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Du secret professionnel du ministre de culte

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par Rémy MUNYANEZA
Université nationale du Rwanda - Bachelor's degree en droit 2008
  

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§3. Obligation de faire connaître le secret

Le confident est délié de son obligation au silence dans le cas où la loi l'oblige à se porter dénonciateur. L'ordre de la loi justifie dans ce cas la révélation du secret professionnel, et par conséquent de la personne qui le lui a confié. Le dépositaire ne jouit pas dans ce cas ci de la faculté d'apprécier lui-même l'opportunité de la révélation.

Dans certaines hypothèses, la révélation est justifiée par la loi. Nous pouvons entre autres citer une disposition du livre 1er du code civil relative aux déclarations des naissances. L'art. 119 CCL I impose au père ou à défaut du père à la mère ou aux personnes qui auraient assisté à un accouchement de le déclarer à l'officier de l'état civil112(*).

Dans ce cas, même un dépositaire de secret doit faire aux autorités les déclarations qui s'imposent. Ainsi par exemple, « un ministre du culte qui assistent à un accouchement d'un enfant naturel ne peut pas s'abstenir de déclarer à l'officier de l'état civil que le nouveau-né est issu d'un commerce illégitimes113(*) ».

La transgression du secret professionnel peut aussi avoir une influence sur la forme d'une obligation de déclarer certains faits qui n'ont pas forcément une nature infractionnelle. Tel est par exemple le cas de la santé publique114(*).

L'article 258 CPL II punit « de six mois à cinq ans et d'une amende de cinq mille à vingt mille francs ou de l'une de ces peines seulement, celui qui ayant connaissance d'un crime déjà tenté ou consommé, n'aura pas, alors qu'il était encore possible d'en prévenir ou limiter les effets ou que l'on pouvait penser que les coupables ou l'un d'eux commettraient de nouveaux crimes qu'une dénonciation pouvait prévenir, averti aussitôt l'autorise administrative ou judiciaire. Echappent à ces dispositions le conjoint, les parents ou alliés de l'auteur du crime ou de la tentative jusqu'au quatrième degré inclusivement, sauf en ce qui concerne les crimes commis sur les enfants de moins de quatorze ans ».

Il apparaît clairement que ce texte de loi ne prévoit pas de dispense en faveur des détenteurs du secret professionnel, mais seulement en faveur du conjoint et des parents et alliés jusqu'au quatrième degré. Lorsque la commission d'une infraction apparaît imminente ou qu'il y a lieu de craindre la récidive, il est du devoir de tout citoyen, y compris le ministre du culte qui en aurait eu connaissance, d'y parer ou d'essayer d'en limiter les conséquences, en la dénonçant aux autorités qui s'occupent de sa répression.

Le degré de réalisation de l'infraction importe peu, le simple fait qu'elle soit tentée justifie la dénonciation.

Le ministre du culte est aussi obligé de lever le secret professionnel lorsque par sa révélation il peut empêcher la commission d'une infraction qualifié crime ou délit contre l'intégrité corporelle de la personne, ne fut ce que pour limiter ses conséquences.

L'art.256, 1° CPL.II dispose que « sera puni d'un emprisonnement de deux mois à cinq ans et d'une amende de dix mille francs au maximum ou de l'une de ces peines seulement, quiconque, pouvant empêcher par son action immédiate sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un fait qualifié crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne, s'abstient volontairement de le faire. »

Ainsi, se rendra coupable d'une telle infraction, le ministre du culte qui restera passif face à une situation dont il voit nettement les effets préjudiciables ou nuisibles pour quelqu'un, au moment où sans risque pour lui, sa révélation pouvait éviter la réalisation de ce fait.

Enfin le ministre du culte est obligé de transgresser le secret professionnel dans le cas où sa révélation prouverait l'innocence d'une personne incarcérée préventivement ou déjà jugée pour crime ou délit. Selon l'article 256, 3° CPL II, qui stipule que : « Sera puni d'un emprisonnement de deux mois à cinq ans et d'une amende de dix mille francs au maximum, ou de l'une de ces peines seulement : 3° quiconque, connaissant la preuve de l'innocence d'une personne incarcérée préventivement ou jugée pour crime ou délit, s'abstient volontairement d'en apporter aussitôt le témoignage aux autorités de justice ou de police. Echappent à cette disposition le coupable du fait qui motivait la poursuite, ses coauteurs, ses complices, son conjoint, ses parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclusivement. Aucune peine ne sera non plus prononcée contre celui qui, après s'être abstenu, apportera son témoignage tardivement mais spontanément. ».

On se trouve devant une situation où un inculpé risque d'être victime d'une erreur judiciaire, alors que quelqu'un en l'occurrence un ministre du culte détient certaines preuves qui permettraient de l'innocenter. L'aide prévue par l'article consiste pour lui d'apporter son témoignage pour faire savoir la vérité, peu importe la façon ou voie par laquelle il a obtenu cette connaissance. A cette abstention d'aider cette personne injustement soupçonnée d'un crime ou d'un délit, s'appliquent les peines prévues car cet inculpé est menacé d'un péril grave puisque par hypothèse, il est déjà incarcéré ou risque de l'être.

Remarquons ici, que le législateur rwandais n'a prévue aucune dispense en faveur des détenteurs d'un secret professionnel en ce qui concerne les articles 256 et 258 déjà cité, sauf en ce qui concerne l'article 178 CPL II, qui stipule que : « Sous réserve des obligations résultant du secret professionnel, sera puni d'un emprisonnement de dix à vingt ans et d'une amende de vingt mille francs au maximum celui qui, en temps de guerre, ayant connaissance de projets ou d'actes de trahison, d'espionnage ou d'autres activités de nature à nuire à la défense nationale, n'en fera pas la déclaration aux autorités militaires, administratives ou judiciaires dès le moment où il les aura connus115(*). »

Ceci suffit à démontrer l'illogisme avec lequel la question du secret est traitée par le Code pénal. En effet, si par exemple en temps de guerre, un ministre du culte prend connaissance dans l'exercice de sa profession, de projets ou d'actes de trahison, d'espionnage etc., il ne risque aucune sanction en s'abstenant de prévenir les autorités puisque l'article 178 qui punit cette abstention lui confère le droit de respecter les obligations de l'article 214. Par contre les articles 256 et 258 ne formulent pas cette réserve et un ministre du culte qui ne dénonce pas un crime qui risque de se commettre ou qui s'abstient de révéler à la justice les preuves de l'innocence d'une personne incarcérée risque d'encourir une peine. Ceci parait assez surprenant puisque les faits prévus à l'article 178 semblent tout de même plus graves pour la nation. Il est étonnant que les personnes soumises au secret professionnel n'aient pas à dénoncer des actes et projets qui peuvent mettre en péril la sécurité du pays. Le législateur rwandais semble s'être inspiré de la loi française pourtant critiquable pour son incohérence116(*).

En outre, les articles 256 et 258, qui ne dispensent pas les détenteurs d'un secret professionnel, prévoient une exemption de peine en faveur des parents et alliés jusqu'au quatrième degré. En d'autres termes, le ministre du culte devrait trahir son pénitent, mais le cousin peut se taire impunément. Selon R. KINT Cette solution parait discutable ; ces critique ne signifient pas qu'il conteste le fondement des dispositions des articles 256 et 258 : lorsqu'un individu risque d'être victime d'un crime, il parait simplement humain de l'en aviser quelle que soit la façon dont on apprit ce danger117(*).

Contrairement au législateur rwandais qui n'a pas prévue de dispense pour les détenteurs de secret professionnel pour les articles 256 et 258 CPL II, le législateur français lui a prévue une exception pour les détenteurs de secret professionnel.

En effet l'article 434-1 du Code pénal français118(*) stipule que : « Le fait, pour quiconque ayant connaissance d'un crime dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets, ou dont les auteurs sont susceptibles de commettre de nouveaux crimes qui pourraient être empêchés, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende.

Sont exemptés des dispositions qui précèdent, sauf en ce qui concerne les crimes commis sur les mineurs de quinze ans :

1° Les parents en ligne directe et leurs conjoints, ainsi que les frères et soeurs et leurs conjoints, de l'auteur ou du complice du crime ;

2° Le conjoint de l'auteur ou du complice du crime, ou la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui.

Sont également exemptées des dispositions du premier alinéa les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13. » Rappelons que l'article 226-13 régit le secret professionnel.

L'article 434-3 du même Code français prévoit aussi une dispense en faveur des détenteurs de secrets professionnels, cet article stipule que : « Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende. Sauf lorsque la loi en dispose autrement, sont exceptées des dispositions qui précèdent les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13. » Ceci voudrait dire que le ministre du culte qui se trouverait dans l'une des deux situations prévues par l'article 434-1 et 434-3, aura la possibilité de lever le secret professionnel mais sans pour autant avoir l'obligation de le faire, puisque la loi lui en donne la dispense.

La doctrine française estime que l'obligation de dénoncer doit dépendre de la nature même du secret119(*). Elle estime que le dépositaire doit être délié du secret professionnel lorsqu'il s'agit par exemple des infractions qui menace dangereusement la sécurité de l'Etat : et cela pour l'intérêt supérieur de la nation, mais non pas à cause des infractions qui ne causent qu'un dommage minime120(*).

Tout compte fait, il est question de voir dans quelle mesure l'obligation de se taire doit fléchir en présence d'une des causes de non-imputabilité reconnues par notre loi, car, l'un ne peut être respecté sans sacrifier l'autre. La dispense d'observer le secret s'explique alors par un intérêt supérieur à celui d'un client et à celui de la profession. Et l'intérêt général qui, normalement impose le secret, exige ou admet au contraire, qu'il soit révélé pour des raisons plus hautes.

Rappelons que la dénonciation ne justifie la révélation du secret professionnel que si son auteur a acquis la connaissance des faits dénoncés, dans l'exercice des fonctions. En l'absence de tout ordre de la loi, le dépositaire de secrets professionnels qui les aurait révélés doit être poursuivi en vertu de la disposition sanctionnant l'obligation au silence.

Ici nous pouvons nous demander ce qui est mieux pour notre société, entre le fait de dispenser les ministres du culte de participer à la manifestation de la vérité sous le voile du secret professionnel ou le fait de les obliger de jouer un rôle dans la recherche de la vérité ?

Comme nous l'avons démontré dans le premier chapitre, le secret professionnel du ministre du culte met en jeu deux ou plusieurs intérêts qui sont plus ou moins contradictoires, à savoir la confiance qui doit régner entre le ministre du culte et son pénitent, car celui-ci ne viendrait pas se confesser s'il craignait que son secret puisse être divulgué, ensuite la soif de la vérité qui sévit dans plusieurs des sociétés surtout une société comme la notre (société rwandaise) qui a connu les événements tragique de 1994 et laquelle société ne pourrait arriver à une véritable réconciliation sans avoir découvert la vérité sur ce qui s'est passé.

Notre propre opinion est que les deux intérêts mises sur une balance, la deuxième à savoir celle de la manifestation de la vérité serait plus pesante que la première, donc c'est avec raison que le législateur rwandais n'a pas voulu prévoir ses dispenses en faveur des ministres du culte. C'est pour maximiser les chances de découvrir la vérité que les ministres du culte sont astreints de transgresser le secret professionnel dans certains cas, que nous avons cités ci-haut.

* 112 Art. 119 de la loi n° 42/1988 du 27 octobre 1988 portant titre préliminaire et livre premier du code civil, in J.O., 1989.

* 113 G. MINEUR , op. cit., p.175.

* 114 C.M. UMWALI, op. cit., p.86.

* 115 Art. 178 CPL II, déjà cité.

* 116 R. KINT, op. cit., p.34.

* 117R. KINT, op. cit., p.34.

* 118 Art. 434-3 du Code pénal français, déjà cité.

* 119 FLORIO R. et COMBALDIEU, Le secret professionnel, Paris, Flammarion, 1973, p.149.

* 120 C.M. UMWALI, op. cit., p.90.

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