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La vente à  l'essai face au régime juridique des contrats à  distance

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par Florent SUXE
Université Panthéon-Sorbonne Paris 1  - Master 2 droit du commerce électronique et de l'économie numérique  2013
  

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SECTION 2 : La survivance du droit de rétractation au cours de l'essai

Dès lors que le délai d'essai se superpose au délai de rétractation, on peut se demander si le droit de rétractation survit à l'essai réalisé par l'acheteur. En effet, conformément à la directive du 20 décembre 199787, l'article L 121-20-2 3° et 4° du Code de la consommation dispose que le droit de rétractation ne peut être exercé, sauf si les parties en ont convenu autrement, pour les contrats :

30 De fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ou qui, du fait de leur nature, ne peuvent être réexpédiés ou sont susceptibles de se détériorer ou de se périmer rapidement ;

40 De fourniture d'enregistrements audio ou vidéo ou de logiciels informatiques lorsqu'ils ont été descellés par le consommateur.

La première de ces exceptions est interprétée de manière large par la jurisprudence. Ainsi, à cet égard, le tribunal de Grande Instance de Bordeaux a jugé que la clause des conditions générales de vente de CDiscount excluant le droit de rétractation à l'égard notamment de « l'ensemble des produits des rayons sous-vêtements (homme et femme, lingerie, chaussettes, piercing et boucles d'oreilles ; ceci par mesure d'hygiène) »88, était valable, en considérant que l'hygiène pouvait être un motif valable justifiant que

européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.

87 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrat à distance, JOCE n° L 144, 4 juin 1997, p. 21.

88 TGI Bordeaux, 11 mars 2008, UFC Que Choisir c/ CDiscount (n°3703/2006), Contrats Conc. Cons. 2008. Comm. n° 69, note A.Debet.

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certains produits soient considérés comme faisant partie de ceux qui de fait de leur nature, ne peuvent être réexpédiés.

Quoique circonscrite au cas des sous-vêtements, ce qui ne concerne pas le cas du vendeur dans notre espèce, dans la mesure où ce dernier ne vend pas de tels objets, cette interprétation extensive a été relayée par Directive du 25 Octobre 2011 qui consacre en son article 16 e) une telle exception concernant « la fourniture de biens scellés ne pouvant être renvoyés pour des raisons de protection de la santé ou d'hygiène et qui ont été descellés par le consommateur après livraison ».

Une interprétation plus extensive encore de cette disposition transposée fidèlement au sein du projet de loi relatif à la consommation permettrait d'exclure l'existence d'un droit de rétractation dans notre cas d'espèce. A défaut, il semble que les vêtements autres qu'intimes puissent être essayés sans que des raisons d'hygiène ne fassent obstacle à leur renvoi.

En outre, l'exception prévue au 4° de l'article L 121-20-2 précité prévoit que le droit de rétractation ne peut être exercé, lorsque les enregistrements audio et vidéo ou logiciels informatiques ont été descellés. Il semble donc que le Code de la consommation prévoit des cas dans lesquels l'ouverture d'un colis ferait obstacle à l'exercice du droit de rétractation de sorte qu'on pourrait se demander si, de manière générale, le droit de rétractation ne pourrait plus être exercé dès lors qu'un bien a été essayé, commencé d'être utilisé. Il ne fait aucun doute que directive du 25 Octobre 2011 conduit à tenir un raisonnement totalement inverse. Ainsi, en effet, dans son considérant 37, la directive indique que « le consommateur devrait être autorisé à essayer et inspecter le bien qu'il a acheté, dans la mesure nécessaire pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement ».

D'autre part, elle indique dans son considérant 42 que « pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement des biens, le consommateur devrait uniquement les manipuler et les inspecter d'une manière qui lui serait également permise en magasin. Par exemple, il devrait seulement essayer un vêtement et non pas le porter. »

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C'est ainsi qu'il paraît difficile de considérer que le fait d'essayer un bien fait disparaître le droit de rétractation, dans la mesure où l'essai ne semble pas impliquer plus que ce qui est prévu dans le considérant 42 de la directive du 25 Octobre 2011. En effet, en revêtant les vêtements qu'il a acquis, l'acheteur les essaye comme il lui serait permis de le faire dans une boutique. La faculté d'essai qui lui est attribuée par le vendeur dans le cadre de la vente à l'essai ne lui donne pas la possibilité de le porter à l'extérieur de chez lui et pendant une durée excédant celle qui est nécessaire pour se faire un avis.

Par ailleurs, à supposer que le vendeur permette à l'acheteur de porter le vêtement afin de se faire un avis sur les vêtements et accessoires qu'il a acquis, le considérant 42 de la directive prévoit que « certains consommateur exercent leur droit de rétractation après avoir utilisé les biens dans une mesure qui excède ce qui est nécessaire pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien. Dans ce cas, le consommateur ne devrait pas perdre son droit de rétractation, mais devrait répondre de toute dépréciation des biens. »

Ainsi, il est bien malaisé de plaider la disparition du droit de rétractation en cours d'exécution du contrat par la réalisation de l'essai qui est permis à l'acheteur.

Même si ce principe est prévu par les considérants de la directive uniquement, il n'en reste pas moins que celle-ci en tire toutes les conséquence à l'article 14.2 aux termes duquel « la responsabilité du consommateur n'est engagée qu'à l'égard de la dépréciation des biens résultant de manipulations des biens autres que celles nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement de ces biens ». Fidèlement transposée par le projet de loi relatif à la consommation, cette disposition fait clairement obstacle à la théorie de la disparition du droit de rétractation en cas de manipulation du bien excédant celle qui est permise pour que le consommateur se fasse un avis.

Partant, il est nécessaire de considérer que le Droit de rétractation se cumule avec le droit de l'acheteur d'essayer et de retourner, en cas d'échec, les vêtements qu'il a acquis dans le cadre de la présente espèce. Ainsi, l'autonomie du Droit de rétractation vis-à-vis

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de la faculté d'essai est bien réelle de sorte qu'il y a lieu de comprendre comment articuler au mieux ces droits pour ne pas alourdir la charge qui pèse sur le vendeur.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo