2.1.1.4. Deux autres systèmes
d'évaluation
Deux autres modèles semblent se distinguer de
l'ensemble par leur appui plus prononcé sur la littérature
scientifique. Il s'agit des modèles de Holton (1996) et de Kraiger
(2002).
Holton (1996) propose une esquisse de modèle
d'évaluation s'appuyant sur les résultats de recherches des
dernières années et comportant des variables
intermédiaires susceptibles d'expliquer l'apprentissage et le transfert.
L'évaluation porte essentiellement sur trois niveaux de résultats
définis par Kirkpatrick (1998) : l'apprentissage, la performance
individuelle et les résultats organisationnels. Cependant, l'auteur
identifie des éléments susceptibles d'influencer ces
résultats. Ceux-ci sont regroupés en trois catégories
principales : les éléments facilitateurs (p.ex., l'influence des
aptitudes individuelles sur l'apprentissage, l'influence du design du transfert
sur la performance); les éléments environnementaux (p.ex.,
l'influence de la réaction sur l'apprentissage, ou du climat de
transfert sur la performance); et les éléments motivationnels
(p.ex., la motivation à apprendre ou à transférer).
À ces éléments s'ajoute la prise en compte de facteurs
pouvant avoir une influence secondaire, tels que les caractéristiques de
la personnalité ou les attitudes au travail. L'utilisation de ce
modèle peut ainsi mener à ne pas se limiter à la seule
évaluation des résultats de la formation, mais aussi à
celle de certains facteurs explicatifs susceptibles d'influer sur le niveau de
résultat obtenu.
L'intérêt de ce modèle réside dans
le fait qu'il attire l'attention du professionnel sur un ensemble de variables
souvent négligées qui permettent de
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comprendre les résultats générés
par la formation. Par ailleurs, sa complexité convient mieux, au
quotidien, aux chercheurs qu'aux praticiens des entreprises qui sont fortement
susceptibles de retourner rapidement au modèle de Kirkpatrick.
Selon Kraiger (2002), de nombreux praticiens
interrogés sur le pourquoi de la réalisation d'une
évaluation de la formation expliquent que c'est principalement à
cause de l'habitude ou la volonté de poursuivre une démarche mise
en place dans l'entreprise par leurs prédécesseurs. Or, la
première chose qui doit guider l'évaluation de la formation,
c'est d'abord et avant tout les raisons qui l'animent. Il faut savoir par
exemple si les résultats vont être utilisés pour prendre
des décisions concernant le contenu des formations ou concernant la
fonction formation de l'entreprise car des objectifs de l'évaluation
vont dépendre le choix des méthodes et des objets à
évaluer.
Les cibles de l'évaluation (Kraiger, 2002)
Cibles
|
Objets
|
Méthodes
|
Raisons
|
Contenu et design de la formation
|
Design Livraison Validité
|
Méthodologies établies d'élaboration de
formation, Jugement d'expert Comité conseil, Évaluation de la
satisfaction
|
Feedback au formateur
|
Changements chez l'apprenant
|
Changements cognitifs Changements comportementaux Changements
affectifs
|
Tests écrits, Enquêtes, Entrevues,
Échantillons de travaux
|
Feedback à l'apprenant Prise de décision
|
Rendement pour l'organisation
|
Transfert, Résultats, Performance
|
Estimations, Enquêtes, Analyses
bénéfices-coûts
|
Prise de décision Marketing
|
|
Ceci l'amène à proposer un modèle
alternatif d'évaluation de la formation sommairement décrit au
tableau 3. Ce modèle identifie trois cibles d'évaluation :
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le contenu de la formation et son design, les changements chez
l'apprenant, et le rendement pour l'organisation. Ces cibles sont en lien
direct avec les trois principales raisons d'évaluer qu'il identifie,
à savoir la prise de décision, le feedback et le marketing de la
formation. Pour chacune de ces cibles, il précise des objets à
évaluer de même que des méthodes appropriées. Par
exemple, le rendement peut être évalué par le transfert des
apprentissages dans les comportements, les résultats de la formation sur
l'organisation ou la performance globale de l'apprenant. Les méthodes
proposées à cet effet sont les estimations, les enquêtes ou
les analyses bénéfices-coûts.
Notons que ce modèle se centre seulement sur les
processus et les résultats de la formation et que différemment du
modèle de Holton (1996), il ne suggère pas de variables
intermédiaires susceptibles d'expliquer les résultats obtenus.
Par ailleurs, il détaille de manière assez explicite les objets
à évaluer de même que les méthodologies
appropriées.
Malgré les critiques, le modèle de Kirkpatrick
(1998) est fortement susceptible de continuer à garder le haut du
pavé dans le domaine de l'évaluation de la formation. Les raisons
reposent principalement sur sa simplicité et le fait que la chaîne
causale qu'il propose allant de la satisfaction à l'impact sur
l'organisation rejoint les préoccupations des gestionnaires de la
formation dans l'entreprise. Cependant, comme le préconise Phillips
(1997), l'ajout d'un cinquième niveau pour le rendement financier
s'avère ici bien fondé, ce type de résultats étant
de nature différente et commandant une approche méthodologique
particulière et exclusivement quantitative.
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