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Le droit de véto et la responsabilité de protéger des Nations Unies

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par Cheikh Kalidou NDAW
Université Gaston Berger de Saint-Louis, Sénégal - Maà®trise 2013
  

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Paragraphe 2 : L'inertie coupable en Syrie ?

Après deux ans de guerre civile, la Communauté Internationale ne s'est toujours pas acquittée de sa responsabilité de protéger envers le peuple syrien qui fait l'objet d'innommables exactions orchestrées par son Gouvernement. Chaque jour emporte son lot de victimes civiles comme en témoigne Robert MARDINI, chef des opérations du CICR pour le Proche et le Moyen-Orient. Il estime que : « des centaines de personnes meurent chaque jour en Syrie. Des millions ont été déplacées à l'intérieur du pays, tandis que d'autres ont fui vers des pays voisins et vivent dans une grande précarité (...). Des dizaines de milliers de personnes sont détenues ou portées disparues. Les familles qui sont sans nouvelles de leurs proches cherchent désespérément à savoir ce qu'il est advenu d'eux. Les services de santé se sont fortement dégradés, des structures médicales sont prises pour cibles et des membres du personnel de santé sont tués, menacés ou placés en détention alors qu'ils tentent de sauver des vies. Les biens et les infrastructures ont subi d'importants dégâts, et des zones entières sont en ruine »77. A cela se sont ajoutés de forts soupçons d'utilisation d'armes chimiques par le régime en place.

Aucune couche sociale n'est épargnée. En deux ans, le conflit aurait fait près cent mille victimes et plus d'un million et demi de déplacés78 c'est-à-dire beaucoup plus que la révolution libyenne Libye, qui totaliserait au moins vingt cinq mille morts79, dans laquelle les Nations Unies sont effectivement intervenues sur la base de la résolution 1973 (2011). La paralysie du Conseil de sécurité face au conflit syrien est dès lors alarmante. La Russie et la Chine s'opposent à toute idée d'intervention en Syrie et une action unilatérale, hormis son interdiction par la Charte des

77 - Communiqué de presse 13/45 du CICR, le 15 mars 2013.

78 - Le Monde du 30 mai 2013. Cf. www.lemonde.fr consulté le 3 juin 2013.

79 - Le Point du 20 septembre 2011. Cf. www.lepoint.fr consulté le 3 juin 2013

Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB, 2012-2013.

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Nations Unies, semble exclue au regard des risques de déstabilisation qu'elle présenterait pour le Moyen-Orient. Cette impuissance, à la fois complice et coupable, est bien résumée par SUR lorsqu'il analyse le blocage du Conseil de sécurité. En effet, l'auteur estime que quand ce dernier ne fonctionne pas à cause d'un veto « sa paralysie le renvoie à l'inexistence politique et juridique : il ne peut rien décider ni rien n'empêcher et son silence rend possibles tous les comportements, même les plus âprement contraires à la Charte »80. C'est ainsi qu'en même temps que prolifèrent les condamnations diplomatiques des innocents continuent de subir les affres de la guerre syrienne au quotidien.

L'inaction en Syrie pose le même problème moral que celui qu'était censé résoudre la responsabilité de protéger : la protection des civils pris à partie dans un conflit armé non international. Dès lors, on ne peut qu'être médusé devant la situation syrienne si tant est que le principe de la responsabilité de protéger de la Communauté Internationale emporte une « véritable interdépendance morale »81. Cela, d'autant plus que comme le note MBONDA : « la non intervention témoigne d'une indifférence moralement problématique, dans un monde de plus en plus globalisé et où la notion de solidarité est défendue parmi les valeurs les plus importantes de notre époque »82.

Une analyse minutieuse de la situation syrienne ne saurait passer sous silence, encore une fois, le décalage persistant de points de vue entre les membres permanents du Conseil de sécurité qui peinent toujours à s'accorder sur les dossiers les plus brûlants de la vie internationale. Toutefois, elle laisse surtout apparaitre un lien de causalité entre l'intervention en Libye (2011) et l'impasse syrienne actuelle (2011-2013). En effet, pour une bonne frange de l'opinion internationale, l'inaction en Syrie serait la conséquence directe de la mise en oeuvre, quelque peu ratée, de la responsabilité de protéger en Libye. Le projet de rapport soumis à l'Union interparlementaire en 2012 sur le rôle du Parlement dans la protection des civils soulignait sur ce point : « l'impasse est-elle en partie imputable à un mauvais usage de la responsabilité de protéger, en 2011 en Libye, sachant que beaucoup pensent que "l'intervention innovante en Libye pour protéger les civils désarmés des atrocités du régime Kadhafi" s'imposait. La question

80 - SUR, (S.), op. cit.

81 - BADIE, (B.), op. cit. p. 222

82 - MBONDA, (E.-M.), « La sécurité humaine et la `'responsabilité de protéger» : vers un ordre international plus humain ? », « s.d. »

Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB, 2012-2013.

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reste ouverte. La mort de Kadhafi et le changement de régime qui a suivi conduisent les détracteurs du concept à dire que leur vote a été dévoyé »83. Ce raisonnement est d'autant plus intéressant que les opposants à une intervention en Syrie semblent avancer les mêmes arguments en l'occurrence la Russie et la Chine. Le renversement du régime de Kadhafi, alors que tel dessein n'avait jamais été celui de la résolution 1973 (2011), n'aurait fait que renforcer la position anti interventionniste de ces Etats.

Les membres permanents du Conseil de sécurité ne parlent pas le même langage sur le cas de la Syrie. Cela se traduit par un rejet systématique des projets de résolution contre le régime syrien. Les partisans de l'intervention militaire et ses détracteurs s'accusent mutuellement parfois de manière virulente.

En dénonçant le rejet d'un troisième projet de résolution sur la Syrie S/2012/538 (2012) par la Russie et la Chine, la représentante des Etats-Unis, Mme RICE, soulignait l'échec du Conseil de sécurité et disait « espérer qu'un jour, avant que plusieurs milliers d'autres personnes ne meurent, la Russie et la Chine arrêteront de protéger M. El-ASSAD et permettront au Conseil de tenir le rôle qui lui revient au coeur de la réponse internationale à la crise en Syrie »84.

De l'autre coté, la Russie et la Chine qui ont voté contre la résolution dénonçaient des calculs stratégiques d'intérêt national et une volonté manifeste de s'ingérer dans les affaires internes d'un Etat souverain. Le représentant de la Russie, M. CHURKIN, s'indignait d'avoir affaire à des « pharisiens » qui « ont promu leurs propres objectifs géopolitiques, qui n'ont rien à voir avec les intérêts légitimes du peuple syrien ». Partant, il réaffirmait l'opposition de la Russie contre tout « document, au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, qui ouvrirait la voie à l'exercice de pressions par des sanctions et à une intervention militaire étrangère dans les affaires nationales syriennes »85. Pendant ce temps, la Chine, attachée à « l'égalité souveraine et la non ingérence dans les affaires intérieures des autres pays », martelait que « l'avenir et le destin de la Syrie doivent faire l'objet d'une décision indépendante du peuple syrien plutôt que d'être imposés par des forces extérieures»86. Cela montre clairement

83 - Projet de Rapport UIP, op. cit. p. 6

84 - S/PV.6810 de la 6810e séance du CS tenue le 19 juillet 2012, ONU.

85 - Ibid. 86- Ibid.

Cheikh Kalidou NDAW, Mémoire de Maîtrise Droit Public, option Droit des Collectivités Locales, UFR SJP, UGB, 2012-2013.

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que la Chine et la Russie n'ont aucunement l'intention d'autoriser une intervention militaire en Syrie.

Dès lors, l'on ne peut qu'avoir des regrets de constater que le système des alliances au sein du Conseil de sécurité continue de vider la responsabilité de protéger de son contenu en empêchant le déploiement de la sécurité collective. Il laisse perpétrer des tueries insupportables, ce qui est clairement contraire aux principes de la Charte des Nations Unies. Il importerait alors de modifier substantiellement le droit de veto afin de mieux asseoir l'effectivité de la responsabilité de protéger et d'éviter de donner, surtout à l'opinion internationale, l'impression d'une justice à double vitesse.

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