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La relation thérapeutique dans les interférences entre la biomédecine et la tradipratique. Une lecture anthropologique à  l'hôpital Laquintinie et à  l'African Clinic de Douala (cameroun).

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par Bruno Duovany BEKOLO ENGOUDOU
Université de Douala (Cameroun) - D.E.A en anthropologie, mention santé 2007
  

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2- De la compréhension et de la patience

De nos observations et de nos enquêtes sur le terrain, il découle que le praticien de la médecine naturelle doit toujours comprendre les attentes et les sollicitations de son patient. Il s'agit de saisir les maux du malade et de pouvoir les interpréter afin de soigner ses affections. Pour arriver à le faire, il semble indispensable pour le traitant de faire preuve de patience.

Du latin patientia, la patience est une aptitude à supporter avec constance ou résignation les maux. Le naturopathe nous a paru patient parce qu'il a toujours écouté tout ce que ces patients avaient à lui dire afin de comprendre, de cerner leurs maladies. Bien des patients révèlent d'ailleurs cette qualité propre à ce naturopathe. Ils disent à ce sujet : « Il nous écoute tellement qu'il nous donne même les conseils pour résoudre certains problèmes de la vie. Il ne s'occupe pas seulement de nous prescrire des médicaments, il nous comprend. Quant on le rencontre, on est sur qu'on va guérir »

Il faut également dire que la compréhension et la patience dont il est question ici sont propres non seulement au praticien mais aussi aux patients. En fait ces derniers doivent pouvoir comprendre le praticien et lui obéir. Il sera alors question de se conformer aux prescriptions et proscriptions faites par le traitant (MEUEWISER L., SHAAP C. and SJAAK VAN DER G., op. cit.). Dans cet article, ces auteurs s'attellent à montrer comment la bonne entente entre les patients et leurs traitants facilite la guérison des patients. Ils révèlent même que la qualité de la conversation conditionne également le rétablissement des patients. Selon eux, l'interaction qu'il y a entre le praticien et son patient ne doit pas se limiter à la médication et/ou à l'auscultation du patient. Elle est, tout au contraire, bien plus dense qu'on ne l'imagine et intègre le social, le culturel et le thérapeutique La compréhension et la patience mutuelles sont indispensables et c'est pourquoi le responsable de l'African Clinic affirme : « Quand un praticien prend le temps d'écouter son patient et vice-versa, le guérison du patient est assurée ou garantie » (Entretien réalisé le 15/05-07 à l'African Clinic), SPEEDING E. et ROSE D. 1985) Bien plus encore, la relation patient/ traitant dans la médecine naturelle africaine doit être bâtie sur ce que nous appellerons un « code médical ».

3- Le respect du « code médical » traditionnel

Ce que nous appelons code médical traditionnel n'est pas à proprement parler l'équivalent du code de déontologie médicale qui régit le rapport entre le patient et son traitant dans la médecine des hôpitaux. Ce code de déontologie des hôpitaux est légal , formel voire universel , contrairement à celui de la médecine naturelle qui se veut informel, illégal et qui, de toute évidence, semble dépendre de l'échelle de valeurs du praticien. Aussi pourrait-on remarquer des dérapages et/ou des abus notoires de leur part puisqu' ils sont « libres » de tout mouvement . Cependant, ils sont tenus de se conformer à une certaine éthique traditionnelle.

Le « code médical » dont il est question ici est celui propre aux praticiens de l'African Clinic. Comme quoi chaque structure a ses normes officielle et officieuse. (COULON A 1987). Quand bien même il existe une norme « Commune » et « officielle », il y en a qui se soustraient et inventent des stratégies d'action s'inscrivant dans la grille des normes « officieuses ». (CROZIER M. ET FRIEDBERG E , 1977). Cependant, il est admis de tous les naturopathes que la relation médicale est basée sur le respect de la vie des patients, la confidentialité de leurs maladies, qui s'assimile à une sorte de secret médical, le refus de rançonner les patients, l'humanisme. A cet effet, le Dr LOUMPIT de l'African Clinic déclare :

 Ce qui importe le plus dans notre médecine, c'est la guérison du patient. Je vais même jusqu'à baisser les prix des médicament quand le patient peut pas les acheter. Et s'il ne peut vraiment pas les acheter, je lui donne les noms des plantes médicinales qu'il devra associer dans une potion pour pouvoir se soigner. Ceci moyennant une modique somme d'argent. (Entretien réalisé le 16 mai 2007 dans les locaux de l'AC).

Pour M. EBOUELLE J., praticien de la médecine naturelle et détenteur d'une pharmacie considérable au quartier Makepè ,la relation entre le patient et son traitant dans cette médecine obéit à des valeurs reconnues universellement comme justes et nobles à savoir l'humanisme, la fraternité, la solidarité, et le secret médical. Il dit à ce sujet : « Mon patient pour moi, c'est un fils, un frère, un proche qui a besoin de mon aide. Je ne peux par conséquent pas l'exploiter pour m'enrichir. Je ne suis pas de ceux qui profitent de la misère des autres. Ça porte malheur. Mais je sais que je peux bien aider tous ses gens sans les rançonner » (Entretien réalisé le 07-05-07 au quartier Maképè dans la clinique des Dr EBOUELLE Jacques)

En fait, la médecine naturelle africaine étant fille de la médecine traditionnelle d'Afrique, laquelle a toujours tenu l'être malade en grande estime en minorant les considérations pécuniaires, l'on comprend bien pourquoi les discours du Dr LOUMPIT et de M. EBOUELLE Jacques se recoupent. Les traditions africaines ont toujours accordé une valeur inestimable à l'Homme. En plus, en Afrique en général et au Cameroun en particulier, l'on sait qu'il n'y a de richesses que l'Homme. Aussi certains praticiens de la médecine naturelle s'efforcent-ils, bon an mal an, de pérenniser cette tradition. D'autres par contre, la mettent à mal en s'en servant pour extorquer de l'argent aux populations (HOURS B., op. cit.). FAINZANG S.(op. cit. ) l'illustre allègrement dans l'un de ses ouvrages .

La déontologie médicale tradinaturelle met donc l'Homme au centre de ses préoccupations. Ce qui fait généralement problème, c'est l'entrée en lice des considérations financières à une époque où les camerounais en général et ceux de Douala en particulier, semblent déifier l'argent. En outre, la ville de Douala, de part son statut de capitale économique du Cameroun, fait de ses habitants des personnes toujours intéressées, à la recherche du profit et même calculatrices. L'économisme en est la règle d'or. Cela se ressent dans presque tous les secteurs d'activité. La médecine traditnaturelle n'étant pas en reste. C'est alors que la théorie de HOMANS G. (), stipulant que la vie sociale ne se résume qu' en des lois économiques, où tout s'échange, où chaque individu ne cherche qu'à minimiser ses coûts et à maximiser ses profits, se trouve confirmée. Cependant, l'on retrouve des praticiens probes et amateurs de leur métier. D'où, il nous semble aviser de dire que les brebis galeuses se retrouvent tant dans la médecine moderne conventionnelle que dans la médecine naturelle. C'est ainsi également que l'on retrouve de bons praticiens dans les hôpitaux comme on en retrouve dans le médecine naturelle (DE ROSNY 1990, op. cit.). C'est ce que confirme le propos du Dr LOUMPIT à l'AC :

  Vous savez, les brebis galeuses, on les retrouve partout. Il y a de bons élèves qui côtoient toujours les mauvais élèves. La médecine moderne, il y a de bons soignants. Dans la médecine rationnelle, il y en a également. A l'hôpital, vous avez sans doute remarqué de mauvais élèves. Quand vous y étiez lors de vos enquêtes. Maintenant que vous explorez la médecine naturelle, vous allez aussi rencontrer de bien mauvais élèves. Les parvenus, au Cameroun, sont partout même dans le domaine de la médecine. Vous avez sans doute entendus parler des charlatans, des féticheurs et autres. Voilà quelques parvenus de la médecine naturelle. C'est d'autant plus dangereux et inquiétant que notre régularisation tarde à être effective. (Entretien réalisé le 16-05-2007 dans les locaux de l'African Clinic).

C'est dire que les codes de déontologie médicale des médecines conventionnelle et tradinaturelle, sont foulés au pied par certains prestataires de soins, qu'ils soient médecins ou tradithérapeutes (TCHINDA T. C., 1981 p30)

Au demeurant, le code médical en médecine naturelle doit être perçu comme un garde -fou sans lequel pratiquer cette médecine serait difficile. Il exige du praticien ou du tradithérapeute le respect du secret médical, le respect du patient, l'humanisme, la solidarité, la compréhension et la patience. Toutes ces exigences font dès lors penser que la médecine naturelle est des plus sérieuses en ceci qu'elle ambitionne de guérir, de soigner et de revitaliser le malade (MANUILA I., MANUILA A et MICOULIN M. op. cit.)

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius