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Les états et la construction de l'union africaine: le cas de la Libye et du Sénégal

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par Romaric TIOGO
Université de Dschang - Master II 0000
  

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SECTION II- LA CONSTRUCTION DISCURSIVE, SYMBOLIQUE ET PRATIQUE DE L'UA

La perception sénégalaise de l'UA est un projet qui transcende les simples frontières du Sénégal et du continent. Pour s'en persuader, il suffit d'analyser sa stratégie qui procède par une construction discursive ou théorique de l'Union (paragraphe I), laquelle est associée à l'usage des symboles et à la pratique (paragraphe II).

PARAGRAPHE I- LA CONSTRUCTION DISCURSIVE

L'analyse du discours sénégalais sur la construction de l'UA permettra de mettre en exergue trois axes principaux de réflexion. D'abord il s'agit d'un discours qui vise à construire l'UA autour du concept de la renaissance256(*) africaine (A). Ensuite, il promeut la constitution des normes et des valeurs partagées à travers la pratique des conférences (B). Enfin, il propose une forme médiane à l'Union (C).

A- La constitution de l'UA autour du discours de la renaissance africaine : la construction de la paix

La paix, dit Jean-François GUILHAUDIS, est l'équivalent de l'absence de guerre257(*). une condition sine qua non pour tout développement durable. Selon les statistiques établies par les polémologues, l'une des causes du retard de l'Afrique par rapport au reste du monde est due aux nombreuses crises qui sévissent sur le continent. C'est dans le souci d'y mettre fin qu'il faut lire le discours du président sénégalais de la renaissance africaine sur la construction de la paix sur le continent.

Au moment de la signature de l'Acte constitutif de l'UA en 2000, le président Wade avait constaté que depuis l'accession à l'indépendance, plusieurs pays africains demeurent le théâtre de crises multiformes qui ont mis à mal leur sécurité interne et entraîné leur repli sur eux-mêmes. Il affirmait que  « les conflits les plus inquiétants en Afrique pouvaient être ramenés à certaines causes, principales, entre autres, les rivalités autour des mines de diamant touchant la Sierra Leone et la République Démocratique du Congo (RDC)..., la bataille autour du pétrole »258(*). Cette bataille poursuit-il a joué un «  rôle essentiel » dans la déstabilisation des pays comme l'Angola, ou le Congo-Brazzaville. Selon lui, il faudrait non seulement y mettre fin, mais aussi et surtout, penser des mesures adéquates pour éliminer «  la lutte pour le pouvoir qui fut un élément déclencheur de la guerre »259(*) avec les assassinats politiques comme en RDC, en Angola, en Somalie et en Ethiopie. Sur ce point justement, les statistiques sont d'autant exécrables que, selon le président de la Commission de l'UA Jean PING, « 31 chefs d'Etat africains ont été assassinés en moins de 40 ans après les indépendances »260(*). Pour sortir de ces crises qui ont déchiré le continent et précisément la région des grands lacs ouvrant la voie à ce que Gérard Prunier a qualifié de « première guerre inter-africaine »261(*), le Président sénégalais a adressé un discours multidimensionnel sur les questions de paix à l'endroit de l'Afrique et du monde entier le 4 avril 2010 à l'occasion de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance du Sénégal.

Axé principalement sur la renaissance du continent africain, ce discours ambitionne entretenir la denrée incommensurable qu'est la paix. Telle qu'envisagée par Dakar, il s'agit d'une paix qui devrait se construire à partir de la destruction des armes lourdes, ce qui aiderait par la suite au développement et à l'émergence de l'Afrique. En présence de 22 chefs d'Etat africains et des représentants des missions diplomatiques des grandes puissances, il a inscrit l'inauguration du Monument de la renaissance africaine dans une perspective de paix mondiale pour le compte de l'Afrique. Comme on le perçoit à travers ces mots , Abdoulaye WADE déclare : «  du sommet de la statue la plus haute du monde, du haut, de cette oeuvre d'art qui symbolise la renaissance africaine, au nom de l'Afrique, l'Afrique qui se reconnaît dans ce monument, je vous transmets un message de paix, condition indispensable à la renaissance de notre continent » 262(*); révélant ainsi le rôle symbolique que joue ce Monument dans la construction de ladite paix et son implication dans le succès du continent.  Par la suite, Il a conseillé « aux gouvernements de s'engager davantage dans  la destruction des stocks » nucléaires. Le message sénégalais sur la renaissance africaine est donc double.

D'abord, un appel lancé à tout le monde entier en vue de la cessation de la fabrication puis de la fourniture des armes dangereuses qui alimentent en grande partie les conflits sur le continent et nuisent à son décollage économique politique et social. Dans la même perspective, parlant des « ventes illicites  d'armes et de produits militaires dérivés en Afrique sub-saharienne »,  lesquels ont occasionné « 50% des morts liés aux conflits »263(*), Yves EKOUE AMAÏZO constate amèrement que « les principaux fournisseurs d'armes de l'Afrique sont les pays du G8 »264(*) .

Ensuite il y a un appel à la dénucléarisation tant civile que militaire de la planète. De fait on constate de plus en plus que l'Afrique, tout comme beaucoup de pays sur la planète, fait face à des crises énergétiques graves. Pour y pallier, elle entend opter pour le nucléaire civil. Or, au regard du spectre des catastrophes qu'engendre cette option, le Président WADE a conseillé à l'Afrique d'y renoncer. Les catastrophes nucléaires qui ont affecté la ville de Fukushima au Japon en mars 2011, un des pays les mieux avancés au monde dans la technologie nucléaire, sont venues confirmer ses inquiétudes quant à cette voie qui, selon lui constituerait durablement un frein dans la marche du continent. Se déliant de son projet du nucléaire civil initialement conclu avec la Russie et dont l'objectif était de doter le Sénégal d'une station nucléaire, il a par la même occasion annoncé qu'au 17ème sommet de l'UA à Malabo, il demanderait à ses pairs d'en faire autant265(*). Ce désengagement envers le nucléaire semble d'ailleurs le maître-mot dans la mesure où de plus en plus, même les pays les plus industrialisés l'abandonnent pour des options moins dangereuses266(*). Pour certains analystes comme Joseph Vincent NTUDA EBODE, le nucléaire coûterait très cher et encore plus aux pays africains qui ne maîtrisent pas encore cette technologie. Outre les accidents que nous venons d'évoquer, il souligne également deux autres problèmes à savoir « l'entretien des équipements »267(*) qui fait généralement défaut sur le continent et le « traitement des déchets »268(*) qui n'est pas aisé. Il est donc incontestable aux yeux de Dakar que la fin de la course à l'acquisition de l'arme atomique permettrait le retour à la paix et au renouveau du continent africain. C'est ce qu'il convient de comprendre par « les peuples de la terre ne veulent plus de l'arme atomique »269(*).

En outre, le Sénégal met suffisamment l'accent sur l'expertise des intellectuels. A travers les colloques continentaux qu'il organise, ces derniers pensent une Union possible et contribuent par ce fait même à la création des normes et des valeurs partagées à travers le continent.

* 256 Le concept de « Renaissance » a fait son entrée dans les sciences sociales avec la « civilisation de la Renaissance » de Jacob Burckhardt en Italie dans les années 1800. Voir le site www.africulture.com., consulté le 2 décembre 2010.

* 257GUILHAUDIS Jean-François, Relations internationales contemporaines, paris, éd. du Juris-classeur, 2002, p. 654.

* 258 Entretien conduit par ZORGBIBE Charles/BELMESOUS Hacène, op. cit., p. 15.

* 259 Ibid.

* 260 Ces propos ont été repris par MBOUMBA Jean-Marie, « Armées africaines : la mauvaise réputation », dans Jeune Afrique Economie N° 380 op. cit., p. 95.

* 261 A partir du 2 août 1998, la RDC est plongée dans un conflit où s'affrontent les armées de la Namibie, de l'Angola et du Zimbabwe, alliées du régime de Kinshasa d'une part et celles du Rwanda Burundi et de l'Ouganda d'autre part qui lui sont opposés. PRUNIER Gérard« Congo-Kinshasa: La première guerre inter-africaine », dans Géopolitique africaine, N° 1 op. cit., p. 109.

* 262 Voir GARENNES Jean, « Wade érige la renaissance africaine », dans Jeune Afrique Economie N° 380, p. 85.

* 263 AMAÏZO EKOUE Yves, « De l'économie de l'insécurité à l'économie durable », dans Afrique Education N°114 du 16 au 31 août 2002, p. 21.

* 264 Ibid, p. 20.

* 265 Suite au soulèvement des Sénégalais, le 23 juin 2011 pour manifester contre ce qu'ils ont qualifié de « tentative monarchique de dévolution du pouvoir», le président Wade ayant essayé de faire modifier la constitution pour « favoriser son fils », son héritier putatif, il n'effectuera plus le déplacement de Malabo.

* 266 Suite à la catastrophe japonaise, l'Allemagne, moteur de la zone euro a décidé de remplacer progressivement ses stations nucléaires par les énergies renouvelables comme le charbon, l'énergie éolienne ou encore l'énergie solaire.

* 267 Il relève à cet effet que les Africains n'entretiennent pas régulièrement les ouvrages. Or, si cette mentalité ne peut produire que des accidents de faible intensité dans des ouvrages tels que les centrales thermiques, les véhicules, ou les avions, c'est à une catastrophe qu'il faudrait s'attendre dans l'hypothèse d'une centrale nucléaire .Car, la Russie qui investit en Afrique dans ce domaine ne maîtrise pas elle même la chaîne technologique dans la mesure où ce sont les Etats-Unis qui entretiennent encore leurs centrales. Voir NTUDA EBODE Joseph Vincent, «  Russie-Afrique : retour gagnant par le nucléaire ? », dans Diplomatie Magazine, Paris, N°26, 2007. 

* 268 La toxicité des déchets nucléaires dure des milliers d'années dans la mesure où si l'iode 131 ne met que huit jours pour prendre la moitié de sa radioactivité, il faut 24000 ans pour le plutonium, 245 000 ans pour l'uranium 234 et 740 millions d'années pour l'uranium 235. NTUDA EBODE (J. V.), op. cit., dans Diplomatie Magazine, Paris, N°26, 2007. 

* 269 A. Wade cité par GARENNES (J.), op.cit., p. 85.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand