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FLS: Analyse des manuels et évaluation des compétences linguistiques en RD. Congo

( Télécharger le fichier original )
par Willy Ilunga Ntumba
Université Paris 3 - Sorbonne Nouvelle - Master2 Recherche 2006
  

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II.3.2. Apprentissage de la compréhension dans le manuel de 1ère année

Après les activités d'apprentissage sur l'identification des mots, le travail de réflexion sur le texte favorise l'intégration des structures linguistiques et permet la progression dans le processus d'apprentissage de la langue. L'application des critères retenus nous fournit les données comprises dans le tableau suivant.

Tableau 7 : Nombre d'activités sur la compréhension manuel 1ère

Activités

Nombre

Pourcentage

Compréhension globale

45

21 %

Inférence dans le texte

0

0

Enchaînements et cohérence

0

0

Sens littéral et sens local

75

35 %

Grammaire (syntaxe)

47

22 %

Lexique

0

0

Morphologie flexionnelle

46

22 %

Production de texte

0

0

Pratiques culturelles de lecture

0

0

Lecture orale

0

0

TOTAL

213

100 %

Graphique 2 : Les activités de compréhension manuel 1ère année

Constatation

Sur les dix critères d'analyse proposés par la grille, le manuel de première année primaire n'en présente que quatre : les activités sur le sens littéral et le sens local (35 %), sur la grammaire (22 %), sur la morphologie flexionnelle (22 %) et sur la compréhension globale (21 %). Il n'existe donc pas d'activités concernant l'inférence dans le texte, les enchaînements et cohérence, le lexique, la production de texte, les pratiques culturelles de lecture et la lecture orale.

Le français en première année. Livre de lecture propose plus des activités sur le sens local et le sens littéral moins dans les textes que dans les phrases. Beaucoup d'activités concernent plus la syntaxe et la morphologie des verbes. Aussi apparaît-il que ce manuel laisse entrevoir la volonté de travailler l'approche linguistique de l'enseignement/apprentissage du français.

II.3.2.3. La progression

a) Les fréquences des graphèmes et des phonèmes

Comme son nom l'indique, Le français en première année. Livre de lecture doit être analysé en tant que tel ; sa progression est à étudier en fonction des graphèmes et des phonèmes qui sont proposés à l'apprentissage.

A la suite de Serge Borg (2001), nous étudions « le degré de cohérence progressive » en vue de reconstituer la sélection, la gradation et la programmation, composantes sur lesquelles repose le processus d'apprentissage. La sélection représente « le tri » des faits linguistiques à enseigner, la gradation renvoie à la répartition de ces faits sélectionnés et la programmation, la manière dont la sélection et sa répartition sont situées dans le temps (moment) d'apprentissage.

Dans un cadre aussi restreint que celui d'analyse des manuels, il serait superflu de cerner la programmation qui justifierait le contenu en présence. Nous pourrions par contre reconstituer la sélection des faits linguistiques proposés à l'apprentissage et retracer leur gradation.

Le français en première année. Livre de lecture a choisi d'enseigner toutes les lettres de l'alphabet français. Dans cette sélection, nous distinguons les graphèmes simples (correspondant à une lettre) et complexes (composition de deux lettres ou plus). Un graphème (valeur écrite d'une lettre) peut représenter un phonème (valeur orale du graphème) ou plusieurs, tout comme un phonème peut se rapporter à plusieurs graphèmes.

Le tableau suivant présente ces unités graphiques selon l'ordre d'apprentissage.

Tableau 8 : Les unités graphiques et leurs fréquences dans le manuel de 1ère année

Phonèmes

Occurrences

a

2278

i

1276

m

911

u

744

e

3201

n

826

o

592

é

438

è

215

r

588

l

1693

d

861

p

705

s

779

t

930

b

577

ê

64

â

24

v

618

on (+6on (= /I/))

514

om

45

ou

488

ez (= é)

75

ent (= /e/)

55

c (= /k/)

354

f

309

j

480

g (= /g/)

116

q

217

k

57

oi

169

oir

60

ai

344

ei

17

au

154

eau

74

eu

160

bl

49

cl

43

pl

88

gl

16

fl

43

dr

38

tr

160

cr

45

fr

66

gr

74

br

96

pr

94

vr

54

ui

96

es (= è)

37

ab

6

ac

22

al

12

ar

116

ic

16

il

21

ir

28

is

22

ud

4

ul

14

ur

70

ol

8

oc

23

os

10

or

76

ge

104

gi (+ 5 gy)

15

gu

71

ce

77

c'

26

ci

68

z

29

x

25

s (= /z/)

132

ch

178

h

55

gn

46

an

166

am

12

en (+1en (=/C/))

115

em

10

in

54

im (+ 2 aim)

10

ain

29

ein

8

euf (+ 12 oeuf)

20

eur (+ 11 oeur)

90

air

7

our

109

oif

5

eul

1

er (= é)

118

et (= é)

113

est (= é)

145

ed (= é)

10

ier

18

ec

42

er

21

el

26

es

6

ex

22

ette

16

erre

19

esse

17

elle

164

enne

2

ill

55

ail (+ aill)

39

eil (+ eill)

44

ieil (+ ieill)

7

euill

19

ueil

4

ouill

6

ien

51

oin

20

tion

25

ph

34

mp

5

nd

3

ng

12

dj

1

tsh (= /tH/)

3

nk

1

ns

1

nsh

5

mb

28

ç

33

y (= /i/)

40

oy

5

ay

9

uy

2

w (= /v/)

5

w (= /w/)

5

TOTAL

25118

Graphique 3 : La progression des 17 premiers graphèmes

Les 17 premiers graphèmes sont simples si on ne considère pas l'accent qui est un autre signe graphique qui transforme les trois « e » accentués en graphèmes complexes. Il apparaît que la gradation (répartition) de ces éléments va des simples aux complexes. Il s'agit en fait d'une « gradation linéaire ». « a » est étudié en premier lieu, mais vient en deuxième position après « e » qui est le cinquième graphème étudié ; mais il faut noter que ce dernier change de nature lorsqu'il est prononcé.

La première consonne proposée à l'apprentissage « m » (3ème acquisition) vient après « l » (3ème en termes des fréquences) qui est étudié au 11ème rang. A partir de la quinzième leçon, on s'aperçoit que les fréquences de certains graphèmes diminuent sensiblement. Il y en a qui n'apparaissent qu'une seule fois dans le manuel (juste lors de leur présentation, sans apparaître dans un seul texte), tout comme quelques-uns n'atteignent pas 1 % des fréquences dans l'ensemble.

Quant aux phonèmes discriminés, on peut remarquer qu'ils rappellent la transcription de l'écrit à l'oral. /a/, le graphème qui subit moins de transformation en contexte, vient loin devant. /l/ se retrouve ici en deuxième position, alors que le premier phonème consonantique étudié /m/ a moins de fréquences. On peut dès lors se demander pourquoi ce n'est pas /l/ qui devait être étudié en deuxième lieu sinon en tête des autres consonnes.

A comparer cette progression au modèle du « français oral » (Germain et Muroni 2003, p. 244), nous remarquons une nette irrégularité quant à la manière en dents de scie qui caractérise la présentation des phonèmes plus fréquents de la langue. La progression de référence présente les phonèmes selon une fréquence décroissante ; du plus fréquent au moins fréquent.

Sur les neuf phonèmes de ce modèle, seules trois consonnes (/R/, /l/, /s/) apparaissent au milieu de six voyelles, alors que Le français en première année. Livre de lecture aborde l'apprentissage de /m/ et /n/ avant et fait intervenir /R /, /l/ qui ont une fréquence élevée respectivement et successivement aux onzième et douzième rangs. /s/ vient au quinzième rang avec une fréquence bien moindre, et pourtant /t/ qui a une forte fréquence se place en seizième position.

Ce manuel consacre donc beaucoup d'importance à l'apprentissage des voyelles orales qui sont susceptibles de combiner avec d'autres phonèmes vocaliques ou consonantiques en vue de la formation d'autres phonèmes vocaliques. /m/ et /n/ sont justement des consonnes qui se prêtent à cette combinaison. C'est là une manière de marquer l'importance de chacun dans l'ordre acquisitionnel.

Tableau 9 : Les phonèmes et leurs fréquences dans le manuel de 1ère année

Phonèmes

Occurrences

/a/

2712

/i/

1547

/m/

911

/u/

829

/e/

234

/n/

828

/o/

441

/O/

488

/é/

748

/è/

251

/R/

1721

/l/

2178

/d/

903

/p/

887

/s/

299

/t/

1106

/b/

728

/A/

27

/v/

678

/I/

584

/U/

608

/k/

824

/f/

477

/j/

599

/g/

282

/w/

264

/E/

137

/F/

147

/V/

98

/z/

166

/H/

178

/G/

46

/B/

303

/C/

172

/J/

291

Graphique 4 : La progression des phonèmes selon leur fréquence dans le manuel

Nous pouvons constater ici que la deuxième série de phonèmes est composée de consonnes orales qui sont présentées selon l'opposition au plan de leur mode d'articulation (/R/, /l/) et leur forme graphique (/d/, /p/) sûrement pour éviter de les confondre. Puis dans la suite, la progression ne se fonde plus à rien ; on a l'impression de se retrouver devant une succession des phonèmes à enseigner pour signaler simplement leur existence.

b) La progression des éléments lexicaux

Cet aspect de l'étude de la progression dans le manuel concerne les mots-outils qui sont des éléments essentiels pour la structuration des textes (Mackey 1972) et permettent le respect de « la logique de la langue, notamment dans sa construction syntaxique » (Germain et Muroni 2003, p. 244).

Nous établissons ici une liste de vocables employés en suivant le modèle des auteurs du manuel afin d'y percevoir la combinatoire proposée pour « assurer un apprentissage progressif » dans le sens de l'autonomisation de l'apprenant. Car c'est le vocable qui, selon Germain et Muroni (2003, p. 245), « représenterait mieux le système phonologique » de la langue.

Tableau 10 : La fréquence des mots-outils dans le manuel de 1ère année

Mots-outils

Occurrences

de

181

le

258

la

325

et

113

il

161

les

80

à

147

est

145

un

350

l'

137

en

21

pas

40

je

263

que

37

des

96

une

236

a

73

tu

122

c'

20

se

32

ne

30

qui

41

dans

20

on

5

pour

24

mais

10

du

94

elle

98

au

37

sur

48

son

30

tout

0

Nous remarquons dans ce tableau une forte présence des déterminants articles. Cette fréquence élevée s'explique par le fait que les noms sont souvent présentés dans un contexte libre. L'objectif étant de travailler de manière « incidente » l'accord de genre et de nombre. Signalons aussi l'emploi significatif des pronoms personnels sujets, qui est dû à la présence de beaucoup d'exercices de conjugaison dans le manuel. Fait voulu par la méthodologie d'apprentissage adoptée. Les prépositions « de », « à », « dans », « pour »... doivent leur forte fréquence à l'emploi des articles, notamment pour la formation des articles contractés et partitifs, ainsi que les circonstanciels (lieu, temps, etc.) Les adverbes sont les moins représentés. Les mots-outils sont employés parfois de façon massive pour certains, pendant que d'autres, tout aussi importants, n'apparaissent pas dans le corpus.

Graphique 5 : Les fréquences des mots-outils dans le manuel de 1ère année

II.3.2.4. Le profil du manuel Le français en première année. Livre de lecture

L'analyse quantitative des textes servant, dans ce manuel, à l'apprentissage de la lecture et de la langue fournit des données ci-après :

ü nombre total de mots : 2435

ü nombre de vocables (en répertoriant les mots différents sans tenir compte de leurs différentes occurrences dans les textes) : 736

ü nombre d'hapax (mots n'apparaissant qu'une seule fois dans les textes) : 450

ü Le pourcentage d'hapax : 18,48 %.

ü Le pourcentage de vocables : 30,22 %.

Ces données permettent d'élaborer le profil du manuel.

Ainsi discriminé ce profil permet de relever que Le français en première année. Livre de lecture n'assure pas beaucoup l'autonomisation visée des apprenants, notamment à cause du pourcentage élevé des hapax qu'il contient. En effet, il n'est pas aisé pour un apprenti lecteur de traiter le sens des unités lexicales qu'il rencontre une seule fois sur plus de quatre-vingt-dix pages du manuel.

Mais nous pouvons aussi considérer qu'un apprenant acquiert tout de même la capacité de lecture en fonction du nombre des mots déchiffrables consignés dans son manuel. Germain et Muroni (2003, p. 255) notent, en ce qui concerne l'apprentissage de la lecture, qu'il est possible de devenir autonome lorsqu'on retrouve au moins 51 % de mots déchiffrables sur une page du manuel.

Il ressort de cette analyse que le pourcentage de mots déchiffrables dans une leçon va augmentant (une leçon correspond à une page de lecture jusqu'à la dix-neuvième) :

1 de 0 à 45,45 % dans les 9 premières leçons ;

2 de 52,54 à 65,57 % dans les 5 leçons suivantes ;

3 de 73,68 à 90 % dans les 5 leçons d'après ;

4 de 92,42 à 100 % dans les 56 dernières leçons (à partir de la vingtième leçon, les révisions occupent deux pages de lecture, et la dernière, avant les textes de lecture libre, en occupe trois).

Nous remarquons que la sélection du manuel peut favoriser l'apprentissage de la lecture. Cependant, comme nous l'avons relevé supra, il n'est pas très évident que cette méthode produise des effets rentables quant à l'apprentissage de la langue.

Le répertoire des formes attestées dans ce manuel montre que le nombre des unités linguistiques d'apprentissage est limité. Les phrases simples y sont 6 fois plus nombreuses que les phrases complexes. Les formes des verbes simples sont 13 fois plus nombreuses que les complexes. Ce qui laisse présumer une « pseudo-simplicité » de la méthode.

Tableau 11 : Le nombre de formes attestées

Formes

Occurrences

Pourcentage

Mots

2435

 

Pronoms personnels sujets et compléments

193

7,92 %

Adverbes

127

5,21 %

Expansions du nom

723

29,69 %

Verbes

490

20,12 %

Verbes forme simple

387

15,89 %

Verbes forme complexe/nombre de verbes

29

5,91 % (29/490)

Verbes forme complexe/nombre de mots

 

1,19 % (29/2435)

Phrases

310

 

Phrases simples ou multiples

263

84,84 % (263/310)

Phrases complexes/nombre de phrases

47

15,16 % (47/310)

Ø Conclusion de l'analyse du manuel de 1ère année :

Le français en première année. Livre de lecture a été conçu de telle manière que sur base des unités grapho-phonémiques de la langue française les élèves apprennent à lire. L'analyse quantitative du contenu de ce manuel révèle, notamment en ce qui concerne les activités sur l'identification des mots, que la lecture des mots déchiffrables est plus exploitée que d'autres activités. L'approche en présence fonctionne sur la base des formes isolées.

Le travail de repérage n'est pas suffisamment renforcé, au-delà des formes, par un traitement de sens efficace qui compléterait le processus afin que l'acquisition soit remarquable. Dès lors que la manipulation du sens s'avère insignifiante, la production individuelle des apprenants (leur output) risque de ne pas être efficiente (Narcy-Combes 2005, p. 46) quand bien même leur mémoire peut fonctionner comme le souhaite les auteurs du manuel. C'est ce que nous essayerons de montrer dans le chapitre suivant.

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