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L'Opus Déi et l'éducation au Chili

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par Mathilde Nicolai
Institut d'études politiques Aix en Provence - Diplôme de sciences politiques 2010
  

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§ II - Des formes d'éducation diverses et novatrices

Toutes ces fondations ont un but éducatif plus ou moins important, qu'elles mettent au premier plan ou non. Pour les fondations qui sont principalement détentrices de fonds et d'établissements, leur rTMle est essentiellement économique et juridique.

Au contraire, certaines fondations sont elles-mêmes des vecteurs de la transmission de l'éducation selon les valeurs de l'euvre, et organisent des activités dans

33

ce but. Le centre d'appui à la famille El Saltopar exemple, dans la commune Recoleta, organise des classes à destination des méres de famille, dans le but de leur donner des instruments pour acquérir un petit revenu supplémentaire à celui de leur époux, en travaillant depuis leur domicile. Une sorte de micro-commerce, qui peut apporter un appui à la famille,

sans délaisser les enfants, ce qui serait inaccepable pour l'Opus Dei. La fondation donne donc des cours de confection de vêtements, de cuisine, de soin aux malades, ou encore de théorie sur les herbes médicinales. Des enseignements qui restent irrémédiablement féminins, et qui coütent en tout 2000 pesos par mois, environ 3 euros; un prix extrémement bas car le but de la fondation n'est absolument pas de s'enrichir gr%oce à cette ativité, mais au contraire d'attirer les gens des catégories pauvres dans le giron de l'Opus Dei, en les aidant à moindre prix. Les éléves peuvent ensuite assister à des conférences ou des débats d'initiation à la foi catholique, qui les aident à comprendre le sens de la vie, du travail, et la valeur du service aux autres.

Les femmes qui le souhaitent peuvent également se former pour la première communion avec des membres du clergé de l'organisation. La pratique de cours

32 Voir annexe n°2

33 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p392

plaisants entre voisines est ainsi mêlée au spirituel, comme dans toutes les activités de l'Opus Dei.

La fondation <<Hacer familia34 È, qui pourrait se traduire comme <<Fonder une famille È, ou <<créer une famille È, va encore plus loin dans ses activités d'éducation. Selon l'Opus Dei, la fondation, comme toutes les autres, ne leur appartient pas, mais ses postulats, son contenu et l'identité des membres de son conseil d'administration reflétent un lien trés étroit. Elle est créée en 1981 sous le nom de <<fondation pour l'éducation et l'orientation familiale Hacer Familia È, et affirme des le commencement des principes moraux trés conservateurs, tels que l'indissolubilité du mariage, la fidélité des époux, le droit à la vie, ou encore l'éducation rigide des enfants. Le siege de la fondation est installé dans une belle et grande maison de Vitacura, à Pamplona 78. Son président est un surnuméraire omniprésent dans toutes les organisations éducatives de l'Îuvre : Juan Enrique, Zegers Hotschild, qui préside aussi la SEDUC.

La fondation organise des cours destinés aux parents, dans plusieurs écoles SEDUC et dans les instituts d'autres fondations. Quatre branches sont proposées, selon l'%oge de l'enfant: << Les premiers pas È, pour les enfants entre 0 et 5 ans, << Premières décisions È, de 5 à 10 ans, <<L'adolescence de nos enfants È, de 10 à 15 ans, et << Avancer sürs È, de 15 à 18 ans.

De plus, des 1994, la fondation crée sa propre revue <<HF È sigle de <<Hacer Familia È, orientée vers les surnuméraires, parents des futurs membres de l'Opus Dei. Un mensuel de plus de 70 pages en couleur, imprimées dans un papier brillant trés coüteux, dirigé par le déjà connu Diego Ibañez Langlois, et vendu dans les magasins des quartiers chics de Santiago, dans le centre commercial Alto Las Condes et dans celui du Parc Arauco. Ce sont effectivement les quartiers ou évolue la quasi majorité des membres de l'organisation, en général trés aisés, et avec des enfants qui fréquentent déjà les écoles SEDUC. Un an plus tard, la fondation commence une campagne d'abonnement, proposant des prix assez élevés. En effet, pour un abonnement d'un an, soit 12 numéros, le prix est de 29 500 pesos, soit environ 43 euros. Environ 14 000 abonnements sont pour l'instant enregistrés, selon Diego Ibañez Langlois, répartis équitablement entre personnes privées et entreprises. Les numéros se divisent de la maniére qui suit: une partie d'actualité, puis les pages <<mariage È, << vie de famille È, << vie scolaire È et << temps libre È.

34 www.hacerfamilia.cl

Le numéro 175, du mois d'octobre 2010, par exemple, publie dans la partie actualité un reportage intitulé << Dominés par la mode ? È qui présente la mode comme dangereuse car elle influencerait trop les femmes et les jeunes filles, les amenant à trop découvrir leur corps et à devenir superficielles. Dans la partie << mariage È, une vertu est mise en avant. Ce mois-ci, c'est la pudeur, alors que dans la partie <<vie de famille È, un reportage intitulé <<Les adolescents face à face avec l'alcool È conjure les parents de renforcer leur sévérité pour éviter une telle confrontation à leurs enfants.

Diverses interviews présentent de plus des personnes des quatre coins du monde, toujours avec une vision trés religieuse ou morale. Dans ce numéro, la francaise Christine Vollmer est interviewée. Membre de l'Opus Dei, elle a crée l'association PROVIVE au Venezuela, qui lutte contre l'avortement et la contraception. Mais la revue a donné naissance à un moyen de communication encore plus important pour la fondation : en 1995, elle crée un site internet sophistiqué, << Al Hacer Familia È, qui reçoit des consultations de tous types, depuis la maniére d'enlever sa sucette à un enfant, jusqu'à la préoccupation des enfants d'un homme de 70 ans devenu veuf qui fréquente une autre femme, en passant par tous les problémes d'adolescence, ou matrimoniaux.

N'importe qui peut se connecter sur le site, et, aprés s'être crée un profil, peut poser une question aux autoproclamés spécialistes de la famille, psychologues, qui leur répondront en quelques heures. Les journalistes de <<Hacer Familia È publient aussi des articles déjà parus dans la revue sur le site internet, comme par exemple celui de Magdalena Pulido, intitulé Ç L'avortement thérapeutique: comment justifier un meurtre ?35 È

La fondation a de plus étrenné en 2002 un logiciel de navigation protégée pour éviter aux enfants l'accés à des informations jugées gênantes sur internet. Gr%oce à ce logiciel, les parents peuvent définir eux-mêmes les pages accessibles à leur enfants.

De plus, Hacer Familia s'est récemment lancée dans l'édition de livres scolaires, avec deux premières séries << L'éducation des vertus È, jusqu'à 10 ans, et Ç L'art d'éduquer È de 10 à 15 ans. Ces manuels sont des guides pour le professeur et contiennent un catalogue d'activités pour l'éléve. La première série est divisée en 8 vertus: ordre, travail, fraternité, obéissance, sincérité, responsabilité, force, générosité, respect, amitié, persévérance, patience, charité et justice. La deuxiéme série contient quatre

35 PULIDO, Magdalena, Ç L'avortement thérapeutique: comment justifier un meurtre ? È, Hacer Familia, 18 décembre 2009, n°166

tomes, qui compilent des textes parus sur le site de la fondation entre 1994 et 2006. Ces livres peuvent être achetés par des familles ou par des institutions éducatives. Par la suite, la fondation a publié plusieurs autres livres de contes religieux, et également des CDs intitulés Ç Jésus de Nazareth È, destinés aux enfants.

La fondation devient ainsi un véritable outil multimédia en totale adéquation avec le 21ème siècle, qui projette une vision éducative d'un autre %oge, à travers des mécanismes divers.

Effectivement, la plus grande manifestation jamais organisée par l'Opus Dei au Chili fut le congrès national convoqué par la fondation Hacer Familia, intitulé ÇLa famille, aujourd'hui, et toujours È36, les 9 et 10 aout 2002, en hommage au centenaire de San Josemar'a. Plus de 2500 personnes (plus de femmes que d'hommes, et d'une moyenne d'%oge entre 30 et 50) se sont rassemblés à Huechuraba, un quartier riche au Nord de la capitale, en présence de l'archevêque de Guayaquil, Juan Ignacion Lattrea, et présidés par le secrétaire général du congrès, Francisco Lav'n Infante (le frère de l'actuel ministre de l'éducation Joaqu'n Lav'n).

Un grand nombre d'entreprises en vue au Chili ont financé le projet: parmi lesquelles Johnson (une chaine de magasins de vêtements et accessoires), Cristal Chile (production de bière), El Mercurio (un des plus grands quotidiens d'information du Chili), la BCI et Santander, deux des plus grandes banques, Paris et Falabella, des centres commerciaux spécialisés dans le vêtement, des assurances, ou encore la mairie de Vitacura.

Dans l'immense et luxueux espace Riesco, avant l'accès au salon de conférence, étaient installés des panneaux exposant la vie du Père fondateur, mais aussi des informations sur les horaires des messes, et des jours de retraite spirituelle. Durant les deux jours, la salle de conférence ne désemplit pas, beaucoup de gens suivaient les exposés debout, gr%oce à deux gigantesques panneaux de retransmission. Beaucoup de moyens furent donc mis en Ïuvre.

Quelques intervenants étrangers venus du monde des organisations internationales de la famille, comme l'espagnol Rafael Pich, surnuméraire père de 16 enfants, créateur de la fondation internationale de la famille (une association francaise) qui fit un exposé intitulé Çles idéaux de l'éducation des enfants È, et Victoria Gillick, une Anglaise de 60 ans, mère de 10 enfants, qui a fait un procès au gouvernement britannique pour avoir fait la promotion du contrôle de la natalité par le biais d'un

36 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 248

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circulaire aux médecins sur la contraception. Le procès a fait jurisprudence , et la Chambre des Lords a statué qu'un médecin peut prescrire un moyen de contraception à un mineur avec son consentement, même sans le consentement des parents.

Malgré ce revers, Victoria Gillick a été l'un des succès majeurs du congrès, (malgré le matériel de traduction instantanée car elle exposait en anglais), avec sa conférence Ç Ma bataille pour ma famille È, arguant que Ç le sexe court partout, et a abandonné les liens maritaux. Il s'attaque aux jeunes non mariés, et même aux enfants È, et que Çles parents doivent reconna»tre ce délinquant qu'est le sexe et l'attaquer. È Elle compare le sexe avec la peste bubonique, transmis par les plaies humaines comme des professeurs haineux, contre la chrétienté. Elle demande au public si ces plaies sont arrivées au Chili et exhorte les gens à les découvrir: Ç ne vous y trompez pas, derrière ces figures souriantes aux discours de paternité planifiée, vous découvrirez des rats38È.

Le discours de Victoria Gillick, particulièrement conservateur et moralisant, ne déparait cependant pas de l'ensemble, et l'exposé le plus suivi, celui de José Miguel Ibañez, d'un style plus détendu et complice, abordait dans le fond les mêmes thèmes. Il donne des clés pour que le mariage dure toujours: il recommande d'avoir un projet spirituel de vie commune, surveiller la fidélité, comprendre que le véritable bonheur est de faire plaisir à l'autre, et séduire constamment son conjoint. Il condamne chez les femmes le gaspillage d'argent dans l'achat de fioritures, maquillage, etc, arguant qu'il faut garder son naturel. Les hommes quant à eux, ne doivent pas Ç évoluer dans la vie avec des airs de célibataires, et doivent garder la distance matrimonialeÈ. Quant au frère de José Miguel, Diego Ibañez Langlois, il expose sur Ç l'amour intelligent pour les enfants È, et récolte également un franc succès.

L'accès aux conférences, pendant deux jours, coüte au total 5 000 pesos, soit un peu plus de 6,5 euros, et 20 000 pesos (25 euros) pour le CD qui va avec certains exposés. A la fin, tout le public est béni par un prêtre, et le congrès clôturé par le chÏur des en fants de l'école Nocedal, après l'annonce de Juan Enrique Zegers, le directeur de la fondation, de la création d'une nouvelle entité qui multipliera les actions dans lesquelles elle est déjà engagée. L'association d'amis de Hacer Familia devra apporter tout l'appui nécessaire aux familles de faible niveau social, gr%oce à l'aide de

37 Jurisprudence de la Chambre des Lords Ç Gillick v West Norfolk and Wisbech Area Health Authority», 1985

38 MONCKEBERG, Maria Olivia, ouvrage précité, p 249

psychologues, de conseillers dÕorientation et de professeurs. Les fiches dÕinscription à lÕassociation et les fiches de dons sont distribuées dans le public.

Des fondations homonymes de Hacer Familia ont été, depuis, créées dans plusieurs autres pays, dont lÕEspagne, le Mexique, la Colombie, le Pérou, lÕArgentine et le Venezuela, et ont pour projet de sÕétendre en Europe prochainement.

Le monde des fondations est donc plus complexe quÕil nÕy para»t, car les différentes organisations ne font pas précisément dÕefforts pour exposer toutes les activités, ainsi que leurs revenus et leurs dirigeants au grand jour. Il est cependant troublant de constater que malgré cette grande opacité, beaucoup dÕentre-elles ont une activité assez importante dans lÕéducation, particulièrement dirigée vers les classes sociales défavorisées mais pas seulement. Elles sont les ambassadrices des valeurs de lÕÎuvre les plus proches de la société.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera