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La relation thérapeutique dans les interférences entre la biomédecine et la tradipratique. Une lecture anthropologique à  l'hôpital Laquintinie et à  l'African Clinic de Douala (cameroun).

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par Bruno Duovany BEKOLO ENGOUDOU
Université de Douala (Cameroun) - D.E.A en anthropologie, mention santé 2007
  

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V- REVUE DE LA LITTERATURE

La maîtrise du sujet de la recherche dans une enquête scientifique passe nécessairement par la lecture des auteurs qui ont théorisé sur le même sujet. Les connaissances livresques relatives au thème de recherche sont donc indispensables. On comprend pourquoi en sociologie, le chercheur est tenu de se soumettre aux étapes de la recherche en tête desquelles se trouve la revue de la littérature existante, laquelle est synonyme d'analyse et de critique des auteurs ayant été lus par le chercheur. GRAWITZ M. (2001) nous dit que cela présente plus d'un avantage. Tout d'abord le chercheur aura une ample idée de la théorie et de la méthode à adopter pour sa recherche. Il pourra mettre une emphase sur tel ou tel aspect de son thème qui n'a pas été abordé par les auteurs qui l'ont précédé. Ensuite, il saura quelle orientation donnée à son thème.  Enfin il pourra emprunter les idées et les méthodes des auteurs qu'il a lus et les critiquer constructive ment.

L'on constate que la revue littéraire n'est pas d'une importance moindre. Les ouvrages que nous avons lus sont de deux ordres : ceux ayant traité de notre thème et ceux l'ayant évoqué d'un côté et de l'autre, ceux traitant uniquement des questions relatives à la santé , relevant de la socio-anthropologie de la santé et ceux portant sur les théories et les méthodes en sociologie et en anthropologie.

Les auteurs comme BAYART J.- F. (1985) parlent de l'usage privé de la chose publique par les gouvernants et les fonctionnaires de l'Etat camerounais. Cela nous a permis de comprendre pourquoi certains personnels de santé profitent de leurs fonctions pour exiger des patients le paiement de « kicksbacks », sorte de rançon qui doit leur être versée par le patient soit avant, soit pendant, soit après le traitement.

NCHINDA T., (1981) parle de la formation et de l'utilisation du personnel de santé dans les hôpitaux camerounais. Il s'appesantit sur leur formation et sur leur utilisation. Il s'agit de la manière avec laquelle on l'emploie. Il pousse son analyse plus loin lorsqu'il dit que la qualité des soins dispensée aux patients est tributaire de la qualité de la formation du personnel soignant et du contexte socioéconomique dans lequel se situe l'hôpital où il exerce. Toutefois, il passe sous silence les rapports entre ce personnel et les patients et récuse de s'y attarder.

De plus, une utilisation inappropriée des médecins et des infirmiers a des conséquences néfastes sur la santé des patients. Tout comme une utilisation appropriée de ce même personnel est l'un des préalables pour le prompt rétablissement des patients.

CARRICABURU D. et MENORET M. (2004), analysent les institutions sanitaires, les professionnelles, les maladies et la médicalisation de la société française. Elles s'intéressent également aux rapports que les patients entretiennent avec ces institutions sanitaires et ce qu'ils en pensent.

BAJOIT G. (1992) pour sa part s'intéresse à la sociologie relationnelle- expression qui d'ailleurs est le titre de son ouvrage- et montre comment les liens sociaux se créent et se consolident au travers des « interactions de face à face ». Selon lui , la sociologie doit avoir pour vocation première l'étude des relations entre les individus afin de pouvoir cerner le tout social , ou du moins la société dans sa globalité.

LAPIERRE D. (1979), DIAKITE T. (1985), DE ROSNY E. (1990) ont respectivement abordé, étudié et analysé les problèmes de santé en Inde et en Afrique. Diakité T. et de Rosny E. se sont appesanti respectivement sur la santé et la médecine tradi-naturelle africaines. Pour le premier, les hôpitaux publics africains sont de véritables mouroirs où se manifeste ce qu'il appelle « Le mythe de la solidarité africaine » (op.cit, p.78). De Rosny quant à lui s'attellent à montrer comment les Africains en général, les Camerounais en particulier se soignent à l'aide de la médecine tradi-naturelle. Il s'emploie dans son livre à analyser les relations entre les « Nganga »1(*) et leurs patients. La relation existant entre eux peut être assimilée, selon lui, entre le maître et son élève, le père et son fils. En outre, il soutient que les tares de la santé publique camerounaise sont l `une des causes de la ruée des malades vers la médecine tradi-naturelle.

Bien plus, CELERIER I. (1995) s'attarde sur la tâche des médecins humanitaires lors des catastrophes, des cataclysmes et des guerres. Il relate l'immensité de leur travail et les problèmes qu'ils rencontrent. Ces hommes et femmes de la médecine venus de très loin, généralement d'un pays étranger, sont obligés de faire preuve d'un humanisme sans pareil, basé sur le respect de la déontologie médicale et du serment d'Hippocrate. Selon lui, les médecins humanitaires essaient de pallier le déficit en personnel médical dans les zones et les régions du monde touchées par les catastrophes naturelles.

Cependant, le reproche qu'on peut adresser à tous ces auteurs est qu'ils n'ont pas abordé les relations entre le personnel soignant et les patients de manière à mettre en relief les logiques officielles et officieuses sous-tendant l'accès à la couverture sanitaire. Leurs observations nous semblent superficielles par rapport à notre thème. En outre, nos auteurs n'ont pas suffisamment mis l'accent sur les inter influences entre les patients et le personnel médical.

Le livre de HOURS B. (op. cit.) présente - entre autres choses- le visage de l'hôpital Laquintinie des années 1985. En effet, l'hôpital Laquintinie de cette époque était caractérisé par l'infection hospitalière, le laxiste et la négligence du personnel traitant, bien des dysfonctionnements, etc. En somme, il parle d'un système sanitaire public « grippé » à travers le fonctionnement difficultueux des hôpitaux publics.

KNUESEL R. (1991) pour sa part, montre que pour l'Africain de souche, la saleté ne tue. En clair, selon lui, le noir ne meurt pas de saleté. C'est la raison pour laquelle il n'aime pas prévenir les maladies et tient en piètre estime les règles hygiènes quelles qu'elles soient. Pour lui, même dans les hôpitaux africains, on les respecte pas toujours.

Quant à FONTAINE M. (1995), son analyse porte sur le rapport en le recours thérapeutique et la culture dans la zone septentrionale du Cameroun. On peut retenir de son livre que le type de soin auquel les populations recourent valorise la culture d'une médecine précise. A titre d'exemple, lorsqu'un Peuhl, au lieu de se rendre à l'hôpital pour se faire soigner, lui préfère le consulter un tradi-praticien, il fait perdurer sa culture et sa tradition dans le domaine de la santé tout comme quand un individu malade se rend chez le médecin, c'est la culture occidentale liée à la médecine qu'il ravive. D'où santé et culture sont liées.

Toutefois, l'auteur semble négliger les relations entre patients et traitants de manière à les rendre compréhensibles. Ce à quoi nous allons nous atteler tout le log de notre recherche. M'BOKOLO E. (1983) fait une analyse portant sur les acteurs de la santé et les professionnels de ce secteur, les malades et les origines de certaines maladies. Il y fait aussi une analyse du mal et de la douleur que ressent le patient en essayant de retracer l'historique de sa maladie. Il analyse aussi les origines des maladies comme la trypanosomiase, le paludisme, le choléra, etc. Ceci dans les angles historique, anthropologique et sociologique. Il s'attarde également sur la part de responsabilité de la société dans la maladie dont souffre un individu et donne tout un éventail de ce nous appellerions les cause sociales des maladies. L'on retiendra dans cet ouvrage que la société peut être à l'origine de la maladie d'un individu tout autant qu'il peut en être un facteur inhibiteur.

ROUGEMONT A. (1992) a étudié la prise en charge des couches sociales défavorisées en matière de santé. Il parle d'une santé qui est le produit de la société, la résultante des interactions entre l'individu et sa société. Pour lui, c'est la société qui codifie les soins de santé. L'auteur nous rejoint lorsqu'il pense que dans les formations sanitaires, on peut entretenir des rapports avec le personnel médical qui conduisent à la santé des patients ou qui peuvent aboutir à une guérison approximative.

WERNER D. (op.cit) fait le tour d'horizon des conditionnalités aux soins de santé primaires que doit assurer un health worker . IL dit à cet effet A health worker has to work as an educator and toward prevention. Il pense que l'agent de santé doive travailler dans l'optique de leur apprendre à se prendre en charge et à prévenir les maladies. C'est ce qu'il appelle « Self reliance for health » (op.cit. p.70).

Le personnel de santé doit aussi traiter les patients avec égard et respecter leur personne. C'est pourquoi il parle d'équilibre entre la prévention et le traitement. D'où, il affirme : «Working toward a balance between prevention and traitment». Cet ouvrage est aussi une compilation de recettes, de potions médicinales à même de soigner les malades. Il y donne des recettes simples relevant de la médecine moderne et de la médecine tradi-naturelle. La première partie de son ouvrage est consacrée à la relation entre « health worker and patients » dans les villes et villages. Ce livre va en droite ligne de notre thème de recherche parce qu'il nous imprègne sur l'attitude que doit avoir le personnel médical « en situation de face à face » avec les malades (GOFFMAN E., 1974 : 26) . Il pousse sa réflexion plus loin et encourage le personnel médical à prendre soin de la communauté dans sa globalité, en se souciant du respect de l'environnement.

La critique que nous pourrions lui adresser est qu'il arrête son analyse des relations entre et personnel soignant pour davantage s'appesantir sur la fabrication des médicaments. Néanmoins, son ouvrage a fortement captivé notre attention puisqu'il a ouvert notre esprit en matière de contacts ou d'interrelations entre malades et médecins.

FASSIN D. et JAFFRE Y. (1990) parlent des canons méthodologiques et théoriques liés à la recherche en socio anthropologie médicale. Ces auteurs analysent également presque tous les secteurs d'activités dans une société. Ils vont du politique à l'économique en passant par le culturel pour cerner la santé et partant, le développement. Cet ouvrage nous a permis d'axer notre recherche sur les relations et les interactions entre le personnel médical et les patients. Nous y avons vu comment aborder ou étudier ces relations. Allant dans le même ordre d'idée, MARA VIVEROS (1990) nous a fait part des principes méthodologiques qui lui ont servi à scruter la relation patient/traitant dans un village colombien du nom de Villeta.

FAINZANG S. (op. cit.) analyse les contours et les logiques de la relation médecins/malades. Elle analyse le contenu des discours tenus par les deux parties en présence dans la relation médicale. Elle passe au scanner les consultations pour y déceler des mensonges, des influences et des irrégularités médicales. Quand nous la lisions, nous comprenions que nombre de patients sont influencés soit positivement soit négativement dans les relations qu'ils entretiennent avec leurs traitants, lesquels vont jusqu'à recourir au mensonge pour les réconforter quand ils sont déprimés du fait de la maladie.

HATTIER (op.cit) s'intéresse aux médecines tradi-naturelles. Il passe en revue les moyens thérapeutiques des médecines naturelles africaine, européenne et asiatique. Chacun de ces continents a une médecine tradi-naturelle qui lui est propre. Il met en exergue les vertus thérapeutiques de chacune d'elle. Seulement, nous avons remarqué qu'il ne s'est pas appesanti de long en large sur les relations patients/traitants dans lesdites médecines

BENOIST J.(1996) a le mérite d'avoir produit un ouvrage qui analyse le pluralisme médical. Sa lecture nous a permis de comprendre les motivations de certains patients qui recourent à plusieurs médecines pour se soigner. Il révèle que c'est l'insatisfaction de bien des patients qui les emmène à opter pour le pluralisme médical. Il déclare à cet effet :

 Les patients qui vont à l'hôpital et en même temps chez le tradipraticien voire chez les prophètes thérapeutes le font parce qu'ils n'ont pas trouvé satisfaction chez l'un d'eux. Ils se disent alors qu'en allant chez tous ces thérapeutes, ils augmentent leur chance de guérison totale. Ce qui n'est pas toujours le cas parce que le pluralisme médical entraîne des interférences médicales (op. cit. p.17).

Dès lors, nous comprenons que le pluralisme médical traduit les insuffisances des politiques sanitaires et l'insatisfaction des patients. Ces derniers pensent qu'à chaque forme de médecine, correspond un type précis de maladie. D'où il parle « de maladies pour hôpital » (op. cit. p.40) ; « de maladies pour tradipraticien » (op. cit., p.42) ; « de maladie pour prophète thérapeute » (op. cit., p.45). Ce qui met en exergue l'existence de « stéréotypes liés à la maladie ». Ainsi, quand un individu est malade, il doit se raviser si oui ou non sa maladie peut être guérit à l'hôpital ou chez les Nganga et prendre par conséquent l'itinéraire thérapeutique qui s'impose.

Le reproche que nous faisons à cet auteur est de n'avoir pas analysé profondément les relations entre soignants et patients dans les médecines qu'il a étudiées pour expliquer le pluralisme médical.

MEYER P.(op. cit.), pour sa part, s'est intéressé aux dérives du personnel médical des hôpitaux publics en France. Selon lui, l'irresponsabilité médicale a des conséquences fâcheuses sur les patients. Son incidence peut entraîner la mort et jeter « Le discrédit sur la médecine moderne » (op. cit. p.78).

NJIKAM M. (1998) a étudié les dynamiques socio-anthropologiques qui sous-tendent la pandémie du VIH/SIDA dans la ville de Douala notamment dans le milieu estudiantin de l'université de cette même ville. RETEL L. Georges (1987) revisite les appellations des maladies selon qu'on est dans une société moderniste ou dans une société traditionaliste. Il s'intéresse aussi à la relation traitant/patient sans pour autant révéler les logiques qui la sous-tendent comme nous aimerions le faire.

LANTUM D. (op. cit.) a rédigé un ouvrage qui fait en quelque sorte l'éloge de la médecine tradi-naturelle au Cameroun. Cependant, il y dit de cette forme médecine qu'elle est en mal de reconnaissance de la part des décideurs politiques. Ce qui, pour lui, est une perte considérable pour les peuples africains en général et camerounais en particulier. En outre, il a recensé les facteurs -22 très exactement- d'expansion de la médecine traditionnelle. Ainsi, l'on a :

  F1 : Dans les régions éloignées des centres urbains et hospitaliers, seuls les guérisseurs indigènes peuvent soigner les malades.

F2 : Certaines maladies ne peuvent être soignées que pas les guérisseurs traditionnels : Folie, jaunisse, épilepsie.

F3 : Les pauvres qui ne sont pas capables d'acheter les produits pharmaceutiques préfèrent les guérisseurs indigènes. Certains guérisseurs ne demandent pas l'argent.

F4 : L'insuffisance des médecins favorise le choix des guérisseurs indigènes par les populations.

F5 : Les guérisseurs indigènes sont mieux connus dans certaines régions grâce à leur efficacité si bien que la population est satisfaite de leur présence.

F6 : Les guérisseurs connaissent les problèmes de leurs sociétés. Ils utilisent ces connaissances dans leurs diagnostics pour mieux soigner les malades dont ils sont apparentés ou proches.

F7 : les guérisseurs utilisent des instruments peu compliqués et ordinaires pour soigner les malades : Ex : Calebasse, houe, plantes.

F8 : Le guérisseur et le malade sont souvent de la même tribu. Ainsi le contact est facile.

F9 : Les guérisseurs sont moins exigeants que les médecins.

F10 : C'est une question de culture thérapeutique

F11 : Pendant de la consultation le malade ne parle pas pendant longtemps : il n' y a pas d'ordonnance complexe et pas d'opérations chirurgicales.

F12 : les guérisseurs traitent souvent à crédit et demandent parfois qu'on leur paie en nature. Exemple : poulet, chèvre

F13 : Les guérisseurs indigènes sont nombreux et bien reparties sur le territoire national.

F14 : Le malade peut choisir d'aller chez un guérisseur soit parce qu'il est célèbre, soit parce qu'il souffre de maux que celui-ci soigne facilement.

F15 : Pendant la période du traitement, le malade, dans certains cas, est logé et nourri gratuitement.

(...)

F17 : Le guérisseur indigène ne s'occupe pas seulement de la maladie déclarée, il traite l'individu dans son âme et/ou dans son esprit. Il prend en compte tous les liens sociaux du malade.

(...)

F20 : Les guérisseurs reçoivent les malades et les traitent comme leurs propres enfants. Ils sont hospitaliers.

F21 : Le manque d'éducation sanitaire chez les populations favorise le recours aux guérisseurs traditionnel et la croyance en eux.

F22 : Le guérisseur traditionnel offre le soutien moral aux malades. Le malade trouve en lui un bon copain avec qui il peut converser au-delà des problèmes de santé (...)  (DONGMO A., 2000.p40).

MBONJI E. (op. cit.) dans son ouvrage montre comment les africains sont à cheval entre la médecine tradinaturelle africaine et la médecine conventionnelle .Pour lui, les citadins constituent la tranche de la population africaine la plus concernée par cet écartèlement.

ADAM P. et HERZLICH Cl. (1990), analysent dans leur ouvrage les interactions dans le milieu médical. Ils s'efforcent de comprendre l'univers médical, les significations qu'on donne aux maladies et les représentations que le personnel soignant se fait des malades

Par ailleurs, nous avons parcouru bien des articles se rapportant à notre thème ou l'ayant évoqué. Nombre de ces articles sont publiés par la revue internationale « social science and medecine ».

BENSING J.M. (1991), nous révèle que la bonne communication est indispensable dans la relation patient/traitant. Nous avons retenu que cette bonne communication est l'un des préalables au bon rétablissement des patients.

Pour BERTAKIS J.M (1992), le patient doit être compris par le traitant et inversement. Il montre comment le patient doit faire l'objet d'attention et de délicatesse de la part du personnel hospitalier. Nous nous trouvons là dans le vif de notre sujet et son analyse nous a fortement édifié et permis d'orienter notre travail.

Dans leur article commun, MEUEWISER L., SHEAP C. and SJAAK Van der GHEEST (1991), analysent les entretiens entre traitants et patients pendant les consultations. Ils montrent comment les traitants imposent aux patients leur quatre volonté et ne tiennent pas toujours compte des aspirations de ceux-ci quand il s'agit de donner le traitement. Ils disent, à cet effet, que cela est parfois source de conflits qui ne vont pas sans conséquences sur la patient.

KLEINMAN A. (1980) a étudié les relations entre malades et traitants dans le contexte culturel. Il dit à cet effet que la relation patient/traitant est fonction de chaque aire culturelle tout autant que de l'importance qu'on lui accorde. De plus, pour cet auteur, l'on doit utiliser la notion de « modèle explicatoire » pour désigner, mettre en exergue et interpréter les différentes idées des malades et des thérapeutes autour de la maladie et de ses origines. Cet auteur, à l'instar de bien d'autres, a essayé de classer ses idées en deux groupes : les croyances internalisantes et les croyances externalisantes. D'où, pour YOUNG C. - qui est la tête de proue des auteurs qui se rangent du côté des croyances internalisantes de l'origine de la maladie- affirme que la genèse des phénomènes de santé, de souffrance sont localisées à l'intérieur de l'individu. Ce dernier est donc le seul responsable de sa situation et l'origine de son mal se trouve soit dans son comportement incorrect, soit au manque de ressources socioéconomiques.

FOSTER G. et ANDERSON B. (1978) analysent les canons de l'anthropologie médicale et son objet d'étude. Ils ont le mérite d'avoir conçu une des théories de l'Anthropologie médicale. Pour eux, le chercheur des sciences humaines qui étudie et explique les causes des maladies doit prendre appui sur ce qu'ils appellent les « systèmes de croyances personnalistes ou internalisantes » et les « systèmes de croyances naturalistes ou externalisantes ». En clair, une maladie peut être due soit à un agent pathogène extérieur qui est « mystique, super naturel », soit à un agent pathogène intérieur qui provient d'un déséquilibre interne à l' individu .Seulement , leur modèle explicatoire des maladies ne fait pas grand cas des rapports médecins/malades pour cerner les causes et le traitement des maladies.

LAPLANTINE F., à la page 86 de son ouvrage , met en relief les modèles théoriques inhérentes à l'Anthropologie médicale. Ainsi, elle parle des « modèles additifs » et des « modèles soustractifs ». Cependant, elle passe sous silence la relation patient/traitant comme partie à part entière de l'accès à la santé.

SPEEDING E. et ROSE D. (1985) montrent comment construire une relation stable et affective avec le patient. De l'accueil jusqu'au traitement en passant par la consultation, le soignant doit être attentif ; c'est pourquoi ils affirment : « The doctor has to pay attention to all the life of his patients » (op.cit, p.622). Seulement, SPEEDING et ROSE ne se sont pas appesantis sur la relation patient/traitant dans la médecine tradi-naturelle.

DEVEUGELE M., DERESE A. et MAESENER J. (2002) s'évertuent à montrer dans leur article comment le support social et le soutien moral apportés aux patients les réconfortent et participent de beaucoup dans leur rétablissement. Pour eux, la bonne relation thérapeutique est, sinon indispensable, tout au moins importante entre le patient et celui qui le soigne.

Cependant, ils se sont limités à le dire sans nous plonger dans un univers hospitalier pour nous montrer comment cela se manifeste. Néanmoins, ils ont le mérite d'avoir pu démontrer, ceci avec le concours de plusieurs prestataires de soins, que la relation médicale et la confiance qui va avec sont indispensables dans le rétablissement des patients. Les médicaments à eux seuls ne suffisent pas.

HERVEY D. et Van GYSEHEM (2006), disent que les patients doivent être traités avec respect. Nous comprenons avec eux que l'analyse des informations données par le malade obéit à des règles édictées par la directive 95/46 du code médical. Michael H., WIADNYANA I. et alii. (1999), s'attardent sur la question de la satisfaction des patients dans les hôpitaux des pays dits en développement. C'est dans cet article qu'ils révèlent que dans nombre de ces hôpitaux publics, l'on ignore la notion « D'indice de satisfaction des malades » (op. cit. p.402). Laquelle, selon eux, est indispensable pour juger de la qualité des soins. En fait, il semble que l'indice de satisfaction des patients permet aux hôpitaux de s'examiner, de faire une introspection afin de mieux servir les patients.

Bien plus, les auteurs comme GUADAGNOLI E. et Patricia W. (1998), ne s'appesantissent sur le degré de participation du patient dans la prise de décisions relatives à son traitement. Ce genre de préoccupation n'a cours qu'en Occident dans la mesure où le rapport médecin/malade frise la relation du maître à l'esclave en Afrique. Le premier donne les directives que le second doit suivre à la lettre sans mot dire.

Les chercheurs ne s'intéressent pas encore à ce genre de problèmes en Afrique en général et au Cameroun en particulier, si bien que la littérature existante portant sur de telles préoccupations y est congrue.

Charles G. et al (1984), se demandent si les malades voudraient être impliqués dans la prise de décision en rapport avec leur santé. Il ressort de cet article que nombre de patients voudraient qu'on leur explique et qu'on les mette au courant de tout ce qui concerne leur santé. BLANCHARD G. (1998), montre comment les malades atteints du cancer veulent être au parfum de tout ce qui a trait à leur état de santé. YORRO S. (2003), pense que la médecine traditionnelle est promue à un bel avenir au regard de son expansion toujours croissante dans les villes africaines. Selon lui, elle revalorise l'Homme et le traite dans toutes ses dimensions. Cependant, le reproche qu'on pourrait lui adresser est de n'avoir pas mis en relief les logiques qui sous-tendent la relation patient/traitant dans les deux médecines. SEUMO H. (2007), ETOA Marguerite S. (2007), DJIMELI A. (2007) affirment dans leurs articles respectifs que dans les hôpitaux publics camerounais, l'on tient en piètre estime la charité , le bon accueil et la notion de satisfaction des patients.

Par ailleurs, il n'a pas été question de lire uniquement des ouvrages spécialisés. Nous avons également parcouru plusieurs ouvrages de méthodologie et de sociologie générale. Ainsi, nous avons eu à consulter le dictionnaire de sociologie de BOUDON R.(1999) , celui écrit par lui et BOURRICAUD F.(1982), celui écrit par ALBIN M.(1998) ; dans lesquels nous nous sommes largement imprégnés des mots et expressions sociologiques et de leurs connotations. De plus, ces auteurs ont explicité les théories sociologiques et anthropologiques de manière à les rendre plus accessibles. Les approches, individualiste, behavioriste, culturaliste, structuraliste, diffusionniste, etc. y sont amplement détaillées.

Dans leur ouvrage collectif, ETIENNE J. et al (1997) donnent les terminologies sociologiques, les approches sociologiques tant classique que contemporaine et leur champ d'application. Nous y avons puisé des mots et expressions clés qui servent à faire des analyses sociologiques appropriées.

COULON A. (1987), s'appesantit sur l'ethnométhodologie et ses principes cardinaux. Il présente en outre les terrains qui siéent à cette théorie. Nous avons donc compris que cette théorie est adaptée aux études sanitaires si tant est qu'elle permet de dénicher les ethnométhodes des patients dans la quête de la santé ; les ethnométhodes propres à la profession de personnel soignant dans le contexte des médecines conventionnelle et traditionnelle. Est ethnométhode, toute habitude, toute stratégie apprise et intériorisée par un individu et s'originant dans sa culture, le contexte socioculturel, politique et économique dans lequel il vit.

RAYMOND A.(1967) pour sa part, retrace les itinéraires de la pensée sociologique des précurseurs aux contemporains-ceux de son époques- , en passant bien sûr par les classiques. De ces pères fondateurs de la sociologie, il met en relief les relans de sociologie dans quelques unes de leurs productions scientifiques. Il dit d'ailleurs que la paternité du vocable sociologie échoit à COMTE A. , lequel l'a forgé à l'université de BORDEAUX - BORDEAUX 10 très exactement- et en a fait une matière universitaire à part entière avec pour objectif principal l'étude de la société française.

ETIENNE J. et MENDRAS H. (1993) passent en revue ce qu'ils appellent les « grands thèmes de la sociologie » auxquels ils associent les « grands sociologues ». Dans cet ouvrage, nous avons noté ce que chaque auteur de sociologie a eu dire sur un thème précis et comment il y théorise. Ainsi DURKHEIM et sa théorie du fait social occupent une place prépondérante dans cet ouvrage, tout comme CROZIER M. et sa théorie portant sur les stratégies des acteurs dans les organisations, etc.

LALLEMENT M. (1993) a tablé sur l'histoire des idées sociologiques de leurs origines à DURKHEIM (Tome I), de PARSONS aux contemporains (Tome II). Dans ces parutions, il subsume l'essentiel des théories de ces différents auteurs et les rend plus abordables à la compréhension. En plus, il ressort les grands axes de chacune d'elle et leurs implications sur la perception des champs sociologiques et la conduite des recherches.

MBONJI E. (2005) recense les théories tant sociologique qu'anthropologique en les détaillant et en les synthétisant. Bien plus, il fait comprendre à ses lecteurs ce qu'ils doivent entendre par méthode, problème de recherche, cadre théorique, cadre conceptuel, intérêt de l'étude, etc. Cet ouvrage nous a paru être un parchemin pour qui veut faire de bonnes recherches ou pour qui veut produire de bons mémoires.

NISBET R. (1984) met en exergue les normes et les valeurs en sociologie. Pour elle, il existe une tradition sociologique que tous les chercheurs en sociologie fondamentale et pratique doivent respecter, voire protéger afin de pérenniser son caractère scientifique. Ainsi, il convient de dire que la sociologie comporte des canons théorique et méthodologique que les sociologisants doivent apprendre et maîtriser. Le cas échant, cette discipline perdrait sa « mémoire ». Cette dernière n'est autre chose que l'ensemble des précurseurs et classiques qui ont jeté les bases de cette science.

PERETZ H. (2004) revoit les méthodes en sociologie et met un accent particulier sur l'observation scientifique sous toutes ses formes. Aussi s'appesantit-il sur l'observation directe que les interactionnistes appellent l'observation in situ et cette autre forme d'observation chère à BRONISLAV MALINOSWKI (1926), à savoir l'observation participante encore appelée la participation observante (MBONJI E. op. cit.)

GARFINKEL H. (1967) ; (1985) a fait des analyses sur l'ethnométhodologie. Il est d'ailleurs présenté comme l'une des têtes de proue de cette théorie qui met un accent sur les motivations des individus en relation avec les ethnométhodes qu `ils ont apprises de leurs cultures. Pour lui , les actions individuelles ont le sceau ou le cachet de l'héritage culturel des individus et ils se comportent en fonction de cet habitus culturel. En clair, la société n'est que le produit des ethnométhodes que les individus mettent en oeuvre quotidiennement.

GOFFMAN E. (1973) pense que la vie en société s'inscrit dans une théâtralité où chacun joue le rôle qui lui est assigné plus ou moins bien. La société étant faite de rôles et de statuts qu'elle confère à ses élus, chacun parmi ceux-ci se doit de « jouer le rôle inhérent à son personnage ». Aussi peut-il arriver qu'on le joue bien ou moins bien. Dans la même optique, les actions individuelles s'inscrivent dans des « rites d'interaction » lesquelles émanent de la législation en vigueur dans la société qui fait jouer aux individus des rôles (GOFFMAN E.1974. p15).

Dans le tome II (1968), il nous a fait comprendre que les acteurs sociaux joue des rôles qui sont fonction de leurs différents statuts. Bien plus, dans nos relations en public, nous portons des sortes de masques qui correspondent à nos statuts sociaux et aux images que la société voudrait que nous renvoyions . Au surplus, en public nous ne sommes plus nous-mêmes. Nous sommes notre rôle, nous sommes ce que la société nous impose d'être en face des autres.

Dans son autre ouvrage (1961), il met en relief les interactions entre les malades mentaux se trouvant dans un asile- lieu qui n'est autre que le titre du livre en question-, il note à cet effet que les malades inventent de nouvelles normes(celles -là officieuses), pour se soustraire aux normes officielles afin de rendre moins pesant leur séjour dans cet univers médical. Son analyse nous a permis de cerner dans une certaine mesure les dessous des rapports entre traitants et soignants dans les structures médicales étudiées.

BACHELARD G. (1980), s'emploie à mettre en exergue les conditionnalités, mieux les critères de définition d'un esprit scientifique ou d'un travail scientifique. Il parle -entre autres choses- des types de recherche en sciences sociales. Il distingue le modèle de recherche empirico- inductif du modèle de recherche hypothético- déductif. Le premier modèle privilégie une méthode compréhensive et interprétative des faits sociaux. Le second modèle quant à lui s'appesantit sur une méthode explicative, positiviste et causaliste des faits sociaux. De plus, il détaille les différentes étapes d'un travail scientifique.

LADRIERE P. (2001), pense que les recherches en sociologie doivent se préoccuper des questions éthiques. En fait, il lui a été donné de constater que dans leur recherches, nombre de chercheurs font fi de l'éthique et passent outre les droits des populations sous études. En clair, au nom d'une recherche, se demande-t-il, doit- on saper les intérêts des enquêtés comme le font certains chercheurs sous l'instigation de certains organismes internationaux. Ces organismes internationaux, très souvent, ne cherchent pas à avoir le consentement des populations concernées.

Allant dans le même sens, GOSSELIN G. (1972), pense qu'il y a une « limite » que le chercheur ne doit pas franchir dans ses enquêtes. Il est des aspects de la vie des informateurs que le chercheur ne doit pas altérer, tordre et divulguer dans ses écrits parce qu'ayant trait à leur vie privée. Il dit également que bien des chercheurs ne se soucient pas de l'éthique et arrive à la conclusion selon laquelle il est urgent de se préoccuper de l'éthique dans les recherches en sciences sociales.

NGA NDONGO V.(2003) estime qu'il faille parler d'une sociologie africaine qui se préoccupera des questions de ce continent avec des canons théorique et méthodologique qu'elle  va emprunter à la « sociologie occidentale(classique et contemporaine) ». Il ne s'agit donc pas de tourner le dos à la sociologie occidentale comme certains pourrait être amenés à le croire. Bien au contraire, il que nous nous servions de la sociologie occidentale pour produire un corps important de connaissances sur notre continent. Pour lui, les africains sont mieux placés pour théoriser sur les réalités de leur continent.

Cadre théorique : De l'interactionnisme symbolique et de l'ethnométhodologie

Tout un courant de la sociologie s'est développé pour comprendre la société du point de vue de l'interaction des individus. Fondateur de cette théorie, BLUMER H. (MENDRAS H., op. cit.) a forgé le terme d'interactionnisme symbolique pour souligner ses deux principes de base : premièrement, la société est un réseau d'interactions entre les individus ; deuxièmement, les individus agissent sur les choses en fonction des significations qu'ils leur donnent et ils utilisent ces significations, ces symboles dans leurs interactions, ou plus exactement, ces symboles sont produits par l'interaction. Ainsi, la structure sociale et la culture sont vues comme le produit des interactions. BLUMER retourne la perspective « holiste » qui voit dans la structure et la culture l'encadrement des actions individuelles et il va jusqu'à laisser entendre qu'il n' y a rien d'autre à étudier pour comprendre la société que la vie quotidienne des individus. De là, ses successeurs ont développé l'ethnométhodologie, mot ambigu qui fait référence à l'ethnologie, puisqu'elle prône l'observation de la vie quotidienne dans nos sociétés, comme les ethnologues observent les moeurs des populations qu'ils étudient. En outre, ethno sous-entend l'idée que tout membre d'une société dispose du savoir de sens commun de sa société, une ethnoscience.

Cette position méthodologique conduit évidemment à s'intéresser aux cas atypiques pour analyser, a contrario, les cas normaux. Par exemple, BECKER H. (1985) a étudié le métier et la carrière des musiciens professionnels du jazz, profession qu'il exerçait lui-même. Il a montré l'importance des facteurs que les études classiques de sociologie du travail et des professions avaient tendance à négliger. Ainsi, l'ethnométhodologie conduit à faire de l'observation participante le principal outil de travail du sociologue et de l'anthropologue.

GOFFMAN E. (op. cit.), de son côté, a fait des études sur la vie des hôpitaux psychiatriques, ce qui l'a conduit à présenter la vie sociale comme une scène de théâtre où les acteurs jouent des rôles et accomplissent des rites d'interaction.

Enfin, attirés par les cas atypiques, les ethnométhodologues se sont intéressés aux marginaux et aux mécanismes de la déviance. L'étude pionnière en ce domaine est celle de BECKER H. (op. cit.) sur les fumeurs de marijuana dans laquelle il décrit méticuleusement l'apprentissage. Du point de vue du déviant, c'est la façon dont les autres le traitent de déviant, et le traitent en déviant, qui fait de lui un déviant : on met sur lui une étiquette qui devient bientôt un stigmate.

Par ailleurs, disons que les analyses interactionnistes étaient déjà au centre des travaux de la première école de Chicago. Everett C. HUGHES (1897-1983), professeur à Chicago puis à Montréal, est un des artisans de la seconde génération qui a forgé la notion de l'interactionnisme symbolique. Non seulement auteur d'ouvrages de référence ( Men and their work 1958, The sociological eyes, 1971), E. C. HUGHES a su impulser de nombreux travaux monographiques qui ont fait date dans la domaine du travail ( D. ROY), des professions ( E. FRIEDSON , Profession of medecine, 1971) ; de la déviance ( E. LEMERT, Human deviance, 1967 ; D. MATZA, Becoming deviant, 1969 ; BECKER H. , op. cit.) ou encore de la maladie ( GLASER B. et STRAUSS A. , Awareness of dying, 1965). L'interactionnisme prend enfin une forme originale et plus personnalisée avec la sociologie dramaturgique d'Erwing GOFFMAN (1922-1982), ancien élève de E. C. HUGHES, et dont l'une des ambitions majeures est de répondre au défi des fondations microsociologiques de l'ordre social.

En plus, l'ethnométhodologie est présentée comme la variante la plus récente mais aussi la plus radicale de l `interactionnisme symbolique. Pour son fondateur, GARFINKEL H. (op. cit.), la réalité sociale est une construction permanente qui n'a rien d'extérieur aux individus aux individus. Il s'inscrit dès lors dans une perspective phénoménolomogique qui le met en phase avec les travaux comme ceux de A. SCHUTZ , réfugié autrichien qui enseigna à la new school for social research( New York), et ses élèves P. BERGER et T. LUCKMANN ( The social construction of the reality, 1967). Lorsque, avec la fin des années 1960, s'amenuise le poids institutionnel des universités de Harvard, Columbia et Chicago, l'ethnométhodologie, jusqu'à lors confinée à un petit groupe de californiens, prend un premier envol institutionnel. Des travaux sur la justice, l'école, l'hôpital, les organisations, la science, les groupes de rencontre ou encore la délinquance, se multiplient.

L'interactionnisme serait donc une tendance récente de la sociologie américaine étudiant l'influence réciproque que les partenaires exercent sur leurs actions respectives lorsqu'ils sont en présence physiques les uns des autres (LALLEMENT M. 1993). Il ne s'agit pas de la personnalité de l'individu mais de ce qu'il est avec les autres. Nous avons porté notre choix sur cette théorie parce que notre thème est son reflet. En d'autres termes, quand on lit notre thème- la relation patient/ traitant dans les médecines conventionnelle et tradinaturelle africaines : cas de l'hôpital Laquintinie et de l'African Clinic de Douala (Cameroun) - l'on pourrait faire usage de l'interactionnisme symbolique et de l'ethnométhodologie pour mener à bien cette recherche. C'est le lieu de présenter les grands axes de ces théories.

Le premier fondement de l'interactionnisme est l'observation in situ. Cette dernière se veut la règle primordiale de l'interactionnisme parce que pour pouvoir étudier les rapports entre les acteurs sociaux, le chercheur doit pouvoir les observer (LAPASSADE G.1991). Dès lors, il est impérieux que le chercheur face corps avec son objet d'étude afin de voir et d'observer. En clair, il s'agit de porter un regard attentif sur les interactions humaines lesquelles constituent le deuxième fondement de cette théorie (MBONJI E.2005).

La notion d'interaction symbolique :

 Due à Herbert BLUMER en 1937, désigne l'unité minimale des échanges sociaux ou situation où chacun des membres d'un groupe joue, agit et se comporte en fonction de l'autre. L'interaction est ainsi une microstructure non préétablie mais formée à l'instant T de l'interface, et dont le présupposé est le partage des significations dans les situations particulières. (MBONJI E. op. cit., p22).

De plus, nous nous sommes inspirés des principes fondateurs de la démarche interactionniste pour conduire notre recherche. Selon H. BLUMER (1937), les humains agissent à l'égard des choses en fonction du sens que les choses ont pour eux. Ce sens provient des interactions de chacun avec autrui. C'est dans un processus d'interprétation mis en oeuvre par chacun dans le traitement des objets rencontrés que ce sens est manipulé ou modifié. COULON A. (1987) affirme à cet effet :

... Les interactionnistes soutiennent à contrario que c'est la description que les acteurs se font du social qui constitue en dernière analyse, l'objet essentiel de la recherche. Nous vivons, disent-ils, dans un monde à la fois physique et symbolique ; et c'est nous -mêmes qui construisons les significations de nos actions et du monde à l'aide des symboles signifiants. (Op.cit.p87).

Les chefs de file de cette théorie se sont intéressés à l'analyse des hôpitaux (FRIEDSON E. 1971) ; (GLASER B. et STRAUSS A. 1965) etc. Ceux-ci considèrent les représentations comme un autre fondement de l'interactionnisme. E. GOFFMAN (1961) a étudié les interactions entre malades et personnels soignants dans un asile. Il en ressort que les handicapés développent des adaptations secondaires pour échapper aux normes préétablies en tissant des relations entre eux.

L'ethnométhodologie pour sa part nous a permis de mettre en relief les «ethnométhodes » des patients et du personnel soignant. Ces deux parties adoptent des attitudes et des comportements en fonctions des représentations sociales qu'elles ont des deux formes de médecines. Ainsi, tout patient qui se rend dans une formation médicale de l'une ou l'autre médecine, met en oeuvre un certain nombres d'ethnométhodes qu'il a su intérioriser. Les ethnométhodes sont des us et coutumes sociales intériorisés par les acteurs (SCHUTZ A. op. cit.).

Cette théorie porte sur les méthodes des acteurs sociaux. Pour agir, ces derniers mettent sur pied des stratégies qui sont tributaires de leurs représentations et de leur savoir culturel. L'ethnométhodologie fait alors partie de la sociologie compréhensive en ceci qu'elle cherche à montrer pourquoi l'individu X va à droite plutôt que d'aller à gauche. GARFINKEL H. déclare à ce sujet : « Ethno semble faire allusion au savoir quotidien de la société en tant que connaissance de tout ce qui est à la disposition d'un membre ». (1985. p46).

Il existe également d'autres théories médicalisées qui s'inscrivent dans la vision interactionniste de la maladie et s'appesantissent sur la relation entre le malade et son traitant. Ces théories peuvent s'appliquer aussi bien à la médecine conventionnelle qu'à la médecine tradi-naturelle. En fait, la théorie des interactions sociales et la théorie de la réciprocité expliquent l'inter influence entre le patient et le traitant. Elles ont profondément l'aspect socio émotionnel ou affectif de la relation patient / traitant.

Ces théories dont la paternité reviennent à BENSING (op. cit.), mettent un point d'honneur sur l'étude des objectifs que veulent atteindre les patients et leur traitant. Elles s'intéressent aux logiques et modalités qui sous-tendent le traitement, la rédaction des ordonnances, bref à tout ce qui apparaît quand le patient est en interaction avec son patient. Elles analysent aussi le degré de communication, de rapprochement ou de distanciation existant entre le patient et son soignant.

En plus, elles marquent un temps d'arrêt sur le comportement des patients et du personnel traitant. Elles étudient aussi les tâches qui incombent à ce personnel et les émotions de tous les personnels impliquées dans la quête de la santé à l'hôpital.

LA THEORIE DE LA RECIPROCITE

Selon GOULDNER (1960), ROBERTS et ARUGETE (2000), la théorie de la réciprocité stipule que les individus ont tendance à transmettre aux autres les biens et les services dont ils font l'objet. Pour eux, les émotions et les sentiments que nous manifestons ne sont le produit que des émotions et des sentiments des autres envers nous. En clair, l'individu X se comporte envers l'individu Y en fonction de la manière donc Y se comporte envers lui. Bien plus, l'individu X donne à l'individu Y parce qu'il a reçu de l'individu Z et inversement. C'est dire que la vie ou du moins l'interaction sociale ne se résume qu'au don et au contre don dont parle Marcel MAUSS.

Au surplus, lors d'une consultation, le médecin ou l'infirmier exige du patient toute sont attention quand il lui parle. Le patient en retour attend de lui qu'il lui donne satisfaction. ROBERTS et ARUGETE (op. cit.) pensent que les patients bien éduqués son respectueux envers leur traitant, sont aussi dans la plupart des cas satisfaits et réciproquement. Cela engendre un climat de sérénité et partant induit mieux favorise la guérison du patient. Ils pensent aussi que le comportement du patient est fonction de l'intensité et du type de sa maladie. La nature de la maladie conditionne l'humeur et le comportement du malade envers le médecin ou le tradi - thérapeute, son entourage et dans une certaine mesure sa famille ; d'où l'on peut dire que la nature de la maladie est liée à l'attitude, à la mentalité et au comportement du malade. Elle influe sur son tempérament. D'où il semble impérieux d'intégrer cette dimension dans la prise en charge psychosociale du malade.

METHODES DE COLLECTE DES DONNEES

Ce qui fait la scientificité d'un travail de recherche, c'est le respect scrupuleux de la part du chercheur de la méthode. C'est elle qui différencie la connaissance scientifique de la connaissance vulgaire et profane. La méthode peut être comprise comme le chemin qu'emprunte un chercheur pour atteindre les objectifs liés à son étude. A ce propos, MBONDJI E. affirme :

Du grec meta et hodos : chemin ; ou du latin « methodus » : poursuite ; la méthode est la manière d'aborder l'objet d'étude, le chemin parcouru, la voie à suivre par l'esprit humain pour décrire ou élaborer un discours cohérent, atteindre la vérité de l'objet à analyser. (op.cit.p11).

Pour les hommes de Science, toute personne qui entreprend une enquête doit faire usage de techniques pour recueillir les informations et révéler des vérités sur son objet d'étude. Ainsi, en sociologie, la recherche s'inscrit dans cette logique et ne saurait se faire sans un canal méthodique qui sert de ligne de conduite, des gardes- fous à celui qui recueille les informations. Cela lui permet de garantir la crédibilité scientifique de son travail. Pour mener à bien nos multiples investigations sur le terrain d'étude (l'HLD et l'AC), nous nous sommes servis des questionnaires, des entretiens de groupe avec les patients, des récits de vie et de l'observation in situ ou observation directe. ( GRAWITZ M. op. cit.). C'est au travers de ces techniques que nous avons pu cerner les logiques qui sous- tendent l'accès à la santé à l'HLD et l'AC. Dans les lignes qui suivent, nous nous proposons de présenter brièvement le panorama de ces techniques et leur apport dans notre recherche.

LE QUESTIONNAIRE DESTINE AUX PATIENTS

Ce questionnaire avait pour objectif de nous donner l'idée que les patients dans ces hôpitaux se font du personnel soignant, ceci en se basant sur les relations qu'ils entretiennent avec eux et les représentations qui en découlent. Ce questionnaire ne renfermait pas des interrogations en vue de chiffrer les données. Il visait tout simplement à nous imprégner de ce que les patients qui sont à l'AC et à l'HLD pensent de leurs soignants. Il nous a permis de glaner un nombre considérable d'informations (BEAUD M. 2003).

LE QUESTIONNAIRE DESTINE AU PERSONNEL SOIGNANT

Au travers de ce questionnaire, nous voulions mettre en évidence ce que le personnel soignant de l'AC et de l'HLD pensent de leurs patients et des rapports qu'ils ont avec eux. Les questions qui s'y trouvaient s'attardaient sur la couverture sanitaire notamment sur la dispensation des soins. Nous voulions avoir une idée de ce qu'ils pensent de leurs patients, de leurs professions selon qu'ils étaient médecins, infirmiers, tradit-hérapeutes, infirmiers et/ou aides-soignants. La connaissance scientifique ne peut pas s'élargir sans questionnement préalable. BACHELARD G. (1967) affirme à cet effet : « Pour un esprit scientifique, toute connaissance est une réponse à une question. S'il n'y a pas de questions, il ne peut y avoir de connaissance scientifique. » (p14).

TYPOLOGIE DES ENTRETIENS UTILISES LORS DES ENQUETES

- Les entretiens semi directifs

Dans l'optique de cerner les interactions entre le personnels de ces hôpitaux et leurs patients, il s'est avéré indispensable que nous ayons des entretiens et les interviews avec toutes les parties en présence notamment les personnes ressources comme les directeurs, les médecins, les majors des pavillons, le personnel paramédical et les patients. Les entretiens que nous avons eus avec nombre de ces informateurs étaient semi directifs. Nous leur faisions connaître notre thème et leur laissions la latitude de s'exprimer en orientant tout de même leurs réponses dans le sens de notre sujet (BLANCHET A. et al, 1985).

- Les entretiens à questions ouvertes

Nous avons fait usage de ce type d'entretien pour recueillir le maximum d'informations possibles lors des entretiens de groupe avec les patients et le personnel soignant pendant les pauses café. Nous leur faisions connaître notre sujet et nous en discutions. C'est alors que chacun s'exprimait librement et nous faisait part de ses expériences personnelles dans les hôpitaux publics de la ville de Douala en général et à l `HLD en particulier ( PENEFF J., 1990). Aux fins de valider ou d'invalider les informations recueillies, nous avons eu recourt à l'observation in situ ou à l'observation directe et à l'observation participante.

L'observation in situ ou l'observation directe

L'on ne peut bien cerner les interactions entre le personnel traitant et les patients dans la quête de la santé si on ne les observe pas directement. L'observation est une étape primordiale dans tout travail de recherche. Elle est synonyme d'allées et venues du chercheur sur son terrain d'étude pour voir et regarder ce qui s'y passe (PERETZ H., 2004).

Selon SELYE (1973), l'observation se subdivise en trois étapes. Il pense que, pour bien observer, le chercheur doit remarquer, reconnaître et évaluer. Il dit en outre que l'observation permet de tester ses hypothèses et les suppositions émises. L'observation du réel s'avère ainsi indispensable à toute entreprise voulant se justifier sur des principes scientifiques. C'est sur cette base que LACOSTE Y.(1966) reconnaît IBN KHALDOUM, historien maghrébin du XIVème siècle, comme le fondateur de l'histoire scientifique, car il aurait été le premier à axer sa recherche historique sur l'observation de la nature des choses. Observer, pour le scientifique, est donc une préoccupation majeure. Son esprit doit y demeurer attaché comme le sont les yeux de l'automobiliste sur la route.

Les observations que nous avons faites au sujet des rapports entre personnel de santé et patients dans les deux structures médicales que nous avons étudiées, nous ont permis de considérer et de mettre en valeur les logiques de ces rapports et ce qui les sous-tend. Elles nous ont permis de voir comment les soins sont dispensés, comment sont accueillis les patients et comment les patients attendent de façon stoïque et téméraire les consultations médicales. Grâce à elles, nous avons pu établir le degré de communication, de rapprochement et de distanciation entre le personnel soignant et les patients dans les deux formes de médecines (ANCELIN A., 1972).

L'observation participante et la participation observante

Elle nous a aidé à intégrer les milieux hospitaliers de Laquintinie et de l'AC. Ainsi nous nous sommes fait passé pour un patient afin de ressentir ce que les patients éprouvent lorsqu'ils viennent en consultation auprès du personnel soignant (VAN DER GEEST S., et SARKODIE S., 1998). Cette participation observante a duré deux semaines à l'HLD.et une semaine à l'AC.

BRONISLAV MALINOSWKI (1926), pour étudier le crime et les coutumes dans les sociétés dites primitives, a cru bon de devenir un membre à part entière desdites sociétés. Dans la même perspective, Robert JAULIN (1983) pense qu'il faut pouvoir faire partie du phénomène étudié pour être en mesure d'en parler correctement. C'est d'ailleurs ce qu'il a fait concernant l'inceste puisqu'il l'avait expérimenté avec sa soeur et, par conséquent, estimait qu'il était plus à même d'en parler par rapport à ces autres chercheurs qui, - s'adressant implicitement à Claude LEVI- STRAUSS- ne l'ont étudié que de « l'extérieur » (MBONJI E., op. cit.).

* 1 Guérisseurs traditionnels en langue Douala

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld