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Etude des déterminants de l'offre de l'eau potable au Cameroun

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par Edmond Noubissi Domguia
Université de Dschang Cameroun - Master II 2012
  

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CHAPITRE 2 : CADRE THEORIQUE GENERAL DE LA VALORISATION DES RESSOURCES NATURELLES

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Le dictionnaire Larousse définit l'environnement comme étant l'ensemble des éléments constitutifs du milieu d'un être vivant. Les problèmes qui y sont liés et actuellement en vogue ces dernières années, ne sont pas nouveaux. En effet, ces problèmes avaient déjà été soulevés au début des années 70, par le Rapport Meadows « Halte à la croissance », impulsé par le Club de Rome (1972). Ce rapport tirait déjà la sonnette d'alarme face aux périls que faisait encourir à l'humanité, « le paradigme de la croissance exponentielle » (Vaaub, 1991). La réémergence de la question environnementale n'est d'ailleurs pas une simple réapparition à l'identique. Les revendications de sa prise en compte se sont faites de plus en plus fortes sous la pression de leur réalité. Par ailleurs, ils existent deux types de ressources naturelles à savoir les ressources dites renouvelables (c'est-à-dire celles qui donnent lieu à des flux toujours disponibles, au moins sous certaines conditions) et celles dites non renouvelables (c'est à dire dont les stocks sont globalement limités et diminuent au fur et à mesure des flux de prélèvements).

En outre, la surexploitation de la nature vient principalement d'une exploitation économique non respectueuse des équilibres et des cycles de reproduction naturels, ce qui provoque des externalités négatives. L'homme peut en effet, par son activité, gravement perturber le jeu normal des éléments naturels, en subir en retour les conséquences et exprimer cet état pathologique à travers l'émergence d'une question environnementale

Enfin, la fin du 20ème siècle a été marquée essentiellement par la prise de conscience de la communauté internationale tout entière, de l'impérieuse nécessité de gérer autrement les ressources naturelles de la planète terre, au risque de déboucher sur une impasse grave pouvant hypothéquer la survie même de l'espèce humaine, aussi longtemps que les modes de production feront abstraction du caractère limité des richesses naturelles. C'est justement à ce titre que l'économie de l'environnement se propose d'intégrer dans la sphère marchande tous les dégâts causés à l'occasion de l'exploitation des ressources naturelles. De plus en plus, les économistes de l'environnement prônent également une gestion efficiente des ressources naturelles. C'est pour cette raison que nous allons présenter dans le cadre de ce chapitre d'abord les différentes techniques de valorisation des actifs naturels (dont l'eau constitue un maillon essentiel). Nous présenterons enfin les différentes méthodes de tarification des monopoles naturels.

2.1. CADRE THEORIQUE GENERAL DE LA VALORISATION ECONOMIQUE DES RESSOURCES NATURELLES

Les activités habituellement considérées par la théorie économique sont des activités marchandes qui aboutissent à la fixation d'un prix monétaire et à la réalisation d'un échange volontaire. Les relations que les hommes entretiennent avec leur milieu de vie naturelle ne répondent pas à ces caractéristiques.

Certaines transactions économiques d'un agent peuvent affecter les ressources ou l'environnement des autres agents, c'est à dire leur bien être. On dit qu'elles exercent des effets externes ou des externalités sur les autres agents. La pollution associée aux activités productives ou à la consommation de certains biens en est un bon exemple. Par ailleurs, l'environnement entre dans la catégorie des biens collectifs : il est non appropriable, non exclusif, souvent gratuit, et apporte d'emblée un bien être à la collectivité (y compris dans le cas où certains individus de la communauté ne le consomment pas). La couche d'ozone, n'est pas produite, n'appartient à personne, et est utile pour tous (sans avoir besoin d'exclure quiconque) même si on ne la consomme pas. Pour autant, l'environnement ne peut être considéré comme un bien collectif pur puisque sa consommation par certains peut détruire le bien ou les qualités qui en faisaient l'attrait. Les règles de gestion et d'allocation des ressources rares habituellement définies par l'économie politique et l'économie du bien être sont ici difficilement applicables.

2.1.1. LA VALORISATION ECONOMIQUE DE L'ENVIRONNEMENT

La détermination de la politique optimale de l'environnement nécessite de pouvoir chiffrer monétairement les coûts et les dommages associés à cette externalité. La recherche de l'optimum est une tâche difficile, et la pratique consiste à adopter des objectifs plus modestes qui nécessitent néanmoins de telles estimations monétaires. Protéger l'environnement, fixer le montant de la réparation des dommages, déterminer un corps de norme, d'une taxe ou d'un quota de permis d'émission supposent d'avoir au préalable chiffré des dommages. C'est le principe de l'analyse coûts-avantages.

Or le problème essentiel rencontré dans l'analyse coûts-avantages réside dans la difficulté qu'il y a à évaluer des valeurs par définition non observables, non exprimées du fait de l'inexistence de droits de propriété définis et de l'absence de marché sur lequel s'échangeraient les services des actifs naturels. Pour évaluer des dommages environnementaux, faut-il évaluer le coût de remise en état du milieu (principe pollueur-payeur), le coût d'évitement du dégât (prévention, mise en conformité) ou la perte de surplus des consommateurs (coût des dommages) ? Dans ce dernier cas, il s'agit d'évaluer la valeur subjective (l'utilité) qu'un individu retire d'une modification particulière de son environnement. C'est l'optique qui est le plus souvent adoptée parce qu'elle permet de négliger a priori aucune des composantes de la valeur accordée par l'ensemble de la société aux dommages. Comme cela a déjà été dit précédemment, les actifs environnementaux ou les services proposés par ces actifs n'ont pas de valeur affichée, résultant de transactions économiques. Pourtant ces actifs ont une valeur, de nature hétérogène et difficile à mesurer (Cléroux, Motte, Salles, 1996)1(*).

Depuis la publication de l'ouvrage de Pearce et Turner (1990)2(*), la notion de « valeur économique totale » s'est largement répandue. Elle propose de regrouper, pour un actif dans une situation définie, ses valeurs d'usage réel, direct et indirect, potentiel et de non usage.

Pour illustrer les différents types de valeurs, nous reprendrons l'exemple des forêts de K. Kristöm (2001)3(*). Une forêt est tout d'abord un actif dont l'exploitation fournit des produits pour lesquels existent des marchés. Parmi les produits classiques, on peut citer le bois de construction, le bois de chauffage, la pâte à papier, le caoutchouc naturel. D'autres produits moins classiques confèrent une valeur supplémentaire à la forêt : ce sont les produits médicinaux qui en sont tirés, comme la quinine, l'acide salicylique extrait des feuilles et de l'écorce de saule, ou les alcaloïdes anticancéreux utilisés dans le traitement des leucémies infantiles qui sont extraits d'une pervenche rose de Madagascar. En raison de ces utilisations possibles, la forêt a ainsi une valeur d'usage. Comme beaucoup d'autres actifs environnementaux, sa valeur d'usage est augmentée du fait qu'elle offre également des possibilités d'usages récréatifs, comme la promenade, la chasse, la pêche.

La théorie néoclassique considère qu'une chose n'a de la valeur que par l'utilité qu'elle a aux yeux de celui qui l'examine. En effet, vouloir apprécier la valeur économique totale de l'environnement oblige donc à cerner toute l'utilité, c'est à dire, tous les avantages qu'il peut offrir aux agents économiques. Parmi ceux-ci les auteurs néoclassiques distinguent les avantages attachés à l'usage de l'environnement et les avantages intrinsèques à celui-ci.

Les premiers mesurés par la valeur d'usage totale sont constitués des bénéfices procurés par la consommation (pêche, chasse) et la non consommation (observation de la faune et de la flore) de l'environnement. Cette valeur d'usage prise en compte par l'individu peut l'être pour lui même, pour l'usage des autres individus qui composent la société ou pour celui des générations à venir. On parlera dans les deux derniers cas de valeur altruiste ou de valeur de legs. A cette première composante, il faut ajouter les composantes liées aux caractéristiques d'incertitude et d'irréversibilité que revêtent les décisions en matière d'environnement.

La valeur attribuée au milieu naturel représente les avantages intrinsèques. On reconnaît là que la faune et la flore peuvent avoir une valeur en soi, ce que John Krutilla (1967)4(*) appellera la valeur d'existence. Un tel concept laisse entrevoir un point de rencontre entre les économistes et les écologistes puisqu'il touche à la dimension éthique de l'environnement. Claude Henry (1990)5(*) propose ainsi d'adjoindre aux critères d'efficience économique un principe de copropriété de l'environnement reconnaissant l'égalité du droit des générations présentes et futures à l'existence du milieu naturel.

Plus une chose est utile, plus elle a de valeur aux yeux de l'économiste néoclassique. Mais l'utilité des choses est liée à la quantité de celles-ci dont on peut disposer. Plus un bien est rare, plus on peut supposer qu'il apportera d'utilité à un individu et plus celui-ci consentira à payer plus cher pour l'acquérir. Si les quantités disponibles de ce bien augmentent, l'utilité apportée par chaque nouvelle unité de ce bien sera moins importante (utilité marginale décroissante) et notre individu sera prêt à dépenser moins d'argent pour acquérir ce bien devenu courant. Ce consentement à payer pour acquérir des biens et des services donne ainsi un indicateur monétaire des préférences des agents et une mesure économique du bien être des individus.

Mais si les hypothèses de concurrence parfaite sont respectées, le prix du bien considéré est le même pour tous. Parmi tous les acheteurs, il est cependant probable que certains étaient prêts à payer beaucoup plus cher que le prix qu'ils ont effectivement acquitté. Ceux-là retirent de cet échange un plus grand avantage que celui indiqué par la somme d'argent qu'ils ont consenti à verser. Cette différence entre le prix susceptible d'être payé et le prix effectivement payé, est appelée surplus du consommateur. Le bien être total qu'une communauté retire de la consommation d'un bien ou d'un service est donc constitué par le montant de la dépense à laquelle elle a consenti pour acquérir ce bien ou jouir de ce service auquel il faut ajouter le surplus de l'ensemble des individus.

Le problème de l'évaluation économique de l'environnement oblige ainsi à évaluer concrètement les variations de ce surplus. Les techniques d'évaluation économique, qui visent à obliger les individus à révéler leurs préférences peuvent être classées en deux groupes : les procédures d'évaluations directes et indirectes.

2.1.1.1. Les méthodes d'évaluation directes

Ces méthodes consistent à trouver un marché de substitution, à savoir une dépense consentie par les agents économiques qui est censée être l'expression de leurs comportements rationnels et de la valeur qu'ils attribuent à l'environnement.

La méthode dite des coûts de transport fût suggérée par Hotelling (1947). La demande des ménages en matière de qualité environnementale est appréhendée par le biais de leurs dépenses de transport engagées pour bénéficier des qualités récréatives (chasse, pêche, baignade, promenade...) de certains sites.

La méthode des prix implicites ou hédonistes part du principe que le prix de certains biens ne reflète pas seulement l'utilité attachée à leurs caractéristiques matérielles intrinsèques mais tient aussi compte de leurs qualités environnementales. Ridker et Hennings (1967) considèrent le marché de l'immobilier comme un marché de substitution pour certaines pollutions atmosphériques ou sonores. Les travaux de Rosen (1974) ont amené certains économistes à étendre les résultats de ces études sur le marché du travail. Ces études postulent en effet que les salaires en termes réels varient également en fonction de caractéristiques des lieux de travail et de résidence. En outre, les dépenses supplémentaires effectuées par les ménages pour se protéger contre certaines nuisances (travaux d'isolation) peuvent également apparaître comme une expression de leur consentement à payer pour un environnement de meilleure qualité.

La méthode des évaluations contingentes tente de créer un marché expérimental afin de procéder à une évaluation directe des préférences des individus au moyen d'un questionnaire. Il s'agira alors de mettre l'agent concerné dans une situation hypothétique la plus concrète possible en termes de paiement (impôt) et de perception du dommage (bande sonore...) et de lui poser directement une question du type : combien êtes-vous prêt à payer pour éviter tel dommage à l'environnement ?

2.1.1.2. Les méthodes d'évaluation indirecte

Elles sont généralement employées lorsqu'il y a des raisons de penser que les individus concernés ne sont pas conscients des effets qu'entraîne la pollution. Il s'agit d'étudier les relations physiques entre des doses de pollution et des effets dommageables pour la santé, les écosystèmes, etc. On s'efforcera ainsi d'évaluer le nombre de décès imputables à la pollution atmosphérique.

Le Sommet de Johannesburg (2002) a été l'occasion de rappeler l'importance de l'enjeu environnemental pour les entreprises. Celles-ci doivent en effet rendre compte des effets de leur production sur l'environnement naturel. Les informations concernant l'environnement sont fournies par la comptabilité environnementale privée et par la comptabilité nationale environnementale. Par comptabilité environnementale privée, il faut entendre un système d'informations efficient sur le degré de raréfaction des éléments naturels engendré par l'activité d'entreprises, utilisable pour réduire cette raréfaction et pour informer les tiers. Pour faire de la comptabilité environnementale, il faut utiliser des principes comptables tels que ceux de prudence ou de permanence des méthodes. Comptabiliser des coûts environnementaux consiste à recenser les coûts environnementaux déjà envisagés ou à envisager compte tenu de la législation en vigueur. Comme en comptabilité de gestion, on analyse tous les entrants et les sortants au cours du processus de production. D'où la recherche d'une valorisation monétaire des biens environnementaux qui conduit au calcul d'un « PIB vert ». Ce PIB vert prend en compte des indicateurs comme la qualité des eaux, la protection de la nature, les émissions de gaz carbonique, etc. La comptabilité environnementale répond à trois principes fondamentaux (J.P Decaestecker et G. Rotillon, 1993). Elle consiste à mieux évaluer :

Ø la richesse nationale en prenant en compte les variations du stock d'actifs naturels (par exemple la forêt).

Ø La production : les dépenses de lutte contre la pollution ne devraient pas être incluses dans le PNB par exemple car la pollution n'y est pas prise en compte négativement.

Ø L'amortissement : l'extraction de ressources naturelles, ordinairement comptée comme un revenu, doit réduire le stock de capital naturel

C'est ainsi que REPETO R.6(*) présente ces différents comptes de la manière suivante :

Emplois PIB classique Ressources

- Consommation finale - Sommes des valeurs ajoutées

- Formation brute du capital fixe - T.V.A

- Variations des stocks - Droits de Douane

- Exportation - Importation

Emplois PIB ajusté à l'environnement Ressources

- Dépenses de protection des ménages

et de l'Etat contre la pollution de l'environnement - PIB classique

- Solde : PIB ajusté

Emplois PIB Durable Ressources

- Coûts des dommages sur l'environnement - PIB ajusté

- Solde : PIB durable

Emplois PIB Durable net Ressources

- Consommation du capital fixe artificiel

- Consommation de capital naturel - PIB Durable

- Solde : PIB durable net

Emplois PIB Ecologique Ressources

- Déplétion des ressources naturelles

- Dépréciation de l'environnement - Epargne Brute

- Solde : Epargne véritable

Mais on recense uniquement ce qui concerne l'environnement, à savoir les rejets de polluants dans l'air et dans l'eau ; la pollution des sols ; les déchets et la consommation d'énergie. Par rapport à la comptabilité analytique, l'information fournie par ce type de comptabilité est, à la fois, plus réduite, puisqu'elle ne donne généralement que des informations en quantité (pas de valorisation) mais aussi plus large puisqu'on s'intéresse au produit (c'est à dire que l'on retient une période de vie qui comprend sa production, mais aussi sa consommation, et sa post-consommation).

Les rapports de développement durable, encore appelés rapports environnement, ont pour objet d'informer les tiers sur les progrès réalisés par l'entreprise en matière de protection de l'environnement, mais aussi ses échecs éventuels et ses projets futurs. Ils comprennent des tableaux statistiques reprenant des informations environnementales, en unités physiques ou en unités monétaires. Rappelons tout de même que le rapport Brundtland (1987) définit le développement durable comme étant un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Ce dernier (le développement durable) a été longtemps considéré comme une tentative pour concilier croissance et développement économique, il insiste aujourd'hui sur l'existence d'un nouveau modèle de gouvernance générant à la fois des perspectives économiques, sociales et écologiques. En s'étendant à de nombreux domaines, on parle d'agriculture durable, de gestion forestière durable, de gestion durable de l'eau et de ressource minière, le développement durable s'inscrit davantage dans le contexte de la durée plutôt que celui de l'effet de mode.

La spécificité de la comptabilité environnementale vient de son champ d'application, l'environnement naturel. En effet, en comptabilité environnementale, pour quantifier et évaluer, on va rencontrer les écueils suivants :

- il est souvent difficile d'être exhaustif en matière de polluants,

- certains biens naturels actuellement consommés sont gratuits, en l'absence de marché, il est difficile d'évaluer le coût de leur consommation,

- l'évaluation de certaines dégradations de l'environnement suppose que l'on soit capable de calculer et d'actualiser certaines dépenses à très long terme, soit parce qu'elles ne seront engagées qu'une fois le processus de production terminé (reconstitution d'un site après fermeture d'une carrière), soit parce que les effets de cette dégradation vont s'étaler sur une longue période (déchets radioactifs).

L'intégration d'éléments relatifs à l'environnement dans la comptabilité nationale doit en priorité fournir des éléments permettant à la puissance publique de prendre des décisions. En France, l'accent est mis sur les comptes satellites de l'environnement qui sont un assemblage de l'information. On isole l'information environnementale et on regarde comment s'instaurent les relations entre producteurs d'éléments protégeant l'environnement, financeurs et bénéficiaires.

A l'étranger, on notera la création de tableau entrées-sorties (tableaux de Leontief) portant sur les émissions de polluants et le développement de systèmes de comptabilité nationale caractérisés par la juxtaposition de données monétaires et physiques (Suisse, Pays-Bas). Ces systèmes de comptabilité nationale ont donné naissance au concept de « valeur ajoutée négative ». Calculer une valeur ajoutée négative, c'est donner une valeur à la consommation gratuite du patrimoine naturel (on le considérait jusqu'à présent comme gratuit car abondant alors qu'il se raréfie) et retrancher cette consommation de la valeur ajoutée produite.

Pour certains, le développement prévu d'un marché des permis d'émission va donner naissance à des situations juridiques particulières qu'il conviendra de traduire en comptabilité. Les questions soulevées sont les suivantes : un droit octroyé, même gratuitement, doit-il faire l'objet d'une comptabilisation dès lors que son utilisation est réglementée et qu'il est négociable ? Comment comptabiliser la négociation de ces droits du côté tant de l'acheteur que du vendeur ?

N'oublions pas l'aspect fiscal qui n'est pas négligeable. En effet, une entreprise fera l'acquisition de permis dans l'intention de s'éviter, au moins temporairement, des investissements. La plus ou moins grande économie d'impôt engendrée par les achats de permis rendra leur négociation plus ou moins attractive.

2.1.2. L'ECONOMIE DES RESSOURCES NATURELLES

L'économie des ressources naturelles est l'autre élément de la réponse de la théorie néoclassique à la question de l'environnement. Ce dernier apparaît alors comme un stock de ressources, qui peuvent être renouvelables ou non, qu'il faut gérer de façon optimale à travers le temps. Il s'agit là d'une problématique économique d'allocation inter temporelle des ressources dont les fondements furent posés par Hotelling (1931).

Les biens qui sont stockables, mais non reproductibles, sont qualifiés de « ressources épuisables » (exemple du charbon, pétrole, gaz, minerais...). L'impossibilité de reproduire ces biens (excepté lors d'une découverte de nouveaux gisements) amène deux remarques: d'une part les stocks (plus précisément les réserves) sont considérés comme donnés, d'autre part, il existerait un lien étroit entre le taux d'extraction et les ventes de ressources naturelles. En effet, si le taux d'extraction peut être assimilé aux ventes, comme la substitution de productions est impossible, l'entreprise chargée d'exploiter une mine de charbon ou un puits de pétrole, pourra chercher soit à accélérer l'extraction (c'est à dire substituer des ventes présentes à des ventes futures), soit à la ralentir (substituer des ventes futures à des ventes présentes). Une entreprise serait ainsi capable d'influencer le prix des ressources naturelles en faisant varier ses ventes via le taux d'extraction.

La relation prix - taux d'extraction d'une ressource naturelle a été introduite par Hotelling grâce à un parallèle entre la sauvegarde de l'héritage intergénérationnel et l'influence des monopoles.

Dans un premier temps, Hotelling s'attaque à la philosophie du mouvement conservationniste américain qui prônait un ralentissement, voire un arrêt de l'extraction des ressources naturelles au moyen d'une augmentation de leurs prix y compris par le biais de taxes imposées par l'Etat. Ce mouvement remettait en cause le productivisme et le consumérisme de la société américaine, et entendait défendre d'autres valeurs. Il appelle au développement d'une éthique environnementale. Les conservationnistes soulignent la spécificité des ressources naturelles qui réside, selon eux, dans le fait qu'elles sont essentielles à la société industrielle, épuisables et très difficiles à remplacer de manière satisfaisante. Les habituels critères économiques (prix, procédure de maximisation de la valeur présente) ne seraient pas capables de répondre de manière satisfaisante aux exigences des ressources naturelles. Dans un second temps, Hotelling s'attaque aux situations de monopoles afin de montrer la supériorité en matière de gestion des ressources naturelles de la concurrence réputée pure et parfaite.

Pour répondre à ce double objectif, Hotelling va bâtir une théorie de l'entreprise minière exploitant une ressource non renouvelable, en reprenant les outils et les éléments de la théorie microéconomique du producteur. La ressource apparaît pour le propriétaire de la mine comme un stock de biens qui diminue au fur et à mesure de son extraction. Gérer de façon optimale ce stock revient à déterminer quel flux de ressource lui apportera le plus de revenu sur l'ensemble de la période d'exploitation de la mine. Le propriétaire de la mine est à la recherche du profit maximal qu'il calcule en comparant ses recettes et ses coûts. Hotelling part du principe que les propriétaires d'une ressource naturelle souhaitent toujours maximiser la valeur actuelle de leurs profits futurs.

Dès lors, comme le souligne Hotelling, le prix net évoluera en fonction des variations du taux d'intérêt, dont les déterminants sont indépendants du produit en question, de l'industrie concernée, et des variations de la production de la mine. De là, la rente de l'entreprise devrait augmenter avec le taux d'intérêt (en d'autres termes, la valeur actuelle du prix net est une fonction croissante du taux d'intérêt). Ainsi la condition d'équilibre, baptisée, règle de Hotelling, stipule que le prix de la ressource naturelle et donc la rente qui lui est attachée, doit croître à un taux égal à celui du taux d'actualisation (taux d'intérêt).

Dans le cas du monopole, Hotelling avance qu'une entreprise peut influencer le prix en faisant varier son taux d'extraction (c'est à dire ses ventes). Cette dernière cherchera à maximiser la valeur présente de ses profits futurs.

Au total, la démonstration est faite qu'à un rythme optimal d'évolution du prix d'une ressource naturelle est associé un sentier optimal d'épuisement de cette ressource. La ressource naturelle est assimilée à un capital. L'exploration visant à la découverte d'un nouveau gisement apparaît comme un simple investissement. Cependant comme le faisait remarquer Scott Gordon (1954), un problème de gestion demeure lorsque l'accès à la ressource naturelle est libre. En effet l'arbitrage de l'entreprise qui désire exploiter une ressource naturelle libre (banc de poissons) ne consiste pas à choisir entre consommer maintenant ou consommer demain mais, puisque tout ce qui n'est pas pêché aujourd'hui par elle, peut l'être par une autre entreprise, son choix réside entre consommer aujourd'hui ou ne jamais consommer. La concurrence que se livrent les firmes désireuses d'exploiter la ressource naturelle libre conduit chacune à maximiser son profit du moment. En l'absence d'appropriation, la règle d'Hotelling ne joue plus, il est question de procédure d'actualisation et gestion inter temporelle optimale. Au contraire chaque firme a intérêt à exploiter au plus vite la ressource. Des risques d'épuisement rapide ou d'extinction d'espèces dans les cas de pêcheries (baleines) sont même à craindre.

2.1.3. LES REMISES EN CAUSES THEORIQUES

« La valorisation des biens environnementaux n'a pas résolu tous les problèmes liés à l'environnement, ce qui a conduit à une remise en cause des cadres théoriques. Bien que les bases soient restées stables (Biens publics et externalités), le calcul économique a subi de profondes modifications que ce soit du point de vue de sa cohérence interne que de sa validité d'utilisation »7(*).

2.1.3.1. La théorie du choix de l'incertain : le modèle Von Neumann

Certains économistes à l'instar de Von Neumann et Morgensten qui s'intéressaient aux comportements des agents en situation de risque ou d'incertitude avaient à leur disposition un modèle standard nommé le modèle V.N.M (Von Neumann et Morgensten). Ce dernier rencontrait un large consensus même si M. Allais (1953) en avait critiqué les bases.

Ce modèle, appelé aussi maximisation de l'utilité espérée, consiste essentiellement à représenter les choix d'individus par une probabilité (P1, P2, P3,..., Pn) sur les conséquences possibles (X1, X2, X3,...., Xn) de ses actes, Pi étant la probabilité d'obtenir Xi. Chaque décision de l'agent correspond à une distribution de probabilité particulière. Le meilleur choix est obtenu en maximisant l'espérance mathématique de l'utilité des conséquences (soit Óu (xi)).

Ce cadre théorique est remis en cause tant sur le plan explicatif que normatif. De plus, les agents économiques ne respectent pas toujours les axiomes qui sont censés fonder leur comportement. En effet, l'axiome d'indépendance des agents est rarement vérifié et par conséquent vivement critiqué.

2.1.3.2. La remise en cause de l'expertise

Les problèmes d'environnement ont atteint le grand public surtout dans les pays développés. Mais cette prise de conscience, encore récente a été progressive. Il est notamment apparu un décalage entre l'institution scientifique productrice de connaissances et la société civile, remise en question par le développement de nouvelles technologies. A l'interface des deux, l'expert, à la fois pédagogue et conseiller du prince, aurait pour charge de faire le lien entre la science et la politique, entre comprendre et décider.

2.2. LES DIFFERENTES METHODES DE TARIFICATION DES MONOPOLES NATURELS

La théorie du « monopole naturel »8(*) nous enseigne qu'il existe plusieurs possibilités, lorsqu'il s'agit de la tarification d'un monopole multiproduits (ou ayant à faire face à plusieurs demandes, comme c'est le cas pour l'eau qui est réclamée pour des usages multiples : consommation d'eau potable par les ménages, l'eau d'irrigation pour les agriculteurs, l'eau pour la production électrique, etc.), contraint par sa mission de service public. La première possibilité est de maintenir une tarification au coût marginal. C'est une solution dite de « premier rang ». La deuxième possibilité consiste à opter pour un optimum de « second rang » et à retenir par exemple une tarification du type Ramsey-Boiteux ou du type par tranche avec une tranche dite sociale.

2.2.1. LES GRILLES DE PRIX DE L'EAU AU COUT MARGINAL

L'apparition en Afrique subsaharienne de nouveaux facteurs, sources de contraintes supplémentaires (forte croissance démographique, forte urbanisation, croissance rapide de la demande, hausse des coûts de mobilisation des ressources et d'exploitation ou, hausse des coûts liés à l'extension des services d'alimentation en eau potable à des zones de faible densité de population pour lesquelles le coût unitaire du service d'eau est relativement plus élevé), a généré l'idée d'atteindre des niveaux de production et de consommation d'eau économiquement « efficaces » susceptibles d'épargner les ressources rares. L'attention s'est donc progressivement portée sur une hausse de la tarification de l'eau pour qu'elle atteigne au moins la valeur de son coût marginal. En ce sens, la recherche de l'optimalité ne serait donc qu'une concrétisation de la contrainte de rareté, une simple exigence d'efficience. Choisir une solution non optimale est dans ce cadre une erreur, source de gaspillage.

Les « économistes » s'appuyant sur la théorie de l'optimum de Pareto justifiaient une tarification au coût marginal, ce qui impliquait une dépéréquation temporelle et spatiale des tarifs. Le surplus collectif (bien être social) est maximisé lorsque l'usager paie un prix correspondant au coût supplémentaire (coûts fixes anticipés et coûts variables) supporté par l'entreprise du fait de la présence de cet usager sur le réseau.

Un tel système justifie des tarifs plus élevés aux périodes de pointe (lorsqu'il y a un encombrement ou lorsqu'il y a une variation climatique à l'origine de conflits d'usage plus élevés : sécheresse) et des tarifs plus élevés dans les zones isolées (là où les coûts de raccordement sont plus forts en raison de la faiblesse des rendements d'échelle). Cette discrimination tarifaire n'est pas incompatible, du point de vue de la théorie, avec le principe de l'égalité de traitement des usagers car tous les usagers placés dans les mêmes conditions paient un prix identique ; a contrario les usagers placés dans des conditions (temporelles et spatiales) différentes doivent payer un prix différent.

Au sens courant, une situation optimale est la meilleure possible compte tenu des contraintes qui caractérisent un contexte particulier. Le point optimal n'est pas seulement un maximum puisque outre les critères quantitatifs, des considérations qualitatives entrent en ligne de compte.

Il s'agit dans ce cadre de la tarification qui permet de maximiser le surplus collectif (elle reproduit une situation de concurrence parfaite). C'est la tarification optimale de premier rang. Cependant elle présente un inconvénient majeur pour un monopole naturel : le coût marginal est inférieur au coût moyen en présence de rendement croissant. Si le prix est égal au coût marginal, alors le profit est négatif. Les pouvoirs publics doivent alors subventionner le monopole, ce qui pose deux types de problèmes9(*) :

Ø La subvention peut apparaître comme une prime accordée à une gestion peu rigoureuse, même si le déficit est justifié par la recherche de l'optimum social.

Ø Le financement de la subvention peut avoir des conséquences dommageables sur d'autres secteurs de l'économie, par exemple les distorsions fiscales.

La valorisation, à son véritable niveau de l'eau, est évidemment un moteur puissant d'évolution des pratiques. Le plein recouvrement des coûts apparaît aujourd'hui une utopie pour de nombreux décideurs, qui s'appuient sur l'impact socioéconomique d'une valorisation du coût de l'eau mais aussi sur des notions culturelles, voire religieuses (l'eau, don du ciel, bien sacré, non appropriable) rendant cette valorisation inacceptable.

2.2.2. LES GRILLES DE PRIX DE L'EAU AU COUT MOYEN (RAMSEY-BOITEUX)

La théorie économique nous enseigne que pour assurer la maximisation du bien être des consommateurs, les biens et services doivent être vendus à leur coût marginal social. Cependant, en présence d'économie d'échelle, ce mode de tarification donne un déficit. Une solution possible consiste à combler ce déficit par une subvention. Dans d'autres situations, cela est politiquement impossible et on requiert plutôt que le responsable de la production s'autofinance au moins en partie. Pour ce faire, il doit alors majorer les prix, du moins certains d'entre eux au dessus des coûts marginaux. On obtient ainsi un optimum de second rang lorsque le monopole est soumis à une contrainte budgétaire et celui-ci (le monopole naturel) fixe un prix égal au coût moyen. Dans le secteur de l'eau où le monopole est obligé de segmenter sa clientèle, il fixe un prix pour chaque produit, qui sera supérieur au coût marginal d'un écart plus grand que la demande est peu élastique au prix, mais tel que les recettes totales soient juste égales au coût total : C'est la règle de Ramsey-Boiteux10(*)

La règle de Ramsey-Boiteux indique comment opérer la majoration des prix, tout en générant le moins de distorsions possibles par rapport aux consommations de premier rang obtenues avec la tarification au coût marginal. Elle maximise le bien-être total des consommateurs sous la contrainte budgétaire. Elle suppose la fonction de demande connue ou, du moins, l'élasticité de cette dernière. Elle fait disparaître l'obligation pour l'Etat d'accorder une subvention au producteur dans le cas où la tarification au coût marginal occasionnerait une perte (prix inférieur au coût moyen).

2.2.3. LES GRILLES DE PRIX BINOME DE L'EAU

La tarification binôme est utilisée lorsque le monopole connait la fonction de demande individuelle. Il va ainsi utiliser la partie forfaitaire du tarif pour couvrir les coûts fixes de production (et non pour capter le surplus des consommateurs). Par ailleurs, cette partie forfaitaire peut être très élevée pour certains consommateurs, c'est-à-dire supérieure à leur surplus, ce qui va entrainer leurs exclusions du marché. Pour remédier à ce problème, le monopoleur peut proposer des tarifs optionnels : le consommateur choisit le tarif qu'il préfère.

En outre, l'avantage de cette méthode de tarification est qu'elle permet de connaître ex post, la disposition à payer des clients sans les différencier a priori. La charge de la discrimination est en quelque sorte « sous-traitée aux usagers qui se positionnent aux divers niveaux du barème » (N.Curien, 2000), en choisissant eux-mêmes les options qu'ils préfèrent. Le tarif est de la forme :

T = E + p.q

Où E représente une prime fixe indépendante des quantités consommées q et p représente le prix unitaire du bien. Willig a démontré en 1978 que le tarif optionnel non linéaire est préférable, au sens de Pareto, à un tarif linéaire du type Ramsey (voir Bezzina, 1998).

Les prix non linéaires optimaux de premier rang ont été proposés dès 1946 par Coase. Ils permettent d'équilibrer le budget de l'entreprise grâce au recouvrement des primes fixes et de faire bénéficier les usagers d'une tarification au coût marginal.

Le tarif non uniforme se décompose dès lors en 2 éléments (J. Percebois, 2001):

- un prix unitaire p égal au coût marginal de mise à disposition du bien ;

- Une partie fixe E qui permet de couvrir les coûts fixes de l'infrastructure et telle que : E = F/n où F représente les coûts fixes et n le nombre d'usagers.

Cela revient donc à répartir les coûts d'infrastructure de façon uniforme entre tous les usagers.

Il faut noter toutefois que la disponibilité à payer (ou capacité à payer, ou encore disposition à payer) de chaque usager doit être supérieure à la charge fixe F/n pour que l'allocation optimale des ressources soit atteinte. Seules des statistiques nous permettraient de connaître les dispositions à payer des différents usagers et donc de déterminer si ce mode de tarification serait applicable pour l'eau, dans les pays de l'Afrique subsaharienne.

En effet, si la disponibilité à payer de chaque usager est inférieure à la charge fixe, certains clients seraient abusivement exclus de l'accès au réseau11(*).

2.2.4. LES GRILLES DE PRIX PROGRESSIVE DE L'EAU AVEC « TRANCHE SOCIALE SUBVENTIONNEE »

Le concept de « tranche sociale subventionnée » ou de « besoin de base » a une justification économique essentiellement fondée sur l'argument de redistribution des revenus. En effet, l'objectif de la société distributrice à mission de service public est aussi de permettre un accès pour tous (même aux ménages à faible revenu) : souci de justice sociale.

Le principe est de définir une 1ère tranche de consommation dite « sociale » (correspondant au volume de consommation minimal pour la satisfaction des besoins de base) pour laquelle le tarif appliqué est dit « social » (inférieur au coût marginal). Puis, les autres tranches de consommation (volumes plus élevés) sont tarifiées au coût marginal.

Cependant de telles politiques ne se sont pas toujours révélées positives aux ménages à faible revenu. Bien au contraire, elles ont même souvent généré en Afrique des effets contre-redistributifs pour les raisons suivantes. Tout d'abord dans des villes où le taux de desserte (branchement domiciliaire) est fort, ces politiques ont favorisé l'accès à l'eau des ménages à revenu moyen et non aux ménages à faible revenu. Ces derniers habitent souvent des quartiers marginaux « hors réseau », et sont donc peu touchés par de telles politiques pourtant dites « sociales ». De plus, dans les quartiers précaires dont la particularité de l'habitat est la cour partagée avec un seul robinet, les ménages se partagent la facture d'eau dont le volume de consommation élevé correspond à un prix fort.

Ces quatre types de tarification posent clairement la question de leur impact réallocatif et redistributif compte tenu de la réalité africaine. Ils (ces différents types de politique de tarification) ne permettent pas toujours aux sociétés concessionnaires d'atteindre le double objectif d'efficacité et d'équité social.

Ce chapitre nous permettra dans une première partie de faire l'état de la plupart des travaux réalisés dans ce domaine avant de faire une analyse critique de la politique de gestion d'eau potable au Cameroun.

3.1. REVUE GENERALE CRITIQUE DE LA LITTERATURE SUR LA GESTION DE L'EAU.

La plupart des littératures sur la question de l'eau focalise leurs attentions sur l'analyse de la friction du marché de l'eau et la combinaison de prix résultant de celle-ci. Les auteurs tels que : Gaudin, Griffin et Sickles (2001), Hewitt et Hanemann (1995), Kim (1995) ont basé leurs travaux sur la demande d'eau pour un but de consommation ménagère. Par contre, d'autres auteurs se sont plutôt intéressés à la demande d'eau pour les besoins d'irrigation. Il s'agit notamment de : Iglesias, Garrido et Gomez-Ramos (2007), Appels, Douglas et Dwyer (2004), Fraiture et Perry (2002). En outre, l'eau permettant d'alimenter les deux secteurs provient du même réservoir de ce fait l'analyse optimale du prix de l'un des secteurs d'utilisation d'eau pendant que la demande d'eau de l'autre secteur est ignorée peut avoir des implications politiques (Yiðit Saðlam, 2010). Mais en prenant en compte l'usage multiple de la ressource eau et en supposant une contrainte de revenue de la part des agents économiques, on peut utiliser la méthode de la combinaison des prix statiques de Ramsey comme le précise les travaux de Diakité, Semenov, et Thomas (2009), Garcia et Reynaud (2004), Griffin (2001). Finalement, l'allocation inter temporelle de l'eau peut aussi avoir un effet important sur le prix de l'eau de la seconde période, comme un volume bas d'eau peut contribuer à rendre plus difficile l'accès à l'eau et provoquer ainsi une augmentation du prix de l'eau comme le précise Yiðit Saðlam (2010). La dynamique de la gestion du réservoir d'eau est un facteur important dans le processus de détermination du prix de l'eau comme le précise les travaux des auteurs tels que : Castelleti, Pianosi, et Soncini-Sessa (2008); Howitt, Msangi, Reynaud, et Knapp (2002) ; Schuck et Green (2002). Katharine Coman renchérit justement cette idée en stipulant que le réchauffement climatique a une influence notable sur la pluviométrie et donc sur les réserves d'eau et a par conséquent un impact sur le prix d'eau. L'ensemble de ces travaux bien qu'intéressant s'occupe particulièrement de la demande d'eau potable et a tendance à négliger l'offre. De plus elle s'occupe principalement de la détermination optimale des prix de l'eau et ceci dans les pays où la gestion de celle-ci est faite par le secteur privé.

En regardant la littérature sur la rareté d'eau, Woo (1994) c'est attardé sur le coût de l'interruption d'eau utilisé dans les résidences. Le modèle de Woo suppose aussi que l'utilité des consommateurs est fonction du temps quand le service d'eau peut être interrompu. En se servant des données provenant de Hong Kong, il a estimé la demande d'eau potable ou buvable en spécifiant un modèle de demande double logarithmique et linéaire. Alors Woo utilise la variation de la compensation Hicksien pour calculer le bien être perdu dû à l'interruption du service de cette ressource. Les travaux de Woo semblent ne pas avoir d'intérêt sur les raisons de l'interruption de ce service et de plus la qualité de cette ressource n'est pas prise en compte.

Schuck et Green (2002) quant à eux, analysent le problème du prix d'irrigation d'eau pour une utilisation conjointe du système d'eau dans un environnement dynamique. Ces derniers supposent que les cultivateurs peuvent utiliser les eaux souterraines et celles à la surface de la terre pour irriguer leurs champs. Ils introduisent par la suite une contrainte de revenue dynamique pour l'irrigation dans un district et analysent le bien être social dans un horizon fini du problème de la dynamique de prix du modèle de Ramsey. En utilisant les données sur l'Etat de Californie, Schuck et Green ont fourni une suggestion sur la politique de prix d'irrigation, le niveau de couche de roche et l'énergie utilisée par les fermiers.

Les économistes tels que Dupuit, 1849 ; Hotelling, 1938 ; Vickrey, 1948 proposent une tarification au coût marginal permettant de produire les quantités optimales au sens de Pareto. Mais en raison de la présence de rendements d'échelle croissants, fixer un prix au coût marginal conduit l'entreprise à faire des pertes que l'État est obligé de résorber. Cependant, cette solution n'est pas totalement satisfaisante pour plusieurs raisons. Les transferts monétaires de l'État vers l'entreprise nécessitent un prélèvement fiscal qui peut être à l'origine de distorsions économiques. Les fraudes fiscales et les bilans comptables falsifiés sont quelques fois inévitables. Enfin, en raison de l'information incomplète et imparfaite de l'État sur l'entreprise, cette dernière profitera de cet avantage pour accroître ses rentes.

Yiðit Saðlam (2010) dans l'un de ses articles précise qu'une politique de prix optimal peut aider à faire face au manque d'eau, notamment en incorporant la demande d'eau dans des secteurs divers ainsi que la contrainte des ressources dynamiques et de revenue. Pour déterminer l'efficacité du prix de l'eau sur la rareté de l'eau, cet auteur suppose un modèle aléatoire dynamique dans lequel l'Etat assure l'offre d'eau aux ménages et aux secteurs agricoles. Une fonction de politique de prix fournira la règle du prix optimal ainsi que la restriction organisationnelle. Il prend en compte les changements dans la composition des cultures pour répondre aux variations du prix d'eau. Yiðit Saðlam (2010) suppose enfin une politique de prix à coût moyen tout en estimant que les bénéfices réalisés par l'Etat sont réutilisés pour offrir l'eau à ces agents. En utilisant les donnés sur la Turquie, il a donné une estimation structurelle de la demande d'eau par secteur et alors examinés les expériences menées sur plusieurs contrefaits.

La gestion de la demande en eau (GDE), qui comprend l'ensemble des mesures visant à accroître les efficiences techniques, sociales, économiques, institutionnelles et environnementales dans les différents usages de l'eau, émerge depuis une dizaine d'années comme une question centrale de la gestion de l'eau en Méditerranée Gaëlle Thivet et Mohammed Blinda (décembre 2007).

Partant du constat que la croissance de l'offre, ayant constitué la réponse traditionnelle à l'augmentation de la demande, avait atteint (ou allait atteindre) ses limites et se heurtait à des obstacles à la fois sociaux, économiques ou écologiques croissants dans presque tous les pays riverains, la Commission Méditerranéenne de Développement Durable avait en effet conclu, dès 1997, que la GDE constituait « la voie permettant les progrès les plus significatifs des politiques de l'eau en Méditerranée », ce, compte tenu des gains d'efficience possibles. Différents ateliers organisés à l'échelle régionale (Fréjus en 1997, Fiuggi en 2002, Saragosse en 2007) ont conduit à une reconnaissance progressive de la gestion de la demande en eau comme une voie prioritaire pour contribuer à atteindre deux objectifs au centre du concept de développement durable : l'évolution des modes de consommation et de production non viables d'une part, la protection et la gestion durable des ressources naturelles aux fins du développement économique et social d'autre part. Ils ont permis de débattre des outils de mise en oeuvre des politiques de gestion de la demande en eau et montré que les progrès obtenus les plus significatifs avaient résulté de combinaisons d'outils (stratégies, tarification et subventions, organisation institutionnelle) mis en oeuvre de façon progressive et continue. La gestion intégrée des ressources et demandes en eau a été retenue comme le premier domaine d'action prioritaire de la Stratégie Méditerranéenne pour le Développement Durable adoptée en 2005 par l'ensemble des pays riverains et la Communauté européenne. Dans cette stratégie « cadre » commune, l'un des objectifs principaux relatifs à la gestion de l'eau est le renforcement des politiques de GDE pour stabiliser la demande grâce à une atténuation des pertes et des mauvaises utilisations et pour augmenter la valeur ajoutée créée par m3 d'eau utilisé (soit amélioré les efficiences).

3.2. ANALYSE CRITIQUE DE LA POLITIQUE DE GESTION DE L'EAU POTABLE AU CAMEROUN

L'eau est au coeur des défis que doit relever le développement à l'échelle mondiale. Elle est le lien entre sécurité alimentaire, réduction de la pauvreté, croissance économique, production énergétique et santé humaine. Elle joue un rôle déterminant pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Même si les problèmes liés à l'eau se manifestent localement, ils interagissent avec d'autres problèmes à d'autres niveaux, et ne peuvent donc pas être résolus indépendamment.

Le Cameroun est considéré comme l'un des pays africains les plus riches en ressources en eau. Le réseau hydrographique est dense mais inégalement réparti sur le territoire national. La politique du Cameroun en matière d'eau est contenue dans le Programme d'Alimentation en Eau Potable et d'Assainissement (A.E.P.A). Ce programme révèle que la politique nationale en matière d'eau comporte essentiellement deux volets que sont l'accès à l'eau potable et l'assainissement. L'AEPA vise à encourager la participation des bénéficiaires en ce qui concerne les programmes d'hydrauliques rurale. En ce qui concerne l'assainissement, le programme vise à associer le secteur privé et les bénéficiaires. Les installations d'alimentation en eau potable en milieu urbain sont assurées par l'Etat et leur gestion quotidienne confiée à la société Nationale des Eaux du Cameroun (SNEC)12(*) dans le cadre d'un contrat de concession. L'AEPA est géré par plusieurs institutions. Cette gestion multiple est la cause de quelques problèmes de coordination.

3.2.1. LA DISPONIBILITE DE L'EAU

3.2.1.1. L'offre

Selon les estimations effectuées par la FAO en 2005, le Cameroun dispose de ressources en eau totales renouvelables de l'ordre de 285,5 milliards de m3 par an, ce qui correspond en termes de disponibilité en eau par habitant à 17.520 m3 par an. Le tableau n°1 ci-dessous indique la disponibilité des ressources en eau selon le découpage administratif par région.

Tableau 1: Prospective de la disponibilité des ressources en eau par province

province

Situation en 2025

Situation en 2050

 

Quantité d'eau par habt, x 103m3

Etat de disponibilité

population

Quantité d'eau par habt, x 103m3

Etat de disponibilité

population

Sud

38,6

Satisfaisant

866.993

23,1

Satisfaisant

1.445.733

Est

29,5

Satisfaisant

1.521.495

14,2

Satisfaisant

3.153.810

Adamaoua

17,8

Satisfaisant

1.419.318

8,8

Satisfaisant

2.863.766

Sud-Ouest

16,9

Satisfaisant

2.416.128

8,4

Satisfaisant

4.832.241

Centre

7,6

Satisfaisant

5.183.926

3,5

Satisfaisant

11.052.389

Nord

5,9

Satisfaisant

3.162.296

2,2

Satisfaisant

8.383.901

Littoral

4,2

Satisfaisant

5.064.067

1,8

Satisfaisant

11.978.616

Nord-Ouest

5,2

Satisfaisant

3.322.972

2,8

Satisfaisant

6.171.677

Ouest

2,4

Satisfaisant

3.661.756

1,3

Satisfaisant

6.958.955

Extrême Nord

1,7

Satisfaisant

5.146.462

0,9

Satisfaisant

10.011.683

Cameroun

8,1

Satisfaisant

31.765.414

3,9

Satisfaisant

66.852.771

Source: Cameroon water development Report, M. FONTEH (2003)

Suivant le PNUD, une région est définie comme étant en pénurie d'eau, lorsque la disponibilité en eau par habitant et par an est inférieure à 1.000 m3. Lorsque cette quantité est inférieure à 1.700 m3 par habitant et par an, la région est considérée être en situation de stress hydrique. Se fondant sur ces définitions, le Cameroun dispose de ressources en eau en quantité adéquate aussi bien du point de vue des bassins hydrographiques que de celui des provinces du pays à l'horizon 2025. A l'horizon 2050, la province de l'extrême nord connaîtra une situation de pénurie d'eau, pendant que la province de l'Ouest sera en situation de stress hydrique. Du point de vue de l'analyse par province, cette situation équivaut à environ 25% de la population qui sera en situation de stress hydrique ou de pénurie d'eau à l`horizon 2050.

Les ressources intérieures en eau renouvelables par habitant sont estimées à 18.500 m3 par an au Cameroun13(*). Suivant les estimations effectuées par la FAO en 2002, environ 18,5% des ressources en eau douce mobilisées au Cameroun sont utilisées pour les usages domestiques. Le défi de l'accès à l'eau potable des populations suivant les OMD, reste un objectif essentiel de la politique nationale de l'eau du pays, si l'on tient compte que 42% de la population totale du pays n'a pas accès à l'eau potable et ce particulièrement en milieu rural avec 58% contre 23% en milieu urbain. Les principaux centres urbains du Cameroun (environ une centaine) possèdent un système d'approvisionnement en eau potable géré par la SNEC14(*). Les populations rurales étant alimentées essentiellement grâce à la mobilisation des ressources en eau souterraines à l'aide de mini système d'adduction d'eau, des forages équipés de pompe à motricité humaine, de puits et de sources aménagées.

Tableau 2 : comparaison des ressources en eau renouvelable et du taux d'accès des populations en eau potable.

Pays

Ressources intérieures en eau renouvelables (en milliers de m3 d'eau potable par Hbt/an)

Population ayant accès à l'eau potable en %.

Cameroun

18.5

32

Togo

3.3

71

Sénégal

3.1

54

Burkina-Faso

3.1

69

Burundi

0.7

38

Source : Rapport Mondial sur le Développement Humain, PNUD, 1992, cité par Nkengfack, 1998

On observe une forte disparité entre les disponibilités en eau du Cameroun et le taux d'accès à l'eau potable. Le Cameroun est en effet le plus doté en eau (18500 m3/an) mais le taux d'accès à la ressource n'est que de 32%. Par contre, les pays tels que le Togo, le Sénégal et le Burkina-Faso avec seulement 3000 m3/an ont des taux d'accès largement au-dessus des 50% de la population.

Le niveau actuel de l'offre d'eau au Cameroun a du mal à satisfaire les besoins actuels en eau des ménages et des industries.

3.2.1.2. La demande

Selon les estimations de la population effectuées en 2001 par l'INS15(*), le Cameroun avait une population d'environ 15292000 habitants, avec un taux annuel de croissance d'environ 2,87%. La densité globale qui est d'environ 33 habitants/km2 cache de fortes disparités régionales, notamment les fortes densités de 127 habitants/km2 dans la province de l'Ouest. Selon les mêmes données, la population est essentiellement jeune, avec 64% de celle-ci ayant un âge en dessous de 25 ans.

L'urbanisation connaît une croissance accélérée avec un taux moyen de 4,7% par an (une personne sur deux vit en ville) et environ 35% de la population urbaine est concentrée dans les deux principales villes que sont Douala et Yaoundé.

La population Camerounaise est estimée aujourd'hui à plus de 20 millions d'habitants. C'est dire que la demande d'accès à l'eau potable ne cesse de croître d'année en année. Cette demande d'eau est fondée sur trois principaux objectifs :

Ø La planification de la gestion des ressources en eau pour la satisfaction des besoins ;

Ø La planification du développement des systèmes de production, d'adduction et de distribution d'eau de façon adéquate ;

Ø La prévision des ressources financières provenant des ventes d'eau dans un cadre tarifaire donné pour le renforcement des investissements en vue de répondre à la demande sans cesse croissante.

Les besoins en eau au Cameroun demeurent immenses. On estime en effet à plus de 68% la proportion de la population n'ayant pas encore accès à l'eau potable dans le pays tout entier, soit environ 9.520.000 habitants. Ces habitants en manque se trouvent principalement dans les zones rurales.

L'inadéquation entre l'offre et la demande en eau au Cameroun est également la conséquence de l'inexistence ou de l'absence d'une politique réelle de l'eau.

3.2.2. LA POLITIQUE DE L'EAU AU CAMEROUN

En termes de mise en perspective historique, l'Etat du Cameroun comme tous les pays en développement en Afrique subsaharienne, a eu pour préoccupation centrale permanente suite à l'indépendance des années 60, la satisfaction urgente des besoins en eau des populations du pays avec l'appui de la communauté internationale. En raison vraisemblablement de l'existence de ressources en eau abondantes dans la plus grande partie du territoire, la maîtrise de l'eau n'a pas toujours été considérée comme un axe majeur de la politique de développement du pays.

Il n'existe pas à ce jour, un document tenant lieu de « politique nationale de l'eau » en tant que cadre unique d'orientation des actions à mener en matière de gestion des ressources en eau du pays. Le Gouvernement a entrepris récemment l'élaboration de sa politique nationale de l'eau, mais ce processus par son essence très participatif n'a pas encore abouti du fait de raisons diverses, dont les contraintes financières. Il existe cependant au Cameroun un nombre non négligeable de documents de référence du domaine de l'eau ainsi que des documents de stratégies sectorielles du secteur de l'eau ; ce qui traduit par ailleurs un certain dynamisme et une capacité de proposition des professionnels du secteur.

En dépit de l'existence de ces documents de stratégies des différents sous-secteurs de l'eau, il n'existe pas a proprement parlé un document de « politique nationale de l'eau » avec des objectifs et des orientations stratégiques définis et des principes clairement énoncés. La nécessité d'agréger ces documents de stratégies sectorielles du domaine de l'eau s'impose, aussi il est indispensable et pertinent de disposer dans les meilleurs délais d'un document de politique et stratégies du pays en matière d'eau, qui mettra en synergie les politiques sous sectorielles et constituera surtout le guide de référence pour l'ensemble des acteurs y compris les partenaires au développement.

3.2.2.1. Les objectifs

La politique de l'eau au Cameroun vise à satisfaire la demande en eau tant en qualité qu'en quantité. Le Cameroun a ratifié la charte de l'eau de l'ONU qui a consacré la décennie 1980-1990 comme la décennie internationale de l'eau. En effet chaque année, les maladies liées à une eau insalubre et porteuse de maladies, comme la diarrhée, le choléra, la typhoïde, la polio, la méningite et les hépatites, fait 8 millions de victimes par an, soit 15 morts par minute ou 22 000 par jour, dont la moitié sont des enfants (parmi ces derniers, 6 000 meurent de diarrhées chaque jour). Beaucoup de souffrances humaines sont imputables à des maladies qui peuvent être en grande partie enrayées par l'installation de réseaux adéquats d'alimentation en eau et d'assainissement. Ce problème est parfois aggravé dans certaines régions par la rareté de l'eau qui rend difficile la satisfaction sans cesse croissante de la demande au moindre coût. La forme de contamination la plus courante est le fait des déjections humaines porteuses de germes, qui se décèlent habituellement en mesurant les niveaux de coliforme fécaux. Les excréments humains constituent un grand danger pour la santé de nombreuses populations qui n'ont pour boire et se laver que l'eau de rivière ou d'étang non traitée.

Malgré les progrès accomplis pour l'amélioration des conditions d'hygiène, la qualité de l'eau a continué à se détériorer et le traitement des eaux ménagères n'a point progressé.

En milieu rural, l'objectif de la politique de l'eau adopté par l'Etat du Cameroun était d'arriver à offrir 25 à 30 litres d'eau par jour contre 50 litres par jour en milieu urbain. En outre, pour toute agglomération comptant 200 à 300 individus, il fallait créer un point d'eau (puits, forages, etc.). En ville, la SNEC avait pour obligation d'étendre son réseau dès lors qu'il y aurait 6 abonnés potentiels désireux de se brancher sur le réseau.

Les objectifs étant ainsi clairement élaborés, il importe également de définir le cadre institutionnel qui sou tend sa mise en application.

3.2.2.2. Le cadre institutionnel

En guise d'introduction à cette partie, il est utile de rappeler le contenu qui entoure le concept de «Cadre institutionnel » et ses principales caractéristiques, afin de guider l'analyse du cas précis du cadre institutionnel du Cameroun

A. Le concept de cadre institutionnel et ses principales caractéristiques

Ø Il est en effet communément admis que le cadre institutionnel est à la fois l'ensemble des règles établies en vue de la satisfaction d'intérêts collectifs se rapportant à l'eau sous toutes ses formes, et l'ensemble des organismes créés pour maintenir et appliquer ces règles et satisfaire ces intérêts. En conséquence, l'on peut affirmer que le cadre de gestion actuel du secteur de l'eau du Cameroun s'est façonné au fil du temps et à la faveur d'évènements caractéristiques ayant suscité la prise de conscience des populations et des décideurs politiques du pays sur les enjeux liés à l'eau, enjeux qui ont déterminé les orientations des politiques successives en matière d'eau ;

Ø Il importe en outre d'avoir à l'esprit que le « cadre institutionnel » n'est jamais neutre, car traduisant à un moment donné de la vie de la nation, la vision que la société a de son développement en valorisant les ressources en eau, aussi le cadre institutionnel n'est autre qu'un instrument de première importance au service de la politique mise en place par l'Etat pour la satisfaction des besoins des divers usagers de l'eau de l'ensemble du pays ;

Ø Enfin, il faut rappeler que le cadre institutionnel est influencé par l'environnement international qui est aujourd'hui marqué par le contexte global de la mondialisation, avec une généralisation du capitalisme néolibéral et l'interconnexion des économies nationales, et où les principales règles sont la compétitivité et la profitabilité.

Parallèlement à ce phénomène de mondialisation, se développe fort heureusement à l'échelle planétaire une conscience aiguë des enjeux et des risques encourus par l'humanité du fait de cette globalisation de l'économie notamment par l'environnement d'une manière générale et par les ressources en eau en particulier (Conférence de Dublin, Forum mondial de la Haye, de Kyoto, etc.). Ainsi comprise, nous pourrons aborder le cadre institutionnel du Cameroun.

B. Le cadre institutionnel du Cameroun

Le cadre institutionnel du secteur de l'eau du Cameroun se caractérise par le rôle central du Ministère de l'Energie et de l'Eau (MINMEE) et en raison du caractère transversal de la ressource eau, par l'intervention également dans le secteur de l'eau d'un grand nombre d'autres opérateurs publics. Plusieurs départements ministériels sont concernés par l'eau sous l'une ou l'autre de ses formes ou de ses utilisations: Ministère chargé de l'Energie, Ministère chargé de l'agriculture, Ministère chargé de l'élevage et de la pêche, Ministère chargé de l'environnement, Ministère chargé de la santé, Ministère chargé de l'industrie, Ministère chargé de travaux publique, Ministère chargé des transports, Ministère chargé des collectivités territoriales et de la protection civile, et Ministère chargé des finances.

Les autres acteurs (le secteur privé, les organisations non gouvernementales « ONG » et le secteur associatif en général) ne font pas partie au sens strict du terme du cadre institutionnel, mais jouent un rôle important dans la mobilisation et la gestion des ressources en eau du pays (Partenariat National de l'Eau du Cameroun, bureaux d'études, sociétés diverses de réalisation de travaux hydrauliques, etc.).

Les fonctions remplies par ces divers organismes sont représentées dans le tableau ci-dessus.

Suivant le décret N°2005/087 du 29 mars 2005, portant organisation du ministère de l'Energie et de l'Eau, le ministère a pour mission d'élaborer, de mettre en oeuvre et d'évaluer la politique du gouvernement en matière de production, de transport et de distribution de l'énergie et de l'eau

Tableau 3 : Institutions nationales intervenant dans le secteur de l'eau.

FONCTION

MINMEE

SNEC

MINEFI

MINSANTE

MINDIC

MAIRIE

Planification générale

*

 

*

 

*

 

Négociation de prêts

*

 

*

 
 
 

Exploitations des eaux souterraines

*

 
 
 
 
 

Contrôle de la qualité de l'eau

*

 
 

*

 
 

AEP en zone urbaine

 
 
 
 
 
 

- Planification et conception

*

 

*

*

 

*

- Réalisation des travaux

*

 
 
 
 
 

- Supervision de la réalisation

*

 
 
 
 
 

- Exploitation et entretient

*

*

 
 
 
 

AEP en milieu rural

 
 
 
 
 
 

- Planification et conception

*

 
 
 
 

*

- Réalisation des travaux

*

 
 
 
 
 

- Exploitation et entretien

*

 
 
 
 
 

Source : MINMEE, cité par Nkengfack 1998

Le ministère assure la tutelle des établissements et sociétés de production, de transport, de stockage et de distribution de l'électricité, du gaz, du pétrole et de l'eau, de la société camerounaise de dépôts pétroliers.

L'organisation du ministère outre les services du cabinet du Ministre, comprend l'administration centrale et les services déconcentrés. L'administration centrale comprend :

1. Le Secrétariat Général ;

2. La Division des Etudes, de la Prospective et de la Coopération;

3. La Direction de l'Electricité ;

4. La Direction des produits pétroliers et gaziers ;

5. La Direction de l'Hydraulique et de l'hydrologie ;

6. La Direction des Affaires générales.

Les services déconcentrés du ministère de l'Energie et de l'Eau comprennent les Délégations provinciales et les Délégations départementales.

La Direction de l'Hydraulique et de l'Hydrologie est constituée de deux départements chargé l'un de Hydraulique Urbaine (Direction de l'eau et de l'assainissement Urbain « DEAU ») et l'autre de l'hydraulique villageoise ou rurale (Direction de l'Hydraulique rurale « DHR »). Elle (Direction de l'Hydraulique et de l'Hydrologie) s'occupe de :

Ø La conception, de la formulation et de la mise en oeuvre des stratégies d'alimentation en eau potable des agglomérations urbaines ;

Ø La conception et de la mise en oeuvre des programmes d'assainissement en matière d'hydraulique urbaine, en liaison avec les administrations concernées ;

Ø L'élaboration, de l'application et du suivi des programmes d'alimentation en eau potable des agglomérations urbaines;

Ø La participation à l'élaboration du cadre juridique régissant les secteurs de l'eau et de l'assainissement, en liaison avec la cellule juridique ;

Ø La conception, de la formulation et de la mise en oeuvre des stratégies d'alimentation en eau potable des zones rurales ;

Ø La gestion et de la protection des ressources en eau ;

Ø La conception et de la mise en oeuvre des programmes d'assainissement rural ;

Ø L'élaboration, de l'application et du suivi des programmes d'alimentation en eau potable des localités rurales ;

Ø L'élaboration du cadre juridique régissant les secteurs de l'eau et de l'assainissement en zone rurale, en liaison avec les administrations concernées ;

Ø La surveillance administrative des eaux de source.

Les faiblesses et contraintes du cadre institutionnel actuel du Cameroun trouvent leur justification au niveau historique, car résultant de la pratique d'une politique de l'eau centraliste, qui a concentré toutes les prérogatives en matière d'eau dans les mains de l'Etat et qui n'associe pas suffisamment les autres acteurs du secteur de l'eau.

3.2.2.3. Le cadre économique et financier

A. Les investisseurs dans le secteur de l'eau au Cameroun

Cette partie traite essentiellement du financement du secteur de l'eau et des coûts de gestion des ressources en eau du pays. La forte corrélation entre l'eau et le développement économique et social justifie les efforts consentis par les pouvoirs publics dans le domaine de l'eau ; ces efforts se traduisent par l'envergure du financement public du secteur de l'eau dans le budget national. En effet suivant « l'Etude diagnostique du domaine de l'Eau, Stratégie du Ministère des Mines, de l'Eau et de l'Energie, mars 2005 »16(*), l'effort financier consenti annuellement pour uniquement le secteur de l'eau potable et de l'assainissement est de l'ordre de 8 milliards de FCFA.

Les partenaires extérieurs contribuent de manière significative au financement du secteur de l'eau, principalement en termes d'investissements ; ce qui signifie que le secteur de l'eau est financé principalement par des ressources extérieures (prêts ou dons à l'état).

En ce qui concerne les coûts de gestion, il est utile de rappeler que la fonction de gestion au sens large comprend la fonction d'administration (planification, organisation et contrôle), la fonction de suivi des ressources en eau et la fonction d'appui dont bénéficie le secteur de l'eau et d'autres secteurs (recherche, formation, etc.). Une attention particulière ici est donnée à la fonction de suivi des ressources en eau qui comporte :

Ø l'inventaire des ouvrages de mobilisation ;

Ø la surveillance de l'état de ces ressources en eau en quantité ;

Ø la surveillance de l'état de celles-ci en qualité.

Au vu des textes, les forces du système actuel résident dans la volonté manifestée par l'autorité politique, à travers des dispositifs juridiques et réglementaires, de générer des ressources internes (cf. compte d'affectation spéciale pour le financement des projets de développement durable en matière d'eau).

B. Les faiblesses du système

Les faiblesses du système actuel résident dans :

Ø l'absence d'un mécanisme transparent de gestion du compte d'affectation spéciale qui implique les acteurs contributeurs au fonds et ce dans la perspective de la mise en place des structures de gestion des ressources en eau par bassin hydrographique ou tout autre cadre approprié ;

Ø la problématique de l'eau étant une question transversale pour la plupart des secteurs socio-économiques ayant chacun une motivation spécifique pour statuer sur l'eau, l'absence de dispositions permettant le financement des activités des acteurs contributeurs peut à terme entraîner le tarissement des contributions audit compte d'affectation spéciale.

Enfin les dispositions actuelles ne garantissent pas qu'une partie des ressources financières sera affectée aux fonctions de gestion et de suivi des ressources en eau ; d'où la dépendance du système actuel de suivi des ressources en eau de l'existence ponctuelle des projets. Cette situation hypothèque la capacité de planification des projets et programmes de développement du secteur de l'eau du fait de l'absence de données fiables.

3.2.2.4. Les programmes d'alimentation en eau potable et d'assainissement.

Il importe de faire une distinction entre l'AEPA en milieu urbain de celui en milieu rural.

A. L'A.E.P.A en milieu urbain

D'une manière générale, la D.E.A.U a pour mission de :

Ø Concevoir, élaborer et exécuter la politique nationale en matière de l'eau dans les zones urbaines en relation avec les départements ministériels concernés ;

Ø Evaluer les ressources en eau et en assurer la protection contre la pollution ;

Ø Etablir les normes de qualité du milieu récepteur et de rejet des effluents ;

Ø Alimenter en eau potable les agglomérations urbaines ;

Ø Préparer les textes législatifs et réglementaires ayant trait à la juridiction de l'eau ;

Ø Effectuer le contrôle technique des exploitations des concessionnaires.

B. L'A.E.P.A en milieu rural

Le projet d'alimentation en eau potable et d'assainissement vise à appuyer les efforts du gouvernement pour améliorer les faibles taux d'accès à l'eau potable et d'assainissement et de renforcer les capacités de gestion du secteur. Il s'inscrit dans la mise en oeuvre du plan d'action 2008-2015 du gouvernement dont le but est d'atteindre des taux d'accès de 80% à 60% respectivement pour l'eau potable et l'assainissement en milieu rural à terme.

En outre, la D.H.R. a pour mission de :

Ø Etablir l'inventaire des ressources en eau du pays pour les besoins des campagnes ;

Ø Définir la politique de l'eau dans les campagnes ainsi que élaborer la législation et la réglementation en la matière ;

Ø Concevoir et exécuter les programmes d'hydraulique villageoise en vue de la satisfaction des besoins humains en eau dans les campagnes ;

Ø Veiller au respect et à l'application de la réglementation en matière d'utilisation de l'eau en milieu rural, notamment en matière d'utilisation de prélèvement d'eau pour l'exécution des programmes d'hydraulique agricole et pastorale initiés par le ministère chargé de l'agriculture et celui chargé de l'élevage, des pêches et des industries animales (MINEPIA) ;

Ø Mettre au point des programmes d'assainissement en milieu rural en collaboration avec les départements ministériels et organismes publics et parapublics concernés ;

Ø Conserver et diffuser les résultats et documents acquis dans le cadre de l'exécution des programmes ci-dessus ;

Ø Mettre au point des programmes de formation et de recyclage des personnels techniques en matière d'hydraulique rurale et en rapport avec le secrétariat général et les départements ministériels et organismes associés.

3.2.2.5. L'accès a l'eau potable et salubre

L'approvisionnement en eau des populations peut être examiné en distinguant les centres urbains des zones rurales. En milieu urbain, c'est la SNEC (Société Nationale des Eaux du Cameroun), détenue à 93,9 % par l'Etat, qui assurait la production et la distribution de l'eau potable, à travers un contrat de concession jusqu'en 2008. Le périmètre SNEC couvrait 103 centres urbains, soit environ 8,4 millions d'habitants. Le tarif de vente de l'eau était identique dans tous les centres urbains gérés par la SNEC (en moyenne 385 FCFA TTC/m3, variable en fonction des tranches de consommation). En milieu rural, c'est la Direction de l'Hydraulique du MINMEE, qui assure toujours la coordination et le suivi des projets, avec des principes de contribution des usagers variables sur le territoire.

Entre 1998 et 2006, environ 2,2% de la population ont changé leur mode d'approvisionnement en eau potable particulièrement en délaissant les eaux de surface (marigots, sources, etc.) au profit d'autres formes d'approvisionnement (confère figure 15a). En effet, en zone rural, 3.8% de la population ont vu leur offre d'eau s'accroître notamment à cause de la prolifération des puits et des forages. Au niveau national, l'utilisation des puits et des forages ont également augmenté en passant de 23% en 1998 à 47% en 2006. Cependant cette forte dépendance des populations de l'approvisionnement en eau potable par les puits et forages n'est pas sans danger. En effet, la qualité de l'eau provenant de ces modes d'approvisionnement n'est pas toujours garantir à cause de leur non protection. Ainsi, la

figure ci-dessous nous présente les oppositions qui existent entre l'offre et la salubrité en milieu rural et urbain.

a.offre d'eau

b. salubrété

% population

80

70

60

50

40

30

20

10

0

100

90

80

70

60

50

40

30

20

10

0

Surface water

Wells and

boreholes

Standposts

(public)

Piped

Open

defecation

Traditional

latrines

Flush toilets

Improved

latrines

Figure 1. L'offre d'eau et l'assainissement en milieu urbain et rural en 2006

Source: AICD water supply and sanitation utilities database downloadable from http://www.infrastructureafrica.org/aicd/tools/data. Access figures calculated by AICD using data the 2006 Multiple Indicators Cluster Surveys published by WHO 2010a and 2010b

Rural

Urban

Urban

Rural

A. L'accès à l'eau dans les zones urbaines

En septembre 1968 pour les centres de Douala, Yaoundé et quelques villes secondaires, une convention de concession17(*) du secteur de l'eau a été signée entre l'état Camerounais et la S.N.E.C. Par cet acte, l'état a concédé l'alimentation de l'eau potable dans les zones urbaines à la société nationale des eaux du Cameroun (SNEC) qui est une entreprise d'état. La durée de cette concession était de 40 ans pour les villes de Yaoundé et Douala. La SNEC dans le cadre de l'exécution de son contrat, doit fournir toute l'eau nécessaire aux besoins publics et privés, contrôler la qualité de l'eau distribuée, etc.

Les tarifs maxima de vente d'eau aux abonnés par la SNEC sont fixés par l'Etat et ce prix est uniforme sur toute l'étendue du territoire. Pendant la durée d'exécution de cette convention, la DEAU intervient pour le contrôle de la gestion technique et financière du concessionnaire. D'après le cahier de charge annexé au contrat de concession signé à Yaoundé le 30 Novembre 1968 entre l'état du Cameroun et la SNEC, cette société est chargée du captage, de l'adduction, du traitement, de l'exploitation et de la distribution publique de l'eau potable pendant la durée de la concession. En 1998, sur les 320 villes et centres urbains que comptait le Cameroun (il s'agit de toute agglomération ayant une fonction administrative quelconque, du chef lieu de province au chef lieu de district), 99 seulement sont équipés de systèmes d'adduction d'eau potable exploités par la SNEC :

Ø 10 chefs lieux de province ;

Ø 40 chefs lieux de département ;

Ø 48 chefs lieux d'arrondissement ;

Ø 1 chef lieu de district.

Ce qui représente un taux de couverture de moins de 30%. Pour parfaire ce ratio, il faudrait équiper les 221 chefs lieux d'unités restantes en systèmes d'adduction d'eau potable d'une part, et entretenir ou réhabiliter les installations en cours d'exécution par la SNEC ; tout en les adaptant aux besoins des populations et au développement des populations desservies18(*).

Dans l'ensemble, comme l'indique le tableau ci-dessous, le taux moyen de couverture urbaine reste très faible (17,9%). La desserte est de 20,5% pour Yaoundé (1.350.000 hab.) contre 18,6% à Douala. Les autres habitants s'alimentent à des bornes fontaines (34,87 %) ou chez le voisin (26,02 %) mais le faible revenu de la population entraîne de fréquentes coupures du service et 34,42 % des ménages « abonnés » vont alors à la source et 17,02 % au puits.

D'une manière générale, la production et la distribution de l'eau par la SNEC demeurent limitées et les systèmes actuellement en place semblent saturés. La SNEC produit environ 56 millions de m3 d'eau par an dont les ¾ sont consommés dans les trois villes : Douala (41%), Yaoundé (29%), Garoua (8.5%). Même dans ces trois villes, la consommation moyenne par habitant (30 à 40 litres par jour et par habitant) est largement en deçà des normes requises (80 à 120 litres par jour et par habitant) pour assurer l'hygiène corporelle, maintenir propre l'environnement et couvrir divers autres usages domestiques.

Tableau 4 : MODE D'APPROVISIONNEMENT EN EAU EN 1976 ET EN 1987 EN %

 

Principale mode d'approvisionnement en eau de boisson

Total

Eau de robinet ou bonne fontaine

Forage ou puits/ source aménagée

Puits/lac/rivière/marigot/source non aménagé(e) ou eau de pluie

Eau minérale

autre

 
 
 
 
 
 

Douala/ Yaoundé/ province

Douala

27,7

29,2

41,9

0,9

0,3

100,0

Yaoundé

43,6

7,5

47,7

0,4

0,7

100,0

Adamaoua

14,0

36,3

49,6

0,0

0,2

100,0

Centre

15,6

50,3

33,8

0,1

0,3

100,0

Est

6,0

57,1

36,3

0,2

0,5

100,0

Extrême-Nord

6,1

42,1

50,5

0,0

1,3

100,0

Littoral

27,5

22,9

48,0

0,0

1,6

100,0

Nord

8,9

15,8

74,8

0,0

0,5

100,0

Nord-Ouest

60,1

7,6

32,2

0,0

0,1

100,0

Ouest

17,9

27,7

54,0

0,2

0,1

100,0

Sud

28,2

26,0

45,6

0,2

0,0

100,0

Sud-ouest

50,0

7,9

41,9

0,1

0,1

100,0

Milieu de résidence

Urbain

37,5

20,5

41,4

0,3

0,4

100,0

Rural

15,4

32,2

51,8

0,0

0,6

100,0

TOTAL

27,7

25,7

45,9

0,2

0,5

100,0

Source : ECAM 3, 2007

Si l'on s'intéresse aux volumes d'eau produite, distribué et consommée, on observe qu'ils évoluent en dents de scie sur la période considérée (1985-1994). En effet, après 61284 mille m3 d'eau produite en 1985, la production a atteint un pic de 78804 mille m3 en 1992 pour ensuite diminuer progressivement jusqu'en 1994 à 75612 m3. Or dans le même temps, la population urbaine ne cesse de croître et par ricochet les besoins en eau augmentent eux aussi.

Tableau 5 : Evolution de la production d'eau de la SNEC en milliers de m3

Rubriques

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

Prod. Totale

61284

65614

67571

66736

66274

66012

76947

78804

79806

75612

Distribution

...

...

...

...

...

...

73036

74252

76061

71114

Consommation

44065

47964

45258

48885

50090

48810

50802

51014

44167

43340

Industries

8310

8378

7644

5754

5269

4656

4314

3980

3325

3209

Particuliers

23549

25536

23902

27755

28893

28387

29763

30046

28332

26592

Administrations

6811

8273

6836

8075

8477

8544

8393

8214

8288

10619

Bornes fontaines

...

5196

5687

6715

7450

7224

7660

8096

3312

1584

Services + agents SNEC

...

....

...

...

...

...

612

678

910

605

Nombres d'abonnés

...

...

...

...

...

...

144360

144725

143951

146928

... : Données non disponibles

Sources : SNEC, Nkengfack, 1998

Malgré l'insuffisance des données sur certaines années, on constate tout de même qu'il existe un grand écart entre les quantités d'eau produite, distribuée et consommée. Cela est dû soit à des fuites d'eau au niveau des conduits et canalisations au moment de la distribution soit à un gaspillage au moment de la consommation soit encore à un accès limité à l'approvisionnement des populations en eau. Dans tous les cas, la quantité d'eau consommée est de loin inférieure à la quantité d'eau produite. On remarquera au passage que la consommation des services et agents de la SNEC elle-même est en constante augmentation, probablement à cause de la gratuité de consommation dont ils bénéficient.

Le faible taux d'abonnés au Cameroun est accompagné par une faible performance technique, marquée par un taux très faible de rendement de distribution. En effet, des 75612000 millions de m3 d'eau produit en 1994, seulement 71114000 millions de m3 ont été distribués soit environ 4498000 millions de perte. Au Cameroun, le résultat d'exploitation est déficitaire pour le secteur de l'eau.

Les performances techniques et financières de la SNEC étant considérablement dégradées, le Gouvernement décide en 1997 de s'engager dans un processus de privatisation de la SNEC. Toutefois le premier schéma envisagé, sur le modèle de la concession, échoue en 2003, à la suite des négociations infructueuses avec l'unique candidat. Un administrateur provisoire est alors nommé en avril 2002 à la tête de la SNEC, puis renouvelé jusqu'à sa dissolution effective en 2008.

Tableau 6 : Services publics d'eau potable : Ratios technico économiques comparatifs de quelques pays Africains (1994).

Pays

Investissements cumulés (milliard de frs CFA)

Investissements par m3 vendu par an (frs CFA)

Facturation par m3 vendu (frs Cfa)

Effectif personnel

Frais de personnel (milliards de frs Cfa)

Maroc (ONEP+ régies)

540

1000

233

11800

36,5

Sénégal (SONES)

104

1677

344

1583

5,00

Côte d'Ivoire (SODECI)

180

1957

304

1302

5,5

Cameroun (SNEC)

170

3959

333

2081

5,3

Source : Rapport bureau ICEA, 1996 pour l'eau et African developpements indicators-Banque Mondiale 1996 pour les données démographiques.

Tirant les leçons de cet échec, les autorités s'orientent alors vers un autre contrat d'affermage, moins exigeant en termes d'investissements privés et qui s'inspire fortement de celui mis en oeuvre avec succès au Sénégal depuis 1995. Une société publique de patrimoine, chargé de l'essentiel des investissements, la CAMWATER, a été créée. A l'issue d'un appel d'offres auquel deux candidats ont répondu, l'affermage a été attribué à un groupement marocain piloté par l'Office national de l'eau potable (ONEP). Le contrat a été signé le 18 décembre 2007 par les actionnaires fondateurs qui ont constitué une société camerounaise de droit privé, la Camerounaise des Eaux (CDE). La passation de service a été effectuée le 2 mai 2008. La SNEC a été dissoute et mise en liquidation le 31 juillet 2008. Le passif de la SNEC a été transféré à CAMWATER, qui est également chargée de la liquidation de la SNEC. Le gouvernement a ainsi signé un contrat d'affermage de 10 ans avec la CDE en Mai 2008 pour la production, le transport et la distribution de l'eau dans les 106 centres urbains et périurbain. La figure ci-dessous nous présente les différents acteurs actuels ainsi que les relations qui existent entre eux dans le secteur de l'offre d'eau au Cameroun.

Source: CDE 2011.

Figure 2. Les acteurs dans le secteur de l'offre de l'eau au Cameroun

B. L'accès à l'eau dans les zones rurales

L'accès à l'eau potable dans le milieu rural, où résident près de 84% des populations pauvres, demeure un problème crucial résultant de la situation géo-écologique défavorable de certaines régions, du niveau insuffisant des investissements et du manque d'une politique appropriée dans le secteur de l'eau et de l'assainissement.

Les populations rurales sont alimentées essentiellement grâce à la mobilisation des ressources en eau souterraines à l'aide de mini système d'adduction d'eau, des forages équipés de pompe à motricité humaine, de puits et de sources aménagées.

Notons également que plusieurs bailleurs de fonds participent au développement ou à l'amélioration de l'accès à l'eau par les ménages Camerounais et surtout en milieu rural. Les principaux bailleurs de fonds du secteur de l'APEA en milieu rural sont : la coopération japonaise, l'Union Européenne (UE), la banque islamique de développement (BID), l'agence française de développement (AFD), la coopération technique Belge, l'agence canadienne pour le développement international (ACDI), la Banque Mondiale, et les institutions des Nations Unies comme l'UNICEF et le PNUD. Ces bailleurs de fonds ont souvent financé des opérations de petites envergures et de manière dispersée et dont la plupart ont été clôturées en 2007. Seules la coopération japonaise, la banque islamique de développement (BID), l'UNICEF, la Banque Mondiale et la BAD (avec l'étude d'inventaire des ouvrages hydrauliques) sont encore actives sur le terrain. Avec ce projet, la banque deviendra l'un des principaux bailleurs de fonds du secteur. Les contributions globales de ces bailleurs de fonds entre 2002 et 2009 sont reprises dans le tableau 7.

Pour améliorer l'accès à l'eau potable, le principal défi consiste à assurer la pérennisation du service de l'eau. Alors que l'installation des équipements est relativement simple, assurer le service à long terme reste délicat, en particulier en milieu rural, où l'organisation des services de base est plus difficile et souvent plus coûteuse.

En dépit du fait que la couverture en eau potable des Populations rurales ne s'est pas sensiblement améliorée, le mode d'accès à cette ressource c'est grandement diversifié dans cette zone. En effet, le Recensement National de la population et de l'Habitat (RNPH) de 1976 révèle que 39,7% de la population rurale s'approvisionnent dans les sources. En 1987, cette proportion est passée outre, l'approvisionnement à partir des points d'eau plus digestes et plus salubres a connu une forte augmentation comme le démontre le tableau 8 ci-dessous.

Tableau 7 : les intervenants dans l'hydraulique rurale

Sous secteur

Importance

PIB (moyenne 2002-2007)

Exportations

Main d'oeuvre

Eau potable et assainissement rural

0.13%

-

-

Parties prenantes- Dépenses publiques moyennes 2002 à 2009 (APEA rurale)

Gouvernement

Bailleurs de fonds

Les différents bailleurs de fond

 

52.27 millions UC

(56.9%)

43.17 millions UC

(43.12%)

Ø Coopération japonaise : 36.19%

Ø Coopération Belge : 11.52%

Ø Banque mondiale : 13.16%

Ø BID : 23.03%

Ø AFD : 0.66%

Ø EU : 7.57%

Ø BAD : 1.29%

Ø ACDI : 6.58%

 

Source : rapport d'évaluation de projet date : mai 2010

De 1953 à 1977, le gouvernement camerounais à l'instar de ceux des autres pays africains n'avait pas à proprement parler de politique nationale en matière d'hydraulique villageoise. Il se contentait de parer au plus pressé et par des actions ponctuelles, d'approvisionner quelques grands villages en y réalisant des points d'eau dont la corde et la puisette constituaient l'essentiel des moyens d'exhaure, des aménagements des sources et quelques systèmes d'alimentation en eau potable. Tout ceci le plus souvent sans la participation des populations bénéficiaires. L'essentiel de la maintenance des ouvrages ainsi réalisés était alors tant bien que mal assuré par le gouvernement et quelques Organismes Non Gouvernementales (ONG).

Tableau 8 : Répartition des unités rurales d'habitation selon le mode d'approvisionnement en eau en %

Mode d'approvisionnement en eau

1976

1987

Eau courante

4,3

2,2

Borne fontaine

4,0

9,9

Puits

19,9

41,5

Source

39,7

10,7

Marigot

29,7

35,2

Autre

2,4

0,5

Total

100,0

100,0

Source : DNSCN, Recensements démographiques 1976 et 1987.

Le rapport du MINEE sur la situation de l'eau en milieu rural est le suivant :

Suite aux sécheresses des années 70 et 80 avec leur cortège de maladies d'origine hydrique et au constat du faible taux de couverture en eau potable en campagne d'une part et d'autre part du fait de la fréquence observée des pannes sur plus de 60% des équipements réalisés, le gouvernement a décidé de réaliser des points d'eau de type puits ou forage équipé d'une pompe à motricité humaine. Ceci concerne les agglomérations de 300 à 500 habitants, à raison de 25 litres par habitants et par jour.

Les communautés de 2500 à 5000 habitants bénéficient quant à elles de systèmes d'alimentation en eau potable soit gravitaires soit par pompage avec traitement sommaire. Ces populations devaient en outre participer aux charges d'entretien de leurs installations. Dès lors, le MINEE s'est attelé à mettre en place de façon progressive une politique participative des communautés bénéficiaires à toutes les phases des projets d'hydraulique villageoise. L'action du ministère a consisté en :

Ø La conception : par le choix des technologies adaptés à la volonté des ruraux, à leur milieu et à leur capacité financière d'entretien. Il s'agit en fait de passer graduellement des technologies appropriées.

Ø La réalisation : par la fourniture dans la mesure du possible des matériaux locaux (Granulats, sable, etc.) et même par la participation financière à l'exécution de certains corps d'état, et par un investissement humain.

Ø La maintenance : par la mise en place d'une structure de maintenance à la fois décentralisée (artisans réparateurs et opérateurs ruraux au niveau des villages) pour la réparation des pannes mineures et centralisée (brigades légères d'intervention au niveau provincial) pour la réparation des pannes importantes.

Ø La gestion : par la formation des comités villageoises qui, animés et sensibilisés par les agents de l'Etat, fixent la tarification et organisent la collecte des redevances dues à la consommation de l'eau. Cette collecte permettra d'assurer le renouvellement des pièces d'usure des pompes elles-mêmes et éventuellement la réparation de tout autre dégât constaté sur les installations. Cette formation dispensée par les agents de l'Etat pourrait à terme déboucher sur une création de métiers d'eau rémunérés. Les travaux réalisés jusqu'en 1997 en milieu rural se répartissent comme suit :

TABLEAU 9: Ouvrages réalisés en milieu rural jusqu'en 1997.

Travaux réalisés

Nombres

Puits équipés de pompes

3500

Forages équipés de pompes

1500

Aménagement de sources

1100

Barrages de retenue

10

Adduction d'eau sans traitement

750

Adduction d'eau traitement sommaire

450

Total

7310

Source : MINEE : Direction de l'Hydraulique Rurale (DHR) ; cité par Nkengfack, 1998..

Il existe par ailleurs une très forte disparité au niveau de l'adduction de l'eau que ce soit dans les villes ou en campagnes comme le témoigne le tableau 10 ci-dessous. Ceci découle d'une répartition inégale des ouvrages d'adduction selon les régions.

Pour améliorer l'accès à l'eau potable, le principal défi consiste à assurer la pérennisation du service de l'eau. Alors que l'installation des équipements est relativement simple, assurer le service à long terme reste délicat, en particulier en milieu rural, où l'organisation des services de base est plus difficile et souvent plus coûteuse. Dans l'ensemble on observe une dégradation de l'accès à l'eau potable entre 1987 et 1992. Ceci est dû à la baisse des investissements dans le secteur d'une part et d'autre part à la croissance démographique et à la mauvaise exploitation des ouvrages due aux problèmes de gestion et de maintenance. En 1989, on dénombrait 60% de pompes à main, 40% de motopompes et 35% de systèmes gravitaires qui étaient hors d'usage

TABLEAU 10 : proportion de la population rurale disposant d'un point d'eau et nombre d'ouvrages par région.

Régions

Taux de couverture

Nombres d'ouvrages

Population par ouvrage

1987

1992

1987

1992

Adamaoua

32

207

329

1600

1113

Centre

33

575

1656

1500

545

Est

60

710

477

500

852

Extrême-Nord

26

820

2635

2000

643

Littoral

14

90

460

4000

667

Nord

54

547

1564

1000

491

Nord-Ouest

25

339

711

2000

1510

Ouest

34

609

1561

1500

654

Sud

29

178

361

1700

830

Sud-Ouest

15

185

320

3300

2075

Source : Plan National d'Action pour le Développement de l'Enfant, 1992 ; cité par Nkengfack, 1998.

En plus des raisons évoquées plus haut, il existe des problèmes d'organisation :

Ø La faiblesse du cadre juridique relatif au domaine ;

Ø L'implication limitée des principaux bénéficiaires ;

Ø Le mauvais choix de la technologie ;

Ø L'absence des organisations communautaires ;

Ø La notion dépassée de la gratuité de l'eau.

En milieu rural, la dernière évaluation physique des ouvrages sur le terrain révèle l'existence d'environ 15 000 ouvrages de tous types. L'objectif du gouvernement de réaliser un point qu'à 45%. Mais ces ouvrages, pour la plupart, fonctionnent mal du fait de l'insuffisance de structures de gestion dignes de ce nom. Leur taux de panne est estimé à plus de 35%.

S'agissant de l'amélioration de l'accessibilité à l'eau potable en zone rurale, plusieurs projets sont en cours visant par exemple la construction de 142 forages équipés et 16 adductions d'eau rurales. Il y a aussi la réhabilitation de 103 points d'eau et la construction de 45 latrines. La cinquième phase du projet hydraulique rural du don japonais et le projet d'alimentation en eau potable et d'assainissement en milieu rural (PAEPAR) rentrent également dans ce package en cours d'exécution. L'objectif clairement défini par le gouvernement à l'horizon 2015 est de porter le taux d'accès à l'eau potable à 75% en milieu rural.

Une politique d'approvisionnement en eau potable ne peut être efficiente que si elle est accompagnée en aval d'un service d'assainissement efficace de traitement des eaux usées et d'ordures de natures diverses.

3.2.3. L'ASSAINISSEMENT

Dans cette partie, nous présenterons les stratégies utilisées par les communautés pour l'évacuation des eaux pluviales, des excrétas et des ordures tant en milieu urbain qu'en milieu rural.

3.2.3.1. L'assainissement en milieu rural

Les populations des zones rurales connaissent un véritable obstacle d'accès aux programmes d'assainissement. L'encadrement par les services d'hygiène qui a donné des résultats pertinents pendant la période coloniale s'est beaucoup relâchée au cours des décennies. La multitude d'intervenants dans ce secteur (soins primaires, vulgarisation agricole, hydraulique rurale, etc.) rend toute coordination difficile. Pourtant la disponibilité de l'espace, le recours aux matériaux locaux dans les zones rurales permettent de penser qu'à coûts réduits par rapport à des divers programmes sectoriels onéreux dans le cadre d'actions intégrées, des progrès substantiels peuvent être atteints. Cela est possible que ce soit en matière d'encadrement pour la construction des latrines ou dans l'hygiène de l'habitat, le déparasitage et le drainage domestiques.

3.2.3.2. L'assainissement en milieu urbain

Le cadre urbain qui se développe dans un espace relativement réduit et densément peuplé présente diverses contraintes et facteurs aggravants qui rendent les problèmes d'assainissement et de pollution plus aigus.

A. L'évacuation des eaux usées et excréta : la prédominance des fosses et latrines.

En ville comme en campagne, l'évacuation des eaux usées se fait principalement sur la base de solutions individuelles. Les eaux ménagères sont en général évacuées dans les fosses en ville et dispersées dans la nature en zone rurale. La majorité des fosses dites septiques n'obéissent pas aux règles de l'art et ne fonctionnent pas normalement.

De façon globale l'évacuation des matières fécales se fait selon divers procédés en ville comme en campagne.

Du tableau 11, il ressort que plus d'un ménage sur deux (52%) ; soit 69,2% dans le milieu rural et 38,1% dans le milieu urbain ont des latrines non aménagées. Cette situation est plus inquiétante dans le Nord (72%) et l'Extrême Nord (70%). Par ailleurs, ceux qui n'ont pas de WC se trouvent le plus souvent dans le milieu rural. Les régions de l'Extrême Nord (20%), du Nord (16%) et du Sud-Ouest (10%) sont celles où l'on enregistre plus de cas de ménages qui n'ont pas de WC. Ceci peut pousser à poser la question de savoir : où est ce que ces derniers évacuent leurs déchets humains ? Certainement ils le font soit dans la nature, soit chez le voisin, soit dans les rivières. La présence du choléra dans le grand Nord en 2010 peut être une conséquence de l'absence des WC.

La latrine demeure le type d'aisance le plus répandu. Les foyers dotés d'une latrine équipée de chasse d'eau sont les plus nombreux en milieu urbain en même temps que la progression est plus rapide dans les centres urbains. L'évolution des latrines simples est dans l'ensemble rapide et l'utilisation des espaces naturels est de moins en moins fréquente. Néanmoins, bien qu'extérieures à la maison, beaucoup de latrines restent souvent peu éloignées des points sensibles (puits, cuisine, salle à manger). Ce qui crée des nuisances et des possibilités de pollution. Aussi le Cameroun a tout intérêt à valoriser ce capital en assainissement individuel afin de le rendre sanitairement fiable et techniquement acceptable. La fosse ventilée, dans un endroit judicieusement choisi est une des réponses techniques à ces préoccupations qui bénéficient déjà du concours de l'UNICEF.

Tableau 11: Proportion des ménages selon le mode d'évacuation des déchets humains

TYPE D'AISANCE

 
 

Type de lieu d'aisance pour le WC

Total1

REGION

 
 

WC avec chasse d'eau

Latrine aménagées

Latrines non aménagées

Pas de WC

%

 
 

%

%

%

%

Douala/

Yaoundé/

Province

Douala

19,7

58,8

21,0

0,5

100,0

Yaoundé

22,5

51,4

25,7

0,4

100,0

Adamaoua

5,2

43,8

47,9

3,1

100,0

Centre

5,3

42,2

51,3

1,3

100,0

Est

5,8

25,0

61,8

7,3

100,0

Extrême-Nord

1,4

8,4

70,4

19,9

100,0

Littoral

8,2

44,5

46,1

1,3

100,0

Nord

2,1

9,4

72,3

16,2

100,0

Nord-Ouest

8,2

24,8

63,5

3,5

100,0

Ouest

6,5

26,5

63,0

4,1

100,0

Sud

10,7

41,6

46,6

1,1

100,0

Sud-Ouest

14,1

34,8

41,0

10,1

100,0

Milieu de résidence

Urbain

15,6

45,4

38,1

0,8

100,0

Rural

1,2

15,9

69,2

13,7

100,0

Total

9,3

32,4

51,8

6,5

100,0

Source: Adapté d'ECAM 3, 2007

 
 
 
 
 

B. Le problème de drainage des eaux et de dépôt anarchique d'ordures.

Les problèmes de drainage sont loin d'être maîtrisés. D'une part l'on relève une pollution constante des cours d'eau urbains qui sont des réseaux naturels de drainage. D'autre part, on assiste à l'occasion de grandes pluies à des inondations régulières y compris dans les zones aménagées, et en saison sèche, à la stagnation des eaux nauséabondes et contaminées. La quasi-inexistence des systèmes d'égout aggrave les problèmes d'assainissement et d'environnement dans les villes.

1. Mode d'évacuation des ordures ménagères

Tout ménage après usage de quelques objets nécessaires à l'alimentation ou à certains travaux ménagers, trouve la nécessité d'évacuer leurs débris. Ceci peut se faire soit dans la nature, soit dans les bacs à ordure, soit en les brulant.

Du tableau 12, il ressort que le Cameroun est en général démuni des infrastructures de voiries. En effet, près de sept ménages sur dix jettent les ordures dans la nature ou les brûlent. Cette proportion est moins grande dans les villes de Yaoundé (27%), et de Douala (20,2%). C'est tout à faire naturel de constater que dans les métropoles, au moins sept ménages sur dix jettent les ordures dans les bacs à ordures grâce à la présence de la société HYSACAM qui se rapproche des ménages pour le ramassage d'ordure. Le gouvernement a encore beaucoup d'effort à fournir pour encourager cette société à s'implanter dans les autres localités du pays.

Tableau12: Proportion des ménages selon le mode d'évacuation des ordures ménagères

MODE D'EVACUATION DES ORDURES

 
 

Mode d'évacuation des ordures

Total1

REGION

 
 

Ramassage camion/ Bac à ordures

Jetées dans la nature

Enterrées/ Brûlées

Recyclées

Autre

%

 
 

%

%

%

%

%

Douala/

Yaoundé/

Province

Douala

78,5

20,2

0,8

0,0

0,6

100,0

Yaoundé

70,5

27,0

1,1

0,2

1,2

100,0

Adamaoua

4,5

93,3

1,4

0,0

0,9

100,0

Centre

2,1

91,5

4,6

1,6

0,1

100,0

Est

2,7

90,5

5,6

0,3

0,9

100,0

Extrême-Nord

4,6

85,2

8,4

0,2

1,6

100,0

Littoral

12,6

84,9

1,4

0,5

0,6

100,0

Nord

6,2

86,7

6,1

0,0

1,0

100,0

Nord-Ouest

10,4

76,6

5,5

6,4

1,1

100,0

Ouest

14,3

64,1

6,2

14,5

1,0

100,0

Sud

17,6

76,6

3,7

1,5

0,6

100,0

Sud-Ouest

18,9

70,6

7,2

1,4

1,9

100,0

Milieu de résidence

Urbain

36,2

55,5

5,3

1,5

1,4

100,0

Rural

3,0

87,9

4,0

4,6

0,6

100,0

Total

21,5

69,8

4,8

2,9

1,1

100,0

Source: Adapté d'ECAM 3, 2007

 
 
 
 
 
 

* 1 Arnaud Diemer (janvier 2004), Economie et environnement, Formation continue MCF IUFM D'AUVERGNE

* 2 Idem

* 3 Idem

* 4 Arnaud Diemer (janvier 2004), Economie et environnement, Formation continue MCF IUFM D'AUVERGNE

* 5 Idem

* 6 Nkengfack H 1998.

* 7 Voir le modèle V.N.M, Problèmes Economiques, No 2364 du 23 février 1994.

* 8 Les coûts fixes sont si importants qu'ils constituent des barrières à l'entrée pour d'autres entreprises susceptibles d'entrer sur le marché.

* 9 Jean-Baptiste Desquilbet, Microéconomie

* 10 Ramsey en 1927, cherchait les taux de TVA optimaux sur plusieurs marchés, maximisant le surplus collectif sous contrainte que les recettes fiscales soient supérieures à un seuil exogène ; Boiteux, en 1956 a retrouvé la formule de Ramsey en cherchant la tarification optimale d'un monopole public astreint à l'équilibre budgétaire.

* 11 Anne Briand, 2004, Fondements théoriques pour une tarification de l'eau en Afrique subsaharienne : une revue de la littérature

* 12 La SNEC s'est chargée de la gestion de l'eau jusqu'en 2008 et maintenant, elle est faite par la Camerounaise Des Eaux

* 13 Rapport Mondial sur le Développement Humain, PNUD, 1992

* 14 SNEC- Société Nationale des Eaux du Cameroun

* 15 Institut National de la Statistique du Cameroun

* 16 « Processus d'Elaboration du PAGIRE du Cameroun : Document d'Orientation »

* 17 Délégation par l'Etat d'une partie de ses activités à des individus ou à des sociétés privées pour sa gestion.

* 18 Nkengfack Hilaire MEMOIRE EN VUE DE L'OBTENTION DU D.E.A, Approvisionnement et gestion durable de l'eau potable au Cameroun une application aux ménages de la ville de Yaoundé

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