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Impacts des échanges universitaires internationaux sur les étudiants de l'Université Lumière Lyon 2: cap sur le Brésil

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par Thibault Pourhadi
Université Lumière Lyon 2 - Master 2 recherche sciences de l'éducation et de la formation 2012
  

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    Année universitaire 2011-2012

    Université de Lyon

    Université Lumière Lyon 2

    Institut des Sciences et des Pratiques d'Éducation et de Formation.
    Département de Sciences de l'éducation.

    Impacts des échanges universitaires

    internationaux sur les étudiants de l'Université

    Lumière Lyon 2 : cap sur le Brésil

    Mémoire de Master2 Recherche

    Sciences de l'éducation et de la formation

    Nom de l'étudiant : Directeur du mémoire :

    Pourhadi Thibault Professeur Jean-Claude Régnier

    N° d'étudiant : Séminaire :

    5112093 Apprentissages, Didactiques et Interactions

    Résumé

    Cette recherche se propose de situer les effets des échanges universitaires internationaux chez trois étudiantes de l'Université Lumière Lyon 2 séjournant au Brésil pour des durées de deux à six mois. Notre objectif est d'explorer les liens qu'entretiennent les transformations socioculturelles des étudiantes sur place avec leur niveau de compétence interculturelle. Pour mener à bien ce travail, nous nous appuyons en premier lieu sur de nombreux travaux issus de la littérature scientifique pour clarifier le concept de transformations socioculturelles et celui de compétence interculturelle. Ensuite, nous présentons notre méthodologie. Initialement, nous avions prévu d'interroger les participants avant leur départ pour le Brésil puis à leur retour en France. Cependant, en raison des difficultés rencontrées lors de la composition de l'échantillon, ce suivi n'a pu être mis en place. En conséquence, les données sur lesquelles repose notre étude sont rétrospectives. Pour les recueillir, nous avons d'abord administré au retour de nos trois étudiantes en France une série de dix questionnaires présentés sous forme d'auto-évaluation avant de conduire un entretien semi-dirigé avec chacune d'elles. Notre procédure de recueil de données nous a ainsi fourni une large quantité d'informations sur la base desquelles de multiples facteurs de transformations et d'évolution ont pu être analysés à la lumière de notre cadre théorique, puis recoupés. À l'issue de notre étude, et par delà les limites de notre méthodologie, nous constatons qu'en dépit de caractéristiques uniques à chaque séjour tous ont été un véritable agent de changement chez les étudiantes. Il ressort également que la nature des expériences vécues sur place a affecté positivement le développement respectif de la compétence interculturelle chez l'ensemble des participantes.

    Mots clés : Transformations socioculturelles, Compétence interculturelle, Études intégrées, Échanges universitaires internationaux, Séjour d'étude à l'étranger, Interculturalité

    Abstract

    The scientific literature shows that the sociocultural transformations and intercultural competence of international students have both been widely investigated the academia, but rarely linked together. The present research explores this relationship in order to determine how the level of sociocultural transformations experienced abroad influences the level of intercultural competence in a group of three international students. The subjects are French female students spending up to six months in Brazil. All of them were asked to fill out a series of questionnaires upon return. The items aimed at obtaining pertinent information in areas pertaining to sociocultural transformations and intercultural competence, including communicative competence, cultural distance, intercultural sensitivity, social capital, acculturation orientations of host society, social support, academic adjustment and acculturative stress. Most often, answers were rated on a 5-point Likert-scale format. Then, based on the results, interviews were conducted to further investigate students' experience abroad, elicit their changes and pinpoint pivotal factors. It is expected that this study will shed greater light on how key sociocultural components affect the construction of students' intercultural competence.

    Key words : Sociocultural transformations, Intercultural competence, Study-abroad programs, International exchange programs, Interculturality

    Remerciements

    Je remercie mon directeur de mémoire, M. Jean-Claude Régnier, pour m'avoir offert l'opportunité de mener à bien ce projet.

    Je souhaite également remercier chaleureusement les étudiantes qui ont accepté de participer à cette étude pour la force de leur engagement.

    Introduction

    Aujourd'hui, les échanges universitaires internationaux, ou programmes d'études intégrées, sont une pratique largement répandue. D'ailleurs, depuis plusieurs années, les partenariats internationaux entre universités sont en pleine expansion et la pratique d'échange international dans ses diverses modalités tend à prendre une place croissante comme phénomène de société. À l'aide de quelques chiffres, illustrons ceci à l'échelle mondiale, puis à l'échelle nationale, et enfin à l'échelle locale.

    · En 2009, on comptait 3 324 871 étudiants internationaux dans le monde. Ce nombre a augmenté de 31,3% depuis 2005 (CampusFrance, 2011).

    · En France, nous avons accueilli plus de 280 000 étudiants étrangers en 2010-2011 dont 77% étaient inscrits à l'université. Ces étudiants étrangers représentaient plus de 10% du total des étudiants et plus de 40% du total des doctorants (CampusFrance, 2011).

    En ce qui concerne la mobilité sortante, près de 75 000 étudiants français sont partis étudier à l'étranger en 2010-2011 (CampusFrance, 2011).

    Notons également que la mobilité sortante (+7,7%) et la mobilité entrante (+5,1) sont toutes deux en progression depuis 2005 (CampusFrance, 2011).

    · À l'Université Lumière Lyon 2 en particulier, en 2011-2012, nous comptabilisions 523 accords d'échanges avec 337 établissements partenaires dans 63 pays. La mobilité étudiante permettait au total à un millier d'étudiants inscrits dans notre établissement de se rendre à l'étranger pour leurs études (Europe, hors Europe et stage inclus) (Université Lumière Lyon 2, 2012).

    En 2012-2013, le nombre d'accords d'échanges, d'établissements partenaires et de pays disponibles est en augmentation par rapport à l'année précédente. L'université comptabilise désormais 581 accords d'échanges avec 340 établissements partenaires dans 64 pays. Ce sont plus de 680 étudiants inscrits à l'Université Lumière Lyon 2 (hors stages cette fois) qui auront l'opportunité de séjourner à l'étranger dans le cadre de leurs études (Université Lumière Lyon 2, 2012).

    Soulignons que ces chiffres traduisent une augmentation de la mobilité internationale des étudiants inscrits à l'Université Lumière Lyon 2 de 25% sur les cinq dernières années (Université Lumière Lyon 2, 2012).

    D'autre part, notons qu'une étude de la Commission Européenne définit la mobilité internationale
    comme l'un des indicateurs de la performance des politiques nationales en matière de recherche

    (European Commission, 2002), et remarquons que la plupart des universités et des établissements d'enseignement supérieur ont tendance à contextualiser la pratique de l'échange international au niveau institutionnel en incluant dans leurs missions d'éducation un aspect ayant trait à la coopération internationale, comme un signe d'ouverture sur le monde. C'est notamment le cas de l'Université Lumière Lyon 2. Afin de l'illustrer, citons pour partie l'article premier des missions de notre établissement :

    « L'université Lumière Lyon 2 a pour missions la formation initiale, la formation continue, la recherche et la diffusion des connaissances dans les domaines de formation suivants : Art Lettres Langues, Sciences Humaines et Sociales, Droit Economie Gestion. Hautement attachée à sa mission de service public, elle affirme sa vocation professionnelle et sa contribution au développement culturel, social et économique. Elle met en oeuvre des programmes d'échanges au titre de la coopération internationale et assure l'accueil et la formation des étudiants étrangers » ;

    « dans le cadre de ses attributions et de la concertation conduite avec ses partenaires de l'Université de Lyon et les universités étrangères partenaires, elle arrête le nombre et la nature des formations qu'elle dispense, organise les enseignements et les sanctionne par des titres et des diplômes » ;

    « Elle a pour mission la promotion et le développement des Sciences Humaines et Sociales dans tous les champs de leur production et de leur diffusion, au niveau national et international ».

    (Université Lumière Lyon 2, 2012).

    Par conséquent, au vu de la popularité des programmes d'études intégrées, il était presque un devoir d'explorer leur pratique dans notre université et leurs effets sur les étudiants qui y participent.

    CADRE THEORIQUE

    Dans cette partie, nous fournirons certains éléments de contextualisation de notre étude. Puis, nous éclaircirons les principaux concepts qui la sous-tendent avant de définir notre problématique.

    1. Contexte

    Nous allons présenter ici la genèse de nos travaux et situer notre étude au sein du monde de la recherche.

    1.1. Origines des travaux

    Ces travaux ont été initiés à l'invitation de mon directeur de mémoire, M. Régnier, à me pencher sur la thématique des échanges universitaires internationaux, que j'ai immédiatement acceptée. Mon intérêt à aborder cette thématique par le biais de la recherche découle de ma propre expérience de la mobilité internationale. En effet, j'ai effectué mon tout premier séjour à l'étranger au cours de l'année scolaire 2009-2010, pendant mon année de Maîtrise que j'ai passée en Australie. Ce fut là une expérience très enthousiasmante au cours de laquelle j'eus le sentiment d'évoluer à grands pas, de changer, que ce soit au niveau de ma personnalité ou de ma vision du monde notamment. Par la suite, il s'est d'ailleurs avéré que ce séjour a eu, et continu d'avoir, un impact considérable sur ma vie en général. Par exemple, d'autres voyages à l'étranger ont eu lieu depuis, et de nouveaux projets d'expatriation sont en cours. Par conséquent, travailler sur les échanges universitaires internationaux représente pour moi un moyen de porter un regard critique sur les effets d'une telle pratique, de mettre en perspective ma propre expérience, somme toute récente. Il s'agit également de promouvoir le séjour d'étude à l'étranger, tant en renseignant les candidats désireux de s'engager dans une telle aventure qu'en fournissant des arguments aux institutions qui les soutiennent.

    1.2. Intérêts de la recherche

    Comme le dit Russo (2006) « De nos jours, la mobilité rencontre un fort consensus social. Portée par l'idéologie ambiante, elle s'investit de significations positives qui évoquent enrichissement personnel et ouverture socioculturelle. Au niveau de l'enseignement supérieur, elle recouvre des pratiques qui ont bénéficié d'une considération valorisante lors de la dernière décennie. Les représentations qui lui sont associées renvoient implicitement à des situations potentiellement formatrices, en même temps qu'elles laissent présumer des capacités individuelles chez ceux qui ont décidé de faire cette expérience ». Assurément, les modalités d'apprentissage par le biais du

    séjour à l'étranger ont un caractère autre de l'apprentissage institutionnalisé (Murphy-Lejeune, 1993). Pour cet auteur, le séjour contextualise l'apprentissage de la langue et de la culture d'accueil en tant que pratique sociale, c'est-à-dire qu'il met en marche un nouveau processus de socialisation et constitue une expérience totale qui marque profondément l'individu, qui se retrouve soumis à plusieurs rituels de passage (passage physique, social, symbolique). Aussi, afin de répondre aux exigences de son nouvel environnement, l'étudiant en échange est-il amené à mobiliser des ressources, ressources qui sont rendues disponibles tant par les espaces de formation que par des espaces hors formations (Acyoli-Régnier, 2005). Effectivement, les dialogues, les relations sociales, les interactions font parties intégrantes de la création de sens et sont vecteurs de savoir (Jonassen, 1991), constituant pour partie ce que l'on nomme des apprentissages buissonniers, soit des savoirs acquis en-dehors de l'institution (Certeau, 1993). Pour toutes ces raisons, on peut considérer l'échange international universitaire comme un catalyseur, comme un processus d'apprentissage plus vaste que le processus d'apprentissage classique vécu dans le pays d'origine, entrainant en très peu de temps des réactions intenses et permettant de vivre énormément d'expériences. D'ailleurs, la décision de se rendre dans une institution éducative particulière à un moment précis de sa vie est porteur de sens pour l'individu au coeur de cette démarche. En effet, sortir des frontières de son pays et s'immerger dans une autre société fournit virtuellement de nouvelles opportunités d'apprendre sur le tas vingt-quatre heures sur vingt-quatre (Hopkins, 1999). De cette façon, l'individu est amené à faire face à des situations qui remettent en cause ce qui lui était familier, ainsi qu'à évoluer dans un environnement aux caractéristiques différentes et à vivre des expériences émotionnelles profondes. Le séjour à l'étranger participe par là à transformer le sujet à tous les niveaux, culturel, social ou psychologique. Pour cela, l'individu en échange met en jeu des mécanismes cognitifs afin de s'adapter aux différences culturelles auxquelles il est confronté. Il s'agit certes d'acquérir des connaissances, mais surtout de parvenir à créer consciemment une dynamique empreinte de sens qui permette, de fil en aiguille, de faire passer les étudiants et leurs hôtes d'un exotisme réciproque à une familiarité réciproque (Vatter, 2003). C'est ce que l'on connait sous le nom de compétence interculturelle.

    En définitive, l'échange international universitaire renvoie une image (trans)formatrice. Il représenterait une fenêtre ouverte sur l'altérité, un processus de changement et de diffusion culturel, susceptible de contribuer à ce que les différents protagonistes portent un regard plus éclairé sur le monde.

    Toutefois, si un certain nombre d'études met en exergue les bénéfices des programmes d'études
    intégrées et en dresse un bilan positif, d'autres sont plus contrastées. En effet, certains chercheurs
    font notamment part de la tendance des étudiants internationaux et des autochtones à ne pas se

    mélanger (Ward, 2001 ; Kim, 1988), ce qui tend à limiter l'ampleur des transformations culturelle, sociale et psychologique chez les participants (Brown, 2009). De la même manière, Ward (2001) indique que si beaucoup d'études incluent comme hypothèse de départ des bénéfices en matière de compétence interculturelle chez les étudiants en mobilité internationale, peu parviennent à le démontrer par la suite.

    C'est pourquoi, au vu des résultat contradictoires sur la question, nous allons tenter ici de situer les effets des échanges universitaires internationaux chez des étudiants de l'Université Lumière Lyon 2 séjournant au Brésil, et ce en étudiant à la fois leurs transformations culturelle, sociale et psychologique et leur compétence interculturelle.

    2. Concepts clés

    Dans cette partie, nous allons nous attacher à définir les transformations socioculturelles et la compétence interculturelle.

    2.1. Les transformations socioculturelles

    Dans ce chapitre, nous délimiterons et structurerons le concept de transformations socioculturelles. Une fois l'étudiant « à l'étranger », son quotidien est inévitablement amené à changer, peu ou prou. Les rouages de la société d'accueil ne sont pas ceux de la société d'origine, de même que la clef pour les comprendre. Cela donne donc lieu à un processus qui conduit l'étudiant à évoluer, à changer culturellement, socialement, psychologiquement. En référence à cela, certains auteurs parlent d'adaptation socioculturelle et d'adaptation psychologique (Berry et al. 2002), tandis que d'autres parlent d'ajustement psychosocial (Halamandaris et Power, 1999). Quant à nous, par souci de simplicité, nous prendrons le parti de réunir l'ensemble de ces dimensions sous la dénomination de transformations socioculturelles, car nous les pensons toutes trois intimement liées. Pour les expliciter, nous nous appuierons notamment sur des travaux situés dans les champs de l'anthropologie culturelle, de la psychologie interculturelle, de la sociolinguistique ou encore de la psycho-sociologie.

    À présent, penchons-nous rapidement sur l'étymologie des termes employés. Les transformations socioculturelles sont liées aux contraintes du milieu dans lequel évolue l'individu, il pourrait donc s'agir d'adaptation ou d'ajustement. Mais alors, pourquoi « transformations »? Transformer, du latin transformare, signifie former au-delà, changer de forme, devenir autre. Ce serait un processus qui conduirait une forme initiale à être remodelée. Dans notre cas, cela s'appliquerait aux étudiants qui, au cours de leur séjour à l'étranger, dépasseraient un état premier de penser, d'être dans le monde. Si nous avons pris le parti de penser que les étudiants se transforment au contact de l'environnement plutôt qu'ils ne s'y adaptent, c'est parce que l'adaptation fait pour nous écho à un changement temporaire, dans le sens où il est limité à la société d'accueil. En effet, le terme adaptation, formé à partir de la racine « apte », du latin aptus, renvoie à la notion d'être spécialisé, propre à quelque chose en particulier. Par conséquent, une fois l'individu sorti de l'environnement même qui a entraîné l'adaptation, le changement disparaît, il n'est plus à propos, d'où l'idée qu'il est limité, ou temporaire. D'ailleurs, on s'adapte à une nouvelle chose puis on se réadapte à l'ancienne, on ne peut se trouver sur les deux plans à la fois. En revanche, en préférant parler de transformations, nous pensons souligner un changement durable et non exclusif. Ainsi, l'individu cesse d'épouser simplement les contours suggérés au contact de son nouvel environnement. Il initie un mouvement en lui-même et évolue par un jeu d'équilibres et de déséquilibres, par aller-retours entre le familier

    et l'incertain. De fait, en incorporant un peu de l'Autre en lui-même, l'individu se transforme et devient un être nouveau, avec des dispositions socioculturelles élargies et pérennes.

    Entrons maintenant dans le détail des trois dimensions dont nous avons fait mention. Définissonsles et précisons leurs composantes ainsi que leurs indicateurs.

    2.1.1. La dimension culturelle

    Dans ce sous-chapitre, nous expliciterons la part de la dimension culturelle dans les transformations socioculturelle. Historiquement, il est impossible de nier la pluralité des populations et des influences au sein de la plupart des sociétés, non plus que la complexité et l'hétérogénéité de leur tissu social. Elles ne sont pas un tout immobile, fermé, monolithique, bien au contraire, elles sont « le produit de négociations continuelles avec le monde extérieur, négociations à travers lesquelles s'affirme un horizon, une identité qu'on ne peut que définir que comme une création continue » (Abdallah-Pretceille, 1996). En somme, les sociétés sont métissées et, sous une apparente uniformité, elles sont composées de sous-ensembles qui s'entrelacent et se conjuguent, renvoyant à une réalité culturelle infiniment plus large, entre l'immobilité de la reproduction et le dynamisme de la mutation (Porcher, 1994). Ainsi, certains observent que « toute société est liée à une culture d'ensemble qui la caractérise et qui est elle-même le résultat de nombreuses cultures, qui sont plus petites, plus sectorisées » (Porcher, 1995, p. 55). Pour étudier les impacts des programmes d'études intégrées sur leurs participants, il nous faut donc clarifier la notion de culture, et observer la façon dont cet objet évolue au cours du séjour à l'étranger.

    2.1.1.1. Composante : la culture

    Dans une perspective anthropologique culturelle, la culture est l'ensemble plus ou moins lié des significations acquises les plus persistantes et les plus partagées que les membres d'un groupe, de par leur affiliation à ce groupe, sont amenés à distribuer de façon prévalente sur les stimuli provenant de leur environnement et d'eux-même. Ceci induit, vis-à-vis de ces stimuli, des attitudes, représentations et comportements communs valorisés dont ils tendent à assurer la reproduction par des voies non génétiques (Camilleri, 1985). Autrement dit, la culture est un construit social qui oriente le déroulement de nos interactions, c'est une carte grâce à laquelle on navigue et structure le monde autour de soi, un infléchissement du « penser » et du « faire ». Finalement, nous sommes tous enracinés dans un terreau culturel qui donne du sens à ce que l'ont fait ou ce que l'on ne fait pas, à ce que l'on pense ou ne pense pas, ou encore à ce que l'on dit ou non.

    Pour compléter utilement notre approche, ajoutons que Bourdieu (1979, p. 47) parle de la culture
    comme de « la capacité de faire des différences », autrement dit, d'opérer des distinctions,

    d'interpréter des variations socialement distinctives à l'intérieur du système culturel et d'y entrevoir un principe d'organisation interne à la culture. En d'autres termes, « pour comprendre une société, et ses membres, il faut être en mesure de repérer les systèmes de classement, de percevoir leurs lois de fonctionnements, leurs régularités, leur logique sociale » (Porcher, 1986, p. 12). De fait, comme nous l'avons évoqué précédemment, nos sociétés revêtent un aspect d'arlequin à travers les différentes distinctions culturelles et sociales qui les constituent, de sorte qu'elles sont à l'image de mosaïques dont les individus se font le reflet. Par conséquent, ce qui caractérise un sujet, c'est la multi-appartenance à des subcultures qui s'entrecroisent et participent à le co-construire. Il nous faut alors rejeter l'équation simpliste selon laquelle une culture équivaut à un pays, donc à un peuple (Philipps, 2007). Il n'y a donc pas un Brésil ou une France, une culture brésilienne ou une culture française, mais d'innombrables points de vue et façons de faire dont les étudiants seront ou non les témoins au gré de leurs rencontres. C'est pourquoi nous préférerons parler non pas de culture mais de « référentiel culturel », ce par quoi nous entendons l'ensemble des significations issues des multiples déclinaisons culturelles d'une société qui sous-tendent la construction de la réalité chez un individu, avec l'ensemble des valeurs, attitudes, comportements et représentations qui en découlent. De cela, il ressort qu'une société ne saurait se résumer à seul et unique référentiel. Virtuellement, il se pourrait qu'il y en ait autant que de membres de la société. Ainsi, le syntagme de « référentiel culturel de la société d'accueil » renvoie aux inflexions particulières dérivées de l'intégralité des déclinaisons culturelles de la société d'accueil qui orientent la manière dont ceux de ses membres qui interagissent avec l'étudiant en échange structurent la réalité. Pareillement, le syntagme de « référentiel culturel de la société d'origine » (du sujet) fait référence aux infléchissements singuliers qui découlent de l'ensemble des subcultures qui composent cette société et qui influencent la construction des significations sous-jacentes à la vision du monde de ses membres. Ces précautions langagières visent à prendre en compte la diversité culturelle et sociale des sociétés auxquelles nous faisons référence ainsi qu'à nous prémunir contre toute généralisation. Dans le même ordre d'idées, lorsque nous associons à des expressions telles que « l'Autre », « autrui », « l'altérité », « la différence culturelle » ou « la société d'accueil » des verbes comme « rencontrer », « faire face » ou encore « confronter », nous ne sous-entendons pas qu'il s'agit là d'entités avec lesquelles le sujet interagit directement. Nous désignons plutôt l'ensemble des acteurs sociaux évoluant dans le même environnement que le sujet et porteurs de symboliques et de significations différentes tant les uns des autres que de celles du sujet, dont ils sont à la fois les dépositaires et les co-constructeurs. Ainsi, pour finir, le mot « autochtone » ou le syntagme « membres de la société d'accueil » sont-ils pour nous une incarnation générique de la différence culturelle qu'il ne faut pas réduire à un ou des individus porteurs d'une symbolique ou d'un ensemble de significations

    particulier (un référentiel culturel), mais qui englobe toutes les variations culturelles et sociales de la société d'accueil.

    2.1.1.2. Les indicateurs

    En pratique, comment ces transformations culturelles se traduisent-elles? Comment pouvons-nous les observer? Présentons ici les indicateurs avec lesquels nous tenterons de repérer des changements « culturels » chez les étudiants. Parmi les indicateurs disponibles, nous porterons plus particulièrement notre attention sur l'acquisition des compétences de communication, la distance culturelle, ainsi que sur la sensibilité interculturelle.

    Les compétences de communication

    Le niveau d'aisance dans la pratique de la (ou les) langue(s) de la société d'accueil ainsi que la connaissance des règles de communication en usage (par exemple la gestuelle, le regard ou encore la proxémie, soit la distance physique qui s'établit lors des interactions entre les individus) forment ce que nous avons appelé les compétences de communication. Elles sont de nature à permettre au sujet de se rapprocher d'autres groupes socioculturels (Byram et al., 1997). Plus généralement, l'acquisition d'une langue étrangère est souvent l'un des objectifs prioritaires des étudiants qui séjournent à l'étranger. La maîtrise de la langue constitue donc une fin et un moyen pour les programmes d'échange universitaire. Un degré minimum de compétence communicationnelle est ainsi nécessaire pour rencontrer des gens ou comprendre ce qui a lieu autour se soi par exemple. En revanche, ne pas être en mesure d'échanger avec les autres représente une barrière à l'intégration et peut être facteur de stress, voire de mal-être. Cependant, s'il est important pouvoir s'exprimer dans un langage compréhensible et de connaître les normes sociales, cela n'est pas suffisant. Encore fautil être capable de mettre cela en oeuvre quand la situation l'exige, sans quoi l'individu ne pourra pas fonctionner efficacement dans son nouvel environnement. C'est cet esprit d'à propos que nous pouvons appeler le « feeling » (Bennett, 1993). Clairement, la maîtrise d'une langue ou d'une norme sociale décontextualisée, sans la conscience du terreau culturel dans lequel elle s'enracine, ne saurait se révéler satisfaisante. Bennett (1993) utilise d'ailleurs le syntagme « fluent fool » pour qualifier un individu qui, tout en ayant une bonne connaissance de la langue et des règles de conduite, ne se conforme pas aux normes communicationnelles de la société d'accueil car il ne parvient pas à utiliser ses savoirs de façon adéquate. Inversement, il utilise le syntagme « cultural intelligence » pour faire référence au respect et à l'usage approprié des règles de communication. Ainsi, la communication se trouve être le vecteur d'une dimension symbolique essentielle, significative culturellement. Comme le dit Hall (1959, p. 186), « La culture est de la communication et la

    communication est de la culture ». Par ailleurs, notons qu'une langue n'est fondamentalement pas qu'un simple assemblage de mots. La pensée s'enracine dans la langue, cette dernière est donc porteuse de structures mentales particulières. La langue catégorise le réel, en association avec les mots qui la composent elle transmet tout une gamme de sous-entendus, d'implicite. Le langage est donc un prisme qui oriente la perception de la réalité, en plus d'être un outil pratique d'interaction. De ce fait, basculer « intelligemment » ou « culturellement » d'une langue à une autre implique de savoir se saisir de tout ce que le langage évoque tacitement, de tout ce qui va de soi mais qui, pour un non-natif, un « étranger », est susceptible de se dérober à lui.

    Pour conclure, il ressort que l'acquisition d'une compétence de communication fonctionnelle et d'un certain feeling soit de nature à faciliter l'ensemble des transformations socioculturelles.

    La distance culturelle

    Investiguons maintenant la notion de distance culturelle. C'est l'écart que perçoit l'individu entre son référentiel culturel et celui (ou ceux) qui compose la société d'accueil telle qu'il se l'imagine. À partir de la somme de ses représentations, l'individu opère une comparaison des différences et similarités entre les sociétés. Finalement, plus la perception des différences, au détriment des similarités, est aiguë, plus la distance culturelle du sujet est élevée.

    Notons que les représentations de l'Autre sont construites tout au long de la vie, souvent à notre insu, à mesure que nous intégrons les infléchissements des groupes culturels et sociaux qui s'entrecroisent dans notre environnement. C'est pourquoi il n'est pas facile de s'en distancier, bien que ces représentations soient du domaine des préjugés, des stéréotypes, de l'imaginaire. « Les stéréotypes sont des images que l'on a de son propre groupe national (autostéréotypes) ou des autres groupes nationaux (hétérostéréotypes) » (Pugibet, 1986, p. 60). Ils correspondent à une représentation partielle de la réalité, sont simplificateurs et réducteurs (Porcher, 1995). Dans une certaine mesure, les hétérostéréotypes révèlent la façon dont un groupe ou une société se voit, se pense en rêvant l'Autre (Pageaux, in Vatter, 2003) qui, de ce fait, devient une sorte de miroir qui renvoie notre image. Finalement, les stéréotypes mettent à jour certaines ambiguïtés dans les représentations culturelles et sociales dont l'individu est porteur vis-à-vis d'autres groupes (AciolyRégnier et al., 2005). Ce n'est qu'ensuite, une fois à l'étranger, que le sujet pourra s'engager dans un processus de destruction d'images ou de représentations collectives de la société d'accueil (Vatter, 2003). Ajoutons simplement que cet indicateur ne nous renseigne nullement sur la façon dont l'individu est susceptible de se situer dans la société d'accueil, sur la manière dont il vit la distance culturelle. Il s'agit simplement ici de dresser les contours d'une cartographie des préconceptions des sujets.

    La sensibilité interculturelle

    En nous basant sur les travaux de Bennett (1986, 1993), nous considérons la sensibilité interculturelle comme la faculté d'accepter l'existence de points de vue multiples, de traits culturels variés, et de les reconnaître comme valables, autant que son propre point de vue ou ses propres traits culturels. Cette faculté se traduit au niveau cognitif, affectif et comportemental. Elle est nécessaire pour comprendre qu'il n'y a pas qu'une seule et unique façon de faire les choses, la sienne, mais que d'autres approches d'un même problème existent et sont viables. Cette faculté dénote un intérêt pour l'Autre et un respect de ses habitudes culturelles quelles qu'elles soient. Elle permet la compréhension et l'acceptation des valeurs locales, l'abandon de sa propre façon de faire au profit des usages locaux quand la situation l'exige, le bon déroulement des interactions avec les membres de la société d'accueil, ou, en bref, une réponse appropriée aux exigences du quotidien. C'est un indicateur qui permet d'évaluer comment l'individu gère pratiquement la distance culturelle.

    2.1.2. La dimension sociale

    Dans ce sous-chapitre, nous passerons en revue les différents attributs de la dimension sociale des transformations socioculturelles. La relation aux autres, par le biais de l'élaboration et de la gestion d'un réseau social, puis à travers la fréquence et la qualité de la communication interpersonnelle, joue un rôle clef dans le processus de transformations socioculturelles. En effet, la façon dont le sujet est amené à se situer au sein de la société d'accueil a des répercussions sur les dimensions culturelles et psychologiques des transformations socioculturelles, en terme de bien-être par exemple, ou de degré et de rapidité de compréhension des référentiels culturels. Ainsi, la nature de la socialisation de l'étudiant reflète-t-elle chez lui l'état d'avancement de la gestion du conflit entre son référentiel et ceux en vigueur dans la société d'accueil. Nous allons donc traiter ici des orientations que peut prendre ce processus interne de négociation inter-référentiels, des différentes manières de se situer dans une nouvelle société.

    2.1.2.1. Composante : le phénomène d'acculturation

    Comme nous l'avons vu précédemment, le milieu social influe largement sur la conduite de l'individu. Quand il transite entre deux sociétés, ce dernier perd donc tout ou partie des repères qu'il avait construit dans sa société d'origine et doit en faire émerger de nouveaux au contact de l'environnement de la société d'accueil. Redfield, Linton et Herskovits (1936) ont défini l'acculturation comme l'ensemble des phénomènes qui résultent d'un contact continu et direct entre des groupes d'individus de cultures différentes et qui entraînent des changements dans les modèles

    culturels initiaux d'au moins l'un des deux groupes. Selon Berry et al. (1989), les variations dans le processus d'acculturation sont liées à trois facteurs majeurs : la volonté, la mobilité et la durée. Ainsi, les choses sont-elles différentes selon qu'il s'agisse d'un étudiant en échange, d'un réfugié politique ou d'un migrant permanent par exemple. En fonction de ses rapports avec les groupes culturels et sociaux qui composent la société d'accueil, l'individu développe des stratégies d'acculturation. Elles reflètent la manière dont se négocie le maintien du référentiel culturel originel dans la société d'accueil ainsi que la propension de l'individu à aller vers les autochtones.

    TABLEAU 1 : stratégies d'acculturation (adapté de Berry, 2000)

     

    Doit-on valoriser la sauvegarde de son référentiel culturel originel?

     

    oui

    non

    Doit-on valoriser le
    contact avec la société
    d'accueil?

    oui

    intégration

    assimilation

     

    Séparation / ségrégation

    marginalisation

     

    Détaillons ces quatre principales stratégies d'acculturation. Tout d'abord, lorsque l'individu souhaite renier son référentiel culturel et recherche activement le contact avec d'autres groupes afin d'adopter le (ou les) leur(s), on parle d'assimilation. Ensuite, quand l'individu désire conserver son référentiel culturel tout en ayant des rapports avec d'autres groupes dans le but de partager une symbolique d'ensemble et de faire partie intégrante d'une même société, il s'agit d'intégration. Puis, lorsque l'individu veut préserver son référentiel culturel intact et évite le contact avec d'autres groupes, on est dans le cas de figure de la séparation. En revanche, si c'est la société (i.e. les groupes dominants) qui impose la séparation, on parle alors de ségrégation. Finalement, dès lors qu'il existe peu de possibilité ou d'intérêt pour l'individu à maintenir son référentiel culturel originel et à entretenir des relations avec d'autres groupes, on parle de marginalisation. Dans ces trois derniers cas (séparation, ségrégation et marginalisation) l'individu est en situation d'exclusion, volontaire ou forcée, par rapport à la société d'accueil.

    Notons bien également que la ségrégation et l'intégration dépendent toutes deux de l'orientation d'acculturation de la société d'accueil et sont, à ce titre, indépendantes du migrant. En effet, à son arrivée dans la société d'accueil ce dernier devra assumer un nouveau statut social qui lui sera appliqué indépendamment de sa volonté, celui de représentant de son pays d'origine avec les attentes et les stéréotypes qui peuvent y être liés (Byram et al., 1997).

    2.1.2.2. Les indicateurs

    Comment donc entreprendre d'évaluer l'insertion des étudiants dans leur société d'accueil? De quels
    moyens disposons-nous? Pour ce faire, il nous faut sonder l'étendue et la nature du capital social des

    sujets, et mettre au jour l'orientation d'acculturation de la société qui les reçoit.

    Le capital social

    Le capital social d'un individu, c'est l'ensemble de ses relations, c'est-à-dire des personnes et des institutions qu'il connaît et dont il est connu (Abdallah-Pretceille et Porcher, 1996). C'est justement en partie au travers des relations sociales que tissent les étudiants qu'il est possible de déterminer leur orientation par rapport à la société d'accueil. La fréquence avec laquelle ils s'engagent dans des rapports humains et le sens qu'ils leurs donnent sont autant de moyens pour eux de se situer au sein du monde qui les entoure. En effet, la nature et l'étendue du capital social du sujet vont avoir une influence directe sur son degré d'immersion dans l'altérité en quelque sorte. Elles vont conditionner :

    · Sa capacité à pénétrer la dimension symbolique d'ensemble qui lie la société d'accueil.

    · Sa propension à opérer des distinctions dans cette société.

    · Son accession à une palette plus ou moins large de significations dérivées des divers référentiels culturels des membre de la société d'accueil avec lesquels il est en contact.

    Créer du lien social, élargir son réseau, en diversifier la nature sont donc autant de démarches à effectuer pour atteindre le coeur d'une société, non pas comme simple observateur mais comme acteur social, et avoir un aperçu in situ des pratiques et représentations qui y ont cours. En somme, l'enjeu consiste à passer d'un capital social uni-culturel (entendu ici comme étant constitué principalement de représentants de la société d'origine) à un capital social pluri-culturel (soit comme constitué indistinctement de membres de la société d'origine et de la société d'accueil), ou bien à ajouter une nouvelle dimension à un capital déjà pluri-culturel selon les cas. Ajoutons que si créer et maintenir du lien social facilite les transformations culturelles, cela joue également un rôle sur les transformations d'ordre psychologique. Church (1982) a démontré qu'entretenir des rapports sociaux étroits avec d'autres individus (autochtones, compatriotes ou étrangers) favorise le dépassement du choc culturel. Par ailleurs, certains chercheurs ont observé que la fréquence et la nature des interactions entre les membres de la société d'accueil et les étudiants étrangers jouent un rôle de premier plan dans la capacité de ces derniers à atteindre leurs objectifs académiques (Poyrazli et al., 2002).

    L'orientation d'acculturation de la société d'accueil

    La manière dont une société dans son ensemble se positionne par rapport aux ressortissants d'autres sociétés constitue un facteur critique influençant largement le séjour de ces derniers. Comme nous l'avons vu, dès son arrivée dans son nouvel environnement, l'individu doit entreprendre de s'acculturer, c'est-à-dire de se situer par rapport aux divers groupes culturels et sociaux qui le compose. Pour se transformer efficacement, il faut que l'individu crée du lien social avec des autochtones, tant pour assurer une certaine stabilité émotionnelle que pour accéder au mieux à la symbolique d'ensemble la société d'accueil. Parallèlement, il se voit contraint d'assumer un nouveau statut social, une certaine image, en tant que représentant de sa société d'origine. Cette image découle de la part d'ethnocentrisme qui sous-tend les référentiels culturels des autochtones. Par conséquent, s'il est rejeté par ses hôtes, s'il est victime de racisme, l'individu se voit barrer l'accès à des pans culturels entiers, en plus de se sentir bafoué dans sa dignité et de voir son équilibre émotionnel mis en péril. En effet, selon certains chercheurs, être victime de préjugés et de discriminations a un impact considérable sur le bien-être (Fenton, 1989 ; Halpern, 1993). Par ailleurs, d'autres considèrent le racisme comme le problème le plus grave auquel peuvent être confrontés les migrants (Fernando, 1993).

    2.1.3. La dimension psychologique

    Nous traiterons ici de la part de la dimension psychologique dans les transformations socioculturelles. La psychologie interculturelle a montré qu'il existe des rapports étroits entre le contexte culturel et le développement comportemental de l'individu. Par ailleurs, une définition de type psychologique de la culture la renvoie à la manière apprise de résoudre les problèmes (Kroeber et Kluckhon, 1952). Ainsi, si l'on s'intéresse aux séjours d'étude à l'étranger, on peut être amené à se demander ce qu'il se passe quand un individu qui s'est développé dans un contexte culturel et social bien particulier entreprend de s'insérer dans une société aux référentiels culturels et à la structure sociale différents. C'est de ce processus de transformation psychologique dont nous allons parler ici. Les décalages entre le référentiel culturel de l'individu, dérivé de sa société d'origine, et ceux en vigueur dans la société d'accueil peuvent conduire à l'émergence de conflits internes chez lui. Selon le degré d'intensité et de permanence de ces conflits, différents noms leurs ont été attribués dans la littérature scientifique. Nous généraliserons cela sous l'appellation de choc culturel. Notons cependant qu'en dépit du terme de « choc » employé ici, cette inadéquation ne se traduit pas nécessairement par un bouleversement profond et total des repères de l'individu, et ne reflète pas non plus des expériences uniquement négatives de la confrontation à l'altérité.

    2.1.3.1. Composante : le choc culturel

    Un choc culturel se manifeste donc quand un individu est « déraciné », quand il entre dans une société dont l'organisation sociale et les référentiels culturels sont sensiblement différents de ce qu'il connait, l'amenant ainsi à perdre ses repères culturels, symboliques, sociaux, les plus familiers. C'est une situation dans laquelle le sujet est extérieur au consensus en vigueur sur la réalité, aux significations partagées par ses hôtes. En effet, nous structurons la réalité au cours d'un processus par lequel nous tentons de faire correspondre notre conceptualisation interne du monde aux stimuli externes que nous recevons de notre environnement (Zapf, 1991). Lorsque cette relation est positivement établie, nous sommes à même de donner du sens aux situations, aux événements. En revanche, si nous ne pouvons pas établir de corrélation entre notre conceptualisation interne et les stimuli externes, c'est le choc culturel. Pratiquement, dans un nouvel environnement, le sujet fait face à des demandes auxquelles il doit répondre (les stimuli externes). Par conséquent, selon l'intensité du décalage entre le référentiel du sujet dérivé de la société d'origine (son modèle de conceptualisation interne) et ceux de la société d'accueil, le processus d'ajustement pour arriver à un nouvel équilibre entre les référentiels culturels (établir une corrélation) est plus ou moins long.

    La représentation classique de la résorption du choc culturel en fonction du temps est celle de la courbe en U, initialement développée par Lysgaard (1955). À sa suite, Oberg (1960) décrit quatre stades d'ajustement psychologique à la différence culturelle : la lune de miel, la crise, la récupération et l'adaptation. En résumé, au départ, rien ou presque ne trouble l'individu et l'aura de nouveauté qui enveloppe la société d'accueil est relativement stimulante. Ensuite, des problèmes plus sérieux font surface à mesure que l'individu réalise la distance entre son référentiel culturel et ceux de ses hôtes. Finalement, au terme d'efforts d'adaptation continus, l'individu atteint une situation d'équilibre psychologique plus pérenne et s'accoutume à la symbolique locale. Par la suite, certains auteurs ont adapté la courbe en U en une courbe en W afin d'inclure le stade du retour dans la société d'origine. Pendant la période de réajustement qui s'en suit, l'individu est tiraillé par un processus de désintégration-réintégration qui le pousse à rompre l'équilibre auquel il était parvenu dans la société d'accueil afin de recouvrer celui qui lui permettra de se familiariser à nouveau à la société d'origine. Néanmoins, ces conceptualisations présentent certaines limites. Tout d'abord, il y a peu de preuves empiriques suggérant que la trajectoire des individus se conforme effectivement à celles que prescrivent les modèles de la courbe en U et en W (Berry, 1997). Ensuite, la temporalité de ces modèles, c'est-à-dire la survenue des phases et leur durée, n'a pas non plus été systématiquement vérifiée (ibid.). À ce sujet, Church (1982) a conclu que les soubassements de la courbe en U-W sont fragiles, que les études utilisant cette théorie sont peu concluantes, et que les résultats obtenus font l'objet d'une généralisation excessive.

    TABLEAU 2 : autre exemples de modèles de courbe en U

    Auteurs

    Stade 1

    Stade 2

    Stade 3

    Stade 4

    Adler (1975)

    Contact

    Désintégration

    Réintégration

    Autonomie

    Kohls (1979)

    Euphorie initiale

    Hostilité

    Ajustement progressif

    Adaptation

    Berry (1997)

    Lune de miel

    Conflit

    Crise identitaire

    Adaptation

     

    Pour notre part, nous nous préférons nous concentrer sur la nature des obstacles rencontrés et des expériences vécues par les sujets au cours du déroulement de leur séjour afin de comprendre leur processus de résorption du choc culturel. Sous-tendant notre démarche est le principe selon lequel l'individu doit établir et maintenir une relation stable avec son environnement afin de fonctionner efficacement. Pour ce faire, nous partons donc du postulat que l'homme a une propension naturelle à se transformer, ce qu'il fait continuellement et plus ou moins consciemment à mesure qu'il est confronté à des obstacles dans son environnement. Insistons là sur le fait que les transformations sont le produit d'une co-construction entre ce dernier et le sujet. Finalement, ce processus de dépassement d'obstacles successifs entraine des cycles de réorganisations internes (cognitives, affectives, motrices) relativement pérennes qui tendent vers une complexification et un élargissement des dispositions du sujet (Kim, 1988). De cette manière, nous nous positionnons en faveur d'une approche plus positive du choc culturel. L'incertitude inhérente à ce dernier n'est ainsi pas forcément un facteur de stress mais, potentiellement, de développement personnel (Milstein, 2005). Par ailleurs, le choc culturel et les transformations qu'il initie offrent une occasion de retour sur soi. En effet, tant que l'individu interagit avec ceux dont il partage les significations, il est fort probable qu'il ne soit pas conscient de ces dernières, tel un animal suspendu dans des toiles invisibles (voir Geertz, 1973). En tant normal, il n'est donc pas enclin à questionner ses pratiques et représentations, à prendre de la distance par rapport à son référentiel culturel. C'est justement ce qu'est susceptible de provoquer le choc culturel. Il est vecteur d'une dimension culturelle analytique. En conséquence, notre système interne d'action et de perception (notre référentiel culturel) ne peut se révéler à nous que quand nous sommes contraints de nous en écarter (Kim, 1988). De ce fait, le choc culturel représente bien une véritable opportunité d'apprentissage. Nous questionnerons donc les étudiants sur certaines situations qui font partie intégrante de toute expérience à l'étranger et face auxquelles ils se voient contraints de produire une réponse, telles que l'obtention d'un logement, la réussite scolaire, la communication avec les autochtones, etc. Ensuite, nous pourrons sélectionner celles des expériences qui nous semblent significatives pour explorer comment elles ont été gérées. Cette focalisation sur la survenue et la gestion des événements permet, selon nous, de prendre en compte le fort degré de variabilité des transformations psychologiques d'un individu à l'autre et de

    nous dégager de toute contrainte temporelle.

    2.1.3.2. Les indicateurs

    La littérature scientifique nous offre pléthore d'indicateurs pour évaluer les transformations psychologiques et la résorption du choc culturel. Nous en retenons ici quatre qui nous semblent des plus pertinents pour notre étude. Nous allons donc nous intéresser au soutien social, au concept d'auto-efficacité, à l'enjeu de la réussite académique ou professionnelle, et pour finir au stress d'acculturation.

    Le soutien social

    Le soutien social est la somme de la communication verbale et non-verbale entre les émetteurs et les destinataires qui a pour but de réduire l'incertitude de la situation, de soi et de l'Autre, afin d'accroître la perception d'un contrôle sur les expériences vécues (Albrecht et Adelman, 1987). Son intensité est fonction de la fréquence de communication, du contenu échangé et du degré de symétrie de la relation entre les membres tel qu'il est perçu par les différents partis (Ray, 1991). Enfin, le soutien social sert plus particulièrement à minimiser le stress et à dépasser le choc culturel (Ward et Kennedy, 1993). Assurément, émigrer implique bien souvent de laisser famille et amis derrière soi ce qui, dans une certaine mesure, est susceptible de fragiliser davantage chez le sujet un équilibre émotionnel déjà potentiellement mis à mal par son déracinement. Ainsi, le rôle du soutien social est-il accentué en contexte interculturel, tant en raison des perturbations que la migration cause dans le capital social pré-existant du sujet que de la difficulté de créer du lien social dans la société d'accueil (Copeland et Norell, 2002). Par ailleurs, la recherche atteste du fait que c'est souvent en période de stress et de bouleversement que l'individu prend conscience de l'importance du soutien social et le désire particulièrement (Burleson, 2003).

    Le soutien social englobe indistinctement les relations disponibles sur place, à proximité de l'individu, et les relations à distance, comme celles entretenues avec les proches restés dans le pays d'origine par exemple. Par contre, il est possible de distinguer le soutien social selon qu'il émane de personnes appartenant à une même société d'origine ou non. Selon Church (1982), les relations entretenues avec les compatriotes ou les autres étudiants internationaux sont bénéfiques en ce qu'elles sont susceptibles de fournir un sentiment d'appartenance à l'individu, un soutien face à la différence, et un espace de discussion concernant les stratégies à établir pour y faire face. Les relations établies avec les autochtones, quant à elles, permettent au sujet de s'ancrer dans la réalité culturelle et sociale du pays d'accueil, de prendre conscience de toutes ses bigarrures, et d'accéder à ce qui en fait l'essence, en plus de participer pareillement au soutien émotionnel. Toutefois, comme

    on pourrait s'y attendre, il apparaît que des relations maintenues à la fois avec des représentants de la société d'origine et de la société d'accueil laissent présager les retombées les plus positives pour l'individu (Berry et al., 1989).

    L'auto-efficacité

    Le concept d'auto-efficacité a été forgé par Bandura (1977) dans le cadre de sa théorie sociale cognitive. Selon lui, le sentiment d'auto-efficacité prend forme à travers la croyance qu'a l'individu en sa capacité à mener à bien une tâche. Cette définition a pour corolaire que plus le sentiment d'auto-efficacité est grand, plus les jalons fixés par l'individu dans la poursuite de ses objectifs sont élevés, ainsi que l'envergure des moyens déployés pour les atteindre. Autrement dit, le sentiment d'efficacité personnelle influence à la fois la motivation de l'individu, son mode de penser, et sa propension à l'action, son comportement. Comme l'expose Bandura lui-même, « si les gens ne croient pas qu'ils peuvent obtenir les résultats qu'ils désirent grâce à leurs actes, ils ont bien peu de raisons d'agir ou de persévérer face aux difficultés » (Carré, in Bandura, 2003, p. IV). Bandura prétend ainsi que l'individu tend à éviter les situations qu'il perçoit comme menaçantes, tandis qu'il a tendance à s'investir dans les activités qu'il se sent apte à accomplir. Généralement parlant, un fort sentiment d'auto-efficacité favorise donc l'engagement de l'individu dans la société d'accueil, et participe aussi à minimiser la part de ses expériences délétères (Bandura, 1989). Schwarzer (1992), quant à lui, nous dit de l'auto-efficacité qu'elle a trait à la capacité à répondre efficacement à un large éventail de situation stressantes, et qu'elle est le reflet d'un sentiment positif de confiance en soi qui favorise par ailleurs la planification d'objectifs, l'engagement, la persévérance et le dépassement de l'échec. On peut donc envisager l'auto-efficacité comme l'impression qu'a l'individu d'être aux commandes de sa vie, comme la conviction qu'il est lui-même le moteur de ses choix et que ses actions et ses décisions sont au centre de sa réussite.

    La recherche a d'ailleurs démontré que le sentiment d'auto-efficacité joue un rôle notoire dans la résorption du choc culturel chez les étudiants qui séjournent à l'étranger. Certains travaux (voir Fan et Mak, 1998) ont mis en exergue une causalité positive entre l'auto-efficacité et les transformations socioculturelles, par le biais de la gestion du stress par exemple (Zheng et Berry, 1991) ou la réussite académique (Mak et Tran, 2001).

    La réussite académique et professionnelle

    Participer à un échange universitaire international est une expérience humaine inestimable, dans
    laquelle la découverte de l'Autre est un élément de premier plan. Toutefois, il ne faut pas oublier
    que l'étudiant en échange a également pour objectif de réussir son parcours scolaire pour ne pas être

    pénalisé dans l'obtention de son diplôme. De fait, comme ceux de ses pairs qui restent dans l'université d'origine, il doit passer des examens, voire effectuer des stages, et valider ainsi son ou ses semestres. Cependant, les systèmes éducatifs et professionnels en vigueur dans le pays d'accueil et dans le pays d'origine sont susceptibles d'être dissemblables. En effet, ancrés dans des sociétés aux inflexions différentes, le monde du travail et le modèle universitaire peuvent varier complètement. Par conséquent, l'étudiant doit fournir des efforts certains pour s'insérer et fonctionner de manière efficace professionnellement ou académiquement. Des difficultés à satisfaire à cette exigence peuvent avoir des répercussions au niveau psychologique et émotionnel et contribuer à former une expérience négative du séjour à l'étranger (Ward et al., 2001). Remarquons que les éventuelles difficultés des étudiants sont moins le reflet d'aptitudes insuffisantes aux études ou à la vie active que d'un ensemble de facteurs relatifs à la nature des expériences sociales et culturelles vécues à l'arrivée en milieu académique ou professionnel. Quoiqu'il en soit, la réussite académique et professionnelle entraîne chez le sujet une meilleure estime de soi et une plus grande confiance en ses capacités, impactant ainsi sur le sentiment d'autoefficacité que nous avons présenté auparavant (Mak et Tran, 2001 ; Bandura, 2007). La performance en milieu scolaire et professionnel semble donc bien entretenir une relation positive avec les transformations socioculturelles.

    Le stress d'acculturation

    Comme nous l'avons déjà évoqué, le choc culturel que peut ressentir l'individu provient d'une asymétrie entre la société d'origine et la société d'accueil en terme d'organisation respective des référentiels culturels et sociaux et des significations qu'ils véhiculent. Le processus de négociation interne nécessaire afin de rééquilibrer ces configurations asymétriques est susceptible de se révéler éprouvant pour le sujet. Les effets secondaires délétères liés à ce processus sont ce que l'on appelle le stress d'acculturation. En effet, la plupart des définitions du choc culturel que nous appliquons, nous, au stress d'acculturation, corroborent cette analyse (Oberg, 1960 ; Kohls, 1979 ; Martin et Nakayama, 2001). Dans cette perspective, le stress d'acculturation prend la forme d'un désarroi causé par une perte de repères, par le manque de signaux familiers renvoyés par le monde alentour et les rapports sociaux. C'est un malaise dont les « symptômes » sont la dépression, le mal du pays, l'anxiété ou encore le stress. Certains facteurs contribuent à aggraver cela, tels que l'échec scolaire, le manque de lien social ou l'absence de compétences communicationnelles adéquates (ibid.). Par ailleurs, l'étudiant international est soumis à un stress élevé dû à la pression mise sur ses épaules par la société d'accueil dans le but de le faire se conformer rapidement aux normes appropriées. En outre, en raison de l'absence dans cette dernière de celles des structures sociales familières qui, dans

    la société d'origine, assuraient la transmission du concept de soi (estime de soi, confiance en soi), le référentiel culturel de l'étudiant peut être amené à se désagréger (Pederson, 1991). Pour conclure, le stress d'acculturation remet en cause le bien-être social, physique, psychologique de l'individu et, à ce titre, participe pleinement au processus de transformations socioculturelles.

    2.1.4. Autres facteurs de variabilité des transformations socioculturelles

    Hormis ceux que nous avons mentionné, il y a d'autres facteurs plus généraux qui sont susceptibles de faire varier le degré de l'ensemble des transformations socioculturelles des étudiants, tels que la durée de séjour dans le pays d'accueil ou l'exposition interculturelle antérieure. Nous allons donc nous y intéresser.

    2.1.4.1. La durée de séjour

    Il semble évident que la durée de séjour joue un rôle crucial, susceptible d'affecter les transformations socioculturelles dans toute leur ampleur. Au plus la présence de l'étudiant dans la société d'accueil est longue :

    · Au plus il a d'opportunités de s'imprégner de la symbolique d'ensemble qui lie la société ; d'observer, de reproduire, d'intégrer les significations partagées localement, y compris la langue, les attitudes, les comportements et pratiques divers.

    · Au plus son réseau social est susceptible de s'étendre, de se diversifier, de se renforcer ; la somme de ses interactions de croître et les bénéfices qui en découlent de s'accumuler.

    · Au plus la marge de manoeuvre pour gérer le choc culturel est large. La nouveauté s'estompant graduellement au profit du familier, l'incertitude se réduit, les situations et les évènements se répètent. Fort de son expérience, l'individu peut fonctionner plus efficacement (Adler, 1975).

    Cependant, il faut bien reconnaître que l'impact de la durée de séjour sur les transformations socioculturelles n'est pas systématique. Il est d'ailleurs impossible au demeurant de déterminer une durée optimale de séjour, tant chaque expérience est différente et si nombreux sont les facteurs à entrer en jeu dans le processus de transformations socioculturelles.

    2.1.4.2. L'exposition interculturelle antérieure

    Le séjour à l'étranger en général, vaste ensemble dont l'échange universitaire international fait
    partie, constitue l'archétype de l'expérience interculturelle, c'est une voie privilégiée pour rencontrer
    l'Autre, découvrir de nouveaux horizons et se transformer. Pourtant, on ne doit pas confondre

    interculturel avec international. Il n'est pas nécessaire de séjourner hors des frontières de son pays pour bénéficier d'une expérience interculturelle : ce n'est qu'un moyen parmi d'autres d'ouverture à la différence. À vrai dire, l'interculturel c'est de l'interpersonnel, la communication en est un ingrédient capital. Nous savons que nos sociétés ne sont pas monolithiques, que le tissu social est hétérogène et que de multiples origines culturelles s'entrecroisent. Autrement dit, chaque culture d'ensemble se décompose en une myriade de subcultures. C'est bien là, précisément dans la richesse de ce vivier subculturel, que peuvent se trouver les opportunités d'exposition interculturelle au sens large. Puisque la diversité est en tout le monde, autochtone, étranger ou voisin de palier, toute rencontre peut être (trans)formatrice. En effet, interagir, échanger, avec des personnes d'horizons culturels et sociaux divers ; participer à des évènements trouvant leurs ancrages à l'extérieur des groupes avec lesquels on partage un large ensemble de significations communes ; apprendre une langue étrangère, lire des livres, regarder des films d'auteurs et réalisateurs issus d'autres sociétés ; se préoccuper de questions politiques ou sociales extra-territoriales et bien d'autres choses encore sont autant de modalités d'exposition interculturelle. Au sujet des médias, certains chercheurs considèrent qu'ils offriraient une ouverture sur certaines dimensions constitutives de leur société et qu'ils fourniraient des points de repères au regard desquels les « étrangers » pourraient auto-réguler leurs comportements et attitudes, adoucissant ainsi la transition entre les sociétés (Kim, 2001). L'enjeu de l'exposition interculturelle est bien de se défaire (autant que faire se peut) des oeillères qui nous ont immanquablement été collées tout au long du processus de socialisation, de s'affranchir le plus possible de l'ethnocentrisme sous-jacent à notre vision du monde. C'est pourquoi l'exposition interculturelle antérieure contribue à préparer l'individu à la mobilité, elle lui donne un aperçu de la différence culturelle. Bien entendu, toute confrontation à l'altérité n'est pas significative de fait. Par exemple, « De nombreuses études ont démontré que les échanges ne réduisent pas systématiquement les stéréotypes et les préjugés » (Abdallah-Pretceille 1999). Les rencontres interculturelles peuvent être un agent d'infléchissement de l'ethnocentrisme, tout comme elle peuvent ne pas l'être. Notons malgré tout que certaines études ont établi une corrélation positive entre exposition interculturelle, réduction du stress et gestion du choc culturel à l'étranger (Mapp et al. 2007).

    2.2. La compétence interculturelle

    Dans ce chapitre, nous éclaircirons le concept de compétence interculturelle (CIC). Les premières recherches sur la CIC datent de plus de cinquante ans. Initialement, si ces travaux ne fédéraient qu'un petit nombre d'acteurs, ils associent aujourd'hui l'ensemble de la société, du gouvernement aux entreprises en passant par les universités. En effet, au cours des dernières décennies, l'essor de

    ce que nous nommerons ici indistinctement la mondialisation, l'internationalisation ou la globalisation a consacré l'échange interculturel, ou tout du moins international, comme fait social total, au sens de M. Mauss. Par conséquent, il n'est guère étonnant que de nombreux champs disciplinaires se soient proposés d'étudier la CIC et qu'il existe, a fortiori, maints approches conceptuelles et outils d'évaluation aux terminologies et objectifs pluriels. Pourtant, cette accumulation de modèles théoriques et d'instruments de mesure n'a pas su venir à bout de la nature fugace d'un concept qui, aujourd'hui encore, échappe à tout consensus. En dépit de l'ampleur du spectre de recherche et des débats autour de la CIC, nous allons tenter d'y voir un peu plus clair. Pour commencer, nous nous pencherons sur les difficultés relatives au syntagme même de CIC. Puis, nous présenterons deux approches conceptuelles sur lesquelles nous nous baserons ensuite pour étayer notre approche.

    2.2.1. Ambiguïté du syntagme

    Si le syntagme de compétence interculturelle semble relativement transparent à première vue, il est en réalité particulièrement flou. En effet, de nombreux auteurs l'ont étudié à l'écart les uns des autres (Frederiksen et al. 2000), lui conférant tour à tour soit une nuance particulière, soit une dénomination nouvelle. De fait, il existe aujourd'hui des dizaines d'expressions utilisées en lieu et place du syntagme de CIC, ainsi que des centaines de définitions différentes dans la littérature scientifique (Deardoff, 2004). On pourrait ainsi parler de « charabia » interculturel (cf Dervin, 2009). D'ailleurs, cette confusion amène certains à dire que la CIC serait en fait un cliché à la mode dont personne ne saisirait bien le sens (Simensen, 2003). À titre d'exemple, voici quelques appellations alternatives à celle de CIC.

    TABLEAU 3 : autres dénominations de la CIC (adapté de Fantini, 2006, in Understanding and assessing intercultural competence, Sinicrope, Norris et Watanabe, 2007)

    Communication
    transculturelle

    Communication
    interculturelle

    Communication
    internationale

    Efficacité
    communicationnelle
    inter-groupe

    Compétence culturelle

    Compétence de
    communication

    Compétence
    internationale

    Compétence
    métaphorique

    Compétence mondiale

    Sensibilité interculturelle

    Sensibilité culturelle

    Ethnorelativité

    Multiculturalisme

    Biculturalisme

    Plurilinguisme

    Adaptation interculturelle

    Coopération
    interculturelle

    Interaction interculturelle

    Conscience
    interculturelle

    Intelligence
    concurrentielle mondiale

     

    1. Savoir-être

    Démontrer une capacité
    d'ouverture à l'Autre et de
    réflexion sur les cultures

    Compétence
    Interculturelle

    La persistance de cet état de fait pourrait venir de ce que le concept de CIC s'articule autour de deux notions complexes : la culture et la compétence. D 'ailleurs, en s'appuyant notamment sur le concept de « Culturespeak » (Hannerz, 2001) qui dénote l'utilisation systématique et non critique du concept de culture, Dervin (2009) considère que ne nombreuses définitions de la CIC reposent sur des prémices erronées. Il énonce certains problèmes que pose le concept :

    · Tout d'abord, il pointe la propension des chercheurs à parler des cultures comme d'entités vivantes, douées d'une conscience propre, avec lesquelles on pourrait interagir directement, alors que l'étudiant en échange ne rencontre jamais qu'un nombre limité de membres d'une société d'accueil aux multiples facettes.

    · Ensuite, il souligne le fait que c'est bien souvent une vision catégorisante, normative qui sous-tend la définition de culture. On parle sans finesse de la culture d'origine et de la culture d'accueil, comme si elles étaient deux blocs inertes et homogènes et qu'il n'y avait pas de place pour la distinction, les subcultures d'une part, et le mouvement, le métissage d'autre part.

    · Puis, il note l'absence répétée d'interlocuteur dans la définition de la CIC, l'amenant à ne reposer que sur le sujet, l'utilisateur de la compétence. De fait, l'influence de l'Autre et du contexte dans la situation d'interaction est négligée, alors que la co-construction de cette situation est un élément essentiel.

    · Il remarque également que la compétence est souvent conceptualisée comme un construit statique et monolithique. Soit on est compétent, soit on ne l'est pas. Il faudrait donc distinguer des niveaux d'habileté.

    · Il constate enfin que la compétence n'est pas forcément infaillible. De fait, dans un contexte donné, on peut être compétent un jour mais pas le lendemain.

    Par ailleurs, lorsque l'on réutilise un concept aussi populaire dans le champ scientifique que celui de CIC, il est nécessaire de prendre en considération son bagage quelque sorte, soit les inflexions que les chercheurs précédents lui ont données. C'est pourquoi, et bien que nous ne puissions possiblement être exhaustifs, nous allons maintenant présenter deux modèles théoriques de référence qui ont eu une large influence dans un certain nombre de champs disciplinaires.

    2.2.2. Exemples de conceptualisation

    Si les premières approches conceptuelles se contentaient de penser la CIC (ou termes apparentés,
    voir supra) comme une liste d'aptitudes ou de qualités classées de façon plus ou moins organisée au

    détriment de l'élaboration d'un cadre théorique clair, les modèles plus récents ont su combler cette lacune et sont bien plus élaborés. En ce qui nous concerne, face à la multitude des possibilités qui s'offrent à nous, nous prendrons appui sur deux modèles largement reconnus dans le champ scientifique, l'un européen et l'autre américain, pour établir les fondements sur lesquels reposera la CIC dans la présente étude. Dans un premier temps, nous allons donc présenter les travaux de Byram (1997) sur la compétence interculturelle avant de nous intéresser aux recherches de Bennett (1993) sur la sensibilité interculturelle.

    2.2.2.1. Byram et le modèle multidimensionnel de compétence interculturelle Byram (1997) propose un modèle de CIC articulé autour de cinq axes majeurs :

    · Les savoir-être (attitudes, relativising self and valuing others) :

    Ils recouvrent la capacité à relativiser la primauté de ses valeurs, à adopter une posture intellectuelle ouverte à l'altérité, c'est-à-dire savoir faire abstraction tant de sa défiance envers les autres cultures que de ses certitudes et croyances envers sa culture d'origine.

    · Les savoirs sociaux (knowledge, of self and others, and of interaction between individuals and society) :

    Ils incluent des connaissances théoriques sur la société d'accueil. Cela comprend notamment les processus sociaux, ou les règles de fonctionnement et les pratiques. Ces savoirs visent à connaître ce qui est l'usage dans la société d'accueil et, de par cette connaissance des éléments significatifs entrant en jeu dans la relation interculturelle, aident le sujet à adopter un comportement approprié lors des interactions sociales.

    · Les savoir-comprendre (skills, of interpreting and relating) :

    Ces savoirs fonctionnels distinguent la capacité à traduire, analyser et mettre en relation les éléments de la culture d'accueil avec ceux de la culture d'origine. D'une part, cela implique d'être à même d'aborder l'Autre sous un angle adéquat afin le comprendre. Ensuite, il s'agit de faire le pont entre les cultures, de chercher des universaux.

    · Les savoir-apprendre-et-faire (skills, of discovery and interactions) :

    Il s'agit là de développer et manier de nouveaux savoirs fonctionnels qui s'appuient sur les savoirs préexistants et permettant d'interagir dans les deux cultures, de compléter sa « boîte à outils » communicationnelle. Cela comprend par exemple ce qui relève des modes communication verbaux et non-verbaux ou du champ des compétences linguistiques.

    · Savoir s'engager (critical cultural awareness) :

    Ce dernier savoir correspond à l'aptitude du sujet à se positionner en retrait vis-à-vis des

    cultures et à porter un regard critique sur ces dernières, à les interroger. Il s'agit d'abord d'expliciter les valeurs et autres attributs des cultures, d'en prendre conscience, puis de les mettre en perspective. Cela doit permettre l'engagement, c'est-à-dire la négociation d'un compromis entre les cultures. In fine, il s'agit de déplacer l'accord de référence à l'une des deux normes culturelles afin construire une nouvelle norme acceptable entre les cultures, soit interculturelle.

    5. Savoir s'engager Déplacer l'accord d'une référence à l'une des

    deux normes culturelles pour construire un

    nouvel objet interculturel

     

    4. Savoir-apprendre-et-faire

    Enrichir sa boîte à outils
    communicationnelle

    2. Savoirs sociaux

    Appréhender les normes de comportements lors des rapports sociaux

    3. Savoir-comprendre

    Faire le pont entre les cultures, chercher les universaux

    FIGURE 1 : modèle multidimensionnel de CIC (adapté de Byram,1997)

    Pour Byram, la CIC a moins pour objectif de s'approprier l'intégralité des attributs de la culture cible pour jongler ensuite entre deux référentiels culturels que d'accéder à un espace au-delà de chacune des cultures pour favoriser l'émergence d'une identité qui les transcende. Pour cet auteur, c'est là que s'opère la distinction entre le bi-culturel et l'inter-culturel. Être biculturel (ou triculturel, etc...) c'est se condamner à n'occuper qu'un espace à la fois, ou, de façon imagée, à être semblable à une pièce de monnaie ou un dé, ne pouvant dévoiler qu'une seule face à chaque lancer. En revanche, être interculturel, c'est avoir don d'ubiquité et évoluer dans des sphères aux multiples configurations. Un pied dans la culture source, un autre dans la culture cible, mais à distance des deux, dans un espace interstitiel qui s'appuie sur elles tout en les dépassant (Byram, 2003). Dans cette optique, l'individu devient ce que Byram appelle le « locuteur interculturel », celui qui a une latitude d'action dans plusieurs espaces de communication (Audras et Chanier, 2007), celui qui communique avec les représentants de la société d'accueil dans leur propre langue et négocie l'équilibre entre les référentiels culturels, s'incarnant ainsi en « médiateur interculturel ».

    L'ethnocentrisme engendre l'asymétrie entre les référentiels culturels. Ainsi, si chacun interprète les stimuli qu'il reçoit en fonction de ses propres codes, les situations interculturelles sont susceptibles d'introduire de l'incertitude dans les schémas standards de communication. En revanche, le médiateur interculturel, lui, est capable de dissiper toute confusion car il sait décoder correctement les messages émanant des représentants des différentes cultures. Il peut porter un regard lucide sur son référentiel culturel originel, sur ses préconceptions, tout comme il peut comprendre l'Autre dans son altérité essentielle, c'est-à-dire envisager le point de vue de l'Autre à la lumière même de l'ethnocentrisme propre à ce dernier ; autrement dit voir à travers les yeux de l'étranger.

    Le modèle de Byram présente l'avantage précieux d'expliciter un ensemble de variables qui interagissent et entrent en jeu dans la construction de la CIC. Cette décomposition donne corps à un concept fugace, le rend plus tangible. En revanche, il a l'inconvénient de se présenter comme un modèle statique en ne distinguant aucun niveau d'habileté, comme si l'on était soit compétent, soit incompétent, sans autre alternative. Par ailleurs, il érige les cultures en blocs homogènes et immobiles avec lesquels l'individu pourrait interagir directement, révélant par là une approche quelque peu normative du concept de culture (Dervin, 2009).

    2.2.2.2. Bennett et le modèle de développement de la sensibilité interculturelle

    Le modèle conçu par Bennett (1993) se propose de hiérarchiser et expliquer les postures et les réactions des individus face à la différence culturelle. Rappelons que l'auteur parle, lui, de sensibilité et non pas de compétence interculturelle. Ce modèle repose sur un continuum divisé en six stades dont la succession reflète un degré accru d'ouverture à l'altérité. Les stades sont indicatifs d'un type de rapport à l'Autre et s'expriment par des attitudes et des comportements caractéristiques. Chaque stade représente donc une façon différente de voir, de structurer le monde régie par des obstacles qui la limitent. De fait, lorsque l'individu passe d'une structure ou configuration de la réalité à une autre, les nouveaux paramétrages génèrent une nouvelle série d'obstacles qui orientent les comportements et les attitudes. Pour opérer avec succès leur transition vers un stade plus avancé, les individus doivent résoudre les problèmes inhérents au stade dans lequel ils se situent déjà.

    Généralement parlant, les trois premiers stades du continuum sont dits ethnocentriques, c'est-à-dire que l'individu ne peut penser le réel qu'à travers le prisme de sa propre culture, qu'il est au centre d'un monde qui gravite autour de ses préconceptions. En effet, les croyances et les comportements initiaux intégrés au cours du processus d'enculturation, lui-même lié au processus de socialisation, ne font pas l'objet d'une remise en question. Les choses sont « comme ça » et pas autrement (Bennett, 1993). Selon Abdallah-Pretceille (1986, p. 81), l'ethnocentrisme c'est « la difficulté voire l'incapacité, pour un groupe ou un individu, d'effectuer une décentration par rapport à son groupe

    culturel de référence ». En définitive, cet immobilisme contribue à l'érection de barrières entre « nous » et « eux » (ce qui peut passer par les stéréotypes et les préjugés par exemple) dans la mesure où l'Autre ne concorde pas avec ce que l'on conçoit comme les normes culturelles classiques. À l'inverse, les trois derniers stades sont dits ethnorelatifs, c'est-à-dire que l'individu met sa propre culture en perspective, qu'il accepte que sa vision du monde, avec les attitudes, les comportements, les valeurs qui la constituent n'en soit qu'une parmi tant d'autres tout à fait viables. Pour résumer, au fil des stades, l'individu progresse d'une conscience, d'une perspective, monoculturelle à une vision du monde plus élaborée, subtile et aiguisée, lui permettant de reconnaître et gérer la différence et, ainsi, d'élargir graduellement ses capacités d'action et de communication en contexte interculturel (Hammer et al., 2003). Comme le dit Bennett (1986), « La clef du développement de la sensibilité et des aptitudes nécessaires à la communication interculturelle réside d'abord dans la vision que chacun entretient face aux différences culturelles ». Remarquons que si la dynamique du continuum est généralement tenue pour unidirectionnelle, occasionnellement, il est possible que l'individu régresse à un stade antérieur. Passons maintenant en revue les six étapes constitutives du continuum :

    · Le déni de la différence culturelle. Pour l'individu, il n'existe qu'une seule culture légitime, la sienne. Il est complètement désintéressé par la différence culturelle et l'ignore en érigeant des barrières psychologiques ou physiques pour se maintenir à l'écart de l'Autre. À ce stade, l'individu a tendance à penser qu'il agit de façon naturelle et qu'il ne saurait en être autrement. Il ne se sent pas menacé par la différence culturelle car il la nie. Concrètement, cela pourrait se traduire au niveau des comportements par la fréquentation exclusive de compatriotes ou encore l'assimilation des traits culturels d'une société à ceux de ses voisines.

    · La défense face à la différence culturelle. La seule culture valable est toujours celle de l'individu, la plus évoluée, porteuse non plus de l'unique mais de la meilleure façon de faire. L'individu réagit face à la menace que représentent les autres cultures en les dénigrant tout en affichant la sienne comme supérieur. Concrètement, cela peut passer par les préjugés et les stéréotypes au travers desquels sont attribués à des individus isolés des caractéristiques indésirables censées refléter les attributs de tout un groupe (ou vice-versa). Manifestation alternative du stade de défense, l'individu peut être sujet à un contrecoup. Il ne prend pas de recul par rapport à l'expérience positive de la culture d'accueil, intègre les stéréotypes négatifs de cette dernière à l'encontre de sa culture d'origine, et la déprécie aveuglément. Dans les deux cas, l'individu à ce stade se comporte de façon manichéenne envers à la différence culturelle, soit en la diabolisant soit en l'exaltant. C'est une évolution par rapport au stade du déni car ici l'individu perçoit la différence culturelle de façon assez forte pour

    qu'elle soit menaçante, alors qu'il l'ignorait précédemment.

    · La minimisation de la différence culturelle. L'individu reconnaît l'existence d'autres cultures mais à un degré superficiel. Il considère que les traits de sa culture sont universels et les généralise aux autres cultures sans distinction, comme si l'humanité toute entière partageait un creuset de valeurs élémentaires. L'altérité ne constitue plus une menace car elle est banalisée, voilant ainsi toute différence profonde. Selon Bennett, un individu à ce stade pourrait par exemple se figurer que tous les peuples aimeraient vivre en démocratie, ou que dans chaque culture les hommes sont considérés comme les enfants de Dieu.

    · L'acceptation de la différence culturelle. Comme au stade précédent, l'individu reconnaît l'existence d'autres cultures, mais cette fois il ne cherche pas à en atténuer les spécificités. Il respecte la légitimité des valeurs, comportements et attitudes d'autrui et admet que sa propre culture fait partie d'un ensemble de cultures également valables. Il s'agit ici d'une posture neutre face à la différence culturelle. En revanche, si l'individu est prêt à accepter, ou tolérer, l'altérité dans ce qu'elle a de plus essentiel, cela ne sous-entend pas pour autant qu'il va l'apprécier purement et simplement. Il ne s'agit pas d'une tentation relativiste politiquement correcte, ni de condescendance. L'individu peut émettre un jugement négatif à l'égard de la différence, mais dans une perspective critique, et non plus ethnocentrique. C'est d'ailleurs bien là l'enjeu de ce stade : la relativité des valeurs. Le cheminement conduisant l'individu à considérer que la nature et la hiérarchie des valeurs sont contingentes au contexte culturel exige de lui qu'il souscrive à une certaine éthique (Perry, 1970, in Hammer et al., 2003). Pour illustrer cela, citons également Tardy (1983) « Comprendre l'autre dans son altérité essentielle ne signifie pas en admettre nécessairement les principes et Ies fondements. Encore moins s'identifier à l'autre par une sorte de mimétisme culturel : toute morale a ses parodies et ses dérives d'inauthenticité. La compréhension n'exclut pas la contestation, davantage: elle en est la condition de possibilité. Bref, l'éthique de la différence n'est pas celle du caméléon ». Notons qu'à ce stade l'individu n'adapte normalement pas ses comportements afin de correspondre aux normes de la société d'accueil. Généralement, il ne s'approprie pas non plus un grand nombre des comportements caractéristiques des représentants de cette dernière. Pour finir, l'esprit de l'individu reste ouvert sans qu'il puisse pourtant appréhender les cultures dans toute leur complexité.

    · L'adaptation à la différence culturelle. L'individu acquiert une latitude d'action dans deux espaces de communication séparés. Il peut s'extraire temporairement de sa culture d'origine pour se fondre dans celle de la société d'accueil. Contrairement aux stades précédents qui se faisaient le reflet de postures intellectuelles, la transition du stade de l'acceptation à celui de

    l'adaptation ne traduit plus une évolution limitée au domaine affectif. En effet, l'individu est ici capable d'opérer un ajustement fonctionnel aux normes de la société d'accueil tout comme il peut intégrer les usages qui y ont cours et les comportements de ses représentants. En somme, non seulement l'individu est-il capable de voir le monde à travers les yeux de l'Autre, mais il peut aussi communiquer efficacement lors des interactions en manifestant des comportements et attitudes appropriés aux normes culturelles en vigueur dans la société d'accueil. C'est ce que Bennett appelle l'empathie. Par ailleurs, il différencie bien l'adaptation de l'assimilation. Pour cet auteur, ce stade n'est pas synonyme d'abandon de la culture d'origine au profit de celle de la société d'accueil, il ne s'agit pas de les substituer. C'est un mouvement de va-et-vient d'un répertoire culturel à l'autre. Pratiquement, l'individu est spontanément capable d'appréhender un comportement dans sa logique culturelle, de décoder les normes et valeurs qui le sous-tendent, et d'agir ainsi que le requiert la situation interculturelle.


    · L'intégration de la différence culturelle. Il n'est possible de parvenir à ce stade qu'après un contact prolongé avec l'altérité. C'est d'ailleurs une inflexion courante chez les expatriés de longue durée, les globe-trotters ou les autochtones issus de subcultures minoritaires par exemple (Hammer et al., 2003). Ce stade implique un processus de reconstruction cognitive au cours duquel l'individu intègre les éléments des diverses cultures sans pour autant s'identifier à aucune d'elles. En d'autres termes, l'individu développe une vision kaléidoscopique du monde, en marge de sa culture originelle et de celle de la société d'accueil. On pourrait rapprocher cela de la description que fait Adler (1977) de la personne multiculturelle : « ce n'est pas simplement la personne sensible à plusieurs cultures différentes. C'est plutôt la personne qui est constamment en train de devenir une partie de et qui se sent en même temps en dehors d'un contexte culturel donné ». Dune part, l'individu est amené à réinterpréter son identité culturelle, et d'autre part sa vision kaléidoscopique est susceptible de le placer en position d'intermédiaire culturel. Bennett précise que la transition du stade de l'adaptation à l'intégration ne traduit pas un meilleur fonctionnement en situation interculturelle. Il indique en outre qu'il n'est pas forcément préférable de s'affranchir de tout enracinement culturel. Si tout le monde devenait marginal, de quoi serait-on en marge au juste? (Bennett, 1993). Pour résumer, le véritable enjeu de ce stade réside dans la gestion de ce que Bennett appelle la marginalité culturelle. C'est-à-dire le fait de ne plus s'identifier durablement à une norme culturelle. Selon cet auteur, la marginalité culturelle peut prendre deux formes. Dans la première, l'individu se sent aliéné puisqu'il ne se reconnaît dans aucune culture. Ainsi, il peut être enclin à se dévaloriser ou faire l'objet de jugements

    négatifs tant de la part des représentants de sa culture d'origine que des membres de la culture d'accueil. Il est comme pris dans un feu croisé en quelque sorte. Inversement, la deuxième forme de marginalité est dite « constructive », le flottement entre les cultures fait partie intégrante de l'identité du sujet. Il se perçoit comme intrinsèquement interculturel et navigue au gré des situations, adaptant aisément ses comportement et ses perspectives, sans qu'il n'en résulte aucun conflit interne, aucun dommage identitaire collatéral.

    1. Déni et retrait

    2. Défense et dénigrement

    3. Minimisation et universalité

    4. Acceptation et relativisme

    5. Adaptation et alternance

    6. Intégration et reconstruction

    Figure 2 : modèle de développement de la sensibilité interculturelle (adapté de Bennett, 1993)

    À l'encontre du modèle de Byram, l'avantage de ce modèle est de présenter une vision évolutive de l'objet qu'il se propose de décrire. En revanche, il fournit peu d'informations sur la nature des obstacles à surmonter afin d'évoluer d'un stade à l'autre, ainsi que sur la manière de le faire. Ajoutons qu'ici encore c'est une conception quelque peu normative, au sens de Dervin (2009), qui sous-tend le concept de culture.

    2.2.3. Notre approche

    Dans ce sous-chapitre, nous allons d'abord faire une synthèse des modèles de Byram et de Bennett. Puis, nous tenterons de donner une définition de la compétence interculturelle avant de relativiser tout cela.

    2.2.3.1. Synthèse des modèles

    Chacun des deux modèles que nous venons de passer en revue présente des avantages dans l'approche conceptuelle de son objet. Mentionnons justement que Hammer et al. (2003) ont tenté de démêler l'écheveau que représente le concept de CIC au sens large en distinguant la sensibilité interculturelle de la compétence interculturelle. Selon eux, la sensibilité interculturelle se limiterait à l'aptitude à discriminer et éprouver la différence culturelle, tandis que la compétence

    interculturelle recouvrirait, elle, la faculté de penser et agir de façon interculturellement appropriée. Néanmoins, si l'on s'en tient aux modèles présentés, il n'est pas possible d'opérer une démarcation aussi claire. D'une part, la sensibilité interculturelle telle qu'envisagée par Bennett se traduit elle aussi par des comportements, des représentations et des attitudes permettant au sujet d'interagir en contexte interculturel, et d'autre part la compétence interculturelle telle que décrite par Byram englobe également l'adoption d'une perspective ethnorelative. Ainsi, tout en présentant des traits uniques, ces deux modèles se recoupent à plusieurs égards. C'est en raison de cette complémentarité que nous avons choisi de les combiner afin d'appréhender la CIC. Notre approche nous conduit donc à distinguer trois paliers d'apprentissage interculturel :

    1) Décentration et ethnorelativité.

    2) Appropriation de savoirs et efficacité.

    3) Dépassement des référentiels culturels et hybridité.

    Notons bien qu'il ne s'agit pas ici de présenter un modèle de CIC en tant que tel, mais plus modestement de creuser des sillons susceptibles d'être approfondis ultérieurement. Cette précaution prise, explicitons la teneur de chacun des trois paliers tels que nous les envisageons actuellement. Tout d'abord, décentration et ethnorelativité.


    · Pour nous, ce qui est au coeur de la CIC c'est bien la décentration. Se décentrer c'est relativiser ses valeurs, interroger ses préconceptions, remettre en question son référentiel culturel en somme. L'enjeu de la décentration consisterait à opérer une sorte d'épochê, de dépouillement par rapport à son référentiel culturel. En situation interculturelle, il s'agit avant toute chose de ne pas basculer dans l'anxiété face à la perte de ses repères, voire à la remise en cause de son référentiel culturel. Au contraire, faire preuve de décentration c'est accepter l'incertitude, l'ambiguïté inhérente à la différence culturelle, et être prêt à rentrer dans un processus de transformation graduelle initié par la rencontre et la fréquentation d'autrui sans occulter ni céder aux conflits internes que cela engendre. L'adoption d'une telle perspective aiderait le sujet à mieux saisir l'Autre dans son altérité essentielle, à faire preuve d'ethnorelativité ou entrevoir que la vision du monde d'autrui ou l'organisation sociale d'une société donnée présente une alternative cohérente et viable à ce que l'on connaît et concevait jusque là comme allant de soi. La décentration est donc la pierre angulaire de la CIC en ce qu'elle représente la première marche vers la reconstruction cognitive, affective, comportementale du sujet au contact de son environnement. Notons que ce premier palier n'exclut pas les situations communication mais qu'elles n'en sont pas l'objet premier.

    Par delà cette délimitation globale, on pourrait distinguer plusieurs niveaux d'habileté dans ce premier palier afin d'introduire une certaine dynamique et de ne pas bâtir des catégories

    factices discriminant des individus dits « compétents » et d'autres qui ne le seraient pas du tout. Par exemple, il serait possible d'opérer un nivellement en fonction de la propension des individus à suspendre leur jugement et à accepter l'Autre, c'est-à-dire selon la fréquence à laquelle ils adoptent une posture de décentration et d'ethnorelativité face à la différence culturelle. On pourrait également inclure un élément ayant trait à l'écueil du relativisme culturel, consistant à considérer que tout se vaut (Reboul, 1989, 1991), à mi-chemin entre l'ethnocentrisme et l'ethnorelativité.

    Intéressons-nous maintenant au second palier, appropriation de savoirs et efficacité.

    · C'est suite au processus de décentration que peut avoir lieu l'appropriation active par le sujet de ceux des éléments caractéristiques de l'altérité qui lui permettent de communiquer avec les autochtones ou d'appréhender la société d'accueil dans toute sa complexité. C'est ce qui lui permet de développer de nouveaux comportements, attitudes ou représentations adéquats dans son nouvel environnement. L'enjeu de ce deuxième palier réside dans la nature des situations d'interaction. Il s'agit de s'adapter plus ou moins consciemment à la situation et à l'Autre, de s'imprégner de ce qui pour autrui fait sens (l'échelle des valeurs, etc.) afin de comprendre la symbolique d'ensemble qui lie société. On retrouverait là les savoirs-sociaux, les savoirs-comprendre ou les savoirs apprendre-et-faire du modèle de Byram par exemple. Finalement, suite à notre premier palier qui, comme le diraient Hammer et al. (2003), reflète plus particulièrement l'aptitude des sujets à éprouver et discriminer la différence culturelle, il est ici question de s'engager de manière fonctionnelle dans une dynamique empreinte de sens. Remarquons que des apprentissages dans le second palier peuvent avoir lieu avant que le processus de décentration ne soit pleinement achevé. Néanmoins, reconnaitre et estimer la différence culturelle à sa juste valeur constitue un prérequis sans lequel il ne saurait y avoir ni progrès possible pour l'individu au plan humain, ni relations pérennes entre les êtres. En effet, une véritable efficacité en situation interculturelle requiert motivation et respect envers l'Autre. Par conséquent, posséder des connaissances ou des savoirs quelconques mais considérer autrui comme inférieur ne peut conduire au développement de la compétence interculturelle.

    Ici encore, il serait envisageable de distinguer différents niveaux d'habileté en fonction de l'aptitude des sujets à communiquer ou à adopter un comportement approprié (respecter les usages locaux, etc.) par exemple.

    Abordons à présent le troisième palier, dépassement des référentiels culturels et hybridité.

    · Après avoir suffisamment côtoyé l'Autre et s'être familiarisé à de nouvelles façons de faire, d'être, de voir le monde, etc. aptes à le voir fonctionner efficacement hors de sa société

    d'origine, le sujet peut développer la capacité à articuler consciemment, à mettre en relation, les traits issus de son propre référentiel culturel et les traits culturels issus des référentiels de l'ensemble des personnes avec lesquelles il a été en contact direct et prolongé. Puisque le sujet dispose de la faculté d'évoluer dans plusieurs espaces de communication ; de voir le monde à travers les yeux de l'Autre dans une certaine mesure, il ne s'agit plus seulement de pouvoir évoluer avec succès dans l'une ou l'autre société mais de transcender les référentiels culturels. L'enjeu ici est de développer une vision du monde hybride qui, plus que de reconnaître et estimer l'altérité, l'englobe.

    Là également, nous pourrions distinguer plusieurs niveaux d'habileté, notamment en incluant un élément de marginalité culturelle au sens de Bennett (1993).

    Ainsi, palier après palier, ce continuum traduit de la part des individus une prise de position sans cesse plus engagée en faveur de la différence culturelle, ou une plus grande propension à l'exploiter, comme s'il s'agissait progressivement d'une appréhension, d'une compréhension, et enfin d'une appropriation de cette dernière.

    Toutefois, reconnaissons que cette approche est très incomplète et pèche plus particulièrement par l'absence d'indicateurs clairs, de comportements, attitudes et représentations observables, identifiables sur le terrain. Néanmoins, ce découpage nous permet de prendre position par rapport à la question de la nature spécifique ou générale de la CIC (Bartel-Radic, 2009). Autrement dit, suite à un séjour au Brésil, le sujet est-il à même de transférer ses apprentissages interculturels lors d'un passage en Chine par exemple? L'apprentissage interculturel fait-il du sujet un spécialiste de l'interculturel, avec une connaissance pointue d'une société précise, ou bien un généraliste capable de s'adapter continuellement à des environnements différents? Pour nous, les dispositions du premier palier de la CIC, la décentration et l'ethnorelativité, sont d'ordre générique. Elles peuvent donc être réinvesties et développées au cours de n'importe quelle situation. Nous ne disons pas qu'elles puissent être captées pleinement à l'issue de la première confrontation à l'altérité, ni qu'un individu ne pourrait jamais plus éprouver de réactions ethnocentriques après avoir atteint un forte propension à se décentrer, mais nous pensons que c'est une disposition que l'on développe graduellement, sans la re-commencer tout à fait à chaque nouvelle expérience. En revanche, le second palier exige, lui, un apprentissage chaque fois renouvelé du tout au tout car spécifique à l'environnement, aux individus rencontrés. Quant au dernier palier, il prend appui sur les expériences successives du sujet et échappe ainsi à la dualité entre généralité et spécificité.

    2.2.3.2. Définition du concept

    Maintenant que nous avons éclairci quelque peu la nature de la CIC, il est temps d'en proposer un essai de définition. Livrons-nous d'abord à une analyse sémantique du syntagme de compétence interculturelle. D'une manière assez évidente, l'interculturel renvoie à un objet qui est entre, ou parmi, les cultures, soit pour nous les significations. Qu'en est-il alors de la compétence? Force est de constater que sa définition varie selon les champs disciplinaires. Pour certains, la notion de compétence a été largement galvaudée dans la littérature scientifique faute de prise en compte rigoureuse de sa diversité sémantique et conceptuelle (Deardorff, 2006). Appuyons-nous sur G. Le Boterf (1995, 1997), pour qui la compétence se pare de plusieurs attributs. Tout d'abord, elle dérive de l'articulation ou, selon ses propres termes, de la mobilisation ou l'activation, de plusieurs savoirs. Ensuite, elle est opérationnelle dans un contexte donné, elle s'ancre dans une situation. Pour finir, elle permet l'action. Il s'agit d'agir, dans une démarche de résolution de problème ou de communication par exemple. Cela complète valablement une autre définition selon laquelle la compétence en science de l'éducation doit être envisagée comme un savoir en usage (Malglaive, 1990). Les implications de cette définition sont les suivantes :

    · La compétence est une notion dynamique. Elle se construit.

    · Elle est dépendante du contexte : de l'acteur lui-même, de l'environnement. Ainsi, si les savoirs constitutifs de la compétence ne sont pas adéquatement mobilisés puis synchronisés, on ne peut pas agir de façon optimale. On peut donc être compétent dans une situation donnée à un moment donné mais plus quelque temps après dans la même situation. Comme le formule Tardy (1983) « Je dois essayer de comprendre l'autre, en tant qu'il est un autre, dans sa différence centrale, dans ce qui à mes yeux en fait un étranger. Effort inouï de décentration culturelle, si inouï que toute lassitude passagère ne saurait être taxée de faute contre l'humanité. On ne peut exiger que 1'on se mette à la place de l'autre vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Le travail de l'enculturation mérite, lui aussi, son repos hebdomadaire ».

    · Puisque la compétence est tributaire de l'acquisition préalable d'un corps de savoirs d'une part, et de leur mobilisation d'autre part, nous sommes amenés à dire qu'elle n'est pas uniforme. On peut la décomposer en niveaux d'habileté, selon le degré d'acquisition puis de mobilisation des savoirs atteints.

    En tenant compte de tout ce que nous avons dit depuis le début de ce chapitre, nous proposons la
    définition suivante de la CIC : la compétence interculturelle est un construit formé d'une
    combinaison de savoirs, attitudes et comportements qui, une fois mobilisés lors d'une situation

    singulière d'interaction, permettent au sujet d'exploiter avec plus ou moins de succès (en vue de comprendre et/ou communiquer) les significations diffuses qui émanent des stimuli (discours, comportements, attitudes...) renvoyés par les protagonistes de l'interaction.

    2.2.3.3. Pondération

    Malgré tout, ni notre synthèse sur la nature de la CIC ni notre essai de définition ne sauraient se suffire à eux-mêmes. La CIC telle que nous l'avons présentée est un objet complexe et difficile à acquérir. Il convient donc de procéder avec circonspection. De fait, il semble exceptionnel de jamais pouvoir atteindre un véritable cosmopolitisme, c'est-à-dire de parvenir à « s'enraciner dans la profondeur de plusieurs mémoires, de multiples particularités, de revendiquer d'autres appartenances en plus de la sienne » (Bruckner, 1992). La CIC englobe en effet un vaste champ d'action aux multiples dimensions et, en dépit de tout modèle (modèles qui ne sont par ailleurs jamais que des représentations simplifiées de conduites humaines complexes), son acquisition n'est jamais parachevée. En effet, dans une société donnée, lors de ses interactions, le sujet n'a pas affaire au « tout » de la culture d'autrui (Vatter, 2003), comme s'il s'agissait d'un rayonnage dans lequel on pourrait piocher à sa guise. Il est seulement possible de s'appuyer sur une connaissance partielle et ponctuelle de tout référentiel culturel, de toute société. L'élément clef, ce sont les acteurs par le biais desquels cette connaissance est transmise, c'est-à-dire les personnes avec lesquelles le sujet interagit et les situations auxquelles il fait face, et qui font office de relai dans son apprentissage interculturel. Ainsi, aucune expérience interculturelle n'est reproductible car elle repose sur une intersubjectivité dont les conditions ne peuvent jamais être identiques. On peut parler d'une double singularité sujet/situation. Chaque séjour à l'étranger est donc unique. Il en résulte une certaine connaissance graduée d'éléments significatifs différente pour chaque individu (ibid.). Par ailleurs, selon Tardy (1983) « il faut admettre enfin, quoi que cela puisse coûter à notre orgueil, que la tâche que je viens de décrire, au delà d'un certain seuil, devient impossible. L'altérité culturelle, dans ce qu'elle a d'essentiel, dans ce qui fait qu'elle est vraiment étrangère, est un objet inaccessible. On peut tourner autour, se familiariser avec sa périphérie. progresser un peu dans une fissure étroite. Mais au-delà, il reste une sorte d'opacité constitutive des rapports entre les êtres, qu'il est vain de vouloir nier, sauf par arrogance. D'où cette phrase un peu sentencieuse, qui est, pour moi et pour l'instant, le dernier mot de la question : l'éthique de la différence, ce n'est pas chercher à comprendre totalement toutes les altérités, c'est admettre qu'elles existent et être capable d'en supporter l'existence, même incomprise, parce qu'incomprise ». La CIC est donc un apprentissage à vie qui, pour nous, aura rempli ses objectifs s'il contribue à faire passer les gens d'un exotisme réciproque à une familiarité réciproque (Vatter, 2003). Plus qu'un simple outil pratique destiné à

    évoluer dans un contexte donné, il s'agit là d'un puissant outil social qui participe à la lutte contre l'intolérance, la xénophobie et l'ethnocentrisme, tant chez soi qu'à l'étranger (Fantini, 2000, 2001). Pour conclure, observons à présent un détail qui a son importance : la perspective civilisationnelle sous-jacente au concept de CIC. On ne peut faire l'économie de remarquer que l'étude de cette dernière dans le monde scientifique est largement, sinon exclusivement, européano- et américanocentrée. Il est donc nécessaire de reconnaître cette limite, qui peut même prendre l'allure d'un paradoxe. Il semble en effet curieux que la recherche sur un concept qui plaide pour l'ethnorelativité et la décentration soit subordonnée à une aire civilisationnelle particulière : l'Occident. Faisons-en notre profit et tâchons de nous montrer circonspects.

    3. Problématique

    Au vu de l'ensemble des éléments ci-dessus, il semble bien que les transformations socioculturelles de l'étudiant et l'accroissement de son degré de CIC soient des enjeux majeurs lors d'un séjour à l'étranger. Pour nous, ces concepts représentent deux volets indissociables qui concourent à la réussite, ou à l'échec, du séjour. En conséquence, l'impulsion que nous envisageons de donner à notre travail nous pousse à les considérer ensemble. Notre angle d'approche en vue d'étudier l'impact des échanges universitaires internationaux sur leurs participants est donc le suivant : comment peut-on envisager les liens entre les transformations socioculturelles et le développement de la compétence interculturelle chez les étudiants à l'issue de leur séjour au Brésil?

    METHODOLOGIE DE RECHERCHE

    Dans cette partie, nous présenterons d'abord les sujets qui ont participé à cette étude. Ensuite, nous commenterons l'ensemble de notre processus de recueil de données, et enfin nous aborderons notre grille d'analyse.

    1. Présentation de la population de recherche

    Pour constituer l'échantillon de notre étude, nous avons contacté plus d'une trentaine d'étudiants de l'Université Lumière Lyon 2 ayant séjourné au Brésil dans le cadre des études intégrées, ainsi qu'une dizaine d'étudiants brésiliens ayant étudié à l'Université Lumière Lyon 2. Sur l'ensemble des personnes contactées, huit ont donné une réponse. Parmi elles, quatre ont accepté de se porter volontaires. Finalement, seules trois étudiantes françaises seront allées jusqu'au bout de cette démarche. Afin de respecter leur anonymat et la confidentialité des données recueillies, nous prénommerons ces étudiantes P, C et M.

    · P est une étudiante de Master 1 en psychologie. Elle a effectué un séjour d'un peu moins de deux mois à Caxias do Sul, au sud du Brésil, dans le cadre d'un stage au sein d'une école publique. C'est une personne qui a voyagé, et dont la famille a des origines anglaises, ce qui l'a conduit à grandir dans un contexte international, si ce n'est interculturel. Précédemment à son expérience au Brésil, P a notamment effectué un séjour d'étude d'un an en Italie au cours de sa Licence.

    · C est également étudiante de Master 1 en psychologie. Elle a elle aussi effectué un séjour de moins de deux mois au Brésil, mais au nord, à Recife. Elle a du effectuer deux stages, l'un dans une structure s'occupant d'enfants autistes, l'autre dans une association visant au développement personnel et identitaire d'enfants des favelas. Pareillement, C a beaucoup voyagé. Elle a notamment effectué un séjour d'étude d'une durée de six mois au Canada en 2008 dans le cadre de ses études universitaires, ainsi qu'un séjour de longue durée à la Réunion, entre 2009 et 2011, là encore dans un cadre académique.

    · M, quant à elle, est en troisième année de Licence en sciences de l'éducation. Elle a passé tout son cinquième semestre à Caxias do Sul, au sud du Brésil. Contrairement à P et C, il s'agissait là de son premier « grand » voyage, bien qu'elle ait déjà effectué des sorties scolaires, l'une de deux semaines en Espagne et l'autre d'une semaine en Angleterre, au cours du collège et du lycée. Notons qu'elle a également eu l'opportunité sur place de travailler dans une école de langue.

    2. Instrumentation

    Dans un premier temps, nous traiterons ici de la procédure que nous avons suivie dans notre recueil de données. Puis, nous présenterons l'intégralité des questionnaires de notre recherche. Pour finir, nous aborderons la construction des grilles d'entretien.

    2.1. Procédure

    Pour recueillir les données nécessaires à la réalisation de cette étude, nous avons travaillé à partir de questionnaires et d'entretiens semi-dirigés auprès de trois étudiantes de l'Université Lumière Lyon 2 ayant séjourné au Brésil au cours de l'année scolaire 2011-2012. Nous avons interrogé les étudiantes après leur séjour, à leur retour en France. Ce sont les questionnaires qui ont été administrés en premier aux sujets.

    Au total, nous en avons fait usage de dix au cours de ce travail, et chaque sujet s'est vu présenté l'ensemble des questionnaires en une seule fois. L'intégralité d'entre eux se présente sous forme d'auto-évaluation : confronté à une série d'items, le participant doit se positionner vis-à-vis de chacun d'eux sur une échelle généralement comprise entre 1 et 5. Le temps nécessaire estimé afin de remplir le Questionnaire général est d'une douzaine de minutes, et d'une minute en moyenne pour chacun des neuf autres questionnaires. Concernant les résultats, le comptage se fait en fonction des réponses du candidat comme suit. Par exemple, s'il indique que l'item x lui correspond à un degré de 1/5, nous comptabilisons un point, et ainsi de suite. En revanche, il se peut que les items soient inscrits sous un régime de comptage inversé. Par exemple, si le candidat indique que l'item y lui correspond à un degré de 1/5, nous comptabilisons cette fois cinq points. Ensuite, le score réel du candidat est ramené au score maximal possible puis multiplié par cent. Par exemple, pour les items x et y : [6/10 x 100 = 60/100 ]. Pour chaque questionnaire, plus le score total est proche de 100, meilleures sont les aptitudes du sujet dans les domaines évalués.

    Ensuite ont eu lieu les entretiens. Chaque sujet a bénéficié d'un seul entretien. Nous les avons conduits sur deux journées consécutives, à la bibliothèque universitaire Chevreul, dans une salle réservée à cet effet. Le premier entretien s'est déroulé le jeudi 3 mai, entre 10 heures et midi, avec P. Les deux autres se sont déroulés le vendredi 4 mai, de 10 heures à 11 heures avec C, puis de 11 heures à midi avec M. Initialement, nous avions convenu d'un créneau d'une durée d'une heure pour chacun des entretiens. Cependant, pour le premier d'entre eux, la salle ayant été réservée pour deux heures et P étant seule à être interviewée ce jour là, nous avons eu le loisir de poursuivre notre discussion plus longuement que prévu. Finalement, nos entretiens auront duré 89 minutes avec P, 50 minutes avec C et 46 minutes avec M.

    Ajoutons que, initialement, il était prévu d'organiser la collecte de données en deux phases

    distinctes : avant le départ des étudiants pour le Brésil, puis à leur retour en France, afin de pouvoir fixer avec davantage de rigueur les jalons d'une éventuelle évolution. Cependant, en raison des difficultés rencontrées lors de la composition de l'échantillon, nous avons été contraints de réviser notre procédure et d'abandonner la première phase de collecte de données.

    2.2. Présentation des questionnaires

    Nous allons présenter ici l'ensemble des questionnaires avec lesquels nous avons travaillé.

    2.2.1. Le Questionnaire général

    Comme son nom l'indique, ce questionnaire élaboré par nos soins vise à récupérer des données élémentaires en relation avec le séjour à l'étranger, notamment afin de le contextualiser et de s'en faire une première impression. En outre, ce questionnaire nous a particulièrement été utile pour orienter spécifiquement le déroulement des entretiens en fonction des réponses fournies par chacun des sujets.

    2.2.2. L'Échelle de communication interculturelle

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes appuyés sur l'Intercultural Sensitivity Scale (ISS) développée par Chen et Starosta (2000). Notre Échelle de communication interculturelle comporte 20 items évalués de 1 à 5. Il s'agit principalement de mesurer la capacité des sujets à communiquer efficacement avec l'Autre. Remarquons que le comptage des items 1 et 4 d'une part, puis 8 à 20 d'autre part, est inversé.

    2.2.3. L'Échelle de distance culturelle

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes inspirés de la Cultural Distance Scale (CDS) développée par Babiker et al. (1980). Notre Échelle de distance culturelle comprend 20 items évalués de 0 à 5. Il s'agit de recueillir le degré perçu de différence entre la société d'origine et la société d'accueil chez les sujets. Notons que le comptage de l'ensemble des items est inversé.

    2.2.4. L'Échelle de sensibilité interculturelle

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes basés sur la Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) développée par Ward et Kennedy (1999). Nous avons également utilisé la traduction française de la SCAS disponible dans l'étude de Ait Ghezala-Rossier (2003). Notre Échelle de sensibilité interculturelle se compose de 26 items évalués de 1 à 5. Elle se destine à mesurer le degré d'ajustement des sujets à la vie quotidienne dans la société d'accueil ainsi que leur ouverture à

    l'altérité. Notons là encore que le comptage de la totalité des items est inversé.

    2.2.5. L'Échelle de soutien social

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes appuyés sur la Multidimensional Scale of Perceived Social Support (MSPSS) développée par Zimet et al. (1988). Notre Échelle de soutien social est constituée de 18 items évalués de 1 à 5. Il s'agit de mesurer le soutien social dont estiment avoir bénéficié les sujets au cours de leur séjour à l'étranger.

    2.2.6. L'Échelle d'efficacité interculturelle

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes basés sur la General Self-Efficacy Scale (GSES) développée par Schwarzer et Jerusalem (1995) ainsi que sur sa traduction française (Dumont, Schwarzer et Jerusalem, 2000). Nous avons aussi utilisé la Cross-Cultural Social-Efficacy Scale for Students (CCSESS) développée par Fan et Mak (1998). Notre Échelle d'efficacité interculturelle se compose de 19 items évalués de 1 à 5. Il s'agit notamment de mesurer le sentiment d'auto-efficacité des sujets et leur posture vis-à-vis de différentes situations d'interaction sociale lors du séjour à l'étranger. Ajoutons que le comptage des items 2, 3, 4, 5, 7, 8 et 11 est inversé.

    2.2.7. L'Échelle d'adaptation académique

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes inspirés du Student Adjustment to College Questionnaire (SACQ) développé par Baker et Siryk (1989), ainsi que de la Student Academic Stress Scale (SASS) développée par Busari (2011). Notre Échelle d'adaptation académique est composée de 26 items et se destine à évaluer la façon dont se positionnent les sujets par rapport aux études et à la vie à l'université en général pendant leur séjour à l'étranger. Les items sont évalués sur une échelle de 1 à 5. Notons que le comptage des items 3, 4, 6, 7, 9, 19, 21, 22, 23, 24, 25 et 26 est inversé.

    2.2.8. L'Échelle de stress d'acculturation

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes basés sur l'Acculturative Stress Scale for International Students (ASSIS) développée par Sandhu et Asrabadi (1994). Notre Échelle de stress d'acculturation se compose de 14 items évalués de 1 à 5. Il s'agit de mesurer le bien-être psychologique des sujets. Ajoutons que le comptage de l'intégralité de cette échelle est inversé.

    2.2.9. L'Échelle de bien-être

    Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes appuyés sur le Bio-Psycho-Social Health Index (BPSHI) développé par Tonks et Paranjpe (1999). Notre Échelle de bien-être comprend 20 items évalués de 1 à 5. Elle vise principalement à mesurer si l'équilibre affectif, social ou physique des sujets a été mis en péril lors du séjour à l'étranger. Remarquons que le comptage des items 1, 2, 3, 8, 10, 11, 15, 16, 17, 18, 19 et 20 est inversé.

    2.2.10. Le Brief COPE

    Originellement développé par Carver et al. (1989), nous nous sommes également appuyés sur la traduction française de ce questionnaire (Muller et Spitz, 2003) afin de l'adapter à notre étude. Tel que nous l'avons remodelé, le Brief COPE se compose de 12 items évalués sur une échelle de 1 à 5. Il vise à jauger la façon dont réagissent les sujets lors d'une situation stressante ou délicate. Notons que le comptage des items 1, 4, 9 et 12 est inversé.

    2.3. Présentation de la grille d'entretien

    Nos grilles d'entretien ont été élaborées afin d'expliciter les points qui présentaient le plus d'intérêt à la lecture des réponses des participants à l'ensemble des questionnaires d'une part, et de permettre aux sujets de nous livrer un maximum de leurs impressions d'autre part. Dans cette optique, conduire des entretiens semi-dirigés présentait justement l'avantage de fournir aux participants une opportunité de parler plus librement de leur séjour. Ainsi, il leur était occasionnellement possible de s'engager dans des digressions ou de soulever d'eux-mêmes certains points qui leurs tenaient à coeur. Ces passages sous forme de récits de vie pendant lesquels les sujets parlent de manière spontanée sont particulièrement importants car ils permettent, de façon privilégiée, de déceler certains éléments sous-jacents à leur construction identitaire et personnelle, ou à leur regard sur le séjour à l'étranger par exemple, qui, autrement, n'auraient pas pu être mis en lumière. Par ailleurs, l'expérience du séjour à l'étranger étant intense, cela leur offre un espace de réflexivité, un moyen de mettre leur expérience en perspective et de faire un bilan de leur vécu sur place.

    3. Grille de lecture

    Dans ce chapitre, après avoir successivement abordé la façon dont nous ferons sens de l'analyse des résultats relatifs aux transformations socioculturelles puis à la compétence interculturelle des sujets, nous mettrons notre travail en perspective.

    3.1. Transformations socioculturelles

    C'est à la lumière de notre conceptualisation que se présente notre grille d'analyse et notre perspective sur les données recueillies. Pour l'analyse des résultats, nous avons d'abord passé en revue les données associées à l'ensemble des indicateurs des trois dimensions des transformations socioculturelles. Pour l'interprétation des résultats, nous avons ensuite mis ces données en parallèle avec chacune des composantes des transformations socioculturelles, en fonction de leur dimension d'appartenance.

    3.2. Compétence interculturelle

    En revanche, concernant la compétence interculturelle, si nous avons développé une esquisse conceptuelle, nous ne disposons pas de modèle d'analyse dans cette étude. De ce fait, pour l'analyse des résultats, nous avons procédé empiriquement, à partir des données recueillies sur le terrain. Après une étude des informations issues des questionnaires et des entretiens, nous avons pu distinguer un certain nombre de thèmes nous fournissant des indices afin de situer les sujets au sein de notre conceptualisation de la CIC. Les thèmes qui ont émergé sont les suivants :

    · Sens du séjour à l'étranger.

    · Ressenti sur le séjour.

    · Tensions éprouvées.

    · Évolution personnelle.

    · Projets d'avenir.

    Par la suite, pour l'interprétation des résultats, nous avons donc rapporté ces données à notre ébauche de modèle théorique afin de situer les sujets par rapport aux trois paliers de la compétence interculturelle telle que nous l'avons envisagée, à savoir : décentration et ethnorelativité, appropriation de savoirs et efficacité, dépassement des référentiels culturels et hybridité.

    3.3. Pondération

    Notre travail repose sur les informations que nous ont communiquées les sujets, par auto-
    évaluations et entretiens, de façon rétrospective. Par conséquent, il est tout à fait plausible qu'il se

    glisse dans les données recueillies un certain nombre d'inexactitudes, d'oublis, d'exagérations, de confusions, etc., et ce soit fortuitement, soit à dessein. Tout cela est inhérent à la nature même de notre procédure de recherche. De fait, si, par éthique, il ne nous est pas permis de remettre en question l'authenticité de la parole des sujets, de douter de leur sincérité, il est néanmoins indispensable que nous puissions adopter une posture critique et ne pas prendre pour argent comptant leur discours, aveuglément, simplement parce qu'il est le leur. Ainsi, il est parfois nécessaire de lire entre les lignes ou, lors de l'analyse d'un entretien, de s'intéresser aussi bien à la forme qu'au fond du discours par exemple.

    ANALYSE DES RESULTATS

    Dans cette partie, nous analysons les réponses de P, C et M à nos questionnaires et entretiens.

    1. Le cas de P

    Premièrement, nous allons contextualiser le séjour de P au Brésil et essayer d'en déceler les origines ainsi que les motivations qui l'ont porté. Deuxièmement, nous passerons en revue les données relatives aux indicateurs des transformations socioculturelles. Dernièrement, nous examinerons les réponses de P associées aux différents thèmes en lien avec la CIC.

    1.1. Contexte

    P est une étudiante en Master 1 de psychologie qui a séjourné à Caxias do Sul pour une durée inférieure à deux mois afin de satisfaire aux exigences d'un stage qu'elle a effectué dans une école publique. Il apparait que le séjour de P au Brésil n'était pas anticipé. Initialement, elle projetait de se rendre au Brésil durant l'été 2012 afin de rendre visite à son ami, brésilien, et de découvrir un pays auquel elle portait de l'intérêt mais qu'elle ne connaissait pas. Cependant, au début de l'année scolaire, l'occasion pour P d'effectuer son stage de Master 1 au Brésil se présenta, et elle la saisit :

    « je sais pas c'est juste venu là, c'est venu là vraiment sur un plateau j'avais rien demandé,

    je comptais y aller cet été en fait du coup j'y vais pas et en fait c'était genre « waow » c'est

    juste venu là quoi » ;

    « Donc j'ai tout de suite sauté sur l'occasion évidemment ».

    Concernant ses motivations, il semble que plusieurs raisons l'aient conduites à se lancer dans cette aventure. Pour une part, cette opportunité de stage à l'étranger revêtait l'aspect d'une expérience professionnelle valorisante :

    « ça me donnait l'occasion d'avoir une expérience professionnelle là-bas si tu veux [...] enfin pour moi l'argument était professionnel ».

    Ensuite, cela lui permettait de retrouver son ami :

    « moi à l'époque en fait mon copain était brésilien et j'étais jamais allée au Brésil ».

    Et finalement, il lui était ainsi possible de découvrir ce pays par elle-même, c'est-à-dire sans la présence permanente de son ami qui habitait loin de Caxias...

    « moi honnêtement j'avais vraiment envie de faire un truc toute seule » ;

    « après tu vois pour moi j'étais pas du tout dans la même région de lui et c'était ce que je
    voulais en fait, parce que ce qui comptait pour moi comme je t'ai dit c'était avoir mon

    expérience du Brésil donc je me disais aussi bin voilà je veux pas me retrouver comment dire, je veux pas voir le Brésil à travers ses yeux je veux me faire ma propre idée donc c'était un truc bien pour moi »

    ...ou encore sous un angle différent de celui du tourisme :

    « connaître le pays différemment que par les vacances tu vois ».

    1.2. Transformations socioculturelles

    Nous allons présenter les résultats de P dans les dimensions culturelle, sociale et psychologique des transformations socioculturelles.

    1.2.1. Dimension culturelle

    Il s'agit ici d'examiner les données se rapportant aux trois indicateurs de la composante culturelle que sont les compétences de communication, la distance culturelle et la sensibilité interculturelle.

    1.2.1.1. Compétences de communication

    P obtient le score de 81/100 à l'Échelle de communication interculturelle. Par exemple, elle s'estime capable de surmonter les difficultés inhérentes aux situations de communication entre individus issus de sociétés aux inflexions culturelles différentes :

    - item 7 « Si besoin est j'arrive à prendre en compte la différence culturelle quand je communique » : 4/5 ;

    - item 16 « Je n'accepte pas qu'une personne d'une autre culture remette ma propre culture en cause » : 2/5 ;

    - item 19 « Je trouve difficile de parvenir à une compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture » : 2/5.

    En outre, elle estime pouvoir créer du lien social facilement sur place :

    - item 8 « Je trouve que les gens du coin ne m'intègrent pas assez » : 2/5 ;

    - item 9 « Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami avec une personne d'une autre culture » : 2/5 ;

    - item 10 « Je trouve difficile de me dévoiler à une personne d'une autre culture » : 1/5.

    De plus, elle semble disposer des ressources adéquates afin de communiquer efficacement avec les gens :

    - item 12 « Je suis angoissé quand je communique avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;

    - item 13 « Je me vexe facilement quand je communique avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;

    - item 14 « Je me décourage si les gens avec qui je parle ne me comprennent pas » : 2/5 ;

    - item 15 « Je me sens inférieur quand je communique avec une personne d'une autre culture » : 1/5.

    Par ailleurs, elle estime qu'entre le début et la fin de son séjour, son niveau de portugais a évolué de 2/5 à 3/5, soit d'un niveau pré-intermédiaire à un niveau intermédiaire (Questionnaire général, item 12 « Quel était votre niveau de portugais? »). Comme elle le déclare lors de notre entretien, elle est passée de « je parlais pas forcément bien le portugais quand même, je le parlais un petit peu avant quand même, j'avais des bases, mais enfin j'ai appris un peu sur le tas là-bas » à « je parlais assez bien portugais ».

    1.2.1.2. Distance culturelle

    P obtient le score de 42/100 à l'Échelle de distance culturelle. Par exemple, certains domaines de la vie sur place lui semblaient très différents de leur équivalent en France :

    - item 6 « La place de le religion, du sacré, de la spiritualité » : 4/5 ;

    - item 9 « La mentalité ou la façon de voir les choses » : 4/5 ;

    - item 10 « La vie en famille » : 4/5 ;

    - item 11 « la façon de se comporter, de rencontrer les gens » : 4/5 ;

    - item 13 « La façon de se déplacer » : 5/5 ;

    - item 17 « L'environnement, la faune, la flore, les paysages » : 4/5 ;

    - item 18 « La façon de consommer, d'acheter » : 4/5 ;

    - item 19 « Les habitudes, la routine, la vie quotidienne » : 4/5.

    Elle indique d'ailleurs que ses représentations ont beaucoup changé suite à son séjour (Questionnaire général, item 14 « Entre votre arrivée et votre départ, diriez-vous que vos représentations du Brésil ont beaucoup changé? » : oui).

    Abordons justement les représentations du Brésil chez P. Nous passerons d'abord en revue son appréhension générale de la société brésilienne, sa vision de la campagne ensuite, puis sa perception de l'insécurité et son regard sur la spiritualité, avant d'examiner sa vision des liens d'amitié et son ressenti des mentalités.

    Premièrement, de la société brésilienne en général, elle nous dit d'abord :

    « c'est vraiment un autre monde » ;

    « tu as beaucoup de spécificités locales en fait enfin c'est vraiment un pays énorme en fait

    donc c'est difficile de dire « c'est comme ça » enfin tu vas à un endroit et tu as ta petite réalité locale ».

    Ensuite, elle parle d'un Brésil du sud et d'un Brésil du nord dans lesquels les origines des populations tendent à différer, dans une certaine mesure :

    « j'étais dans le Rio Grande do Sul, Caxias, c'est la région tout au sud, la dernière région du Brésil avant, t'as l'Argentine en bas, sur le côté je crois c'est le Paraguay enfin je sais plus, y a l'Uruguay d'un côté le Paraguay de l'autre, et en gros c'est une région assez unique au Brésil, parce que ils ont une culture en commun justement avec ces pays là, c'est une culture donc les gauchos » ;

    « il y a une immigration allemande, italienne et polonaise dans la région très forte et du coup la plupart sont descendants d'Européens, bon après maintenant t'as un brassage comme partout dans le Brésil, y a aussi des origines de partout comme ailleurs dans le Brésil » ;

    « le Brésil du nord c'est différent pour eux tu vois, et puis ouais d'un côté c'est très différent tu vois [...] ouais le Nordeste du Brésil c'est autre chose quoi, y a beaucoup plus l'africanité tu vois, il y a une influence africaine ».

    Puis, généralement parlant, elle estime que le passé du Brésil, le poids de la colonisation, semble lester la société encore aujourd'hui :

    « c'est un pays ex-colonisé [...] y a quand même ça qui reste honnêtement ça pèse encore » ; « dans la façon dont est construite cette société y a encore beaucoup ce, tu sens encore un

    peu beaucoup de subir tu vois [...] y ont quand même une façon de subir les choses » ;

    « si tu veux si je me base d'un point de vue comment dire rapports de pays tu vois, enfin genre toute une logique qui leur a été un peu transmise tu vois où « on », enfin, la France et les pays européens étaient synonymes de modernité tu vois de civilisation tu vois c'est un peu ça qui leur a été transmis, et c'est encore un peu ça qu'eux-même cultivent aujourd'hui parce que ça leur a été transmis comme ça je pense et c'est encore présent » ;

    « les erreurs que les pays qui se sont industrialisés dans le passé par exemple en Europe ont fait bin y font les mêmes tu vois parce qu'y suivent le même chemin » ;

    « l'influence de la culture [...] occidentale en général [...] tu vois ils vivent d'une façon dont nous on vit, parce que pour eux c'est un modèle de modernité tu vois c'est un modèle de civilisation ».

    Par ailleurs, elle insiste sur les écarts sociaux de la société brésilienne :

    « c'est un continent différent, bon alors moi déjà je suis allée au Brésil en me disant « ça va
    être pas trop différent » tu vois, parce que comme je connaissais déjà plein de Brésiliens

    ouais je m'étais dit « c'est très moderne » j'avais en tête que il y avait de la pauvreté mais je m'étais dit que j'allais pas être trop choquée » ;

    « c'est une fois là-bas que j'ai vu les choses et que j'ai dit « waow » » ;

    « là-bas en fait c'est que tu sens qu'y sont en plein développement » ;

    « tu es dans un pays qui certes n'est pas très organisé encore, qui est immense et dur à coordonner et qui est pas forcément partout développé pareil enfin y a encore beaucoup de manque, en même temps y sont en effervescence et tu sens cette effervescence là-bas sur place, y a des endroits déjà où tu vois pas limite la différence avec ici, c'est pas la pauvreté partout au contraire, c'est plus que ça va être réparti différemment, tu peux voir une maison riche à côté d'une favela, mais ouais les écarts de confort de vie sont énormes » ;

    « y a tellement de disparité là-bas, y a tellement d'extrêmes ».

    Deuxièmement, concernant les zones rurales, il ressort que l'arrière pays est très différent de la campagne française :

    « quand tu sors t'es tout de suite dans la campagne [...] c'est que tu as donc l'interio ils appellent ça, donc l'intérieur, l'arrière pays quoi, avec une végétation différente hein parce que c'est tropical, et euh, c'est pas que tropical, mais euh c'est différent d'ici de toute façon, et, comment dire, t'as ces petits villages tout de suite quand tu sors en fait, quand tu sors tu commences à être dans des villes beaucoup plus petites et plus tu t'enfonces [...] ça fait un peu Far West tu vois, Far West version brésilienne quoi et c'était hyper désorientant » ;

    « c'est vraiment la campagne, en même temps c'est une ville, ils sont auto-suffisants, ils sont fiers d'être là, les jeunes ils veulent être là, c'est pas comme ici quoi, voilà ils sont très attachés à leur ville, ils ont des modes de fonctionnement encore très ruraux quoi, enfin pour moi en tout cas tu vois, par exemple ils avaient de la viande et ils étaient en train de préparer la viande dans une petite cabane à côté de la maison, ils étaient en train de la faire sécher sur un fil de fer enfin tu vois, il y a des chiens errants partout tu vois y a des petits trucs comme ça que j'avais jamais vraiment vu en fait enfin comment dire t'as un ressenti de la ville complètement différent quoi, j'avais jamais vu ça, alors que je connais la campagne en France, ouais non c'était à faire franchement ».

    Troisièmement, à propos de l'insécurité, il semble que climat au Brésil soit différent de celui en France :

    « on a vraiment ressenti une insécurité [...] t'as aussi un truc à te dire : la personne elle peut être armée, y ont un gros problème là-bas avec la drogue en fait » ;

    « tu vas pas rentrer à pied quoi, ouais, y prennent toujours la voiture. Après c'est peut-être culturel, mais bon j'ai senti que c'était plus un truc de sécurité tu vois, de toujours, surtout le

    soir, surtout le soir » ;

    « dès que la nuit est tombée en fait, tu vas penser tout de suite différemment » ;

    « n'importe quel restaurant ou n'importe où où tu es tu demandes d'appeler un taxi ils le font quoi tu vois, parce que s'ils te voient tout seul ou y voient que t'as pas de voiture enfin c'est pas un souci quoi t'appelles. C'est normal en fait c'est normal là-bas. Et ouais, ça déjà c'est un truc y faut s'y habituer quoi » ;

    « ça m'est arrivé de rentrer à pied quand j'avais besoin vraiment mais la plupart du temps les gens chez qui j'étais me ramenaient tu vois, ils te ramènent, ils te laissent pas tout seul » ;

    « tu compares ça à ta vie d'ici tu te sens un peu étouffée en fait parce que t'es protégée, y a une protection que ici on a pas tu vois, des réflexes de sécurité, et c'est juste leur mode de vie en fait, c'est normal pour eux, mais pour moi du coup c'était un peu bizarre tu vois ».

    Quatrièmement, au niveau de la spiritualité, il semble là encore que les choses divergent entre la

    société brésilienne et la société française, tant au niveau de la foi en général...

    « ce que j'ai trouvé là-bas en fait c'est que c'est tellement courant d'être croyant, enfin en quelque chose hein, quoi que ce soit, ils font beaucoup de mélange hein, c'est très courant que les gens soient catholiques et qu'en même temps y pratiquent le Candomblé et qu'y pratiquent un autre truc tu vois » ;

    « y a une espèce d'hyper tolérance » ;

    « là-bas y sont tous croyants, y croient tous en Dieu, là-bas comment dire l'existence de Dieu est quasiment pas remise en cause par personne en fait » ;

    « Là-bas les athées les gens y se moquent d'eux tu vois parce que c'est tellement évident que Dieu existe tu vois ce que je veux dire et ça peut être n'importe quoi hein, c'est pas forcément le Dieu de la Bible par exemple, le Candomblé est très présent [...] les gens y peuvent croire tout et n'importe quoi mais y ont quand même une notion de spiritualité » ;

    « c'est limite tu crois pas en Dieu t'es pas normal tu vois. Donc y a ça mais du coup ça laisse place aussi à beaucoup de confusion parce que tu crois tout et n'importe quoi, tu mélanges tout. »

    ...que du christianisme en particulier :

    « je pense que ça doit être très compliqué en fait d'être chrétien là-bas » ;

    « Là-bas tu as des églises écoute tu as même pas envie de rentrer dedans tu vois enfin honnêtement, rien qu'à voir l'affiche, rien qu'à voir, c'est un magasin quoi presque tu sais c'est limite un magasin de foi » ;

    « t'as des doctrines un peu bizarres qui circulent tu vois enfin des trucs qui sont pas du tout

    bibliques, genre qu'y vont acheter leur terrain au ciel enfin des trucs complètement aberrants » ;

    « y [les églises évangéliques] te vendent des miracles quoi tu vois t'as tout une doctrine de la guérison, une doctrine de la prospérité aussi qui est très présente là-bas » ;

    « mentalité de propagande ou marché tu vois, de commerce » ;

    « phénomène d'église-secte » ;

    « on leur vend un Jésus un peu refaçonné quoi ».

    Cinquièmement, par rapport aux liens d'amitié, des différences semblent également se faire sentir : « j'ai pu remarquer tu vois c'est que les personnes elles passent tellement de temps au travail, tellement de temps avec leur famille, en fait quelque part tes amis ça devient tes collègues tu vois, en fait c'est très normal que tes amis soient tes collègues » ;

    « la valeur de la famille est très importante, donc les gens, bin par exemple, la fille chez qui je vivais, c'est pas habituel ce qu'y font eux tu vois, parce que normalement les gens vivent chez la famille normalement, donc c'est très rare » ;

    « la famille y a un peu cette notion tu vois de pas chercher les personnes tu vois enfin y ont la famille donc y s'auto-suffisent entre eux ».

    Dernièrement, P nous dit sur les mentalités aux Brésil que les gens sont gais et que l'atmosphère est stimulante :

    « Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens ouais y sont super accueillants » ; « la façon de vivre les choses de voir les choses tu vois cet optimisme » ;

    « y ont une mentalité de fou quoi y ont une joie de vivre, y sont toujours contents, toujours optimistes » ;

    « y a cette effervescence et que tu as envie d'en faire partie en fait, y a un côté très enthousiasmant là-bas, c'est que tu as l'impression que tu vas construire quelque chose, qu'il y a quelque chose qui est en train de se construire et que tu vas construire avec eux ».

    1.2.1.3. Sensibilité interculturelle

    P obtient le score de 71,5/100 à l'Échelle de sensibilité interculturelle. Par exemple, elle déclare bien comprendre sa société d'accueil :

    - item 20 « Comprendre la société dans laquelle vous vivez » : 2/5 ;

    - item 21 « S'adapter aux règles de bienséance locales » : 2/5 ;

    - item 22 « Comprendre les différences culturelles observées ou ressenties » : 2/5 ; - item 23 « Comprendre les valeurs locales » : 2/5 ;

    - item 24 « Vous intégrer à la culture locale » : 1/5.

    Qui plus est, elle estime être à même de communiquer avec succès avec les gens : - item l « Vous faire comprendre » : 2/5 ;

    - item 2 « Comprendre le portugais » : 2/5.

    1.2.2. Dimension sociale

    Nous allons traiter des informations relatives au phénomène d'acculturation, notamment par le biais du capital social de P, ainsi que de l'orientation d'acculturation de sa société d'accueil.

    1.2.2.1. Capital social

    P dit qu'il lui a été facile d'établir des contacts sur place (Questionnaire général, item 2 « Au Brésil, était-il facile de créer du lien avec d'autres personnes? » : 5/5). En outre, elle estime s'être sentie bien intégrée dans son environnement (Questionnaire général, item 7 « Rétrospectivement, comment vous sentiez-vous inséré dans la vie brésilienne à l'issue de votre séjour? » : 4/5).

    Par ailleurs, elle estime avoir communiqué sur une base régulière avec plus ou moins cinq personnes au début de son séjour, puis avec plus ou moins dix personnes à la fin de son séjour (Questionnaire général, item 6 « Dans la vie de tous les jours, parmi vos relations, avec combien de personnes dialoguiez-vous? »). À ce sujet elle se dit satisfaite de la façon dont elle a communiqué avec les autres (Questionnaire général, item 5 « Au quotidien, comment pensez-vous avoir communiqué avec les autres? » : 5/5). De plus, concernant la nature de son réseau social, elle nous dit que ses interlocuteurs privilégiés étaient majoritairement des Brésiliens, suivis par des compatriotes au Brésil (Questionnaire général, item 8 « De quelle nationalité étaient vos interlocuteurs privilégiés? »).

    Pendant son séjour, P a toujours vécu chez des Brésiliens. Elle a été successivement hébergée dans la famille de son référent de stage pendant quelques semaines, puis dans une colocation avec trois jeunes Brésiliens pour le restant du séjour.

    De sa famille d'accueil, P ne nous dit que peu de choses au cours de l'entretien, si ce n'est qu'elle se sentait quelque peu étouffée chez eux :

    « y vivaient un peu excentrés, y faisaient toujours en voiture, y avait pas de transport pour aller là-bas, du coup j'étais vachement dépendante d'eux tu vois, donc tu compares ça à ta vie d'ici tu te sens un peu étouffé en fait parce que t'es protégé, y a une protection que ici on a pas tu vois, des réflexes de sécurité, et c'est juste leur mode de vie en fait, c'est normal pour eux, mais pour moi du coup c'était un peu bizarre tu vois ».

    Ensuite, sa colocation semble avoir été mitigée. D'un côté, elle déclare...

    « c'était mieux quelque part parce que, d'être là je veux dire, là où j'étais, parce que j'avais plus ma vie »

    ...mais d'un autre côté elle nous dit...

    « Alors si je devais refaire quelque chose je clarifierais mon séjour chez cette fille [...] parce que du coup elle m'a pas fait payer de loyer alors que je dormais là quoi je dormais dans le salon mais en même temps elle m'a donné un statut d'invité mais c'était très ambigu du coup pour moi parce que je savais pas trop ce qu'elle attendait de moi » ;

    « je clarifierais mon statut ouais pour que ce soit moins ambigu »

    ...et ajoute :

    « elle avait pas de place chez elle vraiment mais j'ai dormi dans son salon donc bon c'était un peu improvisé mais en même temps y me restait quoi, y me restait un mois tu vois » ;

    « je me suis dit bon bin c'est bon, je tiens le coup tu vois, c'est un mois dans un salon à survivre, bon y avait quand même des désavantages que, c'est pas le fait de pas avoir d'intimité ».

    De plus, il semble qu'elle voyait peu ses colocataires...

    « cette fille avec qui je vivais je la voyais quasiment jamais en fait, je la voyais que le soir ou les weekends des fois parce que elle avait un emploi du temps de malade [...] elle avait des horaires de fou et ses colocs c'était pareil, donc on se voyait qu'en coup de vent [...] c'est pas du tout la même vie étudiante qu'ici »

    ...et qu'il y ait eu, épisodiquement, quelques tensions :

    « ma coloc, les filles avec qui je vivais tu vois enfin j'ai pas mal discuté avec elles des fois c'était un peu le clash enfin ouais on a été au clash des fois et bon.... ».

    Généralement parlant, P nous explique avoir principalement connu ses relations par l'intermédiaire de son stage d'un côté, et de l'université de l'autre :

    « je suis arrivée, aux relations internationales si tu veux, y avait un peu des étudiants qui attendaient aussi si tu veux donc j'ai déjà rencontré quelques étudiants là, j'avais un gars en Erasmus que j'avais contacté avant d'y aller donc quand je suis arrivée aussi après je l'ai vu puis après c'était mon stage, j'ai rencontré beaucoup de gens en stage » ;

    « tu vois les gens que je rencontre, je travaille avec eux, souvent c'était des collègues en fait, par le biais des collègues » ;

    « surtout par le travail, ou par la fac mais en fait le truc c'est que la plupart, tu vois nous on fait cette distinction étudiant / travailleur ici, mais là-bas elle y est pas forcément, les étudiants y sont aussi travailleurs en fait, et ouais j'ai rencontré des gens un peu comme ça

    par mes entretiens aussi du coup ».

    Par ailleurs, si son réseau social au Brésil était principalement constitué de Brésiliens, elle indique que les relations avec ses compatriotes rencontrés sur place ont été significatives :

    « j'avais cinq six Français quand même dans mon réseau, donc je les voyais assez souvent, sinon c'était que des Brésiliens, j'avais pas d'autre étudiants internationaux, c'était que des Français et des Brésiliens, donc soit étudiants soit pas quoi, la majorité était pas étudiant d'ailleurs » ;

    « en fait ce qu'il y a de marrant c'est que sur place après j'ai beaucoup aimé être en contact avec des Français tu vois, je connaissais des Erasmus comme j'étais pas loin de la fac j'étais en contact avec la fac tu sais, donc je les voyais assez souvent en fait [...] j'ai aussi eu ce côté un peu même en même pas deux mois - c'était deux mois quand même, le côté Erasmus de connaître des Français sur place et ça m'a beaucoup aidée aussi tu vois ».

    En outre, notons qu'elle dit avoir gardé contact avec des Brésiliens depuis son retour en France : « Ouais avec quelques personnes ouais [...]surtout brésiliens ».

    Concernant ses relations avec son ami et leur influence pendant son séjour, P nous confie : « oui je pense c'est obligé que ça a joué un rôle » ;

    « forcément ça a influencé sur ma vision du Brésil de toute façon ».

    Elle ajoute, semble-t-il, que cette relation fut un facteur de tension :

    « après c'est juste par rapport à mon copain tu vois je mettrais peut-être moins la pression tu vois puisque du coup c'est vrai j'ai peut-être mis un peu de pression quoi par rapport au contexte » ;

    « je m'étais peut-être pas rendue compte que c'était vraiment loin en fait. Au Brésil t'as pas forcément des moyens de transport faciles et ça coûte cher l'avion donc du coup c'est vrai que je me reposais peut-être beaucoup sur lui par moments, en même temps y pouvait pas m'aider concrètement parce que il était loin donc y a peut-être eu une frustration à ce niveau là ».

    Pour conclure, P estime ne pas avoir eu beaucoup de temps ni de loisir sur place pour se créer un plus large réseau social :

    « j'avais un rythme de vie assez intense » ;

    « sur place j'avais pas trop de loisir » ;

    « vraiment je bossais quoi, j'avais vraiment pas le temps ».

    1.2.2.2. L'orientation d'acculturation de la société d'accueil

    Au sein de la société dans laquelle elle évoluait, P nous dit ne pas avoir subi de rejet : « Non [...] j'ai pas trop eu de réactions comme ça ».

    Elle évoque également une atmosphère positive...

    « y ont une joie de vivre, y sont toujours contents, toujours optimistes » ;

    « la façon de vivre, de voir les choses, tu vois cet optimisme »

    ...et parle même de discrimination positive à son égard :

    « Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens ouais y sont super accueillants et y vont pas te discriminer, c'est presque de la discrimination positive en fait » ;

    « Même dans le sud alors que le sud y sont tous descendants d'Européens quasiment et justement ils s'en vantent, c'est quelque chose dont ils sont contents et même eux parce qu'ils sont brésiliens mine de rien et dès que tu dis que t'es française y sont trop contents tu vois, ils veulent parler avec toi si y parlent français, enfin y vont limite y vont s'identifier plus à toi » ;

    « y a peut-être un complexe d'infériorité de fait que t'es européen t'es français notamment, voilà tu viens de ce pays du savoir, des Lumières nanana, et du coup je pense que certaines personnes elles se sentent d'office peut-être intimidées par toi ou des trucs comme ça, ouais ».

    1.2.3. Dimension psychologique

    Nous recueillons ici les données associées au choc culturel par le biais des indicateurs suivants : le soutien social, l'auto-efficacité, la réussite académique et professionnelle et le stress d'acculturation.

    1.2.3.1. Soutien social

    P obtient le score de 84,4/100 à l'Échelle de soutien social. Par exemple, elle déclare avoir bénéficié d'un excellent soutien social lors de son séjour...

    - item 4 « Je peux parler de mes problèmes à quelqu'un » : 5/5 ;

    - item 5 « Il y a quelqu'un auprès de moi pour me réconforter qu'en j'en ressens le besoin » : 4/5 ;

    - item 6 « Je reçois tout le soutien moral dont j'ai besoin » : 4/5 ;

    - item 18 « Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes joies et mes peines » : 4/5 ...et ce tant de la part de sa famille...

    - item 2 « Je suis satisfait de mes contacts avec ma famille » : 5/5 ;

    - item 3 « Mes relations avec ma famille sont importantes pour moi » : 5/5

    ...que de ses amis en France...

    - item 9 « Je suis satisfaite de mes contacts avec mes amis restés en France » : 5/5 ;

    - item 10 « Mes relations avec mes amis restés en France sont importantes pour moi » : 5/5 ...ou du côté brésilien :

    - item 11 « Je peux compter sur mes nouveaux amis au Brésil » : 5/5 ;

    - item 12 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes nouveaux amis au Brésil » : 5/5 ;

    - item 13 « Mes relations avec mes nouveaux amis au Brésil sont importantes pour moi » : 5/5.

    1.2.3.2. Auto-efficacité

    P obtient le score de 75,7/100 à l'Échelle d'efficacité interculturelle. Par exemple, elle déclare pouvoir gérer les situations stressantes, inattendue ou délicates :

    - item 6 « Si je suis dans le pétrin je peux penser à une solution » : 4/5 ;

    - item 17 « En général, je peux faire face à quoi que ce soit » : 4/5.

    De plus, elle semble présenter toutes les dispositions nécessaires pour évoluer avec succès dans son environnement :

    - item 1 « Je me sens à l'aise lors des activités sociales » : 4/5 ;

    - item 2 « C'est difficile pour moi de me faire des amis » : 1/5 ;

    - item 3 « Je trouve difficile de tenir une conversation avec la plupart des gens » : 2/5 ; - item 4 « Je suis généralement discret et effacé en société » : 2/5 ;

    - item 13 « Je me sens à l'aise quand je parle avec les gens du coin » : 4/5 ;

    - item 16 « J'essaie de devenir ami avec les gens du coin » : 4/5 ;

    - item 18 « Si j'aperçois une personne que je voudrais rencontrer je vais vers elle au lieu d'attendre qu'elle vienne vers moi » : 4/5.

    1.2.3.3. Réussite académique et professionnelle

    P n'a pas rempli le questionnaire intitulé Échelle d'adaptation académique, car elle n'étudiait pas à l'université sur place. De son travail, P nous dit simplement...

    « ça se passait bien » ;

    « En gros j'étais dans une école publique là-bas et j'avais pas forcément un rôle de
    psychologue tu vois dans la structure [...] fallait que je fasse un stage plein temps quoi,

    donc moi j'étais en stage en observation dans les classes, j'ai fait aussi en gros j'étais quoi, y avait un groupe de soutien en fait pour les élèves en difficulté, un cours d'alphabétisation, un cours de progression y appellent ça, c'est une prof en fait qui est dédiée à ça et qui sous forme de jeu aussi, des jeux pédagogiques ou n'importe, donc apporte un enseignement mais qui est différent de celui que tu trouves dans la classe en fait »

    ...et ajoute :

    « mais en même temps toi aussi t'es en train d'apprendre tu vois, t'as un peu une position comme ça qui te permet de pivoter enfin donc c'est, non c'était bien ».

    Par ailleurs, si l'on s'en réfère au Questionnaire général, elle se déclare globalement satisfaite de son stage (item 15 a) « Globalement, combien êtes-vous satisfait de votre séjour dans votre structure de stage au Brésil? » : 4/5.

    1.2.3.4. Stress d'acculturation

    Premièrement, P obtient le score de 78,5/100 à l'Échelle de stress d'acculturation. Par exemple, elle dit ne pas avoir eu le mal du pays :

    - item 1 « J'ai le mal du pays : je ne me sens pas chez moi et mes compatriotes me manquent » : 2/5.

    En revanche, si elle nous dit ne pas avoir subi de discriminations sur place...

    - item 2 « Je me sens discriminé ou pas sur un pied d'égalité avec les gens du coin » : 1/5 ; - item 3 « Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs » : 1/5

    ...elle affirme en revanche avoir été confrontée à des préjugés et à des stéréotypes :

    - item 14 « Je suis victime de préjugés et de stéréotypes » : 4/5.

    Interrogée à ce sujet en entretien, il ressort que cela lui a été très pénible...

    « le truc que moi j'ai trouvé le plus dur en fait c'est le regard qu'y ont en fait sur les Européens et sur les Français notamment ».

    ...et explique :

    « Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens ouais y sont super accueillants et y vont pas te discriminer, c'est presque de la discrimination positive en fait tu vois » ;

    « je pense pas que ça t'empêches d'être authentique avec les gens mais n'empêche que tu as ton arrière plan qui reste tu vois ce que je veux dire » ;

    « c'est un pays ex-colonisé et nous on était colonisateur en fait, enfin la France, les Français étaient colonisateurs, même si je l'étais pas personnellement (rire), mais y a quand même ça qui reste honnêtement ça pèse encore et tu le vois dans leur représentation des

    gens, dès que tu dis que t'es française [...] ils ont des représentations du genre, ils ont des clichés du genre, ouais on se lave pas tous les jours et honnêtement ils le pensent sérieusement quand ils te posent la question c'est pas qu'ils rigolent ils te posent vraiment la question donc ça c'est assez intense, après ils ont des trucs du genre on mange à table avec cinq couverts tous les jours ou genre des trucs tu vois l'entrée, le nana, le dessert enfin tu vois ils ont ce truc tu vois de vraiment on est chic on est élégant [...] Y ont les stéréotypes tu vois que tout ce qui est français c'est de la bonne qualité tu vois, y vont se ruiner à acheter des produits de marque genre Loréal ou Lancôme ou j'en sais rien des trucs que nous-même on achète même pas, parce ce qu'on veut chercher moins cher tu vois, mais pour eux c'est français donc c'est bien et y vont dépenser l'argent pour l'acheter, parce que c'est de la qualité tu vois. Et y pensent que nous on fait pareil, y pensent que y vont acheter quatorze parfums [...]. Pour eux, c'est une marque de richesse tu vois, une marque de je sais pas, d'élégance ou quoi d'avoir un parfum surtout français et d'en avoir plusieurs quoi, et pour moi c'est des trucs mais pff quand j'ai vu ça j'ai halluciné quoi parce que pour moi c'est tellement des trucs futiles en fait honnêtement bon ça c'est mon éducation [...] la France et les pays européens étaient synonymes de modernité tu vois de civilisation [...] et ça pour moi c'était le plus dur à vivre en fait » ;

    « je véhicule ça, en venant ici je véhicule le passé, je véhicule le statut international de mon pays d'origine, et c'est présent aussi quand même dans tes rapports avec les gens tu vois [...] en gros quelque part que tu viens d'un pays qui est plus civilisé donc qu'il y a plus d'éducation, qu'il y a plus de, c'est pas vrai tu vois ce que je veux dire mais c'est quand même ce qui t'es renvoyé tu vois » ;

    « Même dans le sud alors que le sud y sont tous descendants d'Européens quasiment et justement ils s'en vantent, c'est quelque chose dont ils sont contents [...] limite y vont s'identifier plus à toi et te dire « ouais ici c'est pas comme le reste du Brésil, on est plus évolué » enfin des trucs comme ça et enfin moi je trouve ça insupportable en fait parce que quelque part c'est tout le truc de se dire « bin ouais j'ai pas choisi où je suis née et en même temps j'ai pas choisi moi ce rapport de force avec les gens, j'ai pas choisi d'être dans le pays qui était colonisateur » tu vois ce que je veux dire, donc si je vais quelque part j'ai pas envie d'avoir cette position d'ex-colonisateur tu vois mais en même temps tu l'as malgré toi en fait parce que c'est d'où tu viens quoi » ;

    « c'est pas que je voulais pas être française tu vois ce que je veux dire, c'est pas que j'avais honte d'être française ou quoi, mais j'en avais marre qu'y me voient comme ça en fait ».

    Par ailleurs, elle nous confie s'être sentie sous pression au Brésil :

    - item 8 « Je me sens sous pression » : 4/5.

    Là-dessus, elle donne deux explications. D'abord, il apparait que c'était son premier séjour hors de l'Europe :

    « c'était mon premier voyage hors de l'Europe donc c'était quand même un gros pas » ;

    « les premiers jours [...] c'était un peu intense [...] j'avais jamais été là-bas et d'y être c'est une autre chose tu vois ».

    Ensuite, en dépit de la courte durée de son séjour, elle dit ne pas s'être départie d'une vision à plus long terme de la vie au Brésil, ce qui l'a stressée semble-t-il :

    « j'avais la pression de me dire, c'est moi-même qui me la suis mise mais de me dire « ok, est-ce que je me vois habiter là-bas? » » ;

    « sur une perspective à long terme je me suis posée la question honnêtement « est-ce que je me vois vraiment vivre là toute ma vie quoi? » » ;

    « donc c'est toute la question aussi de bin voilà, si tu vas là-bas et que tu te marries avec quelqu'un là-bas et que tu fais ta vie là-bas, est-ce que tu peux revenir en France tu vois? Donc [...] c'est un questionnement aussi, un cheminement de bon qu'est-ce que tu veux pour ta vie plus tard, et ça ça a beaucoup influencé sur mon adaptation là-bas en fait [...] c'était toujours dans le fond quoi, en arrière plan et je pense que du coup bin ça a peut-être mis un peu de pression tu vois, une certaine pression ».

    En définitive, cette confrontation à l'image qu'elle véhiculait et cette pression sur ses épaules ont conduit P à ressentir un certain déséquilibre émotionnel. Ainsi, elle déclare, avoir préféré sa vie à Lyon (Questionnaire général, item 16 « Globalement, en terme de qualité de vie, de bien-être et satisfaction, que placeriez-vous en tête? » : Lyon). À ce propos, elle précise ne pas s'être sentie appartenir sa société d'accueil :

    « Je pensais que ça serait plus facile d'y vivre tu vois peut-être et en fait en y allant je me suis rendue compte quand même que bon bin bien sûr tu peux y vivre c'est pas infaisable mais c'est quand même un gros choix tu vois c'est un choix qu'y faut pas prendre à la légère parce que bin c'est loin déjà géographiquement, ça coûte cher pour y aller, et aussi bin tu te déracines quand même tu vois parce que tu vois comme je t'ai dit j'étais là-bas je m'y suis sentie bien mais en même temps - bon en même temps je suis restée deux mois, mais j'ai pas sentie appartenir en fait » ;

    « ma vie ici comme je t'ai dit elle est plus facile quoi clairement tu vois je sais qu'ici les choses sont plus faciles donc d'un côté je préfère ma vie ici pour ça bin aussi parce que j'ai ma famille et mes amis en France ».

    Elle insiste d'ailleurs sur la notion du déracinement :

    « moi enfin comme t'as pu voir dans mon parcours identitaire dans le fond moi je me sens quand même bien française tu vois, parce qu'il faut te sentir appartenir quelque part, t'as besoin de sentir que t'appartiens quelque part, même si tu veux habiter n'importe où, même si t'aimes pas où t'habites, tu n'aimes pas d'où tu es, j'en sais rien, enfin t'as besoin de savoir d'où tu viens quoi et pour moi je peux dire tout ce que je veux sur la France mais n'empêche que j'ai vécu là, toute ma vie quasiment, et c'est vrai que mes origines ne sont pas là, enfin bref, tout n'est pas là, mais en même temps c'est un peu ma base quoi » ;

    « je me suis rendue compte aussi en allant là-bas que quoi qu'il arrive je voudrais pouvoir revenir en France ».

    In fine, elle confie être attirée par le Brésil mais rebutée par la part d'isolement inhérente aux séjours prolongés :

    « j'ai un attrait pour là-bas mais [...] c'est une chose d'aller y vivre quelques années en électron libre et d'y aller et t'insérer dans la société quoi vraiment genre en intégrant une famille là-bas en fait concrètement donc je pense c'est ça quelque part bin ça fait peur quoi concrètement de se dire voilà [...] « tu vas te couper quoi » [...] c'est un pays que j'ai beaucoup apprécié, en même temps [...] tu te déracines encore plus tu vois, déjà moi je me sens un peu déracinée à la base enfin j'ai du trouver mes racines moi-même tu vois, maintenant que je les ai tu vois j'ai pas envie de me dire « ok je lâche tout » tu vois c'est ouais c'est un saut dans le vide quoi c'est un saut dans le vide et c'est faisable [...] après voilà est-ce que émotionnelement, affectivement, justement tu auras assez de soutien enfin tu vois c'est toutes ces questions là aussi de penser un peu à ta sauvegarde à toi je pense c'est des pensées de préservation en fait » ;

    « c'est ce qui m'a fait ressentir ça quand j'étais dans le sud je me suis rendue compte à quel point, quoi que tu puisses dire, au bout d'un moment t'as besoin de t'identifier à quelque chose du passé quoi, à quelque chose qui fait que t'es toi en fait et pour moi ça a été hyper important ».

    Qui plus est, il apparait que le dénuement global de la population brésilienne, y compris la pauvreté

    de la classe moyenne, ait contribué à accentuer cet état de déséquilibre émotionnel :

    « y a tellement de disparité là-bas, y a tellement d'extrêmes, que pour être je sais pas moi classe moyenne en France y faut vraiment être riche quoi, faut être aisé tu vois pour avoir accès à une bonne éducation y faut avoir de l'argent aussi » ;

    « c'est vrai que tu peux avoir accès aux choses [...] surtout si t'as les moyens, c'est surtout
    une question d'argent, et tu comprends aussi notamment la mentalité des gens, tu vois les

    gens parlent beaucoup d'argent, de s'enrichir, cette notion un peu américaine, de l'ascension sociale, de se créer soi-même nanana [...] en France [...] on a accès à tout tu sais [...] et eux la plupart des gens ont, là les gens dont je te parle ce sont des gens de classe émergente surtout, classe moyenne émergente, donc c'est pas des gens hyper riches mais c'est pas des gens pauvres non plus, pas des milieux populaires ou des favelas non plus, donc c'est quand même des gens qui vivent bien mais qui luttent quoi enfin tu sens qu'y a quand même que c'est pas aussi facile tu vois, je me suis sentie très privilégiée en fait. En France, et dans plein de pays d'Europe, tu as accès à tout facilement tu vois, on peut se plaindre de tout ce qu'on veut [...] n'empêche que la vie elle est quand même facile quoi » ;

    « en même temps le fait est que j'ai passé que deux mois là-bas tu vois et tout ce truc là de ce que les gens te renvoient tout ce que je te disais avant je pense qu'y y aurait un certain temps d'adaptation et que en plus je pense que tu dois faire le sacrifice de plein de choses en plus. Comment dire, c'est dur à expliquer en fait chais pas j'ai ressenti en fait par exemple je me suis dit « si je vais vivre là-bas à long terme » genre imagine tu as des enfants là-bas tu vois, je me suis posée cette question je me suis dit « est-ce que t'accepterais que tes enfants vivent comme des Brésiliens en fait? » tu vois concrètement et en fait moi c'est encore aujourd'hui une question qui est difficile parce que je me dis quelque part que j'aurais envie que mes enfants y aient ce que moi j'ai eu et là-bas dans certains endroits - pas partout, mais pour pouvoir avoir une ascension sociale, pour avoir une très bonne condition de vie y faut être aisé comme je t'ai dit donc c'est pas la majorité des gens. Y a quand même beaucoup de gens puis y a beaucoup de gens qui s'enrichissent aussi donc y a quand même une classe émergente donc tu peux quand même bien vivre là-bas mais voilà je sais pas comment dire mais je pense qu'il y a quand même, c'est peut-être un héritage de la colonisation hein c'est peut-être un truc de groupe de se dire « on est supérieur » quelque part tu sais, y a peut-être de ça hein, mais j'avais le sentiment par exemple de enfin comme une sorte de peur ouais j'ai pas envie que mes enfants y grandissent là-bas tu vois j'ai pas envie que si j'ai des enfants un jour qu'y aillent dans une école brésilienne tu vois enfin, c'est peut-être parce que je connais pas assez bien aussi j'y ai pas vécu assez longtemps mais [...] j'ai pas du tout cette peur dans un autre pays européen, si je vais dans un autre pays d'Europe tu vois c'est pas loin et voilà je connais assez bien les cultures, j'ai quand même bien voyagé en Europe, voilà je sais que y a quand même un niveau de vie et un niveau d'éducation qui se vaut dans la plupart des pays en tout cas. Tu vas là-bas y faut se battre en fait tu vois, pour avoir le meilleur y faut que tu te battes si t'es classe émergente si t'es classe moyenne et j'ai pas eu cette habitude de me battre [...] tu vois c'est pas pareil si

    t'y vas en tant qu'expat deux-trois ans, [...] t'as un cadre de vie assez protégé. Tu vas vivre là-bas en tant que personne qui s'intègre là-bas c'est différent déjà, et comme moi j'avais déjà cette perspective là, j'avais déjà cette idée là dans ma tête, j'y suis pas juste allée en disant « voilà chouette un petit voyage allons au Brésil » en fait tu vois [...] ça m'a quand même fait voir que c'est un choix énorme quoi, c'est pas un choix que tu fais juste voilà parce que t'es amoureux de quelqu'un et que tu vas le suivre tu vois, pour moi enfin tu peux le faire ça à la limite mais pour moi c'est inconscient ».

    Pareillement pour l'insécurité, dans une moindre mesure :

    « j'ai eu tout de suite conscience de ce fait voilà je peux pas sortir la nuit quand je sors la nuit je fais attention de toujours prendre des rues éclairées voilà je sors jamais dans des rues un peu obscures même si c'est plus rapide mais en même temps t'as toujours cette pensée quand c'est la nuit « ok tu rentres le plus vite possible chez toi » quand t'es tout seul t'as pas de voiture tu rentres chez toi sinon tu prends un taxi » ;

    « Donc si tu veux c'est pas des choses à quoi je pense ici, tu vois je me promène dans la rue à trois heures du mat c'est pas un soucis - bon je le fais pas souvent mais ça m'arrive, et làbas, même, dès que la nuit est tombée en fait, tu vas penser tout de suite différemment » ;

    « Et ouais, ça déjà c'est un truc y faut s'y habituer quoi parce que pff ici j'appelle jamais de taxi quoi, ça me viendrait jamais à l'idée d'appeler un taxi tu vois, je sais même pas comment on fait même ».

    Pour finir, remarquons que l'approche de la spiritualité dans la société brésilienne a elle aussi participé au déséquilibre émotionnel de P :

    « Euh ouais alors les églises, parlons-en (rire). C'était assez surprenant ça aussi parce que j'ai jamais vu ça » ;

    « y te vendent des miracles quoi tu vois t'as tout une doctrine de la guérison, une doctrine de la prospérité qui est très présente » ;

    « Concrètement y vont leur promettre des trucs genre donne tout ton argent, Dieu te le rendra, enfin ces théories là quoi et des personnes du coup qui sont très sincères on leur parle de Jésus et on leur vend un Jésus un peu refaçonné » ;

    « j'ai été choquée, j'ai été choquée ouais, j'ai été choquée parce que comment dire bin c'est d'autant plus dur d'être authentique je pense parce que du coup t'es assimilé à quelque chose que t'es pas forcément tu vois et je pense que ça doit être très compliqué en fait d'être chrétien là-bas » ;

    « en temps que chrétien, que protestant évangélique, c'est choquant parce tu te dis toi- même comment t'es crédible après tu vois » ;

    « je comprends la mauvaise réputation des églises évangéliques là-bas » ;

    « ça m'a un peu rendu triste parce que je me suis dit « c'est très dommage en fait » que ce soit utilisé comme ça ».

    Toutefois, elle en tempère le rôle :

    « après moi j'ai cette conception que Dieu gère les choses tu vois Dieu est au-dessus de tout donc y voit même dans ces endroits là » ;

    « c'est pas quelque chose qui me soucie moi personnellement parce que c'est pas dans mon contrôle ».

    En somme, tout ceci a concouru au fait que P reconnaisse avoir subi un choc culturel au Brésil (Questionnaire général, item 17 « Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc culturel pendant votre séjour au Brésil? » : oui), bien qu'elle s'estime globalement satisfaite de son séjour (Questionnaire général, item 15 b) « Globalement, combien êtes-vous satisfait de votre séjour au Brésil? » : 5/5).

    Deuxièmement, P obtient le score de 70/100 à l'Échelle de bien-être. Par exemple, elle semble se satisfaire de la façon dont s'est déroulé son séjour :

    - item 7 « Êtes-vous content de la tournure qu'a pris votre vie ici? » : 4/5 ;

    - item 19 « Avez-vous déjà souhaité être de retour chez vous en France? » 2/5 ; - item 10 « Êtes-vous plus souvent déprimé que joyeux? » : 1/5.

    Il apparait également qu'elle se soit sentie à l'aise dans son environnement :

    - item 2 « Vous sentez-vous exclu socialement? » : 1/5 ;

    - item 3 « Vous sentez-vous seul et faiblement entouré? » : 2/5 ;

    - item 9 « Vous entez-vous à l'aise dans votre environnement? » : 4/5.

    De plus, elle semble ne pas avoir connu de difficultés d'ordre relationnel :

    - item 8 « Les gens vous ennuient-ils ou vous irritent-ils? » : 2/5 ;

    - item 13 « Participez-vous régulièrement à des activités de groupe? : 4/5 ;

    - item 16 « Préférez-vous rester seul? » : 1/5.

    Par ailleurs, elle déclare s'être toujours sentie très bien au Brésil (Questionnaire général, item 1 « Durant votre séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous? » : 5/5). À ce propos, il semble que certains éléments l'aient aidée à faire de ce séjour une expérience positive et à en diminuer les aspects délétères. Elle mentionne d'abord une discussion avec une enseignante à l'Université Lumière Lyon 2 :

    « Mme X elle nous a préparé quand même pour le voyage, elle nous a un petit peu parlé

    avant, le truc c'est que moi elle m'avait dit « ah toi où tu vas ça craint pas du tout c'est une région riche blablabla » enfin elle connait plutôt le nord et elle a bien briefé les filles et moi j'étais là donc j'ai écouté ce qu'elle a dit. Tout ce qu'elle a dit pour les filles qui en plus allaient dans la favela bin écoute moi ça m'a servi pour là où j'étais quoi [...] c'est une chose d'y être tu vois. C'est une chose qu'on te raconte quelque chose mais c'est une chose de le vivre et d'être toute seule ».

    Puis, elle nous fait part des conseils qu'elle a pu recevoir sur place :

    « je pense qu'y faut se comporter en sachant écouter les conseils des personnes sur place tu vois et moi heureusement j'ai la personne avec qui je vivais qui m'a donné beaucoup de conseils au début je t'ai dit j'étais pas mal protégée parce que je vivais avec la famille, quand je me suis retrouvée toute seule elle m'a quand même briefée tu vois, elle m'a donné certains conseils, parfois quand je faisais des trucs elle me disait « ah mais là j'étais inquiète et tout tu devrais pas faire ça » enfin tu vois donc j'ai quand même suivi ses conseils parce que voilà c'est une jeune, elle vit là depuis toujours, c'est quelqu'un qui a

    voyagé donc elle connait le monde aussi tu vois donc elle sait de quoi elle parle je pense donc j'ai écouté ce qu'elle m'a dit tu vois mais non ça va, y a peut-être des moments où je me sentais un peu seule c'est normal t'es loin de chez toi mais après j'ai pas trop eu de moments vraiment ça allait pas du tout je voulais rentrer quoi non ».

    Finalement, elle avance son expérience antérieure du séjour à l'étranger :

    « ça m'a forcément aidée parce que c'était mon premier gros, enfin j'ai vécu un an là-bas [en Italie] c'était mon premier séjour à l'étranger de longue durée quoi en tant qu'étudiante et ouais j'ai vécu là-bas des trucs que j'avais jamais vécu avant tu vois notamment dans la coloc, la coloc avec des personnes de différentes cultures enfin ouais j'ai vécu des choses là-bas que j'avais pas connu ici donc déjà là-bas ça m'a augmenté ma flexibilité (rire) et je pense que ouais c'était nécessaire d'avoir ça même avant d'y aller quoi je pense que d'aller d'office au Brésil ça aurait peut-être été intense ouais parce que comme je t'ai dit maintenant je fais vraiment une séparation entre l'Europe et le reste enfin avant je voyais pas vraiment l'Europe comme un tout tu vois j'avais du mal à voir ça comme une entité et maintenant en fait je le vois vraiment comme ça parce que je pense que y a quand même quoi qu'on dise - ça dépend de quel pays peut-être mais, y a quand même une certaine similarité tu vois une certaine bon en plus on est proche géographiquement avec ces pays là et je pense que quand tu quittes cette zone, c'est un peu ta zone du monde tu vois, quand tu quittes cette zone t'es dans un autre schéma, dans un autre ouais t'es dans totalement autre chose tu vois ta zone de référence elle est plus là donc y faut le prendre en considération et

    je pense que souvent les personnes voyagent un peu trop à la légère en fait tu vois genre recherche d'exotisme en fait tu vois ».

    Dernièrement, P obtient le score de 71,6/100 au Brief COPE. Ses réponses laissent transparaître qu'elle réagit aux situations stressantes, délicates ou imprévues avec flegme...

    - item 1 « Faire quelque chose pour moins y penser » : 4/5 ;

    - item 8 « Rechercher les aspects positifs dans ce qu'il m'arrive, voir le bon côté des choses » : 4/5 ;

    - item 10 « Prendre les choses avec humour » : 5/5 ;

    - item 11 « Prier, méditer, faire de la relaxation » : 4/5

    ...et qu'elle n'hésite pas à chercher aide et conseil auprès de son entourage le cas échéant : - item 3 « Recevoir l'aide et le conseil d'autres personnes » : 4/5 ;

    - item 7 « Rechercher le soutien et la compréhension de quelqu'un » : 4/5.

    1.3. Compétence interculturelle

    À l'aide des données dont nous disposons, nous allons tenter de présenter des éléments qui seraient susceptibles de nous renseigner sur le degré de compétence interculturelle de P.

    1.3.1. Sens du séjour à l'étranger

    Pour P, il semble que le mot le plus caractéristique pour qualifier son séjour soit « suite » (Questionnaire général, item 10 « Choisissez un mot qui serait le plus caractéristique pour situer votre séjour au Brésil au regard de votre vie en général » : suite). Lors de notre entretien, elle déclare :

    « ouais c'était vraiment une super expérience, pour moi c'était genre dans la continuité tu vois enfin genre t'as ta vie comme ça, t'as des projets qui viennent, des opportunités et tout et pour moi c'était là quoi » ;

    « pour moi les choses ça vient les unes après les autres en fait (rire), super la phrase, ouais je sais pas quand je regarde ma vie je vois une progression tu vois je vois comment j'ai évolué sur certaines choses je vois le sens enfin tu vois les choses comment elles font sens aussi et là en fait voilà ça faisait sens quoi, notamment par rapport à ma relation et par rapport à ma formation aussi, par rapport à mon rapport au monde tu vois aussi je pense parce que j'avais jamais quitté l'Europe en fait avant donc c'était mon premier voyage hors de l'Europe donc c'était quand même un gros pas ».

    1.3.2. Ressenti sur le séjour

    P se dit frustrée par sa durée de séjour :

    « Le truc aussi c'est que c'était tellement court comme temps que j'étais enfin limite c'était le contraire tu vois, j'avais envie que ça dure plus longtemps parce que je voyais que les autres Erasmus allaient rester plus longtemps et c'est limite hyper frustrant de devoir rentrer tu vois parce que enfin après deux mois tu t'intègres tu vois, après deux mois t'as trouvé tes marques t'as ta routine un peu pour autant que t'en ai une et ouais j'ai trouvé ça assez frustrant de devoir rentrer finalement parce que deux mois ça passe mais à une vitesse vraiment ouais c'est court ».

    Toutefois, elle estime avoir bénéficié de cette expérience :

    « deux mois j'ai vraiment, j'ai découvert plein de choses par rapport au Brésil quoi tu vois, de l'intérieur du Brésil quoi, et par rapport à une seule région bien sûr parce que c'est très très divers » ;

    « ça permet de réfléchir, de prendre de la distance déjà, parce que tu vis des trucs de l'intérieur tu vois ».

    En outre, elle estime avoir fait le nécessaire pour rencontrer des gens et s'intégrer :

    « j'ai essayé de m'intégrer là-bas » ;

    « j'ai pas de mal à m'adapter aux endroits où je vais en fait, je pense que c'est un avantage que j'ai, un atout, c'est que je m'y fais tu vois quoi et j'ai pas de mal à me dépouiller de ma culture, mes valeurs c'est peut-être autre chose ouais mes modes de vie tu vois du moins mes coutumes c'est pas quelque chose à quoi je suis vraiment attachée tu vois donc je peux m'y adapter, du moins pour un court terme ».

    Cependant, P admet que :

    « je m'y suis sentie bien mais en même temps - bon en même temps je suis restée deux mois, mais j'ai pas senti appartenir » ;

    « je pensais que ça serait plus facile d'y vivre ».

    1.3.3. Tensions éprouvées

    Rappelons simplement qu'au cours de son séjour Brésil P a éprouvé certaines tensions au contact de son environnement du fait de la conjugaison de plusieurs de facteurs, ainsi que nous l'avons abordé avec le stress d'acculturation.

    1.3.4. Évolution personnelle

    Au cours de son séjour, P estime avoir beaucoup changé (Questionnaire général, item 9 « Avez-vous eu le sentiment d'avoir changé à l'issue de votre séjour au Brésil? » : 4/5). Interrogée là-dessus elle déclare :

    « je sais que j'ai changé, ça au moins c'est sûr, après en quoi pour moi je le lie pas forcément à l'expérience du Brésil en tout, je le délimite pas à mon séjour, je le délimite plus à ma relation en fait avec mon copain, plus à l'expérience de l'interculturel comme ça de mes relations multiculturelles multiples. Mais euh ouais c'est plus ça et puis bon les rencontres en fait ouais si c'est quelque chose qui m'a changé ce serait les rencontres sur place, les personnes que j'ai rencontrées ».

    En outre, elle estime que son degré d'exposition internationale est passé de 3/5 au début de son séjour à 4/5 à l'issue de son séjour, soit d'intermédiaire à élevé (Questionnaire général, item I « Comment évalueriez-vous votre exposition internationale (le degré auquel vous êtes confronté à la vie au sens large au-delà de nos frontières)? ») tandis que son degré de conscience interculturelle s'est, lui, maintenu à 4/5 (Questionnaire général, item II « Comment évalueriez-vous votre conscience interculturelle (le niveau auquel vous êtes préoccupé par, ou impliqué dans, des affaires extraterritoriales)? »).

    1.3.5. Projets d'avenir

    P nous confie que ce séjour aura des répercussions sur son avenir (Questionnaire général, item 11 « Pensez-vous que cette expérience va influencer votre vie future? » : oui) et qu'il lui a donné le goût du Brésil en quelque sorte :

    « c'est vraiment un pays qui m'a énormément plu et je voudrais vraiment y retourner quoi même y habiter voire ».

    2. Le cas de C

    Tout d'abord, nous débuterons par une brève contextualisation du séjour de C au Brésil en remontant jusqu'aux origines de ce projet et en éclairant les motivations qui le sous-tendent. Nous examinerons ensuite les réponses de C liées aux indicateurs des transformations socioculturelles. Enfin, nous étudierons ses réponses relatives aux thèmes associés à la CIC.

    2.1. Contexte

    C est donc étudiante en Master 1 de psychologie. Elle a séjourné pour une durée de moins de deux mois à Recife, au nord du Brésil, dans le cadre d'un stage. Finalement, sur place, ce n'est pas un mais deux stages qu'elle aura effectués : l'un dans une structure s'occupant d'enfants atteints d'autisme, et l'autre dans une association participant au développement personnel et identitaire d'enfants des favelas. Il apparait que le séjour de C au Brésil ait été le fruit d'un concours de circonstances. Avant de s'inscrire à l'université pour l'année scolaire 2011-2012, elle caressait déjà l'idée de partir au Brésil. Cependant, ce projet était en concurrence avec l'ambition de poursuivre un Master en psychologie. Finalement, freinée en partie par la barrière de la langue, C abandonna son projet de voyage au Brésil. Comme elle le dit elle-même, la raison prit le dessus, et elle choisit finalement de s'inscrire en Master de psychologie. Ce n'est qu'ensuite, en début d'année scolaire, qu'elle entendit parler en classe de la possibilité d'effectuer son stage de Master 1 au Brésil. Ce fut donc là l'opportunité de concilier ses deux aspirations.

    À propos de ses motivations, C déclare avoir pour passion tout ce qui est africain, éprouver une attirance très forte pour l'Afrique, continent où elle a d'ailleurs séjourné en 2010 :

    « moi ma passion c'est tout ce qu'est africain, je sais pas pourquoi, depuis vraiment longtemps » ;

    « au Brésil, [...] j'y suis allée toujours dans cette envie de découvrir l'Afrique autre part c'est toujours pareil moi c'est toujours l'Afrique qui me motive ».

    De là découle également son intérêt pour les sociétés métissées, comme la Réunion où elle a vécu plus de deux ans, et comme le Brésil. C'est d'ailleurs pour ces raisons là qu'elle a choisi de partir dans le nord du Brésil, où les influences africaines sont plus prégnantes nous dit-elle :

    « l'africanité donc c'est vrai que dans le nord c'est beaucoup plus présent, beaucoup plus

    affirmé qu'à Rio Grande do Sul où c'est beaucoup plus européen ».

    En outre, elle a réalisé sur place une étude sur les pratiques afro-brésiliennes et leur rôle dans la construction de l'identité des jeunes des favelas. Il s'agissait donc pour elle, d'une certaine manière, de retrouver l'Afrique sous un angle différent :

    « mais en tout cas j'ai une attirance très forte pour l'Afrique et puis toutes ces sociétés

    métissées c'est vraiment ma passion » ;

    « je sais pas, j'avais une attirance très forte pour le Brésil depuis très longtemps » ;

    « quand j'ai fini mon cursus à la Réunion, ça m'a renforcé ce désir d'aller voir cette terre où il y a du métissage aussi où l'Afrique elle est là mais d'une autre manière ».

    2.2. Transformations socioculturelles

    Nous présenterons dans cette partie les résultats de C dans les dimensions culturelle, sociale et psychologique des transformations socioculturelles.

    2.2.1. Dimension culturelle

    Nous nous arrêtons ici sur les informations associées à la composante de la culture. Pour ce faire, nous allons nous appuyer sur les indicateurs suivants : les compétences de communication, la distance culturelle et la sensibilité interculturelle.

    2.2.1.1. Compétences de communication

    C obtient un score de 81/100 à l'Échelle de communication interculturelle. Par exemple, elle s'estime capable de surmonter les difficultés inhérentes aux situations de communication entre individus issus de sociétés aux infléchissements culturels différents :

    - item 7 « Si besoin est j'arrive à prendre en compte la différence culturelle quand je communique » : 5/5 ;

    - item 19 « Je trouve difficile de parvenir à une compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture » : 2/5.

    Pareillement, elle estime ne pas éprouver de difficultés à créer du lien social au Brésil : - item 8 « Je trouve que les gens du coin ne m'intègrent pas assez » : 2/5 ;

    - item 9 « Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;

    - item 10 « Je trouve difficile de me dévoiler à une personne d'une autre culture » : 1/5.

    De plus, elle semble disposer de ressources adéquates afin d'interagir efficacement avec les autres :
    - item 11 « Je me sens découragé quand les gens du coin ne sont pas de mon avis » : 2/5 ;

    - item 12 « Je suis angoissé quand je communique avec une personne d'une autre culture » :

    1/5 ;

    - item 13 « Je me vexe facilement quand je communique avec une personne d'une autre culture » : 1/5.

    Par ailleurs, elle estime qu'entre le début et la fin de son séjour son niveau de portugais a évolué de 1/5 à 4/5, soit d'un niveau débutant à un niveau avancé (Questionnaire général, item 12 « Quel était votre niveau de portugais? »). À ce propos, lors de l'entretien, elle déclare que cette évolution s'est faite naturellement :

    « je sais pas qu'est-ce qui s'est passé dans ma tête mais [...] c'est venu naturellement, je sais pas comment ça se fait, j'avais l'impression que j'avais le portugais en moi, c'est venu tout simplement ».

    2.2.1.2. Distance culturelle

    C obtient un score de 38/100 à l'Échelle de distance culturelle. Néanmoins, ce questionnaire n'est que peu pertinent ici. En effet, C revient d'un séjour de pratiquement trois ans à la Réunion, qu'elle a tendance à décrire comme son cadre de référence :

    « je sais que la Réunion c'est ma terre hein, c'est là ou je veux finir et là où je veux revenir ».

    Or, pour répondre à ce questionnaire, elle s'est placée dans une perspective de comparaison de la société brésilienne avec la France métropolitaine. Oralement, elle nous avait d'ailleurs indiqué qu'elle aurait répondu « pas du tout différent » à l'ensemble des items si elle avait comparé le Brésil et la Réunion. En conséquence, son score aurait considérablement varié.

    Quoiqu'il en soit, en entretien, C déclare bel et bien trouver de très fortes similarités entre les sociétés réunionaise et brésilienne...

    « le Brésil, la Réunion c'est des sociétés un peu, un peu soeurs quoi au niveau du métissage, au niveau de l'histoire aussi » ;

    « c'est des sociétés complètement soeurs »

    ...et dit avoir partiellement retrouvé la Réunion au travers du Brésil :

    « c'est vrai que ma vie à la Réunion a fait que ouais c'est vrai que le Brésil était une sorte de retrouvailles » ;

    « plein de choses qui sont pareilles avec la Réunion, y a la végétation, la nourriture, une certaine manière de vivre, une manière de voir la vie aussi, et c'est vrai que ça m'a, ouais un petit retour chez moi après la nostalgie ça faisait depuis six mois que j'étais partie de la Réunion ça faisait un bien fou ».

    Concernant les représentations du Brésil chez C, elle n'imaginait apparemment pas que sa région d'accueil serait si moderne :

    « je m'attendais pas aussi à voir autant de buildings de truc comme ça je pensais que ça allait être un peu plus, [...] préservé, préservé de tout ça ».

    De plus, si elle nous dit avoir anticipé la pauvreté, le degré d'écarts sociaux parait l'avoir décontenancée :

    « je m'attendais pas par contre à tant de différences sociales alors que je le savais, je savais que économiquement le Brésil s'est développé très vite, qu'il y avait des écarts sociaux énormes mais j'ai été choquée quand même, j'ai été choquée [...] dans le sens où je m'attendais pas à ce que les gens cohabitent comme ça ».

    En écho à cela, il semble pour C que, par nature en quelque sorte, le « vrai » Brésil soit le Brésil des favelas :

    « dans la favela là c'était la rencontre avec la société brésilienne pour moi parce que c'est vrai c'est dans ces sociétés là ou dans ces peuples là qui ont beaucoup soufferts que je pense s'inscrivent plus toutes les racines brésiliennes, tout ce qu'ils ont gardé de l'esclavage aussi je pense c'est clair ».

    Finalement, il semble que sa perception du Brésil se soit modifiée suite à son séjour (Questionnaire général, item 14 « Entre votre arrivée et votre départ, diriez-vous que vos représentations du Brésil ont beaucoup changé? » oui).

    2.2.1.3 Sensibilité interculturelle

    C obtient un score de 70,1/100 à l'Échelle de sensibilité interculturelle. Par exemple, elle estime avoir été capable de faire face aux exigences du quotidien...

    - item 16 « Utiliser les transports publics et vous déplacer » : 2/5 ;

    - item 17 « Faire les course » : 2/5 ;

    - item 18 « Vous repérer » : 2/5 ;

    - item 19 « Participer à des activités de groupe » : 2/5

    ...ainsi qu'avoir su se saisir des éléments constitutifs de la société brésilienne :

    - item 20 « Comprendre la société dans laquelle vous vivez » : 2/5 ;

    - item 22 « Comprendre les différences culturelles observées ou ressenties » : 2/5 ;

    - item 23 « Comprendre les valeurs locales » : 2/5 ; - item 24 « Vous intégrer à la culture locale » : 2/5 ; - item 25 « Comprendre la façon dont les autochtones voient le monde » : 2/5.

    2.2.2. Dimension sociale

    Nous examinons maintenant les données liées au phénomène d'acculturation, plus particulièrement
    par l'intermédiaire du capital social, ainsi que celles relatives à l'orientation d'acculturation de la

    société d'accueil de C.

    2.2.2.1. Capital social

    Il apparait que C se soit bien intégrée à sa société d'accueil :

    « dans cet environnement qui en plus est hyper chaleureux où les gens ouvrent leur porte complètement, ouvrent leurs bras » ;

    « j'ai eu une espèce de fusion avec le peuple brésilien » ;

    Questionnaire général, item 7 « Rétrospectivement, comment vous sentiez-vous inséré dans la vie brésilienne à l'issue de votre séjour? » : 4/5.

    De façon générale, elle nous dit toujours parvenir à s'intégrer à l'étranger :

    « à chaque fois je suis là « qu'est-ce que c'est trop bien ce truc là, qu'est-ce que je suis chez moi » et j'arrive tout de suite à tisser des liens avec les gens ».

    Par ailleurs, elle estime avoir profité au maximum des opportunités de communication qui se sont présentées à elle (Questionnaire général, item 5 « Au quotidien, comment pensez-vous avoir communiqué avec les autres? » : 5/5). À ce propos, elle déclare avoir toujours communiqué sur une base régulière avec plus de dix personnes (Questionnaire général, item 6 « Dans la vie de tous les jours, parmi vos relations, avec combien de personnes dialoguiez-vous? »). Elle nous dit également que la majorité de ses interlocuteurs étaient brésiliens (Questionnaire général, item 8 « De quelle nationalité étaient vos interlocuteurs privilégiés? »).

    De plus, C semble avoir été capable de se créer un réseau social très facilement :

    Questionnaire général, item 2 « Au Brésil, était-il facile de créer du lien avec d'autres personnes? » : 5/5 ;

    « quand on est arrivé on a été super bien accueilli y avait tout qui était prévu, y avait des gens qui venaient nous chercher à l'aéroport et tout donc c'est vrai qu'au niveau des liens on a tout de suite été cocooné » ;

    « ça a été comme ça tout le long, j'ai rencontré que des gens que je devais rencontrer tout le temps et des gens qui m'ont donné tellement d'énergie qui m'ont tellement aidée qui m'ont tellement soutenue ».

    Durant son séjour, C a été hébergée par un couple de Brésiliens. Si elle assure avoir été bien reçue, elle ajoute qu'elle ne s'est pas sentie tout à fait à l'aise chez ses hôtes :

    « c'était mitigé hein. Ma colocation [...] c'était un peu ambivalent » ;

    « ça s'est bien passé mais je peux pas dire que je me sentais chez moi quand je rentrais à l'appart » ;

    « j'ai été très très bien reçue, ça je le retire pas, mais c'est juste que un mois et demi c'est

    long avec des gens qu'on choisit pas » ;

    « je m'entendais pas du tout avec cet homme là, enfin c'est pas que je m'entendais pas du tout parce que je l'aime bien il est sympa mais je me retrouvais pas du tout en lui quoi » ;

    « je me suis pas sentie un rapport très fort avec cet homme là » ;

    « ma relation avec elle était assez ambiguë en fait parce que en même temps on s'entendait

    bien, en même temps on avait l'impression qu'elle elle instaurait un peu de rivalité » ; « j'avais le sentiment qu'elle elle était un peu jalouse de moi ».

    Remarquons aussi que C ne s'est pas rendue à Recife toute seule. En effet, elle était accompagnée d'une camarade de sa classe que nous appellerons ici Véronique, avec qui elle a effectué ses stages. Là-dessus, il semble que les relations entre les deux jeunes femmes étaient tendues :

    « je suis partie avec une fille qui n'avait aucune expérience de voyage » ;

    « ça m'a gêné parce qu'en plus cette fille honnêtement enfin, allez je le dis elle l'écoutera jamais, mais ça s'est vraiment pas bien passé elle avait vraiment un complexe d'identité puis justement c'est ce que je te disais elle avait de grosses choses à régler en voyageant et moi ça m'a bousillé mon énergie » ;

    « elle m'a gaspillé mon énergie puis elle son voyage s'est très mal passé et j'avais tellement peur d'être assimilée à elle parce que elle renvoyait des choses très négatives aux gens et c'est vrai que ça m'a bousillé mon énergie » ;

    « c'est que cette fille elle était complètement dans une dynamique de d'arraché, elle était arrachée à sa terre hein, elle le vivait super mal et elle voulait pas en parler et elle partageait rien » ;

    « je la supportais plus dans les stages » ;

    « Rien de négatif, à part mes relations avec Véronique qui n'étaient vraiment pas positives pour l'une comme pour l'autre ».

    Par rapport à ses lieux de stages, C nous fait part d'un excellent volet relationnel. Concernant la clinique privée, si elle ne s'y est pas inscrite au plan personnel et professionnel, elle assure avoir pu bénéficier de très bons contacts humains :

    « je me suis sentie hyper bien intégrée parce que c'était une équipe très soudée ils étaient dix-huit psys et hyper avenants, c'était des gens avec qui je me suis sentie tout de suite en confiance, avec l'équipe y avait pas de problème [...] mais le problème c'était vraiment personnel c'est que j'accrochais pas avec leur manière de travailler, avec leur manière de voir le patient [...] et je me suis pas inscrite du coup dans le lieu de stage comme j'aurais pu le faire ».

    Toutefois, il apparait que c'est au contact de la favela que C ait pu tisser les toiles les plus

    significatives de son réseau social :

    « l'autre [stage] par contre je me suis complètement retrouvée » ;

    « et puis là c'est pareil on a été accueilli à bras ouverts dans les équipes et je me suis sentie faire partie de cette assoc aussi » ;

    « c'était une révélation hein c'était comme ça que je voulais travailler et ça a fonctionné » ; « j'avais l'impression qu'il y avait des choses très fortes qui se créaient avec les enfants » ; « je me suis vraiment trouvée et autant ce que j'ai fait je pense a servi autant tout ce que les gens m'ont renvoyé m'a énormément servi » ;

    « dans la favela là c'était la rencontre avec la société brésilienne » ;

    « il fallait que je rencontre des gens qui faisaient de la percu, des gens qui faisaient de la capoeira, des gens qui faisaient chefs de culte du Candomblé, des jeunes aussi beaucoup [...] je me suis retrouvée complètement dans ce milieu, complètement, je me suis sentie accueillie et initiée en fait » ;

    « c'était des gens que je côtoyais aussi par les cérémonies, ou pour plein d'autres choses

    donc c'est vrai que ouais, puis on se retrouve, c'est un petit milieu hein donc c'est vrai que

    finalement les contacts se font très vite parce que c'est un petit milieu quoi et parce que

    aussi je restais toujours dans le même favela donc les gens se connaissent quoi ». Généralement parlant, C nous dit ne pas avoir eu beaucoup de temps libre ni de loisir durant son séjour, en raison de la charge de travail que représentaient son double stage et sa recherche. Cela dit, il semble que cela ne l'ait pas affectée outre mesure :

    « j'avais pas de temps libre (rire). C'était vraiment ça, j'avais vraiment pas de temps libre on passait d'une structure de stage à l'autre et et le seul peu de temps pour moi que j'avais [..] c'était pour mon étude » ;

    « j'ai pas eu de, mes potes étaient en lien avec mon sujet d'étude, je me suis pas fait d'amis en dehors, j'avais pas le temps vraiment » ;

    « mais en même temps j'ai pas eu le sentiment d'être privée de vie privée parce que je me suis retrouvée complètement dans ce milieu, complètement, je me suis sentie accueillie et initiée en fait ».

    2.2.2.2. L'orientation d'acculturation de la société d'accueil

    Lorsqu'elle parle de la société qui l'a accueillie, C décrit un environnement propice à l'épanouissement, ouvert sur l'Autre :

    « dans cet environnement qui en plus est hyper chaleureux où les gens ouvrent leur porte complètement, ouvrent leurs bras » ;

    « les gens étaient très prévenants » ;

    « les gens m'ont aidée et m'ont ouvert les portes » ;

    « je me suis sentie intégrée tout de suite ça c'est sûr » ;

    « j'ai l'impression qu'on m'a donné tellement d'énergie » ;

    « des gens qui m'ont donné tellement d'énergie qui m'ont tellement aidée ».

    Elle semble d'ailleurs avoir été bien reçue à plusieurs reprises :

    « je me suis sentie hyper bien intégrée parce que c'était une équipe très soudée ils étaient dix-huit psys et hyper avenants, c'était des gens avec qui je me suis sentie tout de suite en confiance » ;

    « et puis là c'est pareil on a été accueilli à bras ouverts dans les équipes et je me suis sentie faire partie de cette assoc aussi » ;

    « quand on est arrivé on a été super bien accueilli y avait tout qui était prévu, y avait des gens qui venaient nous chercher à l'aéroport et tout donc c'est vrai qu'au niveau des liens on a tout de suite été cocooné ».

    Elle ajoute même...

    « j'ai été très soutenue et par des gens dont j'avais l'impression que je les connaissais déjà en fait donc c'était hyper impressionnant comme sensation parce que ouais je me suis sentie soutenue par des gens qui profondément me respectaient et me connaissaient [...] vraiment j'ai rencontré que des gens bienveillants »

    ...et déclare que le Brésil lui a renvoyé une impression d'hospitalité sans précédent :

    « au Brésil ça a été, j'avais tout le temps je me sentais super liée avec les gens et les gens me ramenaient dans leur famille et tout enfin j'ai pas le sentiment de retour sur une terre mais de retour avec un peuple en fait et c'était hyper fort enfin [...] c'est la première fois que je ressens ça autant de retrouvailles ».

    2.2.3. Dimension psychologique

    Nous nous intéressons là aux données relatives au choc culturel, que nous allons examiner par l'intermédiaire des quatre indicateurs que sont le soutien social, l'auto-efficacité, la réussite académique et professionnelle et le stress d'acculturation.

    2.2.3.1. Soutien social

    C obtient le score de 78,8/100 à l'Échelle de soutien social. Généralement parlant, elle estime avoir bénéficié d'un excellent soutien au cours de son séjour...

    - item 4 « Je peux parler de mes problèmes à quelqu'un » : 4/5 ;

    - item 5 « Il y a quelqu'un auprès de moi pour me réconforter quand j'en ressens le besoin » : 4/5 ;

    - item 6 « Je reçois tout le soutien moral dont j'ai besoin » : 4/5 ;

    - item 18 « Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes joies et mes peines » : 4/5 ...et ce plus particulièrement du côté brésilien :

    - item 11 « Je peux compter sur mes nouveaux amis au Brésil » : 4/5 ;

    - item 12 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes nouveaux amis au Brésil » : 5/5 ;

    - item 13 « Mes relations avec mes nouveaux amis au Brésil sont importantes pour moi » : 5/5

    « Non je me sentais pas isolée et je me sentais non pas isolée du coup sur mon quotidien là-

    bas parce que les gens étaient très prévenants » ;

    « j'ai rencontré [...] des gens qui m'ont donné tellement d'énergie qui m'ont tellement aidée qui m'ont tellement soutenue dans une période de ma vie où ça allait pas ».

    En revanche, du côté français, il semble qu'elle ait été moins épaulée :

    - item 8 « Je peux compter sur mes amis restés en France » : 3/5 ;

    - item 9 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes amis restés en France » : 2/5 ;

    « après soutenue par mon côté français, c'est-à-dire par Véronique, zéro [...] Mais après par le côté français plus ou moins parce que ici les gens comprennent pas pourquoi je voyage ».

    Par ailleurs, il apparait que l'aspect spirituel ait joué un grand rôle dans le soutien moral reçu par C :
    - item 16 « Au Brésil j'ai des contacts avec des associations et/ou des lieux de culte » : 5/5 ;

    - item 17 « Au Brésil, le contact avec des associations et/ou des lieux de culte est important

    pour moi » : 5/5 ;

    « ouais vraiment parce que parce que j'ai vécu des choses dures et que j'en avais pas parlé, que j'ai commencé à m'ouvrir là-bas, à recevoir des choses que j'ai aussi rencontré quelqu'un qui après on y croit on y croit pas, a consulté les Cauris tu sais, c'est un genre de coquillage, et ça ça fait partie d'une tradition afro-brésilienne qui m'a révélée plein de choses sur ma vie, je sais pas comment c'est possible mais il a connu toute ma vie, il a connu enfin après mon futur on y croit on y croit pas mais y m'a dit beaucoup de choses, on a parlé pendant quatre heures, de ma vie, de ce que je suis, de ce que j'étais, de mes épreuves et de ce que j'ai vécu, et j'ai fait comme une psychothérapie en accélérée quoi vraiment ça m'a ouais, je pense que j'ai traité beaucoup de choses là-bas. Donc ouais j'ai été très soutenue et par des gens dont j'avais l'impression que je les connaissais déjà en fait donc c'était hyper impressionnant comme sensation parce que ouais je me suis sentie

    soutenue par des gens qui profondément me respectaient et me connaissaient en fait ».

    2.2.3.2. Auto-efficacité

    C obtient un score de 88,4/100 à l'Échelle d'efficacité interculturelle. Par exemple, elle indique pouvoir gérer aisément les aléas inhérents à l'expérience du séjour à l'étranger :

    - item 6 « Si je suis dans le pétrin je peux penser à une solution » : 5/5 ;

    - item 17 « En général, je peux faire face à quoi que ce soit » : 4/5 ;

    - item 19 « Face à une situation inattendue j'ai assez de ressources pour m'en sortir » : 5/5.

    En outre, elle semble disposer de suffisamment de ressources afin de naviguer sans encombre dans un nouvel environnement :

    - item 1 « Je me sens à l'aise lors des activités sociales » : 5/5 ;

    - item 2 « C'est difficile pour moi de me faire des amis » : 1/5 ;

    - item 3 « Je trouve difficile de tenir une conversation avec la plupart des gens » : 1/5.

    Qui plus est, il apparait qu'elle soit tout à fait capable de satisfaire aux demandes relationnelles du quotidien :

    - item 14 « J'ai des sujets de conversation en commun avec les gens du coin » : 5/5 ; - item 15 « J'apprécie les mêmes activités que la plupart des gens du coin » : 4/5 ;

    - item 16 « J'essaie de devenir ami avec les gens du coin » : 5/5.

    2.2.3.3. Réussite académique et professionnelle

    P n'a pas rempli le questionnaire intitulé Échelle d'adaptation académique, car elle n'étudiait pas à l'université sur place. En revanche, de ses stages elle dit :

    « Bin y avait deux choses très différentes en fait, on était dans deux structures ». Concernant la perception de son travail sur son premier lieu de stage, elle déclare :

    « donc y en avait une qui était psychanalytique et qui s'occupait des enfants autistes, donc là on était vraiment dans une démarche clinique très psychanalytique et c'est vrai que pour moi c'était un petit peu difficile parce que je suis pas du tout psychanalyste, mais alors vraiment pas et euh ça s'empire au fil des ans et euh je comprenais absolument pas leur démarche [...] mais le problème c'était vraiment personnel c'est que j'accrochais pas avec leur manière de travailler, avec leur manière de voir le patient, et c'est vrai que ça a été un problème parce que euh je comprenais pas leur méthode et je me suis pas inscrite du coup dans le lieu de stage comme j'aurais pu le faire [...] c'est vrai que je me suis pas investie comme j'aurais pu et puis bon c'est vrai que ça m'a encore renvoyé à ma problématique de

    je suis pas psychanalyste en France ou ailleurs c'est vrai que c'est pas évident d'être psychologue et de rejeter la psychanalyse [...] je me sentais pas investie du fait juste du cadre méthodologique [...] j'avais l'impression que je servais à rien ».

    En revanche, de sa seconde structure elle nous dit :

    « et l'autre [stage] par contre je me suis complètement retrouvée heu un centre de psychologie transpersonnelle mais surtout sociale dans les favelas dans une favela de Recife le Coque et puis en fait là c'était une association donc c'était que des bénévoles et puis donc nous on participait à des groupes enfin c'est pas des groupes thérapeutiques du coup c'est des groupes holistiques qui visaient au développement personnel et identitaire des enfants donc par petites tranches d'âge donc là c'est vrai qu'on avait pas trop une place de psy hein moi je dirais plus comme une place d'éducateur puis vraiment une place de bénévole [..] je me suis sentie faire partie de cette assoc aussi [...] complètement, c'était vraiment c'était une révélation hein c'était comme ça que je voulais travailler et ça a fonctionné [...] en tout cas je me suis vraiment trouvée et autant ce que j'ai fait je pense a servi autant tout ce que les gens m'ont renvoyé m'a énormément servi ».

    Confirmant cela, C se déclare globalement satisfaite de sa première structure de stage à un degré de 2/5 et de sa seconde structure de stage à un degré de 4/5 (Questionnaire général, item 15 a) « Globalement, combien êtes-vous satisfait de votre séjour dans votre structure de stage au Brésil? »).

    2.2.3.4. Stress d'acculturation

    Premièrement, C obtient le score de 75,7/100 à l'Échelle de stress d'acculturation. Par exemple, elle apparait ne pas souffrir du mal du pays :

    - item 1 « J'ai le mal du pays : je ne me sens pas chez moi et mes compatriotes me manquent » : 2/5.

    Toutefois, elle confie s'être sentie sous pression sur place en raison d'un rythme de travail soutenu, entre ses stages et sa recherche :

    - item 8 « Je me sens sous pression ici » : 4/5 ;

    « enfin c'était tout une dynamique qui a fait que finalement on a fait deux stages au lieu d'un, et aussi que du coup on avait notre recherche à faire en plus donc le séjour a été complètement surréel, on s'est dépêché » ;

    « j'avais pas de temps libre » ;

    « j'avais pas le temps vraiment ».

    Ensuite, elle dit ne pas se considérer victime de discriminations, de préjugés ou de stéréotypes :

    - item 2 « Je me sens discriminé ou pas sur un pied d'égalité avec les gens du coin » : 2/5 ; - item 3 « Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs » : 2/5 ;

    - item 14 « Je suis victime de préjugés et de stéréotypes » : 1/5.

    En revanche, lors de notre entretien, elle nous a confié avoir été sujette à de nombreuses remarques d'hommes et parle là du stéréotype de la femme blonde, exotique :

    « au Brésil j'ai fini par le ressentir et ça c'est quelque chose que je supporte pas. Tu vois, comment les hommes t'abordent et puis ouais tu représentes quelque chose quand même en temps que la blonde » ;

    « au Brésil je l'ai ressenti aussi [...] et ça ça me fatigue » ;

    « vraiment, j'ai même pensé une fois à me teindre les cheveux mais j'ai pas eu envie d'enlever ma couleur naturelle parce que pour une question de stéréotypes ça m'énerve mais c'est vrai que c'était présent au Brésil ».

    Par ailleurs, C estime ne pas avoir vécu de choc culturel lors de son séjour (Questionnaire général, item 17 « Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc culturel pendant votre séjour au Brésil? » : non), partiellement en raison des similarités entre les sociétés réunionaise et brésilienne, comme nous l'avons déjà indiqué. Malgré ce, son séjour au Brésil semble avoir accentué une certaine perte de repères sur le plan de l'enracinement culturel et identitaire. En effet, C nous dit :

    « je me sens toujours en marge de mon propre pays » ;

    « je me sens pas d'ici [la métropole] et ça a été évident à partir du moment où j'ai voyagé » ;

    « quand je rentre je refais toujours un rejet total de la France » ;

    « quand je suis revenue ici ça a été tout une démarche de me réapproprier la métropole qui pourtant est mon lieu d'origine » ;

    « toute ma vie, quand je reviens, c'est là que j'ai mon choc culturel c'est là que je me dis «

    ma culture elle m'appartient pas » et je me sens mieux chez les autres que chez moi ». Ensuite elle ajoute :

    « je me sens pas inscrite dans ce pays pour son peuple en fait. Et c'est exacerbé surtout depuis que je suis revenue de la Réunion c'est vraiment les gens m'énervent quoi, la mentalité m'énerve et je pense qu'en plus c'est pas du tout objectif hein, c'est vraiment parce que je sais qu'il y a des gens super et que j'en rencontre aussi mais je me sens pas bien ici » ;

    « quand je voyage c'est que je supporte pas d'être assimilée à une Française alors que c'est ce que je renvoie en fait » ;

    « j'assume pas du tout mon côté français j'ai vraiment un rejet de mon identité je sais pas pourquoi, c'est pas que j'ai honte d'être française c'est que je me sens profondément pas française et en fait du coup quand je voyage je suis assimilée à la France et qu'en fait je le porte pas et c'est hyper lourd pour moi » ;

    « c'est pas la culture française parce que j'aime beaucoup mon pays, j'aime beaucoup sa diversité, j'aime beaucoup tout ce qu'il peut offrir de différent que ce soit dans le peuple ou juste les paysages ou la bouffe ou chaque région a une culture énorme mais c'est vrai que je supporte pas le peuple français ça me fatigue son rejet de la différence, ça me fatigue son manque de communication, sa peur de l'Autre » ;

    « pour moi c'est ça, enfin la France c'est une vieille dame qui a peur de l'Autre en fait ». Puis elle précise :

    « je viens d'un milieu très riche et très fermé et que je rejette tout le temps ça et que en voyageant je me rapproche toujours des gens qui ont rien parce que je trouve ça fabuleux d'avoir rien et de donner tout et parce que je ressens ça je sens que et pourtant c'est pas comme si j'avais été élevée sans rien c'est que au contraire je me retrouve dans ce don comme ça et c'est vraiment ce que je suis profondément et c'est vrai que c'est un paradoxe complet dans mon identité quoi » ;

    « un retour à je sais pas quoi, et complètement contradictoire avec mes origines ».

    Ainsi, de cette assise identitaire conflictuelle, des tensions semblent avoir émergé pendant son séjour au Brésil. C explique s'être :

    « je sais pas pourquoi je me suis identifiée plus à ceux qui se contentent du peu et c'est vrai que je me suis un peu détachée de ce côté occidental et ça a joué sur ma deuxième structure de stage qui était privée, qui accueillait les gens et qui se permettait de faire des choses pas de la manière que j'aurais aimé en fait » ;

    « c'était une structure privée très très chère donc donc le public était plus ou moins enfin bien occidental ».

    De même, en faisant référence à ses hôtes, elle affirme :

    « vu qu'ils étaient très riches [...] y connaissaient rien du Candomblé [...] toute les pratiques afros c'est vade retro satanas » ;

    « la personne qui m'a accueillie elle était dans un immeuble avec piscine, salle de sport et tout » ;

    « eux ils sont très très riches quoi donc c'est des bagnoles et enfin c'était pas le Brésil que je côtoyais après » ;

    « je me suis pas retrouvée dans ce groupe quoi, c'était pas le côté du Brésil qui me faisait

    écho ».

    Par ailleurs, elle indique également :

    « je dormais aussi dans la favela et c'est vrai que je me sentais plus à l'aise quand je dormais dans la favela alors que quand j'entrais dans cet immeuble tout aseptisé ».

    En conséquence, elle nous dit :

    « ça a été mon choc quoi du Brésil de voir des gens dans la misère qui cohabitaient [...] y a pas de rapports en fait entre les très riches et les très pauvres et ça c'est un truc qui m'a choquée » ;

    « le retour en métropole [...] j'appréhendais beaucoup ».

    En définitive, ce déséquilibre, cette incertitude, semble l'avoir conduit vers une soupape spirituelle : « le Candomblé [...] c'est une philosophie de la vie qui m'a vraiment touchée et j'ai développé ma spiritualité vraiment à fond là-bas » ;

    « le Brésil arrivait à point nommé dans ma vie parce que j'étais pas bien du tout et [...] je me suis retrouvée aussi spirituellement, ça fait des années que je lâchais cette partie là de ma vie que je savais pas trop où j'en étais » ;

    « c'était aussi la rencontre avec tout ce côté spirituel [...] qui porte vraiment quelque chose de très fort dans la culture brésilienne » ;

    « je me suis inscrite complètement dans le Candomblé » ;

    « c'est la première fois que je rencontre ma spiritualité enfin c'est pas la première fois que je la rencontre mais c'est vrai que ça m'a permis de retrouver une spiritualité que j'avais perdu complètement » ;

    « alors que je m'attendais pas du tout à ça c'est là que je me suis retrouvée en plein dans ma spiritualité dans ce que je croyais j'ai remis en question beaucoup de choses et c'est vrai que ça m'a beaucoup fait avancer et puis je crois que j'ai rencontré aussi les bonnes personnes au bon moment » ;

    « ce voyage là je me suis retrouvée, c'était différent, parce que je pense que je m'étais perdue, je m'étais perdue en rentrant ici [en métropole] [...] et là je me suis retrouvée. Et ça m'a fait du bien [...] je me sens sur la bonne route [...] j'ai l'impression de m'être retrouvée et d'être repartie dans une dynamique que j'avais perdu en fait ».

    Pour finir, d'une manière générale, C se dit satisfaite de son séjour au Brésil (Questionnaire général, item 15 b) « Globalement, combien êtes-vous satisfait de votre séjour au Brésil? » : 4/5) et déclare également avoir préféré sa vie à Recife par rapport à sa vie à Lyon, en métropole (Questionnaire général, item 16 « Globalement, en terme de qualité de vie, de bien-être et satisfaction, que

    placeriez-vous en tête? » : Brésil). Elle affirme même :

    « moi je suis hyper heureuse de ce que j'ai vécu, ça faisait longtemps que j'avais pas eu ce sentiment d'être au bon endroit au bon moment et ouais et puis j'ai eu une espèce de fusion avec le peuple brésilien ».

    Deuxièmement, C obtient le score de 87/100 à l'Échelle de bien-être. Par exemple, elle semble s'être sentie à l'aise dans son environnement :

    - item 2 « Vous sentez-vous exclu, discriminé ou rejeté? » : 1/5 ;

    - item 3 « Vous sentez-vous seul et faiblement entouré? » : 1/5 ;

    - item 9 « Vous sentez-vous à l'aise dans votre environnement » : 4/5 ;

    - item 12 « Vous sentez-vous capable d'aborder les gens / aller vers les autres? » : 4/5 ; - item 13 « Participez-vous régulièrement à des activités de groupe? » : 5/5.

    Pareillement, il apparait qu'elle ait su conserver un bon moral :

    - item 7 « Êtes-vous content de la tournure qu'à pris votre vie ici? » : 5/5 ;

    - item 8 « Êtes-vous plus souvent déprimé que joyeux? » : 1/5.

    D'ailleurs, le premier item du Questionnaire général corrobore ces observations (« Durant votre séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous? » : 5/5).

    Dernièrement, C obtient le score de 73,3/100 au Brief COPE. Ses réponses laissent transparaitre qu'elle n'hésite pas à chercher aide et conseil auprès de son entourage lorsqu'elle est confrontée à des situations délicates, stressantes ou imprévues...

    - item 3 « Recevoir l'aide et le conseil d'autres personnes » : 5/5 ;

    - item 6 « Exprimer mes sentiments négatifs » : 4/5 ;

    - item 7 « Rechercher la compréhension et le soutien de quelqu'un » : 5/5

    ...et qu'elle ne se laisse pas dépasser par les évènements :

    - item 2 « Prendre les choses en main pour essayer de résoudre la situation » : 4/5 ; - item 4 « Renoncer à essayer de résoudre la situation » : 2/5.

    2.3. Compétence interculturelle

    À l'aide des données dont nous disposons, nous allons tenter de présenter des éléments qui seraient susceptibles de nous renseigner sur le degré de compétence interculturelle de C.

    2.3.1. Sens du séjour à l'étranger

    Pour C, il semble que le mot le plus caractéristique pour qualifier son séjour soit « retrouvailles » (Questionnaire général, item 10 « Choisissez un mot qui serait le plus caractéristique pour situer votre séjour au Brésil au regard de votre vie en général » : retrouvailles).

    Interrogée là-dessus en entretien, elle explique avoir retrouvé une terre d'une part...

    « j'ai l'impression que c'était une petite part de chez moi quoi, et aussi justement c'est ce que je te disais plein de choses qui sont pareilles avec la Réunion [...] un petit retour chez moi après la nostalgie ça faisait depuis six mois que j'étais partie de la Réunion ça faisait un bien fou quoi pour plein de trucs quoi » ;

    « c'est des sociétés complètement soeurs quoi et euh c'est vrai que ma vie à la Réunion a fait que ouais c'est vrai que le Brésil était une sorte de retrouvailles » ;

    « je me suis retrouvée complètement dans ce milieu » ;

    « moi j'étais particulièrement attirée par le nord parce que mon étude, d'une part je faisais un stage et d'autre part ma recherche sur place était sur l'africanité donc c'est vrai que dans le nord c'est beaucoup plus présent, [...] donc c'est vrai que moi ça me faisait particulièrement écho »

    ...puis s'être retrouvée elle-même d'autre part :

    « là ce voyage là je me suis retrouvée [...] je me suis perdue en rentrant chez moi, parce que c'est pas chez moi, et là je me suis retrouvée. Et ça m'a fait du bien » ;

    « ça m'a permis de retrouver une spiritualité que j'avais perdu complètement ».

    2.3.2. Ressenti sur le séjour

    Il apparait que ce séjour soit survenu fort opportunément dans la vie de C :

    « je crois que j'ai rencontré aussi les bonnes personnes au bon moment » ;

    « ça faisait longtemps que j'avais pas eu ce sentiment d'être au bon endroit au bon moment » « le Brésil arrivait à point nommé dans ma vie parce que j'étais pas bien du tout et quand je suis revenue je me suis retrouvée quoi, j'ai rencontré les bonnes personnes au bon moment j'avais l'impression d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis toujours je me suis retrouvée aussi spirituellement » ;

    « je me suis retrouvée en plein dans ma spiritualité dans ce que je croyais j'ai remis en question beaucoup de choses et c'est vrai que ça m'a beaucoup fait avancer et puis je crois que j'ai rencontré aussi les bonnes personnes au bon moment ».

    Elle nous dit même avoir eu le sentiment qu'il ne pouvait pas en être autrement...

    « j'avais vraiment le sentiment de me trouver au bon endroit au bon moment parce que

    j'avais l'impression que tout ce qui m'arrivait c'était écrit en fait » ;

    « j'ai eu un sentiment de déjà vu comme si j'avais déjà été là dans ma vie c'était obligé où je devais être là dans ma vie je sais pas et en tout cas je me suis vraiment trouvée »

    ...ainsi qu'un sentiment de déjà vu :

    « j'ai vraiment le sentiment d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis très longtemps et ces personnes là m'ont renvoyée le même retour, de me dire « j'ai l'impression que je te connais depuis très très longtemps » » ;

    « c'est la première fois que je ressens ça autant de retrouvailles quoi comme si je le connaissais depuis des années [...] c'est vrai que cette notion de rencontre au Brésil a été super forte parce que tous les gens que je rencontrais c'était ça une impression de déjà vu quoi ».

    En outre, il semble que les voyages soient un élément clef dans la vie de C...

    « c'est mon truc de toute manière, moi tout mon cursus, toute ma vie c'est ça, voyager c'est ma passion, c'est ce qui me fait vivre aussi parce que quand je voyage je me sens bien » ;

    « Il faut que je voyage toute seule, j'ai besoin de me retrouver toute seule dans un cadre autre que mon cadre de naissance quoi et puis c'est comme ça que je me construis honnêtement hein, moi mon identité elle est construite comme ça » ;

    « quand je voyage c'est une quête identitaire justement parce que comme je m'inscris pas ici je veux savoir où je m'inscris ailleurs et pourquoi en fait » ;

    « enfin de toute manière mon cursus professionnel, universitaire, c'est l'interculturel donc c'est vrai que c'est des choses qui me renvoient à des choses très profondes » ;

    « c'est vraiment ce qui me nourrit en fait de découvrir la culture de l'Autre que ce soit ici où ailleurs c'est mon cursus, c'est mon identité, c'est qui je suis et c'est vrai qu'à chaque fois que j'arrive dans un endroit différent c'est comme si j'absorbais la culture en fait je suis un peu une éponge »

    ...et elle ajoute :

    « dans chaque voyage on change, d'une déjà parce qu'on se comprend, parce que l'appréhension de l'Autre nous permet de relativiser certaines choses aussi, parce que beaucoup aussi quand je voyage je rencontre énormément de gens qui m'apportent énormément de choses donc c'est clair qu'à chaque voyage je reviens changée » ;

    « j'ai encore envie de profiter de cette soif de découvrir, de toutes ces opportunités d'être libre pour voyager ».

    Néanmoins, elle se déclare frustrée de ne pas avoir pu mener à bien sa première année de Master à la suite de son séjour :

    « c'est comme si [...] il fallait que je revienne pour compléter quelque chose vraiment et aussi parce que bin là j'ai abandonné mon Master du coup parce que j'ai pas réussi en rentrant à faire tout ce que je devais faire donc j'ai pas concrétisé mon étude que j'avais fait là-bas et ça me reste en travers de la gorge parce ce que j'ai l'impression qu'on m'a donné tellement d'énergie, j'ai rencontré tellement de choses que ça m'embête, ça m'embête de pas avoir, et du coup là c'est comme s'il fallait que je retourne au Brésil vraiment ».

    2.3.3. Tensions éprouvées

    Rappelons simplement que C parait reposer sur une assise identitaire conflictuelle, de laquelle semblent avoir résulté des tensions avec son environnement au cours du séjour au Brésil, ainsi que nous l'avons déjà dit précédemment en traitant du stress d'acculturation.

    2.3.4. Évolution personnelle

    Tant avant qu'après son séjour, C déclare avoir toujours eu un degré d'exposition internationale maximal et un degré de conscience interculturelle maximal (Questionnaire général, item I « Comment évalueriez-vous votre exposition internationale (le degré auquel vous êtes confronté à la vie au sens large au-delà de nos frontières)? » : 5/5 ; Questionnaire général, item II « Comment évalueriez-vous votre conscience interculturelle (le niveau auquel vous êtes préoccupé par, ou impliqué dans, des affaires extraterritoriales)? » : 5/5).

    Elle lie cela à plusieurs facteurs, à savoir son environnement familial d'une part...

    « mes parents quand même nous ont fait beaucoup voyager quand on était petit » ; « donc cette découverte de l'Ailleurs je l'avais déjà depuis très très petite »

    ...et ses précédents séjours d'étude à l'étranger d'autre part :

    « j'ai de la bouteille » ;

    « c'est à ce voyage là que je dis que je me suis rendue compte que ça y est j'avais de l'expérience » ;

    « ce voyage là où je me suis dit « ouais finalement ça y est, j'ai des bagages quoi, j'ai voyagé » » ;

    « je pense que ouais c'est clair que mes expériences antérieures m'ont beaucoup aidée » ;

    « c'est vrai que ouais concrètement mes expériences d'avant m'ont beaucoup servie ». Cependant, C estime avoir évolué sur un plan personnel grâce à son expérience au Brésil (Questionnaire général, item 9 « Avez-vous eu le sentiment d'avoir changé à l'issue de votre séjour au Brésil? » : 4/5). Interrogée à ce sujet lors de notre entretien, elle dit :

    « Je me sens pas changée, je me sens sur la bonne route, et c'est ça qui est différent en fait,

    c'est que j'ai l'impression de m'être retrouvée et d'être repartie dans une dynamique que j'avais perdue en fait. Mais oui dans une certaine mesure c'est un changement aussi je pense ».

    2.3.5. Projets d'avenir

    C déclare que cette expérience aura des répercussions sur son avenir (Questionnaire général, item 11 « Pensez-vous que cette expérience va influencer votre vie future? » : oui). Elle nous dit notamment envisager ses études sous un jour nouveau :

    « j'ai une proposition de doctorat là-bas, et j'y pense vraiment » ;

    « j'ai l'impression que c'est comme si le Brésil m'avait mis sur la voie alors que c'était pas du tout mon plan, moi je viens d'une famille qu'est pas très intellectuelle, qui est pas enfin le doctorat c'est plafond de verre pour moi quoi déjà finir le Master c'est magnifique je me suis jamais projetée dans une thèse, je me suis toujours dit « c'est trop loin, être prof c'est pas possible » » ;

    « en fait pour tout te dire c'était ma quatrième proposition de doctorat dans toute ma vie y a quatre profs qui m'ont proposé de me prendre en thèse et je sais que c'est faire la fine bouche mais déjà une proposition de doctorat c'est énorme, quelqu'un qui te propose de te prendre en thèse je suis consciente mais c'est tellement mon plafond de verre, c'est tellement ce qui m'angoisse que j'ai toujours refusé mais après le Brésil je me suis dit « faut peut-être arrêter de faire la fine bouche quoi, faut peut-être y aller » ».

    En outre, elle affirme son désir de se rendre à nouveau au Brésil :

    « Au départ je m'étais dit « le Brésil ça va être une partie de ma vie » mais en partant vraiment j'avais le sentiment que j'avais pas achevé quelque chose et qu'y faut que je reparte là-bas [...] j'ai senti que c'était une évidence de toute manière que j'allais revenir au Brésil » ;

    « c'est comme si là ce que j'avais vécu c'était qu'une mise en bouche et qu'il fallait que je revienne [...] professionnellement et spirituellement ».

    3. Le cas de M

    Pour commencer, nous allons situer le séjour de M et tenter d'en déceler les origines ainsi que les motivations sous-jacentes. Par la suite nous examinerons celles de ses réponses qui se rapportent aux indicateurs des transformations socioculturelles. Finalement, nous passerons en revue les réponses de M associées aux cinq thèmes en relation avec la CIC.

    3.1. Contexte

    M est une étudiante en troisième année de Licence en sciences de l'éducation Elle a passé six mois à Caxias do Sul dans le cadre de ses études, au cours du cinquième semestre de la Licence. Sur place, elle suivait donc des cours et s'est également vue offerte l'opportunité, via la direction des ressources internationales locale, de donner des cours de français à un public adulte dans une école de langue. Il ressort que son séjour au Brésil était assez inattendu. M nous explique que l'Amérique Latine, et plus particulièrement l'Argentine où elle rêvait de se rendre, exercent sur elle un fort attrait depuis longtemps :

    « l'Amérique Latine m'a toujours toujours inspirée j'avais vraiment envie d'y aller et de, mais plus l'Argentine » ;

    « depuis euh peut-être que j'ai dix ans, j'ai le rêve d'aller en Argentine ».

    Or, si étudier à l'étranger l'intéressait, les partenariats internationaux de l'Université Lumière Lyon 2 concernant les sciences de l'éducation ne lui permettaient pas de se rendre en Argentine. Elle avait donc renoncé à tout projet d'études intégrées à l'étranger :

    « voilà j'avais ce rêve là et avec ma Licence c'était pas possible, y avait pas de partenariat

    en Argentine donc j'avais même pas rendu le dossier donc j'étais un peu déçue ».

    Cependant, à la suite d'une intervention lors d'un cours début 2011, M apprit qu'il lui était possible de se rendre au Brésil afin de poursuivre une partie de ses études. Bien qu'elle n'avait jamais envisagé de se rendre au Brésil jusqu'à lors, cette opportunité fut l'élément déclencheur de son séjour, par le biais duquel elle conservait toujours en ligne de mire ses rêves d'Argentine :

    « c'est vrai que j'avais même pas pensé à aller au Brésil » ;

    « alors je me suis dit « bin vas-y fonce » en plus comme ça si je suis à côté de l'Argentine comme ça je pourrais aussi y aller, en Argentine. Et voilà, c'est pour ça que je suis allée au Brésil » ;

    « du coup comme mon rêve c'était d'aller en Argentine j'ai été faire vingt jours en Argentine ».

    3.2. Transformations socioculturelles

    Nous allons présenter ici les résultats de M dans les dimensions culturelle, sociale et psychologique des transformations socioculturelles.

    3.2.1 Dimension culturelle

    Nous nous intéressons ici aux données relatives aux trois indicateurs de la composante culturelle telle que nous l'avons définie dans notre étude, à savoir les compétences de communication, la distance culturelle et la sensibilité interculturelle.

    3.2.1.1. Compétences de communication

    M obtient un score de 88/100 à l'Échelle de communication interculturelle. Par exemple, elle trouve très simple de nouer des liens avec les autochtones :

    - item 8 « Je trouve que les gens du coin ne m'intègrent pas assez » : 1/5 ;

    - item 9 « Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami avec une personne d'une autre culture » : 1/5.

    De même, il semble aisé pour elle d'établir des situations de communication avec des gens issus de sociétés aux inflexions culturelles différentes :

    - items 12 « Je suis angoissé quand je communique avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;

    - item 13 « Je me vexe facilement quand je communique avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;

    - item 14 « Je me décourage si les gens avec qui je parle ne me comprennent pas » : 2/5 ;

    - item 20 « Quand les gens du coin parlent, j'ai du mal à me joindre à la conversation » : 1/5. Par ailleurs, elle trouve facile de parvenir à une compréhension mutuelle avec les personnes issues de sociétés aux infléchissements culturels différents :

    - item 19 « Je trouve difficile de parvenir à une compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture » : 2/5.

    De plus, au début de son séjour, M estimait avoir un niveau en portugais de 1/5, soit un niveau débutant. À l'issue de son séjour, elle estimait cette fois son niveau entre 4/5 et 5/5, soit un niveau avancé ou expert (Questionnaire général, item 12 « Quel était votre niveau de portugais? »). À ce propos, au cours de notre entretien, elle affirme avoir acquis un bon niveau de portugais à l'issue de son séjour :

    « quand je suis partie du Brésil, j'ai mon meilleur copain de là-bas qui m'a dit qu'y

    comprenait quatre-vingt-dix-huit-pour-cent de tout ce que je disais ».

    3.2.1.2. Distance culturelle

    M obtient un score de 45,2/100 à l' Échelle de distance culturelle. Par exemple, certains aspects de la réalité locale au Brésil lui paraissent aux antipodes de sa vie en France...

    - item 1 « Le climat, la météo » : 4/5 ;

    - item 4 « L'enseignement supérieur, la vie à l'université » : 5/5 ;

    - item 9 « La mentalité, la façon de voir les choses » : 4/5 ;

    - item 17 « L'environnement, la faune, la flore, les paysages » : 4/5

    ...tandis que d'autres facettes de la vie brésilienne lui apparaissent beaucoup plus familières : - item 19 « Les habitudes, la routine, la vie quotidienne » : 2/5 ;

    - item 8 « Les loisirs, les distractions » : 3/5.

    Concernant les représentations du Brésil chez M, elle nous confie :

    « déjà, si tu penses au Brésil, c'est sûr tu veux du soleil » ;

    « j'imaginais les plages ».

    Elle imaginait aussi un rythme de vie différent...

    « je pensais aussi à des trucs cons mais euh différentes heures de repas, des trucs comme ça qui en fait non pas du tout » ;

    « j'aurais aimé manger à quatorze heures, même comme en Espagne tu vois et puis avoir un autre rythme de vie » ;

    « j'espérais ça aussi tu vois et non ils mangent à midi, vingt heures, c'est un peu le même rythme que nous finalement et c'est vrai que j'avais une espérance là-dessus »

    ...ainsi qu'une population plus métissée, avec moins d'influences européennes...

    « d'un autre côté c'est vachement européen, enfin je veux dire, physiquement, les personnes ressemblent vachement à des personnes européennes, euh vu que y a beaucoup de descendants italiens et allemands on entendait quand même des gens parler italien ou allemand tu vois, alors que bin tu t'y attends pas au Brésil » ;

    « c'était une ville qui qui, qui faisait Brésil mais qui aussi qui, où y avait aussi quand même quelque chose d'européen » ;

    « à Rio j'ai eu plus un choc visuel déjà de la ville, et culturel aussi, enfin en voyant les gens, en parlant aux gens, c'était quand même complètement différent de Caxias do Sul, et Salvador encore plus [...] ces villes là qui me semblaient, moi, différentes, parce que Caxias c'est quand même vachement européen »

    ...et davantage de pauvreté :

    « je pensais peut-être voir plus de pauvreté surtout à Caxias en fait, après quand je suis allée dans les autres villes c'est vrai que là j'ai eu ma dose mais euh ouais je pensais peutêtre voir plus de pauvreté ».

    Généralement parlant, elle estime que ses représentations du Brésil n'ont pas beaucoup changé (Questionnaire général, item 14 « Entre votre arrivée et votre départ, diriez-vous que vos représentations du Brésil ont beaucoup changé? » : non).

    3.2.1.3. Sensibilité interculturelle

    M obtient un score de 86,9/100 à l'Échelle de sensibilité interculturelle. Par exemple, elle estime n'avoir aucune difficulté à se faire comprendre...

    - item 1 « Vous faire comprendre » : 2/5

    ...ou à comprendre les autres :

    - item 2 « Comprendre le portugais, l'accent local » : 1/5.

    De même elle se dit capable de gérer les activités quotidiennes sur place :

    - item 17 « Faire les courses » : 1/5 ;

    - item 18 « Vous repérer, demander votre chemin » : 1/5 ;

    - item 19 « Participer à des activités de groupe » : 1/5.

    En outre, elle estime avoir une bonne appréhension de la réalité locale en terme de mentalités et d'usages :

    - item 21 « S'adapter aux règles de bienséance locales » 2/5 ;

    - item 22 « Comprendre les différences culturelles observées ou ressenties » : 2/5 ; - item 23 « Comprendre les valeurs locales » : 2/5 ;

    - item 24 « Vous intégrer à la culture locale » : 2/5 ;

    - item 25 « Comprendre la façon dont les autochtones voient le monde » : 2/5.

    3.2.2. Dimension sociale

    Nous allons aborder ici les informations concernant le phénomène d'acculturation, notamment par le biais du capital social de M, ainsi que les données relatives à l'orientation d'acculturation de sa société d'accueil.

    3.2.2.1. Capital social

    M nous dit qu'il lui a été facile de créer du lien social au Brésil (Questionnaire général, item 2 « Au Brésil, était-il facile de créer du lien avec d'autres personnes? » : 5/5) ainsi que s'être sentie bien insérée socialement sur place (Questionnaire général, item 7 « Rétrospectivement, comment vous sentiez-vous inséré dans la vie brésilienne à l'issue de votre séjour? » : 4/5). En outre, elle pense avoir beaucoup communiqué avec les autres pendant son séjour (Questionnaire général, item 5 « Au quotidien, comment pensez-vous avoir communiqué avec les autres? » : 4/5). Par ailleurs, elle estime avoir communiqué sur une base régulière avec plus ou moins cinq personnes au début de son séjour, puis avec plus de dix personnes à la fin de son séjour (Questionnaire général, item 6 « Dans la vie de tous les jours, parmi vos relations, avec combien de personnes dialoguiez-vous? »).

    À ce sujet, elle nous dit que ses interlocuteurs privilégiés étaient majoritairement des Brésiliens et des étudiants internationaux (Questionnaire général, item 8 « De quelle nationalité étaient vos interlocuteurs privilégiés? »).

    Durant son séjour au Brésil, M a d'abord été accueillie au sein d'une famille brésilienne pendant les trois premières semaines, puis a ensuite vécu en colocation avec cinq autres étudiants internationaux, dont un Espagnol, une Italienne, deux Mexicains et un Français.

    Au sujet de son séjour chez la famille brésilienne qui l'a hébergée provisoirement, M nous dit qu'elle a été très bien reçue et s'estime heureuse d'avoir pu bénéficier de cette opportunité :

    « j'ai eu la chance d'être dans cette famille brésilienne » ;

    « tout de suite elle m'a vraiment vraiment super bien accueillie » ;

    « ça m'a aidé à me sentir bien parce que je me suis sentie quand même chez moi assez facilement dans cette famille ».

    En revanche, à propos de son expérience de la colocation, M se montre plus réservée :

    « la colocation a commencé on était une grande famille, tous un grand échange, premier et grand échange dans un autre pays tatati tatata on se retrouve tous étudiants on se dit en fait c'est bon on va devenir friends tu sais des meilleurs amis toute la vie mais non (rire). On est différent, on vient de cultures différentes [...] on avait pas les mêmes attentes » ;

    « tu vois que euh, que t'as pas d'intimité, jamais, et euh, et je pense que ça a été du coup le problème de notre coloc parce que on se retrouvait jamais tout seul tu vois » ;

    « y avait des embrouilles entre nous [...] donc c'est vrai qu'y avait des moments où t'en avais marre » ;

    « vivre à six, en coloc à six, franchement c'était vraiment vraiment, y avait des moments c'était dégoutant [...] vraiment c'était chiant quand même ».

    Qui plus est, elle nous dit que si le contexte pluriculturel de la colocation était enrichissant, il avait

    tendance à confiner entre eux des étudiants étrangers, ce qu'elle envisageait comme une barrière à une plus large intégration dans la société brésilienne :

    « c'est vrai que ça a été super enrichissant [...] mais d'un autre côté ça nous enfermait aussi dans cette euh, dans le fait qu'on est étranger qu'on reste entre étrangers [...] et y en a beaucoup qui ont fait ça [...] mais dès qu'on leur proposait de faire quelque chose dans un autre endroit avec d'autres Brésiliens bin c'était carrément plus dur tu vois et c'est vrai que après je l'ai dit à tout le monde, à ceux qui arrivaient tout ça, fais attention quand tu fais un échange de pas rester qu'entre étrangers c'est con quoi ».

    Concernant l'université, M explique que ce lieu n'a pas été un vecteur privilégié de rencontres, notamment en raison du fait qu'elle n'ait pas eu l'opportunité de suivre l'ensemble des cours au sein d'une seule et même promotion :

    « je changeais à chaque heure de cours [de groupe de personnes], donc plus dur aussi pour se créer de vraies relations durables ».

    Néanmoins, M nous dit être parvenue à tisser un solide réseau d'amis sur place, brésiliens notamment, mais pas seulement. Par exemple elle nous dit avoir noué des liens très forts avec son colocataire français :

    « je me suis vraiment rapprochée de mon coloc français » ;

    « dès que j'ai rencontré mon coloc français, que j'ai vraiment appris à découvrir, et bin ça a été mon meilleur ami et on est devenu inséparable ».

    C'est d'ailleurs par ce biais là que M a pu rencontrer des Brésiliens avec lesquels elle s'est par la

    suite sentie de très fortes affinités, et qui ont constitué son principal groupe d'amis :

    « en fait ça a commencé parce que mon coloc a eu des amis de par sa fac [...] donc y s'est fait ces amis là, on a commencé à bien sympathiser avec eux, et euh, et ensuite, [...] j'ai rencontré euh un gars qui avait fait un échange en Europe [...] et ce gars là il était danseur de hip-hop et il avait tout un groupe avec lui donc on s'est rencontré [...] et c'est devenu mes, mes amis, vraiment, super bon feeling, donc du coup après voilà je restais tout le temps avec eux, j'étais plus chez moi j'étais tout le temps dans la rue avec eux et je disais donc à mon coloc de venir, ou d'autres personnes tu vois d'essayer que tout le monde en profite que j'avais cette relation là ».

    Le lieu de travail de M lui a également permis de fréquenter des Brésiliens et de lier connaissance avec eux :

    « ma directrice était génialissime [...] elle nous emmenait des fois elle nous prenait moi et je bossais avec l'Italienne et la Mexicaine et on allait se balader en, on avait fait un circuit de tous les vignobles du coin [...] elle nous emmenait visiter des villes une fois de temps en

    temps » ;

    « c'était génialissime, parce que t'es avec des gens qui ont envie d'apprendre c'est des adultes [...] et les gens y étaient, j'apprenais le portugais aussi, et j'apprenais plein plein de choses car j'essayais de m'intéresser à ce que eux ils faisaient, comme ça ils pouvaient me parler de leur travail, de leur métier, comme ça j'ai appris plein de trucs que je pensais pas que, qu'y y avait des différences ».

    Finalement, M nous dit avoir volontiers entrepris de créer du lien social au Brésil afin de s'insérer avec succès dans son environnement :

    « j'en avais envie je pense. Je pense que si t'as peur tout de suite et que si tu te renfermes dans ta peur tu vas pas aller vers les gens et c'est vrai que tu vas être tout seul et que tu es malheureux du coup. Mais moi j'en avais envie » ;

    « j'ai quand même fait des efforts pour m'intégrer, j'avais des amis brésiliens ».

    3.2.2.2. L'orientation d'acculturation de la société d'accueil

    Pour décrire son environnement, M parle d'une société ouverte sur l'Autre et avide de rencontre :

    « une curiosité, comme moi j'étais curieuse en allant dans ce pays là, eux ils avaient la même curiosité en retour » ;

    « quand tu croisais des gens dans la rue, ça faisait trois semaines que tu les avais pas vus, toi tu te rappelais plus d'eux et eux ils arrivent « ah salut tu vas bien? » c'est vrai que tu te dis qu'en France on est un peu fermé » ;

    « elle est naturelle, c'est vraiment de la curiosité enfin je sais pas, tu sais quand ils te posent une question ils ont envie d'avoir la réponse car ils s'intéressent à la personne qui est en face d'eux, pas parce qu'ils s'intéressent à elle pour qu'ils puissent en obtenir quelque chose tu vois ».

    Il semble également qu'elle ait bénéficié d'une certaine hospitalité :

    « et puis j'ai eu la chance d'être dans cette famille brésilienne pendant deux semaines [...] en fait c'est la fille du secrétariat que je connaissais pas du tout qui m'a dit « viens j'ai une chambre d'amis chez moi et je savais pas du tout mais elle habitait chez ses parents et je suis restée deux semaines et demi, trois semaines. Sa mère [...] me présentait comme sa fille adoptive, après deux semaines tu vois donc ça aussi ça m'a aidé à me sentir bien parce que je me suis sentie quand même chez moi assez facilement dans cette famille, avec cette mère surtout qui, elle me connaissait pas [...] tout de suite elle m'a vraiment super bien accueillie ».

    Cependant, elle ajoute :

    « mais euh, et les gens, ouais bin les gens du nord plus parce que les gens de Caxias ils sont quand même les gens les plus fermés du Brésil donc même s'ils sont plus ouverts que les Français ils restent spéciaux ».

    3.2.3. Dimension psychologique

    Nous allons recueillir ici des données en lien avec le choc culturel. Pour cela nous allons examiner chez M les informations relatives aux indicateurs suivants : le soutien social, l'auto-efficacité, la réussite académique et professionnelle et le stress d'acculturation.

    3.2.3.1. Soutien social

    M obtient un score de 75,5/100 à l'Échelle de soutien social. Il ressort de ce questionnaire qu'elle semble avoir été très soutenue au cours de son séjour au Brésil :

    - item 4 « Je peux parler de mes problèmes à quelqu'un » : 5/5 ;

    - item 5 « Il y a quelqu'un auprès de moi pour me réconforter quand j'en ressens le besoin » : 5/5 ;

    - item 6 « Je reçois tout le soutien moral dont j'ai besoin » : 5/5 ;

    - item 18 « Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes joies et mes peines » : 5/5.

    De plus, elle déclare que l'ensemble de ses relations était important à ses yeux durant son séjour, et se dit pleinement satisfaite de la façon dont elles ont chacune joué leur rôle de soutien moral :

    - items 3 « Mes relations avec ma famille sont importantes pour moi » : 4/5 ;

    - item 1 « Ma famille fait de son mieux pour m 'aider » : 5/5 ;

    - item 2 « Je suis satisfait de mes contacts avec ma famille » : 5/5 ;

    - items 10 « Mes relations avec mes amis restés en France sont importantes pour moi » : 4/5 ; - item 8 « Je peux compter sur mes amis restés en France » : 5/5 ;

    - item 9 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes amis restés en France » : 4/5 ;

    - item 13 « Mes relations avec mes nouveaux amis au Brésil sont importantes pour moi » : 4/5 - item 12 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes nouveaux amis au Brésil » : 5/5.

    Par ailleurs, au cours de l'entretien, elle nous confirme avoir été soutenue plus particulièrement par

    sa mère...

    « j'ai été soutenue par ma mère, bien sûr, bin elle était, on s'envoyait des mails, toutes les deux-trois semaines on se parlait sur Skype »

    ...par l'une de ses relations restée en France...

    « il continuait à m'écrire tous les jours [...] le fait qu'on continue à se parler [...] je pense

    que ça m'a pas mal aidée aussi »

    ...ainsi que par son colocataire français au Brésil :

    « ça a été mon meilleur ami et on est devenu inséparable en fait, on s'est toujours soutenu l'un l'autre ».

    3.2.3.2. Auto-efficacité

    M obtient un score de 92,6/100 à l'Échelle d'efficacité interculturelle. Par exemple, elle considère être à même de se sortir sans encombre de situations imprévues, stressantes ou délicates :

    - item 6 « Si je suis dans le pétrin, je peux penser à une solution » : 5/5 ;

    - item 17 « En général, je peux faire face à quoi que ce soit » : 4/5 ;

    - item 19 « Face à une situation inattendue, j'ai assez de ressources pour m'en sortir » : 5/5. Par ailleurs, elle apparait capable d'évoluer aisément dans son environnement :

    - item 1 « Je me sens à l'aise lors des activités sociales » : 4/5 ;

    - item 4 « Je suis généralement discret et effacé en société » : 2/5 ;

    - item 13 « Je me sens à l'aise quand je parle avec les gens du coin » : 5/5 ;

    - item 14 « J'ai des sujets de conversation en commun avec les gens du coin » : 5/5 ; - item 2 « C'est difficile pour moi de me faire des amis » : 1/5.

    Qui plus est, il semble que le séjour de M au Brésil l'ait rendue plus autonome et ait augmenté son degré de confiance en soi :

    « je n'ai plus peur d'aller toute seule du coup même une journée quelque part » ; « c'est vrai que ça m'a donné un peu cette spontanéité là » ;

    « je pense que le Brésil j'y ai été pour découvrir, pour le découvrir, mais qu'au final ça m'a fait découvrir moi-même aussi, cette partie de moi qui me donne envie de voir autre chose » ;

    « là-bas j'étais carrément plus ouverte que ici » ;

    « j'étais fière de moi, j'étais fière de me dire tu peux apprendre une langue aussi rapidement ».

    3.2.3.3. Réussite académique et professionnelle

    M obtient un score de 73/100 à l'Échelle d'adaptation académique. Par exemple, elle affirme avoir assimilé parfaitement le fonctionnement du système académique local :

    - item 12 « Je m'intègre bien à l'université » : 5/5 ;

    - item 15 « Je m'adapte bien à la vie étudiante » : 4/5 ;

    - item 20 « Je comprends ce que l'on attend de moi en cours » : 5/5.

    De plus, elle semble avoir très bien réussi ses études :

    - item 6 « Je trouve les études difficiles » : 1/5 ;

    - item 7 « Je n'ai pas de bons résultats aux examens » : 1/5 ;

    - item 8 « Je suis satisfait de mes résultats à l'université » : 5/5.

    En revanche, elle déclare ne pas s'être inscrite dans ses études durant son séjour au Brésil : - item 1 « J'apprécie les études » : 1/5 ;

    - item 10 « Je suis satisfait des cours que j'ai choisi » : 2/5 ;

    - item 16 « J'ai plusieurs amis dans ma ou mes classes » : 2/5 ;

    « totalement déçue de la fac » ;

    « j'ai eu des dix sur dix, je suis française, je parle pas très bien le portugais, euh je euh, je révisais pas, je vois pas comment je peux avoir dix sur dix, c'était pour moi surnoté honnêtement. Et je m'ennuyais en cours » ;

    « j'ai trouvé que les cours étaient faciles et que j'avais pas appris grand chose » ; « de toute façon j'y avais pas été pour ça ».

    En outre, si l'on se réfère au Questionnaire général, M déclare qu'elle déconseille de venir étudier au Brésil dans son université d'accueil (item 3 « Aujourd'hui, conseilleriez-vous à un autre étudiant de venir étudier au Brésil dans votre université? » : non).

    3.2.3.4. Stress d'acculturation

    Premièrement, elle obtient le score de 98,5/100 à l'Échelle de stress d'acculturation. Elle affirme ne jamais s'être sentie discriminée au Brésil :

    - item 2 « Je me sens discriminé » : 1/5 ;

    - item 3 « Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs » : 1/5 ;

    - item 14 « Je suis victime de préjugés et de stéréotypes » : 1/5.

    Pareillement, elle dit s'être sentie tout à fait à l'aise sur place tout au long du séjour : - item 1 « J'ai le mal du pays » : 1/5 ;

    - item 5 « Participer aux activités sociales m'intimide » : 1/5 ;

    - item 8 « Je me sens sous pression ici » : 1/5.

    Lors de notre entretien, elle nous confie d'ailleurs ne jamais avoir été inquiète pour sa sécurité sur place :

    « Caxias c'était une ville riche justement comme je t'ai dit, assez européenne, où t'avais pas du tout à avoir peur quoi enfin moi vraiment je m'y sentais plus en sécurité qu'à Lyon » ;

    « j'ai pas eu cette peur du danger ».

    Qui plus est, M ne semble pas non plus avoir été dépaysée outre mesure lors de son séjour :

    « J'aurais aimé arriver au Brésil, rester une semaine et dire « mais je suis où, waow », ouais j'aurais aimé que ça me retourne » ;

    « j'avais l'impression que j'avais la même vie en fait, que j'avais exactement pareil, que y avait pas vraiment de changement ».

    En outre, elle a le sentiment de ne pas avoir vécu de choc culturel au Brésil (Questionnaire général, item 17 « Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc culturel pendant votre séjour au Brésil? » : non).

    Cependant, M déclare avoir préféré sa vie à Lyon à sa vie à Caxias (Questionnaire général, item 16 « Globalement, en terme de qualité de vie, de bien-être et de satisfaction, que placeriez-vous en tête? » : Lyon). Questionnée là-dessus en entretien, elle lie cela avec son vécu de la colocation ainsi qu'au fait d'avoir eu un réseau social moins étoffé qu'en France :

    « Et bin je pense ma vie à Lyon aussi pour le côté confort du terme, parce que vivre à six, en coloc à six, franchement c'était vraiment vraiment, y avait des moments c'était dégoutant [...] t'as beau dire ce que tu veux, « je vais dans un pays je m'en fous », c'est vrai que si tu peux avoir les conditions, tant mieux. Pourquoi ma vie à Lyon aussi, parce que socialement je pense que j'étais plus épanouie à Lyon qu'au Brésil quand même parce que j'ai plus d'amis ici au final, forcément ».

    Néanmoins, rappelons que la réalité locale à Caxias ne semblait pas correspondre à sa vision d'un

    Brésil ensoleillé, exotique et dynamique, telle que nous l'avons explicitée précédemment :

    « les gens de Caxias ils sont quand même les gens les plus fermés du Brésil donc même s'ils sont plus ouverts que les Français ils restent spéciaux » ;

    « Caxias c'est quand même vachement européen » ;

    « physiquement, les personnes ressemblent vachement à des personnes européennes » ; « c'était l'hiver donc y pleuvait, tous les jours tous les jours » ;

    « j'aurais eu plus le choix j'aurais peut-être choisi une autre ville » ;

    « une ville où je, je suis sûre qu'y a plus de d'activité tu vois, plus grande quoi » ;

    « j'ai l'impression que y avait pas assez de monde en fait, j'aurais eu besoin de plus de monde et plus d'activité tu vois » ;

    « c'était surtout la ville en elle-même en fait, la ville n'était pas très active, c'était une petite ville, de quatre-cent-mille habitants, et peut-être le fait que quand j'y étais c'était aussi l'hiver donc il pleuvait aussi beaucoup, euh, c'est la ville, elle est pas agréable pour un échange, mais même pour une vie étudiante en elle-même tu vois je pense qu'il vaut mieux

    aller faire un échange à Rio ou à Salvador parce que déjà si tu penses au Brésil c'est sûr tu veux du soleil, c'est vrai, donc t'en auras plus là-bas qu'à Caxias et t'auras plus de choses à faire, t'auras la plage aussi que j'avais pas ouais ».

    Deuxièmement, M obtient un score de 84/100 à l'Échelle de bien-être. À titre d'exemple, il apparaît qu'elle se soit sentie à l'aise tout au long de son séjour :

    - item 2 « Vous sentez-vous rejeté? » : 1/5 ;

    - item 3 « Vous sentez-vous faiblement entouré? » : 1/5 ;

    - item 9 « Vous sentez-vous à l'aise dans votre environnement? » : 5/5 ;

    - item 10 « Vous sentez-vous plus souvent déprimé que joyeux? » : 1/5 ;

    - item 16 « Préférez-vous rester seul? » : 1/5 ;

    - item 19 « Avez-vous déjà souhaité être de retour chez vous en France? » : 1/5.

    Au cours de notre entretien elle admet avoir eu une période difficile au début de son séjour, à l'occasion de son anniversaire...

    « le jour de mon anniversaire, je crois que c'est la seule fois où j'ai pleuré [...] je suis arrivée au Brésil le sept juillet et mon anniversaire c'était le huit août, donc tu vois un mois t'as pas le temps de te faire des amis, les cours ont attaqué début août, t'as pas le temps de te faire de copains, rien, j'avais mes colocs je les connaissais ça devait faire une ou deux semaines [...] pour mon anniversaire [...] mes vingt ans en plus je voulais marquer le truc, sauf que je connaissais personne et que j'avais personne de motivé pour bouger avec moi donc ouais j'ai eu un bon coup de déprime »

    ...mais nous assure ne jamais plus avoir éprouvé ce genre de sentiment à nouveau au cours de son séjour :

    « Mais sinon non je me suis jamais sentie vraiment mal, enfin déprimée tu vois, triste ». Cependant, elle nous confie qu'elle aurait aimé avoir davantage d'amies sur place et que cela lui a quelque peu manqué :

    « Mes amis ne m'ont pas manqué mais le fait d'avoir moins d'amis qu'avant, d'avoir juste ce petit groupe que [...] au final et je sais pas, j'ai jamais eu beaucoup de copines moi, et par contre j'en ai toujours eu une quand même tu vois, il me fallait toujours une fille pour raconter mes trucs de fille et j'en avais pas au Brésil et je pense que ça m'a manqué un peu aussi ».

    Malgré cela, M dit s'être globalement sentie très bien durant son séjour au Brésil (Questionnaire
    général, item 1 « Durant votre séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous? » : 5/5) et s'estime

    satisfaite de son expérience (Questionnaire général, item 15 b) « Globalement, combien êtes-vous satisfait de votre séjour au Brésil en général? » : 4/5).

    Dernièrement, M obtient un score de 70/100 au Brief COPE. Ses réponses suggèrent qu'elle est encline à gérer les situations stressantes, délicates ou imprévues avec flegme...

    - item 5 « Apprendre à vivre avec » : 4/5 ;

    - item 8 « Voir le bon côté des choses » : 4/5 ;

    - item 10 « Prendre les choses avec humour » : 4/5

    ...ainsi qu'à ne pas se laisser dépasser par les évènements : - item 2 « Prendre les choses en main » : 4/5 ;

    - item 4 « Renoncer à essayer de résoudre la situation » : 2/5.

    3.3. Compétence interculturelle

    À l'aide des données dont nous disposons, nous allons tenter de présenter des éléments qui seraient susceptibles de nous renseigner sur le degré de compétence interculturelle de M.

    3.3.1. Sens du séjour à l'étranger

    Si l'on se réfère au Questionnaire général, M déclare que le mot le plus caractéristique afin de qualifier son séjour est « découverte » (item 10, « Choisissez un mot qui serait le plus caractéristique pour situer votre séjour au Brésil au regard de votre vie en général » : découverte). Interrogée à ce sujet lors de notre entretien, elle nous confie être initialement partie au Brésil en quête de différence, au sens large :

    « pourquoi découverte, parce que j'étais partie pour ça à la base, c'était pour découvrir une autre culture, un autre pays, d'autres personnes, découvrir autre chose, de tout nouveau ».

    3.3.2. Ressenti sur le séjour

    Pour M, il apparaît que la réalité ait été quelque peu différente de ses attentes :

    « je suis pas sûre au final que c'est ce qui s'est passé, si, bien sûr, j'ai découvert autre chose, mais c'était peut-être pas le plus important du coup ».

    Alors, en définitive, qu'est-ce qui était le plus important? M déclare...

    « Ça a été ouais le voyage, les rencontres »

    ...et ajoute :

    « je pense que le Brésil j'y ai été pour découvrir, pour le découvrir, mais qu'au final ça m'a

    fait découvrir moi-même aussi, cette partie de moi qui me donne envie de voir autre chose ». Toutefois, elle se dit frustrée de ne pas avoir séjourné au Brésil plus longtemps :

    « ça m'a frustrée, franchement je suis frustrée d'avoir fait que six mois maintenant » ;

    « c'est vrai que si je devais refaire cet échange déjà je referais plus long, je ferais un échange d'un an minimum ».

    D'ailleurs, si elle considère bel et bien avoir vécu une expérience très positive au Brésil, elle ne s'en satisfait pas pour autant et parait être animée d'une véritable soif d'Ailleurs :

    « c'était une belle expérience » ;

    « C'était une excellente expérience mais je peux en vivre des mieux, pour moi je reste sur un sentiment d'inachevé, il m'en faudrait encore » ;

    « pour moi c'est un début maintenant quoi, c'est autre chose qui commence mais qui va être plus grand » ;

    « j'aurais envie de bouger plus que, qu'avant quoi ».

    Elle nous dit également avoir volontiers entrepris de créer du lien social au Brésil afin de s'insérer avec succès dans on environnement :

    « j'en avais envie je pense. Je pense que si t'as peur tout de suite et que si tu te renfermes dans ta peur tu vas pas aller vers les gens et c'est vrai que tu vas être tout seul et que tu es malheureux du coup. Mais moi j'en avais envie » ;

    « j'ai quand même fait des efforts pour m'intégrer, j'avais des amis brésiliens ».

    3.3.3. Tensions éprouvées

    Afin de déceler les tensions dont M a fait l'expérience, intéressons-nous à la façon dont elle décrit son environnement local.

    Elle oppose le Brésil des régions au nord de Caxias au Brésil du sud :

    « les gens du nord plus parce que les gens de Caxias ils sont quand même les gens les plus fermés du Brésil ».

    D'un côté, en effet, elle fait allusion à un Brésil exotique et dépaysant, plus agréable :

    « quand tu vas a Rio ou à Salvador bin tu retrouves plus quoi, ce truc européen je trouve » ; « je pense qu'il vaut mieux aller faire un échange à Rio ou à Salvador parce que déjà si tu penses au Brésil c'est sûr tu veux du soleil, c'est vrai, donc t'en auras plus là-bas qu'à Caxias et t'auras plus de choses à faire, t'auras la plage ».

    D'un autre côté, en revanche, elle mentionne un Brésil aux influences européennes...

    « c'est vachement européen, enfin je veux dire, physiquement, les personnes ressemblent vachement à des personnes européennes, [...] alors que bin tu t'y attends pas au Brésil »

    ...qui ne s'est pas révélé dépaysant...

    « J'aurais aimé arriver au Brésil, rester une semaine et dire « mais je suis où, waow », ouais j'aurais aimé que ça me retourne » ;

    « j'avais l'impression que j'avais la même vie en fait, que j'avais exactement pareil, que y avait pas vraiment de changement » ;

    « c'est un peu le même rythme que nous finalement et c'est vrai que j'avais une espérance làdessus »

    ...et l'ayant même vraisemblablement un peu déçue :

    « c'est la ville, elle est pas agréable pour un échange » ;

    « c'est vrai que j'aurais eu plus le choix j'aurais peut-être choisi une autre ville ».

    3.3.4. Évolution personnelle

    Il semble que ce séjour ait contribué à affiner le regard de P sur le monde et à développer sa capacité à prendre en compte l'Autre :

    « Parce que c'est vrai que quand t'es là-bas tu te dis « ouais c'est différent » mais en même temps c'est pareil que toi mais d'un autre point de vue, non mais je pense que y a plein de trucs à prendre en compte » ;

    « t'as plusieurs pays en un pays en fait ».

    Par ailleurs, elle estime que son degré d'exposition internationale est passé de 2/5 au début de son séjour à 4/5 à l'issue de son séjour, soit de faible à élevé (Questionnaire général, item I « Comment évalueriez-vous votre exposition internationale (le degré auquel vous êtes confronté à la vie au sens large au-delà de nos frontières)? »). Elle affirme aussi que son degré de conscience interculturelle est passé de 1/5 à 3/5 entre le début et la fin de son séjour au Brésil, soit d'un niveau minimal à un niveau intermédiaire (Questionnaire général, item II « Comment évalueriez-vous votre conscience interculturelle (le niveau auquel vous êtes préoccupé par, ou impliqué dans, des affaires extraterritoriales)? »).

    De plus, alors qu'avant de partir M se disait plutôt timorée et semblait entretenir quelques craintes à l'égard de l'aventure ou des voyages en général...

    « j'avais donc le choix entre six mois et un an et je t'avoue que j'étais morte de trouille [...] donc bin moi je me suis dit je vais faire six mois déjà » ;

    « Ouais, je savais pas du tout comment ça allait se passer, est-ce que j'allais arriver à m'intégrer, etc. je partais toute seule alors que le seul voyage que j'avais fait avant c'était scolaire ou deux semaines en Angleterre enfin tu vois, et donc là, ouais ouais ça me faisait peur quand même »

    ...il apparait que son séjour au Brésil lui ait, pour ainsi dire, fait pousser des ailes, ait participé à lui donner davantage d'assurance, de confiance en soi...

    « [...] en Argentine et pour y aller on faisait tout au dernier moment, on disait bin aujourd'hui tu vas faire quoi on se levait et on allait marcher dans la ville on se disait « bin tiens je viens de voir sur la carte que y a un musée par là », on y passe et voilà. Et c'est comme ça que j'ai visité l'Argentine » ;

    « Pour moi maintenant après le voyage c'est que ça m'a donné une envie [...] j'ai toujours eu envie de voyager, c'est pour ça que j'ai fait ce premier voyage mais là ça m'a donné plus que l'envie [...] là je suis en train de me renseigner pour un Master, un Master qui propose deux fois six mois d'échange à l'étranger et qui t'ouvre des portes pour devenir experte en relations, en associations internationales donc tu vois je suis en train moi-même de changer mes idées de projet de vie pour voyager plus et pour découvrir »

    ...ainsi qu'à lui ouvrir l'esprit et à aiguiser sa curiosité :

    « Ouais je pense, parce que là-bas j'étais carrément plus ouverte que ici bin là du coup oui, je voulais tout connaître, j'étais super curieuse, moi je posais des milliers de questions » ;

    « je posais des questions, j'essayais toujours de m'intégrer, toujours de discuter, ouais, non, je pense que j'étais assez curieuse là-bas ».

    Toutefois, généralement parlant, M pense n'avoir que moyennement changé durant son séjour (Questionnaire général, item 9 « Avez-vous eu le sentiment d'avoir changé à l'issue de votre séjour au Brésil? » : 3/5). Par ailleurs, elle exprime des difficultés à prendre du recul par rapport à ce qu'elle a vécu :

    « c'est pas encore assez clair » ;

    « je sais pas si je change vraiment vraiment, si j'ai vraiment changé ».

    3.3.5. Projets d'avenir

    M nous confie que cette expérience l'a amenée à reconsidérer ses perspectives futures...

    « je voulais être éducatrice, enfin je veux toujours, être éducatrice PJJ et c'est vraiment un job qui me fascine et qui me passionne et ça fait des années que je veux faire ça et j'ai pas envie de me dévier de cette voie là. Mais j'ai envie de me dire « tiens, si je peux en profiter pour faire un Master et voyager un peu dans l'Europe » puis après si ce Master m'ouvre des voies sur un job qui peut être intéressant, qui me permet de voyager, pourquoi pas et après je reviendrais à l'éduc tu vois, je suis en train de, ouais, mon plan de vie, alors qu'il était assez rectiligne tu vois (rire), il est en train de tout changer, et tant mieux! Je suis contente tu vois, ça me fait de nouveaux projets tout ça, c'est sympa » ;

    Questionnaire général, item 11 « Pensez-vous que cette expérience va influencer votre vie future? » : oui

    ...et elle se déclare prête à retourner au Brésil dès que possible :

    « Oui oui je vais y retourner je pense, je vais essayer de me faire toute l'Amérique Latine » ; « j'espère avoir de l'argent d'ici trois ou quatre ans pour voyager et je me dis que j'irais au Brésil ».

    INTERPRETATION DES RESULTATS ET DISCUSSION

    Dans cette partie, nous tenterons de donner du sens à notre précédente analyse. Nous nous attacherons donc, tour à tour pour chacune des participantes, à expliciter leurs transformations socioculturelles puis à les situer dans notre esquisse de conceptualisation de la CIC, avant d'essayer de mettre à jour les relations entre ces deux objets. Pour finir, nous répondrons à notre problématique et exposerons les limites de cette étude.

    1. Le cas de P

    Dans ce premier chapitre, nous commenterons d'abord les données relatives aux transformations socioculturelles et à la compétence interculturelle de P avant d'essayer de les mettre en relation.

    1.1. Transformations socioculturelles

    Il s'agira là d'expliciter la façon dont P s'est vue transformée aux plans culturel, social et psychologique durant son séjour au Brésil.

    1.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture

    S'interroger sur la portée du séjour de P en relation à la dimension culturelle des transformations socioculturelles revient à se poser la question suivante : quels infléchissements cette expérience semble-t-elle avoir donné à ce qui fait sens pour elle? Quelle évolution de ses attitudes, comportements et représentations pouvons-nous déceler?

    Premièrement, concernant les représentations de P, ce séjour aura contribué à lui donner une image plus finement ciselée du Brésil, dont elle n'envisageait pas les écarts sociaux ou les caractéristiques régionales avec autant de contrastes.

    Deuxièmement, au plan communicationnel, bien évidemment, ses habiletés linguistiques se sont accrues.

    Dernièrement, au niveau des attitudes et des comportements, les transformations sont plus difficiles à expliciter. Certes, sur place, son environnement l'a conduit à modifier ses habitudes, plus particulièrement en matière de sécurité. Par exemple, elle a su adopter les comportements appropriés comme appeler un taxi afin de rentrer le soir. Néanmoins il s'agit plus là d'une adaptation d'ordre temporaire que d'une véritable transformation. Au regard des données dont nous disposons, nous ne pouvons donc fournir davantage d'éléments.

    1.1.2. Dimension sociale - Composante : le phénomène d'acculturation

    Nous allons commenter ici la stratégie d'acculturation mise en oeuvre par P en vue de se situer au sein de son nouvel environnement au Brésil.

    Nous pensons que P s'est inscrite dans un processus d'intégration au sens de Berry (2000), c'est-àdire qu'au cours de son séjour elle a eu tendance à valoriser les contacts avec les autochtones, à s'ouvrir à la différence culturelle pour s'insérer dans sa société d'accueil, tout en gardant une cohérence vis-à-vis de ses racines, de ce qui la constituait intrinsèquement jusque là au niveau culturel et identitaire. En effet, son réseau social sur place s'est élargi au cours de son séjour et incluait à la fois une majorité de Brésiliens et un solide groupe de compatriotes. D'autre part, son environnement a contribué cela en se montrant ouvert et accueillant tout en lui renvoyant certaines évocations pesantes de l'Occident.

    1.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel

    Dans ce sous-sous-chapitre, nous commenterons la façon dont P a géré son choc culturel au Brésil, c'est-à-dire la façon dont elle a fait face aux ambiguïtés et aux incertitudes qui lui ont été renvoyées lors des interactions avec son environnement tout au long du séjour.

    Par l'intermédiaire de son expérience, P a notamment été amenée à repenser son rapport au monde. En effet, confrontée à la réalité locale, elle a véritablement pu mettre perspective sa vie en France et prendre conscience de certaines disparités, en terme de confort matériel ou de politique publique d'éducation par exemple. Il apparait aussi que ce séjour ait contribué à ce qu'elle se découvre ellemême. Ainsi, elle s'est rendue compte que ses attaches relationnelles et ses racines revêtent une grande importance.

    1.2. Compétence interculturelle

    À l'aide des données précédemment recueillies, nous tenterons ici de capturer le degré de CIC de P en relation à notre esquisse conceptuelle.

    Nous pensons que la place de P dans notre ébauche de modèle théorique est au second palier, appropriation de savoirs et efficacité. En effet, elle affiche toutes les caractéristiques laissant à penser qu'elle ait une certaine propension à la décentration et à l'ethnorelativité. D'une part, elle a été amenée à relativiser sa vision du monde à la française au regard de l'ensemble de ses découvertes au Brésil. D'autre part, elle semble être ouverte à l'Autre et accepter la différence culturelle, bien qu'elle l'interroge parfois, mais dans une perspective critique, et non ethnocentrique. Pour toutes ces raisons, nous la pensons suffisamment avancée au sein du premier stade de notre essai de conceptualisation (décentration et ethnorelativité) pour pouvoir évoluer dans le second

    stade. D'ailleurs, au vu de ses bons résultats aux différents questionnaires et de sa facilité à communiquer avec les autochtones ainsi qu'à évoluer dans son environnement de façon générale, il nous semble évident qu'elle ait nécessairement acquis un corps de savoirs lui permettant de s'adapter à diverses situations. Cependant, reconnaissons que nous n'avons guère d'éléments concrets pour étayer cette affirmation. Pour finir, nous n'estimons pas que P ait atteint le dernier palier (dépassement des référentiels culturels et hybridité) car, en dépit de cette efficacité supposée, elle ne parait pas encore avoir une assez bonne appréhension de la société brésilienne, ni se reconnaitre en elle au point d'en extraire des fragments culturels qu'elle intégrerait à sa propre vision du monde.

    1.3. Synthèse

    Finalement, comment les transformations socioculturelles de P ont-elles influencé le développement de sa compétence interculturelle?

    Il nous apparait que l'évolution des représentations de P, l'hétérogénéité de son réseau social et les ambiguïtés auxquelles l'a confronté son choc culturel ont toutes trois contribué à développer la faculté de décentration dont elle a su faire preuve durant son séjour au Brésil.

    2. Le cas de C

    Dans ce deuxième chapitre, nous interpréterons les données relatives aux transformations socioculturelles et à la compétence interculturelle de C, puis nous tenterons de faire le lien entre elles.

    2.1. Transformations socioculturelles

    Nous commenterons d'abord les transformations vécues par C aux niveaux culturel, social et psychologique pendant son séjour au Brésil.

    2.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture

    Nous nous demanderons ici quels ont été les infléchissements de C au niveau de ce qui fait sens chez elle suite à son séjour au Brésil.

    En ce qui concerne les représentations de C, son séjour aura participé à renforcer son attirance pour l'africanité ainsi qu'à accentuer cette volonté de rapprochement aux plans culturel et identitaire avec une certaine idée de l'Afrique, comme nous l'indiquent ses affinités avec la favela et le Candomblé. Aux niveaux des comportements et des attitudes, cette expérience a fait évoluer considérablement sa perspective sur la spiritualité et son rapport au mysticisme par exemple, en lui permettant de se joindre à des pratiques et rites afro-brésiliens.

    De plus, là encore, le séjour au Brésil de C lui a permis d'aiguiser ses facultés linguistiques.

    2.1.2. Dimension sociale - Composante : le phénomène d'acculturation

    Nous allons aborder ici la stratégie d'acculturation mise en oeuvre par C en vue de se positionner vis-à-vis de sa société d'accueil.

    Il paraitrait que C se soit engagée dans un processus d'assimilation (Berry, 2000) au cours de son séjour. En effet, elle se positionne en porte-à-faux de ses origines culturelles et identitaires tout en s'identifiant de manière prononcée au Brésil des favelas, avec l'arrière plan culturel et identitaire dont il est porteur. Pratiquement, d'une part elle apparait avoir eu une révélation ou une fusion, pour reprendre ses propres termes, avec ce Brésil empreint d'africanité, et d'autre part elle s'est éloignée durant son séjour tant de sa compatriote Véronique que de sa famille d'accueil plus proche, semblet-il, du « modèle » occidental.

    2.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel

    Nous allons à présent commenter la manière dont C a réagi aux ambiguïtés auxquelles son expérience du Brésil l'a confrontée.

    Il semble que le séjour de C ait accentué chez elle une distanciation préexistante vis-à-vis de la France métropolitaine et des valeurs qu'elle véhicule. De ce fait, elle s'est détournée de tout ce qui, au Brésil, lui rappelait sa terre natale, et s'est engagée activement dans des pratiques telles que le Candomblé.

    2.2. Compétence interculturelle

    Dans ce sous-chapitre, nous tenterons d'évaluer le degré de compétence interculturelle de C dans notre essai de conceptualisation.

    Il apparaitrait que C se trouve au troisième stade de notre esquisse conceptuelle, dépassement des référentiels culturels et hybridité. En effet, Il nous semble qu'elle soit dans une situation de marginalité culturelle, dans un rapport conflictuel entre le dépassement de son référentiel culturel initial ayant émergé au cours du processus d'endoculturation, et l'hybridité issue de la confrontation aux référentiels culturels de la société brésilienne certes, mais plus largement des sociétés réunionaise, canadienne, etc. Cette marginalité n'est donc à pas lier exclusivement avec son expérience à Recife mais à replacer dans le contexte de l'ensemble de ses voyages et plus globalement de sa vie.

    2.3. Synthèse

    Pour conclure, il s'agit là de déterminer la manière dont les transformations socioculturelles de C au cours de son séjour ont influencé le développement de sa compétence interculturelle.

    Il nous semble que l'inscription de C dans le Candomblé, ses relations étroites avec des autochtones à l'arrière plan afro-brésilien et sa distanciation par rapport à son pays d'origine ont toutes trois participé à exacerber son sentiment de marginalité culturelle à l'issue de son séjour au Brésil.

    3. Le cas de M

    Dans ce troisième chapitre, nous commenterons les données relatives aux transformations socioculturelles et à la compétence interculturelle de M puis nous essayerons de les mettre en parallèle.

    3.1. Transformations socioculturelles

    Nous préciserons ici les transformations de M aux plans culturel, social et psychologique au cours de son séjour au Brésil.

    3.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture

    Dans ce sous-sous-chapitre, nous tenterons d'expliciter les inflexions de M en termes de comportements, attitudes et représentations afin de refléter une évolution de ce qui, chez elle, fait sens.

    Au niveau des représentations, il semble, dans une certaine mesure, que M entretienne désormais une vision moins romantique du voyage en général et qu'elle envisage l'Autre de façon moins exotique.

    En terme de comportements et d'attitudes, il apparait qu'elle soit aujourd'hui plus encline à se lancer dans des projets d'aventure, de voyage ou de visite et qu'elle entretienne moins d'appréhension à cet égard.

    Notons bien sûr que ce séjour lui aura également permis d'affûter ses compétences linguistiques.

    3.1.2. Dimension sociale - Composante : le phénomène d'acculturation

    Nous nous intéressons maintenant à la stratégie d'acculturation développée par M afin de se positionner par rapport à sa société d'accueil.

    Sur place, c'est une stratégie d'intégration (Berry, 2000) que M a mis en oeuvre, d'une part en essayant de s'investir activement dans ses relations avec les autochtones, et d'autre part en conservant un contact avec ses proches du côté français. La nature de son réseau social se fait d'ailleurs le reflet de cette stratégie, en incluant à la fois des Brésiliens, des compatriotes et d'autres étudiants internationaux.

    3.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel

    Nous interpréterons ici la façon dont M a fait face aux ambiguïtés qui ont émergé au fil des interactions avec son environnement au Brésil.

    Le contact avec son environnement lui a apparemment communiqué un certain optimisme ainsi

    qu'une plus forte assurance et confiance en soi, et a finalement participé à développer son goût d'Ailleurs.

    3.2. Compétence interculturelle

    Dans ce sous-chapitre, nous tenterons d'évaluer le degré de CIC de M en la situant dans notre ébauche de modèle théorique.

    Nous la positionnons au second palier de notre esquisse conceptuelle, appropriation de savoirs et efficacité. Elle dispose en effet de tous les éléments caractéristiques d'une perspective ethnorelative, comme le respect de la différence ou l'ouverture à l'Autre. Elle semble donc se situer à un niveau suffisamment avancé dans le premier palier (décentration et ethnorelativité) afin d'être en mesure d'évoluer au sein du second palier. En effet, compte tenu de ses bons résultats à l'ensemble des différents questionnaires et de son aisance à nouer des liens sur place et à évoluer de façon générale dans son environnement pendant toute la durée de son séjour, il apparait indispensable qu'elle ait acquis un corps de savoirs lui donnant les moyens de répondre avec succès à une large gamme de situations. Cependant, nous ne disposons pas d'éléments concrets pour développer cela. Quant au troisième palier (dépassement des référentiels culturels et hybridité), il ne semble pas qu'elle ait suffisamment de recul sur son expérience afin de se situer dans une perspective de dépassement des référentiels culturels tant brésiliens que français.

    3.3. Synthèse

    Pour finir, intéressons-nous à la manière dont les transformations socioculturelles de M au Brésil ont influencé le développement de sa compétence interculturelle.

    Il nous semble que le bon déroulement du séjour de M, ainsi que la nature positive de ses relations avec les autochtones, aient participé au développement chez elle d'une vision ethnorelative du monde.

    4. Discussion

    Dans ce chapitre, nous tenterons d'abord de répondre à notre problématique avant de nous intéresser aux limites de cette recherche.

    Tout d'abord, il apparait qu'aucun séjour à l'étranger n'est similaire, car c'est bel et bien l'ensemble des situations d'interaction qui donne sa force à une telle expérience. En effet, le participant n'est jamais confronté au « tout » de la culture d'autrui (Vatter, 2006), c'est-à-dire que ne lui est dévoilé que ce qu'il peut bien entrevoir par l'intermédiaire des personnes et des institutions avec lesquelles il communique à un instant t. D'autre part, le participant lui-même constitue une variable dans le déroulement du séjour à l'étranger. Chaque situation étant singulière, les attitudes, comportements et représentations du sujet sont susceptibles d'en orienter le déroulement d'une manière ou d'une autre. Cette double singularité confère au séjour à l'étranger un caractère non reproductible, il est donc difficile d'en prédire le résultat. Toutefois, à l'issue de cette étude, il semble que toutes les participantes aient éprouvé un certain degré de transformations socioculturelles au cours de leur séjour au Brésil, et ces dernières, dans leur ensemble, paraissent avoir eu un impact positif sur le degré respectif de développement de la CIC des sujets.

    Sommes-nous alors en mesure de répondre adéquatement à notre problématique? Nous nous interrogions sur le caractère des relations entre transformations socioculturelles à l'étranger et évolution de la compétence interculturelle des individus. Il apparaitrait effectivement que la nature des expériences vécues par P, C et M au Brésil entretienne bien des liens étroits avec l'évolution de leur CIC, attendu qu'elles dressent toutes trois un bilan positif de leur séjour et qu'elles se situent chacune dans une perspective d'ouverture à l'altérité. Néanmoins, force est de reconnaitre que nous ne pouvons répondre que partiellement à notre problématique, faute d'éléments suffisants. Nous estil en effet possible de parler de « transformations » et d' « évolution » alors même que nous ne pouvons nous prévaloir que d'une vision rétrospective de l'expérience de nos sujets? Il est vrai que nous n'avons pas été en mesure de recueillir des informations sur le degré de CIC des participantes avant leur séjour au Brésil, non plus que sur l'état de leurs dispositions culturelles, sociales et psychologiques à la veille de leur mobilité.

    Finalement, si nos travaux nous permettent d'avancer certains arguments en faveur de retombées positives des programmes de mobilité internationale au Brésil sur les participants à la lumière des informations dont nous disposons, leurs objectifs ne sont que partiellement remplis car nous ne pouvons que deviner les liens entre transformations socioculturelles et développement de la CIC. Ce constat nous montre le chemin à suivre : afin d'établir rigoureusement ces liens, il est impératif de mettre en place un suivi des participants à l'échange universitaire international, de l'avant-mobilité jusqu'à l'après-mobilité.

    Poursuivons dans les limites de cette étude. Situer finement le niveau de CIC des sujets demeure l'un des problèmes fondamentaux de toute recherche sur l'interculturalité. De ce fait, employer des outils de mesure rigoureux de la CIC, en relation à un modèle théorique solide, est sans nul doute une gageure pour le chercheur. Ainsi, notre esquisse conceptuelle n'était-elle pas assez structurée et manquait-elle d'indicateurs de terrain.

    De même, rappelons certaines limites relatives à notre procédure de recueil de données. En effet, les questionnaires ont été administrés sous forme d'auto-évaluation, avec tous les biais que cela comporte. Nous n'avons d'ailleurs pu travailler qu'à partir des données issues de nos questionnaires et entretiens qui, s'ils ont bien pour but de faire un tour d'horizon aussi vaste que possible de l'expérience à l'étranger, ne sauraient prétendre à l'exhaustivité. Il est donc probable que nous soyons passés à côté de certains éléments d'une part, et que les sujets aient gardé une certaine réserve d'autre part. En outre, inviter ces derniers à porter un regard rétrospectif sur une expérience intense et prolongée les conduit irrémédiablement à arquer leur regard leur vécu.

    Soulignons néanmoins la force de leur investissement dans notre étude, plus particulièrement lors des entretiens. Il nous semble que chacune des participantes se soient livrées véritablement. Cela nous apparait d'autant plus vrai pour P et C qui ont été interrogées très peu de temps après leur retour en France. Leur entretien a vraiment été vecteur d'une dimension analytique, d'un espace de réflexivité qui leur a permis de faire le point sur leur expérience. De plus, possiblement en raison de leur expérience antérieure du séjour d'étude à l'étranger, le degré de prise de conscience de leur vécu au Brésil, leur faculté de mise en perspective, s'est révélée particulièrement aiguisée.

    Pour finir, et dans l'optique de constituer un plus large corps de données sur les impacts de la mobilité internationale au Brésil chez les participants inscrits à l'Université Lumière Lyon 2, ajoutons qu'il serait profitable de systématiser la participation des étudiants en échange à de telles études. Par ailleurs, cela évincerait le biais inhérent au volontariat suivant lequel les étudiants qui considèrent leur expérience du séjour à l'étranger comme globalement positive et valorisante sont plus enclins à accepter de témoigner.

    Conclusion

    Notre étude s'est intéressée aux impacts de la mobilité internationale chez les étudiants séjournant au Brésil. Pour la contextualiser, nous sommes partis de l'accroissement de la mobilité internationale des étudiants de l'Université Lumière Lyon 2 au cours de cinq dernières années, et de l'état contradictoire de la recherche sur les effets d'une telle pratique. Nous avons donc été amenés à mettre en exergue un certain nombre de facteurs clés dans l'expérience des étudiants en mobilité afin de mieux discerner les changements auxquels ces derniers sont susceptibles de s'exposer au cours de leur séjour. C'est ainsi que nous avons entrepris de délimiter tour à tour les concepts de transformations socioculturelles et de compétence interculturelle (CIC) en nous appuyant sur de nombreux travaux préalables. Concernant les transformations socioculturelles, nous les avons envisagées en premier lieu comme un ensemble de changements durables chez l'individu subdivisés en trois dimensions, culturelle, sociale et psychologique. Ensuite, chacune de ces dimensions s'est vue associée à une composante (la culture, l'acculturation et le choc culturel respectivement) à laquelle de multiples indicateurs ont finalement été reliés (les compétences de communication, la distance culturelle, la sensibilité interculturelle ; le capital social, l'orientation d'acculturation de la société d'accueil ; le soutien social, l'auto-efficacité, la réussite académique et professionnelle, et le stress d'acculturation). Pour compléter cela, nous avons également mentionné le rôle de deux autres variables dans le processus de transformations socioculturelles, à savoir la durée de séjour et l'exposition interculturelle antérieure. Au niveau de la CIC, nous avons d'abord détaillé le modèle de compétence interculturelle de Byram (1997) et le modèle de développement de la sensibilité interculturelle de Bennett (1993) sur lesquels nous nous sommes ensuite basés pour faire émerger notre approche de la CIC qui, rappelons-le, relève davantage de l'ébauche que du véritable modèle. Enfin, nous avons procédé à un essai de définition du concept de CIC en nous appuyant notamment sur les travaux de Dervin (2009) et de Le Boterf (1995, 1997). Les transformations socioculturelles et le développement de la CIC s'imposant tous deux comme les enjeux majeurs d'une mobilité internationale réussie, nous avons été conduits à nous interroger sur la nature de leurs liens au regard du séjour à l'étranger en général. Ainsi, l'ensemble de ce travail nous a fourni une assise suffisamment large grâce à laquelle nous avons pu exploiter une importante quantité de données relatives à l'expérience de l'échange universitaire international. Pour recueillir ces données, nous avons utilisé à la fois des questionnaires et des entretiens semi-dirigés. Sur les dix questionnaires employés au cours de cette étude, neuf sont des questionnaires préexistants que nous avons simplement adaptés à notre objet. Initialement prévu en deux phases, avant le départ des étudiants pour le Brésil puis à leur retour en France, le recueil de données n'a finalement pu avoir

    lieu qu'à l'issue du séjour des participants en raison de difficultés relatives à la composition de l'échantillon. En effet, nous n'avons pu réunir que trois volontaires pour prendre part à nos travaux. Il s'agit de trois étudiantes ayant séjourné au Brésil pour des durées comprises entre deux et six mois, deux d'entre elles dans le cadre d'un stage de Master 1 et une dernière pour son cinquième semestre de Licence. Parmi elles, deux ont séjourné à Caxias do Sul, au sud du Brésil, et une à Recife, au nord du pays. Dans un premier temps, notre analyse laisse transparaître que le séjour au Brésil s'est révélé transformateur pour l'ensemble des participantes, bien que nous ne puissions déterminer de manière rigoureuse quelle a été l'ampleur des changements chez elles, en raison du mode rétrospectif de notre recueil de données. Ensuite, il semble que les transformations socioculturelles vécues sur place entretiennent bien un lien positif avec l'évolution du degré de CIC des étudiantes, bien que là encore nous ne soyons pas en mesure de situer finement ces dernières sur notre modèle de CIC, en raison de son état de gestation. Toutefois, malgré les limites de cette étude dans la réponse à sa problématique, force est de constater l'impact positif de la mobilité internationale au Brésil sur les trois étudiantes interrogées. En effet, nous constatons qu'en dépit de la situation géographique, de la durée du séjour, de l'expérience du voyage ou encore des motivations des participantes, cette expérience fut pour elles un véritable pas en avant. La somme de leurs expériences sur place les a conduites tantôt à s'ouvrir davantage sur le monde et la différence, tantôt à gagner en assurance et en confiance en soi, tantôt à mieux se connaître et avoir davantage conscience de soi. Elles nous parlent toutes trois d'une expérience bénéfique au plan personnel et humain, qui leur a ouvert de nouvelles perspectives d'avenir, et surtout au coeur de laquelle la rencontre occupe une place privilégiée. Finalement, les programmes d'échanges universitaires internationaux entre l'Université Lumière Lyon 2 et le Brésil semblent jouer pleinement leur rôle d'ouverture à l'altérité, de sensibilisation à la différence culturelle, en plus de fournir aux candidats à l'échange un puissant levier de développement de leurs ressources personnelles.

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    Sitographie

    [1] Les étudiants internationaux, chiffres clés CampusFrance 2011, URL:
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    [2] Ouvrir son parcours à l'international, partir à l'étranger avec l'Université Lumière Lyon 2, URL : http://etu.univ-lyon2.fr/international/etu-partir-a-l-etranger. (consulté le 20/08/2012).

    [3] La mobilité internationale 2012/2013 : préparation des étudiants sélectionnés, URL: http://www.univ-lyon2.fr/international/actualites-internationales/la-mobilite-internationale-2012- 2013-preparation-des-etudiants-selectionnes. (consulté le 20/08/2012).

    [4] La dimension internationale de Lyon 2, URL : http://www.univ-lyon2.fr/international/unedimension-internationale. (consulté le 20/08/2012).

    [5] Titre premier : missions et composition, URL : http://www.univ-
    lyon2.fr/universite/gouvernance/titre-premier-m issions-et-composition . (consulté le 20/08/2012).

    [6] Dervin, F. (2004). Définition et évaluation de la compétence interculturelle en contexte de mobilité : ouvertures, URL : http://users.utu.fi/freder/mob.pdf. (consulté le 04/08/2011).

    Index Auteurs

    Abdallah-Pretceille, 12, 18, 26, 31 Acioly-Régnier, 15

    Adelman, 22 Adler, 21, 25, 34

    Albrecht, 22 Asrabadi, 45 Audras, 30 Babiker, 44 Baker, 45

    Bandura, 23, 24 Bartel-Radic, 37

    Bennett, 14, 16, 29, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37 Berry, 11, 17, 20, 21, 23, 109, 111, 113 Bourdieu, 13

    Brown, 10

    Bruckner, 39 Burleson, 22

    Byram, 14, 17, 29, 30, 31, 35, 36, 37 Camilleri, 12

    Carré, 23

    Carver, 45

    Certeau, 9

    Chanier, 30 Chen, 44

    Church, 18, 20, 22

    Copeland, 22 Norell, 22

    Deardoff, 38 Dervin, 27, 28, 31

    Fan, 23

    Fantini, 27, 40 Fenton, 19

    Fernando, 19 Frederiksen, 27 Geertz, 21

    Halamandaris, 11

    Hall, 15

    Halpern, 19

    Hammer, 32, 33, 34, 35

    Herskovits, 16 Hopkins, 9 Jonassen, 9 Kim, 9, 21, 26 Kohls, 21, 24 Kroeber, 19 Le Boterf, 38 Linton, 16 Lysgaard, 20 Mak, 23, 24 Malglaive, 38 Mapp, 26

    Milstein, 21 Murphy-Lejeune, 8 Norris, 27

    Oberg, 20, 24 Pederson, 25

    Porcher, 12, 13, 15, 18 Power, 11

    Poyrazli, 18 Pugibet, 15 Reboul, 36 Redfield, 16 Ruben, 37 Russo, 8

    Sandhu, 45 Schwarzer, 23, 45 Searle, 44 Simensen, 27 Sinicrope, 27 Siryk, 45

    Starosta, 44 Tardy, 33, 38, 39

    Tran, 23, 24

    Vatter, 9, 15, 39, 40, 115 Ward, 9, 10, 22, 24, 44 Watanabe, 27

    Zapf, 20

    Zheng, 23
    Zimet, 44

    Index Mots clés

    Compétence interculturelle, 3, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 47, 49, 72, 91, 108, 109, 114, 115 Échanges universitaires internationaux, 3, 6, 8, 10, 41, 117

    Études intégrées, 6, 7, 9, 12, 42, 91, 115

    Séjour d'étude à l'étranger, 8, 10, 116

    Transformations socioculturelles, 3, 11, 15, 16, 19, 23, 24, 25, 41, 47, 49, 50, 72, 73, 91, 92, 108, 110, 111, 112, 113, 114, 115

    Index Graphiques

    Figure 1 modèle multidimensionnel de CIC (adapté de Byram,1997) 30

    Figure 2 modèle de développement de la sensibilité interculturelle (adapté de Bennett, 1993) 35

    Index Tableaux

    Tableau 1 - stratégies d'acculturation (adapté de Berry, 2000) 17

    Tableau 2 - autre exemples de modèles de courbe en U 21

    Tableau 3 - autres dénominations de la CIC (adapté de Fantini, 2006, in Understanding and assessing intercultural competence, Sinicrope, Norris et Watanabe, 2007) 27

    Annexe 1 : questionnaires et résultats de P, C et M

    Questionnaire général

    QUESTIONNAIRE GENERAL (10-12 min)

    Rappel : Les informations collectées seront gardées confidentielles.

    PARTIE A : Renseignements Généraux

    Nom :

    Prénom :

    Année de naissance :

    Sexe : M F

    Domaine ou filière :

    PARTIE B : Votre Séjour d'Etude Au Brésil

    Quel(s) semestre(s) avez-vous passé au Brésil? vous pouvez sélectionner plusieurs réponses S3 S4 S5 S6 S7

    S8 S9 S10

    Stage (précisez la durée) :

    Au cours du Doctorat (précisez la durée) :

    Durée totale du séjour (en mois) :

    Université d'accueil :

    Durant la période de votre séjour au Brésil, êtes-vous rentré(e) en France (vacances ou autres) ?

    OUI NON

    PARTIE C : Autres Expériences à l'Etranger

    Si vous avez déjà séjourné à l'étranger Avant ET / OU Pendant votre échange au Brésil, remplissez le tableau suivant* :

     

    SEJOUR 1

    SEJOUR 2

    SEJOUR 3

    SEJOUR 4

    SEJOUR 5

    Cadre du séjour** :

     
     
     
     
     

    Année du séjour :

     
     
     
     
     

    Durée du séjour :

     
     
     
     
     

    Pays visité :

     
     
     
     
     

    Bilan plutôt positif (+) OU

    Bilan plutôt négatif (-)

     
     
     
     
     

    AVANT

    ou

    PENDANT le Brésil

     
     
     
     
     

    * si plus de 5 séjours à l'étranger effectués, renseignez en priorité :

    (A) ceux non touristiques

    (B) ceux de plus de 15 jours

    **cadres :

    · Touristique / Privé Ex : vacances, séjour sportif, cours de langue, au pair, working holiday, ....

    · Professionnel / Humanitaire Ex : travail salarié, bénévolat, engagement associatif, ....

    · Scolaire / Universitaire Ex : échange scolaire, études universitaires, stage universitaire ....

    · AUTRE (précisez) :

    PARTIE D : Exposition internationale

    I) Comment évalueriez-vous votre exposition internationale (le degré auquel vous êtes confronté(e) à la vie au sens large au-delà de nos frontières) sur une échelle de 1 à 5?

    1 2 3 4 5

    (minimale) (intermédiaire) (maximale)

    AVANT votre séjour au Brésil : PENDANT votre séjour au Brésil :

    II) Comment évalueriez-vous votre conscience interculturelle (le niveau auquel vous êtes préoccupé(e) par, ou impliqué(e) dans, des affaires extraterritoriales) sur une échelle de 1 à 5?

    1 2 3 4 5

    (minimale) (intermédiaire) (maximale)

    AVANT votre séjour au Brésil : PENDANT votre séjour au Brésil :

    III) Quelles sont vos sources privilégiées d'exposition internationale / prise de conscience interculturelle?

    Sélectionnez 3 réponses au maximum et classez-les de 1 à 3

    (a) TV (b) Internet (c) Journaux (d) Radio (e) Livres

    (f) Famille (g) Amis (h) Études/scolarité (i) Activité professionnelle

    (j) Engagement associatif ou militant

    (k) AUTRES (précisez) :

    AVANT votre séjour au Brésil : 1) 2) 3)

    PENDANT votre séjour au Brésil : 1) 2) 3)

    PARTIE E : vous au Brésil

    * 1er mois

    1) Durant votre séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous ?

    1 2 3 4 5

    (Mal) (Intermédiaire) (Très bien)

    AU DEBUT*:
    À LA FIN :

    2) Au Brésil, par rapport à vos interactions sociales, était-il est facile de créer des liens avec d'autres personnes ou pas?

    1 2 3 4 5

    (difficile) (intermédiaire) (facile)

    AU DEBUT*:
    À LA FIN :

    3) Aujourd'hui, conseilleriez-vous à un autre étudiant de venir étudier au Brésil dans votre université ?

    OUI NON

    4a) Pendant vos études au Brésil, avez-vous vécu : vous pouvez cocher plusieurs réponses

    En famille En colocation Chez l'habitant

    En chambre universitaire En appartement seul AUTRE (précisez) :

    4b) Si en colocation, était-ce avec une ou des personnes d'origines : vous pouvez cocher plusieurs réponses

    Brésiliennes Françaises Étrangères

    5) Au quotidien, au-dedans et au-dehors de l'université au Brésil, comment pensez-vous avoir communiqué avec les autres?

    1 2 3 4 5

    (le moins possible) (moyennement) (le plus possible)

    AU DEBUT*:
    À LA FIN :

    6) Dans la vie de tous les jours, parmi vos relations, dialoguiez-vous principalement avec :

    (a) = 2 personnes (b) = 5 personnes (c) = 10 personnes (d) + 10

    personnes

    AU DEBUT*:
    À LA FIN :

    7) Rétrospectivement, comment vous sentiez-vous inséré(e) dans la vie brésilienne à l'issue de votre séjour?

    1 2 3 4 5

    (pas du tout) (moyennement) (complètement)

    Réponse :

    8) Vos interlocuteurs privilégiés étaient-ils : choisissez 3 réponses au maximum et classez-les de 1 à 3

    (a) Des étudiants brésiliens

    (b) Des Brésiliens non étudiants

    (c) Des étudiant internationaux non brésiliens

    (d) Des compatriotes français au Brésil comme vous

    (e) Votre famille et/ou vos amis en France

    (f) AUTRE (précisez) :

    AU DEBUT* : 1) 2) 3)

    À LA FIN : 1) 2) 3)

     

    9) Avez-vous eu le sentiment d'avoir changé à l'issue de votre séjour au Brésil?

    1 2 3 4 5

    (pas du tout) (dans une certaine mesure) (complètement)

    Réponse :

    10) Choisissez 1 mot qui serait le plus caractéristique pour qualifier votre expérience : (surlignez-le)

    Découverte

    Changement

    Rupture

    Faire une parenthèse

    Nouveauté

    Être déconnecté

    Explorer

    Continuité

    Suite

     

    AUTRE (précisez) :

     

    11) Pensez-vous que cette expérience va influencer d'une quelconque manière votre vie future?

    OUI NON

    12) Quel était votre niveau de portugais?

    1 2 3 4 5

    (débutant) (intermédiaire) (avancé) (expert)

    À votre arrivée :

    À l'issue du séjour :

     

    13) Écrivez UN MAXIMUM de 6 mots ou expressions qui sont représentatifs, selon vous, du Brésil ou de la culture brésilienne :

    1)

    2)

    3)

    4)

    5)

    6)

    14) Entre votre arrivée et votre départ, diriez-vous que vos représentations du Brésil ont beaucoup changé?

    OUI NON

    15)

    Globalement, combien êtes-vous satisfait(e) de votre séjour au Brésil?

    1 2 3 4 5

    (pas du tout) (moyennement) (tout à fait)

    À l'université :
    En général :

     
     

    16) Globalement, en terme de qualité de vie, de bien-être et satisfaction, que placeriez-vous en tête?

    Votre vie à LYON Votre vie au BRESIL

    17) Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc culturel pendant votre séjour au Brésil?

    OUI NON

    Échelle de communication interculturelle

    Ce questionnaire s'intéresse à la communication interculturelle.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 0 à 5 selon qu'elles s'appliquent à vous ou non.

    NE SAIS
    PAS

    PAS DU TOUT
    D'ACCORD

    PLUTOT PAS
    D'ACCORD

    MOYENNEMENT
    D'ACCORD

    PLUTOT
    D'ACCORD

    TOTALLEMENT
    D'ACCORD

    0

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Je donne souvent mon avis sur la façon dont se comportent les gens du coin

     

    2

    Lors de nos interactions, je montre souvent à mes interlocuteurs que je les comprends au travers de signaux verbaux ou non-verbaux (hochement de tête, sourire, gestuelle...)

     

    3

    Lors de nos interactions, je peux dire quand j'ai vexé une personne d'une autre culture

     

    4

    J'ai du mal à cerner les intentions des gens du coin lors de nos interactions

     

    5

    Je questionne mes habitudes

     

    6

    Je suis conscient(e) de l'image que je véhicule avec moi à l'étranger (en tant que Français(e))

     

    7

    Si besoin est, j'arrive à prendre en compte la différence culturelle quand je communique

     

    8

    Je trouve que les gens du coin ne m'intègrent pas assez

     

    9

    Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami avec une personne d'une autre culture

     

    10

    Je trouve difficile de me dévoiler à une personne d'une autre culture

     

    11

    Je me sens découragé(e) quand les gens du coin ne sont pas de mon avis

     

    12

    Je suis angoissé(e) quand je communique avec une personne d'une autre culture

     

    13

    Je me vexe facilement quand je communique avec une personne d'une autre culture

     

    14

    Je me décourage si les gens avec qui je parle ne me comprennent pas

     

    15

    Je me sens inférieur(e) quand je communique avec une personne d'une autre culture

     

    16

    Je n'accepte pas qu'une personne d'une autre culture remette ma propre culture en cause

     

    17

    La façon de faire des gens du coin est franchement bizarre

     

    18

    J'ai des difficultés à savoir ce que les gens du coin ont derrière la tête quand on parle

     

    19

    Je trouve difficile de parvenir à une compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture

     

    20

    Quand des gens du coin parlent, j'ai du mal à me joindre à la conversation

     

    Échelle de distance culturelle

    Ce questionnaire s'intéresse aux différences entre la France et le Brésil.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux items un score de 0 à 5 selon la perception que vous avez des différences entre ces deux pays.

    NE SAIS
    PAS

    PAS DU TOUT
    DIFFERENT

    UN PEU
    DIFFERENT

    ASSEZ
    DIFFERENT

    TRES
    DIFFERENT

    TOTALLEMENT
    DIFFERENT

    0

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Le climat et la météo

     

    2

    Les vêtements, la façon de s'habiller

     

    3

    La langue

     

    4

    L'enseignement supérieur, la vie à l'université

     

    5

    La nourriture, la cuisine

     

    6

    La place de la religion, du sacré ou de la spiritualité

     

    7

    Le niveau de vie, le confort

     

    8

    Les loisirs, passe-temps et distractions

     

    9

    La mentalité ou la façon de voir les choses

     

    10

    La vie en famille

     

    11

    La communication / la façon de parler / de se comporter / de rencontrer les gens

     

    12

    Les traditions et coutumes

     

    13

    La façon de se déplacer

     

    14

    Les habitations / l'architecture / l'organisation des villes et villages

     

    15

    Les formes d'arts et d'expressions (musique, peinture....)

     

    16

    l'organisation de la société / le système politique et social

     

    17

    L'environnement / la faune, la flore / les paysages

     

    18

    La façon de consommer et d'acheter

     

    19

    Les habitudes, la routine, la vie quotidienne

     

    20

    Les traditions, rituels, cérémonies, évènements et fêtes locales ou nationales

     

    Échelle de sensibilité interculturelle

    Ce questionnaire s'intéresse à votre vie quotidienne au Brésil.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon le niveau de difficulté approprié.

    AUCUNE
    DIFFICULTE

    DIFFICULTE
    FAIBLE

    DIFFICULTE
    MOYENNE

    DIFFICULTE
    ELEVEE

    DIFFICULTE
    EXTREME

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Vous faire comprendre

     

    2

    Comprendre le portugais / l'accent local

     

    3

    Comprendre les plaisanteries et l'humour propres aux gens du coin

     

    4

    Bien vous entendre avec les membres du sexe opposé

     

    5

    Parler de vous-même avec d'autres personnes

     

    6

    Vivre loin des vos proches

     

    7

    Bien vous entendre avec vos colocataires (si approprié - sinon ne pas répondre)

     

    8

    Vous habituer à la cuisine locale / trouver la nourriture que vous aimez

     

    9

    Vous habituer au rythme de vie

     

    10

    Vous habituer au climat

     

    11

    Vous sentir bien chez vous (dans votre logement)

     

    12

    Gérer les relations avec des personnes en position d'autorité ou de responsabilité (professeurs, administration, doyen )

     

    13

    Gérer une situation dans laquelle vous êtes confronté(e) à quelqu'un qui est désagréable, fâché(e) ou agressif(ve)

     

    14

    Gérer le fait que des gens vous fixent du regard

     

    15

    Gérer une situation dans laquelle vous n'êtes pas satisfait(e) des services qui vous ont été proposés

     

    16

    Utiliser les transports publics et vous déplacer

     

    17

    Faire les courses / du shopping / aller au marché / au fast-food...

     

    18

    Vous repérer, demander votre chemin

     

    19

    Participer à des activités de groupe

     

    20

    Comprendre la société dans laquelle vous vivez (système politique, organisation sociale ...)

     

    21

    S'adapter aux règles de bienséance locales

     

    22

    Comprendre les différences culturelles observées ou ressenties

     

    23

    Comprendre les valeurs locales / propres à la culture brésilienne

     

    24

    Vous intégrer à la culture locale

     

    25

    Comprendre la façon dont les autochtones voient le monde

     

    26

    Être capable de considérer les deux versants d'une question culturelle (le vôtre + celui des gens du coin)

     

    Échelle de soutien social

    Ce questionnaire s'intéresse au soutien dont vous avez pu bénéficier lors de votre séjour au Brésil.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon qu'elles vous correspondent ou non.

    PAS DU TOUT
    D'ACCORD

    PLUTOT PAS
    D'ACCORD

    MOYENNEMENT
    D'ACCORD

    PLUTOT
    D'ACCORD

    TOUT A FAIT
    D'ACCORD

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Ma famille fait de son mieux pour m'aider

     

    2

    Je suis satisfait(e) de mes contacts avec ma famille

     

    3

    Mes relations avec ma famille sont importantes pour moi

     

    4

    Je peux parler de mes problèmes à quelqu'un

     

    5

    Il y a quelqu'un auprès de moi pour me réconforter quand j'en ressens le besoin

     

    6

    Je reçois tout le soutien moral dont j'ai besoin

     

    7

    Il y a quelqu'un de prêt à m'aider pour prendre des décisions

     

    8

    Je peux compter sur mes amis restés en France

     

    9

    Je suis satisfait(e) de mes contacts avec mes amis restés en France

     

    10

    Mes relations avec mes amis restés en France sont importantes pour moi

     

    11

    Je peux compter sur mes nouveaux amis au Brésil

     

    12

    Je suis satisfait(e) de mes contacts avec mes nouveaux amis au Brésil

     

    13

    Mes relations avec mes nouveaux amis au Brésil sont importantes pour moi

     

    14

    La direction des ressources internationales et l'administration de l'université en France sont à mon écoute

     

    15

    La direction des ressources internationales et l'administration de l'université au Brésil sont à mon écoute

     

    16

    Au Brésil, j'ai des contacts avec des associations et/ou des lieux de culte

     

    17

    Au Brésil, le contact avec des associations et/ou des lieux de culte est important pour moi

     

    18

    Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes joies et mes peines

     

    Échelle d'efficacité interculturelle

    Ce questionnaire s'intéresse à diverses dimensions de votre séjour au Brésil.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon qu'elles s'appliquent à vous ou non.

    PAS DU TOUT
    VRAI

    UN PEU VRAI

    MOYENNEMENT
    VRAI

    SOUVENT VRAI

    TOUT A FAIT
    VRAI

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Je me sens à l'aise lors des activités sociales

     

    2

    C'est difficile pour moi de me faire des amis

     

    3

    Je trouve difficile de tenir une conversation avec la plupart des gens

     

    4

    Je suis généralement discret(ète) et effacé(e) en société

     

    5

    J'ai du mal à obtenir un renseignement quand j'en ai besoin

     

    6

    Si je suis dans le pétrin, je peux penser à une solution

     

    7

    J'ai du mal à participer aux débats en classe

     

    8

    J'ai du mal à m'adresser au personnel de l'université

     

    9

    J'ai confiance en moi quand je parle avec mes professeurs

     

    10

    Je suis sûr(e) de moi quand je pose une question en classe

     

    11

    C'est dur pour moi d'être en désaccord avec quelqu'un

     

    12

    J'ai confiance en mes compétences en portugais

     

    13

    Je me sens à l'aise quand je parle avec les gens du coin

     

    14

    J'ai des sujets de conversation en commun avec les gens du coin

     

    15

    J'apprécie les mêmes activités que la plupart des gens du coin

     

    16

    J'essaie de devenir ami avec les gens du coin

     

    17

    En général, je peux faire face à quoi que ce soit

     

    18

    Si j'aperçois une personne que je voudrais rencontrer, je vais vers elle au lieu d'attendre qu'elle vienne vers moi

     

    19

    Face à une situation inattendue, j'ai assez de ressource pour m'en sortir

     

    Échelle d'adaptation académique

    Ce questionnaire s'intéresse aux études et à la vie universitaire lors de votre séjour au Brésil.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez un score de 1 à 5 à chaque proposition en fonction de la façon dont vous avez vécu les choses.

    PAS DU TOUT
    VRAI

    UN PEU VRAI

    MOYENNEMENT
    VRAI

    PLUTOT VRAI

    TOUT A FAIT
    VRAI

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    J'apprécie les études et le travail universitaire

     

    2

    Je me tiens à jour de mon travail universitaire

     

    3

    Je ne travaille pas autant que je le devrais

     

    4

    Je ne suis pas motivé(e) pour étudier

     

    5

    Je vais toujours en cours

     

    6

    Je trouve les études et le travail universitaire difficiles

     

    7

    Je n'ai pas de bons résultats aux examens

     

    8

    Je suis satisfait(e) de mes résultats à l'université

     

    9

    Je ne réussis pas très bien à l'université compte tenu de tous mes efforts et de mon travail

     

    10

    Je suis satisfait(e) des cours que j'ai choisis

     

    11

    Je suis satisfait(e) des enseignants et chargés de cours

     

    12

    Je m'intègre bien à l'université

     

    13

    Je participe à des activités extra-scolaires à l'université

     

    14

    Je suis satisfait(e) des activités extrascolaires proposées à l'université

     

    15

    Je m'adapte bien à la vie étudiante

     

    16

    J'ai plusieurs amis dans ma ou mes classe(s)

     

    17

    Je suis satisfait(e) de ma vie sociale à l'université

     

    18

    Je suis content(e) de ma décision de suivre des cours à cette université

     

    19

    J'ai du mal à gérer le stress engendré par mes études

     

    20

    Je comprends ce que l'on attend de moi en cours

     

    21

    Je me sens dépassé(e) par les exigences scolaires

     

    22

    Je me fais trop de soucis pour mes notes et les examens

     

    23

    Je trouve que certains livres sont trop durs à comprendre

     

    24

    Je trouve que certains professeurs sont trop durs à comprendre

     

    25

    On nous demande trop de travail dans certains cours

     

    26

    Ça ne colle pas entre certains professeurs et moi

     

    Échelle de stress d'acculturation

    Ce questionnaire s'intéresse à certains aspects du processus d'acclimatation que vous avez traversé pendant votre séjour au Brésil. Il peut s'agir ici de premières impressions mais aussi de sentiments plus durables. Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 1 à 5 en fonction de votre ressenti d'alors.

    PAS DU TOUT
    D'ACCORD

    PLUTOT PAS
    D'ACCORD

    MOYENNEMENT
    D'ACCORD

    PLUTOT
    D'ACCORD

    TOTALLEMENT
    D'ACCORD

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    J'ai le mal du pays : je ne me sens pas chez moi et mes compatriotes me manquent

     

    2

    Je me sens discriminé(e) ou pas sur un pied d'égalité avec les gens du coin

     

    3

    Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs

     

    4

    Je me sens nerveux(se) quand je prends la parole en portugais

     

    5

    Participer aux activités sociales m'intimide

     

    6

    En général, je me fais discret(ète) car je suis étranger(ère)

     

    7

    Je me sens coupable d'avoir laissé ma famille et mes amis derrière moi

     

    8

    Je me sens sous pression ici

     

    9

    Les autres affichent du mépris ou de l'indifférence envers moi (non verbalement)

     

    10

    Les autres affichent du mépris ou de l'indifférence envers moi (verbalement)

     

    11

    Les autres affichent du mépris ou de l'indifférence envers moi (en s'en prenant à ma personne physique)

     

    12

    Ça me touche quand les autres ne comprennent pas ma façon de voir les choses

     

    13

    Je trouve que les gens ne vont pas assez vers moi

     

    14

    Je suis victime de préjugés et de stéréotypes

     

    Échelle de bien-être

    Ce questionnaire s'intéresse à certains aspects de votre vie sociale au Brésil.

    Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon qu'elles vous correspondent ou non.

    PAS DU TOUT

    UN PEU

    MOYENNEMENT

    BEAUCOUP

    TOUT A FAIT

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Votre hygiène de vie a-t-elle changée?

    (+/- manger +/- dormir +/- d'énergie +/- fatigué(e))

     

    2

    Vous sentez vous exclu(e) socialement, discriminé(e) ou rejeté(e)?

     

    3

    Vous sentez-vous seul(e) et faiblement entouré(e)?

     

    4

    Si l'occasion se présente, allez-vous vers les gens du coin / les étudiants brésiliens?

     

    5

    Si l'occasion se présente, allez-vous vers des compatriotes?

     

    6

    Si l'occasion se présente, allez-vous vers d'autres étudiants internationaux / des gens d'une autre nationalité?

     

    7

    Êtes-vous content(e) de la tournure qu'a prise votre vie ici?

     

    8

    Les gens vous ennuient-ils ou vous irritent -ils?

     

    9

    Vous sentez-vous à l'aise dans votre environnement?

     

    10

    Êtes vous plus souvent déprimé(e) que joyeux(se)?

     

    11

    Est-il difficile de parler avec de nouvelles personnes / de se faire de nouveaux amis?

     

    12

    Vous sentez-vous capable d'aborder les gens / d'aller vers les autres?

     

    13

    Participez-vous régulièrement à des activités de groupe?

     

    14

    Êtes-vous membre d'un club ou d'une association locale?

     

    15

    Êtes-vous souvent malade?

     

    16

    Préférez-vous rester seul(e)?

     

    17

    Avez-vous tendance à être d'un tempérament plus solitaire qu'en France?

     

    18

    Trouvez-vous les activités sociales auxquelles vous participez au Brésil différentes de celles que vous feriez en France?

     

    19

    Avez-vous déjà souhaité être de retour chez vous, en France?

     

    20

    Avez-vous tendance à avoir moins confiance en vous qu'en France?

     

    Brief COPE

    Pour ce questionnaire, nous vous demandons de penser aux situations difficiles ou stressantes que vous avez pu vivre au Brésil. Il y a beaucoup de manière de faire face au stress. Il s'agit ici d'indiquer ce que vous avez fait ou avez ressenti habituellement lors d'un événement stressant.

    Pour chaque proposition, donnez un score de 1 à 5 selon que vous avez eu tendance ou non à réagir de cette façon.

    JAMAIS

    RAREMENT

    PARFOIS

    SOUVENT

    TOUJOURS

    1

    2

    3

    4

    5

    1

    Faire quelque chose pour moins y penser (travailler, aller au cinéma, sortir etc...)

     

    2

    Prendre les choses en main pour essayer d'améliorer la situation

     

    3

    Recevoir l'aide et le conseil d'autres personnes

     

    4

    Renoncer à essayer de résoudre la situation

     

    5

    Apprendre à vivre avec

     

    6

    Exprimer mes sentiments négatifs

     

    7

    Rechercher le soutien et la compréhension de quelqu'un

     

    8

    Rechercher les aspects positifs dans ce qu'il m'arrive, voir le bon côté des choses

     

    9

    Me critiquer, me reprocher les choses qui m'arrivent

     

    10

    Prendre les choses avec humour

     

    11

    Prier, méditer, faire de la relaxation

     

    12

    Me dire que ce n'est pas réel, refuser de croire que ça m'arrive

     

    Résultats de M, C et P au questionnaire général

    Qu

    P

    C

    M

    I

    Avt 3
    Pdt 3

    Avt 5
    Pdt 5

    Avt 2
    Pdt 4

    II

    Avt 4
    Pdt 4

    Avt 5
    Pdt 5

    Avt 1
    Pdt 3

    III

    Avt F-G-H
    Pdt F-G-H

    Avt H-I-G
    Pdt H-I-G

    Avt A/B-C-H
    Pdt G-A-C

    1

    Db 4
    Fin 5

    Db 4
    Fin 5

    Db 3
    Fin 5

    2

    Db 5
    Fin 5

    Db 3
    Fin 5

    Db 3
    Fin 5

    3

    Oui

    Oui

    Oui

    4

    Fam - Col
    Hab - Brsl

    Hab
    Brsl

    Fam - Col
    Frç - Etrg

    5

    Db 5
    Fin 5

    Db 3
    Fin 5

    Db 2
    Fin 4

    6

    Db B
    Fin C

    Db D
    Fin D

    Db B
    Fin D

    7

    4

    4

    4

    8

    Db B-A-E
    Fin B-D-C

    Db C-D-A
    Fin B-A-D

    Db A-D-C
    Fin B-C-A

    9

    4

    4

    3

    10

    Suite

    Retrouvailles

    Découverte

    11

    Oui

    Oui

    Oui

    12

    Db 2
    Fin 3

    Db 1
    Fin 4

    Db 1
    Fin 4-5

    13

    Consommation
    Fête
    Famille
    Sédentarité
    Chaleur
    Soutien

    Communauté
    Énergie
    Joie de vivre
    spiritualité
    Violence
    Différences

    Nossa
    Meu Deus
    com saudades
    oi!! Tudo bem?
    Fica com deus
    bah

    14

    Oui

    Oui

    Non

    15

    Stg 4
    Gnrl 5

    Stg 2 - 4
    Gnrl 4

    Univ 3
    Gnrl 4

    16

    Lyon

    Brésil

    Lyon

    17

    Oui

    Oui

    Non

    Résultats de M, C et P à l'Échelle de communication interculturelle

    Qu

    P

    C

    M

    1

    4

    2

    2

    2

    5

    5

    5

    3

    4

    3

    5

    4

    1

    2

    2

    5

    3

    4

    4

    6

    4

    5

    3

    7

    4

    5

    3

    8

    2

    2

    1

    9

    2

    1

    1

    10

    1

    1

    2

    11

    2

    2

    1

    12

    1

    1

    1

    13

    1

    1

    1

    14

    2

    3

    2

    15

    1

    3

    1

    16

    2

    4

    2

    17

    2

    1

    1

    18

    3

    3

    2

    19

    2

    2

    2

    20

    3

    3

    1

    TTL

    81/100

    81/100

    88/100

    SCR

    81/100

    81/100

    88/100

    Résultats de M, C et P à l'Échelle de distance culturelle

    Qu

    P

    C

    M

    1

    3

    5

    4

    2

    4

    4

    3

    3

    3

    5

    4

    4

    4

    4

    5

    5

    4

    4

    4

    6

    4

    5

    5

    7

    3

    3

    4

    8

    3

    3

    3

    9

    4

    5

    4

    10

    4

    4

    3

    11

    4

    5

    4

    12

    4

    5

    4

    13

    5

    3

    4

    14

    5

    3

    4

    15

    3

    4

    3

    16

    3

    3

    0

    17

    4

    3

    4

    18

    4

    4

    4

    19

    4

    5

    2

    20

    4

    5

    3

    TTL

    42/100

    38/100

    43/95

    SCR

    42/100

    38/100

    45,2/100

    Résultats de M, C et P à l'Échelle de sensibilité interculturelle

    Qu

    P

    C

    M

    1

    2

    3

    2

    2

    2

    2

    1

    3

    3

    2

    2

    4

    3

    3

    1

    5

    2

    2

    1

    6

    3

    3

    1

    7

    4

    3

    3

    8

    2

    3

    1

    9

    2

    3

    1

    10

    2

    1

    1

    11

    3

    3

    2

    12

    1

    3

    1

    13

    3

    4

    1

    14

    2

    2

    2

    15

    2

    4

    2

    16

    4

    2

    3

    17

    3

    2

    1

    18

    2

    2

    1

    19

    3

    2

    1

    20

    2

    2

    4

    21

    2

    3

    2

    22

    2

    2

    2

    23

    2

    2

    2

    24

    1

    2

    2

    25

    3

    2

    2

    26

    3

    2

    1

    TTL

    93/130

    92/130

    113/130

    SCR

    71,5/100

    70,7/100

    86,9/100

    Résultats de M, C et P à l'Échelle de soutien social

    Qu

    P

    C

    M

    1

    3

    5

    5

    2

    5

    4

    5

    3

    5

    3

    4

    4

    5

    4

    5

    5

    4

    4

    5

    6

    4

    4

    5

    7

    2

    3

    3

    8

    3

    3

    5

    9

    5

    2

    4

    10

    5

    4

    4

    11

    5

    4

    3

    12

    5

    5

    5

    13

    4

    5

    4

    14

    4

    3

    2

    15

    4

    2

    2

    16

    4

    5

    1

    17

    4

    5

    1

    18

    4

    4

    5

    TTL

    76/90

    71/90

    68/90

    SCR

    84,4/100

    78,8/100

    75,5/100

    Résultats de M, C et P à l'Échelle d'efficacité interculturelle

    Qu

    P

    C

    M

    1

    4

    5

    4

    2

    1

    1

    1

    3

    2

    1

    1

    4

    2

    1

    2

    5

    3

    1

    1

    6

    4

    5

    5

    7

    2

    2

    1

    8

    1

    1

    1

    9

    4

    3

    4

    10

    4

    2

    4

    11

    1

    1

    1

    12

    3

    4

    5

    13

    4

    3

    5

    14

    2

    5

    5

    15

    2

    4

    4

    16

    4

    5

    5

    17

    4

    4

    4

    18

    4

    5

    4

    19

    3

    5

    5

    TTL

    72/95

    84/95

    88/95

    SCR

    75,7/100

    88,4/100

    92,6/100

    Résultats de M, C et P à l'Échelle d'adaptation académique

    Qu

    P

    C

    M

    1

    -

    -

    2

    2

    -

    -

    1

    3

    -

    -

    5

    4

    -

    -

    2

    5

    -

    -

    3

    6

    -

    -

    1

    7

    -

    -

    1

    8

    -

    -

    5

    9

    -

    -

    1

    10

    -

    -

    2

    11

    -

    -

    3

    12

    -

    -

    5

    13

    -

    -

    1

    14

    -

    -

    1

    15

    -

    -

    4

    16

    -

    -

    2

    17

    -

    -

    3

    18

    -

    -

    3

    19

    -

    -

    1

    20

    -

    -

    5

    21

    -

    -

    1

    22

    -

    -

    1

    23

    -

    -

    2

    24

    -

    -

    1

    25

    -

    -

    1

    26

    -

    -

    1

    TTL

    -

    -

    95/130

    SCR

    -

    -

    73/100

    Résultats de M, C et P à l'Échelle de stress d'acculturation

    Qu

    P

    C

    M

    1

    2

    2

    1

    2

    1

    2

    1

    3

    1

    2

    1

    4

    1

    3

    1

    5

    2

    2

    1

    6

    3

    3

    1

    7

    3

    4

    2

    8

    4

    4

    1

    9

    1

    1

    1

    10

    1

    1

    1

    11

    1

    1

    1

    12

    3

    4

    1

    13

    2

    1

    1

    14

    4

    1

    1

    TTL

    55/70

    53/70

    69/70

    SCR

    78,5

    75,7/100

    98,5

    Résultats de M, C et P à l'Échelle de bien-être

    Qu

    P

    C

    M

    1

    3

    2

    2

    2

    1

    1

    1

    3

    2

    1

    1

    4

    3

    4

    5

    5

    3

    2

    3

    6

    3

    3

    3

    7

    4

    5

    3

    8

    2

    2

    1

    9

    4

    4

    5

    10

    1

    1

    1

    11

    4

    1

    2

    12

    3

    4

    5

    13

    4

    5

    3

    14

    2

    5

    1

    15

    1

    1

    1

    16

    1

    1

    1

    17

    4

    1

    1

    18

    4

    3

    2

    19

    2

    1

    1

    20

    3

    2

    2

    TTL

    70/100

    87/100

    84/100

    SCR

    70/100

    87/100

    84/100

    Résultats de M, C et P au Brief COPE

    Qu

    P

    C

    M

    1

    4

    2

    3

    2

    2

    4

    4

    3

    4

    5

    5

    4

    2

    2

    2

    5

    3

    3

    4

    6

    2

    4

    2

    7

    4

    5

    3

    8

    4

    5

    4

    9

    1

    5

    3

    10

    5

    3

    4

    11

    4

    3

    1

    12

    2

    3

    1

    13

    Oui

    Oui

    Oui

    TTL

    43/60

    44/60

    42/60

    SCR

    71,6/100

    73,3/100

    70/100

    Résultats totaux de M, C et P par questionnaire

     

    P

    C

    M

    Échelle de
    communication
    interculturelle

    0.810

    0.810

    0.880

    Échelle de distance
    culturelle

    0.420

    0.380

    0.452

    Échelle de
    sensibilité
    interculturelle

    0.715

    0.707

    0.869

    Échelle de soutien
    social

    0.844

    0.788

    0.755

    Échelle d'efficacité
    interculturelle

    0.757

    0.884

    0.926

    Échelle
    d'adaptation
    académique

    -

    -

    0.730

    Échelle de stress
    d'acculturation

    0.785

    0.757

    0.985

    Échelle de bien-
    être

    0.700

    0.870

    0.840

    Brief COPE

    0.716

    0.733

    0.700

    TOTAL

    5.747 / 8

    5.929 / 8

    7.137 / 9

    SCORE

    71,8 / 100

    74,1 / 100

    79,3 / 100

    Annexe 2 : questionnaires originaux

    Intercultural Sensitivity Scale (ISS)

    Auteur(s) : Chen et Starosta (2000)

    Échelle : (1) Strongly Disagree

    (2) Disagree

    (3) Uncertain

    (4) Agree

    (5) Strongly agree

    1 I enjoy interacting with people from different cultures

    2 I think people from other cultures are narrow-minded

    3 I am pretty sure of myself in interacting with people from different cultures

    4 I find it very hard to talk in front of people from different cultures

    5 I always know what to say when interacting with people from different cultures

    6 I can be as sociable as I want to be when interacting with people from different cultures

    7 I don't like to be with people from different cultures

    8 I respect the values of people from different cultures

    9 I get upset easily when interacting with people from different cultures

    10 I feel confident when interacting with people from different cultures

    11 I tend to wait before forming an impression of culturally-distinct counterparts

    12 I often get discouraged when I am with people from different cultures

    13 I am open-minded to people from different cultures

    14 I am very observant when interacting with people from different cultures

    15 I often feel useless when interacting with people from different cultures

    16 I respect the ways people from different cultures behave

    17 I try to obtain as much information as I can when interacting with people from different

    cultures

    18 I would not accept the opinions of people from different cultures

    19 I am sensitive to my culturally-distinct counterpart's subtle meanings during our interaction

    20 I think my culture is better than other cultures

    21 I often give positive responses to my culturally different counterpart during our interaction

    22 I avoid those situations where I will have to deal with culturally-distinct persons

    23 I often show my culturally-distinct counterpart my understanding through verbal or

    nonverbal cues

    24 I have a feeling of enjoyment towards differences between my culturally-distinct

    counterpart and me

    Cultural Distance Scale (CDS)

    Auteur(s) : Babiker, Cox et Miller (1980)

    Échelle : (0) No difference compared to your home country

    (1) Slight difference

    (2) Moderate difference

    (3) Great difference

    (4) Extreme difference

    1 Climate/weather

    2 Physical environment (such as the neighborhood, the density of population)

    3 Transportation tool or style

    4 Food (the cooking and eating style)

    5 Clothing

    6 The types of leisure activities/games and recreational activities

    7 Pace of life

    8 Material comfort (standard of living)

    9 Language

    10 Communication style (such as directness or indirectness)

    11 General education level for most people

    12 Education style (such as class interaction, teacher's expectation)/kind of school

    13 Religion/praying

    14 Family structure (such as the general size of family, generations living together)

    15 The usual age of getting married

    16 The values of family/family life

    17 Forming friendship

    Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) - version 1

    Auteur(s) : Ward et Kennedy (1999) Échelle : (1) No Difficulty

    (2) Slight Difficulty

    (3) Moderate Difficulty

    (4) Great Difficulty

    (5) Extreme Difficulty

    1 Making friends

    2 Using the transport system

    3 Making yourself understood

    4 Getting used to the pace of life

    5 Going shopping

    6 Going to social events/gatherings/functions

    7 Worshipping in your usual way

    8 Talking about yourself with others

    9 Understanding jokes and humor

    10 Dealing with someone who is unpleasant/cross/aggressive

    11 Getting used to the local food/finding food you enjoy

    12 Following rules and regulations

    13 Dealing with people in authority

    14 Dealing with the bureaucracy

    15 Making yourself understood

    16 Adapting to local accommodation

    17 Communicating with people of a different ethnic group

    18 Relating to members of the opposite sex

    19 Dealing with unsatisfactory service

    20 Finding your way around

    21 Dealing with the climate

    22 Dealing with people staring at you

    23 Going to coffee shops/ food stalls/restaurants/fast food outlets

    24 Understanding the local accent/ language

    25 Living away from family members overseas/independently from your parents

    26 Adapting to local etiquette

    27 Getting used to the population density

    28 Relating to older people

    29 Dealing with people of higher status

    30 Understanding what is required of you at university

    31 Coping with academic work

    32 Dealing with foreign staff at the university

    33 Expressing your ideas in class

    34 Living with your host family

    35 Accepting/understanding the local political system

    36 Understanding the locals' world view

    37 Taking a local perspective on the culture

    38 Understanding the local value system

    39 Seeing things from the locals' point of view

    40 Understanding cultural differences

    41 Being able to see two sides of an intercultural issue

    Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) - version 2

    Auteur(s) : Ward et Kennedy (1999)

    Échelle : (1) No Difficulty

    (2) Slight Difficulty

    (3) Moderate Difficulty

    (4) Great Difficulty

    (5) Extreme Difficulty

    1 Making friends

    2 Finding food that you enjoy

    3 Following rules and regulations

    4 Dealing with people in authority

    5 Taking a _____ (host country) perspective on the culture

    6 Using the transport system

    7 Dealing with bureaucracy

    8 Understanding the (host country) value system

    9 Making yourself understood

    10 Seeing things from a 's (host national's) point of view

    11 Going shopping

    12 Dealing with someone who is unpleasant

    13 Understanding jokes and humor

    14 Accommodation

    15 Going to social gatherings

    16 Dealing with people staring at you

    17 Communicating with people of a different ethnic group

    18 Understanding ethnic or cultural differences

    19 Dealing with unsatisfactory service

    20 Worshipping

    21 Relating to members of the opposite sex

    22 Finding your way around.

    23 Understanding the (host country's) political system

    24 Talking about yourself with others

    25 Dealing with the climate

    26 Understanding the host country's) world view

    27 Family relationships

    28 The pace of life

    29 Being able to see two sides of an inter-cultural issue

    Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) - traduction

    Auteur(s) : Ait Ghezala-Rossier (2003)

    Échelle : (1) Pas de difficulté

    (2) Difficulté légère

    (3) Difficulté modérée

    (4) Grosse difficulté

    (5) Difficulté extrême

    1 Se faire des amis

    2 Utiliser les transports publics

    3 Se faire comprendre

    4 S'habituer au rythme de vie

    5 Faire du shopping

    6 Se rendre à des manifestations sociales / rassemblements / réunions

    7 Prier comme d'habitude

    8 Parler de soi-même avec d'autres personnes

    9 Comprendre les plaisanteries et l'humour

    10 Gérer une situation dans laquelle vous êtes confronté(e) à quelqu'un qui est désagréable/

    fâché(e) / agressif (ve)

    11 S'habituer à la nourriture locale / trouver la nourriture que vous aimez

    12 Suivre les règles et les règlements

    13 Gérer les relations avec les personnes responsables

    14 Gérer les situations dans lesquelles vous êtes confronté(e) à la bureaucratie

    15 Savoir se faire comprendre

    16 S'adapter aux logements locaux

    17 Communiquer avec des personnes provenant d'un groupe ethnique différent

    18 S'entendre avec les membres du sexe opposé

    19 Gérer une situation dans laquelle vous n'êtes pas satisfait(e) des services qui vous ont été

    proposés

    20 Trouver son chemin

    21 Gérer les différences climatiques

    22 Gérer le fait que des personnes vous fixent du regard

    23 Allez dans un café / au marché / au restaurant / au fast-food

    24 Comprendre l'accent / la langue locale

    25 Vivre loin des membres de sa famille /indépendant de ses parents

    26 S'adapter aux règles de bienséance locales

    27 S'habituer à la densité de la population

    28 S'entendre avec des personnes âgées

    29 Gérer une situation impliquant des personnes de haut statut social

    30 Comprendre ce qu'on attend de vous à l'Université

    31 Gérer le travail académique

    32 Gérer les relations avec les professeurs étrangers

    33 Exprimez ses idées en classe

    34 Vivre avec les gens avec ou chez qui vous logez

    35 Accepter / comprendre le système politique local

    36 Comprendre la perception du monde des gens du coin

    37 Adopter la culture locale

    38 Comprendre les valeurs locales

    39 Voir les choses du même point de vue que les gens du coin

    40 Comprendre les différences culturelles

    41 Etre capable de considérer les deux versants d'une question culturelle

    Multidimensional Scale of Perceived Social Support (MSPSS)

    Auteur(s) : Zimet, Dahlem, Zimet et Farley (1988)

    Échelle : (1) Very Strongly Disagree

    (2) Strongly Disagree

    (3) Mildly Disagree

    (4) Neutral

    (5) Mildly Agree

    (6) Strongly Agree

    (7) Very Strongly Agree

    1 There is a special person who is around when I am in need

    2 There is a special person with whom I can share my joys and sorrows

    3 My family really tries to help me

    4 I get the emotional help and support I need from my family

    5 I have a special person who is a real source of comfort to me

    6 My friends really try to help me

    7 I can count on my friends when things go wrong

    8 I can talk about my problems with my family

    9 I have friends with whom I can share my joys and sorrows

    10 There is a special person in my life who cares about my feelings

    11 My family is willing to help me make decisions

    12 I can talk about my problems with my friends

    General Self-Efficacy Scale (GSES)

    Auteur(s) : Schwarzer et Jerusalem (1995)

    Échelle : (1) Not true at all

    (2) Hardly true

    (3) Moderately true

    (4) Exactly true

    1 I can always manage to solve difficult problems if I try hard enough

    2 If someone opposes me, I can find the means and ways to get what I want

    3 It is easy for me to stick to my aims and accomplish my goals

    4 I am confident that I could deal efficiently with unexpected events

    5 Thanks to my resourcefulness, I know how to handle unforeseen situations

    6 I can solve most problems if I invest the necessary effort

    7 I can remain calm when facing difficulties because I can rely on my coping abilities

    8 When I am confronted with a problem, I can usually find several solutions

    9 If I am in trouble, I can usually think of a solution

    10 I can usually handle whatever comes my way

    Auto-efficacité Généralisée

    Auteur(s) : Dumont, Schwarzer et Jerusalem (2000)

    Échelle : (1) Pas du tout vrai

    (2) À peine vrai

    (3) Moyennement vrai

    (4) Totalement vrai

    1 Je peux toujours arriver à résoudre mes difficultés si j'essaie assez fort

    2 Si quelqu'un s'oppose à moi, je peux trouver une façon pour obtenir ce que je veux

    3 C'est facile pour moi de maintenir mon attention sur mes objectifs et accomplir mes buts

    4 J'ai confiance que je peux faire face efficacement aux évènements inattendus

    5 Grâce à ma débrouillardise, je sais comment faire face aux situations imprévues

    6 Je peux résoudre la plupart de mes problèmes si j'investis les efforts nécessaires

    7 Je peux rester calme lorsque je suis confronté à des difficultés car je peux me fier à mes

    habiletés pour faire face aux problèmes

    8 Lorsque je suis confronté à un problème, je peux habituellement trouver plusieurs solutions

    9 Si je suis « coincé », je peux habituellement penser à ce que je pourrais faire

    10 Peu importe ce qui m'arrive, je suis capable d'y faire face généralement

    Cross-Cultural Social-Efficacy Scale for Students (CCSESS)

    Auteur(s) : Fan et Mak (1998)

    Échelle : (1) Strongly Agree ? (4) Neither ? (7) Strongly Disagree

    1 I do not handle myself well in social gatherings

    2 It is difficult for me to make new friends

    3 I have difficulties making new friends at university

    4 I find it difficult to hold a conversation with most people

    5 I have difficulties participating in class discussions

    6 I am usually quiet and passive in social situations

    7 I have difficulties getting a data when I want one

    8 I have difficulties talking to university staff

    9 It is difficult for me to express a different opinion

    10 I feel confident asking a lecturer a question

    11 I feel confident talking to my lecturers

    12 I feel confident in asking questions in class

    13 I am confident of my language skills

    14 I feel comfortable requesting information

    15 I have common interests with local people

    16 I have common topics for conversation with local people

    17 I enjoy activities that most local people enjoy

    18 When I'm trying to become friends with someone who seems uninterested at first, I don't

    give up easily

    19 If I see someone I would like to meet, I go to that person instead of waiting for him or her to

    come to me

    20 I feel confident in joining a student organization

    Student Adjustment to College Questionnaire (SACQ)

    Auteur(s) : Baker et Siryk (1989)

    Échelle : (1) apply close to me ? (9) doesnt apply to me at all

    1 Fits in well with college environment

    2 Feels tense or nervous

    3 Keeps up-to-date with academic work

    4 Is meeting people and making friends

    5 Is definite about reasons for being in college

    6 Finds academic work difficult

    7 Feels blue and moody

    8 Is very involved with college social activities

    9 Is adjusting well to college

    10 Does not function well during exams

    11 Feels tired a lot lately

    12 Being independent has not been easy

    13 Is satisfied with academic performance

    14 Has informal contact with professors

    15 Is pleased with decision to go to college

    16 Is pleased about decision to attend this college

    17 Does not work as hard as he or she should

    18 Has several close social ties

    19 Has well-defined academic goals

    20 Is not able to control emotions well lately

    21 Does not feel smart enough for course work

    22 Is lonesome for home

    23 Considers college degree important

    24 Appetite is good

    25 Does not use study time efficiently

    26 Enjoys living in a dormitory

    27 Enjoys writing papers for courses

    28 Has a lot of headaches

    29 Is not motivated to study

    30 Is satisfied with extracurricular activities

    31 Has thought about seeking psychological help recently

    32 Doubts value of college degree

    33 Gets along well with roommates

    34 Would prefer to be at another college

    35 Gained or lost a lot of weight lately

    36 Is satisfied with variety of courses

    37 Has adequate social skills

    38 Gets angry too easily lately

    39 Has trouble concentrating when studying

    40 Is not sleeping well

    41 Does not do well academically, considering effort

    42 Has difficulty feeling at ease with others at college

    43 Is satisfied with quality of courses

    44 Attends classes regularly

    45 Sometimes thinking gets muddled too easily

    46 Is satisfied with social participation

    47 Expects to finish bachelor's degree

    48 Does not mix well with opposite sex

    49 Worries a lot about college expenses

    50 Enjoys academic work

    51 Feels lonely a lot

    52 Has trouble getting started on homework

    (?)

    54 Is satisfied with program of courses

    55 Feels in good health

    56 Feels different from others in undesirable ways

    57 Would rather be home

    58 Most interests are not related to course work

    59 Is thinking about transferring to another college

    60 Thinks a lot about dropping out of college permanently

    61 Is thinking about taking time off from college

    62 Is satisfied with professors

    63 Has good friends to talk about problems with

    64 Has trouble coping with college stress

    65 Is satisfied with social life

    66 Is satisfied with academic situation

    (?)

    Student Academic Stress Scale (SASS)

    Auteur(s) : Busari (2011)

    Échelle : (1) None of the Time

    (2) A Little of the Time

    (3) Some of the Time

    (4) Most of the Time

    (5) All of the Time

    1 My work built up so much that I feel like crying

    2 I feel emotional

    3 My emotions stop me from studying

    4 I yelled at family or friends

    5 I feel emotionally drained by academic institution

    6 I feel I was lazy when it came to academic work

    7 I procrastinated on assignments

    8 I am been distracted in class

    9 I am unable to study as required

    10 I have trouble concentrating in class

    11 I try to avoid class if possible

    12 I use alcohol or drugs to enable me study well

    13 I have trouble remembering my notes

    14 I couldn't breathe

    15 I have difficulty eating

    16 My hands are sweaty

    17 I have had a lot of trouble sleeping

    18 I have headaches

    19 I feel overwhelmed by the demands of study

    20 I feel worried about coping with my studies

    21 There is so much going on that I can't think straight

    22 I miss too many of my lectures

    23 I don't enough time in studying

    24 I am not really sure am interested in reading

    25 At times am unable to express myself in words

    26 I am afraid to speak or discuss in the lecture room

    27 I feel academic programme is too cumbersome for me

    28 I can't keep my mind on my studies

    29 I have trouble studying effectively

    30 A times I don't feel like studying

    31 I feel am too slow in reading compared to others

    32 I worried too much about marks to obtain in my examination

    33 I feel am getting low marks

    34 I would like to stop going to school

    35 I have no stable place to study

    36 I don't really like my course of study

    37 I feel some textbooks are too hard for me to understand

    38 I feel some lecturers are too hard for me to understand

    39 I feel so much restless while receiving lectures

    40 There are not enough good books in the library

    41 Too much work is required in some courses

    42 I feel am not getting along with some lecturers

    43 I feel some lecturers lack interest in their students

    44 Some courses are too dull and boring

    45 Some lecturers are not friendly to students

    46 I feel lecturers are not considerate of students' feelings

    47 Some lecturers give unfair tests to students

    48 I feel I have poor memory

    49 I have trouble making up my mind about my academic work

    50 I am too forgetful and easily discouraged about academic work

    Acculturative Stress Scale for International Students (ASSIS)

    Auteur(s) : Sandhu et Asrabadi (1994)

    Échelle : (1) Strongly Disagree

    (2)

    (3) Not Sure

    (4)

    (5) Strongly Agree

    1 Homesickness bothers me

    2 I feel uncomfortable to adjust to new foods

    3 I am treated differently in social situations

    4 Others are sarcastic toward my cultural values

    5 I feel nervous to communicate in English

    6 I feel sad living in unfamiliar surroundings

    7 I fear for my personal safety because of my different cultural background

    8 I feel intimidated to participate in social activities

    9 Others are biased toward me

    10 I feel guilty to leave my family and friends behind

    11 Many opportunities are denied to me

    12 I feel angry that my people are considered inferior here

    13 Multiple pressures are placed upon me after migration

    14 I feel angry that I receive unequal treatment

    15 People show hatred toward me non-verbally

    16 It hurts when people don't understand my cultural values

    17 I am denied what I deserve

    18 I frequently relocate for fear of others

    19 I feel low because of my cultural background

    20 Others don't appreciate my cultural values

    21 I miss the people and country of my origin

    22 I feel uncomfortable to adjust to new cultural values

    23 I feel that my people are discriminated against

    24 People show hatred toward me through actions

    25 I feel that my status in this society is low due to my cultural background

    26 I am treated differently because of my race

    27 I feel insecure here

    28 I don't feel a sense of belonging here (community)

    29 I am treated differently because of my colour

    30 I feel sad to consider my people's problems

    31 I generally keep a low profile due to fear

    32 I feel some people don't associate with me because of my ethnicity

    33 People show hatred toward me verbally

    34 I feel guilty that I am living a different lifestyle here

    35 I feel sad leaving my relatives behind

    36 I worry about my future for not being able to decide whether to stay here, or go back

    Bio-Psycho-Social Health Index (BPSHI)

    Auteur(s) : Tonks et Paranjpe (1999)

    Échelle : (1) Never

    (2) Sometimes

    (3) Always

    1 Do you enjoy exercising?

    2 Do you exercise regularly (2 times a week or more?)

    3 Do you eat meals at regular times each day?

    4 Are you concerned about eating only healthy foods?

    5 Do you have trouble eating (too little or too much?)

    6 Do you have problems getting to sleep?

    7 Do you feel too tired to get up?

    8 Do you feel tired throughout the day?

    9 Do you think that you have plenty of energy to go about your daily tasks?

    10 Do you suffer from bad headaches?

    11 Do you suffer from pain in any part of the body?

    12 Do you socialise with people of your own race if given the opportunity?

    13 Do you feel shy when meeting new people?

    14 Do you feel excluded from social activities?

    15 Do you feel alone?

    16 Do you feel it is important to maintain your cultural identity?

    17 Do you feel happy with the way your life is?

    18 Do you ever wish that you could change your appearance?

    19 Personality?

    20 Race?

    21 Do people irritate you and annoy you?

    22 Do you get uncomfortable in unfamiliar places?

    23 Do you feel depressed more often than not?

    24 Do you find it difficult to talk to new people?

    25 Do you discuss this feeling with someone of your own race/ethnicity?

    26 If you were to choose a best friend would it be someone of your own race?

    27 Do you go out with friends on a regular basis to the cinema?

    28 To nightclubs or bars?

    29 To religious meetings?

    30 To other gatherings? e.g.,

    31 Do you participate in any team sports or activities on a regular basis?

    32 Do you get colds/flu on a regular basis?

    33 Do you prefer your own company?

    34 Do you feel that you are excluded on the basis of race alone?

    35 Do you discuss this feeling with someone in order to help you?

    36 (If so, what is their relationship to you?)

    37 Do you find social activities in Canada different from those you would be participating in at

    home?

    38 Do you ever wish that you were back in your home country?

    Brief COPE

    Auteur(s) : Carver, Scheier et Weintraub (1989)

    Échelle : (1) I haven't been doing this at all

    (2) I've been doing this a little bit

    (3) I've been doing this a medium amount

    (4) I've been doing this a lot

    1 I've been turning to work or other activities to take my mind off things

    2 I've been concentrating my efforts on doing something about the situation I'm in

    3 I've been saying to myself "this isn't real"

    4 I've been using alcohol or other drugs to make myself feel better

    5 I've been getting emotional support from others

    6 I've been giving up trying to deal with it

    7 I've been taking action to try to make the situation better

    8 I've been refusing to believe that it has happened

    9 I've been saying things to let my unpleasant feelings escape

    10 I've been getting help and advice from other people

    11 I've been using alcohol or other drugs to help me get through it

    12 I've been trying to see it in a different light, to make it seem more positive

    13 I've been criticizing myself

    14 I've been trying to come up with a strategy about what to do

    15 I've been getting comfort and understanding from someone

    16 I've been giving up the attempt to cope

    17 I've been looking for something good in what is happening

    18 I've been making jokes about it

    19 I've been doing something to think about it less, such as going to movies, watching TV,

    reading, daydreaming, sleeping, or shopping

    20 I've been accepting the reality of the fact that it has happened

    21 I've been expressing my negative feelings

    22 I've been trying to find comfort in my religion or spiritual beliefs

    23 I've been trying to get advice or help from other people about what to do

    24 I've been learning to live with it

    25 I've been thinking hard about what steps to take

    26 I've been blaming myself for things that happened

    27 I've been praying or meditating

    28 I've been making fun of the situation

    Brief COPE - traduction

    Auteur(s) : Muller et Spitz (2003)

    Échelle : (1) Pas du tout

    (2) Un petit peu

    (3) Beaucoup

    (4) Tout à fait

    1 Je me tourne vers le travail ou d'autres activités pour me changer les idées

    2 Je détermine une ligne d'action et je la suis

    3 Je me dis que ce n'est pas réel

    4 Je consomme de l'alcool ou d'autres substances pour me sentir mieux

    5 Je recherche un soutien émotionnel de la part des autres

    6 Je renonce à essayer de résoudre la situation

    7 J'essaie de trouver du réconfort dans ma religion ou dans des croyances spirituelles

    8 J'accepte la réalité de ma nouvelle situation

    9 J'évacue mes sentiments déplaisants en en parlant

    10 Je recherche l'aide et le conseil d'autres personnes

    11 J'essaie de voir la situation sous un jour plus positif

    12 Je me critique

    13 J'essaie d'élaborer une stratégie à propos de ce qu'il y a à faire

    14 Je recherche le soutien et la compréhension de quelqu'un

    15 J'abandonne l'espoir de faire face

    16 Je prends la situation avec humour

    17 Je fais quelque chose pour moins y penser (comme aller au cinéma, regarder la TV, lire,

    rêver tout éveillé, dormir ou faire les magasins)

    18 J'exprime mes sentiments négatifs

    19 J'essaie d'avoir des conseils ou de l'aide d'autres personnes à propos de ce qu'il faut faire

    20 Je concentre mes efforts pour résoudre la situation

    21 Je refuse de croire que ça m'arrive

    22 Je consomme de l'alcool ou d'autres substances pour m'aider à traverser la situation

    23 J'apprends à vivre dans ma nouvelle situation

    24 Je planifie les étapes à suivre

    25 Je me reproche les choses qui m'arrivent

    26 Je recherche les aspects positifs dans ce qu'il m'arrive

    27 Je prie ou médite

    28 Je m'amuse de la situation

    Annexe 3 : retranscription des entretiens

    Entretien avec P (89 minutes)

    Tibo

    Alors pour commencer je voudrais savoir comment tu en es arrivée à partir au Brésil, comment ça s'est passé?

    P

    Euh, alors moi, comme je t'ai dit, je suis pas de Lyon à la base mais je suis revenue vivre à Lyon en fait cette année en septembre là pour le Master en fait, le Master 1, euh, bon j'ai mes parents dans la région aussi, euh, après ce qui s'est passé tout simplement c'est qu'on était en cours quoi, Mme X, donc la femme de M. Y euh, nous a proposé des stages au Brésil quoi, d'office. Enfin le premier jour de cours avec elle limite tu vois genre « bon bin voilà je suis brésilienne donc si vous voulez des stages pas de soucis » et moi à l'époque en fait mon copain était brésilien et j'étais jamais allée au Brésil donc ça faisait deux occasions en une tu vois, parce que bon évidemment je voulais aller au Brésil et de l'autre côté euh ça me donnait l'occasion d'avoir une expérience professionnelle làbas si tu veux, enfin, professionnelle, juste en stage, de connaître le pays différemment que par les vacances tu vois. Donc j'ai tout de suite sauté sur l'occasion évidemment et, enfin pour moi l'argument était professionnel tu vois ce que je veux dire, euh donc voilà, c'était mes motivations.

    Tibo

    Ok. Donc ce désir t'es venu cette année ou tu y pensais déjà avant?

    P

    Ouais ouais ça fait déjà un moment ouais. Ça fait, je connais beaucoup de Brésiliens, bin j'ai rencontré beaucoup de Brésiliens en Italie en fait, quand j'y ai vécu l'année dernière, et puis ça fait un certain temps que je connaissais déjà des Brésiliens ici en France aussi donc ouais.

    Tibo

    Et finalement qu'est-ce qui t'as décidé à partir, quand tu t'es dit « ça y est j'y vais »? Rapidement? T'as pris un peu de temps pour réfléchir?

    P

    Mmh non en fait j'ai pas trop réfléchi. Enfin, donc quand Mme X nous a présenté [les stages au
    Brésil] du coup je suis allée la voir tout de suite à la fin du cours et je lui ai dit enfin « voilà je suis

    intéressée » donc ça c'était en septembre, et en gros, déjà je pense en novembre, ça s'est fait assez vite, y a peut-être eu un mois de battement, je me souviens plus exactement des dates, y a eu un mois de battement où on savait pas trop qu'est-ce qui se passait tu vois. Parce que ce qu'y s'est passé c'est qu'elle elle nous a proposé tout de suite d'office tu vois le jour même donc C elle-même a dit « voilà moi aussi ça m'intéresse et tout » donc on pouvait aller si tu veux ensemble au même endroit, faire un projet. Enfin moi honnêtement j'avais vraiment envie de faire un truc toute seule, parce que euh, en fait ce qu'il y a de marrant c'est que sur place après j'ai beaucoup aimé être en contact avec des Français tu vois, je connaissais des Erasmus comme j'étais pas loin de la fac j'étais en contact avec la fac tu sais, donc je les voyais assez souvent en fait, je suis allée à une fête Erasmus avec eux enfin tu vois j'ai aussi eu ce côté un peu même en même pas deux mois - c'était deux mois quand même, le côté Erasmus de connaître des Français sur place et ça m'a beaucoup aidé aussi tu vois de - mais ça je pourrai en parler après peut-être aussi, mais à la base c'était plus ça en fait tu vois, c'est pas que je l'aimais pas [C] c'est juste que j'avais envie de faire mon truc toute seule tu vois. Donc je pense que j'y ai fait un peu comprendre et elle Mme X, d'office comme elle est de Recife elle proposait Recife tu vois parce qu'elle connait des gens là-bas et tout sauf que moi ça me disait pas trop en fait d'aller dans la structure qu'elle proposait tu vois parce que - dont C te parlera demain, euh notamment pour tout l'aspect spirituel en fait du stage tout ça, c'est pas une hostilité ou quoi par exemple moi je vais à l'église, je vais dans une église évangélique, une église baptiste, et c'est quelque chose de très important dans ma vie tu vois, ma foi, et là j'allais me retrouver dans un endroit avec des personnes, t'en a qui faisaient des transes, tu vois qui, enfin une autre spiritualité en fait, et je me suis dit « ouais non c'est pas on truc » tu vois, en gros. Mais j'allais pas le dire à Mme X ça tu vois enfin honnêtement tu peux pas dire ça, donc j'étais prête à lui dire si tu veux « bin écoutez... » je m'étais un peu résignée si tu veux parce que bon si je refuse son stage c'est mort quoi et donc j'étais un peu résignée et j'arrive le mardi d'après et d'office j'ai rien eu le temps de dire elle me sort « ah bin écoute, j'ai pensé à toi cette semaine et j'ai trouvé un stage parfait pour toi ». J'ai rien eu le temps de dire, et elle m'a parlé du sud où je suis allée donc et là elle m'a dit - qu'est-ce qu'elle m'a dit déjà, oui bon voilà « en gros comme tu es intéressée par tout ce qui est problématique de transmission, d'immigrés, les Italiens en plus, voilà tu connais bien l'Italie tout ça, y a cette région donc dans le sud du Brésil qui, où tu peux, la plupart des personnes dans une des villes, dans une région en fait mais dans une ville où tu vas, sont des descendants d'Italiens notamment donc tu peux faire une étude avec eux enfin donc bref en gros un truc comme ça donc j'étais là super j'étais enthousiaste, enfin j'ai rien demandé enfin tu vois elle me l'a présenté sur un plateau quoi et de là, donc ça ça devait être quoi, fin octobre un truc comme ça, donc bin après de là jusqu'à février on a, petit à petit on a organisé quoi mais ça s'est décidé dès ce moment là en fait, dès

    qu'elle m'a dit « c'est bon j'ai trouvé un truc pour toi » et que bon enfin voilà.

    Tibo

    D'accord. Et ça a été facile de discuter avec les gens là-bas, enfin le processus administratif, etc.?

    P

    Au Brésil ou ici?

    Tibo

    Entre les deux si tu veux, la convention et tout ça.

    P

    Bin en fait si tu veux (rire), le stage ça s'est fait un peu à l'arrache en fait parce que du coup elle connaissait quelqu'un dans l'université, le vice-président de l'université là-bas, mais pour mon stage le stage officiellement si tu veux il est avec la fac sauf que bon, comme je suis en psycho, j'ai pas fait un stage à la fac tu vois donc après, en fait eux sont venus en France à un moment donné donc j'ai pu discuter avec la femme du gars et en fait elle elle est maîtresse donc j'ai pu faire un stage dans son école mais ça ça s'est un peu organisé en biais tu vois c'était pas genre, voilà trouver le stage tu vois, alors que pour les autres filles, les deux autres filles qui sont parties à Recife, elles avaient déjà des structures avant de partir tu vois et bin en fait j'avais voulu aller à Recife au début dans une structure YMCA et en fait au début Mme X m'avait dit « non c'est pas bien d'y aller en Master 1 parce que t'y vas pas longtemps, t'y vas que un mois et demi/ deux mois, ça vaut la peine d'y aller au moins trois mois tu vois, au moins, voilà, du coup elle m'avait dit non pour ça mais j'y serais bien allée sinon tu vois, je serais bien allée à Recife, c'était pas une question d'endroit ou quoi, voilà, c'était juste...

    Tibo

    Je comprends bien effectivement. Et du coup est-ce que tu peux me parler de ta structure, ce que tu faisais, tes collègues, tes élèves, le cadre un petit peu, qu'est-ce que c'était en fait?

    P

    En gros j'étais dans une école publique là-bas et j'avais pas forcément un rôle de psychologue tu
    vois dans la structure, y avait une psychologue qui venait une fois toutes les deux semaines mais on
    s'est jamais croisé, on s'est croisé vers la fin, et puis même de toute façon ça aurait été compliqué de

    travailler avec elle tu vois parce qu'elle faisait des entretiens avec les parents, avec les enfants, et apparemment c'était un truc, enfin, comme elle était pas là souvent de toute façon ça aurait été dur de faire que ça de toute façon quoi, fallait que je fasse un stage plein temps quoi, donc moi j'étais en stage en observation dans les classes, j'ai fait aussi en gros j'étais quoi, y avait un groupe de soutien en fait pour les élèves en difficulté, un cours d'alphabétisation, un cours de progression y appellent ça, c'est une prof en fait qui est dédiée à ça et qui sous forme de jeu aussi, des jeux pédagogiques ou n'importe, donc apporte un enseignement mais qui est différent de celui que tu trouves dans la classe en fait. Euh, il y a une psychopédagogue dans l'école une fois par semaine qui vient donc je passais tous les jeudis avec elle et là c'est plus un travail tu vois qu'elle fait par rapport à l'autoestime des enfants enfin voilà.

    Tibo

    Je vois. Et ça se passait bien les relations avec ces gens là, tes collègues, les élèves, le courant passait bien?

    P

    Ouais, non non ça passait bien, y a juste des fois tu sais avec les enfants c'était un peu compliqué au début parce que par exemple si je parlais pas forcément bien le portugais quand même, je le parlais un petit peu avant quand même, j'avais des bases, mais enfin j'ai appris un peu sur le tas là-bas tu vois, donc ouais au début t'es un peu dans une position ambiguë parce que c'est dur de te faire respecter peut-être comme adulte parce que y voient que, surtout que c'est des enfants en général, comme ils viennent d'un milieu assez défavorisé qui n'avaient jamais vu d'étrangers si tu veux des fois donc t'es un peu l'extraterrestre, et en plus tu parles pas forcément bien leur langue, donc au début j'avais un peu cette position bancale mais en même temps c'était un atout aussi ça permettait tu vois de, surtout dans des cas de difficulté d'apprentissage, enfin des enfants qui avaient des problèmes d'apprentissage ou quoi, bin d'être t'es le professeur, enfin l'éducateur plutôt, mais en même temps toi aussi t'es en train d'apprendre tu vois, t'as un peu une position comme ça qui te permet de pivoter enfin donc c'est, non c'était bien.

    Tibo

    Du coup c'était une chance d'avoir ces enfants, ne serait-ce que pour la langue, pour la culture, ça a du t'aider non?

    P

    Ouais bin m'aider...bin après ouais c'était enrichissant quoi c'est sûr de voir le système, et puis j'ai pu aller dans d'autres écoles aussi après parce qu'en connaissant les profs là-bas parce qu'elles travaillent jamais dans une seule école en fait, ça marche par demi-journée, euh enfin en gros ouais j'ai pu visiter d'autres écoles, j'ai même pu visiter une école privée aussi, j'ai pas été en stage là-bas mais je l'ai visitée quoi et c'est un contexte totalement différent déjà, ouais tu vois beaucoup de la culture d'un pays par l'École aussi quoi tu vois, l'éducation, non honnêtement deux mois j'ai vraiment, j'ai découvert plein de choses par rapport au Brésil quoi tu vois, de l'intérieur du Brésil quoi, et par rapport à une seule région bien sûr parce que c'est très très divers.

    Tibo

    Justement, est-ce que tu peux me parler un peu de ta région, parce que moi je connais pas très bien le Brésil tu vois parce qu'il y a plein de régions très différentes, au niveau enfin climat, n'importe quoi, tout, t'étais où toi exactement?

    P

    Ouais, alors moi j'étais dans le Rio Grande do Sul, Caxias, c'est la région tout au sud, la dernière région du Brésil avant, t'as l'Argentine en bas, sur le côté je crois c'est le Paraguay enfin je sais plus, y a l'Uruguay d'un côté le Paraguay de l'autre, et en gros c'est une région assez unique au Brésil, parce que ils ont une culture en commun justement avec ces pays là, c'est une culture donc les gauchos, donc c'est un peu les cowboys latins tu vois, ils ont le lasso, le cheval et tout ça quoi.

    Tibo

    Oui, le lasso avec les boules accrochées c'est ça?

    P

    Je sais pas ça. En fait j'en ai jamais vu en vrai, j'ai eu l'occasion d'aller dans un centre de tradition mais j'ai pas vu les trucs de lasso. Je sais pas, mais c'est possible ouais. Après y ont une boisson tu sais y bois le chimarin [retranscription phonétique], le maté qu'ils boivent en Argentine tout ça quoi. Ils ont des traditions communes avec ces pays là, ils ont, je pense que certaines personnes s'identifient même plus à ces gens là tu vois que aux Brésiliens, et notamment les descendants d'Européens, parce qu'il y a une immigration allemande, italienne et polonaise dans la région très forte et du coup la plupart sont descendants d'Européens, bon après maintenant t'as un brassage comme partout dans le Brésil, y a aussi des origines de partout comme ailleurs dans le Brésil mais

    t'as quand même un certain attachement encore, un petit peu encore, dans les jeunes générations beaucoup moins, mais les personnes âgées encore d'aujourd'hui tu vois y revendiquent quand même bien, tu vois y sont pas, enfin y ont un attachement au Brésil mais bon, généralement parlant hein, je généralise là, mais le Brésil du nord c'est différent pour eux tu vois, et puis ouais d'un côté c'est très différent tu vois parce que j'ai pas pu aller du coup à Bahia, Recife tout ça parce que c'est vraiment très loin mais ouais le Nordeste du Brésil c'est autre chose quoi, y a beaucoup plus l'africanité tu vois, il y a une influence africaine, j'ai pu aller, je suis allée à São Paulo et à Rio aussi, et bin là aussi c'est différent tu vois, bon je dirais qu'il y a plus de points communs avec São Paulo parce que c'est une ville assez moderne puis je suis pas restée longtemps mais euh enfin tu as beaucoup de spécificités locales en fait enfin c'est vraiment un pays énorme en fait donc c'est difficile de dire « c'est comme ça » enfin tu vas à un endroit et tu as ta petite réalité locale mais bien sûr t'as des choses qui se retrouvent et t'as une grosse influence de la culture américaine aussi, nord-américaine, et euh les personnes ont quand même dans leur majorité le sentiment d'être brésiliens mais voilà, un espèce de patriotisme commun, donc ouais.

    Tibo

    Et toi justement ta réalité locale, c'était comment là où tu vivais?

    P

    Euh ouais alors c'était une grande ville, c'était une ville assez récente, qui a cent trente ans, c'était une ville assez grande quand même, c'est une ville en pleine expansion en plus, très industrielle, la capitale de la région c'est Porto Alegre, qui est déjà beaucoup plus grande donc c'est pas aussi grand que la capitale de l'état mais c'était quand même une ville - comment je peux comparer avec la France, par exemple c'est plus petit que Lyon mais c'est plus grand qu'Avignon par exemple, c'est plus grand que Montpellier aussi, enfin c'était quand même une grande ville quoi mais ce qui est intéressant c'est que c'est une ville enfin c'est un peu comme Montpellier tu vois, quand tu sors t'es tout de suite dans la campagne en fait. Et c'est ça qui est assez impressionnant aussi, c'est que tu as donc l'interio ils appellent ça, donc l'intérieur, l'arrière pays quoi, avec une végétation différente hein parce que c'est tropical, et euh, c'est pas que tropical, mais euh c'est différent d'ici de toute façon, et, comment dire, t'as ces petits villages tout de suite quand tu sors en fait, quand tu sors tu commences à être dans des villes beaucoup plus petites et plus tu t'enfonces, je suis allée une fois dormir dans un village, enfin c'est plutôt une petite ville, et c'est une ville rurale si tu veux, ça fait un peu Far West tu vois, Far West version brésilienne quoi et c'était hyper désorientant.

    Tibo

    Tu sens vraiment donc une différence entre ces deux mondes?

    P

    Ah ouais t'es perdu, en fait je suis montée dans, enfin il y a le point le plus haut de la ville, bon elle m'a fait monter le point le plus haut de la ville pour que je puisse tout voir et tout, et tu vois des forêts de pins, c'est un pin typique de la région, et tu as des forêts forêts à perte de vue de pins, et tu vois pas la prochaine ville quoi, t'as juste la ville là et les pins à vue d'oeil, et c'est dingue quoi t'es vraiment isolée, et cette fille elle va à la fac tous les jours tu vois donc elle se tape quatre heures de bus par jour tu vois, deux heures pour y aller deux heures pour le retour, et c'est des routes de terre à certains moments, donc y a même pas des vraies routes tu vois c'est vraiment la campagne, en même temps c'est une ville, ils sont auto-suffisants, ils sont fiers d'être là, les jeunes ils veulent être là, c'est pas comme ici quoi, voilà ils sont très attachés à leur ville, ils ont des modes de fonctionnement encore très ruraux quoi, enfin pour moi en tout cas tu vois, par exemple ils avaient de la viande et ils étaient en train de préparer la viande dans une petite cabane à côté de la maison, ils étaient en train de la faire sécher sur un fil de fer enfin tu vois, il y a des chiens errants partout tu vois y a des petits trucs comme ça que j'avais jamais vraiment vu en fait enfin comment dire t'as un ressenti de la ville complètement différent quoi, j'avais jamais vu ça, alors que je connais la campagne en France, ouais non c'était à faire franchement.

    Tibo

    D'accord. Et quand tu t'es retrouvée au Brésil donc qu'est-ce qui s'est passé, où est-ce que t'as logé, qui t'as accueilli, comment se sont passés les premiers instants disons?

    P

    Ouais, en fait du coup c'est mon référent de stage, en fait j'avais plusieurs référents de stage, j'avais donc le référent c'était le président et après c'est ma coordinatrice qui était pédagogue en fait à la fac, une prof, parce que j'avais un cours à la fac avec elle pour genre analyse de stage un peu tu vois donc j'étais logée chez lui au début, les huit premiers jours et après j'ai trouvé mon logement toute seule en fait parce que eux ils avaient pas vraiment de place donc il y avait pas moyen de me loger tout le long et j'avais logé chez une étudiante que j'avais connu par le biais d'une copine à moi qui est brésilienne justement, qui vivait en France, elle est en Angleterre maintenant, elle c'était une ancienne coloc à elle et voilà, je lui ai demandé si elle connaissait des gens, elle a dit « oui je connais cette fille », elle l'a contactée et en fait elle avait pas de place chez elle vraiment mais j'ai

    dormi dans son salon donc bon c'était un peu improvisé mais en même temps y me restait quoi, y me restait un mois tu vois donc, et puis certains weekends, en général le weekend j'étais quand même là, parce que je faisais mes entretiens le weekend, mais y a quand même un weekend où j'ai pu voyager, et le dernier weekend j'étais pas là ; j'étais partie quoi donc en fait bon ça faisait un mois et je me suis dit bon bin c'est bon, je tiens le coup tu vois, c'est un mois dans un salon à survivre, bon y avait quand même des désavantages que, c'est pas le fait de pas avoir d'intimité c'est le fait que voilà je faisais mon mémoire, que du coup j'avais pas forcément le silence, je pouvais pas me poser dans un endroit pour travailler tu vois donc ça c'est vrai que ça m'a peut-être un peu pénalisé pour travailler, mais après en fait c'était mieux quelque part parce que, d'être là je veux dire, là où j'étais, parce que j'avais plus ma vie. Parce que ce qui se passait dans la famille d'avant c'est que y vivaient un peu excentrés, y faisaient toujours en voiture, y avait pas de transport pour aller là-bas, du coup j'étais vachement dépendante d'eux tu vois, donc tu compares ça à ta vie d'ici tu te sens un peu étouffée en fait parce que t'es protégée, y a une protection que ici on a pas tu vois, des réflexes de sécurité, et c'est juste leur mode de vie en fait, c'est normal pour eux, mais pour moi du coup c'était un peu bizarre tu vois.

    Tibo

    Qu'est-ce que tu veux dire par « protégée »?

    P

    Bin, comment dire, tu vas pas rentrer à pied quoi, ouais, y prennent toujours la voiture. Après c'est peut-être culturel, mais bon j'ai senti que c'était plus un truc de sécurité tu vois, de toujours, surtout le soir, surtout le soir. Le soir pour te dire, y a un soir en fait avec une Française on était allé se balader comme ça parce qu'on cherchait un bar assez connu apparemment, un truc sympa, et on s'est perdu. On avait une carte et tout, on s'est retrouvé dans des, à côté du centre ville vraiment la place centrale et tout, on s'est retrouvé dans des quartiers écoute, c'était huit heures du soir mais glauque quoi, y avait personne dans les rues, alors que c'est habité hein c'est des maisons voilà, personne dans les rues, une petite voiture qui passe de temps en temps mais vraiment le truc vraiment glauque, du coup on est arrivé à une espèce de station d'essence avec un Pizza Hut et c'était trop bizarre j'ai jamais senti ça, on a vraiment ressenti une insécurité tu vois, de se dire « ok on peut pas aller marcher plus loin et revenir sur nos pas, on peut pas revenir sur nos pas, on va pas continuer plus loin ça a l'air dangereux », tu vois des personnes un peu louches qui trainent enfin, en France honnêtement ça me pose aucun souci, mais là-bas, y savent que t'es étranger quand même, tu le vois, en plus on parlait français entre nous, t'as aussi un truc à te dire : la personne elle peut être

    armée, y ont un gros problème là-bas avec la drogue en fait, avec les drogués qui agressent les gens dans la rue pour avoir de l'argent, qui ont besoin de drogue en fait, donc il y a pas mal de cas de gens qui se font tuer dans la rue par des personnes en manque quoi. Donc si tu veux c'est pas des choses à quoi je pense ici, tu vois je me promène dans la rue à trois heures du mat c'est pas un souci - bon je le fais pas souvent mais ça m'arrive, et là-bas, même, dès que la nuit est tombée en fait, tu vas penser tout de suite différemment, tu vas te dire, ça m'est arrivé de rentrer à pied quand j'avais besoin vraiment mais la plupart du temps les gens chez qui j'étais me ramenaient tu vois, ils te ramènent, ils te laissent pas tout seul et donc je finis juste avec cette fille là, en fait on s'est dit « bin c'est bon on prend la pizza là et après on appelle un taxi » et n'importe quel restaurant ou n'importe où où tu es tu demandes d'appeler un taxi ils le font quoi tu vois, parce que s'ils te voient tout seul ou y voient que t'as pas de voiture enfin c'est pas un souci quoi t'appelles. C'est normal en fait c'est normal là-bas. Et ouais, ça déjà c'est un truc y faut s'y habituer quoi parce que pff ici j'appelle jamais de taxi quoi, ça me viendrait jamais à l'idée d'appeler un taxi tu vois, je sais même pas comment on fait même.

    Tibo

    Oui c'est vrai, c'est souvent à l'étranger qu'on appelle les taxis alors qu'en France on le fait pas, c'est assez amusant d'ailleurs. Et dis moi, comment tu t'y est pris pour créer des liens, pour rencontrer des gens, nouer des relations?

    P

    Bin en fait je connaissais déjà des gens avant parce que bon j'avais le contact de cette fille, après bon j'avais mon coordinateur déjà que je connaissais, que j'avais rencontré ici aussi donc enfin je suis arrivée, aux relations internationales si tu veux, y avait un peu des étudiants qui attendaient aussi si tu veux donc j'ai déjà rencontré quelques étudiants là, j'avais un gars en Erasmus que j'avais contacté avant d'y aller donc quand je suis arrivée aussi après je l'ai vu puis après c'était mon stage, j'ai rencontré beaucoup de gens en stage, j'ai rencontré quoi, ouais, c'était, je sais pas où j'ai rencontré le plus de gens, mais en fait j'avais déjà des personnes clés un peu dès le début euh ouais, ça s'est fait tout seul après quoi. Ça m'a quand même bien mis une semaine à commencer mes entretiens par exemple parce que j'ai bien mis une ou deux semaines à faire bien mes contacts aussi, tu vois les gens que je rencontre, je travaille avec eux, souvent c'était des collègues en fait, par le biais des collègues qui connaissaient des gens ou quoi je me retrouvais dans une famille et ça a mis un peu de temps à faire les contacts surtout que les gens ne sont pas libres en semaine donc c'est que les weekends donc les weekends c'était que ça quoi.

    Tibo

    Et donc c'était facile de t'intégrer finalement quoi?

    P

    Ouais, j'ai pas trouvé ça compliqué, après pour moi ce qui était plus difficile c'était le mode de vie tu vois, parce qu'y ont un mode de vie, par exemple la fille chez qui je vivais bon elle avait deux colocs, elle travaillait à des horaires pas possibles alors elle bin souvent tu sais la plupart des gens travaillent si ils vont dans une école, attends, les facs publiques sont gratuites quasiment mais si tu n'as pas été pris dans la fac publique tu paies, c'est très cher la fac, la plupart des gens travaillent en fait pendant la journée et vont à la fac le soir très tard et du coup ils vont avoir une journée de travail normale et ils vont aller à la fac de sept à dix-onze heures du soir tu vois et après s'il suffit qu'y est un soir où tu veux faire une activité, je sais pas moi, de la danse ou quoi, en gros tu te retrouves avec la semaine vraiment blindée quoi donc cette fille avec qui je vivais je la voyais quasiment jamais en fait, je la voyais que le soir ou les weekends des fois parce que elle avait un emploi du temps de malade quoi, je veux dire même moi qui travaillais beaucoup je trouve, je travaillais moins qu'elle quoi je veux dire elle avait des horaires de fou et ses colocs c'était pareil, donc on se voyait qu'en coup de vent tu vois et ça j'ai trouvé ça très bizarre au début parce que c'est pas du tout la même vie étudiante qu'ici. Moi ça me posait pas trop problème parce que je travaillais la journée en stage, mais je sais que y a une étudiante Erasmus par exemple pour elle c'était dur tu vois, parce qu'elle est arrivée et la journée elle avait rien à faire, parce que les cours étaient le soir, et elle comme elle avait pas de travail elle se retrouvait les premiers jours à se dire « bon bin qu'estce que je fais quoi? ». Donc c'est un rythme de vie différent, la valeur de la famille est très importante, donc les gens, bin par exemple, la fille chez qui je vivais, c'est pas habituel ce qu'y font eux tu vois, parce que normalement les gens vivent chez la famille normalement, donc c'est très rare.

    Tibo

    Famille élargie tu veux dire?

    P

    Non juste les parents mais ils vont rester chez les parents, c'est très rare d'aller en coloc comme ça, d'ailleurs quand je le disais aux personnes que je rencontrais c'était « ah bon elle vie en coloc mais c'est bizarre », c'est vraiment pas habituel, après tu peux le comprendre aussi parce qu'avec ce rythme de vie là t'as pas trop le temps de prendre soin de toi enfin tu vois, si y faut que tu fasses le

    ménage dans l'appart t'as vraiment pas le temps de le faire, elle avait, après la famille ouais, c'est vrai y ont tendance à habiter, pas tout le monde hein, pas tout le monde, pas toutes les personnes que j'ai vu, mais moins avec la famille proche donc parents frères et soeurs mais tu as aussi des liens avec les tantes, cousins tu vois. C'est, c'est important tu vois, moi ce que j'ai pu remarquer tu vois c'est que les personnes elles passent tellement de temps au travail, tellement de temps avec leur famille, en fait quelque part tes amis ça devient tes collègues tu vois, en fait c'est très normal que tes amis soient tes collègues, sauf si par exemple tu es chrétien et tu vas à l'église, là tu connais d'autres gens, enfin si tu fais une activité sportive ou tu vois, mais en général ce que j'ai pu observer les personnes ont leur famille et leurs collègues et c'est ça quoi et si y font une fête y vont inviter les collègues tu vois et moi j'ai trouvé ça très bizarre personnellement parce que pour moi dans l'éducation que j'ai eu tes collègues c'est tes collègues enfin c'est genre ton travail, tu laisses ça de côté et ton temps libre c'est avec tes amis tu vois, d'autres personnes. Et ça au début j'ai trouvé ça très bizarre et aussi très ambigu en fait parce que tu coup tu peux pas, enfin pour moi d'après mes valeurs, tu peux pas être ami avec quelqu'un avec qui tu as des enjeux financiers, enfin des enjeux comme ça tu vois de travail, mais pour eux c'est normal voilà.

    Tibo

    Ok. Et donc en parlant, en lisant tes réponses aux questionnaires, on voit que tout de suite au Brésil tu t'es sentie bien dès le début, est-ce qu'il y a quelque chose de particulier? Un état d'esprit peutêtre je sais pas?

    P

    Ouais bin en fait déjà comme c'est un continent différent, bon alors moi déjà je suis allée au Brésil en me disant « ça va être pas trop différent » tu vois, parce que comme je connaissais déjà plein de Brésiliens ouais je m'étais dit « c'est très moderne » j'avais en tête que il y avait de la pauvreté mais je m'étais dit que j'allais pas être trop choquée tu vois et aussi bon je pense tu vois que j'avais la pression de me dire, c'est moi-même qui me la suis mise mais de me dire « ok, est-ce que je me vois habiter là-bas? » tu vois et du coup en arrivant c'est vrai que peut-être les deux premiers jours, parce que ouais les premiers jours j'étais chez mon copain, c'était ouais c'était un peu intense parce que je suis débarquée là et j'avais l'impression d'être dans un documentaire sur l'Amérique Latine tu vois honnêtement hein, j'avais jamais été là-bas et d'y être c'est une autre chose tu vois, c'est même pas le fait de la langue ou quoi tu vois parce que j'ai déjà connu tu vois, j'ai déjà été au Portugal aussi avant, c'est pas que la langue, c'est l'environnement quoi, les mesures de sécurité comme je te parlais, les maisons elles ont toutes le grillage devant enfin, juste la façon de vivre quoi et au début

    ça m'a quand même fait un petit choc ouais le premier jour ouais ouais. Bon après je m'y suis fait vite hein j'ai pas eu trop de mal à m'adapter, après c'est juste que sur une perspective à long terme je me suis posée la question honnêtement « est-ce que je me vois vraiment vivre là toute ma vie quoi? » et ouais j'ai pas forcément encore de réponse à cette question enfin je pense qu'y faudrait y retourner plus longtemps tu vois pour mieux connaître, après moi enfin comme t'as pu voir dans mon parcours identitaire dans le fond moi je me sens quand même bien française tu vois, parce qu'il faut te sentir appartenir quelque part, t'as besoin de sentir que t'appartiens quelque part, même si tu veux habiter n'importe où, même si t'aimes pas où t'habites, tu n'aimes pas d'où tu es, j'en sais rien, enfin t'as besoin de savoir d'où tu viens quoi et pour moi je peux dire tout ce que je veux sur la France mais n'empêche que j'ai vécu là, toute ma vie quasiment, et c'est vrai que mes origines ne sont pas là, enfin bref, tout n'est pas là, mais en même temps c'est un peu ma base quoi, et je me suis rendue compte aussi en allant là-bas que quoi qu'il arrive je voudrais pouvoir revenir en France tu vois, je me vois pas forcément rester ici toute ma vie, mais en même temps je veux pouvoir revenir, donc c'est toute la question aussi de bin voilà, si tu vas là-bas et que tu te marries avec quelqu'un làbas et que tu fais ta vie là-bas, est-ce que tu peux revenir en France tu vois? Donc il y a toute, tu vois c'est un questionnement aussi, un cheminement de bon qu'est-ce que tu veux pour ta vie plus tard, et ça ça a beaucoup influencé sur mon adaptation là-bas en fait. Bon après j'ai fait abstraction tu vois de projets futurs ou quoi parce que cette expérience là je la vis tu vois mais c'était toujours dans le fond quoi, en arrière plan et je pense que du coup bin ça a peut-être mis un peu de pression tu vois, une certaine pression, mais en même temps elle a été bien gérée parce que bin ça s'est bien passé quoi.

    Tibo

    Je vois. Pendant que tu étais là-bas, est-ce que ton image de la France elle a un petit peu changé, est-ce que tu as remarqué des choses que tu remarquais peut-être pas avant, est-ce que tu as pu te distancier et regarder en arrière et te dire « ah oui tiens c'est différent » par rapport à ce que « nous », Français disons, on fait et eux comment ils s'organisent peut-être je sais pas?

    P

    Euh oui bin oui c'est très différent en fait, mais le truc que moi j'ai trouvé le plus dur en fait c'est le regard qu'y ont en fait sur les Européens et sur les Français notamment parce que bon y a pas à dire, c'est un pays ex-colonisé et nous on était colonisateur en fait, enfin la France, les Français étaient colonisateurs, même si je l'étais pas personnellement (rire), mais y a quand même ça qui reste honnêtement ça pèse encore et tu le vois dans leur représentation des gens, dès que tu dis que t'es

    française « ouah trop chic » tu vois enfin bon ils ont des représentations du genre, ils ont des clichés du genre, ouais on se lave pas tous les jours et honnêtement ils le pensent sérieusement quand ils te posent la question c'est pas qu'ils rigolent ils te posent vraiment la question donc ça c'est assez intense, après ils ont des trucs du genre on mange à table avec cinq couverts tous les jours ou genre des trucs tu vois l'entrée, le nana, le dessert enfin tu vois ils ont ce truc tu vois de vraiment on est chics on est élégant tu vois ils ont vraiment les stéréotypes comme ça sur la France qui sont tellement pas vrais pour la plupart des Français aujourd'hui, c'était peut-être vrai dans le passé et ça l'est peut-être encore pour une petite minorité de gens. Y ont les stéréotypes tu vois que tout ce qui est français c'est de la bonne qualité tu vois, y vont se ruiner à acheter des produits de marque genre Loréal ou Lancôme ou j'en sais rien des trucs que nous-même on achète même pas, parce ce qu'on veut chercher moins cher tu vois, mais pour eux c'est français donc c'est bien et y vont dépenser l'argent pour l'acheter, parce que c'est de la qualité tu vois. Et y pensent que nous on fait pareil, y pensent que y vont acheter quatorze parfums, y vont alors le parfum c'est un truc, le parfum français a une telle réputation y vont acheter je sais pas combien de parfums alors que nous on va en acheter un tu vois et ce sera genre notre parfum tu vois quoi on va pas en acheter quarante. Pour eux, c'est une marque de richesse tu vois, une marque de je sais pas, d'élégance ou quoi d'avoir un parfum surtout français et d'en avoir plusieurs quoi, et pour moi c'est des trucs mais pff quand j'ai vu ça j'ai halluciné quoi parce que pour moi c'est tellement des trucs futiles en fait honnêtement bon ça c'est mon éducation enfin voilà mais en même temps j'arrive pas à comprendre, enfin je peux le comprendre si tu veux mais si tu veux si je me base d'un point de vue comment dire rapports de pays tu vois, enfin genre toute une logique qui leur a été un peu transmise tu vois où « on », enfin, la France et les pays européens étaient synonymes de modernité tu vois de civilisation tu vois c'est un peu ça qui leur a été transmis, et c'est encore un peu ça qu'eux-même cultivent aujourd'hui parce que ça leur a été transmis comme ça je pense et c'est encore présent et ça pour moi c'était le plus dur à vivre en fait.

    Tibo

    Ça revenait donc souvent au fur et à mesure des gens que tu rencontrais?

    P

    Bin ça revient ouais dès que tu rencontres quelqu'un c'est clair. Même dans le sud alors que le sud y sont tous descendants d'Européens quasiment et justement ils s'en vantent, c'est quelque chose dont ils sont contents et même eux parce qu'ils sont brésiliens mine de rien et dès que tu dis que t'es française y sont trop contents tu vois, ils veulent parler avec toi si y parlent français, enfin y vont

    limite y vont s'identifier plus à toi et te dire « ouais ici c'est pas comme le reste du Brésil, on est plus évolué » enfin des trucs comme ça et enfin moi je trouve ça insupportable en fait parce que quelque part c'est tout le truc de se dire « bin ouais j'ai pas choisi où je suis née et en même temps j'ai pas choisi moi ce rapport de force avec les gens, j'ai pas choisi d'être dans le pays qui était colonisateur » tu vois ce que je veux dire, donc si je vais quelque part j'ai pas envie d'avoir cette position d'ex-colonisateur tu vois mais en même temps tu l'as malgré toi en fait parce que c'est d'où tu viens quoi.

    Tibo

    Et tu penses que ça a altéré ton rapport avec les gens d'un certain côté?

    P

    Pas « altérer », ça a pas altéré les choses, enfin je pense pas que ça t'empêches d'être authentique avec les gens mais n'empêche que tu as ton arrière plan qui reste tu vois ce que je veux dire. Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens ouais y sont super accueillants et y vont pas te discriminer, c'est presque de la discrimination positive en fait tu vois, c'est presque de ouais, enfin, en fait c'est pas que je voulais pas être française tu vois ce que je veux dire, c'est pas que j'avais honte d'être française ou quoi, mais j'en avais marre qu'y me voient comme ça en fait, j'avais envie de leur dire « mais allez en France » tu vois, y en a qui sont allés en France et y sont pas comme ça tu vois, c'est pas tout le monde qui est comme ça, mais j'avais envie de leur dire « allez y quoi » enfin en même temps c'est un peu ingrat de dire ça car ils ont pas forcément tous les moyens d'y aller, mais tu vois rien que le fait avec l'euro aussi, que moi j'arrive avec l'euro j'ai tout moitié prix quoi, si je travaille là au Brésil je gagnerais la moitié de ce que je peux gagner ici, enfin des trucs comme ça de me dire, bin ouais c'est vrai que avec la géopolitique je suis en position de force et je véhicule ça, en venant ici je véhicule le passé, je véhicule le statut international de mon pays d'origine, et c'est présent aussi quand même dans tes rapports avec les gens tu vois, les gens vont toujours te dire « oh oui, l'éducation là-bas c'est tellement bien » en gros quelque part que tu viens d'un pays qui est plus civilisé donc qu'il y a plus d'éducation, qu'il y a plus de, c'est pas vrai tu vois ce que je veux dire mais c'est quand même ce qui t'es renvoyé tu vois et en même temps c'est vrai qu'y a tellement de, comment dire, y a tellement de disparité là-bas, y a tellement d'extrêmes, que pour être je sais pas moi classe moyenne en France y faut vraiment être riche quoi, faut être aisé tu vois pour avoir accès à une bonne éducation y faut avoir de l'argent aussi et les livres là-bas coûtent chers parce que c'est pas une normalité là-bas d'acheter des livres tu vois, enfin ici en France c'est quand même assez courant d'avoir une bibliothèque chez toi, c'est pas tout le monde mais c'est

    courant, là-bas enfin c'est la télé quoi, la télé la télé, les livres c'est un luxe quoi tu vois et ouais voilà moi je viens d'une famille où les livres c'est hyper important c'est pas qu'on est intellectuel ou quoi mais les livres pour nous c'est important quoi et ça voilà je me suis dit « si j'habite au Brésil, est-ce que je pourrais me payer des livres quoi? » voilà, est-ce que je pourrais aussi importer des livres dans les langues que je veux lire, français, italien, anglais, etc., parce que ça coûte cher aussi ça d'importer les livres, tu vois y a tout ce truc de l'accès à la culture, l'accès à l'éducation qui est quand même pas le même. Tu vois c'est pas que les gens y sont bêtes, c'est que y ont pas le même accès en fait, ici on est quand même privilégié par rapport à ça, je veux dire on a des réductions, déjà les monuments sont entretenus, c'est organisé on a des offices du tourisme, on a enfin tu vois l'accès à la culture est privilégié tu vois, nous en tant qu'étudiants on a des réductions en plus c'est favorisé pour la jeunesse.

    Tibo

    Et ça tu t'en est aperçue, tu l'as conscientisé quand tu étais là-bas ou tu t'étais déjà fait la réflexion avant?

    P

    Je l'ai un peu vu là-bas, avant non je disais pas ça parce que j'avais pas vu comment c'était donc avant j'avais pas conscience de comment ça allait être vraiment tu vois et c'est une fois là-bas que j'ai vu les choses et que j'ai dit « waow » mais c'est vrai que, c'est vrai que tu peux avoir accès aux choses tu peux si tu veux et si tu as les moyens tu vois, surtout si t'as les moyens, c'est surtout une question d'argent, et tu comprends aussi notamment la mentalité des gens, tu vois les gens parlent beaucoup d'argent, de s'enrichir, cette notion un peu américaine, de l'ascension sociale, de se créer soi-même nanana, et ici enfin en France ça fait, ça fait pas bourgeois mais tu parles pas d'argent comme ça, au contraire, les gens essaient de montrer qu'ils sont le plus humble possible tu vois par exemple, c'est peut-être limite « bobo » ça aussi mais bon y a pas tellement cette mentalité de parler d'argent tu vois ici, en même temps c'est parce qu'on a accès à tout tu sais, on a pas besoin de parler d'argent vraiment tu vois, et eux la plupart des gens ont, là les gens dont je te parle ce sont des gens de classe émergente surtout, classe moyenne émergente, donc c'est pas des gens hyper riches mais c'est pas des gens pauvres non plus, pas des milieux populaires ou des favelas non plus, donc c'est quand même des gens qui vivent bien mais qui luttent quoi enfin tu sens qu'y a quand même que c'est pas aussi facile tu vois, je me suis sentie très privilégiée en fait. En France, et dans plein de pays d'Europe, tu as accès à tout facilement tu vois, on peut se plaindre de tout ce qu'on veut, de l'administration enfin tout ce que tu veux n'empêche que la vie elle est quand même facile quoi.

    Tu as réussi à t'y faire quand même là-bas? Il y a quelque chose qui t'as manqué peut-être ou je sais pas?

    P

    Bin à part ce côté ouais culture tu vois parce que bon notamment dans les villes assez récentes parce que du coup c'est vrai qu'y a pas de patrimoine tu vois, bon tu vas à Rio c'est différent hein, Rio c'est une ville beaucoup plus ancienne, donc il y a ce côté culture, tu sens qu'il y a une richesse culturelle là-bas qui est différente. Dans une ville récente c'est vrai que c'est un petit peu normal peut-être que tu sentes moins, faut dire qu'en France partout où tu vas y a de l'histoire tu vois ce que je veux dire. Ce qui est intéressant là-bas en fait c'est que tu sens qu'y sont en plein développement et eux-même y ont en conscience en fait, parce qu'y vont te dire « ouais en Europe y a la crise, nous on est la cinquième puissance économique on grandit » y ont conscience qu'y se passe des choses tu sais et en même temps c'est assez frustrant d'un autre côté parce que tu te dis « c'est vrai voilà en Europe c'est un peu la misère en même temps toi personnellement t'y es pour rien » donc là encore t'as l'impression de porter un fait, un passé, et tout une situation où toi t'as rien à voir dedans, c'est juste la situation des choses, donc tu es dans un pays qui certes n'est pas très organisé encore, qui est immense et dur à coordonner et qui est pas forcément partout développé pareil enfin y a encore beaucoup de manque, en même temps y sont en effervescence et tu sens cette effervescence là-bas sur place, y a des endroits déjà où tu vois pas limite la différence avec ici, c'est pas la pauvreté partout au contraire, c'est plus que ça va être réparti différemment, tu peux voir une maison riche à côté d'une favela, mais ouais les écarts de confort de vie sont énormes mais ce qui est très frustrant c'est que tu sens qu'y a cette effervescence et que tu as envie d'en faire partie en fait, y a un côté très enthousiasmant là-bas, c'est que tu as l'impression que tu vas construire quelque chose, qu'il y a quelque chose qui est en train de se construire et que tu vas construire avec eux et que quelque part ici en Europe c'est pas qu'y a plus rien qui va se faire tu vois mais c'est comme si c'est essoufflé, c'est comme si tu vas là l'Histoire a été faite, tu es héritier d'une Histoire qui a déjà été faite et que voilà maintenant on a les conséquences de ce qui a déjà été fait et on est obligé de se dépêtrer avec toutes les conséquences alors que là-bas tu as l'impression que ça commence en fait tu vois et c'est très bizarre comme sentiment et c'est un peu caricaturé hein je pense pas que c'est exactement comme ça, mais ouais c'est un peu ça que tu ressens. Et en même temps c'est assez comment dire tu as peur pour eux. Moi je sais que je voyais certains trucs là-bas et je me disais « mais mince mais pourquoi y font ça quoi » enfin y font exactement bin par exemple l'influence de la culture américaine ou occidentale en général même pas que américaine, tu vois ils vivent d'une façon dont

    nous on vit, parce que pour eux c'est un modèle de modernité tu vois c'est un modèle de civilisation en fait et moi j'ai envie de leur dire parfois « mais pourquoi vous faites ça quoi, faites pas les mêmes erreurs que nous » du style de pas développer les transports en commun au lieu de la voiture personnelle, le modèle américain par excellence, le pétrole quoi tu vois les erreurs que les pays qui se sont industrialisés dans le passé par exemple en Europe ont fait bin y font les mêmes tu vois parce qu'y suivent le même chemin, et eux y ont quand même l'avantage d'avoir la canne à sucre, d'avoir du terrain enfin bref, mais y a un moment donné où y vont avoir les même problèmes qu'on a ici de gestion de l'espace dans les villes, de voilà qu'est-ce qu'on fait avec les voitures, les énergies renouvelables, ça va aussi se poser ces question là.

    Tibo

    D'accord. Et tu t'es assez identifiée à cette culture, à cette façon de voir le monde peut-être, tu t'es sentie vraiment incorporée là-dedans, envie de participer peut-être?

    P

    Ouais moi j'ai pas de mal à m'adapter aux endroits où je vais en fait, je pense que c'est un avantage que j'ai, un atout, c'est que je m'y fais tu vois quoi et j'ai pas de mal à me dépouiller de ma culture, mes valeurs c'est peut-être autre chose ouais mes modes de vie tu vois du moins mes coutumes c'est pas quelque chose à quoi je suis vraiment attachée tu vois donc je peux m'y adapter, du moins pour un court terme. Après, voilà, le long terme c'est une autre question mais à court terme ouais je peux. Donc voilà ça permet de réfléchir, de prendre de la distance déjà, parce que tu vis des trucs de l'intérieur tu vois.

    Tibo

    On parlait de préjugés, non de stéréotypes pardon, positifs, est-ce qu'il y a eu des stéréotypes négatifs à ton encontre par exemple? Est-ce que c'est arrivé?

    P

    Non pas de ça. Non du coup bon je pense un truc négatif ça peut être que justement y a peut-être un complexe d'infériorité de fait que t'es européen t'es français notamment, voilà tu viens de ce pays du savoir, des Lumières nanana, et du coup je pense que certaines personnes elles se sentent d'office peut-être intimidées par toi ou des trucs comme ça, ouais.

    Ça t'as pas perturbé plus que ça disons, y a pas eu de réactions frontales où on t'a fait comprendre que...

    P

    Ah non, ça non, mais je pense que c'est lié aussi à la l'usage de la langue, vu que je parlais assez bien portugais enfin, ça aussi je pense que ça aide, que si par exemple tu galères à comprendre, si tu parles très fort avec l'accent français tu vois ce que je veux dire, je pense que bon si tu critiques tout, ça dépend de l'attitude aussi je pense. Non comme j'ai essayé de m'intégrer là-bas j'ai pas trop eu de réactions comme ça, enfin je m'en souviens pas du tout.

    Tibo

    Très bien très bien. Et du coup qu'est-ce que tu faisais comme activité sociale? Parle-moi de tes loisirs, ce que tu faisais en dehors du boulot, comment ça marchait?

    P

    Euh en dehors du travail, bin du coup je rencontrais des personnes, du coup ça m'arrivait des fois de rencontrer quelques connaissances que j'avais, euh je connaissais pas trop les cafés ou les bars et de toute façon il y avait pas trop cette culture du café sur la terrasse tu vois où on va se poser, mais ouais ça m'est arrivé d'aller boire un coup avec quelques personnes et c'est vrai que c'est pas très courant là-bas en fait, c'est pas un truc qu'y font entre jeunes par exemple, tu vas plus aller chez les gens en fait. Bin ouais je suis allée une fois à une soirée chez des argentins pour danser c'était sympa, je crois que c'est la seule fois où je suis sortie en fait parce qu'après à part ça vraiment je bossais quoi, j'avais vraiment pas le temps. Y a juste bin un weekend quoi je suis allée à, un weekend je suis rentrée chez mon copain....

    Tibo

    (Bruit), hop, le temps de retourner la cassette...

    P

    Ouais un weekend je suis retournée là-bas et le dernier weekend où j'ai pu aller à Rio mais à part ça sur place j'avais pas trop de loisir. J'ai failli aller avec ma coloc à, elle faisait des cours de danse et de l'escalade alors j'ai failli y aller mais j'étais tellement crevée en fait que je crois que c'est le fait de la langue aussi tu sais comme je parlais portugais vingt-quatre sur vingt-quatre je me sentais

    tellement fatiguée au début, le rythme de que j'avais, je dormais pas forcément bien du coup avec le canapé, oui parce qu'il y avait une des colocs qui rentrait à minuit du travail bon elle me réveillait pas, mais j'étais toujours réveillée par celle qui se levait à six heures du mat, donc je dormais pas trop (rire), voilà donc ouais j'avais un rythme de vie assez intense.

    Tibo

    D'accord. Et tu parlais d'église tout à l'heure, et est-ce que t'as fréquenté les églises là-bas?

    P

    Alors ouais en fait j'ai rencontré une dame qui allait à une église baptiste là-bas donc j'ai pu y aller une fois j'ai pas pu y aller beaucoup parce que bin je travaillais tu vois. Euh ouais alors les églises, parlons-en (rire). C'était assez surprenant ça aussi parce que j'ai jamais vu ça et je pense que c'est très proche de ce qu'il y a aux États-Unis en fait. Parce que par exemple en France c'est pas du tout comme ça. La situation des églises évangéliques en France, y a plein de dénominations mais tu n'as pas de mentalité de propagande ou marché tu vois, de commerce un peu tu vois. Et ce que j'ai trouvé là-bas en fait c'est que c'est tellement courant d'être croyant, enfin en quelque chose hein, quoi que ce soit, ils font beaucoup de mélange hein, c'est très courant que les gens soient catholiques et qu'en même temps y pratiquent le Candomblé et qu'y pratiquent un autre truc tu vois. Et dans les églises évangéliques, je sais pas d'où ça vient, alors mon hypothèse c'est que c'est l'influence des États-Unis, mais dans de nombreuses églises, pas toutes, mais c'est vrai que je comprends la mauvaise réputation des églises évangéliques là-bas parce que (rire) tu vas dans la rue tu vois des églises évangéliques tu vois c'est des grands boulevards un peu à l'américaine tu en vois partout et alors c'est des trucs l'affiche la plus grande possible, y te vendent des miracles quoi tu vois t'as tout une doctrine de la guérison, une doctrine de la prospérité aussi qui est très présente làbas et qui est pas présente en France, j'ai jamais vu ça en France, et si c'est présent c'est vraiment une minorité d'églises et c'est pas visible quoi mais là-bas j'ai été choquée, j'ai été choquée ouais, j'ai été choquée parce que comment dire bin c'est d'autant plus dur d'être authentique je pense parce que du coup t'es assimilé à quelque chose que t'es pas forcément tu vois et je pense que ça doit être très compliqué en fait d'être chrétien là-bas, je pense même plus compliqué qu'ici, parce que ici y a pas ce côté, enfin moi je l'ai jamais vu, donc je pense que tu n'as pas à remettre en question l'authenticité et la sincérité des gens, enfin moi j'ai jamais vu ici le phénomène d'église-secte tu vois, y a des sectes, mais dans les églises évangéliques que je connais j'ai jamais vu ça. Là-bas tu as des églises écoute tu as même pas envie de rentrer dedans tu vois enfin honnêtement, rien qu'à voir l'affiche, rien qu'à voir, c'est un magasin quoi presque tu sais c'est limite un magasin de foi quoi,

    enfin je sais pas comment l'exprimer mais j'ai été choquée par ça quoi. Et en parlant avec des gens ce qui est très intéressant, quand je parlais avec des gens et qu'y te demandent « alors toi tu crois quoi » parce que là-bas y sont tous croyants, y croient tous en Dieu, là-bas comment dire l'existence de Dieu est quasiment pas remise en cause par personne en fait ce qui par exemple en France n'est pas le cas. Là-bas les athées les gens y se moquent d'eux tu vois parce que c'est tellement évident que Dieu existe tu vois ce que je veux dire et ça peut être n'importe quoi hein, c'est pas forcément le Dieu de la Bible par exemple, le Candomblé est très présent, bin C t'en parleras demain, les gens y peuvent croire tout et n'importe quoi mais y ont quand même une notion de spiritualité donc tu leur dis « je crois en Dieu » c'est pas une grosse nouvelle tu vois c'est pas choquant alors que si tu dis ça à quelqu'un en France déjà y peut penser que t'es un peu bizarre tu vois ou que t'es pas intelligent enfin bref tu peux avoir des réactions comme ça en France là-bas non, c'est limite tu crois pas en Dieu t'es pas normal tu vois. Donc y a ça mais du coup ça laisse place aussi à beaucoup de confusion parce que tu crois tout et n'importe quoi, tu mélanges tout.

    Tibo

    C'est intéressant parce que toi du coup étant croyante ou pratiquante je sais pas, est-ce que c'était la même foi? T'es-tu ou ne t'es-tu pas assimilée à ça? Comment tu voyais la chose avec tes yeux à toi?

    P

    Bin du coup c'était marrant comme je te disais parce que quand je rencontrais des gens dans une église et qu'y me demandaient « et toi qu'est-ce que tu fais » et je leur disais « je suis évangélique », mais quand tu dis que t'es évangélique à un Brésilien, qui ne l'est pas d'office, alors deux réactions : soit y va penser que t'es dans une secte, complètement illuminé, soit tu lui précises quelle église tu vas et là y va te dire « ah ouais d'accord ok je vois eux c'est des églises sérieuses ». Mais moi je l'ai vécu comment, euh bin, ça m'a un peu rendu triste parce que je me suis dit « c'est très dommage en fait » que ce soit utilisé comme ça, après moi j'ai cette conception que Dieu gère les choses tu vois, Dieu est au-dessus de tout donc y voit même dans ces endroits là, enfin, voilà mais ouais et ça m'a rendu triste pour ça parce que je me suis dit qu'il y a beaucoup de personnes ici et c'est vrai que j'entends beaucoup d'histoires de personnes qui sont escroquées quoi. Concrètement y vont leur promettre des trucs genre donne tout ton argent, Dieu te le rendra, enfin ces théories là quoi et des personnes du coup qui sont très sincères on leur parle de Jésus et on leur vend un Jésus un peu refaçonné quoi à la façon qu'on veut quoi et eux du coup y croient, y vont vendre tout ce qu'y ont, donner tout leur argent et t'as des personnes qui se retrouvent à la rue comme ça quoi, t'as beaucoup de personnes aussi, enfin t'as des doctrines un peu bizarres qui circulent tu vois enfin des trucs qui

    sont pas du tout bibliques, genre qu'y vont acheter leur terrain au ciel enfin des trucs complètement aberrants et en temps que chrétien, que protestant évangélique, c'est choquant parce tu te dis toimême comment t'es crédible après tu vois, mais n'empêche que comme je t'ai dis c'est pas quelque chose qui me soucie moi personnellement parce que c'est pas dans mon contrôle tu vois, et j'ai pu discuter avec des gens notamment, enfin c'était assez random mais c'était un gars à l'arrêt de bus qui a commencé à me parler de Dieu et comme ça et puis il commence à me dire qu'il a été dans des églises justement qui recherchaient à prendre son argent machin et j'ai discuté avec lui et il était content juste de parler avec quelqu'un, je pense qu'il devait avoir un passé alcoolique mais euh il était sobre à ce moment là mais c'était intéressant de parler avec quelqu'un tu vois je sais pas s'il adhère à une église ou quoi en tout cas y devait croire, il avait du avoir de mauvaises expériences, mais tu vois qu'il est quand même ouvert à la discussion et puis les gens en fait là bas - pas tout le monde mais, y a une espèce d'hyper tolérance en fait une espèce de, par contre je sais pas, ça c'est un truc intéressant, je sais pas comment y géreraient, je sais pas l'état de l'islam là-bas tu vois, je sais pas si y a des mosquées, je sais pas s'il y a beaucoup de populations arabes, maghrébines, y a pas beaucoup de musulmans tu vois, je sais même pas si y a des mosquées, mais c'est vrai que ça par exemple, j'ai déjà parlé de ça avec certaines personnes, et tu vois y imaginent pas du tout qu'en France maintenant enfin c'est normal tu vois d'entendre parler arabe, tu vois on a grandi dans une France qui est très différente de celle qu'ont connu les gens il y a quelques années, enfin, y a un mélange culturel tu vois, pour moi c'est normal tu vois que la France elle est comme ça, je l'ai toujours connu comme ça, mais pour eux, de penser que y a des arabes en France, de penser qu'y a des musulmans en France c'est un truc complètement aberrant, et y vont te demander « ah ouais c'est quoi la religion majoritaire en France? » tu vois des trucs comme ça et y vont penser que tu leur dit « catholique » tu vois et moi c'est vrai je leur dit « bin traditionnellement c'est vrai que y a beaucoup de catholiques encore, mais n'empêche que désolée, la majorité des gens y sont pas catholiques aujourd'hui » et y hallucinent quand tu leur dis ça parce que ils sont tolérants mais y sont tolérants de ce qu'y connaissent tu vois donc c'est normal c'est humain mais c'est vraiment un autre monde quoi.

    Tibo

    Ok. De quoi voulais-je te parler déjà? Ah oui, tout à l'heure tu parlais de tes relations, alors était-ce plutôt avec des étudiants internationaux, des compatriotes, des Brésiliens, ton réseau social comment était-il constitué finalement?

    P

    Bin j'avais cinq six Français quand même dans mon réseau, donc je les voyais assez souvent, sinon c'était que des Brésiliens, j'avais pas d'autres étudiants internationaux, c'était que des Français et des Brésiliens, donc soit étudiants soit pas quoi, la majorité était pas étudiant d'ailleurs.

    Tibo

    Et tu les as rencontrés comment ces gens là du coup, les Français comment tu les as connus?

    P

    Alors surtout par le travail, ou par la fac mais en fait le truc c'est que la plupart, tu vois nous on fait cette distinction étudiant / travailleur ici, mais là-bas elle y est pas forcément, les étudiants y sont aussi travailleurs en fait, et ouais j'ai rencontré des gens un peu comme ça par mes entretiens aussi du coup. Et juste pour revenir sur l'église là, donc je suis allée à une église baptiste je t'ai dit, et là par contre pas de soucis tu vois, enfin là c'était très similaire à ce que je connais en France y a pas de soucis mais le contexte en soi m'a choqué quand même.

    Tibo

    Ok. Est-ce que sur un versant émotionnel, etc., tu t'es sentie soutenue ou tu as manqué de quelqu'un à qui te confier je sais pas, est-ce que t'étais un petit peu perdue parfois?

    P

    Bin y a des moments quand même où je me suis dit, bon Mme X elle nous a préparé quand même pour le voyage, elle nous a un petit peu parlé avant, le truc c'est que moi elle m'avait dit « ah toi où tu vas ça craint pas du tout c'est une région riche blablabla » enfin elle connait plutôt le nord et elle a bien briefé les filles et moi j'étais là donc j'ai écouté ce qu'elle a dit. Tout ce qu'elle a dit pour les filles qui en plus allaient dans la favela bin écoute moi ça m'a servi pour là où j'étais quoi, enfin honnêtement les même règles de sécurité elles valaient aussi dans le sud quoi dans une ville riche, parce que c'est ville riche mais en même temps y ont eu beaucoup de problèmes compliqués avec la drogue avec les favelas tout ça mais j'aurais voulu, et d'après ce que j'ai constaté avec certains étudiants internationaux, ça pourrait être pas mal, quand tu changes de continent comme ça, d'avoir peut-être une préparation plus intensive en fait aux différences culturelles tu vois genre communication, contact avec la culture machin, parce que c'est une chose d'y être tu vois. C'est une chose qu'on te raconte quelque chose mais c'est une chose de le vivre et d'être toute seule et j'ai vu certains étudiants la façon dont y vivaient bin honnêtement y en a certains y prenaient pas

    forcément les précautions qu'y fallait tu vois et je me suis dit « si jamais y leur arrive un truc... » tu vois le truc c'est que y faut pas être parano mais en même temps t'es pas dans ton pays enfin c'est pas l'Europe tu vois quoi et c'est pas la même criminalité, les personnes peuvent facilement être armées comme je t'ai dit enfin c'est pas les même règles. Donc ça change les choses et je pense qu'y faut se comporter en sachant écouter les conseils des personnes sur place tu vois et moi heureusement j'ai la personne avec qui je vivais qui m'a donné beaucoup de conseils au début je t'ai dit j'étais pas mal protégée parce que je vivais avec la famille, quand je me suis retrouvée toute seule elle m'a quand même briefé tu vois, elle m'a donné certains conseils, parfois quand je faisais des trucs elle me disait « ah mais là j'étais inquiète et tout tu devrais pas faire ça » enfin tu vois donc j'ai quand même suivi ses conseils parce que voilà c'est une jeune, elle vit là depuis toujours, c'est quelqu'un qui a voyagé donc elle connait le monde aussi tu vois donc elle sait de quoi elle parle je pense donc j'ai écouté ce qu'elle m'a dit tu vois mais non ça va, y a peut-être des moments où je me sentais un peu seule c'est normal t'es loin de chez toi mais après j'ai pas trop eu de moments vraiment ça allait pas du tout je voulais rentrer quoi non. Le truc aussi c'est que c'était tellement court comme temps que j'étais enfin limite c'était le contraire tu vois, j'avais envie que ça dure plus longtemps parce que je voyais que les autres Erasmus allaient rester plus longtemps et c'est limite hyper frustrant de devoir rentrer tu vois parce que enfin après deux mois tu t'intègres tu vois, après deux mois t'as trouvé tes marques t'as ta routine un peu pour autant que t'en ai une et ouais j'ai trouvé ça assez frustrant de devoir entrer finalement parce que deux mois ça passe mais à une vitesse vraiment ouais c'est court. Non j'ai pas eu de moment vraiment...

    Tibo

    Est-ce que t'as connu des galères, ce qu'on appelle des galères?

    P

    (Pause) genre des gros problèmes non, après ouais y a des moments où j'ai un peu galéré quand même au début genre comprendre du coup me repérer dans la ville (rire) tout ça comment tu prends le bus enfin ouais retirer de l'argent dans les banques juste avoir des points de repère tu vois, genre où est le super marché le plus près parce que du coup j'ai eu tout de suite conscience de ce fait voilà je peux pas sortir la nuit quand je sors la nuit je fais attention de toujours prendre des rues éclairées voilà je sors jamais dans des rues un peu obscures même si c'est plus rapide mais en même temps t'as toujours cette pensée quand c'est la nuit « ok tu rentres le plus vite possible chez toi » quand t'es tout seul t'as pas de voiture tu rentres chez toi sinon tu prends un taxi mais bon le taxi ça fait un peu cher à la longue (rire) donc ouais y a juste peut-être ce côté où tu te sentais un peu étouffé quoi mais

    c'était pas une galère non j'ai pas eu trop de galères je crois pas je me souviens pas.

    Tibo

    Très bien. Et dans le questionnaire, quand je t'ai demandé de placer ton séjour par rapport à ta vie en général, t'avais répondu « suite ». Est-ce que tu peux m'expliquer cela, pourquoi tu as écrit « suite » pour parler du sens de ton séjour par rapport à ta vie en général?

    P

    Euh bin parce que pour moi les choses ça vient les unes après les autres en fait (rire), super la phrase, ouais je sais pas quand je regarde ma vie je vois une progression tu vois je vois comment j'ai évolué sur certaines choses je vois le sens enfin tu vois les choses comment elles font sens aussi et là en fait voilà ça faisait sens quoi, notamment par rapport à ma relation et par rapport à ma formation aussi, par rapport à mon rapport au monde tu vois aussi je pense parce que j'avais jamais quitté l'Europe en fait avant donc c'était mon premier voyage hors de l'Europe donc c'était quand même un gros pas et puis je sais pas c'est juste venu là, c'est venu là vraiment sur un plateau j'avais rien demandé, je comptais y aller cet été en fait du coup j'y vais pas et en fait c'était genre « waow » c'est juste venu là quoi même si maintenant j'ai beaucoup de boulot avec les entretiens à traduire et tout ça quoi mais ouais c'était vraiment une super expérience, pour moi c'était genre dans la continuité tu vois enfin genre t'as ta vie comme ça, t'as des projets qui viennent, des opportunités et tout et pour moi c'était là quoi.

    Tibo

    C'est une très bonne réponse. C'est ce que t'as ressenti donc c'est le principal finalement. Et justement donc, le Brésil avant et après, est-ce que ton image elle a changé, est-ce que la vision des gens du pays de la culture en général s'est transformée?

    P

    Mmh je pense qu'avant sans connaître du coup sans connaître concrètement je pensais que ça serait plus facile d'y vivre tu vois peut-être et en fait en y allant je me suis rendue compte quand même que bon bin bien sûr tu peux y vivre c'est pas infaisable mais c'est quand même un gros choix tu vois c'est un choix qu'y faut pas prendre à la légère parce que bin c'est loin déjà géographiquement, ça coûte cher pour y aller, et aussi bin tu te déracines quand même tu vois parce que tu vois comme je t'ai dit j'étais là-bas je m'y suis sentie bien mais en même temps - bon en même temps je suis restée deux mois, mais j'ai pas senti appartenir en fait tu vois enfin je peux, je peux tu vois dire

    « ouha je me suis trop identifiée là-bas je me vois trop habiter là-bas » ça peut être vrai mais en même temps le fait est que j'ai passé que deux mois là-bas tu vois et tout ce truc là de ce que les gens te renvoient tout ce que je te disais avant je pense qu'y y aurait un certain temps d'adaptation et que en plus je pense que tu dois faire le sacrifice de plein de choses en plus. Comment dire, c'est dur à expliquer en fait chais pas j'ai ressenti en fait pas exemple je me suis dit « si je vais vivre là-bas à long terme » genre imagine tu as des enfants là-bas tu vois, je me suis posée cette question je me suis dit « est-ce que t'accepterais que tes enfants vivent comme des Brésiliens en fait? » tu vois concrètement et en fait moi c'est encore aujourd'hui une question qui est difficile parce que je me dis quelque part que j'aurais envie que mes enfants y aient ce que moi j'ai eu et là-bas dans certains endroits - pas partout, mais pour pouvoir avoir une ascension sociale, pour avoir une très bonne condition de vie y faut être aisé comme je t'ai dit donc c'est pas la majorité des gens. Y a quand même beaucoup de gens puis y a beaucoup de gens qui s'enrichissent aussi donc y a quand même une classe émergente donc tu peux quand même bien vivre là-bas mais voilà je sais pas comment dire mais je pense qu'il y a quand même, c'est peut-être un héritage de la colonisation hein c'est peut-être un truc de groupe de se dire « on est supérieur » quelque part tu sais, y a peut-être de ça hein, mais j'avais le sentiment par exemple de enfin comme une sorte de peur ouais j'ai pas envie que mes enfants y grandissent là-bas tu vois j'ai pas envie que si j'ai des enfants un jour qu'y aillent dans une école brésilienne tu vois enfin, c'est peut-être parce que je connais pas assez bien aussi j'y ai pas vécu assez longtemps mais j'avais un peu cette espèce de, tu vois, j'ai pas du tout cette peur dans un autre pays européen, si je vais dans un autre pays d'Europe tu vois c'est pas loin et voilà je connais assez bien les cultures, j'ai quand même bien voyagé en Europe, voilà je sais que y a quand même un niveau de vie et un niveau d'éducation qui se vaut dans la plupart des pays en tout cas. Tu vas là-bas y faut se battre en fait tu vois, pour avoir le meilleur y faut que tu te battes si t'es classe émergente si t'es classe moyenne et j'ai pas eu cette habitude de me battre bin par exemple mon copain c'est différent, voilà il a grandi dans un contexte où ouais enfin y ont connu un moment donné un moment difficile financièrement enfin tu vois y ont pas toujours eu tout ce dont y avaient besoin et du coup tu comprends ce besoin de comment dire cette aspiration à plus tu vois à donner plus à tes enfants. Moi c'est pas que je veux donner plus à mes enfants tu vois je veux juste qu'y aient que ce que j'ai eu tu vois pas moins quoi et de coup de me dire « bin ouais si je vais vivre làbas... » tu vois c'est pas pareil si t'y vas en tant qu'expat deux-trois ans, t'y vas en tant qu'expat deuxtrois ans tu te dis « ouais c'est bien » au moins les enfants y ont une expérience de l'étranger mais en général y vont dans un lycée français ou une école française enfin tu vois ce que je veux dire, t'as un cadre de vie assez protégé. Tu vas vivre là-bas en tant que personne qui s'intègre là-bas c'est différent déjà, et comme moi j'avais déjà cette perspective là, j'avais déjà cette idée là dans ma tête,

    j'y suis pas juste allée en disant « voilà chouette un petit voyage allons au Brésil » en fait tu vois donc d'ailleurs j'ai jamais fait ça avec mes voyages mais ça m'a quand même fait voir que c'est un choix énorme quoi, c'est pas un choix que tu fais juste voilà parce que t'es amoureux de quelqu'un et que tu vas le suivre tu vois, pour moi enfin tu peux le faire ça à la limite mais pour moi c'est inconscient.

    Tibo

    Ouais. T'as le droit de pas répondre à cette question mais comme t'y as fait référence plusieurs fois est-ce que le fait d'avoir ton copain au Brésil dans ton expérience c'est quelque chose qui a compté ou qui a influencé, qui a eu un sens? T'es pas obligée de répondre parce que c'est un autre domaine.

    P

    Euh si ça a influencé mon expérience au Brésil?

    Tibo

    Voilà est-ce que la façon dont t'as appréhendé les choses, ton état d'esprit peut-être, dont t'as ressenti, je sais pas?

    P

    Bin alors du coup oui je pense c'est obligé que ça a joué un rôle hein après tu vois pour moi j'étais pas du tout dans la même région de lui et c'était ce que je voulais en fait, parce que ce qui comptait pour moi comme je t'ai dit c'était avoir mon expérience du Brésil donc je me disais aussi bin voilà je veux pas me retrouver comment dire, je veux pas voir le Brésil à travers ses yeux je veux me faire ma propre idée donc c'était un truc bien pour moi mais en même temps je m'étais peut-être pas rendue compte que c'était vraiment loin en fait. Au brésil t'as pas forcément des moyens de transport faciles et ça coûte cher l'avion donc du coup c'est vrai que je me reposais peut-être beaucoup sur lui par moments, en même temps y pouvait pas m'aider concrètement parce que il était loin donc y a peut-être eu une frustration à ce niveau là mais en même temps c'était réel enfin c'est ça la réalité du pays donc en même temps ça m'a fait découvrir le Brésil tel qu'il est vraiment tu vois et j'ai pu aussi découvrir un Brésil différent de ce dont lui il parle, de ce que lui il vit aussi parce que c'est pas la même région j'ai pu vraiment avoir mon expérience du Brésil quoi et c'est vraiment ce que je voulais. Ouais euh après oui bin forcément ça a influencé sur ma vision du Brésil de toute façon, bon c'est vrai que lui y m'en parlait déjà beaucoup avant, si je rencontrais quelque chose qui me faisait penser à lui ou tu vois enfin je faisais toujours des rapprochements mais ouais non. Après du

    coup - tu vas connaître toute ma vie (rire) mais on est plus ensemble en fait là donc en ce moment je me pose plus forcément ces questions là que j'avais posé avant. Après pour autant c'est vraiment un pays qui m'a énormément plu et je voudrais vraiment y retourner quoi même y habiter voire tu vois.

    Tibo

    Du coup justement en parlant de ça, quand je t'ai demandé ce que tu placerais en tête entre ta vie au Brésil et ta vie à Lyon 2 t'as répondu Lyon 2. Est-ce que tu peux développer un petit peu dans tout ce contexte là?

    P

    Attends répète la question?

    Tibo

    Dans le questionnaire que je t'ai donné, que placeriez-vous en tête : votre vie au Brésil ou à Lyon 2, en France donc...

    P

    Ah oui!

    Tibo

    On sent que t'as ces deux trucs qui te tiraillent un petit peu et t'as du mal à, enfin c'est normal hein, à vraiment choisir parce qu'il y a une lucidité d'un côté, un attrait de l'autre...

    P

    Ouais bin le truc c'est que ma vie ici comme je t'ai dit elle est plus facile quoi clairement tu vois je sais qu'ici les choses sont plus faciles donc d'un côté je préfère ma vie ici pour ça bin aussi parce que j'ai ma famille et mes amis en France, pas forcément à Lyon mais en France, après euh comment dire ouais c'est vrai que j'ai un attrait pour là-bas ouais et je pense même indépendamment de mon copain du coup et c'est toute la question de l'engagement à laquelle tu touches là, parce que comme je t'ai dit tout à l'heure enfin c'est une chose d'aller y vivre quelques années en électron libre et d'y aller et t'insérer dans la société quoi vraiment genre en intégrant une famille là-bas en fait concrètement donc je pense c'est ça quelque part bin ça fait peur quoi concrètement de se dire voilà tu vas à je sais pas combien de kilomètres de ton pays, de ta famille, voilà mes parents y peuvent

    pas forcément voyager non plus tu vois donc, donc de se dire « tu vas te couper quoi » tu vois, y a cette notion de se dire « si la personne ne compte pas venir vivre ici un peu » donc c'est toi ok super mais enfin je dis pas non tu vois parce que bin c'est un pays que j'ai beaucoup apprécié, en même temps ouais je trouve ça inconscient quoi de te dire « voilà je pars pour la vie » tu vois et c'est tellement, c'est tellement, tu te déracines encore plus tu vois, déjà moi je me sens un peu déracinée à la base enfin j'ai du trouver mes racines moi-même tu vois, maintenant que je les ai tu vois j'ai pas envie de me dire « ok je lâche tout » tu vois c'est ouais c'est un saut dans le vide quoi c'est un saut dans le vide et c'est faisable et concrètement c'est faisable mais complètement irréalisable concrètement c'est pas difficile tu prends un avion et tu vas là-bas tu vois ce que je veux dire après voilà est-ce que émotionnelement, affectivement, justement tu auras assez de soutien enfin tu vois c'est toutes ces questions là aussi de penser un peu à ta sauvegarde à toi je pense c'est des pensées de préservation en fait et tu vois moi je me dis j'ai beaucoup aimé sa famille [à mon copain] tu vois je me suis très bien sentie là-bas c'est pas le souci c'est juste de me dire « ok ça c'est son monde à lui » tu vois c'est pas mon monde donc ça peut devenir mon monde à moi mais j'ai besoin de retrouver quelque chose d'avant aussi tu vois et c'est pour ça moi par exemple si je vais vivre là-bas à long terme j'aurais besoin d'avoir des amis tu vois en-dehors de mon travail d'avoir des personnes comme ici qui ne sont pas liées à mon travail des personnes notamment avec qui je peux avoir des discussions tu vois je sais pas moi sur des sujets qui m'intéressent, des personnes avec qui j'ai des affinités quoi pas juste des personnes qui sont là parce qu'elles sont là parce que la famille y a un peu cette notion tu vois de pas chercher les personnes tu vois enfin y ont la famille donc y s'autosuffisent entre eux et dans ta famille c'est pas des gens que t'as choisi donc c'est pas forcément des gens comme nous qu'on a rencontré bon voilà on va se voir des amis en fonction de nos affinités, un peu trop des fois c'est vrai que des fois on est intolérant et on déprécie la famille à ce point là mais euh au travail c'est pareil, au travail c'est pas des gens que tu choisis et moi voilà je pense que si j'étais là-bas j'aurais besoin de ça, j'aurais besoin de me dire « ok j'ai des personnes avec qui je suis parce que j'ai envie d'être avec elles » tu vois pas parce que c'est ma famille ou que c'est mes collègues et aussi j'aurais besoin de connaître des expats et donc ça je pense que c'est ce qui m'a fait ressentir ça quand j'étais dans le sud je me suis rendue compte à quel point, quoi que tu puisses dire, au bout d'un moment t'as besoin de t'identifier à quelque chose du passé quoi, à quelque chose qui fait que t'es toi en fait et pour moi ça a été hyper important et c'était pareil en Italie d'ailleurs j'avais besoin des fois de parler français avec des gens qui parlaient français j'en connaissais pas beaucoup en Italie et au Brésil j'en connaissais plus du coup et c'est ce qui est très marrant là non plus c'est pas des personnes que j'ai choisi tu vois c'est des personnes qui se sont trouvées là comme moi et avec lesquelles j'avais pas forcément d'affinités en fait mais on était dans la même circonstance et là tu

    t'aides donc c'est un peu ce cercle aussi comme la famille, comme le travail, mais ouais je sais pas si c'est parce qu'on est beaucoup plus individualiste qu'eux mais pour moi y a toujours cette notion de pouvoir choisir quoi, tes fréquentations, ce que tu fais, pas subir les choses, et dans la façon dont est construite cette société y a encore beaucoup ce, tu sens encore un peu beaucoup de subir tu vois, de là, de là enfin y ont une mentalité de fou quoi y ont une joie de vivre, y sont toujours contents, toujours optimistes, enfin tu apprends énormément aussi de ça de leur façon de vivre tu vois, c'est vrai que nous ici à côté on est hyper blasé on est toujours en train de se plaindre enfin c'est clair hein alors qu'on a, qu'on a tout, mais y ont quand même une façon de subir les choses tu vois avec joie, avec joie c'est pas un souci mais y a quand même des choses qui me rebellaient en fait là-bas j'avais envie de dire aux gens des fois « mais comment vous supportez ça, comment c'est possible que vous viviez comme ça » tu vois et ouais...

    Tibo

    D'accord. Et je ne t'ai pas encore demandé mais est-ce que toutes tes expériences comme l'Italie par exemple, tout ton passé de voyages, d'expériences à l'étranger donc, ça t'as servi pour te préparer au niveau mental je sais pas, tes analyses, as-tu pu réinvestir des choses ou est-ce que tu t'es sentie peut-être à l'aise grâce à ça je sais pas?

    P

    Ouais ah ouais ça m'a forcément aidé parce que c'était mon premier gros, enfin j'ai vécu un an làbas [en Italie] c'était mon premier séjour à l'étranger de longue durée quoi en tant qu'étudiante et ouais j'ai vécu là-bas des trucs que j'avais jamais vécu avant tu vois notamment dans la coloc, la coloc avec des personnes de différentes cultures enfin ouais j'ai vécu des choses là-bas que j'avais pas connu ici donc déjà là-bas ça m'a augmenté ma flexibilité (rire) et je pense que ouais c'était nécessaire d'avoir ça même avant d'y aller quoi je pense que d'aller d'office au Brésil ça aurait peutêtre été intense ouais parce que comme je t'ai dit maintenant je fais vraiment une séparation entre l'Europe et le reste enfin avant je voyais pas vraiment l'Europe comme un tout tu vois j'avais du mal à voir ça comme une entité et maintenant en fait je le vois vraiment comme ça parce que je pense que y a quand même quoi qu'on dise - ça dépend de quel pays peut-être mais, y a quand même une certaine similarité tu vois une certaine bon en plus on est proche géographiquement avec ces pays là et je pense que quand tu quittes cette zone, c'est un peu ta zone du monde tu vois, quand tu quittes cette zone t'es dans un autre schéma, dans un autre ouais t'es dans totalement autre chose tu vois ta zone de référence elle est plus là donc y faut le prendre en considération et je pense que souvent les personnes voyagent un peu trop à la légère en fait tu vois genre recherche d'exotisme en fait tu vois.

    Je vois bien. Et qu'est-ce que tu dirais que ça t'as apporté cette expérience au Brésil, est-ce que tu te sens différente aujourd'hui? C'est dur de mettre des mots dessus surtout à chaud parce que c'est assez récent mais disons dans quel domaine tu penserais que t'as évolué voilà je sais pas, si t'arrives, c'est pas facile.

    P

    Euh ouais bin je sais que j'ai changé, ça au moins c'est sûr, après en quoi pour moi je le lie pas forcément à l'expérience du Brésil en tout, je le délimite pas à mon séjour, je le délimite plus à ma relation en fait avec mon copain, plus à l'expérience de l'interculturel comme ça de mes relations multiculturelles multiples. Mais euh ouais c'est plus ça et puis bon les rencontres en fait ouais si c'est quelque chose qui m'a changé ce serait les rencontres sur place, les personnes que j'ai rencontré, ma coloc, les filles avec qui je vivais tu vois enfin j'ai pas mal discuté avec elles des fois c'était un peu le clash enfin ouais on a été au clash des fois et bon....

    Tibo

    Sur des choses, des façons de voir les choses ou sur le quotidien?

    P

    Non sur des trucs de la maison parce que bon c'était pas très clair des fois ce qu'elle attendait de moi mais ouais et puis enfin ouais c'était juste ouais des fois des façons de voir la vie aussi hein des fois elle m'a bien cassé certaines visions que j'avais certaines choses tu vois enfin ouais bin ça revient un peu à ce que je disais avant tu vois cette vision de nous ici c'est vrai qu'on a jamais manqué de rien donc on voit les choses différemment on voit pas notre confort matériel comme quelque chose d'hyper important d'office on va être assez tu vois genre « ouais je vais aller faire de l'humanitaire, je vais aller aider les gens pauvres » tu vois des trucs du genre et elle me disait « bin oui mais méprise pas les gens qui veulent leur confort parce que quelque part si tu aides ces gens là c'est aussi pour qu'ils aient un confort quelque part, si tu les aides c'est pour ça, pas pour qu'ils aillent moins bien donc ne va pas mépriser des gens qui se contentent d'être dans leur confort » tu vois parce que quelque part c'est ce à quoi on aspire tous enfin c'est pas notre but dans la vie tu vois mais c'est normal de vouloir ça quoi en fait et puis c'est hypocrite en fait de nier ça tu vois et c'est juste qu'elle avait une façon de parler assez cash tu vois je pense qu'elle m'a un peu ouvert les yeux sur certains trucs tu vois, que je pensais en fait avant en tant qu'Européenne et confrontée là-bas bin ouais voilà tu réfléchis quoi.

    Et tu penses que ça va influencer ta vie à venir ou disons comment tu vas vivre à présent?

    P

    Ouais bin ouais je pense ouais.

    Tibo

    D'accord. Alors finalement ouais bin voilà on a quasiment fini et puis ça va être l'heure hein...

    P

    Il est quelle heure en fait?

    Tibo

    Il est moins vingt.

    P D'accord.

    Tibo

    Oui ça a duré un peu plus longtemps que prévu (rire)

    P

    Non mais c'est bon (rire) en fait j'ai juste un rendez-vous avec C à cinq heures et demi mais c'est bon y a le temps là c'est juste à côté.

    Tibo

    Ok. Et pour finir si c'était à refaire est-ce que tu changerais quelque chose, est-ce que t'es contente de la façon dont les choses se sont passées?

    P

    Alors si je devais refaire quelque chose je clarifierais mon séjour chez cette fille genre je mettrais les choses plus au clair tu vois genre voilà parce que du coup elle m'a pas fait payer de loyer alors que je dormais là quoi je dormais dans le salon mais en même temps elle m'a donné un statut d'invité mais c'était très ambigu du coup pour moi parce que je savais pas trop ce qu'elle attendait de

    moi tu vois bon j'ai acheté ma bouffe j'ai acheté et bon moi j'avais cette notion tu vois de bon bin j'ai toujours envie de dire « bon on mange ensemble? » tu vois c'était pas pour qu'elle fasse les choses à ma place c'était que j'avais envie de partager avec elle parce qu'aussi mon vécu de la coloc en Italie c'était comme ça tu vois (sonnerie de téléphone) - pardon (C au téléphone, il est l'heure).

    Tibo

    On va abréger t'en fais pas, désolé.

    P

    Mais y a pas de soucis c'est pas grave. Attends juste c'est quoi que tu me demandais déjà? Ah ouais je clarifierais mon statut ouais pour que ce soit moins ambigu et euh bin ouais un autre truc je pense que par rapport au stage non après c'est juste par rapport à mon copain tu vois je mettrais peut-être moins la pression tu vois puisque du coup c'est vrai j'ai peut-être mis un peu de pression quoi par rapport au contexte tout ça je pense que j'étais moi-même en situation d'acculturation (rire) mais ouais non c'est tout sinon non j'ai pas de regrets.

    Tibo

    C'est super. T'as gardé des contacts un peu avec des gens de là-bas?

    P

    Ouais avec quelques personnes ouais.

    Tibo

    Des Brésiliens ou des expatriés?

    P

    Brésiliens surtout brésiliens.

    Tibo

    Et tu penses que ça va être à peu près durable?

    P

    Ouais ouais.

    C'est une bonne chose alors. Et dernier élément, est-ce qu'il y a des éléments de la culture brésilienne que toi t'aimerais incorporer pas dans ta culture mais oui ta façon d'être, des éléments que t'aimerais transposer?

    P

    Ouais je pense bin justement la façon de vivre les choses de voir les choses tu vois cet optimisme qu'on a pas mais après c'est lié au contexte aussi donc je pense que ça va être dur de l'avoir à tout prix, enfin tu vois je pense la vision des choses elle est liée aussi tu vois à là où tu vis mais en même temps voilà l'ayant vécu je pense que je peux essayer de garder ça aussi.

    Tibo

    D'accord. Bin écoute merci beaucoup j'ai trouvé ça très intéressant d'avoir pu discuter avec toi ///

    Entretien avec C (50 minutes)

    Tibo

    Pour commencer, je voudrais savoir comment tu en es arrivée à partir au Brésil, pourquoi le Brésil, comment tout ça est arrivé quoi, comment ça s'est goupillé en fait?

    C

    Bon en fait c'était une drôle de coïncidence parce que justement j'avais fini mon Master l'année dernière donc j'ai validé un Master bac +5 et je savais pas trop quoi faire, j'avais deux ans d'avance, alors je me suis dit « soit je pars au Brésil mais je parle pas portugais, ce qui me stresse, soit je reprends un Master de psycho » parce qu'en plus mon autre diplôme n'était pas très valorisé en France donc je me suis dit en faisant psycho ce serait plus simple, enfin je suis partie sur cette branche et puis je suis arrivée j'ai rencontré ma directrice de recherche de cette année qui était brésilienne et qui a dit comme ça en classe « ah bin ceux qui sont intéressés pour faire un stage au Brésil, s'ils ont un projet cohérent, moi je peux les envoyer et tout machin » donc je suis allée la voir en fin de cours, elle m'a proposé, euh on a beaucoup parlé, en plus je viens de la Réunion donc c'est vrai que le Brésil, la Réunion c'est des sociétés un peu, un peu soeurs qui au niveau du métissage, au niveau de l'histoire aussi, et puis et voilà donc je lui ai dit que c'était marrant parce justement cette année là je voulais aller au Brésil et puis donc elle m'a proposé, de fil en aiguille ça s'est fait très vite en fait, et puis donc justement c'est une bonne coïncidence parce que bon c'était soit psycho soit Brésil et finalement c'est psycho et Brésil donc c'était exactement ce que je voulais.

    Tibo

    Et quand est-ce que tu as pris la décision pour de bon de dire « c'est bon j'y vais »?

    C

    En fait pour moi ça m'a paru tellement simple et tellement une évidence c'est que quand je lui ai parlé je me suis dit, j'avais pas l'impression que c'était concret, et puis quand la semaine d'après elle m'a dit « bon c'est bon j'ai vu, est-ce que ça te dit? » je me suis dit c'est vraiment concret quoi j'y vais vraiment et puis j'ai réalisé à ce moment là mais sur le coup je me suis dit « c'est pas possible, c'est une drôle de coïncidence » je m'étais pas vraiment projetée et puis finalement quand elle a commencé à me donner des projets concrets là je me suis dit « mais ça y est quoi, on y va » et puis ouais, enfin ouais je me suis pas trop freinée en fait j'avais un peu d'économies de côté et puis c'est exactement ce que je voulais faire je suis mon chemin en fait c'était, je savais pas trop quoi choisir

    et puis finalement c'est comme si ma route me mettait sur le Brésil quoi alors je me suis dit « allez on y va c'est parti quoi ».

    Tibo

    Super. Justement, à propos de tes expériences à l'étranger, tu as déjà voyagé au Canada, à la Réunion pendant deux ans et demi, au Burkina Faso, etc., est-ce que t'as le sentiment que ces expériences à l'étranger antérieures, est-ce que ça t'as servi?

    C

    Ah ouais vraiment, vraiment parce que je pense que, de plus parce que je suis partie avec une fille qui n'avait aucune expérience de voyage, et justement c'est ce voyage là où je me suis dit « ouais finalement ça y est, j'ai des bagages quoi, j'ai voyagé », c'est mon truc de toute manière, moi tout mon cursus, toute ma vie c'est ça, voyager c'est ma passion, c'est ce qui me fait vivre aussi parce que quand je voyage je me sens bien et je pense que ouais c'est clair que mes expériences antérieures m'ont beaucoup aidé, surtout au Canada parce que c'est vrai que le Burkina Faso, la Réunion, c'est des endroits où on parle plus ou moins français donc euh, puis j'ai une facilité pour les langues donc c'est venu tout seul ça le créole, tout ça quoi, donc c'est vrai que le Canada c'était immersion anglophone et là le Brésil c'était immersion lusophone donc c'est vrai que je mets un peu en parallèle ces deux expériences là et c'est vrai que ouais concrètement mes expériences d'avant m'ont beaucoup servi.

    Tibo

    D'accord. D'ailleurs t'as fait des progrès assez fantastiques en portugais non?

    C

    Ouais, ouais ouais, c'était impressionnant, je sais pas qu'est-ce qui s'est passé dans ma tête mais en plus j'étais hyper stressée avant de partir parce que j'avais pris des cours et je m'en sortais pas du tout et puis c'est venu naturellement, je sais pas comment ça se fait, j'avais l'impression que j'avais le portugais en moi quoi (rire), c'est venu tout simplement ouais.

    Tibo

    Super. Est-ce que tu peux me parler un petit peu donc de ton cadre, dans quelle ville t'étais, quelle région du Brésil?

    C

    En fait du coup nous on est parti dans le nord du Brésil, à Recife, dans le Nordeste, et puis, ouais, et puis en fait du coup Mme X, notre tutrice, nous avait proposé deux régions, donc c'était Rio Grande do Sul, ou Nordeste, avec Recife, et c'est vrai que moi j'étais particulièrement attirée par le nord parce que mon étude, d'une part je faisais un stage et d'autre part ma recherche sur place était sur l'africanité donc c'est vrai que dans le nord c'est beaucoup plus présent, beaucoup plus affirmé qu'à Rio Grande do Sul où c'est beaucoup plus européen, donc c'est vrai que moi ça me faisait particulièrement écho, et puis donc voilà, on est parti pour faire un stage et une étude enfin finalement ça s'est révélé être deux stages parce qu'on était deux du coup à partir et la deuxième a pas compris qu'on devait se partager les stages donc elle m'a fait passer le message comme quoi il fallait qu'on fasse les deux et puis finalement les gens sur place se sont ajustés à nous, enfin c'était tout une dynamique qui a fait que finalement on a fait deux stages au lieu d'un, et aussi que du coup on avait notre recherche à faire en plus donc le séjour a été complètement surréel, on s'est dépêché et euh moi je suis hyper heureuse de ce que j'ai vécu, ça faisait longtemps que j'avais pas eu ce sentiment d'être au bon endroit au bon moment et ouais et puis j'ai eu une espèce de fusion avec le peuple brésilien je sais pas, j'avais une attirance très forte pour le Brésil depuis très longtemps, depuis vraiment petite, mon père écoutait beaucoup de musique brésilienne et puis enfin cette langue elle était vraiment dans ma tête et enfin voilà on est parti, je me suis un peu perdue du coup.

    Tibo

    Et du coup c'est intéressant parce que cet attrait pour le Brésil c'est pas de cette année, ça remonte à avant le fait que tu voulais y aller...

    C

    Ah oui complètement, parce que moi ma passion c'est tout ce qu'est africain, je sais pas pourquoi, depuis vraiment longtemps, et un retour à je sais pas quoi, et complètement contradictoire avec mes origines parce que je suis d'origine russe, anglaise, enfin je sais pas, mais en tout cas j'ai une attirance très forte pour l'Afrique et puis toutes ces sociétés métissées c'est vraiment ma passion, enfin de toute manière mon cursus professionnel, universitaire, c'est l'interculturel donc c'est vrai que c'est des choses qui me renvoient à des choses très profondes et le Brésil, c'est vrai que mon père m'a beaucoup ouvert à la musique brésilienne j'adore les percus, j'en fais beaucoup donc c'est vrai que, que le Brésil c'est un peu un endroit privilégié pour ça et donc oui ouais le Brésil ça a été présent depuis très très longtemps et je peux pas trop expliquer pourquoi, je sais que quand j'étais ado pendant deux-trois ans j'ai du faire une fixette sur le Brésil mais énorme (rire), puis ça m'est

    passé, il y a eu la Martinique, la Réunion, et beaucoup de choses qui sont passées, et bizarrement, quand j'ai fini mon cursus à la Réunion, ça m'a renforcé ce désir d'aller voir cette terre où il y a du métissage aussi où l'Afrique elle est là mais d'une autre manière et puis voilà, je suis arrivée à la fin de mon diplôme, je sais que la Réunion c'est ma terre hein, c'est là ou je veux finir et là où je veux revenir, mais j'ai encore envie de profiter de cette soif de découvrir, de toutes ces opportunités d'être libre pour voyager encore et du coup c'était ça c'était bon ok je finis mes études je vais au Brésil ou je continue mes études puis finalement les études ont pris le dessus, la raison a pris le dessus mais le Brésil était dans le fond quoi, il était en arrière plan c'est sûr.

    Tibo

    Et donc c'est pour ça que quand je t'avais demandé quel sens avait ce voyage au Brésil t'as marqué que pour toi ce voyage c'était des « retrouvailles »?

    C

    Ouais retrouvailles parce que j'ai vécu des choses très difficiles cette année à Lyon déjà parce que c'était le retour en métropole et que j'appréhendais beaucoup, ça faisait déjà près de trois ans que j'étais à la Réunion et que déjà j'avais ce sentiment de retrouvailles à la Réunion, d'avoir trouvé la terre où je devais être, d'être retournée à quelque chose de très profond et ouais c'est vrai que quand je suis revenue ici ça a été tout une démarche de me réapproprier la métropole qui pourtant est mon lieu d'origine et puis j'ai eu des histoires très difficiles cette année et c'est vrai que le Brésil arrivait à point nommé dans ma vie parce que j'étais pas bien du tout et quand je suis revenue je me suis retrouvée quoi, j'ai rencontré les bonnes personnes au bon moment j'avais l'impression d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis toujours je me suis retrouvée aussi spirituellement, ça fait des années que je lâchais cette partie là de ma vie que je savais pas trop où j'en étais, j'ai fait des rencontres magnifiques là-bas, ma recherche aussi c'était sur le Candomblé donc j'ai été très amenée à rencontrer des gens qui étaient...tu connais le Candomblé?

    Tibo

    Non, j'allais te demander après par rapport à tes stages et recherches, j'aurais bien aimé savoir ce que tu faisais précisément.

    C

    Ouais bin le Candomblé c'était ma recherche en fait, c'est la religion afro-brésilienne, donc c'est
    tous les rites des afros descendants et tout ça et c'est très intéressant c'est une philosophie de la vie

    qui m'a vraiment touché et j'ai développé ma spiritualité vraiment à fond là-bas et, et retrouvailles aussi parce que j'ai l'impression que j'ai vu tellement de choses à faire au Brésil, j'ai l'impression que c'était une petite part de chez moi quoi, et aussi justement c'est ce que je te disais plein de choses qui sont pareilles avec la Réunion, y a la végétation, la nourriture, une certaine manière de vivre, une manière de voir la vie aussi, et c'est vrai que ça m'a, ouais un petit retour chez moi après la nostalgie ça faisait depuis six mois que j'étais partie de la Réunion ça faisait un bien fou quoi pour plein de trucs quoi.

    Tibo

    On le sent parce que quand je parle avec toi, quand je lis le questionnaire, on dirait que tout de suite t'étais très à l'aise au Brésil, que tu te sentais vraiment bien à tous les niveaux, voilà c'est peut-être ce qui explique, le cadre, etc.?

    C

    Bin je pense aussi peut-être que aussi mon choc culturel en fait c'était pas du tout à l'étranger, mon choc culturel il est là parce que je reviens et c'est vraiment une problématique très forte de vie c'est que c'est très personnel c'est que euh toute ma vie, quand je reviens, c'est là que j'ai mon choc culturel c'est là que je me dis « ma culture elle m'appartient pas » et je me sens mieux chez les autres que chez moi et c'est hyper fort en fait parce que à chaque fois que j'arrive dans un pays j'ai pas ce moment où je me dis « ouh qu'est-ce que je fais là et tout » à chaque fois je suis là « qu'est-ce que c'est trop bien ce truc là, qu'est-ce que je suis chez moi » et j'arrive tout de suite à tisser des liens avec les gens, après mes destinations je les prends pas au hasard hein, c'est vrai bin c'est vrai que j'ai toujours l'impression d'être à l'endroit où je dois être quand je voyage et de pas l'être quand je reviens et c'est vrai que, sauf pour le Canada qui a été une grosse surprise parce qu'en fait j'avais postulé pour des échanges en Espagne enfin tout dans le sud moi c'est toujours dans le sud, et en fait j'ai pas du tout été prise et c'est une de mes amies qui m'a laissé son voyage pour en faire un autre, et du coup le Canada j'avais pas pensé en fait, j'avais pas élaboré et finalement je me suis retrouvée pareil, là vraiment pour le coup ça a été l'endroit où je devais être au bon moment j'ai rencontré des personnes avec qui je suis encore en contact après cinq ans et puis ça a été la révélation de mon voyage aussi parce que quand je suis partie là-bas en fait je suis partie avec une amie, et elle m'a lâché sur place en fait donc j'ai commencé à voyager toute seule j'avais pas le choix et à partir de ce moment là j'ai, parce que quand je voyage je voyage toute seule et je pense que c'est important de le préciser parce que c'est pas du tout la même démarche parce que quand tu voyages toute seule t'es face à toi même tu te poses beaucoup de questions sur ton identité, tu remets beaucoup les choses en

    question, ton cadre culturel aussi, et c'est vrai que suite à cette étape là du Canada où je me suis retrouvée toute seule j'ai eu, maintenant c'est comme une drogue quoi, il faut que je voyage toute seule, j'ai besoin de me retrouver toute seule dans un cadre autre que mon cadre de naissance quoi et puis c'est comme ça que je me construis honnêtement hein, moi mon identité elle est construite comme ça.

    Tibo

    Est-ce que justement là c'était un peu différent parce que t'étais avec quelqu'un? Tu l'as senti? Ça t'as, peut-être pas gênée, enfin je sais pas si c'est le bon mot, mais....

    C

    Si, ça m'a gêné parce qu'en plus cette fille honnêtement enfin, allez je le dis elle l'écoutera jamais, mais ça s'est vraiment pas bien passé elle avait vraiment un complexe d'identité puis justement c'est ce que je te disais elle avait de grosses choses à régler en voyageant et moi ça m'a bousillé mon énergie quoi parce que j'y allais déjà j'étais pas bien avec moi-même et quand j'y suis allée j'avais pas la force de m'occuper de quelqu'un d'autre qui avait son propre choc culturel et elle m'a gaspillé mon énergie puis elle son voyage s'est très mal passé et j'avais tellement peur d'être assimilée à elle parce que elle renvoyait des choses très négatives aux gens et c'est vrai que ça m'a bousillé mon énergie mais je regrette pas parce que ça faisait partie de la dynamique du voyage aussi certaines choses que je devais traiter avec moi-même aussi pourquoi pas partager des choses et pas faire tout le temps des voyages toute seule et ouais j'ai des choses à partager, mais le problème c'est que cette fille elle était complètement dans une dynamique de d'arraché, elle était arrachée à sa terre hein, elle le vivait super mal et elle voulait pas en parler et elle partageait rien et moi le truc c'est que j'avais le sentiment d'être responsable d'elle et d'autant plus parce que je savais qu'elle avait jamais voyagé et qu'elle voulait pas en parler, elle faisait plein de bourdes qui me faisaient sentir qu'elle était pas du tout débrouillarde et que c'était la première fois qu'elle partait, et elle voulait pas partager ça au lieu de dire « tu peux m'aider? » enfin non elle était pas du tout dans une demande et du coup moi ça me rendait responsable d'elle.

    Tibo

    Je comprends tout à fait. On va parler d'images. Est-ce que au Brésil t'as été, pas la victime mais oui, de préjugés, de stéréotypes, positifs ou négatifs hein. Est-ce que t'avais une image en tant qu'Européenne ou que Française peut-être, et est-ce que tu l'as senti par rapport aux gens, aux Brésiliens quand vous discutiez, en bien ou en mal?

    C

    Ouais bin justement, ça a un lien avec elle parce que moi j'assume pas du tout mon côté français j'ai vraiment un rejet de mon identité je sais pas pourquoi, c'est pas que j'ai honte d'être française c'est que je me sens profondément pas française et en fait du coup quand je voyage je suis assimilée à la France et qu'en fait je le porte pas et c'est hyper lourd pour moi, et le truc c'est que d'autant plus que Véronique, cette fille avec qui je voyageais, elle avait euh, elle renvoyait ce que je déteste en France en fait elle s'ouvrait pas du tout, elle trouvait que tout ce que les gens faisaient était bizarre et pour moi c'est ça, enfin la France c'est une vieille dame qui a peur de l'Autre en fait et c'est vraiment ce qu'elle me renvoyait et du coup dans cet environnement qui en plus est hyper chaleureux où les gens ouvrent leur porte complètement, ouvrent leurs bras, moi je me sentais mal, je me sentais mal d'être assimilée à elle en fait elle représentait pour moi tout ce que j'aime pas en France et c'est vrai que ça c'est assez difficile pour moi quand je voyage c'est que je supporte pas d'être assimilée à une Française alors que c'est ce que je renvoie en fait et je sais pas je pense que j'ai vraiment un travail à faire sur ça pour ma propre identité culturelle puis et puis aussi ça c'est un truc que je porte énormément et surtout parce que je voyage dans les pays du sud où le peuple est plus métissé c'est que quand je suis blonde c'est H24 quoi c'est tout le temps « ah la blonde nanana » et puis je représente ça quoi la fille blonde un peu exotique c'est vrai que particulièrement à la Réunion et en Afrique moi ça me pesait et au Brésil j'ai fini par le ressentir et ça c'est quelque chose que je supporte pas. Tu vois, comment les hommes t'abordent et puis ouais tu représentes quelque chose quand même en temps que la blonde quoi surtout dans les pays du sud où y en a pas tant que ça, bon après c'est vrai que le Brésil c'est différent parce que y a beaucoup de blondes, enfin y a pas beaucoup de blondes mais c'est vrai qu'on représente quelque chose en tant que femme blonde, et surtout quand je voyage c'est vrai que ça c'est un truc tout bête que j'aime bien raconter mais j'avais rencontré une fille au Canada qui voyageait tout seule et qui me disait « mais moi j'ai jamais d'histoires avec des hommes et tout et qui essayent d'aller plus loin et tout » mais moi je disais « mais moi tout le temps » mais cette fille elle était hyper grande, très brune avec des cheveux super longs et je pense que y a un type de fille que les hommes aiment plus attaquer quoi et c'est vrai que ouais, et puis je suis petite et puis enfin bon bref y a plein de trucs qui font que c'est vrai que physiquement j'attire pas forcément les hommes bien intentionnés et au Brésil je l'ai ressenti aussi mais c'était pas comme à la Réunion parce qu'à la Réunion c'est une attaque constante quoi, c'est « hé la blonde nanana » là au Brésil c'était plus subtil mais c'était présent et ça ça me fatigue, vraiment, j'ai même pensé une fois à me teindre les cheveux mais j'ai pas eu envie d'enlever ma couleur naturelle parce que pour une question de stéréotypes ça m'énerve mais c'est vrai que c'était présent au Brésil, je peux pas dire que ça y était pas.

    D'accord. Est-ce que maintenant tu pourrais me parler un petit peu de tes lieux de stages, de tes relations avec tes collègues, avec tes « patients » ou « élèves » je ne sais pas comment les qualifier et puis voilà, qu'est-ce que tu faisais là-bas?

    C

    Bin y avait deux choses très différentes en fait, on était dans deux structures donc y en avait une qui était psychanalytique et qui s'occupait des enfants autistes, donc là on était vraiment dans une démarche clinique très psychanalytique et c'est vrai que pour moi c'était un petit peu difficile parce que je suis pas du tout psychanalyste, mais alors vraiment pas et euh ça s'empire au fil des ans et euh je comprenais absolument pas leur démarche alors après je me suis sentie hyper bien intégrée parce que c'était une équipe très soudée ils étaient dix-huit psys et hyper avenants, c'était des gens avec qui je me suis sentie tout de suite en confiance, avec l'équipe y avait pas de problème mais le problème c'était vraiment personnel c'est que j'accrochais pas avec leur manière de travailler, avec leur manière de voir le patient, et c'est vrai que ça a été un problème parce que euh je comprenais pas leur méthode et je me suis pas inscrite du coup dans le lieu de stage comme j'aurais pu le faire et puis surtout parce qu'on avait pas assez de temps parce que par exemple on participait on partageait les groupes thérapeutiques avec les psys et y nous demandaient d'aller consulter avant, de voir les enfants leur dossier et tout on avait juste pas le temps quoi donc c'est vrai que je me suis pas investie comme j'aurais pu et puis bon c'est vrai que ça m'a encore renvoyé à ma problématique de je suis pas psychanalyste en France ou ailleurs c'est vrai que c'est pas évident d'être psychologue et de rejeter la psychanalyse, et l'autre [stage] par contre je me suis complètement retrouvée heu un centre de psychologie transpersonnelle mais surtout sociale dans les favelas dans une favela de Recife le Coque et puis en fait là c'était une association donc c'était que des bénévoles et puis donc nous on participait à des groupes enfin c'est pas des groupes thérapeutiques du coup c'est des groupes holistiques qui visaient au développement personnel et identitaire des enfants donc par petites tranches d'âge donc là c'est vrai qu'on avait pas trop une place de psy hein moi je dirais plus comme une place d'éducateur puis vraiment une place de bénévole et puis là c'est pareil on a été accueilli à bras ouverts dans les équipes et je me suis sentie faire partie de cette assoc aussi. L'autre [stage] dans une moindre mesure puisque j'étais pas, je me sentais pas investie du fait juste du cadre méthodologique en fait mais de l'autre complètement, c'était vraiment c'était une révélation hein c'était comme ça que je voulais travailler et ça a fonctionné alors que dans l'autre stage j'avais l'impression que je servais à rien autant dans l'autre j'avais l'impression qu'il y avait des choses très fortes qui se créaient avec les enfants et quand je suis arrivée dans cette structure d'ailleurs j'ai eu un

    sentiment de déjà vu comme si j'avais déjà été là dans ma vie c'était obligé où je devais être là dans ma vie je sais pas et en tout cas je me suis vraiment trouvée et autant ce que j'ai fait je pense a servi autant tout ce que les gens m'ont renvoyé m'a énormément servi.

    Tibo

    Effectivement parce ça te donnait un rapport privilégié avec la culture brésilienne d'un côté avec les enfants, de l'autre côté avec la représentation du handicap, enfin culturellement tu as du vraiment apprendre beaucoup je suppose avec ces contacts?

    C

    Ouais ouais surtout dans la favela. Autant avec les enfants autistes c'était une structure privée très très chère donc donc le public était plus ou moins enfin bien occidental et bien enfin je sais pas si tu connais le Brésil mais avec les écarts de vie énormes donc ceux qui ont beaucoup d'argent évidemment ils ne vivent pas comme les occidentaux puisque la culture est pas la même mais c'est vrai que la société de consommation est très présente mais autant dans la favela là c'était la rencontre avec la société brésilienne pour moi parce que c'est vrai c'est dans ces sociétés là où dans ces peuples là qui ont beaucoup souffert que je pense s'inscrivent plus toutes les racines brésiliennes, tout ce qu'ils ont gardé de l'esclavage aussi je pense c'est clair que et puis aussi c'était là où il y avait mon sujet de recherche parce que le Candomblé c'est pas dans les milieux riches à part à Bahia le Candomblé ça se fait dans des milieux un peu plus afros donc plus pauvres évidemment donc là c'était aussi la rencontre avec tout ce côté spirituel qu'on ne connait pas du tout ici et qui porte vraiment quelque chose de très fort dans la culture brésilienne y a une présence très très forte de ce Candomblé et qui en plus est intéressante parce que à Recife en tout cas cette religion est complètement discriminée, complètement stéréotypée, les gens la rejettent complètement alors qu'en fait elle est présente dans tout les aspects de leur vie et ça c'est très intéressant aussi mais bon c'est vrai qu'après moi mon approche de la culture elle est très différente parce que c'est vraiment ce qui me nourrit en fait de découvrir la culture de l'Autre que ce soit ici où ailleurs c'est mon cursus, c'est mon identité, c'est qui je suis et c'est vrai qu'à chaque fois que j'arrive dans un endroit différent c'est comme si j'absorbais la culture en fait je suis un peu une éponge, et euh donc c'est vrai que j'avais déjà beaucoup lu sur le Candomblé avant de partir parce que c'était mon sujet de recherche donc j'avais déjà une appréhension de ce que j'allais trouver et c'était flagrant quoi quand je suis arrivée dans la favela que les gens m'ont ouvert leur porte enfin ouais.

    Je vois. Et justement entre avant et après ton séjour, est-ce que ton image du pays, de la culture elle a un petit peu changé ou pas? Est-ce que ça a confirmé ou au contraire infirmé ce que tu pensais de la réalité brésilienne?

    C

    Ouais. Je pense que j'avais beaucoup assimilé le Brésil à Rio et São Paulo et finalement je m'attendais pas à voir ce que j'ai vu à Recife puis je m'attendais pas aussi à voir autant de buildings de trucs comme ça je pensais que ça allait être un peu plus, peut-être un peu plus j'arrive pas à trouver le mot euh, préservé, préservé de tout ça ouais et euh mais bon je m'attendais tout de même à ça, je m'attendais parce que j'avais aussi une appréhension de la société réunionaise je savais un petit peu ce que les sociétés esclavagistes et le passé a pu donner au niveau culturel, au niveau métissage, et c'est vrai qu'en plus vraiment pour le coup j'en étais déjà persuadée avant de partir et je encore plus en rentrant c'est que c'est des sociétés complètement soeurs quoi et euh c'est vrai que ma vie à la Réunion a fait que ouais c'est vrai que le Brésil était une sorte de retrouvailles et je m'attendais à ça, je m'attendais à ça mais je m'attendais pas par contre à tant de différences sociales alors que je le savais, je savais que économiquement le Brésil s'est développé très vite, qu'il y avait des écarts sociaux énormes mais j'ai été choquée quand même, j'ai été choquée de voir comment, en fait c'était pas la misère qui m'a choqué parce que une fois qu'on a fait l'Afrique ou linde enfin ce genre de pays on est pas vraiment plus choqué mais notre choc il est plus aussi douloureux je pense, enfin c'est pas ça que je voulais, c'est pas que la misère me choque plus c'est juste que j'ai passé le cap de me dire « houlala c'est pas possible » mais euh dans le sens où je m'attendais pas à ce que les gens cohabitent comme ça, j'ai vraiment été choquée de à quel point les gens vivent vraiment, par exemple la personne qui m'a accueilli elle était dans un immeuble avec piscine, salle de sport et tout et au milieu d'une favela quoi je me dis « mais comment c'est possible quoi que les gens arrivent à survivre, cohabiter comme ça » avec autant de en France on pourra jamais faire ça quoi et ça ça a été mon choc quoi du Brésil de voir des gens dans la misère qui cohabitaient qui ont aucune rancoeur y a pas de lutte des classes quoi, y a pas de vraie rancoeur envers les personnes qui ont réussi et y a pas de pitié envers les personnes qu'ont pas réussi, y a pas de rapports en fait entre les très riches et les très pauvres et ça c'est un truc qui m'a choqué.

    Tibo

    Et tu as pu t'y faire quand même au cours du séjour?

    Ouais mais je pense que comme d'habitude je sais pas pourquoi je me suis identifiée plus à ceux qui se contentent du peu et c'est vrai que je me suis un peu détachée de ce côté occidental et ça a joué sur ma deuxième structure de stage qui était privée, qui accueillait les gens et qui se permettait de faire des choses pas de la manière que j'aurais aimé en fait ouais et je pense que ouais c'est toujours ma problématique de toute façon c'est que je pense que je viens d'un milieu très riche et très fermé et que je rejette tout le temps ça et que en voyageant je me rapproche toujours des gens qui ont rien parce que je trouve ça fabuleux d'avoir rien et de donner tout et parce que je ressens ça je sens que et pourtant c'est pas comme si j'avais été élevée sans rien c'est que au contraire je me retrouve dans ce don comme ça et c'est vraiment ce que je suis profondément et c'est vrai que c'est un paradoxe complet dans mon identité quoi.

    Tibo

    Et justement ce fait d'avoir été confrontée à plusieurs cultures, civilisations différentes, est-ce que aujourd'hui ça te permet de porter un regard différent sur la France, la culture française, voire l'Europe entière, est-ce que du coup ton image, ta perception de ta propre culture, est-ce que ça a changé, est-ce que ton séjour au Brésil a altéré cela, ta façon de voir, de te voir toi-même en Europe ou en France?

    C

    Ouais toujours quand je rentre je refais toujours un rejet total de la France et c'est un problème, c'est vraiment un problème...

    Tibo

    À quel niveau? C'est vrai c'est dur de préciser je pense mais à quel niveau tu fais ce rejet là, qu'estce qui te...

    C

    Bin c'est pas la culture française parce que j'aime beaucoup mon pays, j'aime beaucoup sa diversité, j'aime beaucoup tout ce qu'il peut offrir de différent que ce soit dans le peuple ou juste les paysages ou la bouffe ou chaque région a une culture énorme mais c'est vrai que je supporte pas le peuple français ça me fatigue son rejet de la différence, ça me fatigue son manque de communication, sa peur de l'Autre et c'est vrai qu'à chaque fois que je voyage et que je vois à quel point je suis accueillie, à quel point j'arrive à me sentir bien dans d'autres pays parce que on m'accueille comme

    ça je me dis « mon Dieu quelle honte on fait en France » et je me sens toujours en marge de mon propre pays et ça c'est très difficile quand je rentre parce que bin par exemple ça c'est un exemple très fort, quand je suis rentrée j'avais pas le coeur d'aller aux élections quoi, parce que j'avais raté la campagne d'une et que je me sentais pas de voter pour quelqu'un que j'avais pas suivi tout ça et puis de deux parce que vraiment c'était la première semaine où je suis rentrée les élections et bin je me sentais plus française quoi et bin là je vais revoter pour le deuxième tour mais je trouve que c'est un exemple hyper hyper fort parce que euh ouais parce que je me sens pas inscrite dans ce pays pour son peuple en fait. Et c'est exacerbé surtout depuis que je suis revenue de la Réunion c'est vraiment les gens m'énervent quoi, la mentalité m'énerve et je pense qu'en plus c'est pas du tout objectif hein, c'est vraiment parce que je sais qu'il y a des gens super et que j'en rencontre aussi mais je me sens pas bien ici.

    Tibo

    Ok. Bon très bien, c'est quelque chose qu'on va survoler parce que le retour dans la culture d'origine c'est très intéressant et tout car ça fait partie de ce que t'as vécu mais c'est moins dans mon sujet.

    C

    Ouais puis en plus la chose c'est que je me suis toujours sentie différente ici avant de voyager bon c'est que mes parents quand même nous ont fait beaucoup voyager quand on était petit, on a fait la Grèce en bateau, on est allé au Portugal enfin plein de voyages comme ça différents donc cette découverte de l'Ailleurs je l'avais déjà depuis très très petite enfin mes parents à dix-huit mois ils sont partis aux Baléares quoi enfin c'est vrai que j'ai commencé à voyager très très vite mais c'est vraiment je me suis toujours sentie différente dans mon propre pays mais je savais pas de quelle manière et quand je suis allée au Canada ça m'a paru comme une évidence je me sentais pas d'ici mais c'est très étrange comme sentiment parce que en même temps c'est ce que je suis évidemment c'est la culture c'est inscrit en moi c'est mon éducation et puis mes parents sont très français ma mère est d'origine anglaise mais elle renie complètement ses origines elle parle pas anglais elle s'en fout enfin pour elle elle est française et c'est vrai que ouais moi je me sens pas d'ici et ça a été évident à partir du moment où j'ai voyagé.

    Tibo

    D'accord, d'où presque une certaine quête de « spiritualité » comme tu as pu dire tout à l'heure?

    Bin spiritualité non parce que c'est la première fois que je rencontre ma spiritualité enfin c'est pas la première fois que je la rencontre mais c'est vrai que ça m'a permis de retrouver une spiritualité que j'avais perdu complètement mais ça c'était au Brésil, parce que mais j'y suis pas allée dans cet objectif c'était ça qui était très intéressant c'est que j'y suis allée toujours dans cette envie de découvrir l'Afrique autre part c'est toujours pareil moi c'est toujours l'Afrique qui me motive, mais c'est vrai que bizarrement alors que je m'attendais pas du tout à ça c'est là que je me suis retrouvée en plein dans ma spiritualité dans ce que je croyais j'ai remis en question beaucoup de choses et c'est vrai que ça m'a beaucoup fait avancer et puis je crois que j'ai rencontré aussi les bonnes personnes au bon moment mais après non, quand je voyage c'est plus une quête identitaire honnêtement plus que spirituelle, c'est une quête identitaire justement parce que comme je m'inscris pas ici je veux savoir où je m'inscris ailleurs et pourquoi en fait.

    Tibo

    Et justement donc quand t'es arrivée au Brésil, comment t'as fait pour rencontrer des gens, est-ce qu'il y avait des stratégies, comment ça s'est passé pour se faire des amis, nouer des liens?

    C

    Bin en fait c'est ça qui a été super bizarre au Brésil et autant je crois vraiment, c'est un peu bizarre, mais je crois vraiment aux vies antérieures et tout ça, mais j'ai pas le sentiment de venir du Brésil vraiment pas mais j'ai vraiment le sentiment d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis très longtemps et ces personnes là m'ont renvoyé le même retour, de me dire « j'ai l'impression que je te connais depuis très très longtemps » et en fait c'est ça c'est que, je me suis éloignée de la question de départ, c'était quoi déjà (rire)?

    Tibo

    Comment tu t'y es prise, comment ça s'est passé pour rencontrer des gens, comment c'est arrivé?

    C

    Ouais ouais c'est ça. C'est que du coup quand on est arrivé on a été super bien accueilli y avait tout qui était prévu, y avait des gens qui venaient nous chercher à l'aéroport et tout donc c'est vrai qu'au niveau des liens on a tout de suite été cocooné c'est vrai que les gens nous ont emmené à droite à gauche, nous ont dit « il faut faire ça, ça il faut faire, il faut pas faire » c'est vrai qu'à ce niveau là ça s'est fait ouais naturellement mais moi j'ai vraiment l'impression que j'ai rencontré les personnes que

    je devais rencontrer sur place alors par exemple un exemple tout bête c'est qu'au début j'avais vraiment du mal par rapport à ma recherche parce que pour s'introduire dans le milieu des religions afros et tout ça c'est pas évident quand on est pas afro et qu'on est pas de cette culture là parce qu'en plus les gens se cachent plus ou moins parce que c'est dévalorisé donc c'est vrai que j'avais beaucoup de mal puis en fait j'en ai parlé à une dame dans l'assoc comme ça vite fait un dimanche et puis un semaine plus tard j'ai un musicologue qui faisait le même sujet que moi qui m'a appelé pour me dire « oui je suis au courant que t'as pas trop de contacts moi j'en ai plein si tu veux on se rencontre » et en fait mon contact avait fait le tour de cinq personnes, elle en fait avait filé mon contact à quelqu'un qui connaissait qui connaissait qui connaissait et qui est finalement arrivé dans les mains de ce type et en fait vraiment on est devenu tout de suite ami ça a été hyper fort on s'est vachement aidé et ça a été comme ça tout le long, j'ai rencontré que des gens que je devais rencontrer tout le temps et des gens qui m'ont donné tellement d'énergie qui m'ont tellement aidé qui m'ont tellement soutenu dans une période de ma vie où ça allait pas que j'avais vraiment le sentiment que rien n'était au hasard au Brésil quoi et c'est vrai que j'avais eu ce sentiment là très très fort au Canada aussi, que je rencontrais tout le temps les bonnes personnes aux bons moments mais autant là franchement au Brésil ça a été, j'avais tout le temps je me sentais super liée avec les gens et les gens me ramenaient dans leur famille et tout enfin j'ai pas le sentiment de retour sur une terre mais de retour avec un peuple en fait et c'était hyper fort enfin, j'ai rencontré un gars que je considère comme mon père quoi enfin pas comme mon père, comme mon père mais mon père d'adoption, pareil j'ai rencontré un homme avec qui c'était très très fort enfin j'ai pas eu de relations avec lui mais euh c'était très très fort c'est la première fois que je ressens ça autant de retrouvailles quoi comme si je le connaissais depuis des années et c'est lui en plus, moi j'ai ce sentiment là et c'est lui qui m'a parlé de ça y m'a dit « tu sais j'ai l'impression qu'on s'est retrouvé » y m'a dit « j'ai l'impression que ça fait des années qu'on que pour moi c'est évident que je te connais par coeur » et j'avais le même sentiment et c'est vrai que cette notion de rencontre au Brésil a été super forte parce que tous les gens que je rencontrais c'était ça une impression de déjà vu quoi.

    Tibo

    C'est assez fantastique.

    C

    Ouais ouais et c'est pour ça aussi que j'avais vraiment le sentiment de me trouver au bon endroit au bon moment parce que j'avais l'impression que tout ce qui m'arrivait c'était écrit en fait.

    Tibo

    Et dans le même domaine qu'est-ce que tu faisais dans ton temps libre, quels étaient tes loisirs, tes activités avec les gens, comment ça se passait un petit peu?

    C

    Bin j'avais pas de temps libre (rire). C'était vraiment ça, j'avais vraiment pas de temps libre on passait d'une structure de stage à l'autre et, et le seul peu de temps pour moi que j'avais mais vraiment peu c'est-à-dire le soir de huit heures à minuit c'était pour mon étude donc c'était d'aller trouver des gens, de faire des entretiens, parce que mon étude c'était la place des pratiques afrobrésiliennes dans la construction de l'identité des jeunes des favelas et donc il fallait que je rencontre des gens qui faisaient de la percu, des gens qui faisaient de la capoeira, des gens qui faisaient chefs de culte du Candomblé, des jeunes aussi beaucoup c'est vrai que tout mon temps libre ça passait là-dedans mais en même temps j'ai pas eu le sentiment d'être privée de vie privée parce que je me suis retrouvée complètement dans ce milieu, complètement, je me suis sentie accueillie et initiée en fait, c'était super bizarre parce que les gens me parlaient et finalement quand je suis rentrée je me suis dit « en fait je comprenais plein de trucs que quand je l'explique aux gens y comprennent rien », des termes vraiment afros mais aussi je pense parce que je connaissais bien l'Afrique et c'est vrai que quand avec cette appréhension toute cette culture africaine, des racines, des rites, parce que je le connais très bien, c'est vrai que les gens m'ont peut-être senti initiée tout de suite parce que je l'étais peut-être déjà un petit peu dans le fond. J'élabore en parlant mais ouais c'était ça c'est que ouais je me suis sentie intégrée tout de suite ça c'est sûr.

    Tibo

    Mais du coup toutes tes relations venaient de tes deux stages, de ton travail, des gens que tu as rencontré de fil en aiguille comme ça?

    C

    Ouais j'ai pas eu de, mes potes étaient en lien avec mon sujet d'étude, je me suis pas fait d'amis en dehors, j'avais pas le temps vraiment, et y a juste deux-trois petits moments où pff j'en avais juste marre alors je boycottais un peu mon stage (rire), je disais que je faisais mon étude et puis en fait je voulais juste prendre une heure pour dormir parce que vraiment j'étais crevée et donc j'allais à la plage pour dormir et c'est tout le temps sur la plage que je rencontrais des gens, c'était incroyable, je rencontrais, une fois j'ai passé, bon là j'avais pas boycotté, j'étais vraiment au repos et j'avais pris du repos et j'étais partie sur la plage et j'ai passé tout l'aprem avec un petit de huit ans qui m'a raconté

    toute sa vie c'était un petit de huit ans des favelas donc déjà adulte quoi car ils ont pas d'enfance et il a raconté toute sa vie et, et enfin voilà toutes les rencontres que je faisais étaient soit très ponctuelles mais très fortes soit, soit en rapport avec mon sujet d'étude mais c'était aussi mes amis quoi enfin c'est vrai que les gens avec qui je parlais du Maracatou, le Maracatou je sais pas si tu connais c'est un style de percussion, ou de la capoeira ou du Candomblé c'était des gens que je côtoyais aussi par les cérémonies, ou pour plein d'autres choses donc c'est vrai que ouais, puis on se retrouve, c'est un petit milieu hein donc c'est vrai que finalement les contacts se font très vite parce que c'est un petit milieu quoi et parce que aussi je restais toujours dans le même favela donc les gens se connaissent quoi.

    Tibo

    Et à propos de ta colocation, comment ça s'est passé un petit peu?

    C

    Ah c'était mitigé hein. Ma colocation de la personne qui me, après la personne qui m'accueillait c'était un peu ambivalent parce que c'est vrai qu'en fait je m'entendais bien avec elle mais j'avais le sentiment que elle elle était mariée...

    Tibo

    Il s'agit d'un Brésilien, d'une personne brésilienne?

    C

    Ouais ouais et déjà je m'entendais pas du tout avec cet homme là, enfin c'est pas que je m'entendais pas du tout parce que je l'aime bien il est sympa mais je me retrouvais pas du tout en lui quoi, enfin c'est quelqu'un qui est très très très riche, qui aime pas du tout les favelas, qui n'avait rien à voir avec mon sujet d'étude, qui voulait pas que je parle des trucs afros dans la maison parce que ça porte malheur, enfin bref voilà, j'étais un peu la macumbella du truc, la macumbella c'est le terme négatif associé aux personnes qui font du Candomblé et c'est vrai que je me suis pas sentie un rapport très fort avec cet homme là et j'avais le sentiment qu'elle elle était un peu jalouse de moi en fait parce que plusieurs fois elle m'a fait des remarques en disant que j'allumais les hommes enfin des trucs comme ça quoi donc j'avais vraiment pas le sentiment, et puis j'étais vraiment pas du tout partie dans cette optique là je, enfin bref du coup ma relation avec elle était assez ambiguë en fait parce que en même temps on s'entendait bien, en même temps on, on avait l'impression qu'elle elle instaurait un peu de rivalité enfin donc bref ça s'est bien passé mais je peux pas dire que je me

    sentais chez moi quand je rentrais à l'appart enfin bizarrement je dormais aussi dans la favela et c'est vrai que je me sentais plus à l'aise quand je dormais dans la favela alors que quand j'entrais dans cet immeuble tout aseptisé.

    Tibo

    T'as fait tout ton séjour dans cet immeuble?

    C

    J'ai été accueillie chez eux mais finalement vers la fin je dormais tout le temps dans la favela parce que comme je faisais tout le temps des cérémonies ça finissait tard et ça craignait plus de sortir de la favela que de rester dedans en fait donc je restais dans la favela la nuit.

    Tibo

    D'accord, je croyais que tu vivais avec Véronique.

    C

    Ah non non et heureusement parce que déjà je la supportais plus dans les stages mais alors si on avait partagé notre vie c'était pas possible, elle me puisait mon énergie vraiment, et heureusement qu'on a pas cohabité mais après oui non j'étais quand même très indépendante, j'ai été très très bien reçue, ça je le retire pas, mais c'est juste que un mois et demi c'est long avec des gens qu'on choisit pas et c'est vrai que non ça s'est bien passé, je peux pas dire ça, mais je me suis pas retrouvée dans ce groupe quoi, c'était pas le côté du Brésil qui me faisait écho. Mais c'était intéressant aussi de voir l'autre [côté].

    Tibo

    Oui parce qu'il y a plusieurs Brésils.

    C

    C'est ça, et puis en plus vu qu'ils étaient très riches ça me permettait aussi euh, leur environnement, y connaissaient rien du Candomblé, y connaissaient rien de mon sujet d'étude, toute les pratiques afros c'est vade retro satanas et justement ça m'a apporté énormément pour travailler sur ces stéréotypes hein, sur qu'est-ce qui fait qu'on rejette l'afro, enfin la culture afro et tout ça donc c'est vrai que c'était aussi très riche mais moi je me suis pas retrouvée parce que justement ce que j'étais au Brésil c'était vraiment inscrit dans ce milieu très tradi et ils n'étaient pas comme ça et puis eux ils

    sont très très riches quoi donc c'est des bagnoles et enfin c'était pas le Brésil que je côtoyais après en fait.

    Tibo

    Tout à fait. Et est-ce que t'as connu des galères, enfin ce qu'on appelle des galères quand on roule sa bosse, est-ce que t'as connu ça au Brésil?

    C

    Bin justement alors c'est c'est toujours parce que moi je suis Miss galère, tout le temps la poisse, quand je voyage il m'arrive tout le temps des trucs de fou mais de fou vraiment, genre des gars qui me poursuivent ou des trucs comme ça, enfin vraiment à chaque fois que je voyage j'ai des histoires de malade où je rencontre des gens trop bizarres enfin bref et, et en fait c'est le seul voyage que j'ai fait dans ma vie où y m'est rien arrivé. Et en plus quand je voyage je m'attends toujours à avoir la poisse comme ça, tout le temps des crasses et c'est vrai que les gens quand je rentre de voyage y attendent toujours mes petites histoires, mes petites aventures qui m'arrivent de trucs de merde, enfin pardon (rire), mais euh mais c'est ça non c'est vraiment euh enfin y m'arrive la poisse et là au Brésil bizarrement y m'est rien arrivé du tout et que des choses positives. Rien de négatif, à part mes relations avec Véronique qui n'étaient vraiment pas positives pour l'une comme pour l'autre, mais euh après vraiment y m'est pas arrivé de poisse quoi. Ah si des trucs enfin un peu futiles quoi genre je me trompe de bus et je fais quarante kilomètres dans un sens et je me rends compte que je suis super loin de la ville et qu'il est vingt-heures trente, enfin ce genre de truc en fait mais c'est pas enfin je panique plus du tout en fait enfin mais ça c'est pareil hein, c'est mon expérience de voyage qui fait que quoi qu'il arrive le danger c'est les autres hein c'est pas soi-même quoi donc après si on panique c'est vrai qu'on fait ressentir ça aux autres enfin mais c'est vrai qu'en Afrique il m'arrivait tout le temps plein de trucs enfin des trucs à la con quoi enfin du genre taximan qui veut plus s'arrêter qui veut plus me laisser sortir du taxi enfin ce genre de trucs qui peuvent être dangereux mais au Brésil jamais...jamais...si, si, je mens. Il m'est arrivé un truc mais j'ai tout de suite réagi et j'ai pas eu peur en fait c'est pour ça que c'est à ce voyage là que je dis que je me suis rendue compte que ça y est j'avais de l'expérience, parce que j'étais partie en fait y avait c'était le dernier jour du carnaval parce que j'y suis allée pendant le carnaval, et en fait le couple chez qui j'étais était trop crevé mais moi je voulais pas rater une minute du carnaval quoi c'est vrai que eux ils y sont tous les ans mais moi j'avais vraiment envie de profiter et je suis partie au carnaval toute seule et je savais que ça craignait parce qu'en plus c'était dans un coin de la ville où ça craignait et donc j'ai fait attention à pas m'habiller trop euh voilà, en plus c'est vrai que je suis blonde donc à chaque fois je

    passe pas inaperçue, et puis en fait y a un gars qu'est venu hyper efféminé qui dit, qui arrive en m'abordant en me disant « je suis homosexuel » et puis y me dit « oui je t'ai remarqué, je te trouve très très belle j'aimerais bien que tu fasses du mannequina et tout en fait je cherche des mannequins et nanana » donc y commence à me parler j'y dit « ouais bin ça m'intéresse pas moi je suis psy donc le mannequina c'est pas moi et puis je pense pas être une bombe donc euh » et puis y me dit « mais non ce serait bien qu'on fasse des essais photos nanana » et j'y dit « bin non c'est pas trop mon truc merci et tout » et y m'a collé collé collé et y m'a forcé à aller chez lui et j'ai vraiment eu les bonnes réactions en fait, je l'ai pas brusqué, je l'ai pas, j'ai essayé vraiment d'aller dans son sens sans trop aller dans le sien justement (rire) et je m'en suis bien sortie quoi mais c'était dangereux, je savais que c'était dangereux, puis en plus y m'avait sorti des trucs genre « oui, je travaille que avec des filles de Russie, d'Europe de l'est » enfin moi j'avais compris, j'avais senti le truc en plein carnaval je vois pas pourquoi on va faire des photos dans un appart enfin mais je pense que ce genre de truc à une fille très naïve qui voyage pas qui prend pour un compliment qui dit qu'il est vraiment homosexuel, elle pourrait aller dans le truc quoi, mais ça ouais c'est parce que j'ai de la bouteille et que je sais ressentir les gens maintenant aussi et que je sais aussi ne plus paniquer parce que si j'avais paniqué il aurait pu prendre le dessus quoi. Là j'y ai montré que ça m'intéressait pas point quoi.

    Tibo

    Et justement donc l'insécurité est-ce que tu l'as ressentie un petit peu, est-ce que t'as ressenti, y a peut-être des différences par rapport à la métropole ou peut-être même à la Réunion je sais pas?

    C

    Oui ouais c'est clair qu'on peut pas dire que le Brésil est pas dangereux, honnêtement c'est un pays dangereux et surtout parce qu'on était dans les favelas donc c'est clair que voilà, mais en même temps je me suis jamais sentie vraiment menacée contrairement à en Afrique. En Afrique j'ai vécu vraiment des choses très dures, parce que bin on est blanc et que du coup ça a pas du tout la même valeur que au Brésil, et au Brésil j'ai rien vécu de tout ça. Par contre c'est clair que je pense aussi que peut-être que mon comportement fait que je suis peut-être moins naïve donc les gens m'attaquent peut-être moins, je sais pas si les agressions sont une affaire de ce qu'on renvoie à l'autre ou une affaire de malchance, je sais pas.

    Tibo

    Je parlais du climat en général, est-ce qu'il y avait pas une pression peut-être mais enfin je sais pas

    quelque chose ou pas du tout?

    C

    Ouais quand même...

    Tibo

    Je connais pas du tout donc je pose des questions naïves tu vois.

    C

    Oui mais pas du tout je comprends, mais ouais quand même on peut pas dire comparé à ici, on se promène pas dans la rue à vingt-trois heures trente toute seule, mais après je pense que quoi qu'il arrive quand on voyage vaut mieux pas prendre de risques quoi. Enfin on est pas dans son pays, en plus quand on parle pas la langue c'est pas évident et je pense que ce climat d'insécurité il est là quand on voyage quoi qu'il arrive. C'est sûr que quand on voyage en Angleterre on voyage pas comme quand on voyage au Brésil par exemple, mais quoi qu'il arrive, on est une cible parce qu'on a des têtes d'étrangers et qu'on voit ça donc y faut faire attention. Après moi je sais que ça c'est un truc qui est intéressant par contre au Brésil c'est qu'y a une paranoïa énorme des gens riches mais vraiment, des gens qui comprennent même pas mon travail dans la favela, « qu'est-ce que tu vas faire là? », « comment, tu dors dans la favela?! » et oui en effet, c'est clair que c'était dangereux à l'intérieur de la favela mais pour être franche moi je me baladais vers vingt-trois heures à l'intérieur de la favela et j'ai jamais eu de problèmes, j'ai jamais été agressée. Après je peux pas dire que j'étais super à l'aise et que je me promenais en shorts et que tout va bien mais euh voilà c'était pas non plus la grande peur comme j'ai pu l'avoir en Afrique. Parce qu'en Afrique tu te promènes pas la nuit.

    Tibo

    Et est-ce que t'as le sentiment, bon c'est dur de mettre des mots dessus mais, d'avoir changé, suite à ton séjour au Brésil, est-ce qu'il y a des choses en toi qui ont changé, et tu le ressens peut-être?

    C

    Oui, dans chaque voyage on change, d'une déjà parce qu'on se comprend, parce que l'appréhension de l'Autre nous permet de relativiser certaines choses aussi, parce que beaucoup aussi quand je voyage je rencontre énormément de gens qui m'apportent énormément de choses donc c'est clair qu'à chaque voyage je reviens changée mais là ce voyage là je me suis retrouvée, c'était différent, parce que je pense que je m'étais perdue, je m'étais perdue en rentrant ici, c'est ça le pire, c'est que je

    me suis perdue en rentrant chez moi, parce que c'est pas chez moi, et là je me suis retrouvée. Et ça m'a fait du bien. Je me sens pas changée, je me sens sur la bonne route, et c'est ça qui est différent en fait, c'est que j'ai l'impression de m'être retrouvée et d'être repartie dans une dynamique que j'avais perdu en fait. Mais oui dans une certaine mesure c'est un changement aussi je pense.

    Tibo

    Et justement donc pour l'avenir, est-ce que tu as l'impression que ce séjour au Brésil influence déjà ou va influencer un petit peu ta vie à venir?

    C

    Ouais complètement.

    Tibo

    Dans quel sens? Tu peux m'expliquer un peu?

    C

    Bin parce que j'ai une proposition de doctorat là-bas, et que j'y pense vraiment. Au départ je m'étais dit « le Brésil ça va être une partie de ma vie » mais en partant vraiment j'avais le sentiment que j'avais pas achevé quelque chose et qu'y faut que je reparte là-bas et euh il y a des gens qu'y m'ont fait promettre que je reviendrai, c'était hyper fort parce que bon je suis pas du style à promettre des choses mais j'étais obligée, enfin c'est pas que j'étais obligée, c'est que j'ai senti que c'était une évidence de toute manière que j'allais revenir au Brésil, et en fait c'est que, comme je me suis inscrite complètement dans le Candomblé, le système du Candomblé fait qu'il y a des entités religieuses et que chaque personne descend d'une divinité donc moi je sais quelle est ma divinité, j'ai déjà consulté des gens pour savoir et tout, et avant de partir mon chef de culte de qui je suis très très proche m'a demandé de faire une prière et de remercier pour ce que j'avais vécu, donc je suis allée dans un temple alors que c'est pas du tout ma religion hein mais pour te dire comme je me suis inscrite profondément dans ça et je lui ai demandé de me mettre sur la route, de m'envoyer un signe, et le lendemain j'ai eu une proposition de doctorat au Brésil.

    Tibo

    C'est fantastique.

    C

    Ouais, après alors on y croit du côté spirituel ou pas mais en tout cas c'est comme si même si y a pas de divinités, même si ça n'existe pas - ce dont je ne suis plus du tout convaincue mais, j'ai l'impression que c'est comme si le Brésil m'avait mis sur la voie alors que c'était pas du tout mon plan, moi je viens d'une famille qu'est pas très intellectuelle, qui est pas enfin le doctorat c'est plafond de verre pour moi quoi déjà finir le Master c'est magnifique je me suis jamais projetée dans une thèse, je me suis toujours dit « c'est trop loin, être prof c'est pas possible ».

    Tibo

    Donc tu l'envisageais vraiment après le Brésil?

    C

    Ouais, et en fait pour tout te dire c'était ma quatrième proposition de doctorat dans toute ma vie y a quatre profs qui m'ont proposé de me prendre en thèse et je sais que c'est faire la fine bouche mais déjà une proposition de doctorat c'est énorme, quelqu'un qui te propose de te prendre en thèse je suis consciente mais c'est tellement mon plafond de verre, c'est tellement ce qui m'angoisse que j'ai toujours refusé mais après le Brésil je me suis dit « faut peut-être arrêter de faire la fine bouche quoi, faut peut-être y aller » et c'est comme si là ce que j'avais vécu c'était qu'une mise en bouche et qu'il fallait que je revienne pour compléter quelque chose vraiment et aussi parce que bin là j'ai abandonné mon Master du coup parce que j'ai pas réussi en rentrant à faire tout ce que je devais faire donc j'ai pas concrétisé mon étude que j'avais fait là-bas et ça me reste en travers de la gorge parce ce que j'ai l'impression qu'on m'a donné tellement d'énergie, j'ai rencontré tellement de choses que ça m'embête, ça m'embête de pas avoir, et du coup là c'est comme s'il fallait que je retourne au Brésil vraiment mais en même temps chaque pays que je fais j'ai l'impression qu'il faut que j'y retourne en fait pour des raisons différentes : la Canada pour les gens ; l'Afrique pour l'amour, parce que j'ai laissé quelqu'un là-bas ; la Réunion parce que c'est ma terre et que je sais que je vais finir làbas ; et le Brésil professionnellement et spirituellement. Donc c'est plein d'aspects de ma vie en fait.

    Tibo

    Est-ce que tu t'es sentie soutenue pendant ton séjour, enfin émotionnelement, soutien tu vois affectif?

    C

    Ouais vraiment parce que, parce que j'ai vécu des choses dures et que j'en avais pas parlé, que j'ai

    commencé à m'ouvrir là-bas, à recevoir des choses que j'ai aussi rencontré quelqu'un qui après on y croit on y croit pas, a consulté les Cauris tu sais, c'est un genre de coquillage, et ça ça fait partie d'une tradition afro-brésilienne qui m'a révélé plein de choses sur ma vie, je sais pas comment c'est possible mais il a connu toute ma vie, il a connu enfin après mon futur on y croit on y croit pas mais y m'a dit beaucoup de choses, on a parlé pendant quatre heures, de ma vie, de ce que je suis, de ce que j'étais, de mes épreuves et de ce que j'ai vécu, et j'ai fait comme une psychothérapie en accélérée quoi vraiment ça m'a ouais, je pense que j'ai traité beaucoup de choses là-bas. Donc ouais j'ai été très soutenue et par des gens dont j'avais l'impression que je les connaissais déjà en fait donc c'était hyper impressionnant comme sensation parce que ouais je me suis sentie soutenue par des gens qui profondément me respectaient et me connaissaient en fait alors que c'est vrai que quand on voyage on rencontre pas forcément des gens bienveillants et que là pour le coup vraiment j'ai rencontré que des gens bienveillants mais après c'est vrai que euh soutenue par rapport à...

    Tibo

    Bin parler de tes soucis, de tes petites galères, est-ce que tu te sentais isolée quoi simplement?

    C

    Non je me sentais pas isolée et je me sentais non pas isolée du coup sur mon quotidien là-bas parce que les gens étaient très prévenants, ils nous disaient beaucoup « attention sortez pas là nanana » même peut-être trop des fois et autant sur ça sur l'aspect concret de la vie quotidienne autant sur mon étude aussi, les gens m'ont aidée mais m'ont ouvert les portes y a un homme que j'ai rencontré que vraiment j'adore qui m'a, qui a passé deux jours à m'emmener voir tous les gens qu'y connaissait pour m'aider pour ma recherche, deux jours de sa vie, ce que je trouve énorme, enfin j'imagine même pas que ça puisse être possible en France, en plus que c'est un homme très très occupé et ouais non vraiment soutenue pour tout quoi, pareil pendant mon stage, dès qu'on avait une question y avait quelqu'un qui était là pour répondre, après soutenue par mon côté français, c'est-à-dire par Véronique, zéro, par par le...il y a quelqu'un je sais pas? [la prochaine volontaire pour l'entretien est arrivée].

    Tibo

    T'inquiète pas on a cinq minutes.

    C

    Mais après par le côté français plus ou moins parce que ici les gens comprennent pas pourquoi je

    voyage.

    Tibo

    D'accord, je vois. Et bien merci beaucoup, c'était très intéressant de discuter avec toi ///

    Entretien avec M (46 minutes)

    Tibo

    Pour commencer, est-ce que tu peux m'expliquer un petit peu comment tu en est arrivée à partir au Brésil cette année, pourquoi le Brésil, comment ça s'est en quelque sorte goupillé tout ça.

    M

    D'accord, depuis euh peut-être que j'ai dix ans, j'ai le rêve d'aller en Argentine. J'ai dû voir un reportage, je ne pourrais plus dire d'où vient ce rêve, mais voilà j'avais ce rêve là et avec ma Licence c'était pas possible, y avait pas de partenariat en Argentine donc j'avais même pas rendu le dossier donc j'étais un peu déçue tu vois et, on était plus tard que le six janvier, et y a O. qui est venu dans ma salle qui a dit « voilà, je sais que les dates pour les échanges, que la date de fin où tu dois rendre les dossiers pour les échanges est terminée mais si y en a qui veulent aller au Brésil voilà, y a encore une possibilité », alors je me suis dit bin vas-y fonce en plus comme ça si je suis à côté de l'Argentine comme ça je pourrais aussi y aller, en Argentine. Et voilà, c'est pour ça que je suis allée au Brésil.

    Tibo

    Très bien, et donc tu as pris ta décision, tardivement finalement?

    M

    Oui, bin oui oui je l'ai pris avant le six janvier bin et puis et je suis partie en juillet donc en fait ouais ouais j'étais assez speed dans tout c'était assez, plutôt la course, mais bien du coup.

    Tibo

    Oui, donc c'est une volonté qui remontait, ça fait un moment que tu voulais partir dans ce coin là du monde en fait.

    M

    Ouais vraiment l'Amérique Latine m'a toujours toujours inspirée j'avais vraiment envie d'y aller et de, mais plus l'Argentine car je parle espagnol et pas portugais donc c'est vrai que j'avais même pas pensé à aller au Brésil en fait et mais je suis très contente au final d'être allée au Brésil.

    Bien sûr, je vois. Est-ce que tu peux me parler un petit peu donc bin de la région, de la région où t'étais, de ta ville, etc., un peu le cadre de ton séjour?

    M

    Ouais, alors j'étais dans le sud, au sud au sud, donc Caxias do Sul, euh, c'est euh, quand je suis arrivée, c'était l'hiver donc y pleuvait, tous les jours tous les jours, les gens y sont c'est sûr qu'y sont, t'as un changement radical c'est sûr avec la culture française et la culture brésilienne tu le vois, mais d'un autre côté c'est vachement européen, enfin je veux dire, physiquement, les personnes ressemblent vachement à des personnes européennes, euh vu que y a beaucoup de descendants italiens et allemands on entendait quand même des gens parler italien ou allemand tu vois, alors que bin tu t'y attends pas au Brésil et puis euh, c'était une ville assez riche, c'était la seule ville du Brésil qui avait des conteneurs, tu sais pour faire les poubelles et tout ça, donc c'est vrai que c'était une ville qui qui, qui faisait Brésil mais qui aussi qui, où y avait aussi quand même quelque chose d'européen par exemple, que quand tu vas a Rio ou à Salvador bin tu retrouves plus quoi, ce truc européen je trouve, donc c'est vrai que j'aurais eu plus le choix j'aurais peut-être choisi une autre ville parce que cette ville elle était petite et euh, dans le sud, donc pas facile non plus pour voyager dans tout le Brésil parce que c'est un pays super grand tu vois, y vaut mieux être au milieu comme ça tu fais tout quoi (rire) ; et euh, et voilà ouais, c'est vrai que si je devais refaire cet échange déjà je referais plus long, je ferais un échange d'un an minimum...

    Tibo

    Oui, t'as le sentiment que six mois ça te...

    M

    Ouais, ouais ça m'a frustrée, franchement je suis frustrée d'avoir fait que six mois maintenant...

    Tibo D'accord.

    M

    Et euh, ouais, je le ferais plus long et dans une ville où je, je suis sûre qu'y a plus de d'activité tu vois, plus grande quoi.

    Et à la base six mois c'était donc, c'était imposé ou c'était un choix personnel?

    M

    Non, du tout, c'était j'avais donc le choix entre six mois et un an et je t'avoue que j'étais morte de trouille donc donc j'ai demandé à O. ce qu'il avait fait et y m'a dit « moi j'ai fait six mois et ça m'a suffi amplement, je suis rentré y a des gens qui me manquaient, j'étais content de rentrer », donc bin moi je me suis dit je vais faire six mois déjà, et c'est vrai que j'étais contente de rentrer mais j'aurais pu rentrer six mois plus tard quoi.

    Tibo

    Je comprends. Oui, parce que c'est ton premier grand voyage c'est ça non?

    M

    Ouais, je savais pas du tout comment ça allait se passer, est-ce que j'allais arriver à m'intégrer, etc., je partais toute seule alors que le seul voyage que j'avais fait avant c'était scolaire ou deux semaines en Angleterre enfin tu vois, et donc là, ouais ouais ça me faisait peur quand même et donc je me suis dit je vais faire six mois, y [O.] m'a dit que lui six mois ça avait vraiment été vraiment suffisant, qu'il aurait pas aimé rester plus, je me suis dit je vais partir sur ça et j'aurais su je serais partie plus, plus longtemps mais bon (rire).

    Tibo

    Bien sûr bien sûr. Et t'avais quelle image du Brésil avant de partir justement, est-ce que ça a changé entre temps, comment tu voyais les choses?

    M

    Comme je t'ai dit c'était tellement précipité que ouais j'ai pas eu le temps de, ni, je l'ai pas pris non plus, de me renseigner réellement et je me suis dit « tant mieux ça va me faire la surprise » je vais pas arriver avec plein de d'aprioris tu sais donc c'est vrai que je me suis pas spécialement renseignée donc après j'avais un peu, les clichés si tu veux, j'imaginais les plages, je pensais peut-être voir plus de pauvreté surtout à Caxias en fait, après quand je suis allée dans les autres villes c'est vrai que là j'ai eu ma dose mais euh ouais je pensais peut-être voir plus de pauvreté et je pensais aussi à des trucs cons mais euh différentes heures de repas, des trucs comme ça qui en fait non pas du tout. Donc voilà y a des petits trucs qui m'ont étonnée mais

    D'accord. C'est vrai que t'as voyagé après dans le Brésil, enfin que t'as profité de ton séjour pour voyager au Brésil ainsi qu'à l'extérieur...

    M

    Ouais, j'étais bin du coup comme mon rêve c'était d'aller en Argentine j'ai été faire vingt jours en Argentine.

    Tibo

    D'accord, ça c'est intéressant. Et comment ça s'est passé, t'es partie toute seule, comment tu t'y es pris?

    M

    Pour aller en Argentine?

    Tibo

    En général, dans tous tes voyages.

    M

    Donc dans tous mes voyages au début on s'était organisé avec tous mes colocs en fait pour faire un voyage, donc on avait fait Foz do Iguaçu, Rio, Salvador, puis on était revenu à Caxias et en fait euh si tu veux la colocation a commencé on était une grande famille, tous un grand échange, premier et grand échange dans un autre pays tatati tatata on se retrouve tous étudiants on se dit en fait c'est bon on va devenir friends tu sais des meilleurs amis toute la vie mais non (rire). On est différent, on vient de cultures différentes donc euh le premier voyage qu'on a fait c'est vrai qu'il a été un peu foireux au final parce qu'on avait pas les mêmes attentes du voyage mais on s'est séparé mais tu vois ça nous a juste montré ce qu'y fallait pas qu'on fasse pour le prochain [voyage] et moi donc pendant ce voyage je me suis vraiment rapprochée de mon coloc français et c'est avec lui après que j'ai décidé d'aller en Argentine et pour y aller on faisait tout au dernier moment, on disait bin aujourd'hui tu vas faire quoi on se levait et on allait marcher dans la ville on se disait « bin tiens je viens de voir sur la carte que y a un musée par là », on y passe et voilà. Et c'est comme ça que j'ai visité l'Argentine.

    Très intéressant, est-ce que c'est un truc que t'aurais fait en France, par exemple pour dire « tiens je pars » comme ça, aussi vite, enfin voilà....

    M

    Non, non et je le regrette. Maintenant j'y pense quand je pars à la gare maintenant je me dis bon allez je vais où maintenant et je serais prête à prendre un billet c'est vrai que ça m'a donné un peu cette spontanéité là.

    Tibo

    Mmh mmh, tu as l'impression d'avoir pris plus de, d'assurance c'est ça?

    M

    Oui voilà c'est ça, je n'ai plus peur d'aller toute seule du coup même une journée quelque part ça me fait plus du tout peur donc ouais c'est vrai j'ai envie de, ouais bah, quand tu dis à la gare j'ai envie d'aller prendre un billet c'est vrai que je vais pas le faire toute seule parce que je me dis « c'est con même d'aller à Genève une journée c'est chaud, autant que j'emmène quelqu'un avec moi » mais euh mais ouais je c'est ça j'aurais envie de bouger plus que, qu'avant quoi.

    Tibo

    Bien sûr. Et justement, ta coloc, est-ce que tu peux me parler un petit peu de ta vie sur place, de ton lieu d'habitation, des gens avec qui t'étais? Était-ce plutôt des Brésiliens, des compatriotes, des étudiants internationaux? Comment ça se passait un petit peu?

    M

    Et bin y avait deux Espagnols, non un Espagnol, une Italienne, deux Mexicains dont un qui parlait portugais parfaitement, un autre Français et moi. On était donc six peut-être dans un 70m2, entre 50 et 70m2, euh y avait deux chambres donc trois filles d'un côté, trois garçons de l'autre, une petite cuisine, deux salles de bain et un petit salon, donc tu vois que euh, que t'as pas d'intimité, jamais, et euh, et je pense que ça a été du coup le problème de notre coloc parce que on se retrouvait jamais tout seul tu vois. Je crois que l'appartement a du être fermé à clef quinze minutes dans les six mois parce que y avait personne à ce moment là mais sinon y avait toujours quelqu'un et c'est vrai que ça a été super enrichissant parce que j'ai bouffé des trucs de tous les pays du coup mais d'un autre côté ça nous enfermait aussi dans cette euh, dans le fait qu'on est étranger qu'on reste entre étrangers et y

    en a beaucoup qui ont fait ça, j'ai vu les deux Colombiennes et les deux autres Mexicains qui étaient amis avec nous on les voyait de temps en temps mais dès qu'on leur proposait de faire quelque chose dans un autre endroit avec d'autres Brésiliens bin c'était carrément plus dur tu vois et c'est vrai que après je l'ai dit à tout le monde, à ceux qui arrivaient tout ça, « fais attention quand tu fais un échange de pas rester qu'entre étrangers c'est con quoi ».

    Tibo

    Ouais, et du coup est-ce que t'as mis des stratégies en place pour t'intégrer, nouer des liens...

    M

    Ouais, en fait ça a commencé parce que mon coloc a eu des amis de par sa fac parce que lui il était tout le temps dans les mêmes groupes de personnes alors que moi je changeais à chaque heure de cours, donc plus dur aussi pour se créer de vraies relations durables tu vois, et donc y s'est fait ces amis là, on a commencé à bien sympathiser avec eux, et euh, et ensuite, comment, comment ça s'est passé, je sais plus exactement bref, je me j'ai rencontré je pense que c'était ah! la journée de l'enfant j'ai rencontré euh un gars qui avait fait un échange en Europe et du coup qui voulait me rencontrer pour qu'on puisse discuter et échanger, parler de notre expérience, et ce gars là il était danseur de hip-hop et il avait tout un groupe avec lui donc on s'est rencontré à l'occasion d'une de ses représentations, et c'est devenu mes, mes amis, vraiment, super bon feeling, donc du coup après voilà je restais tout le temps avec eux, j'étais plus chez moi j'étais tout le temps dans la rue avec eux et je disais donc à mon coloc de venir, ou d'autres personnes tu vois d'essayer que tout le monde en profite que j'avais cette relation là et euh voilà, je sais plus si c'était ça ta question de départ (rire).

    Tibo

    Si, c'était tout à fait ça, tu as très bien répondu, non mais c'est bien c'est intéressant, parce que du coup tu pars sur autre chose, tu y reviens, donc c'est intéressant parce que tu dis plein de choses et c'est vraiment, c'est tout à fait ça tu as bien répondu. Et du coup, comment ça s'est passé à l'université, puisqu'on parlait de la fac est-ce que tu t'attendais à ça, est-ce que ça t'as un petit peu déçu, ou...

    M

    Ouais, totalement déçue de la fac, vraiment vraiment, tout ce que j'ai appris euh, enfin, je vais pas
    dire que je savais tout mais je l'avais toujours vu dans, peut-être pas dans tous les aspects mais en
    tout cas tout ce que j'ai vu je l'avais déjà entendu ou vu quelque part euh, j'ai eu des dix sur dix, je

    suis française, je parle pas très bien le portugais, euh je euh, je révisais pas, je vois pas comment je peux avoir dix sur dix, c'était pour moi surnoté honnêtement. Et je m'ennuyais en cours, en fait les deux-trois premières semaines ça a été cool au contraire j'adorais aller en cours parce que ça me faisait travailler mon portugais tu vois je m'amusais à prendre des notes après je rentrais chez moi parce qu'il pleuvait en plus je me disais « bin tiens je vais recopier mes cours comme ça je vais corriger mes fautes » tu vois je vais bosser mon portugais plus que les cours en eux-même mais euh je pense que c'est juste pour ça que j'allais en cours au final. J'avais une prof qui n'était pas du tout intéressante qui demandait, qui avait séparé la classe en groupes et on devait faire des exposés et en fait chaque heure de cours c'était des exposés donc tu vois la prof elle sert strictement à rien, elle était là mais c'est les élèves qui font le cours au final. Et on avait après des évaluations sur ces exposés là. Y avait juste un prof qui était vraiment vraiment super intéressant et avec qui je m'entendais bien, que j'ai recroisé dans un bar d'ailleurs, c'était marrant (rire), et mais sinon j'ai trouvé que les cours étaient faciles et que j'avais pas appris grand chose.

    Tibo

    Donc du coup c'était pas vraiment central dans ton séjour finalement...

    M

    Non. Mais de toute façon j'y avais pas été pour ça non plus donc c'est vrai que peut-être que si je m'étais investie plus dans les cours j'aurais pu y trouver plus d'intérêt mais c'est vrai que j'y avais pas non plus été pour les cours donc y m'ont pas intéressée, j'ai pas vraiment accroché donc je me suis dit et « bin tant mieux » au final je vais me concentrer sur autre chose.

    Tibo

    Et sinon à propos de tes loisirs, qu'est-ce que vous faisiez pendant votre temps libre, est-ce que, comment vous vous organisiez finalement?

    M

    Alors en fait je bossais aussi dans une école, je donnais des cours de français donc euh ma directrice était génialissime enfin elle avait vingt-huit ans on aurait dit qu'elle en avait quinze et elle était adorable et donc du coup elle nous emmenait des fois elle nous prenait moi et je bossais avec l'Italienne et la Mexicaine et on allait se balader en, on avait fait un circuit de tous les vignobles du coin tu vois. On les avait fait, on avait goûté les vins tu vois, des endroits elle nous emmenait visiter des villes une fois de temps en temps. Et puis sinon je m'occupais pas mal avec les gars qui faisaient

    du hip-hop du coup j'allais pas mal à des représentations avec eux ce qui me faisait voir aussi d'autres trucs de danse parce qu'ils n'étaient jamais tous seuls tu vois donc c'était sympa ce à quoi j'occupais mon temps.

    Tibo

    Est-ce que il y avait une vie universitaire, une vie étudiante par exemple avec des clubs, des associations, des choses qu'on fait à l'extérieur, des visites tout simplement de la ville ou des monuments, je sais pas...

    M

    Ouais bin les monuments en fait comme je suis arrivée j'étais le première étrangère à arriver et euh et ensuite y a eu une autre Française, la deuxième c'était une autre Française, donc on s'est tout de suite retrouvé, on nous a présenté d'ailleurs et comme les cours n'avaient pas commencé, on connaissait personne on savait pas quoi faire et y faisait super beau et bin on avait visité déjà tous les monuments de Caxias en fait en une semaine j'ai du visiter les trois-quatre musées qu'y avait, euh deux églises et puis bon on avait fait un tour de la ville question de visiter les monuments, etc., parce qu'on s'ennuyait aussi (rire), donc euh sinon y avait un cinéma à la fac. Ah oui là-bas aussi la fac c'est exceptionnel.

    Tibo

    Ah bon, vas-y raconte-moi parce que je connais pas du tout du tout.

    M

    Et bin la fac elle est euh t'as un zoo dans ta fac, t'as des magasins de vêtements, de sous-vêtements, de nourriture, de jus d'orange, de hamburgers, t'as des magasins de tout t'as tout ce que tu veux dans cette fac, de locations DVD, etc., t'as un cinéma aussi et donc le cinéma c'était pas mal parce que je crois tous les mardis t'achetais une place t'en avais une gratuite donc avec la Mexicaine vu qu'on aimait bien le ciné on allait se faire souvent des cinés là-bas. Ouais c'était ça à peu près mes activités. Un peu comme ici au final, c'est vrai que quand j'en parle comme ça je me dis bin oui je vais au ciné avec mes copines, je vais à des représentations de danse moins c'est un truc ouais voilà.

    Tibo

    Tu t'es retrouvée à bosser dans une école comme prof de français alors?

    Et bin justement en fait je cherchais un travail, et j'ai demandé aux Relations Internationales s'ils pouvaient me trouver quelque chose et y m'ont dit bin vu que tu es en Pédagogie, ça s'appelait comme ça là-bas, euh, tu je vais essayer de te trouver un stage et y avait une école de français, euh une école de langue, à côté de chez moi, et donc j'y avais été et j'avais dit « bin voilà je suis française est-ce que ça vous intéresse? », elle a dit « bin très bien, moi j'ai monté cette école y a pas longtemps avec ma soeur et si on dit en plus on a des étudiants, enfin des personnes qui parlent la langue », des natifs c'est ça, « si on a des natifs ça nous fera peut-être un bon coup de pub » aussi vu que moi après je les ai orientées vers tous les autres étudiants étrangers donc ma coloc italienne pour l'italien, ma coloc espagnole pour l'espagnol enfin tu vois une autre Française pour l'anglais je les ai orientées bin y m'ont repris et j'ai géré un classe de cinq à sept adultes, en général ils étaient sept.

    Tibo

    D'accord. Ça a du t'apprendre plein de choses ça.

    M

    Oh c'était génialissime, parce que t'es avec des gens qui ont envie d'apprendre c'est des adultes mais d'un autre côté y en avait une qui avait par exemple, elle avait vingt-trois ans je crois, j'étais la plus jeune c'était marrant (rire) j'étais la prof mais la plus jeune, elle devait avoir vingt-trois ans, elle était là parce que oui elle voulait apprendre le français mais elle avait pas envie de travailler vraiment, tu vois le genre de personne que je veux dire (rire), et c'était marrant parce que je devais justement essayer de lui donner envie donc je m'amusais le soir tu m'aurais vu, à une heure du matin en train de dessiner des nuages et des soleils pour préparer la météo pour le lendemain, c'était grave enrichissant et les gens y étaient, j'apprenais le portugais aussi, et j'apprenais plein plein de choses car j'essayais de m'intéresser à ce que eux ils faisaient, comme ça ils pouvaient me parler de leur travail, de leur métier, comme ça j'ai appris plein de trucs que je pensais pas que, qu'y y avait des différences.

    Tibo

    D'ailleurs, la langue, tu as eu des progrès assez fantastiques non? As-tu eu le sentiment que tu as bien...parce que tu parlais un petit peu avant non?

    Comme je parlais espagnol franchement ça aide. Après je pense que quand je suis partie du Brésil, j'ai mon meilleur copain de là-bas qui m'a dit qu'y comprenait quatre-vingt-dix-huit-pour-cent de tout ce que je disais, je me suis dit c'est pas mal quand même (rire). Mais je pense que les trois premiers mois, non, le premier mois, c'est tellement spectaculaire - bin t'as fait un échange aussi, t'as, t'as l'impression que tu t'apprends à parler comme tu manges tu sais, t'es en train de manger et puis tu parles, c'est exactement pareil, ça va trop vite, enfin moi j'ai été choquée, j'étais fière de moi, j'étais fière de me dire tu peux apprendre une langue aussi rapidement, mais bon je la parle plus parfaitement et là je vois qu'elle est en train de partir et ça ça me fait peur, donc je commence à regarder des films en portugais, à parler à mes potes sur Skype et tout ça pour pas le perdre, ça serait bête.

    Tibo

    D'accord. Est-ce que tu t'es sentie bien intégrée tout de suite au Brésil, parce que apparemment tu avais l'air bien dès le début non? Comment ça se fait à ton avis que tu aies été bien intégrée, à quoi ça tient tout ça finalement?

    M

    Ouais, comment ça se fait, parce que déjà j'en avais envie je pense. Je pense que si t'as peur tout de suite et que si tu te renfermes dans ta peur tu vas pas aller vers les gens et c'est vrai que tu vas être tout seul et que tu es malheureux du coup. Mais moi j'en avais envie et puis j'ai eu la chance d'être dans cette famille brésilienne pendant deux semaines. Quand je suis arrivée, j'avais pas de logement, donc la première nuit j'ai dormi à l'hôtel comme les trois-quarts des étudiants étrangers hein, et après je devais rejoindre une coloc d'étudiants étrangers. Il s'est avéré qu'ils n'avaient plus de place, et en fait c'est la fille du secrétariat que je connaissais pas du tout qui m'a dit « viens j'ai une chambre d'amis chez moi » et je savais pas du tout mais elle habitait chez ses parents et je suis restée deux semaines et demi, trois semaines. J'étais vraiment dans une famille brésilienne, sa mère préparait des tonnes de trucs à manger, elle était prof de portugais, et en plus elle essayait de m'apprendre le portugais et elle me présentait comme sa fille adoptive, après deux semaines tu vois donc ça aussi ça m'a aidé à me sentir bien parce que je me suis sentie quand même chez moi assez facilement dans cette famille, avec cette mère surtout qui, elle me connaissait pas, c'était la première fois qu'elle accueillait une étudiante étrangère donc pour elle aussi c'était nouveau mais tout de suite elle m'a vraiment vraiment super bien accueillie.

    Tibo

    D'accord. Six mois c'est quand même long, est-ce que t'as eu des hauts et des bas, est-ce que c'était toujours...

    M

    Ouais, bin le jour de mon anniversaire, je crois que c'est la seule fois où j'ai pleuré dans toute la... J'ai fêté mes vingt ans là-bas, si tu veux je suis arrivée au Brésil le sept juillet et mon anniversaire c'était le huit août, donc tu vois un mois t'as pas le temps de te faire des amis, les cours ont attaqué début août, t'as pas le temps de te faire de copains, rien, j'avais mes colocs je les connaissais ça devait faire une ou deux semaines et moi je suis quelqu'un qui bouge, enfin pour mon anniversaire c'est sûr que je vais boire minimum un verre dans un bar avec mes copains enfin tu vois, mes vingt ans en plus je voulais marquer le truc, sauf que je connaissais personne et que j'avais personne de motivé pour bouger avec moi donc ouais j'ai eu un bon coup de déprime où je me suis dit « c'est de la merde ce pays, je veux rentrer chez moi, je veux retrouver mes copains, faire mon anniversaire avec mes copains » (rire) mais ouais non non sinon ça va. Non, y a bien eu des petits coups de déprime mais parce qu'on s'embrouillait un peu, enfin moi particulièrement, j'ai eu une aventure on va dire avec mon coloc espagnol, donc le truc à pas faire enfin tu vois, et donc après y avait des embrouilles entre nous et vu qu'on vivait ensemble c'était pas forcément le plus pratique donc c'est vrai qu'y avait des moments où t'en avais marre mais c'était plus du à la situation qu'au pays luimême tu vois. Mais sinon non je me suis jamais sentie vraiment mal, enfin déprimée tu vois, triste.

    Tibo

    Est-ce que t'as été soutenue là-bas, affectivement, émotionnelement, que ce soit par des gens, par les ressources internationales, la DRI, je sais pas, ou es-ce que t'as eu l'impression d'avoir manqué de soutien peut-être?

    M

    D'un point de vue administratif?

    Tibo

    Non non, d'un point de vue émotionnel, affectif.

    M

    D'un point de vue émotionnel ouais, j'ai été soutenue par ma mère, bien sûr, bin elle était, on

    s'envoyait des mails, toutes les deux-trois semaines on se parlait sur Skype, quand je suis partie d'ici j'étais amoureuse d'un gars, d'un Français, et en fait il continuait à m'écrire tous les jours donc ça m'a fait quand même tu vois ça m'a permis de pas, je pensais que ça allait faire une rupture tu vois avec lui, qu'on allait plus se parler et que j'allais en souffrir mais le fait qu'on continue à se parler, en tant qu'amis hein, tous les jours je pense que ça m'a pas mal aidé aussi, et puis après sur place, dès que j'ai rencontré, dès qu'on a fait ce voyage en fait, dès que j'ai rencontré mon coloc français, que j'ai vraiment appris à découvrir, et bin ça a été mon meilleur ami et on est devenu inséparable en fait, on s'est toujours soutenu l'un l'autre et comme on habitait ensemble, voilà.

    Tibo

    Ok, je vois. Est-ce que les mentalités sont différentes, est-ce que tu t'es aperçue de différences entre la mentalité française que tu connaissais et la façon dont les gens voyaient les choses au Brésil?

    M

    (Pause). Ouais, oui, oui oui, c'est sûr qu'il y a des mentalités différentes mais j'ai jamais réussi à vraiment mettre des mots dessus.

    Tibo

    C'est très dur, je suis d'accord avec toi, c'est pas facile du tout.

    M

    Parce que c'est vrai que quand t'es là-bas tu te dis « ouais c'est différent » mais en même temps c'est pareil que toi mais d'un autre point de vue, non mais je pense que y a plein de trucs à prendre en compte mais je pourrais pas te dire qu'est-ce qui est différent ouais. Je sais que c'est différent, je sais mais je peux pas dire pourquoi.

    Tibo

    Bien entendu oui. Est-ce que tu as connu des « galères », ce qu'on appelle des « galères », pendant ton séjour?

    M

    Non quasiment pas non, j'ai grave de la chance. À part où j'ai fait une crise dans un avion tu sais, en
    fait j'avais fait une nuit blanche et on partait de Rio pour Salvador et je me suis endormie direct
    dans l'avion et je me suis réveillée mais j'avais pas adapté mon corps à la pression tu vois et donc du

    coup je me suis réveillée j'avais l'impression que mes yeux allaient sortir de ma tête, je pleurais je pleurais, grosse crise, pas cool, mais ça a été une des seules galères que j'ai eu.

    Tibo

    D'accord, donc ça n'avait rien à voir avec ton séjour finalement, ça aurait pu arriver en France.

    M

    Voilà, c'est ça, après mon coloc a eu des problèmes de carte bancaire et tout ça mais moi tout s'est bien passé.

    Tibo

    D'accord. Quand t'as répondu au questionnaire, quand je t'ai demandé donc quel sens avait ton voyage dans ta vie, tu as répondu le mot « découverte ». Est-ce que tu peux m'expliquer un petit peu?

    M

    Oui ça a été très dur de choisir un mot, et pourquoi découverte, parce que j'étais partie pour ça à la base, c'était pour découvrir une autre culture, un autre pays, d'autres personnes, découvrir autre chose, de tout nouveau. Et je suis pas sûre au final que c'est ce qui s'est passé, si, bien sûr, j'ai découvert autre chose, mais c'était peut-être pas le plus important du coup mais en tout cas c'est pour ça que j'étais partie. Donc c'est pour ça que j'ai choisi ce mot.

    Tibo

    Et qu'est-ce qui est important alors pour toi, qu'est-ce qui a fait que c'était spécial?

    M

    Pour moi maintenant après le voyage c'est que ça m'a donné une envie, bin en fait ouais, j'ai toujours eu envie de voyager, c'est pour ça que j'ai fait ce premier voyage mais là ça m'a donné plus que l'envie, je sais pas trop comment dire, c'est pas comme si je vais dire « maintenant ça y est je suis passionnée par l'idée de voyager » comme ça juste parce que j'ai fait six mois au Brésil, c'est pas ce que je veux dire, c'est simplement que, là je suis en train de me renseigner pour un Master, un Master qui propose deux fois six mois d'échange à l'étranger et qui t'ouvre des portes pour devenir experte en relations, en associations internationales donc tu vois je suis en train moi-même de changer mes idées de projet de vie pour voyager plus et pour découvrir donc peut-être que je pense

    que le Brésil j'y ai été pour découvrir, pour le découvrir, mais qu'au final ça m'a fait découvrir moimême aussi, cette partie de moi qui me donne envie de voir autre chose.

    Tibo

    Parce que du coup tu envisages l'avenir différemment?

    M

    Ouais, bin je voulais être éducatrice, enfin je veux toujours, être éducatrice PJJ et c'est vraiment un job qui me fascine et qui me passionne et ça fait des années que je veux faire ça et j'ai pas envie de me dévier de cette voie là. Mais j'ai envie de me dire « tiens, si je peux en profiter pour faire un Master et voyager un peu dans l'Europe » puis après si ce Master m'ouvre des voies sur un job qui peut être intéressant, qui me permet de voyager, pourquoi pas et après je reviendrais à l'éduc tu vois, je suis en train de, ouais, mon plan de vie, alors qu'il était assez rectiligne tu vois (rire), il est en train de tout changer, et tant mieux! Je suis contente tu vois, ça me fait de nouveaux projets tout ça, c'est sympa.

    Tibo

    Excellent, on te sent vachement dynamique, c'est vachement bien.

    M

    (Rire). Ouais, j'essaie d'avancer.

    Tibo

    Et du coup, dans le questionnaire par exemple, quand je t'avais demandé ce que tu préfères entre ta vie au Brésil et ta vie à Lyon, t'as mis en tête ta vie à Lyon. Est-ce que tu peux expliquer pourquoi. Enfin, c'est pas, juste pour avoir plus d'informations.

    M

    Et bin je pense ma vie à Lyon aussi pour le côté confort du terme, parce que vivre à six, en coloc à six, franchement c'était vraiment vraiment, y avait des moments c'était dégoutant dégoutant dégoutant, les Mexicains ils font tout frire donc ça sentait tout le temps la friture et tout ça, donc je pense que ça ouais, vraiment c'était chiant quand même, t'as beau dire ce que tu veux, « je vais dans un pays je m'en fous », c'est vrai que si tu peux avoir les conditions, tant mieux. Pourquoi ma vie à Lyon aussi, parce que socialement je pense que j'étais plus épanouie à Lyon qu'au Brésil quand

    même parce que j'ai plus d'amis ici au final, forcément.

    Tibo

    Ils t'ont manqué là-bas [tes amis]?

    M

    Mes amis ne m'ont pas manquée mais le fait d'avoir moins d'amis qu'avant, d'avoir juste ce petit groupe que j'avais rencontré, avec qui j'ai réussi à créer des affinités, mais différentes au final et je sais pas, j'ai jamais eu beaucoup de copines moi, et par contre j'en ai toujours eu une quand même tu vois, il me fallait toujours une fille pour raconter mes trucs de fille et j'en avais pas au Brésil et je pense que ça m'a manqué un peu aussi.

    Tibo

    D'accord. Et est-ce qu'au Brésil, en tant que Française, qu'Européenne, est-ce que tu sentais que tu véhiculais une image, des stéréotypes - négatifs ou positifs hein, peu importe, mais est-ce que il y a avait une image de l'Européenne, de la Française donc?

    M

    Oui, je pense, parce que vu les questions qu'on me posait, je me doute qu'il y a des stéréotypes bien ancrés mais, mais ils sont tellement ouverts aussi que j'ai trouvé qu'en Amérique Latine en général, pas tous les pays mais là où j'étais, les personnes sont quand même assez ouvertes et quand ils te rencontrent et qu'ils voient que tu es étranger ils sont quand même curieux de venir te parler. C'est un truc qu'on a pas ici je trouve, enfin pas assez en tout cas. Et euh, c'était quoi ta question?

    Tibo

    Est-ce que tu sentais que tu véhiculais une image malgré toi finalement?

    M

    Ouais, quand on venait vers moi, qu'on entendait que j'étais française et qu'on me disait « voulez vous coucher avec moi ce soir? » ou alors quand on me disait « excuse-moi mais tu t'épiles? » ou « tu te laves combien de fois par semaine? » tu vois qu'il y a des clichés qui sont vraiment vraiment ancrés et que j'étais, ouais je pense que si, j'étais plus ou moins une image parce que « ah regarde-la avec ses traits, ça se voit bien que c'est une Française » je suis sûre que je leur aurais dit que j'étais italienne ils m'auraient pris pour une Italienne sur le coup mais bon.

    Tibo

    Mais ça n'empêchait pas, enfin disons ça ne modifiait pas tes relations avec les gens du coup?

    M

    Non du tout, c'était une curiosité, ils étaient oui, comme moi j'étais curieuse au final en allant dans ce pays là, et là eux ils avaient la même curiosité en retour.

    Tibo

    Et est-ce que du coup d'avoir séjourné là-bas ça a modifié ta vision de la France, la culture française, ou de tes habitudes, est-ce que tu t'es posée des questions par rapport à ce que tu connaissais déjà?

    M

    Ça m'a modifié oui et non parce que je le savais mais je m'en rendais pas compte, je savais que les Français en général ont peut-être justement un peu plus de mal à avoir cette curiosité envers une autre personne ou peut-être qu'ils l'ont mais en tout cas ils ne l'expriment pas pas aussi facilement que les Brésiliens par exemple, et donc je savais qu'on avait ça, enfin ce problème entre guillemets hein, c'est un fait culturel, mais je ne m'en rendais pas compte à ce point. Quand tu croisais des gens dans la rue, ça faisait trois semaines que tu les avais pas vu, tu te rappelais plus d'eux et eux ils arrivent « ah salut tu vas bien? » c'est vrai que tu te dis qu'en France on est un peu fermé quoi.

    Tibo

    Et quand je t'avais demandé si tu conseillerais à un autre étudiant d'aller étudier dans ta fac au Brésil, t'as dit que tu ne le conseillerais pas. Est-ce que tu peux revenir un petit peu dessus?

    M

    Justement, parce que cette fac certes était une fac grandissime avec comme je te disais un zoo, plein de magasins, t'as plus l'impression d'être dans une fac, euh, mais c'était surtout la ville en elle-même en fait, la ville n'était pas très active, c'était une petite ville, de quatre-cent-mille habitants, et peutêtre le fait que quand j'y étais c'était aussi l'hiver donc il pleuvait aussi beaucoup, euh, c'est la ville, elle est pas agréable pour un échange, mais même pour une vie étudiante en elle-même tu vois je pense qu'il vaut mieux aller faire un échange à Rio ou à Salvador parce que déjà si tu penses au Brésil c'est sûr tu veux du soleil, c'est vrai, donc t'en auras plus là-bas qu'à Caxias et t'auras plus de choses à faire, t'auras la plage aussi que j'avais pas ouais, y avait quoi, trois-quatre bars sympas, une

    boîte d'électro, pour te dire à peu près tout ce qu'il y avait hein, un bar rock, après les autres bars c'était voilà samba, etc., et voilà, ça s'arrêtait presque là tu vois juste de vie étudiante, après comme je t'ai dit t'avais trois ou quatre musées, t'avais l'église sur la place, t'avais la cathédrale et une église et ouais c'est une petite ville.

    Tibo

    Donc c'était moins vivant que prévu du coup peut-être?

    M

    Ouais c'est ça j'ai l'impression que y avait pas assez de monde en fait, j'aurais eu besoin de plus de monde et plus d'activité tu vois, y avait un marché le samedi matin, mais voilà, alors que moi j'aurais aimé faire tous les marchés tous les jours mais bon.

    Tibo

    D'accord. Et on dirait que t'as pas vécu un choc quand t'es arrivée là-bas. On se dit que c'est totalement différent mais quand t'en parles c'est vrai que t'as pas été dépaysée, enfin pas déracinée, enfin je sais pas...

    M

    Ouais voilà c'est ça, mais moi aussi ça me fait bizarre. J'ai cette sensation là aussi, c'est que ouais, j'avais l'impression que j'avais la même vie en fait, que j'avais exactement pareil, que y avait pas vraiment de changement, donc certes c'était un contexte et devant les yeux c'était différent mais au final moi j'ai quand même quasiment vécu pareil.

    Tibo

    Et tu l'expliques ça?

    M

    Alors je me suis remise en question, je me suis dit que c'est peut-être moi aussi qui du coup j'ai voulu adopter mon mode de vie français euh au Brésil et du coup pas m'intégrer réellement à la culture je me suis dit ça, mais en fait je crois pas.

    Tibo

    Oui, non, pas du tout, je pense que tu as raison de ne pas croire que c'est ça.

    Je ne crois pas que c'est ça parce que j'ai quand même fait des efforts pour m'intégrer, j'avais des amis brésiliens et que j'aurais vu si j'étais complètement en décalage et non non je crois pas donc je sais pas pourquoi.

    Tibo

    C'est pas un élément obligatoire du séjour à l'étranger du tout de toute façon.

    M

    Oui oui bien sûr c'est ça, mais je pense être quelqu'un de sociable aussi donc c'est peut-être pour ça que j'ai réussi à m'adapter assez vite, je sais pas.

    Tibo

    Du coup t'aurais aimé ressentir cette différence?

    M

    Ouais, ouais j'aurais aimé. J'aurais aimé arriver au Brésil, rester une semaine et dire « mais je suis où, waow », ouais j'aurais aimé que ça me retourne, ouais ça aurait peut-être pas été cool mais j'aurais aimé, au moins je me serais dit que je suis partie pour quelque chose, non pas que je pense que je suis partie pour rien.

    Tibo

    Et si on prenait les autres régions, comme l'Argentine, et les autres régions du Brésil où t'as voyagé, est-ce que t'as justement ressenti plus cette différence?

    M

    Ouais, c'est pour ça que j'ai dit aussi que je conseille pas d'aller étudier dans ma fac c'est que déjà juste à Rio j'ai eu plus un choc visuel déjà de la ville, et culturel aussi, enfin en voyant les gens, en parlant aux gens, c'était quand même complètement différent de Caxias do Sul, et Salvador encore plus, et c'est pour ça que j'aurais préféré étudier dans une de ces villes là qui me semblaient, moi, différentes, parce que Caxias c'est quand même vachement européen.

    Tibo

    Donc c'est un pays très différent selon les endroits...

    Ouais de partout, t'as plusieurs pays en un pays en fait.

    Tibo

    Je vois. Est-ce que par exemple il y a des éléments de cette culture brésilienne que toi t'aimerais incorporer dans ta façon de faire, dans ta façon de vivre?

    M

    Ah bin j'aimerais dire bonjour comme eux!

    Tibo C'est-à-dire?

    M

    Bin tu sais ils se font une bise et ils se prennent, ils se font l'embrassade carrément et bin j'aimerais qu'on se dise, que tous les Français se disent bonjour comme eux, mais bon c'est pas possible (rire). Non, j'aimerais gagner cette, cette curiosité qu'ils ont envers les gens, mais moi j'ai toujours peur, je pense que c'est le problème de tout Français, qu'elle soit malsaine du coup, qu'elle soit considérée comme malsaine, et en fait non eux pas du tout elle est naturelle, c'est vraiment de la curiosité enfin je sais pas, tu sais quand ils te posent une question ils ont envie d'avoir la réponse car ils s'intéressent à la personne qui est en face d'eux, pas parce qu'ils s'intéressent à elle pour qu'ils puissent en obtenir quelque chose tu vois. Et j'aimerais bien être plus comme ça. Et je suis pas sûre que j'y arrive mais j'essaie en tout cas.

    Tibo

    D'accord. Est-ce que tu dirais que tu étais la même en France qu'au Brésil? Est-ce qu'au niveau de ta personnalité tu t'es trouvée autre, différente? Ta façon d'aborder les choses quand tu es arrivée làbas voilà, est-ce qu'il y a des choses que t'as fait que t'aurais pas fait peut-être ici, etc.?

    M

    Ouais je pense, parce que là-bas j'étais carrément plus ouverte que ici bin là du coup oui, je voulais tout connaître, j'étais super curieuse, moi je posais des milliers de questions.

    Ça se ressent bien quand tu parles, que t'étais proactive.

    M

    (Rire). Ouais ouais moi je posais des questions, j'essayais toujours de m'intégrer, toujours de discuter, ouais, non, je pense que j'étais assez curieuse là-bas, j'aimerais redevenir comme ça mais en France.

    Tibo

    D'accord. Et si tu devais refaire cette expérience, qu'est-ce que tu changerais, si tu voulais refaire quelque chose?

    M

    Bin la longueur, la ville, euh, (pause). Sinon je sais pas (pause).

    Tibo

    C'est une bonne réponse, t'inquiète pas.

    M

    Oui oui, qu'est-ce que j'aurais changé, non j'ai (pause). Je veux pas le changer, c'était une belle expérience (rire).

    Tibo

    Donc t'es contente de la tournure que ça a pris, t'as le sentiment d'avoir profité comme tu voulais, hormis la longueur peut-être?

    M

    Je pense que j'aurais peut-être plus pu profiter, je sais pas exactement comment, mais je pense que oui ça aurait pu être encore plus, mieux, ou des souvenirs encore plus incroyables, mais ça s'est pas fait et puis c'est pas grave, enfin c'est la vie aussi, y a des aléas que tu peux pas contrôler et que...

    Tibo

    C'est tout à fait vrai. Qu'est-ce qui t'as le plus plu dans ton séjour, c'est le fait de voyager, de...?

    Ça a été ouais le voyage, les rencontres, en fait en gros les gens et les paysages parce que quand t'es à Foz do Iguaçu t'as les chutes, tu te sens quand même minuscule, tu te sens vraiment ridicule, ça te permet de penser aussi, donc c'est vrai que t'as des paysages ouais qui sont tellement différents de ceux dont t'es habitué que ça fait du bien à voir mais euh, et les gens, ouais bin les gens du nord plus parce que les gens de Caxias ils sont quand même les gens les plus fermés du Brésil donc même s'ils sont plus ouverts que les Français ils restent spéciaux.

    Tibo

    D'accord. Est-ce que le rythme de vie est différent?

    M

    Bin non justement moi j'espérais ça aussi tu vois et non ils mangent à midi, vingt heures, c'est un peu le même rythme que nous finalement et c'est vrai que j'avais une espérance là-dessus.

    Tibo

    Parce que c'est plus occidentalisé que ce que tu pensais c'est ça?

    M

    Ouais, j'aurais aimé manger à quatorze heures, même comme en Espagne tu vois et puis avoir un autre rythme de vie mais bon, j'ai gardé mon rythme c'est pas grave (rire).

    Tibo

    Est-ce que tu as le sentiment d'avoir bien changé quand même grâce à cette expérience quand tu regardes comme tu étais avant de partir et toi aujourd'hui, est-ce que tu te dis « tiens j'ai changé sur tel point » et vraiment tu le vois ou c'est pas encore assez clair peut-être?

    M

    Non c'est pas encore assez clair. Je pense qu'en plus là vu que je suis rentrée j'ai eu plus de responsabilités aussi qu'avant le Brésil donc je me demande à quoi est dû mon changement professionnel, enfin mon orientation future, c'est dû certes au Brésil mais c'est dû aussi à d'autres choses qui me sont arrivées tu vois. Donc je sais pas si je change vraiment vraiment, si j'ai vraiment changé.

    C'est pour ça que c'est peut-être un peu tôt pour le dire, c'est très dur de mettre des mots sur les choses qu'on ressent, je suis entièrement d'accord. Et, t'as gardé des contacts avec les gens là-bas?

    M Oui.

    Tibo

    Tu penses que ça va durer? C'est important pour toi je veux dire, ça a un sens?

    M

    Oui, ça a un sens. J'ai mon, dans cette bande, j'ai mon ami, J. il s'appelait, qui le dernier jour où je suis partie m'a offert un collier avec le symbole de l'infini en me disant notre amitié est infinie, garde-le avec toi, moi je l'ai avec moi, et y s'était acheté le même. C'est vrai qu'on se parle, on s'envoie quelques mails de temps en temps - j'ai pas encore internet chez moi donc c'est un peu galère, mais je sais que je, je suis lucide, je me doute que ce sera pas mon ami de toute la vie mais j'espère avoir de l'argent d'ici trois ou quatre ans pour voyager et je me dis que j'irais au Brésil et j'irais le voir.

    Tibo

    Tu vas y retourner?

    M

    Oui oui je vais y retourner je pense, je vais essayer de me faire toute l'Amérique Latine mais bon il faut que je gagne des sous (rire). Et j'ai des amis brésiliens qui viennent justement pour la danse, qui viennent en Allemagne cet été donc je vais aller en Allemagne et je vais leur proposer de venir à Lyon, etc., donc j'essaie de garder des contacts et de me dire que ça fait aussi des contacts pour y retourner.

    Tibo

    Et quand t'es rentrée, est-ce que ça a été dur de rentrer, est-ce qu'il y a eu un choc au retour peutêtre, pour te réadapter disons?

    M Non.

    Tibo

    Non, ça s'est fait naturellement?

    M

    Oui, en fait je devais courir parce que j'avais une semaine pour trouver un appartement et m'inscrire à la fac donc trouver un appart sur Lyon tu dois connaître la galère aussi, donc en fait mon installation, et après et du coup j'ai trouvé mon appart, je me suis inscrit, les cours commençaient, je devais trouver un job, donc j'avais tellement de trucs à faire, j'étais tellement stressée par tout entre les aller-retours Clermont - Lyon vu que mes parents habitent à Clermont et que je devais voir ma famille aussi, etc., que j'ai pas eu trop le temps de me réhabituer. Et c'est après quand la routine a commencé que là je me suis sentie un peu « ouais bin tiens là ça y est t'es revenue, c'est fini, tchao » et, mais comme il y avait tous mes amis à côté de moi que ça s'est bien passé car même mes amis brésiliens ils étaient virtuellement plus ou moins à côté de moi quand même. Donc non je pense que ça s'est bien passé.

    Tibo

    Est-ce qu'il y a des choses au Brésil qui t'ont surprise ou énervée au premier abord, qui t'ont marquée disons et dont tu pourrais te souvenir là comme ça?

    M

    Les choses qui m'ont marquée c'est cette image de clochards qui dorment les uns à côté des autres le long d'une rue, ça c'est une image qui est restée gravée. Les chutes c'est resté gravé aussi, c'est des photos ouais, pour moi c'est des images comme ça, la police quand je vois les trente jeunes qui sont contre le mur avec la police derrière eux ça ça m'avait marqué aussi parce que plus violent quand même.

    Tibo

    Oui, souvent on voit le Brésil avec la violence et les écarts sociaux, l'insécurité, tu l'as ressenti aussi ça par exemple pendant ton séjour?

    En fait ce qui est étrange, mais vraiment très étrange, c'est qu'à Caxias c'était une ville riche justement comme je t'ai dit, assez européenne, où t'avais pas du tout à avoir peur quoi enfin moi vraiment je m'y sentais plus en sécurité qu'à Lyon quoi et pourtant eux ils étaient tous paranoïaques. Enfin « paranoïaques » c'est exagéré mais ils voyaient quelqu'un dans la rue, il était vingt-trois heures, et bin hop ils fermaient toutes les portes de la voiture pour être sûrs que personne vienne faire du car jacking. Ils grillent tout le temps les feux la nuit, etc. Donc c'est vrai que tu te dis « il doit y avoir du danger pour qu'eux ils aient peur comme ça » mais comme moi je l'ai pas vu je l'ai pas ressenti vraiment. Pourtant j'ai des amis qui habitaient dans une favela qui m'a dit qu'il revenait du super marché et qu'il avait retrouvé un mec mort dans sa rue, donc oui il y a des trucs mais comme je l'ai pas vraiment vu, que j'ai juste entendu des histoires qui me semblent plus enjolivées que bin ouais j'ai pas eu cette peur du danger quoi. Et comme je me suis même pas fait agressée rien, genre mon coloc français qui s'est fait voler son portefeuille c'est une agression même si elle est minime c'est une agression bin moi non rien du tout donc c'est vrai que j'ai pas peur (rire).

    Tibo

    Est-ce qu'il y a des facettes de la vie qui t'échappent un petit peu, qu'aujourd'hui tu ne comprends pas encore?

    M

    Comment ça?

    Tibo

    Bin dans les façons de faire par exemple où aujourd'hui tu te dis quand t'y repenses « tiens pourquoi il fait ça comme ça? ».

    M

    Non je pense pas parce que chaque fois que j'avais une question je la posais, je me gênais pas donc c'est vrai que si je leur demandais « pourquoi tu grilles le feu? » par exemple ils me donnaient une réponse tu vois donc je ne pense pas qu'il y ait des choses qui aujourd'hui me surprennent encore.

    Tibo

    Cool super. Donc du coup ton verdict tu penses que c'est un séjour très réussi, t'es contente de ce que t'as fait?

    De ce que j'ai fait au Brésil?

    Tibo

    Voilà, de ton séjour comment tu vois les choses? T'es contente? Aujourd'hui tu te dis que c'était...

    M

    C'était une excellente expérience mais je peux en vivre des mieux, pour moi je reste sur un sentiment d'inachevé, il m'en faudrait encore.

    Tibo

    Donc c'est que le début de quelque chose d'autre?

    M

    Ouais voilà c'est ça pour moi c'est un début maintenant quoi, c'est autre chose qui commence mais qui va être plus grand (rire).

    Tibo

    Ok. Bon et bin écoute très bien hein.

    M

    Bon bin j'espère que je t'ai aidé.

    Tibo

    Bien sûr, c'était très très utile. Merci beaucoup de ta participation ///

    Table des matières

    Introduction 6

    CADRE THEORIQUE 8

    1. Contexte 8

    1.1. Origines des travaux 8

    1.2. Intérêts de la recherche 8

    2. Concepts clés 11

    2.1. Les transformations socioculturelles 11

    2.1.1. Dimension culturelle 12

    2.1.1.1. Composante : la culture 12

    2.1.1.2. Indicateurs 14

    2.1.2. Dimension sociale 16

    2.1.2.1.Composante : le phénomène d'acculturation 16

    2.1.2.2. Indicateurs 17

    2.1.3. Dimension psychologique 19

    2.1.3.1. Composante : le choc culturel 20

    2.1.3.2. Indicateurs 22

    2.1.4. Autres facteurs de variabilité des transformations socioculturelles 25

    2.1.4.1. La durée de séjour 25

    2.1.4.2. L'exposition interculturelle antérieure 25

    2.2. La compétence interculturelle 26

    2.2.1. Ambiguïté du syntagme 27

    2.2.2. Exemples de conceptualisation 28

    2.2.2.1. Byram et le modèle multidimensionnel de compétence interculturelle 29
    2.2.2.2. Bennett et le modèle de développement de la sensibilité

    interculturelle 31

    2.2.3. Notre approche 35

    2.2.3.1. Synthèse des modèles 35

    2.2.3.2. Définition du concept 38

    2.2.3.3. Pondération 40

    3. Problématique 42

    METHDOLOGIE DE RECHERCHE 43

    1. Présentation de la population de recherche 43

    2. Instrumentation 44

    2.1. Procédure 44

    2.2. Présentation des questionnaires 45

    2.2.1. Le Questionnaire général 45

    2.2.2. L'Échelle de communication interculturelle 45

    2.2.3. L'Échelle de distance culturelle 45

    2.2.4. L'Échelle de sensibilité interculturelle 45

    2.2.5. L'Échelle de soutien social 46

    2.2.6. L'Échelle d'efficacité interculturelle 46

    2.2.7. L'Échelle d'adaptation académique 46

    2.2.8. L'Échelle de stress d'acculturation 46

    2.2.9. L'Échelle de bien-être 47

    2.2.10. Brief COPE 47

    2.3. Présentation de la grille d'entretien 47

    3. Grille de lecture 48

    3.1. Transformations socioculturelles 48

    3.2. Compétence interculturelle 48

    3.3. Pondération 48

    ANALYSE DES RESULTATS 50

    1. Le cas de P 50

    1.1. Contexte 50

    1.2. Transformations socioculturelles 51

    1.2.1. Dimension culturelle 51

    1.2.1.1. Compétences de communication 51

    1.2.1.2. Distance culturelle 52

    1.2.1.3. Sensibilité interculturelle 56

    1.2.2. Dimension sociale 57

    1.2.2.1. Capital social 57

    1.2.2.2. Orientation d'acculturation de la société d'accueil 60

    1.2.3. Dimension psychologique 60

    1.2.3.1. Soutien social 60

    1.2.3.2. Auto-efficacité 61

    1.2.3.3. Réussite académique et professionnelle 61

    1.2.3.4. Stress d'acculturation 62

    1.3. Compétence interculturelle 70

    1.3.1. Sens du séjour à l'étranger 70

    1.3.2. Ressenti sur le séjour 70

    1.3.3. Tensions éprouvées 71

    1.3.4. Évolution personnelle 72

    1.3.5. Projets d'avenir 72

    2. Le cas de C 73

    2.1. Contexte 73

    2.2. Transformations socioculturelles 74

    2.2.1. Dimension culturelle 74

    2.2.1.1. Compétences de communication 74

    2.2.1.2. Distance culturelle 75

    2.2.1.3. Sensibilité interculturelle 76

    2.2.2. Dimension sociale 76

    2.2.2.1. Capital social 77

    2.2.2.2. Orientation d'acculturation de la société d'accueil 79

    2.2.3. Dimension psychologique 80

    2.2.3.1. Soutien social 80

    2.2.3.2. Auto-efficacité 82

    2.2.3.3. Réussite académique et professionnelle 82

    2.2.3.4. Stress d'acculturation 83

    2.3. Compétence interculturelle 87

    2.3.1. Sens du séjour à l'étranger 88

    2.3.2. Ressenti sur le séjour 88

    2.3.3. Tensions éprouvées 90

    2.3.4. Évolution personnelle 90

    2.3.5. Projets d'avenir 91

    3. Le cas de M 92

    3.1. Contexte 92

    3.2. Transformations socioculturelles 93

    3.2.1. Dimension culturelle 93

    3.2.1.1. Compétences de communication 93

    3.2.1.2. Distance culturelle 94

    3.2.1.3. Sensibilité interculturelle 95

    3.2.2. Dimension sociale 95

    3.2.2.1. Capital social 96

    3.2.2.2. Orientation d'acculturation de la société d'accueil 98

    3.2.3. Dimension psychologique 99

    3.2.3.1. Soutien social 99

    3.2.3.2. Auto-efficacité 100

    3.2.3.3. Réussite académique et professionnelle 100

    3.2.3.4. Stress d'acculturation 101

    3.3. Compétence interculturelle 104

    3.3.1. Sens du séjour à l'étranger 104

    3.3.2. Ressenti sur le séjour 104

    3.3.3. Tensions éprouvées 105

    3.3.4. Évolution personnelle 106

    3.3.5. Projets d'avenir 107

    INTERPRETATION DES RESULTATS ET DISCUSSION 109

    1. Le cas de P 109

    1.1. Transformations socioculturelles 109

    1.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture 109

    1.1.2. Dimension sociale - Composante : le phénomène d'acculturation 110

    1.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel 110

    1.2. Compétence interculturelle 110

    1.3. Synthèse 111

    2. Le cas de C 112

    2.1. Transformations socioculturelles 112

    2.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture 112

    2.1.2. Dimension sociale - Composante : le phénomène d'acculturation 112

    2.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel 113

    2.2. Compétence interculturelle 113

    2.3. Synthèse 113

    3. Le cas de M 114

    3.1. Transformations socioculturelles 114

    3.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture 114

    3.1.2. Dimension sociale - Composante : le phénomène d'acculturation 114

    3.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel 114

    3.2. Compétence interculturelle 115

    3.3. Synthèse 115

    4. Discussion 116

    Conclusion 118

    Bibliographie 120

    Sitographie 135

    Index Auteurs 136

    Index Mots clés 138

    Index Graphiques 139

    Index Tableaux 139

    Annexe 1 : questionnaires et résultats de P, C et M 140

    Annexe 2 : questionnaires originaux 168

    Annexe 3 : retranscription des entretiens 186

    Table des matières 269

    Université Lumière Lyon 2-Institut des Sciences et Pratiques d'Éducation et de Formation

    Mémoire de Master 2 RECHERCHE «Sciences et pratiques de l'éducation et de la formation»

    Année universitaire 2011-2012

    Nom de naissance et prénom : Pourhadi Thibault N° étudiant(e) : 5112093

    Titre :

    Impacts des échanges universitaires internationaux sur les étudiants de l'Université Lumière Lyon 2 : cap sur le Brésil

    Problématique :

    Comment peut-on envisager les liens entre les transformations socioculturelles et le développement de la compétence interculturelle chez les étudiants à l'issue de leur séjour au Brésil ?

    Résumé (15 à 20 lignes) :

    Cette recherche se propose de situer les effets des échanges universitaires internationaux chez trois étudiantes de l'Université Lumière Lyon 2 séjournant au Brésil pour des durées de deux à six mois. Notre objectif est d'explorer les liens qu'entretiennent les transformations socioculturelles des étudiantes sur place avec leur niveau de compétence interculturelle. Pour mener à bien ce travail, nous nous appuyons en premier lieu sur de nombreux travaux issus de la littérature scientifique pour clarifier le concept de transformations socioculturelles et celui de compétence interculturelle. Ensuite, nous présentons notre méthodologie. Initialement, nous avions prévu d'interroger les participants avant leur départ pour le Brésil puis à leur retour en France. Cependant, en raison des difficultés rencontrées lors de la composition de l'échantillon, ce suivi n'a pu être mis en place. En conséquence, les données sur lesquelles repose notre étude sont rétrospectives. Pour les recueillir, nous avons d'abord administré au retour de nos trois étudiantes en France une série de dix questionnaires présentés sous forme d'auto-évaluation avant de conduire un entretien semi-dirigé avec chacune d'elles. Notre procédure de recueil de données nous a ainsi fourni une large quantité d'informations sur la base desquelles de multiples facteurs de transformations et d'évolution ont pu être analysés à la lumière de notre cadre théorique, puis recoupés. À l'issue de notre étude, et par delà les limites de notre méthodologie, nous constatons qu'en dépit de caractéristiques uniques à chaque séjour tous ont été un véritable agent de changement chez les étudiantes. Il ressort également que la nature des expériences vécues sur place a affecté positivement le développement respectif de la compétence interculturelle chez l'ensemble des participantes.

    Mots-clés :

    Transformations socioculturelles, Compétence interculturelle, Études intégrées, Échanges universitaires internationaux, Séjour d'étude à l'étranger, Interculturalité

    Directeur de mémoire : Jean-Claude Régnier Date de soutenance :






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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway