation qui a, selon un membre du parti en Grande-Bretagne, « permis de mettre en valeur la diversité culturelle du Cameroun »123(*). Toujours en ce qui concerne les Camerounais de Londres, ils se sont également mobilisés le 24 mars de la même année en vue de la célébration du dix-neuvième anniversaire du parti. Ce jour-là, plusieurs manifestations à caractères politique, social, culturel et sportif étaient prévues.

Les mobilisations sont également très nombreuses en périodes électorales. A titre d'illustration, nous pouvons citer la « Grande Journée RDPC » organisée en Allemagne en août 2004 qui a connu la participation des Camerounais venus de France, et de Grande-Bretagne. C'est une journée qui fut consacrée à des meetings et marches de soutien au Président Paul Biya. Ces marches et meetings ont vibré au rythme de chants patriotiques en présence de Mme Fogning : l'on pouvait lire sur des pancartes : ''we are decided to follow Paul Biya'' ; ''Paul Biya for 2004'' ; '' Paul Biya our candidate'' ; ''Paul Biya pour un nouveau septennat''. Sous la conduite de certains Camerounais résidents d'Allemagne (Thomas Fomekong, J-P. Ntédé Etaba, et Nkwetta Natty), les marcheurs sont entrés dans les locaux de l'ambassade en chantant : Vive Paul Biya, notre président ! Pour les organisateurs, cette journée avait un seul objectif : « manifester un soutien à la candidature de Paul Biya à la présidentielle à venir ». Françoise Fogning présente au meeting, a offert une centaine de pagnes du RDPC aux militants et une aide financière à toutes les sections extérieures du RDPC qui étaient présentes. ''Votre engagement et votre détermination derrière Paul Biya sont visibles. Vous aurez toujours mon soutien'', a déclaré la dame124(*).

Très souvent les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne, actives au sein du RDPC, apprécient l'action gouvernementale à travers l'élaboration de motions de soutien adressées à certaines autorités publiques. A titre de d'illustration, nous pouvons citer la communication adressée par Amvouna Atemengué à www.ici.cemac.com, le 08 mai de l'année 2005, sur la gestion de la crise dans les universités d'Etat au Cameroun par le ministre Fame Ndongo et le Premier ministre Inoni Ephraïm.

Nous nous réjouissons de la gestion peu répressive de la crise actuelle par le ministre de l'enseignement supérieur et le premier ministre. En affirmant que «la jeunesse est l'avenir d'une nation», le président Biya a souvent voulu dire que c'est au travers des investissements qu'une société consacre collectivement et individuellement à la jeunesse qu'on lit l'idée qu'elle se fait de son avenir. Or l'esprit des réformes engagées il y a plus d'une décennie n'est pas acceptable pour tous ceux qui partagent une certaine idée de la République125(*).

Sur le plan intellectuel, les conférences de sous-sections ne manquent pas d'organiser des journées tables-rondes où participent le plus souvent les militants de la région (France ou Royaume-Uni) et des sympathisants au mouvement en Europe en général, en France et en Grande-Bretagne en particulier. C'est ainsi que la conférence de sous-section de Toulouse organisée le 20 avril 2004 s'est consacrée au P.I.B. : sa définition, son but et son rôle.

Au niveau des sections du parti en France et en Grande-Bretagne, le collectif des présidents de sous-sections se réunit périodiquement pour établir un rapport d'activités. C'est dans ce sens que l'on a pu voir la section RDPC/France se réunir le 22 mai 2004, celle de Grande-Bretagne en novembre 2003. La réunion de la section France portait sur l'organisation, la gestion de la section, et l'action du président de section. Il y eut également à l'ordre du jour les présidentielles 2004 au Cameroun : l'étude des stratégies de la section, et du droit de vote de la diaspora, tandis que celle de Grande-Bretagne consista plus à un grand rassemblement. De même, les conférences de sous-section, qui se déroulent à un niveau plus local, en dehors des informations instructives, structurent généralement leurs débats autour de l'actualité camerounaise.

b. Les moyens de diffusion des opérations du parti

Pour assurer la diffusion de leurs informations et de leurs activités, les sections et sous-sections RDPC de France font usage des sites Web ou Internet. Ces sites fonctionnent de telle manière que chaque cellule ou sous-section possède à titre individuel un espace Web. A titre d'exemple www.rdpc9.fr représente la sous-section de Toulouse, et www.rdpc.92.fr.st, celle des Hauts de Seine. On peut lire sur les sites plusieurs espaces publicitaires à caractère national et régional (Synergies africaines) ; le logo du parti ; un portrait du chef de l'Etat ; des espaces de forum de discussions ; etc. Les informations diffusées ne sont pas pour autant qu'à caractère local. A travers le même site, des internautes peuvent prendre connaissance de l'actualité venant du pays (politique générale, vie sociale, économie, vie partisane, etc.) et du globe terrestre.

La création de sites Web RDPC en France (03 mai 2003) a permis à ce parti politique camerounais non seulement de s'arrimer à un monde de plus en plus global, mais aussi d'entretenir son réseau de contacts à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Elle a également eu pour conséquence d'accroître les soutiens du président Paul Biya.

La section RDPC/ Grande-Bretagne dispose d'un journal local publiée par la section elle-même. Le nom du journal est ''In Touch''. Il a pour but mieux faire connaître le parti. Orientant ses actions d'abord vers le social (aide aux compatriotes en difficultés), la section RDPC de Grande-Bretagne tient à la diffusion d'une bonne image par le parti.

B. Le SDF en terre étrangère

1. L'implantation du parti en France et en Grande-Bretagne

a. Le SDF en France

L'implantation s'est faite en deux étapes : d'abord la mise sur pied d'une première coordination, puis d'une seconde.

La première coordination

Elle naît en 1991, dans le but de répondre à la sympathie des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne, en accord avec cette fibre politique camerounaise. Ces dernières manifestèrent leur sympathie à travers l'envoi des messages de soutien, de dons, d'adhésions multiples. Conscient de l'enjeu que pouvait représenter cette population sur le plan stratégique, le leader du parti n'a pas hésité à prendre la décision de les associer. Et pour ce faire, le secrétaire national adjoint du parti à l'époque, Me Augustin Mbami en mission en France a initié en mai 1991, une rencontre avec les diasporas camerounaises ``amies du SDF''. Ceci a permis la mise sur pied de la coordination du SDF pour la France sous la direction de Léonard Njaboum. C'est cette coordination qui s'est chargée de l'implantation du parti en France.

Encadré 1

Rencontre de Cachan en avril 1993

C'est celle qui pose l'acte fondateur de la première cellule SDF de l'Ile de France. Elle débouche sur la création de la cellule Paris Sud, cellule pilote de l'implantation du parti en France. Par ces différents actes, le SDF pensait « réaffirmer la primauté du citoyen, le respect des droits de l'homme, droits civiques et politiques ». En effet, la communauté camerounaise en Europe devait se mobiliser « pour porter à la connaissance de l'opinion internationale la situation sociale, économique et politique » du Cameroun.

La seconde coordination

Après la création de la première coordination, la seconde coordination oeuvra surtout à la mise en place des structures du parti en France. Elle participa à la propagande, à la sensibilisation et devait inciter les Camerounais de France à adhérer au parti.

Pour la réalisation de cette tâche, l'implication du président national du Parti n'a pas été du reste. Invité dans la cellule Paris Sud lors de son séjour en France du 3 au 8 octobre 1993, le Chairman Ni John Fru Ndi, déclara que : « Vous êtes la première structure légale du parti en France et de ce fait, vous devez être le fer de lance du parti. Vous devez prendre votre bâton de pèlerin et sillonner la France afin d'y créer de nouvelles structures du parti... »126(*). C'est ainsi que le 8 octobre 1993, après un meeting à l'Orée du Bois (banlieue parisienne), le président national du SDF proposa à tous les militants qui l'ont rencontré, d'initier une réunion au cours de laquelle ils mettront en place une coordination chargée d'implanter le parti en France. Ainsi après plusieurs réunions, et celle du 3 décembre de la même année en particulier, les dirigeants et les sympathisants du SDF en terre française ont réussi à organiser les différentes commissions de la coordination, dont les réunions devraient désormais être convoquées par Paul Yamga-Tientcheu127(*). Il y eut un planning pour la sensibilisation -un groupe appelé « animation politique » chargé de la mobilisation (21 janvier à Lille ; le 29 janvier à Rouen ; le 12 février, retour à Lille ; et le 12 mars à Marseille) -un autre groupe « affaires juridiques », chargé de déposer auprès de la préfecture de Paris un dossier pour la légalisation du SDF en France128(*). Le 22 mars 1994, deux militants du SDF se sont donc présentés à la préfecture de police de Paris munis de leurs cartes de séjour, de l'acte constitutif du SDF en tant qu'association, et de deux exemplaires originaux des statuts du SDF129(*).

C'est le 13 avril 1994 que le parti fut légalisé en France, publié au journal officiel sous le n°1640 intitulé : « Front Social Démocratique (SDF) », avec son objet : « établissement au Cameroun d'une société juste, libre démocratique, fondée sur des principes démocratiques et le respect des droits de l'homme ; et le siège social : 118- 30, Avenue Jean-Jaurès, 75019. Cette légalisation du parti a créé une nouvelle dynamique au sein de la communauté camerounaise de France et d'Europe. Les instances dirigeantes du SDF /France se sentirent dès lors confrontées à un nouveau défi. 

b. Le SDF en Grande-Bretagne

L'installation du Social Democratic Front (SDF) en Grande-Bretagne suit plus ou moins la même trajectoire que celle de France. Des structures de base ou cellules, qui peuvent devenir sous réserve de l'accord du comité national exécutif, une province. Cependant, si en France seuls deux niveaux sont effectifs (la cellule et la province), en Grande-Bretagne, on peut distinguer l'existence de cellules, et sous-sections. De temps en temps, les membres du parti se réunissent sous forme de congrès ou conférence provinciale pour d'autres. C'est une assemblée qui réunit les membres des comités exécutifs des différentes cellules130(*).

2. Modes d'action du SDF

a. Les premières stratégies du parti en France

Dans l'accomplissement de ses activités à l'extérieur, le parti a adopté trois grandes orientations :- la communication - les explications politiques- la mobilisation. Selon les membres du SDF, « un parti qui ''aspire à prendre le pouvoir'' doit faire connaître son programme et ses grandes orientations non seulement au niveau de sa base, mais aussi à l'extérieur ». C'est dans cette optique que la communication s'est avérée importante. Elle suppose, pour le SDF deux politiques : nationale et internationale.

Les officiels du SDF dans les années 1990, ont eu pour principale priorité ''pallier à la carence d'information''. Il s'agissait de ''soigner l'image du parti''. Pour eux, les hommes politiques de la place de Paris de l'heure « avaient une si mauvaise image du SDF, qu'il s'imposait au parti d'aller vers ces derniers pour leur apporter d'autres sons de cloche que ceux entendus au travers des rapports officiels »131(*). C'est ainsi que communication et explications politiques devinrent un challenge, impliquant la mise en place d'un réseau de contacts au niveau des médias et des hommes politiques. Celles-ci permettraient à tout responsable du parti de passage en Europe de faire un point de presse, mais aussi de discuter de vive voix avec les leaders d'opinion.

La communication dans le SDF extérieur démarra dans les années 1990 avec les médias :- une interview le 26juillet 1994 sur les antennes de la Radio France Internationale (RFI) ; à Africa n°1 les 15 et 16 octobre 1994 ; à la British Broadcasting Corporation (BBC) le 25 novembre 1994 -une interview accordée à « Jeune Afrique » n°1755 du 25 août-la parution de « SDF - France Echos » en Septembre 1994, bimensuel du parti entièrement conçu et réalisé par les militants du parti en France.

Pour ce qui est des explications politiques, les officiels du comité exécutif provincial en France ont commencé par initier des rencontres dans les différents ministères à savoir : au ministère des affaires étrangères, à la coopération ou encore au service Afrique de l'Elysée. Le choix politique fait de rencontres et d'échanges permettrait au SDF, d' « occuper quelques années plutard, une place considérable au Quai-d'Orsay, à la rue Monsieur ou à l'Elysée, ou encore dans les salles de rédaction des médias français »132(*). La mobilisation s'est également avérée prioritaire parce que, selon les membres SDF, « le parti ne pouvait tenir qu'en fonction du nombre et la qualité de ses militants ». Et, malgré l'enthousiasme manifesté ici et là par certains Camerounais de la diaspora pour le SDF, les adhésions spontanées étaient plutôt rares. Le comité exécutif du SDF en France multiplia ainsi les rencontres, les meetings, dans les principales villes de France afin d'inciter les sympathisants à adhérer au parti. Il faut dire cependant que les stratégies déployées par le parti dans les années 1990 ont plus ou moins évolué, les contextes ayant aussi changé. La priorité est donnée aujourd'hui à la mobilisation et à la sensibilisation. Ce ne sont plus les leaders de partis qui contrôlent et pilotent de l'intérieur. Les sympathisants du parti politique membres des diasporas camerounaises se mobilisent et prennent de plus en plus des initiatives. Les conditions pour leur émancipation ayant été créées, ils se prennent de plus en plus en charge eux-mêmes.

b. La nouvelle donne

La nouvelle donne a trait à l'exploitation des Nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) par les artisans du SDF, membres de la diaspora camerounaise, pour la diffusion de leurs différentes activités politiques. Cette diffusion est facilitée d'une part, avec la création d'un site web par le parti et d'autre part avec la publication par d'autres sites spécialistes de l'actualité politique camerounaise comme www.cameroun21.com.

i. Le site web du parti d'opposition SDF

Dénommé www.sdfparty.org, il existe depuis 2000. Sa page d'accueil est structurée ainsi qu'il suit : un espace pour :« le logo du parti - Forum de discussion- Email- Contact ». A gauche de la page, ce sont les différentes rubriques : - Siège et adresse téléphonique- Actualité du parti - textes de base- Adhésion - etc.-

A travers l'outil Internet, outil de communication et d'échange d'informations à l'échelle planétaire, les membres de la diaspora camerounaise sympathisants ou militants du SDF en France ou en Grande- Bretagne, une fois qu'ils disposent d'ordinateurs et sont connectés (on line) réussissent à débattre, échanger à distance des textes, des documents, des propos ou points de vue sur l'actualité et la vie du parti au pays. On ne saurait minimiser l'importance extraordinaire de cette innovation scientifique et technologique qui n'est pas sans impact sur la citoyenneté des Camerounais de Londres et de Paris qui veulent soutenir, critiquer ou accompagner le Social Democratic Front dans sa quête du pouvoir politique.

ii. L'intervention des militants externes dans la vie du parti

S'inscrivant dans la mouvance politique du pays, des militants du SDF résidant en Grande-Bretagne se sont mobilisés pour appeler leur président national au « réalisme ». La mobilisation avait trait à un point de vue de la diaspora camerounaise (membre et sympathisante du parti) sur la « coalition ». Leur souhait était que l'opposition aille unie aux élections présidentielles du 11 octobre 2004. Aussi, dépités par la situation créée au sein de la Coalition nationale pour la réconciliation et la reconstruction (Cnrr) du fait du retrait de leur chairman, une centaine de Camerounais, pour l'essentiel militants du SDF de Grande-Bretagne (SDF/UK) se sont rassemblés dans le centre de Londres vendredi 17 septembre 2004 pour exprimer leur mécontentement face à la sortie de leur leader John Fru Ndi de la Coalition. Réunis dans les jardins de Holland Park, non loin de l'ambassade du Cameroun à l'appel de Brice Nitcheu, coordonnateur de la Cameroon Diaspora Coalition et surtout, président du SDF à Londres (avant d'être exclu du parti tout récemment), des militants munis de pancartes, l'air très grave ont exprimé leur désaccord avec la direction de leur parti.

« Nous sommes très fâchés. L'opposition vient d'étaler ses limites, et notre Chairman porte une lourde responsabilité dans cette crise » a dit au journal Le Messager, le président du SDF de Londres133(*). Et d'ajouter « Nous voulons tout faire pour l'emmener à trouver un accord avec le candidat désigné par la Coalition. A notre avis, une candidature de John Fru Ndi à côté de celle de Ndam Njoya sera une faute politique très lourde qui ne servira ni les intérêts du SDF ni ceux de l'opposition, ni l'alternance souhaitée par les membres du parti. Seul le SDF ne gagnera jamais une élection au Cameroun...».

Au cours de cette mini-manifestation, les militants brandissaient des pancartes où l'on lisait « Fru Ndi et Ndam Njoya n'ont aucun autre choix que de s'unir » ou encore « Fru Ndi and Ndam Njoya must unite ». Accusant leur leader d'amateurisme, Emmanuel Kemta, secrétaire à l'organisation du SDF/UK a déclaré : « La sortie de la coalition de notre président national est une lâcheté. Il aurait dû rester dans la salle, essayer de faire changer les choses si tant qu'il y ait eu des manipulations, appeler le peuple dont il se revendique à témoin. Il est tard pour le SDF de reculer ». Et Brice Nitcheu a conclu « je ne battrai jamais campagne pour une candidature vouée à l'échec (...). Je fais appel au sens de l'honneur du Chairman. Un grand leader doit savoir être humble. »134(*). En effet, quand les Camerounais de la diaspora, militants et sympathisants du SDF ne font pas recours au site du parti, ils passent généralement par d'autres sites web proches de l'opposition tels que : le site du journal La Nouvelle Expression :''www.lanouvelleexpression.net'' ou des sites diffusant de manière générale l'actualité politique du pays comme ''www.cameroon-info.net''.

Paragraphe 2 : Mouvements et associations politiques des diasporas camerounaises de l'Occident : cas du CODE et de l'ASBL.

A. Le Collectif des Organisations Démocratiques de la Diaspora camerounaise (CODE)

Le Collectif des organisations démocratiques et patriotiques des Camerounais de la diaspora (CODE), créé en fin d'année 2003, est un regroupement de plusieurs associations, mouvements et partis politiques camerounais qui : « travaillent à mobiliser les compatriotes de l'étranger, autour de leurs préoccupations politiques et sociales d'une part, et d'autre part pour qu'ils apportent leurs contributions à la lutte du peuple pour la démocratie, l'Etat de droit et le changement politique, économique et social dans le pays »135(*). Ces mouvements proches de l'opposition, militent pour la liberté, la démocratie, et l'indépendance du Cameroun et de l'Afrique. La coordination des activités se fait en réseaux, entre certains partis politiques camerounais de l'opposition représentés à l'étranger, certaines associations telle que Action citoyenne (AC), et certains mouvements comme la Ligue camerounaise des droits de l'homme (LCDH). Ceci participe de la mise en place d'un bureau qui sert d'interface entre ce qui se passe au Cameroun et à l'étranger. Dans l'ensemble, le CODE et ses démembrements comptent à ce jour une douzaine d'organisations actives principalement sur trois continents : l'Europe, l'Amérique du Nord, et l'Afrique. Cependant les organisations qui soutiennent tout gouvernement anti-démocratique et sa politique anti-nationale et anti-populaire ; - celles qui sont tribales, régionales et religieuses ; - ou encore xénophobes, racistes et sexistes ; - les mouvements séparatistes, révisionnistes et à but lucratif, ne font pas partie du CODE.

1. Idéologie du mouvement

Le CODE est doté d'une charte qui guide sa philosophie, son action et son fonctionnement. Les objectifs inscrits dans cette charte s'articulent autour de plusieurs points qui sont : - « contribuer à l'instauration de la démocratie au Cameroun et à l'alternance politique du pouvoir ; - regrouper des associations progressistes pour mener des actions concertées en direction du Cameroun ; - sensibiliser et mobiliser l'opinion internationale sur la question camerounaise ; -servir de relais pour les actions engagées par les forces progressistes de l'intérieur du Cameroun ; - informer l'opinion internationale sur l'évolution de la situation démocratique, sociale et des droits de l'homme au Cameroun ; - appuyer toute initiative prise de l'intérieur en faveur de la démocratie, des droits de l'homme et de l' « alternance politique ». Le secrétaire exécutif de l'Organisation, M. Tené Sop, pense que les Camerounais de la diaspora, membres du CODE, disposent d' « un réservoir de moyens inestimables constitué par les patriotes et progressistes camerounais de l'étranger ». L'autre moyen, toujours d'après lui, est la « solidarité internationaliste entre les progressistes (camerounais) du monde entier »136(*).

2. Les stratégies politiques du CODE

Depuis sa création à la fin de l'année 2003 à Bruxelles, le CODE a surtout travaillé à la proximité de l'élection présidentielle, qui a eu lieu en octobre 2004 au Cameroun. Les membres de l'organisation se sont plus attachés à mobiliser les Camerounais de la diaspora autour de la question du « droit de vote des Camerounais de l'étranger  ; de la revendication pour une commission électorale indépendante » ainsi que, « la sensibilisation et la mobilisation de l'opinion internationale et de certaines institutions sur les violations des droits humains et la négation des principes de l'Etat de droit ». Aujourd'hui, le CODE apparaît comme un pôle actif de contestation des Camerounais de la diaspora. D'ailleurs, les piliers de l'organisation, quand ils n'ont pas fait partie des mouvements d'opposition au Cameroun avant de s'exiler, ont de manière générale, suivi un trajet particulier. Le parcours de M. Tené Sop décrit plus bas en encadré pourrait nous en dire plus.

Encadré 2 : Biographie de Tené Sop

Natif de Nkongsamba dans le Moungo (Littoral), Guillaume Tené Sop a marqué une certaine période de la lutte estudiantine pour les libertés au Cameroun dans les années 1990.

Membre fondateur et ancien coordonnateur du ``Parlement des étudiants camerounais de l'Université de Yaoundé'', il a également représenté les étudiants camerounais au sein de la coordination nationale des partis de l'opposition et des associations, et de l'Union pour le Changement.

Le contexte socio-politique étant devenu ``insupportable'', il a décidé, comme bien d'autres compatriotes se sentant menacés par le régime, de s'exiler, d'abord au Bénin, puis au Burkina-Faso, ensuite au Niger, et enfin en Côte d'Ivoire. C'est un nomadisme au cours duquel Tené Sop dit avoir tissé des relations de travail avec plusieurs leaders d'étudiants des pays de l'Afrique de l'Ouest, dont un certain Guillaume Soro, devenu ministre en Côte d'Ivoire.

Il ne cache pas son hostilité pour les régimes ``dictatoriaux et corrompus''. Il se présente comme un combattant de la libération des peuples opprimés. Et comme pour répondre à ceux qui ne prennent pas au sérieux ses propos, Tené Sop rappelle ouvertement qu'il a participé au soulèvement des 24 et 25 octobre 2000 en Côte d'Ivoire contre le Général Robert Gueï.

Depuis bientôt trois ans, il est installé en Europe. Aujourd'hui âgé de 35ans, Tené Sop est le secrétaire général du Conseil national pour la résistance, mouvement Um- Nyobiste (Cnr-Um) basé à Hambourg. Ce qui fonde et conforte son militantisme au sein du CODE dont la charte a été adoptée le 24 juillet 2004 à Bruxelles, mais qui a son siège à Paris.

Pour s'assurer de la diffusion de ses activités sur l'espace territorial national et international, le CODE procède également par l'élaboration d'articles d'opinion diffusés sur des sites Web africains et de journaux locaux, des mobilisations, l'organisation de forum d'activités, de campagnes de sensibilisation, etc. Pour ce qui est des sites, nous pouvons par exemple citer www.ici.cemac.com; www.cameroun21.com/fr; etc.

En ce qui concerne l'organisation des forum d'activités, il y a eu en mai 2005 l'organisation d'un «  Forum international » tenu à Paris sur le thème : « Rôle et la place de la Diaspora patriotique dans la démocratisation, le changement politique et le développement économique et social du Cameroun ». L'idée de ce forum est née de la « nécessité de mobiliser les forces de la diaspora patriotique au lendemain de l'élection présidentielle du 11 octobre 2004 », pour contribuer à une réflexion collective sur le devenir du pays. Ce forum international est également né de la nécessité ou du besoin ressenti par les animateurs du mouvement de ressouder les rangs des patriotes de la diaspora camerounaise, proches de l'opposition dans le but d'engager des actions « concrètes et opérationnelles en direction du Cameroun ». Selon les organisateurs du programme, le forum offrirait l'occasion de mener une réflexion prospective sur l'appui de la diaspora patriotique à l'avènement de la 2ème République.

Il faut noter que ce forum a connu la participation de délégués, d'intellectuels, d'activistes politiques, de personnalités et d'organisations patriotiques proches de l'opposition camerounaise venant de France et de Grande-Bretagne, mais aussi d'autres pays comme l'Allemagne, la Belgique, les Etats-Unis d'Amérique et la Suisse, etc. Les participants ont passé en revue la situation socio-politique et économique du Cameroun. A l'issue des différentes concertations, il a été adopté un certain nombre de conclusions sur « les préoccupations politiques et sociales des Camerounais de la diaspora ; la contribution de la Diaspora patriotique (CODE) à la démocratisation, au changement politique et au respect des libertés ; l'appui direct de la Diaspora patriotique (CODE) aux populations camerounaises abandonnées par le régime de fait et aussi, des motions, résolutions et recommandations ».

Pour ce qui est des marches et mobilisations des membres du CODE, elles interviennent le plus souvent en rapport avec l'actualité du pays, qu'elle soit politique, économique, ou sociale. Ainsi, il aura été possible de voir des Camerounais de France et Grande-Bretagne se mobiliser à Londres ou à Paris à la veille des élections présidentielles, lors de la célébration de la 57ième journée internationale des droits de l'homme. Et tout récemment encore, nous avons pu la voir réagir face au problème de la corruption en tant que mal qui mine le pays. C'est dans ce sillage que du 13 au 14 mars 2004, des Camerounais membres et sympathisants du CODE, venus de France, de Belgique, de Hollande et d'Allemagne se sont rencontrés à Paris. C'était dans le cadre de l'étape hexagonale de leur Campagne internationale d'action pour la démocratie au Cameroun, lancée huit mois plus tôt à Hambourg et dont les objectifs seraient « la mobilisation des Camerounais de l'extérieur et la Communauté internationale autour des conditions d'élections transparentes au Cameroun ».

Photo 1- Des Camerounais de la diaspora vont aux ``urnes'' à Paris.

 

 

Photo 2 - Des Camerounais de Paris à la veille des élections présidentielles du Cameroun du 11 octobre 2004.

Source :www.cameroon-info.net, le 25 mars 2006 

B. La Diaspora camerounaise pour la solidarité (ASBL)

1. Ligne d'action

La diaspora camerounaise pour la solidarité existe depuis près de six ans aujourd'hui. Basée en Belgique, elle a pour but principal « faciliter les échanges entre les Camerounais résidant en Belgique, les autorités belges, les instances européennes et d'autres associations similaires ». Cette association camerounaise est formée d'anciens étudiants boursiers pour la plupart, déjà engagés dans la vie professionnelle. Ces anciens étudiants se donnent pour objectif « promouvoir l'image du Cameroun et de la communauté camerounaise aussi bien en Belgique qu'en Europe. Les membres viennent des régions anglophones et francophones du Cameroun.

2. Activités

La diaspora camerounaise pour la solidarité (ASBL) organise très souvent des rencontres, des conférences, des manifestations à but culturel dont les thèmes recouvrent l'ensemble des préoccupations de la diaspora camerounaise. En 2000, a été organisée une conférence sur la « Gestion de l'eau et de la forêt tropicale en Afrique centrale ». En 2002, une autre conférence fut organisée sur « la problématique de la bonne gouvernance » et en 2003, les membres de l'association ont organisé deux conférences - débats. L'une portait sur « l'éducation et le développement », tandis que l'autre portait sur « les Pygmées Baka ».

Prenant très souvent part aux rassemblements organisés par des membres du CODE et associés, l'ASBL ne partagent pas leur idéologie. L'interview suivante, réalisée par cameroun-info.net, le 22 décembre 2003, et publiée telle que tirée du net, nous en donnera un aperçu.

Jean-Marie ABOGSO137(*) : «Le mémorandum de Bruxelles est une imposture !»138(*)

L'association « DIASPORA CAMEROUNAISE POUR LA SOLIDARITE » a bel et bien été au rassemblement qui a eu lieu à Bruxelles les 9 et 10 décembre derniers139(*)...

Une délégation, constituée de deux membres : Monsieur Bodiong et moi-même, s'est rendue à la conférence publique du 9 décembre 2003. La salle, assez petite, était à moitié vide. Nous n'avons vu aucun membre d'un parti politique européen (à l'exception toutefois d'une personne qui vendait des prospectus du Parti des Travailleurs de Belgique).

On dirait que vous ne portez pas trop les organisateurs à coeur ?

Je connais assez-bien «libéral» qui organisait cette conférence. Il est malheureusement difficile de penser, à la lecture des prises de positions de ce groupe, qu'il ait d'autre objectif que de ternir l'image du Cameroun. Je pense que sur ce point, très peu de gens diraient le contraire.
Monsieur Kapet de Bana est président de «Ligue camerounaise des Droits de l'homme», et à ce titre, il est installé à Paris ! Il avait déjà écrit en 2002 un rapport très déséquilibré sur la situation des droits de l'homme au Cameroun. Je connaissais donc l'individu et ses idées. Il semblait d'ailleurs se réjouir d'avoir pu cette année commanditer un rapport encore plus négatif sur le Cameroun (Il n'a pas dit rigoureux).


La conférence s'est tout de même bien passée. Quelles sont vos impressions sur les exposés des différents intervenants ?

Une fois l'absence du Prof. Abel Eyinga annoncée, on a donné la parole à Madame Augusta EPANYA. Elle semblait très gênée par les caractéristiques de l'assistance: réduite (entre vingt et trente personnes) et très peu d'Européens (deux). Son texte de propagande finira quand même par reconnaître que sous la présidence du Président BIYA, les Camerounais se sont sentis plus libres qu'avant. «Les années AHIDJO ou les années de plomb... ».
Maître MOMO est un magnifique conteur. Il n'est pas cependant parvenu à faire croire à la salle que le droit de propriété n'existait pas au Cameroun. Ses exemples truffés d'incohérences et de documents photographiques (contradictoires ou non authentifiés) vont parfois réussir à émouvoir la salle mais jamais, malgré son sens du show, il ne la convaincra de se soulever contre les institutions.
En se référant au Commandement Opérationnel (Unité spéciale chargée de lutter contre le grand banditisme) pour affirmer que l'Etat camerounais est un Etat répressif qui terrorise la population, Maître MOMO fait preuve d'une irresponsabilité notoire. Car, comment laisser croire à l'opinion publique que combattre la grande criminalité, très intense alors, était une atteinte aux droits de l'homme. Il y a eu des bavures, elles ont été sanctionnées et des jugements ont été prononcés. Pourquoi dès lors, s'évertuer à prouver que ces bavures étaient couvertes par l'Etat ?
L'intervention du Professeur Kapet de Bana sera lyrique, elle n'a sans doute pas changé depuis 1960. Nous replongerons pendant près d'une heure dans le passé («Sauce KAPET»). Il aura alors l'occasion de tenir des propos indignes vis à vis de nombreuses institutions du pays. La salle le suivra, jusqu'au moment où il tentera d'introniser monsieur Tene Sop comme héritier de la tradition «upeciste». Le silence, assez lourd, le fera reculer sur le sujet. Monsieur Kapet parlera alors de la recherche d'un candidat capable de gagner les élections présidentielles. Ignorant de ce fait le candidat de son parti dont les tracts étaient pourtant présents dans la salle. Ce comportement finira par déstabiliser l'auditoire.

Nous ne parlerons pas ici de l'intervention de Monsieur Tene Sop qui semble n'avoir pris la parole que pour conclure qu'il n'avait rien à dire !
Le texte de Monsieur Abel Eyinga, bien que discutable sur le fond, a donné un semblant de sérieux à la conférence. Mais l'absence de l'auteur a empêché tout débat sur ses affirmations.
La partie débat achèvera de transformer le désordre ambiant en carnaval historique.
En effet les questions que notre association à posées, par mon entremise, ont suscité une émotion caractéristique des groupes peu habitués à la contradiction. Cette émotion fera passer à la trappe les questions des militants qui voulaient des résolutions concrètes après le «bavardage».

Avez-vous signé le mémorandum qui a ponctué la conférence ?
Nous ne pouvions pas signer le mémorandum. D'abord parce que nous n'avons jamais été associés à quelque concertation que ce soit à ce sujet. D'autre part parce que les objectifs d'un tel document n'étaient pas clairs.

Et pourquoi ?
La conférence n'a jamais abordé la question du texte du mémorandum tant elle s'était déroulée, comme je le disais tout à l'heure, de manière beaucoup trop chaotique.
C'est donc un groupe d'individus qui, sans concertation aucune avec la Diaspora de Belgique, décide de présenter un texte au nom de ladite Diaspora. Ce comportement n'est pas démocratique et nous, Diaspora Camerounaise en Belgique, dénonçons ce coup de force.

Et sur le fond ?
Ce mémorandum partisan est surtout le fruit d'un groupe qui, sous le couvert des droits de l'homme, prétend jouer un rôle politique au Cameroun. Il n'est donc pas étonnant qu'il soit truffé d'inexactitudes. Il est bien dommage que sur un sujet aussi important des personnes, vivant pour la plupart à l'extérieur du pays, se livrent à de la démagogie.


Pourquoi réagir maintenant ?
J'ai pensé dans un premier temps qu'une conférence aussi mal organisée soit sans importance. C'est par la suite lorsque j'ai vu la désinformation qui s'organisait autour d'elle que j'ai réalisé que je devais témoigner pour les générations à venir. Bruxelles a été le centre d'une imposture...

Une fois de plus, c'est grâce à Internet que le ''diasporique'' J-M. Abogso a pu s'exprimer et de surcroît diffuser son point de vue.

.  L'étude du Collectif des organisations démocratiques et patriotiques de la diaspora camerounaise (CODE) et de la Diaspora camerounaise pour la solidarité comme mouvements et associations des diasporas camerounaises de l'Occident, de la France et de la Grande-Bretagne en particulier dégage les différentes tendances politiques visibles à travers les comportements des Camerounais de l'extérieur. En effet, la diaspora camerounaise apparaît comme un groupe pluriel de par ses objectifs, ses croyances, ses parcours, ses activités et ses modes d'actions.

La vie politique camerounaise en terre diasporique, notamment en France et en Grande-Bretagne est la mise en exergue à la fois de différentes cultures politiques camerounaises et de différentes idéologies politiques s'affrontant déjà au plan local. Il s'agit bien là, d'une intégration différentielle des Camerounais de France et de Grande-Bretagne dans le jeu politique national. C'est aussi des luttes d'influence, des stratégies de positionnement, entre le parti de la Majorité présidentielle et l'Opposition politique radicale.

Section II : Les modalités étatiques d'intégration des Camerounais de la diaspora dans la vie politique nationale

L'éloignement est souvent un déchirement contre lequel au cours de ces dernières années, l'Etat s'est efforcé de lutter. Il essaie de construire une proximité en dépit de l'espace : proximité objective quand elle s'inscrit ou peut s'inscrire dans les liens formels de la nationalité et d'une représentation au sein de l'Etat ; proximité politique quand s'engagent de loin des actions en faveur du gouvernement. Et enfin, proximité temporelle quand les moyens actuels de communication permettent de vivre le lien et l'intimité au pays par - delà la distance140(*). Alors, si l'Etat camerounais entend « entretenir sa diaspora  », ou encore « l'encadrer», c'est pour créer des conditions favorables à l'épanouissement politique de sa population, même si, celle-ci se trouve à distance. C'est dire que, face aux divers mouvements diasporiques de Camerounais de l'étranger et en particulier de ceux de Londres et de Paris, les autorités publiques ne sont pas indifférentes. Le maintien d'un lien le plus formel possible, souvent médiatisé par la nationalité, devient une priorité nationale ou s'impose comme un atout important, surtout, sur le plan politique.

Paragraphe 1 : La reconnaissance des diasporas camerounaises et l'assignation de missions de représentation par l'Etat

La reconnaissance est l'un des grands mécanismes de la vie sociale et donc de la politique. Un individu, un citoyen, un groupe, un peuple existe certes en prenant conscience de lui-même, mais aussi étant reconnu par les autres, et de surcroît par les autorités publiques. Ces deux dynamiques interagissant en permanence l'une sur l'autre, les Etats, les citoyens, se constituent dans un double mouvement de réussite et d'honneur. D'où la reconnaissance souvent officielle d'un citoyen qui sera distingué sur le plan national ou international. L'Etat camerounais applique ou adopte de temps à autre des politiques qui prennent en compte les élites de la diaspora. De même l'Autorité publique est consciente du fait que la présence des populations en dehors de leurs frontières est un enjeu pour la politique économique et diplomatique. C'est pourquoi de temps à autre, l'Etat camerounais est tributaire de politiques d'attention et de reconnaissance à l'égard de ses diasporas manifestant la volonté de contribuer à l'édification de leur pays sur les plans national et international.

A. Les diasporas camerounaises comme ''porteurs'' de l'identité de l'Etat

Les espaces vécus par les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne qui correspondent également à leur vie quotidienne ne sont pas forcément les espaces investis. Bien au contraire, le champ investi est le Cameroun puisque c'est dans ce dernier que les migrants envisagent leur avenir et espèrent obtenir une reconnaissance sociale. D'ailleurs, le président de la République a affirmé dès sa première rencontre avec la communauté camerounaise en France le 16 février 1983 à Paris que toute contribution à l'oeuvre de la construction nationale ne serait que la bienvenue141(*).

En terres française et anglaise, les communautés camerounaises sont tributaires d' « un charisme collectif distinctif » du territoire d'origine qui sert de mesure éthico-axiologique et surtout de référentiel d'identification politico-citoyenne142(*). Donc à l'intérieur de ce double phénomène, il se joue comme le dit l'auteur précité « la dynamique de l'expatriation de l'identité nationale et de l'exportation ou reproduction extra-territoriale de l'Etat ». En effet, face à la stigmatisation dont ils sont l'objet en terre d'accueil, les immigrés camerounais reformulent et revivifient leur figure nationale et communautaire. Ils restent pour la plupart engagés dans « un travail de rétablissement des continuités culturelles et ou identitaires »143(*). Le maintien du lien par les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne avec l'Etat d'origine à travers l'identité n'est pas sans impact sur la considération de ces communautés par les autorités publiques.

B. L'assignation de missions de représentation à travers l'intégration de certains Camerounais de la diaspora dans les institutions nationales.

Bien que conscient du fait que beaucoup d'agents de l'Etat, fonctionnaires, membres du gouvernement anciens et nouveaux autrefois membres de la diaspora ont intégré et assuré ou continuent d'occuper des fonctions de responsabilité au sein des instances de l'Etat, seuls les joueurs de football seront pris en compte ici du fait de leur particularité identitaire.

Certains joueurs de football sont souvent appelés à représenter les couleurs du Cameroun qui n'est jamais que celui de leurs parents auquels ils s'identifient, et pour lequel ils ne possèdent pas la nationalité. C'est ainsi que le Lyonnais Joseph-Désiré Job, le Lensois Assou- Ekotto, l'Auxerrois Perrier Doumbè, pour ne citer qu'eux, jouent pour le Cameroun, sont nés en France et sont de nationalité française, avant d'être Camerounais. L'acceptation par ceux-ci de défendre les couleurs du Cameroun est un signal fort du lien gardé avec la mère patrie. Leur intégration dans l'équipe des ''Lions indomptables du Cameroun'', l'une des plus importantes institutions de représentation de l'Etat camerounais à l'extérieur et dans les compétitions internationales montre non seulement le degré de responsabilité de ces individus envers la Nation, mais également leur reconnaissance par l'Etat. Leur situation identitaire prouve que, quand il y va aussi bien de l'intérêt de la Nation que de l'attachement manifesté par les membres des diasporas camerounaises, l'Etat n'hésite pas à outrepasser certaines dispositions juridiques, telle que celle de l'acceptation des joueurs de nationalité française et d'origine camerounaise alors que les textes n'admettent pas encore la bi-nationalité.

Paragraphe 2 : La reconnaissance des élites de la diaspora

A. Yannick Noah

1. le personnage

Il serait étonnant pour certains de voir Yannick Noah cité parmi les ''figures de proue'' de Camerounais à l'étranger. Mais ce choix est dû aux différents rapports maintenus par l'individu avec son pays d'origine (puisqu'il est français mais de père camerounais) malgré sa nationalité française et son éloignement géographique.

Yannick Noah est né le 18 mai 1960 à Sedan. De mère française et de père camerounais, il est un ancien joueur de tennis victorieux à Roland-Garros, en 1983. Il se reconvertit en coach après sa carrière de joueur et mène depuis 2000, une carrière de chanteur amorcée dès 1990 avec la chanson « saga africa ». Lorsqu'il a trois ans, la famille de Yannick Noah s'installe à Yaoundé au Cameroun, où il découvrit le tennis. C'est là qu'il se fait remarquer par Arthur Ashe, premier joueur noir à remporter un tournoi de Grand Chelem.

2. Sa place au sein de l'Etat

Yannick Noah a occupé des postes honorifiques proposés par le Pouvoir. En 2005, il a rejoint l'équipe nationale de football en tant que conseiller, tout en maintenant sa résidence et ses activités hors du pays. Ce Camerounais soutient également la Fondation Chantal Biya par le biais du « Collectif Unis pour Vaincre ». C'est une preuve que la nationalité n'est pas toujours la seule modalité d'attachement d'un individu à une terre. L'origine affecte quelque peu sa personnalité.

B. Manu Dibango

Le choix de cet artiste est dû au fait que bien que vivant à l'étranger et ayant acquis la nationalité française, il cultive une conscience de ''diasporique'' en ce sens que le lien qui l'unit au pays natal reste une référence identitaire forte (style musical, langue choisie pour ses chansons).

Le 12 décembre 1933, est né à Douala, au Cameroun Emmanuel N'djokè Dibango. Etudiant à Chartres dans les années 1950, il y découvre le jazz et y apprend le piano. Mais c'est à Reims qu'il prépare son Baccalauréat, qu'il s'initie au saxophone et commence à se produire dans les boîtes et au grand dam de son père qui lui coupe les vivres en 1956.

Différents contrats le mènent à Bruxelles où il rencontre sa femme ; Anvers et Charleroi où son jazz s'africanise au contact du milieu congolais, dans l'ambiance de l'accession du Congo belge à l'indépendance en 1960. Joseph Kabasélé l'engage dans son orchestre et ils enregistrent quelques disques qui remportent le succès en Afrique et les amènent à Léopoldville. C'est de là que Manu rentre au Cameroun en 1963 avant de regagner la France où il vit depuis toujours.

Manu Dibango est le précurseur de la World Music. Pendant deux ans (2003-2005), il a géré la Cameroon music corporation (CMC). Dès ses débuts avec Nino Ferrer ou Brassens, il a tissé des rythmes africains qui lui ont valu multiple reconnaissance mondiale et nationale. En 1998, TV5 le met aux commandes de son émission ``A la découverte du continent africain''. Icône de la musique africaine et camerounaise en particulier, l'artiste Manu Dibango au cours de ces dernières années, a pu bénéficier de nombreux prix à titre honorifique. En novembre 2003, il a reçu le ''Grand prix in honorem'' de l'Académie Charles Cros, pour l'ensemble de sa carrière.

Le 27 mai 2004, à l'UNESCO, il est devenu ``ambassadeur pour la paix'' et le premier africain à obtenir cette distinction. En dehors de ces différents honneurs internationaux, Manu Dibango a été bénéficiaire de diverses reconnaissances de la nation. Ce fut le cas par exemple en février 2000, lorsque l'ancien Premier ministre Peter Mafany Musonge lui remettait un important trophée en signe de reconnaissance de la Nation. Toujours, le même mois de la même année, Manu Dibango a été la vedette officielle de la fête de la jeunesse qui a réuni de milliers de jeunes au stade omnisports de Yaoundé144(*).

A travers leurs démarches le plus souvent privées, Yannick Noah et Manu Dibango comme bien d'autres que nous n'avons pas cités ici, agissent sur l'image extérieure du Cameroun.

La possession d'une nationalité étrangère par des Camerounais de la diaspora due aux uns grâce aux principes de jus solis et jus sanginis et conséquence d'un long séjour pour les autres, n'a pas complètement érodé l'attachement de ceux-ci à leur pays d'origine. La nationalité apparaît donc d'abord comme un tremplin social. C'est le point de départ d'un transculturalisme qui se traduit par une volonté d'intégration en terre d'accueil caractérisée par l'accoutumance et la reproduction et des valeurs et usages locaux. L'acquisition mutanti mutandis d'une nationalité étrangère, donnant automatiquement droit à une nouvelle identité nationale peut diluer l'emprise de l'Etat d'origine mais sans couper l'individu de ses racines. On devient donc citoyen français ou anglais mais on revendique corrélativement une identité propre. C'est aussi cela, l'une des caractéristiques des membres de la diaspora camerounaise.

Si bien avant les Etats contrôlaient efficacement les frontières et limitaient les migrations, aujourd'hui l'horizon spatial s'est ouvert, parfois concrètement, parfois dans l'imaginaire des hommes. Aussi, si les partis camerounais se retrouvant à l'étranger étaient pilotés par les leaders des partis eux-mêmes, aujourd'hui les diasporas camerounaises se les réapproprient et les prennent en main elles-mêmes. Le plus étonnant dans ces activités politiques diasporiques, c'est qu'elles ont un écho incroyable au plan national et international. De ce point de vue, la chute du mur de Berlin comme l'ouverture des frontières dans l'espace Schengen par exemple, sont aujourd'hui plus que des symboles.

CHAPITRE III :

LES DIASPORAS CAMEROUNAISES, ACTEURS DE LA VIE POLITIQUE NATIONALE

Par « acteur », nous entendons « tout groupe, tout mouvement ou toute association politique et même à la limite, toute personne « jouant un rôle » dans le champ socio-politique (camerounais) local ou externe » 145(*). Tenir un rôle peut consister, à tout le moins à entreprendre et surtout, à exercer une influence sur les détenteurs du pouvoir de décision et de la force matérielle.

Dans ce chapitre qui se structure en deux sections à raison de deux paragraphes par section, il est question de mettre en exergue l'impact des activités politiques menées par les membres des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne. En effet, l'engagement politique des Camerounais de la diaspora n'est sans effet et échos sur l'environnement national et international. Leurs actions font sens et confirment notre hypothèse de la réinvention diasporique de la citoyenneté de la part des Camerounais de l'étranger. Ainsi donc, notre première section de ce chapitre ressortira les modalités d'ordre pratique tandis que la deuxième ressortira les implications théoriques.

Section I : Les scènes politiques locale et internationale : réceptacles des actions politiques des diasporas camerounaises militantes.

L'activisme, qu'il soit politique ou économique est une caractéristique de la diaspora, ou de populations exilées qui disent « garder ou maintenir des liens » avec leur pays d'origine. Les diasporas camerounaises participent, entreprennent des actions et exercent une influence assez considérable sur le développement politique et économique de leur pays. Si elles ne prennent pas de décision, elles exercent tout de même une influence sur les détenteurs du pouvoir de décision et de la force matérielle, qu'elles militent dans l' Opposition, dans les mouvements, ou au sein de la Majorité présidentielle. En effet, elles ''jouent des rôles'' dans le champ socio-politique camerounais, en prenant une part déterminante dans le déroulement de l'action politique.

Paragraphe 1 : Les diasporas camerounaises, acteurs de la société civile camerounaise transnationalisée

A. Les organisations diasporiques comme groupes de pression

Par groupes de pression, il faut entendre des « organismes de défense d'intérêts qui agissent sur les pouvoirs publics pour infléchir leurs décisions dans un sens favorable à ces intérêts »146(*). N'ayant pas accès à la participation politique conventionnelle (droit de vote, éligibilité, etc.), les diasporas camerounaises peuvent agir de façon très diverse, allant de l'appel à l'opinion publique jusqu'à l'action directe sur des personnalités politiques influentes ou sur les pouvoirs publics internationaux. En raison parfois de leur dimension transnationale, les diasporas camerounaises sont capables d'exercer une influence, soit occulte, soit ouverte.

Elles exercent une pression forte sur les autorités publiques à travers leurs différentes interventions sur les questions d'actualités en rapport plus ou moins direct avec le déroulement de la vie politique nationale. En d'autres termes, les activités des diasporas camerounaises ont des répercussions sur les prises de décision des autorités nationales et internationales. Leurs différentes réactions sur les débats qui ponctuent la gouvernance, la situation des étudiants dans les universités camerounaises et à l'étranger, les mouvements animant la vie des partis politiques de la Majorité présidentielle et de l'Opposition147(*), les élections présidentielles, etc., parlent d'elles-mêmes.

C'est ainsi que, par rapport à leur désir d'une élection présidentielle transparente au Cameroun en 2004, les diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne membres et sympathisantes du CODE, de la CDC et du SDF n'hésitèrent pas à se tourner vers les institutions internationales. En effet, ces ''diasporiques'' ont su jouer au profit du contexte et de l'environnement dans lesquels ils se trouvent pour exposer leurs préoccupations politiques. Pour faire pression aux membres du gouvernement camerounais, les acteurs du CODE et du SDF en France et en Grande-Bretagne se sont tournés vers l'Union européenne et vers le Commonwealth, pour ce qui est de la CDC.

Ainsi donc, le 15 mars 2004, à la demande du SDF et du CODE, une ''journée spéciale'' fut consacrée au Cameroun par le parlement européen. La commission chargée du développement et la coopération s'est penchée sur le dossier du Cameroun concernant la situation des droits de l'homme, suivant les revendications faites par les membres du CODE et du SDF. Y ont participé M. Poufong Théodore, vice-président du SDF, province de Belgique et son secrétaire exécutif ; y étaient également présents Mme Bassong Isabelle, ambassadeur du Cameroun auprès du Royaume de Belgique et M. Tsala, premier secrétaire d'ambassade. L'intérêt de cette commission avait été suscité par les mouvements d'opposition au régime. Il s'agit là des Camerounais, membres de l'opposition résidant en Grande-Bretagne et ou en France qui ont porté le ''problème camerounais'' dans la rue et devant les institutions étrangères susceptibles d'influer sur le comportement du Gouvernement. Après l'audition des différents intervenants, la vice- présidente de la commission européenne et chair lady, Mme Sandersten-Holte a déclaré que « le parlement européen suivra de très près l'évolution du Cameroun (pendant la période électorale) »148(*).

De même, le 6 juillet 2004, environ une centaine de manifestants, activistes de la CDC et de la section londonienne du SDF se sont rendus devant le siège du Commonwealth pour porter des revendications. Conduits par Brice Nitcheu, coordinateur de la CDC et de la section SDF/UK les activistes réclamaient des « élections libres et transparentes au Cameroun ; la libéralisation effective des médias audiovisuels avec notamment la fin du musellement de Freedom FM149(*) ». Une délégation de quatre personnes : - Brice Nitcheu, E. Kemta, A. Pokam Tadiesse, Sylvie Ndjike - a été admise à l'intérieur du siège du Commonwealth, où elle a été reçue par Matthew Neuhaus, directeur des affaires politiques du Commonwealth, Dr. Pungong, directeur adjoint et chef de la section des bons offices à la division des affaires politiques et Mme Geraldine Goh, officier des affaires publiques, de la communication à la division des affaires publiques, trois hauts responsables du Commonwealth. M. Matthew a déclaré après l'entretien avec les manifestants qu'ils étaient très attentifs à la manifestation et aux messages portés à travers elle. Donc, quand la Grande-Bretagne décide d'envoyer 10000 urnes transparentes au Cameroun, c'est parce que les Camerounais qui sont à Londres ont saisi le Commonwealth pour dire « Ecoutez, nous voulons des élections transparentes chez nous aussi »150(*). C'est dire de quel poids et de quelles méthodes les diasporas peuvent user pour accroître leur influence sur le cours de la vie politique nationale.

Suite aux manifestations estudiantines qui ont animé l'actualité nationale pendant une certaine période, l'organisation des étudiants camerounais d'Europe avaient rendu publique, à travers le net, une déclaration. Suite à l'assassinat de M. John Khotem, militant du Social Democratic Front (SDF) et chef de circonscription électorale de Balikumbat dans le Nord-Ouest, l'on a pu voir des forces vives de la diaspora camerounaise membre du SDF se mobiliser pour dénoncer l'acte. En effet, des Camerounais de France et de Grande-Bretagne ont été « horrifiés » par ce crime dont l'auteur est un chef traditionnel, député-maire issu du parti au pouvoir. Le responsable du crime a écopé de quinze années de prison ferme. Un communiqué conjoint a été rédigé et publié. Plutard, une structure de coordination fut créée. Dénommée ''Coordination des Camerounais de la diaspora'', son but essentiel tel qu'il ressort de la mouture des statuts est la « défense des intérêts et des droits civiques et politiques des Camerounais de l'extérieur ».

De manière générale, une tension palpable anime quelquefois des Camerounais de France et de Londres. Puisqu'ils peuvent au prix de deux euros (1400fcfa), se procurer dans les librairies telle que celle de Tamery, avec quelques jours de retard seulement le dernier numéro du Messager, Cameroon Tribune ou de Mutations, ils vivent presque quotidiennement les réalités du pays. A titre d'illustration, il est possible de mentionner la mobilisation camerounaise dans les villes de Paris et de Londres lors des dernières élections présidentielles au Cameroun. En s'informant sur le net, à travers des conversations téléphoniques sur la Radio France Internationale (RFI), les diasporas camerounaises sont restées très attentives à l'évènement : un intérêt à la mesure de la nature et de la portée des enjeux de cette consultation dont les ressorts institutionnels structuraient et conditionnaient l'avenir politique du pays. Les meetings, les initiatives diverses de mobilisation et de sensibilisation et les prises de position convergeaient autour des questions « impulsion de la prospérité et de la démocratie par le Président de la République » pour ce qui est des militants du RDPC en particulier, comme de l'énigme du vote des Camerounais de l'étranger, pour l'ensemble des diasporas camerounaises militantes.

A. L'influence des Camerounais de la diaspora sur l'élaboration des politiques publiques

Une politique publique se présente sous la forme d'un programme d'action gouvernementale dans un secteur de la société ou un espace géographique151(*). En effet, une politique publique est constituée d'un ensemble de mesures concrètes. Elle a un public (ou plutôt des publics), c'est-à-dire des individus, groupes ou organisations dont la situation est affectée par la politique publique. Par exemple : les automobilistes, les constructeurs, les entreprises de génie civil constitueront à des degrés divers le public de la politique de la sécurité routière. Ce n'est pas un donné mais un construit152(*).

Aujourd'hui, le Code de la nationalité camerounaise est entrain d'être revu. Pourtant aussi bien l'octroi du « droit de vote » que l'accès à la « double nationalité » figurant sur le nouveau projet153(*), avaient déjà fait l'objet de nombreuses revendications au sein des diasporas (CODE, SDF/Londres et Paris) et plus formellement, il a fait l'objet d'un débat au sein du RDPC/France qui a émis, le 30 mai 2003 : « dix propositions initiales de la nouvelle politique publique de la diaspora camerounaise ». Il s'agit de : - la réforme de la nationalité avec acceptation de la double nationalité ; - l'octroi du droit de vote aux Camerounais de l'étranger ; - la création d'un conseil représentatif des Camerounais de l'étranger et l'ouverture des maisons des Camerounais de l'étranger au Cameroun ; - la mise en place d'un couloir humanitaire avec un budget annuel d'aide au transport des dons de l'étranger et élaboration d'un dispositif fiscal et douanier spécifique sur les investissements des Camerounais de l'étranger ; - l'ouverture des centres culturels camerounais à Paris, Berlin, Londres, Bruxelles et New-York ; - la libéralisation du transport aérien ; - la création du répertoire des chercheurs camerounais de la diaspora et coopération scientifique prioritaire avec eux ; - la création d'un centre d'accueil et d'information des nouveaux arrivants ; - la création des consulats honoraires dans les villes provinciales ; - la relance des bourses pour des études spécialisées à l'étranger.

Ces propositions ont été signées par Amvouna Atemengue Jean-Baptiste Martin, président de l'association Diaspora solidaire et vice-président de la section France du RDPC.

En définitive, il est à noter que la géographie influence dans une large mesure les comportements, voire la participation politique des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne à la vie politique nationale. Se trouvant au coeur des pays de liberté, à la tête de certaines organisations internationales telles que le Commonwealth et la Francophonie promotrices de valeurs démocratiques, les comportements politiques des diasporas camerounaises en restent fortement influencées. Encore que, au niveau locale ceux-ci seront davantage influencés en fonction de la culture politique du pays d'accueil, d'où l'éventuelle différence au niveau de l'intensité de l'engagement.

Paragraphe 2 : Les Camerounais de la diaspora, acteurs à part entière et entièrement à part de la vie politique nationale

A. Les Camerounais de la diaspora comme acteurs à part entière

L'hypothèse que nous avançons dans cette partie est celle de l'incorporation idéologique et virtuelle des diasporiques camerounais de France et de Grande-Bretagne dans le champ politique national.

1. Les modalités d'incorporation idéologique et de marquage de la vie politique nationale par les diasporas camerounaises

Les diasporas camerounaises militantes de France et de Grande-Bretagne peuvent être considérées comme des acteurs à part entière de la vie politique nationale car, les groupes et mouvements politiques étudiés plus haut, sont chacun, porteurs d'idéologies politiques claires. Ces idéologies fondent l'identité politique de chaque groupe. Les mouvements et groupes politiques des Camerounais de la diaspora sont manifestes dans des sections de partis politiques camerounais représentés à l'étranger. On note une participation partisane intense en accordéon avec les militants de l'intérieur. Celle-ci se caractérise par de constantes relations avec le parti en question (RDPC, SDF), des élus du parti, l'implication même à distance dans les campagnes électorales, et des activités militantes. Il faut également ajouter que les critères d'adhésion sont respectés par les membres et acteurs politiques des diasporas. Les cotisations sont régulièrement payées. En effet, la plupart des critères appliqués au plan national sont également appliqués au plan externe. Tout comme pour ceux représentés à l'intérieur, la propagande est la principale arme des partis et mouvements politiques camerounais représentés à l'étranger154(*), la mise en place et l'exécution des programmes des partis par leurs membres. En effet, les militants des partis politiques de la diaspora camerounaise sont généralement des relais de la section « affaires étrangères » des partis concernés. Ceci leur donne une grosse part de responsabilité dans la vente de l'image du parti, qu'il soit de l'opposition ou de la majorité présidentielle. Par ailleurs, la vulgarisation de l'image du parti passe par la défense même de son idéologie qui peut, selon le dictionnaire Larousse, être considérée comme un «ensemble plus ou moins systématisé de croyances, d'idées, de doctrines influant sur le comportement individuel ou collectif ».  Chaque mouvement politique des Camerounais de la diaspora sait où il va et ce qu'il recherche. Les objectifs, comme pour tout acteur politique, sont déterminés à l'avance et les actions menées dans le sens du but à atteindre. Cependant, la manière dont les différences sont mobilisées dans un processus qui conduit à aboutir à l'identité d'un groupe est particulière. L'identité n'est pas figée, elle fait flèche de tout bois, usant parfois d'éléments relevant d'autres cultures155(*).

2. Les modalités d'incorporation virtuelle des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne dans la vie politique nationale

C'est l'idée même de la participation politique virtuelle des Camerounais de l'étranger. Celle-ci participe du processus de « démarginalisation »156(*) des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne en tant qu'acteurs politiques. Elle montre leur implication ou inféodation dans la scène politique virtuelle. En effet, la mobilité virtuelle a ouvert de nouvelles voies de rencontres politiques : ce qui confirme l'idée de A. Appadurai selon laquelle : « la mondialisation a un impact considérable et direct sur les structures politiques et la vie culturelle des groupes humains »157(*). L'extraordinaire développement de la communication de masse, avec les images qui peuvent transiter d'un bout à l'autre a donné un rôle inédit aux diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne, qui ont réussi à s'imposer dans le « combat des idées »158(*). C'est ainsi que pendant la période électorale en 2004, l'on a pu voir pas mal de sites investis par une prépondérance de commentaires (entre critique et soutien) de la part des Camerounais de France et de Grande-Bretagne.

Internet permet d'accélérer la constitution de réseaux à une vitesse exponentielle. On peut se rendre compte de l'existence de véritables « communautés virtuelles »159(*). On ne compte plus les sites sur lesquels les diasporas s'expriment. Dans cet espace virtuel, les membres dispersés se rassemblent. Ce sont des réunions qui ont souvent une base nationale, voire étatique- quand les pays d'origine maintiennent les relations avec leurs ressortissants lointains. Ils valorisent la culture d'origine, discutent des sujets d'actualité nationale, échangent les points de vue sur les questions les plus poignantes concernant l'avenir du pays.

Grâce à la mondialisation des échanges, il existe aujourd'hui « un double réseau de relations ''latérales'' dont le premier se développe comme dans le passé à l'intérieur de la diaspora, mais le second s'étend à l'ensemble des pays du monde »160(*). La diaspora s'inscrit désormais dans ce que Tambiah propose d'appeler un réseau transnational global161(*). Des Camerounais de l'étranger réussissent à s'intégrer dans des débats nationaux à partir des sites Web, soit en réaction des articles publiés, soit en réaction des comportements des acteurs politiques. A titre d'illustration, nous avons pu recenser un certain nombre de sites Internet qui sont des espaces de forum de discussion de la diaspora camerounaise. Il s'agit de :

-http://www.camerounimage.org

Ce site est dédié à l'information et à la culture camerounaise en vidéo, et axé sur les activités de la diaspora camerounaise à Paris.

-http://www.cambs.de

Ce site est un portail des étudiants camerounais en Allemagne : vivre et étudier en Allemagne

-http://www.camer.be

Le site est une revue de presses nationales et internationales concernant le Cameroun. Les informations sont diffusées en français.

-http://www. cameroonnews.com

C'est un portail camerounais d'informations diffusées en anglais.

-http://www.icicemac.com

De source canadienne, cet espace Web apparaît comme un lieu privilégié des forums de discussion des diasporas camerounaises.

-http://www.djangui.com

C'est un site camerounais d'information qui a pour slogan ''informer les Camerounais par les Camerounais et pour les Camerounais à travers le monde''.

-http://www.sofibabe.net

Ce site Web est celui de l'association des ressortissants `babimbi' résidant en France. C'est dire que la constitution des réseaux cosmopolites camerounais ne se fait pas seulement en référence à l'état d'origine mais également à la tribu.

La liste de sites Web énumérés ci-dessus appartient à un ensemble plus vaste qui contribue sans doute à la construction d'un ''réseau transnational global'' et au cosmopolitisme des Camerounais de l'étranger. Et ceci contribue à la particularité de ces acteurs de la vie politique nationale camerounaise, considérés comme à ''part''.

B. Les diasporas camerounaises comme acteurs entièrement à part

Les membres de la diaspora camerounaise militent dans des partis et mouvements politiques, mais ne votent pas. Ils ne sont pas non plus, candidats aux élections. Pourtant, la mobilisation extérieure est forte, et parfois même, bien plus forte que celle interne. Leur mobilisation politique est moins bien occasionnelle que celle des Camerounais de l'intérieur162(*). Constamment à l'écoute des nouvelles en provenance du pays, ils n'hésitent pas à réagir et à soutenir les compatriotes de l'intérieur dès qu'une occasion se présente. C'est généralement des déclarations collectives sur les sites web, des mobilisations spéciales à l'occasion de la célébration d'une journée internationale, de l'arrivée sur place des autorités politiques ou administratives camerounaises. Contrairement aux acteurs politiques ordinaires résidant sur le territoire national, d'abord des électeurs et dont la participation politique se limite généralement à des comportements électoraux, ils sont conquis d'abord pour leurs voix, tandis que les autres, (les Camerounais de l'extérieur) sont conquis pour une adhésion à une certaine idéologie. A l'extérieur, il s'agit beaucoup plus d'un combat des idées dans un espace virtuel. La spécificité politique des mouvements de la diaspora camerounaise de l'Occident en général, de la France et la Grande-Bretagne en particulier, est également due au fait que leur influence est limitée. Leur participation politique sur le plan institutionnelle est essentiellement passive. Il y a en réalité, un problème de faisabilité matérielle.

1. Originalité des moyens déployés

L'emprunt des sites Internet ( www.rdpc.fr, www.sdf.party, www.cameroon-info.net, www.cameroon21.com), et des voies non conventionnelles (mobilisations, marches, manifestations, articles d'opinion etc.) par les Camerounais de France et de Grande-Bretagne pour s'intégrer dans le débat politique national rend inédite leur participation politique. En effet, celle-ci se pose en termes tout à fait singuliers. Il s'agit d'une population a priori exclue qui réussit à investir l'espace politique national. Leur « participation politique qui emprunte rarement les trajectoires légales ou celle des structures ou cadres conventionnels, opère par contournement des cadres agrées »163(*). Ces pratiques des Camerounais de la diaspora dans leur rapport à l'Etat et à la vie politique nationale et la récurrence de leurs activités transnationales sont une mise en exergue du rapport entre l'Etat et ses nationaux de l'étranger.

C'est innovant dans la mesure où les sites Web investis par les diasporas camerounaises laissent observer la naissance de véritables communautés politiques virtuelles. Celles-ci, en transnationalisant la vie politique interne camerounaise, remettent considérablement en cause les formes classiques de localisme ancrées sur le territoire dans le cadre de l'Etat-Nation.

2. Affrontements virtuels directs

Les migrations d'une part, les flux médiatiques d'autre part, ont bouleversé l'ordre régnant jusqu'alors. Cette situation, comme le note A.Appadurai, « tend à donner un rôle inédit à l'imagination. Non que les sociétés n'aient abondamment, dans leurs productions mythologiques, littéraires ou artistiques, fait appel à cette faculté. Mais désormais l'imagination n'est plus cantonnée à certains domaines d'expression spécifiques. Elle investit les pratiques quotidiennes, notamment dans les situations migratoires où les sujets sont obligés de s'inventer dans l'exil un monde à eux, en usant de toute sorte d'image que les médias mettent à leur disposition »164(*). En effet les migrants camerounais transforment les sites Web en forum de discussion, à titre individuel ou collectif. C'est ainsi que face à la déclaration final du CODE découlant du colloque organisé les 14 et 15 mai 2005 à Paris165(*), des Camerounais d'ici et d'ailleurs (France, Etats-Unis, Grande-Bretagne, etc.) n'ont pas manqué de réagir.

Voici en dessous quelques réactions individuelles de Camerounais d'ici et de l'étranger par rapport à la publication d'un article*.

Guest_Ngonase Atangana Winoc (Paris)

2005-05-26 00:37

Oui les camerounais de l'étranger ont un rôle à jouer mais seulement tous les camerounais de l'étranger pas un groupe ethnique de 150 personnes qui vont de surcroît se réunir dans une cave de restaurant pour soit disant trouver des solutions à la crise de notre pays .

Le Cameroun nous appartient tous et plusieurs d'entre nous qui sommes aussi à l'étranger ne nous reconnaissons pas dans ces soient disant colloques de la diaspora ! C'est quoi ce machin là ?

Personne n'a jamais interdit aux camerounais de l'étranger de convoquer un colloque national au PAYS et parler DEVANT TOUS LES CAMEROUNAIS.
Le Cameroun n'est pas en guerre et je voudrais que ceux qui sont allé faire cette réunion à Bobigny nous disent quels autres citoyens de notre pays ils ont contactés ?
J'habite à 2 mns de Bobigny, mais je me suis résigné à ne pas m'y rendre bien que j'ai lu leur publicité sur cameroon info net. Ces gens ne représentent que leur tendance et n'ont reçu mandat de personne de nous représenter. Je regrette car le Cameroun est représenté en France par plus de 50 000 personnes et je demande à ces intrus d'indiquer quels votes ils ont reçu pour parler au nom des autres ? 0 moins qu'en français diaspora veuille dire autre chose !!!!!!!

Guest_kmer++ ((Düsseldorf(Reinhen Westfallen)

2005-05-25 18:02

ECOUTEZ MOI MES CHERS FRERE ET SOEURS.
zUM EINEN:
remercions le CNI de nous avoir offert un espace de debat ou chacun a la possibilite de dire ce qu,il veut et ou seul la force des idees prime.
SECUNDO.
Si un space comme celui-ci avait existe aux temps de nos glorieux combattants qui ont ete assasines pour delit d,opinion,sur qu,ils n,auront pas subit la mort subite sans accomplissement de devoir qui a ete le leur.
Et de 3: Remercions la providence de nous avoir offert cette chance a chacun de dire ce qu,il pense sans avoir peu que sa soeur ou sa mere sea kidnappee et viollee le soir.
Bref moi je remercie Cameroon-info.net pour cet espace car dpuis que je bagarre ici il serait malhonnete de ma part de ne pas reconnaitre que beaucoups sont pleins d,idees qui ont completement chagees monressentiment envers eux.Je suis oblige de faire fi des idees preconcues pour avouer que vous posteurs ou postiers jene sais plus comment on dit vous m,avez fait grandir par vos post.
Merci a CIN
merci a vous tous.
vive le Kmer.(je ne veux pas dire camerounais(e) mais Cameroun.)
puissent tous ceux jaloux du Kmer et principalement les Nyge ke nous nourissons perrir ds les flammes de l,enfer invisible

Guest_Sadjo (Bordeaux)

2005-05-24 20:38

Et puis j'aimerai attirer l'attention de mes compatriotes sur l'image que nous nous faisons de ce pays. Pour beaucoup, le Cameroun c'est Douala et Yaoundé. Il y en a qui parle du Cameroun sans avoir même été dans plus de 2 provinces sur les 10. Ayons l'esprit large et surtout une vision vraie de notre propre pays. Autrement dit, le connaître d'abord avant de s'engager à parler de lui.
Chaque jour je rencontre des camerounais qui ont une idée vague de leur pays mais qui sont zélés pour en parler.

Guest_Sadjo (Bordeaux)

2005-05-24 20:33

Encore une fois, le manque de culture politique des Camerounais apparaît au grand jour. Ceux qui ont une vision politique d'avenir doivent créer une sorte de chaîne de solidarité d'abord à l'intérieur du pays et l'extérieur leur apportera du soutien.
Je ne vois pas en quoi cette rencontre peut augurer de belles perspectives. La radicalisation politique n'aura jamais de succès dans notre pays. Sa complexité ne favorise pas une telle démarche.
Nous manquons cruellement de classe moyenne. C'est là le vrai enjeu. La population est majoritairement pauvre et n'a pas accès à l'eau, l'électricité et aux moyens de communication les plus rudimentaires même dans les villes. Je me demande même finalement s'il ne faudrait pas exiger des politiques qu'ils s'occupent des vraies questions de notre quotidien avant de parler d'élections et compagnie qui ne donnent que les résultats connus à l'avance. Ceux qui gouvernenet passent le clair de leur temps à conserver le pouvoir qu'à gouverner. Tant qu'il n'y a pas de classe moyenne, la mayonnaise de la révolution ne prendra pas. Le Camerounais est facilement corruptible. Ceux qui disent oui aujourd'hui diront non le lendemain et vice versa.
Ces débats des camerounais font simplement pitié.

Neutre (Bafoussam)

2005-05-24 20:18

Inutile de venir ici pleurnicher. Si vous avez choisi une nationalité étrangère, assumez. Personne ne vous a obligez à abondonner votre nationalité camerounaise!!!!
Le cameroun a besoin de ses fils patriotes. Pas des prostitués de nationalité.

Bao02 (Mtl)

2005-05-24 18:43

Je crois que le mouvement de la diaspora est absolument nécessaire si on doit avoir un quelconque changement au Kmer. Mais comme nous tous le savons, nous sommes essentiellement extrémistes.

Dans leurs résolutions, les gars ont des choses que réclament tous les Kmers de l'extérieur: La double nationalité par exemple. Le Kmer est l'un des rares pays qui refuse d'en discuter même. Le droit de vote: Quel Kmer de l'étranger ne voudrait pas exercer son droit de vote ?

Les autorités consulaires: De nombreux Kmers se sentent frustrés par leurs ambassades et consulats. Un jour, un autre nous a dit que les ambassades sont d'abord là pour négocier les accords entre pays. Donc, le service aux citoyens peut attendre.

Donc il y a un certain nombre de choses qui sont normales. Mais dès qu'ils croient qu'il suffit de remplacer Popaul pour que la situation s'arrange, je crois qu'ils ont tort. La classe politique camerounaise fonctionne pareil. Chacun veut utiliser le peuple pour arriver au pouvoir ou pour le conserver.

Je m'attendais à ce qu'ils mettent dans leurs résolution la formation politique du peuple. La démocratie n'est pas violence, ou injure, ou slogans, etc. C'est la proposition d'un mode de gestion de la société.

Chaque fois qu'il y a un sujet important pour la vie de la nation, le parti au pouvoir devrait avoir sa position clair, les partis d'opposition doivent avoir leur position claire. On ne doit plus voir le leader de l'opposition demander combien de fils du Nord Ouest sont au gouvernement.

Je crois que tout le monde a besoin d'une formation politique au Kmer. Et pour ceux qui disent aux Kmers de l'extérieur de rentrer, il faut savoir que 90 % des Kmers aujourd'hui sont des candidats à l'émigration. Et celui qui est sorti du pays ne perd pas ses droits de citoyens. Il a même l'avantage d'avoir vu comment les choses se passent ailleurs et a le devoir de venir contribuer à l'enrichissement de sa culture.

Le document a été publié tel que tiré du site Web www.cameroon-info.net, le 22 mai 2006.

Section II : Imbrication du national et de l'international dans le jeu politique au Cameroun

Paragraphe 1 : Interactions entre acteurs politiques internes et externes

A. Explication à travers la vie internationaliste des partis politiques

Relais des partis politiques au plan national, soutien des « forces patriotiques de l'intérieur », membres de la communauté camerounaise politique virtuelle, les Camerounais créent un brouillage des frontières entre le global et le local. En effet, la représentation des partis politiques camerounais à l'étranger rentre dans la stratégie même de la vie internationaliste des partis politiques. Ceci se construit autour de la crise du principe de la territorialité de l'Etat. Si ce n'est une érosion du monopole étatique de l'action internationale, c'est tout au moins une internationalisation des luttes et concurrences partisanes camerounaises.

En fait, la dynamique historique des formations partisanes en quête de pouvoir décèle une dimension internationale et transfrontière comme le montre, dans le cas du Cameroun, l'étude de Seutcheu(1993) sur la transformation des Nations-Unies en tribune de revendication politique interne par l'Union des Populations du Cameroun165(*). Pour A. Chouala, l'international est un champ depuis toujours sollicité et investi, surtout par les partis d'opposition qui influencent largement les politiques étrangères des Etats. Dans un contexte où l'environnement international est fourni aux groupements politiques des moyens et des ressources leur permettant de s'organiser parallèlement, (il est possible de mesurer) l'enjeu de l'action internationale des partis politiques en tant que dynamique et stratégie de mobilisation par ceux-ci des ressources matérielles et symboliques extérieures nécessaires à leur ascension politique interne, en jouant sur une diversité d'arènes : l'arène institutionnelle, l'arène de l'influence et l'arène transnationale.

B. Les sphères locale et globale comme marqueurs du jeu politique camerounais

Le jeu politique national est marqué par une interconnectivité du local et global d'abord dans ce sens que des idéologies politiques nées à l'intérieur, notamment ceux de l'opposition, pour peu qu'elles se rapprochent de celles existant à l'extérieur co-participent à des activités (forums, colloques, manifestations). Ce fut par exemple le cas avec l'organisation du forum international de la diaspora camerounaise dont le thème était « Rôle et place de la diaspora patriotique dans la démocratisation, le changement politique et le développement économique et social du Cameroun ». Le forum en question a connu la participation de plusieurs délégués, intellectuels, activistes politiques venus de France, Grande-Bretagne, et du Cameroun. Le président du MANIDEM, y était présent. Il a également été possible de noter la participation téléphonique d'Abel Eyinga, président de la Nationale (LANA), parti politique d'opposition dont le siège est à Ebolowa. C'est dire que ce qui est fait, par les politiciens à l'extérieur n'est pas inconnu à l'intérieur et ce qui est initié à l'intérieur est souvent soutenu par l'extérieur. En s'informant sur le net, à travers des conversations téléphoniques sur la Radio France Internationale (RFI), la diaspora reste souvent très attentive aux évènements politiques se passant dans le pays : un intérêt à la mesure de la nature et de la portée des enjeux de l'actualité politique et économique dont les ressorts institutionnels structurent et conditionnent l'avenir politique du pays. Il faut également noter que les activités de la diaspora camerounaise n'interpellent pas souvent uniquement les acteurs politiques de la scène locale, mais aussi les citoyens au Cameroun et ceux à l'extérieur, dispersés dans le monde entier qui n'hésitent pas souvent à réagir166(*).

Paragraphe 2 : L'acquisition d'une citoyenneté à distance par les diasporiques de France et de Grande-Bretagne

A. La réinvention ''diasporique'' de la participation politique

La mise sur pied d'une communauté politique camerounaise en France et en Grande-Bretagne contribue également à une exportation de la vie politique nationale. Elle est liée à une manifestation de la loyauté et de l'allégeance des immigrés camerounais à leur nation. Bien qu'étant à distance, ils participent à la vie politique camerounaise. En dépit du fait que les Camerounais de l'extérieur ne soient pas encore autorisés à voter, les entreprises partisanes disposent de sections étrangères qui permettent l' « internationalisation de l'action politique des formations respectives »167(*). Cependant, même si la politique correspond à ce que Dominique Chagnollaud, appelle l' « ensemble des efforts que l'on fait en vue de participer au pouvoir ou d'influer sur la répartition du pouvoir, soit entre les Etats, soit entre divers groupes à l'intérieur d'un même Etat », nous nous demandons quand même si la diaspora camerounaise de France et de Grande-Bretagne, a vraiment gagné en respectabilité. En effet, figures extraterritoriales et cosmopolites, les diasporas camerounaises incarnent désormais des expériences vécues-une réussite virtuelle-du monde transnational. Elle illustre le rêve d'une communauté mondiale d'individus de même nationalité, d'une fidélité à soi, le mythe d'une résistance spirituelle et culturelle à l'uniformisation et d'une solidarité à toute épreuve par delà les différences et les oppositions.

La nationalité, instrument juridique du lien entre les Camerounais de l'extérieur et la vie politique nationale en ce qu'elle a trait aux rapports entre les individus et l'Etat est une question relevant de la citoyenneté. La migration transnationale observe Jacobson168(*), « est entrain de saper continûment le socle traditionnel de l'appartenance à l'Etat-nation, en un mot la citoyenneté ». Les modalités d'acquisition de cette citoyenneté sont imposées par les Camerounais de l'Occident en général, de France et de Grande-Bretagne en particulier, qui ne manquent pas d'imaginer des moyens leur permettant de s'investir dans la vie politique nationale. C'est également dans ce cadre qu'il faut inscrire les dynamiques de transformation de la citoyenneté des Camerounais de la diaspora.

B. l'hypothèse de la citoyenneté à distance

1. Implications d'ordre pratique

Les diverses activités de la diaspora nous ont démontré que nous sommes bel et bien à l'ère de la « fin des territoires ». Pas une fin qui, au sens de Bertrand Badie remet en cause la souveraineté des Etats, mais, plutôt, une fin synonyme de la démystification de l'éloignement par rapport à la terre ou territoire d'origine. C'est plutôt une fin cherchant à démontrer que la distance n'est plus de nos jours, un handicap à l'épanouissement politique des peuples qui désirent participer à l'émancipation ou évolution politique de leur pays. Dans certains pays de l'Occident, il est admis depuis déjà quelques années qu'on est plus citoyen d'un pays, mais plutôt, citoyen du monde et que l'ouverture de l'espace territorial doit se faire sans frein quelconque.

L'apparition d'acteurs, militants et sympathisants politiques camerounais au-delà des frontières territoriales de l'Etat est sans doute l'un des faits les plus marquants du nouveau « modèle multiculturel de la citoyenneté » en cours d'invention et de banalisation avec la remise en cause du lien intime, voire constitutif, entre Etat et citoyenneté. En tout cas le modèle de citoyenneté qui se forge à partir des différents mouvements de diasporiques combine « allégeance à la communauté politique d'origine, solidarités transnationales, réinvestissements particularistes et participation au « charisme collectif distinctif » de la société d'installation.

Contrairement à la « citoyenneté dite de ''proximité'' (...) au lien raffermi mais particularisant qui a lieu à l'échelle subnationale » au sens de B. Badie et Perrineau (2000 :25), la citoyenneté diasporique est une citoyenneté à distance, extra-territoriale. Elle repose sur des formes d'allégeance politique en dehors du territoire d'origine. Cependant, il ne faudrait pas forcément l'assimiler à une déterritorialisation. Car, malgré la crise des référents territoriaux qui a cours dans le monde, les Etats parviennent à un contrôle plus ou moins relatif sur les individus, bien que se situant à l'extérieur de leur domaine territorial, rationae loci.

2. Conséquences théoriques

La redéfinition de la citoyenneté participe des nouvelles formes du politique et du social qui émergent dans le monde. Comme le note Leca cité par Chouala (2004,b), « les nouvelles immigrations » constituent un défi aux traditions démocratiques et notamment à la citoyenneté en tant que modèle artificialiste de l'inclusion : « alors que la formule stato-nationale assurait l'inclusion de l'interne en externalisant l'exclusion, la situation actuelle voit les deux processus s'internaliser ; l'inclusion s'accompagne de (demandes) d'exclusion interne dont les `''Front nationaux'' sont la traduction politique la plus apparente (...). » 169(*). Par ailleurs, la citoyenneté est travaillée par de multiples logiques. Ce qui a assurément cours dans le lien citoyen, c'est le redéploiement de nouvelles formes de participation politique à l'extérieur des frontières nationales. Celles-ci se construisent généralement autour d'un imaginaire collectif et individuel façonné par les cultures politiques d'origine et l'environnement ambiant.

Conçue dans la perceptive classique comme l'ensemble des droits et devoirs que confère à l'individu son rattachement juridique à la population constitutive d'un Etat, la citoyenneté fut naguère «une prérogative des seuls nationaux internes ou « insiders » (Chouala, 2004). Dans cette posture spécifique, la citoyenneté s'exprime dans le cadre de l'Etat-nation, d'où la forte relation entre citoyenneté et nationalité. Seul le national est citoyen. Néanmoins, à un moment où les émigrés camerounais ou « outsiders »170(*), par le biais des migrations d'installation, deviennent partie intégrante des corps nationaux des Etats d'accueil tout en continuant d'être reconnus comme nationaux ou citoyens camerounais, l'hypothèse de la nouvelle citoyenneté, déjà soulevée par Chouala171(*) et d'autres auteurs, s'applique pertinemment aux Camerounais résidant en France et Grande-Bretagne.

CONCLUSION GENERALE

Apparaissant comme des communautés cosmopolites c'est-à-dire qui vivent dans l'entre-deux, ou ''l'interstice'', entre inclusion et exclusion, les Camerounais de la diaspora sont des individus dont les expériences existentielles finissent toujours par donner lieu à une synchronisation, en d'autres termes la combinaison des lieux de provenance et des lieux de fixation. C'est comme le note A. Chouala l' « incorporation des temporalités et des charismes collectifs distinctifs d'origine sur les temps sociaux et les réalités anthropologiques des sociétés d'accueil ». Constituant l'une des trames profondes de la reproduction extra-territoriale de l'Etat, les comportements socio-politiques des diasporas camerounaises d'Occident ne sont pas impact. Bref, il ressort de ce travail un double résultat, d'abord sur le plan empirique et ensuite sur le plan théorique.

L'organisation des Camerounais de l'Occident par rapport à la vie politique nationale a commencé avant l'indépendance du Cameroun avec non seulement les actions clandestines des partis nationalistes camerounais comme l'UPC et les activités de l'Union nationale des étudiants du Kamerun (UNEK) dans les années 1950-1970, initiées par les membres de ceux-ci dans le but de soutenir la lutte pour l'indépendance. Par ailleurs, les années 1990 caractérisées par la démocratisation du régime, la mondialisation des échanges, le développement de la communication de masse avec les images pouvant transiter d'un bout à l'autre de la planète a profité aux Camerounais de la diaspora qui ont réussi à déployer de nouveaux modes de participation politique, parmi lesquels la participation politique virtuelle.

Celle-ci peut se définir comme la capacité qu'ont les membres des diasporas camerounaises de France et de Grande-Bretagne à user d'Internet pour s'insérer dans la vie politique nationale. En effet, la participation politique des Camerounais de la diaspora s'est également concrétisée au sein des partis politiques camerounais tels que le RDPC, parti de la majorité présidentielle et le SDF, principal parti de l'opposition ; de même que dans des mouvements et associations politiques aux tendances idéologiques différenciées, contribuant à l'épanouissement socio-politique des Camerounais de la diaspora. Ces derniers s'intègrent aussi dans la vie politique par des voies de la reconnaissance étatique.

Influençant alors de manière plus ou moins considérable la vie politique nationale qui est dès lors transnationalisée, les diasporas camerounaises apparaissent à la fois comme des acteurs à part entière et entièrement à part de la vie politique leur terre patrie.

Sur le plan théorique, nous sortons de cette étude avec un concept de la citoyenneté enrichi de sens et de nouvelles significations. La construction du concept de la ''citoyenneté à distance'' découle directement des comportements socio-politiques des diasporas camerounaises. Ces comportements socio-politiques renvoient à l'implication active des diasporas dans la vie politique nationale donneront sûrement droit, dans les prochains jours aux débats sur la double nationalité.

BIBLIOGRAPHIE ET REFERENCES

I. Manuels et ouvrages généraux

Aubin, Emmanuel (2003), L'essentiel de l'introduction à la vie politique, Paris, Gualino éditeur

Braud, Philippe (2004), Sociologie politique, Paris, L.G.D.J.

Chagnollaud, Dominique (1996), Introduction à la politique, Paris, Seuil.

Ethier, Diane (2004), Introduction aux relations internationales, Montréal, Presses universitaires de Montréal.

Fustel de Coulanges D. (1985), La cité antique, L' Harmattan.

Huntington, Samuel (1991), Troisième vague, Les démocratisations de la fin du XX ème siècle, Norman, Oklaoma press.

Le Pors, Anicet (1999), La citoyenneté, Paris, PUF.

Merle, Marcel (1982), Sociologie des Relations Internationales, Paris, Dalloz

Schnapper, Dominique (2000), Qu'est-ce que la citoyenneté ? Paris, Gallimard.  

II. Ouvrages de méthodologie

Béitone et al. (2002), Sciences sociales, 3ème édition, Paris, Dalloz.

Dreyfus, Simone et Nicolas-Vullierme Laurence (2000), La Thèse de Doctorat et le Mémoire. Etude méthodologique (sciences juridiques et politiques), 3ème édition. Paris, Editions Cujas.

Finnemore, Martha (1996), National Interests in international Society, Ithaca, University press.

Fragnière, Jean-Pierre (1986), Comment réussir un mémoire, Paris, Dunod

Grawitz, Madeleine (2001), Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz.

Quivy, Raymond, et Van Campenhoudt Luc (1995), Manuel de recherche en sciences sociales, Paris, Dunod.

Pettnam, Ralph (2000), Commonsense Constructivism, New-York/Londres, M.E. Sharpe

Roche, Jean-Jacques, Théories des relations internationales, Paris, Montchrestien.

III. Ouvrages spécialisés

Arjun Appadurai (2003), Modernity at large : cultural dimensions of globalisation, Minnesota, University of Minnesota Press. 

Abwa, Daniel (2005), Woungly-Massaga alias Commandant Kissamba, »Cameroun : ma part de vérité' Eds Minsi.

Badie, Bertrand (1995), La Fin des territoires. Essai sur le désordre international et sur l'utilité sociale du respect, Paris, Fayard.

Bayart, Jean-François (1985), L'Etat au Cameroun, Paris, FNSP.

Borne-Benayoun, Chantal et Schnapper, Dominique (2006), Diasporas et Nations, Paris, Odile Jacob.

Braudel, Fernand (1966), La Méditerranée et le monde méditerranéen à l'époque de Philippe I, vol.I ; Paris, Armand Colin.

Cantégrit, Jean-Pierre (1995), Les Français de l'étranger, Paris, Economica.

Claude, Inis L. (1962), Power and International relations, New-York, Random House.

Dahl, Robert (1998), De La Démocratie, New Haven, Yale University Press.

Kom, David (2001), L'Emancipation du Cameroun, un upéciste témoigne. Paris, L'Harmattan.

Dufoix, Stéphane (2003), Les diasporas, Paris, P.U.F.

Epifaino San Juan (1998), From exile to Diaspora: version of the Filipinos experience in the United States, Westview press.

Hagan, J. (1993), Political opposition and foreign policy in comparative perspective, Boulder, Col. Lynne Rienner Publishers.

Hyung-Chan Kim (1977), The Korean Diaspora, Santa Barbara, American Bibliographical center.

Juteau Tousse (2004), Diaspora, Développement et Rayonnement international de l'Etat d'origine : cas de la Diaspora camerounaise aux Etats-Unis. Mémoire de DESS en diplomatie, IRIC. 

Le Message du Renouveau. Discours et interviews du président de la République. Novembre 1982- Novembre 1983. Editions SOPECAM.

Muller, Pierre (1990), Les Politiques publiques, Paris, PUF.

Nkwengué, Pierre (2005), L'UNEK ou La Contribution d'Africains à l'Emancipation du Continent, Paris, L'Harmattan.

Onuf, Nicholas (1989), World of our Making: Rules and Rule in Social Theory and International Relations, Columbia, University of South Carolina press.

Quantin, Patrick (2004), (dir.), Voter en Afrique, Paris, L'Harmattan.

Richard Joseph (1986), Le Mouvement nationaliste au Cameroun, Paris, Karthala.

Sindjoun, Luc (2002), Sociologie des relations internationales africaines, Paris, Karthala.

(2004), Comment peut-on être opposant au Cameroun. Politique parlementaire et politique autoritaire, Dakar, Codesria.

(2004), Etat, individus et réseaux dans les migrations africaines, Paris, Karthala.

Sophie Bouly de Lesdain (1999), Femmes camerounaises en région parisienne. Trajectoires

migratoires et réseaux d'approvisionnement, Paris, L'Harmattan.

T. Le Vine Victor (1984), Le Cameroun : du Mandat à l'Indépendance, Paris, Présence africaine.

Weber, Max (1919), Le Savant et le Politique, Paris, Plon.

Wonyu, Eugène (1985), CAMEROUN : De l'UPC à L'UC : témoignage à l'aube de

L'Indépendance (1953-1961), Paris, L'Harmattan.

Yamga-Tientcheu, Paul (1999), le Social Democratic Front se meurt-il ? Le mal des oppositions africaines :exemple du Cameroun, Paris, Biblieurope.

Zang-Atangana, Jean-Marie (1989), Les forces politiques au Cameroun réunifié (Tome3), Paris, L'Harmattan.

IV. Articles

Awoumou, Damien (2005), « Election présidentielle du Gabon : comme d'habitude ? » Enjeux, n°25, Octobre - Décembre 2005, PP. 41-42.

Bahoken, Françoise (2005), « De la présence camerounaise en France à « l'option diaspora » in Enjeux, n°24, juilet-septembre 2005, PP. 1-15

Chukwu-Emeka Chikezie (2002), « La diaspora africaine : panafricanisme ou solidarité villageoise ? », document présenté au troisième forum pour le développement de l'Afrique (ADFIII),''définir les priorités de l'intégration régionale'' Addis-Abeba : 3-8 mars 2002.

Lacoste (Yves),« Géopolitique des diasporas » in Hérodote, n°53, 2ème Trimestre 1989, PP.3-12.

Menthong, Hélène- Laure (1998), « Vote et communautarisme au Cameroun : `un vote de coeur, de sang et de raison' » in Politique Africaine, n°69, PP.40-52

Nkene, Blaise (2001), « Les étrangers, acteurs de la vie politique camerounaise :l'expérience des immigrés nigérians dans la ville de Douala » in Polis, Vol.8, numéro spécial. PP.1-32

(2003), « Les immigrés nigérians à Douala : problèmes et stratégies d'insertion sociale des étrangers en milieu urbain » in Afrique et Développement, Vol. XXVIII, n°3 et 4, PP. 142-167.

Tambiah, Stanley J. (2000), «Transnational movements, Diaspora and Multiple Modernities. International Movements of people and their Implications» Daedalus

Tchouassi, Gérard (2005), « Argent de la diaspora et financement du développement des infrastructures urbaines de base en Afrique », Communication à la 11ème Assemblée générale du CODESRIA sur le Thème « Repenser le développement africain : au-delà de l'impasse, les alternatives », Maputo, Mozambique, 6-10 décembre 2005.

Vertovec, Steven (1999), «Three meanings of `diaspora', exemplified among South Asian religions», Diaspora 7(2), University of Oxford.

Wendt, Alexander (1992), «Anarchy is What States Make of It: The Social Construction of Power Politics», InternationalOrganisation (46, 2), PP.391-425

V. Dictionnaires spécialisés

Boniface, Pascal (1996), Dictionnaire des relations internationales, Paris, Hâtier, PP. 103-109.

Debbasch, Charles et al. (2001), Lexique de politique, Paris, Dalloz.

Hermet, Guy et al. (2001) Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques. Paris, Armand Colin, Dalloz.

VI. Quelques sites Web consultés

http://www.rdpc.org

http : //www.rdpc.toulouse.fr

http : // www.cameroon-info.net

http://www.ici.cemac.com

http:// www.cameroun21.com

http:// www.sdf.party.org

http://www.cameroonews.com

http:// www.cameroon link.com

http://www.google.com

http://www.cambs.de

http://www.cameroonimage.org

http://www.djangui.com

http://www.webzinemaker.net

http://www.bonaberi.com

www.lanouvelleexpression.net

www.codesria.org

http://www.agelfire.com

ANNEXES

Pour la collecte des données devant servir à cette étude, des entretiens nous ont été accordés par des acteurs politiques internes et ceux de la diaspora camerounaise d'Occident qui nous ont fourni des informations à partir de liens téléphoniques et Internet. Cependant, il faut noter que de tous les individus que nous avons pu contacter, seulement le tiers nous a apporté des informations utiles tandis que les autres nous ont donné de ''faux rendez-vous''. D'autres également ont préféré garder l'anonymat.

ENTRETIENS AYANT CONTRIBUE A L'ELABORATION DE

CE TRAVAIL RECHERCHE

Entretien n° 1 : Avec le Doyen Abel EYINGA

Lieu : Ebolowa (domicile)

Date : 28 avril 2006

Objet : Données sur l'UNEK et les mouvements et associations politiques camerounaises à l'étranger.

Questions posées

§ Pouvez-vous nous parler des organisations politiques camerounaises en France dans les années 1960, 1970 ?

§ Que pensez-vous de l'UNEK ?

§ Qu'est ce qui vous a conduit à adhérer à l'Organisation ?

§ Quels étaient ses objectifs et les rapports avec les autres formations politiques camerounaises présentes en Occident ces années-là ?

§ Quels sont devenus vos rapports avec le Gouvernement camerounais après le départ de l'administration coloniale ?

Sur la diaspora actuelle

§ On vous a souvent vu envoyer les communications aux forums organisés par les membres du CODE, êtes-vous un membre de ce mouvement ?

§ Si non, quels sont vos rapports avec eux ?

§ En tant qu'ancien membre de la diaspora, comment voyez-vous la participation des Camerounais de France et de Grande Bretagne aujourd'hui ?

Entretien N° 2 : Communication par e-mail avec M. TENE SOP membre de la

diaspora camerounaise résident a Hambourg (Allemagne)

Date : 28 Avril 2006

- Lien téléphonique

- Puis par e-mail

Objet : Connaissance des activités et textes du CODE

Q1. Que représente le CODE ?

Q2. Quels sont ses objectifs ?

Q3. Quelles sont les motivations de ses membres ?

Q4. Comment se structure t-il ?

Q5. Pouvez-vous estimer le nombre de membres ?

De l'ensemble des échanges avec l'enquêté, nous avons obtenu un ensemble de documents portant sur les statuts et la charte du CODE.

Entretien N° 3  : Entretien avec Mme SALE, membre du comité central du

R.D.P.C

Date : 16 Mai 2006

Lieu : NSAM (Yaoundé) à son domicile

Objet : Connaissances des structures du R.D.P.C en France et en Grande-Bretagne

Q1. Existe-t-il des représentations étrangères du parti ?

Q2. Comment se structurent-elles ?

Q3. Quelles sont les activités menées par ses membres ?

Q4. Quelles relations entretenez-vous avec les Camerounais de la diaspora, membres du parti ?

Q.5 Est-il possible d'évaluer à peu près le nombre de membres ?

Mme SALE, nous a mise en contact avec quelques membres du parti qui nous ont guidée pendant notre recherche.

_________________________________

TABLES DES MATIERES

- Dédicaces.............................................................................. P. 1

- Remerciements....................................................................... P. 2

- Résumé / Abstract................................................................... P. 3

- Liste des signes et abréviations..................................................... P. 4

- Tableaux - Cartes et Photos....................................................... P. 6

INTRODUCTION GENERALE.................................................. P. 7

A. Contexte général de l'étude.................................................................... P. 8

B. Clarification conceptuelle............................................................... P. 15

.Diaspora................................................................................ P. 15

.Participation politique............................................................... P. 18

.Citoyenneté............................................................................. P. 19

C. Revue de la littérature..................................................................... P.21

D. Problématique.............................................................................. P. 24

E. Hypothèses.................................................................................. P. 25

F. Approches théoriques...................................................................... P. 25

G.Techniques de recherche............................................................... P. 29

H. Annonce et justification du plan......................................................... P. 30

CHAPITRE I : MALENTENDU HISTORIQUE ENTRE L'ETAT ET LES

DIASPORAS CAMEROUNAISES DE L'OCCIDENT......... P. 31

SECTION I : Un désaccord lié au processus de décolonisation......................... P. 33

Paragraphe 1 : Les diasporas camerounaises comme terre d'élection de

l'opposition au pouvoir colonial................................................. P. 35

A. Diasporas camerounaises et mouvement nationaliste au Cameroun............... P. 35

1. La constitution de la diaspora camerounaise d'Occident.............. P. 35

2. L'UNEK ou NUKS......................................................... P. 36

B. L'orientation nationaliste de l'UNEK.................................................. P. 39

1. Les objectifs de l'UNEK.................................................. P. 40

2. Les actions de l'UNEK................................................ P. 41

Paragraphe 2 : Les diasporas camerounaises comme terre du régime de l'Opposition... P. 46

A. La dimension politique de la migration camerounaise comme facteur explicatif... P. 46

1. L'exilé, l'étudiant et le contestataire comme caractéristique de la

présence camerounaise à l'étranger.................................... P. 46

2. La place du nationalisme........................................................... P. 47

B. Quelques illustres dissidents de la diaspora camerounaise de l'Occident......... P. 47

1. Mongo Beti........................................................................... P. 47

2. Brice Nitcheu........................................................................ P. 48

Section II: La traduction législative du malentendu entre l'Etat et les

diasporas camerounaises de l'Occident............ ............... .......... P. 49

Paragraphe 1 : L'absence de reconnaissance du droit de vote aux Camerounais de

l'étranger..................................................................... P. 50

A. Le droit de vote comme exercice de la citoyenneté.............................. P. 50

1. Le statut du citoyen et la déclaration universelle des droits de

l'homme (1948).......................................................... P. 51

2.Les implications................................................................. P. 52

B. La spécificité camerounaise ............................................................ P. 52

Paragraphe 2 : L'absence de bi-nationalité................................................... P. 53

A. Contexte de création de la Loi portant sur le Code de la

nationalité camerounaise........................................................... P.53

B. Le Code de la nationalité camerounaise proprement dit...............................P. 54

CHAPITRE II : LA CONSOLIDATION DE LA CITOYENNETE A DISTANCE DES CAMEROUNAIS DE France ET DE Grande-Bretagne.............................. P.57

Section I : L'organisation des diasporas camerounaises de France et de

Grande-Bretagne par rapport à la vie politique nationale............................ P.60

Paragraphe 1 : L'intégration des Camerounais de l'Etranger dans la vie politique par

les partis politiques ............................................................................ P. 61

A. Le R.D.P.C en France et en Grande-Bretagne .............................. P. 61

1. L'organisation du parti en France et en Grande-Bretagne............... .. P. 62

2. Les modes d'action du parti à l'étranger................................. P. 65

B. Le S.D.F en terre étrangère..................................... ............ P. 68

1. L'implantation du parti en France et en Grande-Bretagne... P. 68

2. Les modes d'action du SDF.......................................... P. 70

Paragraphe 2 : Mouvements et associations politiques de la diaspora camerounaise de

l'Occident................................................................... P. 74

A. Le CODE............................................................ P. 74

1. Idéologie du CODE.............................................. P. 75

2. La stratégie politique du CODE........................... P. 76

B. l'ASBL.................................................................. P. 79

1. Ligne d'action....................................................... P. 79

2. Activités............................................................ P. 79

Section II : Les modalités étatiques d'intégration des diasporas camerounaises

dans le jeu politique national.................................................. P. 83

Paragraphe 1 : La reconnaissance étatique des Camerounais de la diaspora et

l'assignation de missions de représentation........................... P. 84

A. Les diasporas camerounaises comme '' porteurs'' de l'identité

de l'Etat............................................................... P. 84

B. L'assignation de missions de représentation au sein des

institutions nationales ................................................ P. 85

Paragraphe 2 : La reconnaissance des élites de la diaspora camerounaise......... P. 86

A. Yannick Noah...................................................... P. 86

B. Manu Dibango............................................................ P. 86

CHAPITRE III : LES DIASPORAS CAMEROUNAISES, ACTEURS DE LA VIE

POLITIQUE NATIONALE.......................................... P. 89

Section I : Les scènes politiques nationales et locales comme réceptacles des

engagements politiques des diasporas camerounaises militantes... P. 90

Paragraphe 1 : Les Camerounais de la diaspora comme acteurs de la société civile

camerounaise transnationalisée........................ .................. P. 91

A. Les organisations ''diasporiques'' comme groupes de pression... ... P. 91

B. L'influence des Camerounais de la diaspora sur l'élaboration des politiques

publiques................................................................................ P. 94

Paragraphe 2 : Les Camerounais de la diaspora, acteurs à part entière et entièrement

à part de la vie politique nationale....................................... P. 95

A. Les diasporas camerounaises comme acteurs à part entière...................... P. 95

1. Les modalités d'incorporation idéologique et de marquage de la vie

politique nationale....................................................................... P. 95

2. Les modalités d'incorporation virtuelle des diasporas dans le débat

politique interne..................................................................... P. 96

B. Les diasporas camerounaises comme acteurs entièrement à part............ P. 98

1. Originalité des moyens déployés........................... P. 99

2. Affrontements virtuels directs................................ P. 99

Section II : Imbrication du national et de l'international dans le jeu politique au Cameroun........................................................................................ P. 103

Paragraphe 1 : Interactions permanentes entre acteurs externes et internes......... P. 103

A. Explication à travers la vie internationaliste des partis politiques....... P. 103

B. Le local et le global comme cadre du jeu politique camerounais......... P. 104

Paragraphe 2 : L'acquisition d'une citoyenneté à distance par les diasporas

camerounaises............................................................... P. 105

A. La réinvention diasporique de la participation politique............... P. 105

B. L'hypothèse de la citoyenneté à distance................................... P. 106

1. Implications d'ordre pratique........................................ P. 106

2. Conséquences théoriques............................................ P. 107

CONCLUSION GENERALE................................................................ P. 108

BIBLIOGRAPHIE ET REFERENCES................................................... P. 111

ANNEXES....................................................................................... P. 118

________________________________

* 1 Mommar Coumba et Mamadou Diouf cités par Blaise Nkene (2001), « Les étrangers, acteurs de la vie politique camerounaise : l'expérience des immigrés nigérians dans la ville de Douala » in Polis, Vol.8 numéro spécial, P.2

* 2 Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper (2006), Diasporas et Nations, Paris, Odile Jacob, P.7

* 3F. Bahoken, « De la présence camerounaise en France à ``l'option diaspora'' », in Enjeux, n°24 (Juillet-Septembre 2005), PP. 9-10

* 4 Sophie Bouly de Lesdain (1999), Femmes camerounaises en région parisienne. Trajectoires migratoires et réseaux d'approvisionnement, Paris, L'Harmattan, P. 16

* 5 Zaki Laïdi (1998 : 9), cité par A. Chouala, « L'installation des Camerounais au Gabon et Guinée-Equatoriale », in Luc Sindjoun (2004) (dir.), Etat, individus et réseaux dans les migrations africaines, Paris, Karthala, P.105

* 6 Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper, op.cit., P.8

* 7 A. Chouala (2004, a), « L'installation des Camerounais au Gabon et en Guinée-Equatoriale : les dynamiques originales d'exportation de l'Etat d'origine », in Luc Sindjoun, Etat, individus et réseaux dans les migrations africaines, Paris, Karthala, P. 114

* 8 Sophie Bouly de Lesdain, op.cit., P. 12

* 9 fr.wikipedia.org ./wiki/cmr.

* 10 Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper, op.cit., P. 9

* 11Ibid., P.13

* 12 Ibid.

* 13 Chukwu-Emeka Chikezie, « La diaspora africaine : panafricanisme ou solidarité villageoise ? », document présenté au troisième forum pour le développement de l'Afrique (ADFIII),''définir les priorités de l'intégration régionale'' Addis-Abeba : 3-8 mars 2002.

* 14 Tarrius (1995 :22), cité par Chouala, op.cit.

* 15 Fernand Braudel (1966), La Méditerranée et le monde méditerranéen à l'époque de Philippe I, Vol. I, Paris, Armand Colin, P. 43

* 16 Chantal Bordes-Benayoun et Dominique Schnapper, op.cit., P.12

* 17 Selon Stéphane Dufoix (2003), Les Diasporas, Paris, P.U.F., le mot est devenu « passe-partout ; il fait partie du langage courant des journalistes de presse-écrite, de radio et de télévision ; du vocabulaire des représentants de communautés nationales ou religieuses comme des autorités étatiques à ne pas perdre le contact avec des descendants d'anciens émigrés ; de l'arsenal conceptuel des chercheurs en questions migratoires ».

* 18 S. Dufoix, op. cit. PP. 3-4

* 19 P. Boniface (dir.), Dictionnaire des relations internationales, Paris, Hâtier, 1996, P.103

* 20 G. Scheffer (1986), Diasporas in international politics, cité par Françoise Bahoken (2005), P.8

* 21 Steven Vertovec (1999), « Three meanings of `diaspora', exemplified among South Asian religions», University of Oxford, PP.1-2

* 22 Ibid. PP. 2 - 8

* 23 G. Hermet et al, (2001)., Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques, Paris, Dalloz, Armand Colin, P. 216

* 24 P. Braud (2004)., Sociologie politique,7ème édition, Paris, L.G.D.J., P. 363

* 25 En science politique, le vote est reconnue comme la modalité essentielle de participation politique. Mais dans ce travail, il sera question de dépasser cette approche et voir d'autres modes d'influence sur la vie politique.

* 26 O. Ihl, cité par Hélène- Laure Menthong (1998), « Vote et communautarisme au Cameroun : `un vote de coeur, de sang et de raison' » in Politique Africaine, n°69, P. 40

* 27 Cité par Guy Hermet et al., opt.cit., P. 216

* 28 Braud, op. cit., P. 363

* 29 Dominique Schnapper (2000), Qu'est-ce que la citoyenneté ? , Paris, Gallimard, P.10

* 30 C. Debbasch (2001), Lexique de politique, Paris, Dalloz, P. 69

* 31 Braud, op.cit., P. 675

* 32 Dominique Schnapper (2000), op.cit., PP. 10-11

* 33 Ibid., P. 11

* 34 D. Fustel de Coulanges (1985), La cité antique, Hachette, PP. 226-230

* 35 Ces catégories sont inspirées du célèbre discours de Périclès et ont été confirmées par les enquêtes de Janovitz.

* 36 G. Hermet et al, op.cit., PP. 48-49

* 37 Hyung-Chan Kim (1977), The Korean Diaspora, Santa Barbara, American Bibliographical center.

* 38 Richard Joseph (1986), Le mouvement nationaliste au Cameroun, Paris, Karthala.

* 39 Epifaino San Juan (1998), From exile to Diaspora: version of the Filipinos experience in the United States, Westview press, U.S.A.

* 40 Stéphane Dufoix, op.cit.

* 41 Arjun Appadurai (2003), Modernity at large :cultural dimensions of globalisation, Minnesota, University of Minnesota Press.

* 42 Sophie Bouly de Lesdain (1999), Femmes camerounaises en région parisienne. Trajectoires migratoires et réseaux d'approvisionnement, Paris, L'Harmattan.

* 43 Juteau Tousse (2004), Diaspora, Développement et rayonnement de l'Etat d'origine : cas de la diaspora camerounaise aux Etats-Unis. Mémoire de DESS EN Diplomatie à l'IRIC.

* 44 Chantal Bordes-Benayoun, Dominique Schnapper (2006), Diasporas et Nations, Paris, Odile Jacob.

* 45 Luc Sindjoun, Sociologie des relations internationales africaines, Paris, Karthala, P. 44

* 46 Max Weber (1959 :100), cité par Luc Sindjoun (2002), op.cit., P. 55

* 47 Brubaker (1997), cité par Luc Sindjoun (2002), op.cit., PP. 55-56

* 48 Violence invisible, masquée, liée à la mise en oeuvre d'un système de domination (Bourdieu) ; atteinte dépréciative à l'estime de soi, vécue comme source de souffrance sur le plan identitaire (Braud).

* 49 Jean-Jacques Roche, Théories des relations internationales, Paris, Montchrestien, P. 53

* 50 Inis L. Claude (1962), Power and International relations, New-York, Random House.

* 51 Norbert Elias (1991), La société des individus, Paris, Fayard, PP. 70-71

* 52 Ibid., P. 216

* 53 Guy Hermet et al., op.cit., P. 138

* 54 Nicholas Onuf (1989), World of our Making : Rules and Rule in Social Theory and International Relations, Columbia, University of South Carolina press; Alexander Wendt (1992), «Anarchy is What States Make of It: The Social Construction of Power Politics», International Organisation (46,2), PP. 391-425

* 55 Diane Ethier (2004), Introduction aux relations internationales, Montréal, Presses universitaires de Montréal, P. 59

* 56 Peter Katzenstein, Robert Keohane et Stephen Krasner, « International Organisation and the Study of World Politics », in Internationational Organisation n°52, PP. 943-969

* 57 Diane Ethier, op.cit.

* 58 Martha Finnemore (1996), National Interests in international Society, Ithaca, University press.

* 59 Ralph Pettnam (2000), Commonsense Constructivism, New-York/Londres, M.E. Sharpe.

* 60 Voir Katzenstein et al., op.cit.

* 61 Jean-François Bayart (1985), L'Etat au Cameroun, Paris, FNSP, P. 109

* 62 « Le Cameroun et sa diaspora : un lien à revitaliser » in Conjoncturis, n°06-juin 2004, P.4

* 63 Sur les réformes politiques et constitutionnelles au Cameroun, lire V. T. Le Vine (1984), Le Cameroun : du mandat à l'indépendance, Paris, Présence africaine, PP. 174-178

* 64 Victor (1984), op.cit., P. 178

* 65 Si pour les uns l'autonomie ou l'indépendance devait s'obtenir après avoir atteint un certain nombre d'objectifs, pour les autres, elles devaient s'octroyer rapidement, vue l'assistance des populations aux Grandes Puissances pendant la Deuxième Guerre Mondiale.

* 66 Sur le mandat, lire Victor T. Le Vine (1984), op.cit.

* 67 Accord de tutelle pour le territoire du Cameroun sous administration française, O.N.U., Doc. T/8, 25 mars 1947, P. 39

* 68 Daniel Abwa (2005), Woungly-Massaga alias Commandant Kissamba, » Cameroun : ma part de vérité'' Eds Minsi, PP. 42-44

70 Ibid.

* 69 P. Nkwengué (2005), L'UNEK ou La Contribution d'Africains à l'Emancipation du Continent, Paris, L'Harmattan, P. 41

* 70 D'après un témoin de l'histoire, Pierre Nkwengué, enseignant retraité à Douala.

* 71 Pierre Nkwengué, op.cit., P. 42

* 72 Pierre Nkwengué, op.cit., P.43

* 73 Lire J-M. Zang-Atangana (1989), Les forces politiques au Cameroun (tome3), Paris, L'Harmattan, P.178

* 74 Ibid.

* 75 Il faut noter que l'UNEK était dirigée par les syndicalistes tandis que le REC était dirigé par les corporatistes.

* 76 P. Nkwengué, op.cit.

* 77 Stéphane Dufoix, op.cit., P. 106

* 78 Expression utilisée par les nationalistes eux-mêmes pour qualifier le régime dérivé de la colonisation.

* 79 Benedict Anderson, « Long-distance nationalism» in B. Anderson (1998), The Spectre of Comparisons, Londres, Verso, PP. 58-74

* 80 Stéphane Dufoix, op.cit., P.107

* 81 Cité par Stéphane Dufoix, op.cit., P.107

* 82 A sa création, l'organisation eut d'abord pour but principal, la défense des intérêts des étudiants camerounais à l'étranger. C'est dire que son rôle fut d'abord syndical.

* 83 Article 3 de la Charte de l'UNEK.

* 84 P. Nkwengué, op.cit. , P. 90

* 85 Ibid.

* 86 Ce fut le cas par exemple pour Woungly-Massaga, ancien président de l'UNEK, et ancien étudiant camerounais de France qui vit, la politique d'abord, comme « une passion du pays et du peuple ».

* 87 Daniel Abwa, op.cit., P. 29

* 88Daniel Abwa, op.cit.

* 89 Ancien étudiant camerounais en France et membre de l'UNEK, est aujourd'hui président d'un parti politique camerounais qui a son siège à Ebolowa.

* 90 Ibid., P. 37

* 91 Voir les mouvements de grèves des années 1990.

* 92 Le Messager n°528 du 25 juillet 1996.

* 93 Lionel Manga, « Les rapports entre Mongo Beti et le Cameroun ou l'impossible connivence », in Ruptures, nouvelle série, n°4-2002, Karthala, PP.174-175

* 94 Ibid.

* 95 Mongo Beti (1984), Main basse sur le Cameroun, Rouen, Editions Peuples noirs.

* 96 Zacharie Ngniman (1993), Cameroun : La Démocratie emballée, Yaoundé, Eds Clé, PP. 90-91

* 97 Voir Mutations du 10 mars 2004.

* 98 Contexte socio-historique décrit précédemment, qui a entouré l'accession à l'indépendance, l'Etat post-indépendance, et la transition démocratique.

* 99 Voir les différentes dimensions de la citoyenneté données dans notre introduction.

* 100 Robert Dahl (1998), De La Démocratie, New Haven, Yale University Press, PP. 37

* 101 Ibid.

* 102 P. Braud, op.cit., PP. 365

* 103 Dominique Chagnollaud (1996), Introduction à la politique, Paris, Seuil, P. 41

* 104 Voir préambule de la Constitution camerounaise, PP. 1-4

* 105 Dominique Schnapper (2006), op.cit., P. 33

* 106G. Tchouassi, (2005), « Argent de la diaspora et financement du développement des infrastructures urbaines de base en Afrique », Communication à la 11ème Assemblée générale du CODESRIA sur le Thème « Repenser le développement africain : au-delà de l'impasse, les alternatives », Maputo, Mozambique, 6-10 décembre 2005.

* 107 Nous y reviendrons plus loin dans notre argumentation.

* 108Stéphane Dufoix, op.cit.

* 109 Les modalités de perte de la nationalité camerounaise sont énoncées dans les Articles31 et 32 de la loi en question.

* 110 Dominique Schnapper (2006), op.cit., P. 37

* 111 Arjun Appadurai, op.cit., P. 7

* 112 Appadurai, op. cit., P. 9

* 113 P. Braud, op.cit., PP. 429-430

* 114 P. Braud, op.cit., P. 433

* 115 J-François Bayart (1985), op.cit., P. 136

* 116 Ibid,. P.129 

* 117 Article11, des statuts du parti.

* 118 Voir article 12 des statuts du parti.

* 119 Articles 15 des statuts du RDPC.

* 120 J. Hagan (1993), Political opposition and foreign policy in comparative perspective, Boulder, Col. Lynne Rienner Publishers.

* 121 B. Badie (1995), La fin des territoires. Essai sur le désordre international et l'utilité sociale du respect, Paris, Fayard.

* 122 A. Chouala (2004,b), « L'action internationale de l'opposition : la transnationalisation de la vie internationale camerounaise » in Luc Sindjoun (2004) (dir.), Comment peut-on être opposant au Cameroun ? Politique parlementaire et politique autoritaire, Dakar, Codesria.

* 123 www.cameroun21.com

* 124 Cameroon Tribune, éditorial du 27 août 2004.

* 125 www. ici.cemac.com

* 126 Paul Yamga-Tientcheu, Le SDF se meurt-il ? Le mal des oppositions africaines : cas du Cameroun, P. 36

* 127 Ancien président du SDF en France, Paul Yamga - Tientcheu est aujourd'hui, président d'un mouvement politique en France, dénommé Action citoyenne.

* 128 P. Yamga, op.cit., PP. 37-38

* 129 Ibid.

* 130 En France par exemple, la première conférence provinciale avait réuni 9 cellules : Grenoble - Lille -Marseille - Paris centre - Paris est - Paris sud - Paris nord - Rouen - Toulouse.

* 131 Les rapports officiels présentaient le SDF comme un groupuscule d'anglophones hostiles aux intérêts français et qui tentent d'organiser une partition du Cameroun aux fins de rattacher les provinces du Nord-ouest et Sud-ouest au Nigeria.

* 132 Paul Yamga-Tientcheu, op.cit., PP. 45-46

* 133 Le Messager du 21 septembre 2004.

* 134 AGA, correspondance particulière de Londres, du 21 septembre 2004.

* 135 Charte du CODE.

* 136 D'après une interview réalisée par Modeste Bala (ici.cemac.com) le 13 mai 2005.

* 137 Jean-Marie Abogso est le président et porte -parole de la Diaspora camerounaise pour la solidarité. Il est un Camerounais installé en Belgique.

* 138 Cette interview a été publiée tel que tiré du site Web le 10 mai 2006.

* 139 Le rassemblement de Bruxelles concernait en effet la rencontre des membres du CODE au siège de l'Union européenne en Belgique à l'occasion de la 57ème journée internationale des droits de l'homme.

* 140 S. Dufoix, op.cit., P. 94

* 141 Lire Le Jeune Afrique n° 1168 du 25 mai 1983.

* 142 A. Chouala (2004,a), op.cit., PP. 130-131

* 143 Chouala, op.cit.

* 144 Ici. Cameroun, n°13. février 2005, P.13

* 145 Marcel Merle (1982), Sociologie des Relations Internationales, Paris, Dalloz, P. 292

* 146 Charles Debbasch, op.cit., P. 194

* 147 A titre d'illustration, La réaction des Camerounais de Londres par rapport à la démission de John Fru Ndi de la Coalition et aux deux étudiants morts à Buéa pendant les mouvements de grève.

* 148 Cameroon .info.net du 25/03/2004, « Journée spéciale du parlement européen consacrée au Cameroun.

* 149 Freedom FM est une chaîne de radio camerounaise dont le propriétaire est Pius Njawé.

* 150 Paul Yamga-Tientcheu, dans un entretien avec le Messager, saisi sur la question de savoir si à distance les Camerounais de l'extérieur peuvent influencer le cours de la vie politique de leur pays.

* 151 Yves Mény, J-C. Thoenig (1989), Politiques publiques, Paris, PUF.

* 152 Pierre Muller (1990), Les Politiques publiques, Paris, PUF, PP. 22-23

* 153 Il concerne la réforme sur la nationalité camerounaise en général.

* 154 Voir le Président de la République distribuer des euros lorsqu'il arrive à Paris, ou Mme F. Fogning distribuer des pagnes RDPC ne peut qu'apparaître comme un signal fort.

* 155 Arjun Appadurai, op.cit., P.13

* 156 Blaise Nkene (2001), « Les étrangers, acteurs de la vie politique camerounaise : l'expérience des immigrés nigérians dans la ville de Douala » in Polis/R.C.S.P./C.P.S.R., Vol.8, numéro spécial, P.4

* 157 Arjun Appadurai (1996), op.cit., P.7

* 158 Ibid.

* 159 Voir le numéro que la revue Hommes et migrations a consacré à ce sujet, n°1240, novembre-décembre 2002

* 160 Chantal Borne-Benayoun et Dominique Schnapper (2006), Diasporas et Nations, Paris, Odile Jacob, P.128

* 161 Stanley J. Tambiah (2000), «Transnational movements, Diaspora and Multiple Modernities. International Movements of people and their Implications» Daedalus, P.170

* 162 Les Camerounais de l'intérieur se mobilisent le plus souvent pendant les périodes électorales; tandis que pour ceux de l'extérieur, la mobilisation est visible en temps d'actualité forte ou très sensible.

* 163 Blaise Nkene, op.cit., P.20

* 164 A. Appadurai, op.cit., P.9

* *Ces réactions ont été publiées telle que tirées du site Web : http://www.cameroon-info.net

* 165 A. Chouala (2004, a), op.cit., P. 296

* 166 Voir les opinions d'un certain nombre de Camerounais d'ici et d'ailleurs sur les activités de la diaspora, précédemment citées.

* 167 Sur l'action internationale de l'opposition camerounaise, lire Yves-Alexandre Chouala (2004,b)

* 168 Cité par Blaise Nkene, op.cit., P. 20

* 169 Chouala, op.cit., P.138

* 170 Ibid.

* 171 Chouala, (2004, a et b).






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault