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Etude de la réception de deux coproductions théâtrales européennes, à travers des articles de la presse écrite d'Europe

( Télécharger le fichier original )
par Laetitia van de Walle
Université Libre de Bruxelles - Master européen en Art du spectacle vivant 2007
  

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3.3.3.3. Répercussions sur le « jeu de théâtre »

Dans cette section, figurent les éléments qui composent le jeu de théâtre, c'est-à- dire : le texte dramatique, la mise en scène et le système scénique, ainsi que le jeu des acteurs et les réactions du spectateur. S'il nous apparaît professionnellement logique de justifier un avis, les statistiques que nous avons effectuées montrent que beaucoup de journalistes omettent cette étape.

Après avoir décrit les composantes du jeu de théâtre, en nous basant sur la teneur du commentaire du journaliste, nous aborderons le second schéma, rendant compte de la perception du spectateur, en tant que réactions à la présentation des actions des comédiens. Rappelons que ce schéma est basé, originellement sur les actions des acteurs. Lors d'enquêtes antérieures, il est apparu à W. Sauter que les comédiens étaient les principaux responsables de l'appréciation d'un spectacle. Nous commencerons donc par évoquer cet aspect. Nous avons tenté de voir si les commentaires relatifs au jeu des acteurs, réactions du public ou interprétation du spectacle suffisaient à évoquer la perception du spectacle définissant la réception.

Ensuite, nous avons pensé qu'il était possible de situer les éléments « système scénique », « mise en scène » et « texte » sur un même type de schéma, que nous avons imaginé ici, à l'instar de W. Sauter.

Rappelons que le critique dramatique n'est pas un spectateur comme les autres. Il est favorisé par ses connaissances et son habitude des événements théâtraux. Il n'est pas au théâtre pour son seul plaisir mais bien pour son travail qui consiste à donner au lecteur son avis sur la pièce afin d'aiguiller ces derniers dans leur choix.

o Communication théâtrale : les comédiens.

Reprenons ce que W. Sauter considère comme premier niveau de communication : la communication sensorielle qui naît de l'exhibition de l'acteur et de la réaction des spectateurs quant à son apparition : affection, attente, reconnaissance (cf. les réactions des spectateurs).

Ensuite, le niveau de communication artistique qui consiste en une appréciation des compétences artistiques que manifestent les acteurs : plaisir et évaluation. (cf. le jeu des acteurs). Nous devons insister sur le fait que si les participants (acteurs - spectateurs) ne possèdent pas le même code, les même attentes dans la réalisation du spectacle, la communication est brisée.

Enfin le troisième niveau de communication, symbolique, ne peut exister sans les précédents et consiste en l'interprétation de l'histoire ou l'identification aux personnages fictifs. (cf. réflexion).

(1) Réactions du spectateur

Parfois, le rôle passif (la signification du spectacle s'impose d'elle-même : Gurs) dans lequel est habituellement cantonné le public est remis en cause quand des spectacles requièrent sa participation pour la production de sens. C'est le cas de Learning Europa et nous vérifierons si le critique y fait allusion ou développe cet aspect. D'une manière plus générale, nous chercherons dans nos articles des informations sur les réactions du public (s' il rit, pleure, apprend, s'ennuie, applaudit....).

+ Gurs, une tragédie européenne

Concernant les conditions techniques du spectateur durant la représentation, deux critiques, l'un espagnol, l'autre luxembourgeois, se plaignent amèrement de la lecture « épuisante », « harassante », « pesante » des surtitres, empêchant le spectateur de se concentrer sur la scène et de rentrer dans l'émotion du spectacle.

Deux critiques luxembourgeois (75%) et deux français de Nice (50%), et une espagnole (25%) rendent compte de ce que ressent le spectateur durant le spectacle. Au Luxembourg, Josée Zeimes utilise le « on » : « Une course aux idées, stimulante d'abord, déroutante ensuite, que le spectateur écoute, au risque de s' y perdre ; on ne se laisse pas

embarquer émotionnellement... »173. De même, Stéphane Gillbart (qui rédige deux articles) a choisi d'utiliser le « nous », ce qui inclut plus encore, les spectateurs qui étaient autour de lui, le soir de la représentation : « terrible accumulation- gavage- de faits qui nous empêche d'atteindre à l'essentiel (....) et de nous faire l'historique et le relevé chiffré de pareils transferts ! »174 et « le pédagogisme de l'explication nous ennuie (...) le texte (...) nous ensevelit sous une avalanche de faits, d'évocations et de préoccupations (...) dont nous ne percevons que des bribes »175. A Nice, Brigitte Chéry écrit également : « Alors que nous rentrons progressivement dans le sujet, un sentiment de honte du passé grandit »176. Georges Bertoldini donne son avis personnel qui rend compte de son sentiment au cours de la représentation : « l'émotion passe... »177 et Josée Zeimes décrit : « dès le début de la pièce, la pièce projette le public (...) dans le vif de la situation.178 »

Enfin, Margot Molina reprend l'avis qu'elle a recueilli auprès des autres spectateurs : elle explique que, lors de la représentation à laquelle elle a assisté, le public constitué de nombreux directeurs de théâtre et dramaturges est d'accord pour dire que bien que belle à certains moments, cette représentation n'est pas du théâtre179.

Parfois, quelques critiques communiquent aux spectateurs ce qu'ils ont ressenti par rapport aux acteurs. Par exemple : « les acteurs nous ont touchés, émus.... ». Mais les réactions à la communication sensorielle ne se retrouvent pas dans les articles.

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 1% 2% 3% 4% 5% 6% 7% 8% 9% 10%

0%

0%

Réactions des spectateurs dans Gurs

3%

4%

9%

173 ZEIMES Josée : « Solidarité dans le malheur », Lëtzebuerger Land, 24 décembre 2004.

174 GILBART, Stéphane : « Deux pages auraient suffi », Luxemburger Wort, 17 décembre 2004.

175 Id : « Un rendez-vous manqué », La voix du Luxembourg, 18 décembre 2004.

176 CHERY, Brigitte : « Les internés de Gurs », dans Art-Jonction, le journal culturel et d'art contemporain du Sud et d'ailleurs, Bimestriel : janvier/février 2005, n°49.

177 BERTOLINO, Georges: « Théâtre national de Nice: «Gurs», mémoire d'un camp », dans Nice-Matin, Jeudi 9 décembre 2004.

178ZEIMES, Josée: « Solidarité dans le malheur », Lëtzebuerger Land, 24 décembre 2004.

179 MOLINA, Margot: « Gurs », de Semprún, decepciona en Sevilla », in El Pais, el sábado 22 de mayo de 2004.

+ Learning Europa

Les journalistes ne mentionnent aucun élément qui pourrait parasiter la communication. La section concernant les conditions techniques reste vide.

Les réactions des spectateurs ne sont pas largement diffusées, mais elles sont tout de même présentes. 29% des journalistes de Hambourg et 25% des journalistes de Francfort mentionnent quelques éléments, ainsi que celui de Wiesbaden et de Luxembourg. Par exemple, dans le Bild de Francfort, le journaliste explique, à la fin de son article, « on applaudit fort, c'est que ça va »180, ....

Comme la pièce était différente dans chaque théâtre, nous voyons ici qu'à Francfort, les acteurs ont tenté de faire participer le public en dansant et en chantant. 75% des journalistes mentionnent cette particularité et précisent qu'elle n'a pas véritablement plu aux spectateurs. C'est pourquoi nous avons pensé que cette catégorie pouvait se joindre aux précédentes pour occuper 6% du contenu des articles de Francfort.

Luxembourg

Hambourg

Francfort

0% 1% 2% 3% 4% 5% 6% 7% 8% 9% 10%

Réactions des spectateurs dans LEARNING EUROPA

1,5%

2%

6%

(2) Le jeu des acteurs

Trouve-t-on dans les articles, des commentaires par rapport à la voix, à la gestuelle, aux mimiques, aux compétences artistiques ? Le critique donne-t-il une appréciation du jeu des acteurs ?

+ Gurs, une tragédie européenne

Les informations concernant le jeu des acteurs occupe, au maximum, 4% du contenu des articles à Luxembourg, 2% à Nice, 1.2% à Paris et 0% à Séville et à Berlin. Rappelons

180 Ner.: « Premiere im Schauspiel: Ein Wildes Europa », Bild, Frankfurt, 16 avril 2004

le faible taux de présentation du nom des acteurs dans les informations générales, maximum 15% à Séville. Il semble bien que la performance des acteurs ne soit pas le principal appui des critiques dans la rédaction de leur avis. Nous devons nuancer cette information car l'appréciation du jeu des acteurs revêt, comme l'envisage W. Sauter, une caractère personnel. L'appréciation du critique sur les acteurs est tout de même évoquée dans 75% des cas au Luxembourg et dans 50% des cas à Nice (0% à Séville et Berlin).

Commentaires sur le jeu des acteurs dans GURS

0% 1 % 2% 3% 4% 5%

Berlin

Paris

Luxem bourg

Nice

Séville

0%

4%

1 ,2%

2%

0%

+ Learning Europa

Le commentaire sur la qualité des acteurs ou sur la description du jeu de ceux-ci est encore plus insignifiant pour Learning Europa puisque seuls 50% des journalistes de Francfort donnent quelques éléments d'appréciation, ce qui représente 1.2% du contenu des articles. Les autres journalistes n'épinglent pas le jeu des acteurs.

Luxembourg

Hambourg

Francfort

Commentaires sur le jeu des acteurs dans LEARNING EUROPA

0% 1% 2% 3% 4% 5%

0%

0%

1%

Alors que les deux pièces emploient des acteurs de plusieurs nationalités possédant une pratique du jeu différente, bien qu' « européenne », aucun journaliste ne fait allusion à cette originalité.

(3) Les références intra ou extra théâtrales : interprétation et réflexion

Comme nous l'avons précisé précédemment, une critique dramatique devrait, idéalement, donner des compléments d'information sur certains points afin d'assurer une compréhension du spectacle ou ouvrir des voies de réflexion et de discussion qui se rapportent à l'événement théâtral. Ces références peuvent être en rapport avec l'actualité, l'histoire, avec des représentations antérieures d'un style analogue, du même auteur ou metteur en scène, ou simplement sur un thème identique. Elles peuvent être mises en relation avec d'autres arts (cinéma, musique, littérature...). Les remarques peuvent toucher la politique du théâtre, les choix opérés dans le répertoire ou la programmation.... Enfin, nous pourrons trouver des références et mises en perspective concernant le théâtre en général. Dans le cas qui nous occupe, nous espérons trouver dans les articles analysés quelques réflexions concernant le théâtre européen, l'identité commune, la politique de l'Union européenne.

Nous considérons que si le journaliste évoque des références par rapport à l'actualité, à l'histoire, à d'autres oeuvres ou propose une réflexion sur le théâtre.... il donne des pistes pour l'interprétation de la fable, pour un autre regard sur le monde. Cela se situe, sur le schéma de Sauter, au niveau de la communication symbolique qui engendre chez le spectateur interprétation et questionnement par rapport à l'histoire et son contexte.

+ Gurs, une tragédie européenne

C'est en connaissant l'Histoire que l'on peut comprendre le présent. Cette conviction chère à nos professeurs d'histoire justifie le fait que le sujet de Gurs entraîne des réflexions tant sur l'Histoire que sur l'actualité. A Séville, 50% des journalistes évoquent l'un ou l'autre créneau ou les deux. A Nice, 75% font référence à l'actualité et 100% à l'Histoire. Procurer au lecteur des références historiques afin d'appréhender Gurs semble couler de source. Ces éléments sont les seuls présents dans les articles à Paris et Berlin.

Concernant la mise en perspective de l'oeuvre, aucun journaliste ne dispense d'information à ce sujet, bien que d'autres titres d'oeuvres de Semprún soient cités, comme d'autres spectacles brechtiens, mais sans aucun développement. Cela nous a poussée à les considérer comme des indices bibliographiques ou rendant compte de la forme de l'oeuvre. Concernant la catégorie «rapprochement avec d'autres oeuvres », aucune référence n'apparaît à Paris, ni à Luxembourg. A Nice, un journaliste mentionne une autre oeuvre artistique du même type,

Luxembourg

Hambourg

Francfort

0% 5% 10% 15% 20%

Références à propos de LEARNING EUROPA

4%

15%

15%

mais cette information est également juste citée. En revanche, à Luxembourg, 75% des journalistes comparent l'oeuvre théâtrale de Semprún à d'autres. La réflexion sur le théâtre comme moyen de sensibilisation à l'Histoire et aux tragédies vécues dans les pays européens, est mentionnée par 25% des journalistes sévillans et niçois et par 50% des luxembourgeois, mais malheureusement par aucun parisien ni berlinois.

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 2% 4% 6% 8% 10% 12% 14% 16% 18% 20%

3%

1,6%

5%

Références à propos de GURS

13%

17%

+ Learning Europa

Contrairement au cas de Gurs, c'est dans les deux villes allemandes que les références occupent l'espace le plus conséquent : 15% à Hambourg et 15% à Francfort, contre 4% à Luxembourg.

Dans la majorité des cas, et étant donné le sujet de la pièce, les références sont principalement liées à l'actualité et particulièrement à l'Europe. Elles sont abordées par tous les journalistes de Hambourg, par celui de Luxembourg, et par 60% de ceux de Francfort. Nous n'avons rencontré nulle part de réflexion par rapport à l'histoire, ni de mise en perspective de l'oeuvre (mais cela s'explique par le fait que cette oeuvre est unique en son genre). À Francfort, 25% des journalistes évoquent d'autres oeuvres européennes présentées cette année, dans le cadre du projet de la maison de la littérature et du Köber- Stiftung « Europa schreib », comme 14% des journalistes de Hambourg. De même, 29% des journalistes à Hambourg et 25% à Francfort parlent du théâtre comme moyen de connaissance entre les peuples d'Europe.

Notons que pour les deux pièces, le thème et la réflexion sont parfois visibles dès le titre de l'article, comme nous l'avons déjà souligné.

o Conclusion partielle.

Pour la réalisation de son schéma, W. Sauter se fonde sur les acteurs, et particulièrement sur leur jeu. Nos résultats indiquent que la description des qualités physiques des acteurs, leurs compétences dans le jeu en vue de la création de leur personnage et le déroulement de l'intrigue n'occupent pas une place de choix dans la rédaction de l'article critique. Seul le rapport à la fiction qui génère l'interprétation et la réflexion possède un espace plus ou moins important.

Cependant, le jeu théâtral n'est pas uniquement constitué par les acteurs. Nous tenterons, ci- dessous de définir le rôle des autres éléments du jeu de théâtre par rapport à la perception du spectateur.

o La perception à travers les autres éléments du jeu de théâtre

Nous reprenons le même schéma de W. Sauter pour ces éléments. Bien qu'il soit incongru de considérer que les éléments du système scénique, de la mise en scène et du texte vont participer à la communication théâtrale, nous admettons qu'ils jouent un rôle certain. En effet, si le spectateur réagit à l'exhibition des acteurs de manière sensorielle, nous considérons qu'il réagira aussi à la découverte de la scène et de son décor. De même encore, la mise en scène est constituée de nombreux choix artistiques que le spectateur décodera et appréciera ou non. Enfin, nous avons considéré que le texte agissait au niveau symbolique car sans lui, point de fable. D'ailleurs, la concentration du spectateur pour la fable passe évidemment par la forme dramatique.

Le schéma est donc le même que précédemment, mais il fait intervenir une composante supplémentaire pour chaque niveau de communication. Nous pensons qu'il y a bel et bien communication même si elle se produit, pour cette exploitation du schéma, à sens unique : de la scène vers la salle.

(1) Le système scénique

La mention et l'avis du critique sur le système scénique : le décor, les images et vidéos, la musique et les bruitages, l'éclairage, les objets et les costumes sont très faiblement représentés. Nous avons choisi, comme pour les acteurs, de considérer la description et le commentaire éventuels sur tous les éléments du système scénique dans la même catégorie.

La composition de la scène, son esthétique, l'ambiance que créent le décor, les lumières, les sons... participent pleinement à notre perception. Il s'agit, pour adapter le terme de W. Sauter aux autres éléments du jeu, de considérer que le système scénique correspond, en quelque sorte, aux actions d'exhibition des acteurs. Ici, c'est la scène qui s'offre à nous et qui évoluera tout au long du spectacle.

+ Gurs, une tragédie européenne

Aucun journaliste parisien ne fait allusion à ces éléments alors que 25% des articles sévillans, 33% des berlinois et 75% des niçois et des luxembourgeois les répertorient. Les journalistes décrivent en quelques mots la scène, évoquent la diffusion des chansons d'Ernest Busch, le bruit des trains lors de la dernière scène....

Remarquons que les articles berlinois sont très descriptifs. Ils proposent au lecteur des images de la scène, car les journalistes dépeignent souvent les actions qui s'y déroulent de façon très minutieuse, en considérant les éléments du système scénique.

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 1% 2% 3% 4% 5% 6% 7% 8% 9% 10%

0%

Le Système scènique de GURS

2,2%

3%

4%

6%

+ Learning Europa

Deux articles, un de Hambourg et celui de Wiesbaden, évoquent les décors, objets, musiques... qu'Armin Petras avait précisément imposés aux acteurs. C'est vraisemblablement tiré d'un communiqué de presse. Un autre article hambourgeois

mentionne l'utilisation, par les acteurs, d'un bottin de téléphone. Ainsi donc, à Hambourg, ce type d'information occupe 2.1% du contenu des articles et 18% à Wiesbaden. Dans les autres villes, le résultat est nul.

Luxembourg

Hambourg

Francfort

0Y 1 Y 2Y 3Y 4Y 5Y

0%

Le système scènique de LEARNING EUROPA

2,1%

2,3%

Or, la cause de cette lacune est à chercher dans le fait que sur vingt-deux articles critiques, douze sont accompagnés d'une photo qui représente pour Gurs, soit une scène dans le lit, soit la scène finale où tous les artistes sont groupés. La photographie permet au lecteur de visualiser les éléments du décor, les costumes... et de sentir l'atmosphère qui peut se dégager de la scène. Si les photos qui illustrent les articles de Learning Europa sont centrées sur les acteurs en pleine action, cela permet également de procurer au lecteur une impression concernant le système scénique.

(2) La mise en scène

Nous considérons, toujours en suivant les termes de W. Sauter, que la mise en scène représente une importante compétence artistique. En effet, une mise en scène extraordinaire peut transformer un texte médiocre en un spectacle génial.

Pour beaucoup, comme l'explique Patrice Pavis, « la mise en scène est la notion la plus subtile, la plus utile et centrale pour évaluer un spectacle, non seulement l'analyser, mais aussi le juger en termes esthétiques.181 »

Nous repèrerons si les journalistes critiques évoquent, selon les catégories fournies par Patrice Pavis, le statut du texte, dans la mise en scène (texte illustré ou réduit à un des éléments de la représentation), ainsi que la lecture de la fable par la mise en scène ou la direction des acteurs. Nous intégrerons également dans cette section les éléments relatifs à la scénographie (la construction de l'espace de jeu, le rapport entre l'espace de jeu et

181 Patrice Pavis : « La critique dramatique face à la mise en scène », in colloque de Séoul, p1.

l'espace du public, les caractéristiques du théâtre). Nous noterons enfin si un discours global sur la mise en scène se retrouve dans les articles (ce qui a plu au critique, ce qui l'a dérangé, les moments forts ou ennuyeux, les images qu'il retient du spectacle).

+ Gurs, une tragédie européenne

Le discours critique global sur la mise en scène est développé par 50% des journalistes à Séville, 75% à Nice et à Luxembourg, 25% à Paris et 0% à Berlin. Comme nous pouvons le voir sur le graphique, l'espace occupé par le discours global sur la mise en scène prend entre 0% et 7.8%. Nous devons attirer l'attention du lecteur sur le fait que parmi les catégories proposées par Patrice Pavis, certaines sont restées systématiquement vides. C'est le cas pour le commentaire sur le statut du texte dans la mise en scène ainsi que pour la lecture de la fable dans la mise en scène. La direction des acteurs ne fait pas l'objet de commentaire, non plus. Les articles espagnols mentionnent assez bien la « scénographie ». Cependant, il nous a paru que le sens qui était donné à ce terme n'était pas le même que celui qui nous concerne. Le terme espagnol semble plus se rapporter au système scénique. Enfin, l'avis du critique sur la mise en scène est très pauvre, il se borne à annoncer que la mise en scène sert le texte, qu'elle l'allège, qu'elle est rythmée... sans autre commentaire.

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 1 % 2% 3% 4% 5% 6% 7% 8% 9% 10%

0%

Discours global sur la mise en scène de Gurs

3%

3,6%

5,7%

7,8%

Ce pourcentage est à mettre en relation avec la description de la mise en scène et de la scénographie, car parfois, dans les mots utilisés pour la description, l'auteur de l'article manifeste son opinion.

Concernant la mise en scène de Daniel Benoin, les journalistes évoquent souvent la mise en abyme durant laquelle les comédiens discutent de la mise en scène, de la pièce qu'ils préparent sur Gurs. Ils font également souvent mention de l'apparition de l'auteur sur vidéo.

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 1% 2% 3% 4% 5% 6% 7% 8% 9%

La mise en scène de Gurs

3%

4%

5%

7%

8%

Luxembourg

Hambourg

Francfort

Discours global sur la mise en scène de LEARNING EUROPA

0% 1% 2% 3% 4% 5% 6% 7% 8% 9% 10%

0%

0%

1,7%

+ Learning Europa

Le discours critique global sur la mise en scène n'est affirmé que dans les articles de deux journalistes hambourgeois. Le commentaire représente 1.7% du contenu de l'article. Alors que la mise en scène n'est décrite que par un seul de ces deux journalistes. Cette description occupe 2% de l'article. À Francfort, 75% des journalistes décrivent la mise en scène, qui occupe 4% du contenu des articles. Cet espace est le même que celui qu'accorde le journaliste de Wiesbaden à la description de la mise en scène. Cependant, nous n'avons trouvé aucun commentaire critique sur la mise en scène dans une autre ville qu' Hambourg.

Si pour Gurs, les journalistes allemands avaient tendance à décrire de façon très imagée la scène, pour Learning Europa, ils décrivent largement ce qui se passe sur la scène, la mise en scène. Ils évoquent les trois plateaux de jeux simultanés, surplombés de trois écrans vidéos et décrivent véritablement les actions des personnages sur scène, danses, chants, jeux particuliers. Le discours global de la mise en scène ne semble pas être l'apanage des critiques allemands. Pour un texte qui possède une théâtralité affirmée comme Learning Europa, le discours aurait pu être prolixe.

Luxembourg

Hambourg

Francfort

0% 2% 4% 6% 8% 10%

0%

La mise en scène de LEARNING EUROPA

2%

4%

Si nous considérons généralement que nous sommes actuellement, à l'heure de la mise en scène, l'espace qu'occupe cette donnée dans les articles est minime. Pourtant, Patrice Pavis considère la mise en scène comme « un système de sens, de choix de mise en scène » (d'un point de vue sémiologique). Selon lui, le critique dramatique devrait s'atteler à « décrire les options de la mise en scène, d'en révéler le système, le Konzept (comme le disent les Allemands), la dramaturgie (comme le formulaient les brechtiens), l' « acting » ou le « staging style », comme on l'emploie en anglais. »182 Aucun de nos journalistes critiques ne rend compte de la mise en scène de la manière voulue par Patrice Pavis.

(3) Le texte

Il peut sembler absurde de prendre en compte, pour l'analyse d'un spectacle, le critère de qualité textuelle. Pourtant, les articles commentent largement le sujet. En effet, si le texte est mauvais, sans dramaturgie ... les acteurs, tout excellents qu'ils puissent être, auront des difficultés à faire vivre le spectacle. De plus, en règle générale, la qualité du texte ou du scénario est importante pour celle de l'ensemble du spectacle. N'oublions pas qu'un bon metteur en scène et des acteurs talentueux peuvent transformer un texte médiocre en spectacle extraordinaire. Il nous a semblé que la qualité du texte influence le fait que le spectateur soit captivé où non par l'histoire. Pourtant, le spectateur rentre dans ce que le texte présente, par le biais des acteurs. Nous pouvons donc dire que le texte joue un rôle dans la communication par son style, sa forme puisque c'est lui qui est porté par les acteurs.

+ Gurs, une tragédie européenne

L'avis sur le texte figure dans 100% des cas à Séville, 50% à Nice, 25% à Luxembourg, 57% à Paris et 100% à Berlin. En revanche, la justification de l'avis du

Luxembourg

Hambourg

Francfort

0% 1 % 2% 3% 4% 5%

Commentaires sur le texte de ARIMIN PETRAS

0,0%

0,0%

0 ,8%

journaliste est moins fréquente : 50% à Séville, 25% à Nice, 25% à Luxembourg, 0% à Paris et 0% à Berlin. Nous pensons que s'il donne un avis négatif sur le texte, le journaliste explique par exemple que l'auteur emprunte différentes formes de récits, que les personnages manquent de profondeur, que les informations historiques sont trop nombreuses, sans mettre en cause la mise ne scène, la scénographie ou le jeu des acteurs. Dans le cas de Gurs, il semble que les journalistes aiment ou détestent la forme pédagogique brechtienne du texte. Quand les journalistes émettent un avis positif, c'est par rapport aux mots de l'auteur, à la puissance de leur évocation...

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 4% 8% 12% 16% 20%

Commentaires sur le texte de JORGE SEMPRUN

2%

4%

5%

8%

15%

+ Learning Europa

Or, comme le texte de Learning Europa n'en est pas véritablement un au sens traditionnel du texte dramatique littéraire, nous ne nous étonnons pas de la déficience des commentaires des critiques. Seuls deux journalistes hambourgeois émettent un avis, mais il n'est pas justifié. Ainsi donc, la place occupée par un commentaire sur le texte et une justification se limite à 0.8% de l'espace des articles de Hambourg et est nul partout ailleurs.

o Le spectacle dans son ensemble.

Nous envisagerons dans cette catégorie une appréciation du spectacle en général et nous chercherons ensuite à savoir si elle est ou non justifiée. Nous évoquerons également dans cette section la visibilité de l'avis dans l'organisation typologique des articles. Nous espérons trouver dans les articles, un sentiment, une image du spectacle qui permettent de déduire la réception du spectacle par le journaliste.

+ Gurs, une tragédie européenne

L'appréciation sur le spectacle dans sa globalité est assez visible dans le discours critique : 75% à Séville, 100% à Nice, 100% à Luxembourg, 100% à Paris et 67% à Berlin. Soulignons qu'à Berlin, aucun journaliste ne justifie explicitement sa position, pratique à laquelle se livrent seulement 14% des journalistes parisiens, 25% des sévillans, 50% des niçois et 75% des luxembourgeois. De quoi est composé ce commentaire général ?

Luxembourg

Séville

Berlin

Paris

Nice

0% 2% 4% 6% 8% 10% 12% 14% 16% 18% 20%

Commentaires sur le spectacle dans son ensemble: GURS

5,3%

6,5%

9,8%

16,2%

18,5%

+ Learning Europa

L'appréciation du spectacle dans sa globalité est encore mieux représentée dans les articles traitant de Learning Europa en Allemagne. En effet, 100% des articles diffusent un avis quant au spectacle en général. Comme dans le cas de Gurs, la justification est plus faible : 100% à Francfort, 57% à Hambourg, et 0% à Luxembourg.

Luxembourg

Hambourg

Francfort

Commentaires sur le spectacle dans son ensemble de
LEARNING EUROPA

0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40%

6%

29%

30%

Il nous a semblé intéressant de signaler ici la manière très différente dont sont constituées les critiques allemandes par rapport aux autres. Nous l'avons déjà signalé, mais il convient de nous y a attarder quelque peu. Nous parlions plus tôt d'images de la scène, de sentiments.... Les journalistes allemands décrivent méticuleusement la scène, en y incluant le jeu des acteurs, le texte, la mise en scène, le système scénique.... Il est très difficile de séparer les éléments dépeints. Très logiquement, en effet, le spectacle devrait avant tout être considéré comme une unité et non disséqué en plusieurs parties : le texte, la mise en scène, le jeu des acteurs.... Nous pensons (mais nos connaissances de la langue allemande ne sont pas assez pointues pour l'affirmer) que les journalistes allemands font part au lecteur, dans leurs comptes rendus, de la perception qu'ils ont eue du spectacle. Ce n'est pas le cas dans les autres pays, les journalistes emploient un vocabulaire propre au jargon théâtral et une structure plus dissociée.

Lors du congrès de Séoul, Patrice Pavis caractérisait le critique allemande par « l'absence de réflexion sur la dramaturgie ou la mise en scène qui étonnera un Français »183 . Pourtant, la tendance que nous avons soulignée pour la critique allemande et qui se rapproche de l'affirmation de Patrice Pavis, pourrait être le fait d'un autre phénomène. Learning Europa est une pièce expérimentale et très originale. D'après Christa Muller184, responsable de la production du spectacle, beaucoup de journalistes ne savaient pas comment aborder cette oeuvre. Ils étaient décontenancés car ce travail sortait des formes dont ils ont l'habitude. Michel Vaïs, lors du congrès de Séoul expliquait, en prenant l'exemple de la pièce « Le regard du sourd » de Bob Wilson, que quand un spectacle est

183PAVIS, Patrice : « La critique dramatique face à la mise en scène », Congrès extraordinaire de l'Association Internationale des Critique de Théâtre à l'occasion du 50ème anniversaire de l'association sur le thème : Nouvelle théâtralité et critique, du 21 au 25 octobre 2006. www.aict- iatc.org/documents/congress/colloqueseouloct.06fv.07.pdf p 2.

184 Interview de Christa Muller le 22 juin à Paris.

trop novateur, il faut d'abord rendre compte de ce que l'on voit et de ce que l'on entend 185, décrire son « expérience de spectateur avec sa sensibilité, sa culture, son vécu, ses références » afin que le lecteur en déduise un point de vue utile. Si le critique n'a pas compris la pièce, il est inutile de vouloir y consacrer une critique qui n'est pas réfléchie, mûrie.

Comme l'explique Debenedetti, « en termes de management, on aborde volontiers la critique comme un prescripteur privilégié du marché de la culture, lequel se caractérise par l'incertitude du consommateur à l'égard de la valeur des oeuvres et par la difficulté de celui- ci à développer une forme d'apprentissage utile en la matière (en raison de la singularité de chaque production artistique)»186. De ce point de vue, il est très important que le critique dramatique puisse rester indépendant « à l'égard des producteurs », et neutre par rapport « à toutes les dominations économiques, politiques ou religieuses »187 . Il est donc essentiel qu'il existe des critiques négatives. C'est le cas parmi notre corpus. Comme nous l'avons déjà évoqué, si la critique est mauvaise, la plupart du temps, le lecteur en sera averti dès le titre de l'article. Il ressort que si les critiques sont vraiment positives ou vraiment négatives, elles sont au moins très intéressantes. Malheureusement, elles sont plus souvent neutres. Peut- être le journaliste ne veut-il pas s'engager de peur de briser des projets reconnus unanimement comme originaux et très porteurs. Dans ces cas, la majeure partie de l'article est consacrée à des informations pratiques ; un point de vue à peine critique se limite à quelques phrases en fin d'article.

185VAÏS, Michel : « Décrire ou juger ? », Congrès extraordinaire de l'Association Internationale des Critiques de Théâtre à l'occasion du 50ème anniversaire de l'association sur le thème : Nouvelle théâtralité et critique, du 21 au 25 octobre 2006. www.aict-iatc.org/documents/congress/colloqueseouloct.06fv.07.pdf p 10.

186 DEBENEDETTI, Loc. Cit. p 2

187 Ibid. p 3.

(4) La visibilité des éléments de la communication du « jeu de théâtre » dans les articles critiques

30%

25%

20%

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10%

5%

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5%

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Critique du texte Mise en scène Discours global Système

scénique

Critique du
texte

Composition de l'avis critique pour
LEARNING EUROPA

Composition de l'avis critique pour GURS

Mise en
scène

Hambourg Francfort Luxembourg

Discour
global

Séville

Nice Luxembourg Paris

Berlin

Système
scénique

Jeu des acteurs Spectateur Attitude critique Références

Jeu des
acteurs

Spectateur Attitude

critique

Références

Bien qu'il nous semble plus logique de considérer le spectacle comme un ensemble, la critique a plutôt tendance à émettre un avis sur les parties distinctes. Pourtant, pour Gurs, à Séville, Nice, Luxembourg et Paris, le discours critique se répartit entre la critique du texte, le discours global sur la mise en scène, et, dans une moindre mesure, le jeu des

acteurs et les réactions des spectateurs. A Berlin, le commentaire est centré sur le texte ainsi que sur le spectacle dans son ensemble.

Pour Learning Europa, les journalistes se concentrent sur l'impression globale du spectacle. Seuls trois journalistes de Hambourg développent brièvement un discours sur la mise en scène.

Le schéma de W. Sauter a pour but de décrire la perception du journaliste à propos d'un spectacle auquel il vient d'assister, car il considère que la perception définit la réception.

Or, W. Sauter pense que la communication au théâtre est basée sur la performance des acteurs. Leurs actions d'exhibition, encodées, et incarnées provoquent chez les spectateurs des réactions affectives, d'attente, de reconnaissance, de plaisir, d'évaluation, d'identification ou d'interprétation. Nous avons déjà cerné cette théorie.

Au vu des résultats que nous avons obtenus, nous pouvons affirmer que le critique ne s'attarde pas sur la communication « sensorielle », sur le sentiment qu'ont provoqué en lui les acteurs. Tout au plus, il aborde cet aspect par l'utilisation d'adjectifs : les acteurs sont « touchants », par exemple. Concernant leurs compétences, l'appréciation du critique se borne à un commentaire général : les acteurs sont excellents, les acteurs sont tous doués.....La réaction la plus développée est celle qui a rapport à l'histoire. En effet, le critique consacre souvent la majeure partie de son article à l'explication de l'histoire qui est portée par les comédiens et qui ouvre la voie aux interprétations. C'est une pratique relativement répandue en Europe.

Nous avons étendu le schéma de communication de W. Sauter aux autres éléments du jeu de théâtre : le système scénique, la mise en scène et le texte. Cependant, nous arrivons aux mêmes conclusions que pour le schéma précédent : aucune émotion sensorielle par rapport à l'atmosphère née de l'organisation de la scène, aucune évaluation artistique de la mise en scène. Ne parlons pas de l'analyse du système de signes qui mène à l'interprétation et qui est absente de toutes nos critiques. L'élément le mieux représenté est la critique du texte, porteur de la fiction.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci