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Les implications juridiques du transfert des affaires du tribunal pénal international pour le Rwanda devant les juridictions rwandaises (article 11bis rpp-tpir)

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par Jean Maurice MUGABONABANDI
Université Nationale du Rwanda - Licence en Droit  2008
  

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§IV. Les critères pour accorder le renvoi

Deux critères sont prévus. La chambre de première instance doit s'assurer que l'accusé bénéficiera d'un procès équitable et qu'il ne sera pas condamné à la peine capitale.

La condition du procès équitable s'avère la plus délicate. Les décisions qui ont été rendues ont procédé à un examen détaillé des garanties que les pays concernés seront aptes à respecter. Ces garanties seront examinées en détail dans la seconde partie de notre travail. Elles doivent être les mêmes que celles dont l'accusé bénéficierait devant le TPIR, soit les règles minimales internationalement reconnues44(*).

La garantie que l'accusé ne se verra pas infligé la peine capitale ne posera guère de problème pour les États qui ont aboli ce châtiment,45(*) y compris le Rwanda46(*). Le fait d'ajouter la condition que l'accusé ne sera pas exécuté peut apparaître comme redondant, puisqu'une exécution ne peut logiquement intervenir que si l'accusé a été condamné à mort.

L'interprétation de l'article 11bis recèle certainement d'autres conditions implicites qui devront aussi être remplies. Le Procureur estime ainsi que la volonté des autorités nationales de poursuivre le cas constituera une condition nécessaire pour ordonner le renvoi47(*). À ce propos, la logique de l'article semble indiquer que l'État saisi d'une cause doit être "disposé et tout à fait prêt à accepter une telle affaire" ; on ne voit pas comment une affaire judiciaire donnée pourrait être confiée à un pays qui ne serait pas disposé ou prêt à l'accepter48(*).

Au-delà de la volonté de poursuivre l'affaire, l'État devra aussi disposer de la compétence pour poursuivre, notamment eu égard à la délicate problématique concernant la non rétroactivité des lois, lorsque le droit interne au moment des faits ne prévoyait pas les mêmes incriminations que celles retenues dans l'acte d'accusation49(*), ou ne connaissait pas les mêmes formes de participation, en particulier la responsabilité du supérieur50(*)ou, peut-être plus important encore, la forme de responsabilité de l'entreprise criminelle commune. Ces questions devront certainement être résolues par la chambre désignée préalablement à toute ordonnance de renvoi51(*).

Nous rappelons ainsi que le Tribunal a justifié sa volonté de modifier l'article 11bis notamment pour faire en sorte que le Tribunal puisse s'assurer que les accusés qui seront jugés au niveau national aient à répondre de tous les crimes visés dans les actes d'accusation. Le titre de la disposition indique d'ailleurs bien qu'il s'agit de renvoyer l'acte d'accusation, à charge pour les autorités nationales de poursuivre l'affaire, et non de remettre l'accusé pour que les autorités locales qualifient elles-mêmes les crimes, selon leur droit interne. Il ne revient certainement pas à la chambre de première instance de décider si certaines qualifications juridiques pourraient être abandonnées.

Si le Procureur ne souhaite pas que l'acte d'accusation soit transféré tel que, il lui est d'ailleurs loisible d'en solliciter la modification selon le mécanisme de l'article 50 du Règlement. En conséquence, l'État entendu devra donc, à notre avis, démontrer que la procédure interne permettra de poursuivre l'accusé sur la base de l'ensemble de l'acte d'accusation confirmé par le TPIR.

Enfin, la chambre devra inévitablement considérer une multitude d'autres critères qui ne doivent pas être négligés, comme l'existence de facilités de détention aptes à accueillir les accusés transféré ou la conformité des conditions de détention aux normes internationales52(*).

* 44Voy. art. 20 Statut du TPIR adopté le 8 novembre 1994  tel que modifié. Les droits de l'accusé correspondent ainsi aux garanties internationalement reconnues énumérées à l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

* 45 Procureur c. Kanyarukiga, op.cit., note 6, par. 96 ; Procureur c. Rahim Ademi et Mirko Norac , op.cit., note 40, par. 26 : « The death penalty is not prescribed by the criminal legislation of Croatia, which has adhered to the European Convention on Human Rights, including its Protocol 6 which prohibit the death penalty. Article 49 of the Croatian Criminal Code prescribes that the only forms of punishment for criminal offences are imprisonment and fine, while Article 53 thereof provides that imprisonment may not be longer than forty years for the gravest forms of serious criminal offences perpetrated with intent ». La Bosnie-Herzégovine ainsi que la Serbie-et-Monténégro ont également aboli la peine capitale. Voir pour cette dernière la ratification le 3 mars 2004 des Protocoles n° 6 et n° 13 à la Convention européenne des droits de l'homme. Ceux-ci sont entrés en vigueur pour la Bosnie-Herzégovine en 2002, respectivement en 2003.

* 46 Voy. loi Organique n°31/2007 du 25/2007 portant abolition de la peine de mort, in J.O.R.R., n° spécial du 25/07/2007.

* 47 Procureur c. Youssuf Munyakazi, op.cit., note 6, par.16. Procureur c. Rahim Ademi et Mirko Norac, note 40, pars. 6 et 21.

* 48 Procureur c. Zeljko Mejakic., Affaire n° : IT-04-78-PT, Ordonnance préliminaire du 22 septembre 2004 du Président du TPIY ; Procureur c. Radovan Stankovic, Affaire n° : IT-96-23/2-AR11 bis2, Ordonnance préliminaire du 27 septembre 2004, par.3.

* 49 La Croatie n'a par exemple introduit les crimes contre l'humanité dans son droit pénal qu'en 2004, selon OSCE (MISSION TO CROATIA), Supplementary Report : War Crime Proceedings in Croatia and Findings from Trial Monitoring, juin 2004, p. 4; Procureur c. Michel Bagaragaza, op.cit., note 5, par.16.

* 50Voy. HUMAN RIGHTS WATCH, Justice at Risk: War Crimes Trials in Croatia, Bosnia and Herzegovina, and Serbia and Montenegro, New York, octobre 2004, p. 24; où l'on apprend que le droit de la Serbieet- Monténégro ne prévoirait pas ce type de responsabilité, en tout cas pas à titre rétroactif pour les actes commis au début des années 1990. Voir également M. S. ELLIS, « Coming to Terms with its Past - Serbia's New Court for the Prosecution of War Crimes », Berkeley Journal of International Law, 2004, p. 174.

* 51 L'exercice pourrait s'avérer délicat, car, en l'absence de jurisprudence, la chambre ne saura pas comment la question serait nécessairement tranchée par les juridictions nationales.

* 52 E. KINETZ, « Mpanga, un Château -fort pour le Rwanda », International Justice Tribune, 5 mai 2008.

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