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La protection des salariés face au harcèlement sexuel

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par Emeline LOREK
Faculté de Droit de Montpellier - Master 1 - Droit social 2015
  

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Section 2 ) Les mesures de prévention prises par l'employeur

L'employeur étant tenu d'une obligation de prévention liée à une obligation de sécurité de résultat vis à vis de ses salariés, ces dernières doivent être matérialisées.

Ce n'est pas dans le Code du Travail que l'employeur trouvera un guide des actions de prévention adaptés aux risques psychosociaux. Au mieux , il disposera de l'article L.4121-2 du Code du Travail et de son évaluation des risques (A) ou encore les articles L.1321-1 et -2 du même code à propos du règlement intérieur (B).

En revanche, la lecture des ANI sur le stress au travail37 et sur le harcèlement et la violence au

33 ) Cass.soc., 10 mai 2001,n°99-40.059

34 ) Cass.soc., 4 avril 2012, n°11-10.570

35 ) Supra

36 ) L'article L.4122-1 du Code du travail dispose que « Conformément aux instructions qui lui sont données par l'employeur, dans les conditions prévues au règlement intérieur pour les entreprises tenues d'en élaborer un, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail.

Les instructions de l'employeur précisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d'utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses. Elles sont adaptées à la nature des tâches à accomplir.

Les dispositions du premier alinéa sont sans incidence sur le principe de la responsabilité de l'employeur. »

37 ) Accord national interprofessionnel du 2 juillet 2008 sur le stress au travail , étendu par un arrêté du 23 avril 2009

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travail38 semblent plus utiles. Ils guident l'employeur en prônant l'élaboration d'une charte éthique

( C ) , ainsi qu'une sensibilisation et une formation adéquate des responsables hiérarchiques et des salariés (D), sans oublier que les salariés peuvent bénéficier d'un droit d'alerte (E).

De plus, l'ANI du 19 juin 201339 pose un principe intéressant qui est celui de la possible mise en oeuvre d'une démarche QVT (qualité de vie au travail) (F).

A) L'évaluation des risques

Il s'agit d'un document unique créé par un décret du 5 novembre 200140 en vue de rendre obligatoire , pour toutes les entreprises et associations de plus d'un salarié, l'évaluation des risques professionnels. A l'origine, ce document n'a pas été créé pour les risques psychosociaux. Cependant, ceux ci doivent y trouver leur place bien que ce fusse délicat. En effet, il s'agit de dresser une cartographie des risques de l'entreprise , de reconnaître l'existence de ces risques et ainsi, le travail de prévention en amont semble déjà commencé.

Pour satisfaire pleinement à son obligation , l'employeur doit évaluer et identifier précisément les risques encourus en matière de harcèlement. Ce principe est posé par les articles L.4121-2 et L.4121-3 du Code du travail. Il doit donc prendre en compte les risques psychosociaux ce qui lui permettra d'adapter ses mesures de prévention aux réalités de son entreprise.

Au niveau géographique, l'évaluation des risques doit se faire au niveau de chaque unité de travail de l'entreprise ou bien de l'établissement. Ceci est prévu par l'article R..4121-1 du Code du travail. Cette notion paraissant floue, c'est par une circulaire du 18 avril 200241 qu'elle a été précisée. La notion doit donc être comprise dans un sens très large et ce, afin d'englober des situations très diverses en ce qui concerne l'organisation du travail. Il peut donc s'agir d'un seul poste de travail ou bien de plusieurs postes occupés par les travailleurs ou bien présentant les mêmes caractéristiques. L'étendue est donc volontairement très large.

Afin d'évaluer les risques , l'employeur devra tenir compte des activités de l'établissement mais aussi de l'aménagement des lieux de travail. Il ne devra pas se contenter de faire état des risques avérés mais il devra prendre en compte tous les éléments qui seraient susceptibles de révéler un

38 ) Accord national interprofessionnel du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail

39 ) Accord national interprofessionnel du 19 juin 2013 relatif à la qualité de vie au travail

40 ) Décret n° 2001-1016 du 5 novembre 2001 portant création d'un document relatif à l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs

41 ) Circulaire DRT n° 6 du 18/04/02 pris pour l'application du décret n° 2001-1016 portant création d'un document relatif à l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs

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dysfonctionnement ; il devra se servir d'indices (taux élevé d'absentéisme, actes de violences, suicides, baisse de productivité...). L'employeur devra aussi prendre en compte les remarques et observations faites par les institutions représentatives du personnel (IRP).

De plus, l'employeur se devra de prendre en compte les caractéristiques des salariés et des emplois occupés. Certaines personnes en raison de leur poste peuvent être plus exposées à des risques psychosociaux que d'autres.

Cependant, le travail de l'employeur ne s'arrête pas là. En plus d'identifier une situation de risque, il devra encore analyser et identifier les causes .

Ensuite, cette évaluation doit répondre à un certain formalisme. En effet, une fois l'étude menée, les résultats sont retranscrits dans un document nommé « document unique » (DU) ou « Document unique d'évaluation des risques » (DUER) selon l'article R.4121-1 du Code du travail. Ce document sera composé d'un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail. Il est mis à jour au moins une fois par an. Il peut aussi être mis à jour dès qu'un aménagement important modifiant les conditions de travail , de santé et de sécurité voit le jour ou encore lorsqu'une information supplémentaire est recueillie. Sujet à des mises à jour fréquentes, ce document permet donc de tenir compte de l'apparition de nouveaux risques jusque là ignorés et par la suite de modifier les actions de prévention mises en oeuvre afin de les adapter.

L'article L.4121-3 du Code du travail admet une dérogation à la fréquence de révision du document unique en disposant que dans les entreprises de moins de 11 salariés, la mise à jour pourra être moins fréquente sous réserve que soit garanti un niveau équivalent de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Concernant son utilité , le DU permet d'informer le personnel des risques encourus dans l'entreprise. Ce document est tenu à disposition du Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT), des délégués du personnel, du médecin du travail, des agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale42, du médecin inspecteur du travail et de l'inspecteur du travail. Un arrêt de la Chambre criminelle du 25 octobre 2011 (n°10-82.133) a même imposé à l'employeur de communiquer à l'ensemble des salariés les informations relatives aux risques encourus et aux mesures de prévention correspondantes, répertoriés dans le DU.

Autre utilité, ce document doit être utilisé dans l'établissement du rapport et du programme de prévention présenté chaque année au CHSCT (article R.4121-3 du Code du travail).

42 ) Article R.4121-4 du Code du travail

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Concernant d'éventuelles sanctions, le fait pour l'employeur de ne pas transcrire ou mettre à jour les résultats de l'évaluation des risques peut être puni d'une amende de 1 500 € selon l'article R. 4741-1 du Code du travail.

Ensuite, si l'employeur refuse de mettre le DU à disposition des IRP il se rend coupable d'un délit d'entrave43 et si il refuse de le mettre à disposition de l'inspecteur du travail , il s'agira d'un obstacle à contrôle44.

Toutefois, procéder à l'évaluation des risques peut s'avérer compliqué pour l'employeur qui agirait seul. Afin de l'aider dans cette tâche, il peut donc faire appel à des institutions présentes dans l'entreprise (représentants du personnel et assistant de prévention) et à des institutions externes (inspection du travail ou organismes spécialisés) dont le rôle sera étudié ultérieurement.45

B) Le règlement intérieur

L'employeur dispose d'une grande liberté concernant le choix des moyens de prévention des risques psychosociaux et donc de harcèlement sexuel. En revanche, le règlement intérieur est une obligation qui s'impose à lui.

Le règlement intérieur est obligatoire quand au moins 20 salariés sont occupés habituellement dans l'entreprise46. Il permet de déterminer les conditions d'exécution du travail , les obligations des salariés en matière d'hygiène et de sécurité ainsi que les règles de discipline47 .

Les articles L.1321-1 et L.1321-2 du Code du travail précisent les clauses proscrites48 ainsi que celles qui sont obligatoires et parmi ces dernières figurent celles relatives au harcèlement moral mais aussi sexuel49.

Ainsi donc , doivent être inscrits dans ce règlement intérieur les articles L.1153-1 à L.1153-6 du Code du travail, relatifs au harcèlement sexuel. Les dispositions relatives aux actions en justice liées au harcèlement 50 ainsi que les dispositions sur les sanctions pénales liées aux discrimination en raison d'un harcèlement 51 doivent y figurer également .

43 ) Article L.2328-1 du Code du travail pour le CE / article L.4742-1 du Code du travail pour le CHSCT / article L.2316-1 du code du travail pour les délégués du personnel / article L.2146-1 du Code du travail pour le droit syndical.

44 ) Article L.8114-1 du Code du travail.

45 ) Titre I, Chapitre II

46 ) Article L.1311-2 du Code du travail

47 ) Article L.1321-1 du Code du travail

48 ) Article L.1321-3 du Code du travail

49 ) Article L.1321-2, 2° du Code du travail

50 ) Articles L.1154-1 et L.1154-2 du Code du travail

51 ) Article L.1155-2 du Code du travail

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En cas de modification ou de retrait de clause, les formalités de mise en place du règlement intérieur s'imposent. Si ces règles ne sont pas respectées, la modification du règlement intérieur reste sans effet selon un arrêt de la Chambre sociale du 4 juin 1969 (n°68-40.377). Ce fut notamment le cas lorsque les articles du Code du travail furent modifiés par la loi du 6 août 2012 et par celle du 4 août 2014.

Ainsi , le projet de règlement intérieur est soumis au CHSCT qui délivrera un avis sur les matières le concernant. Ensuite, le Comité d'entreprise (CE) donne le sien ou , à défaut, les délégués du personnel52.

Enfin, une fois que le règlement intérieur est établi il est affiché « à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux et à la porte des locaux où se fait l'embauche. »53. Il est donc affiché dans deux endroits, simultanément et ce, afin d'informer au mieux le personnel notamment en ce qui concerne les faits de harcèlement moral ou bien sexuel.

Si le règlement n'est pas affiché, l'employeur personne physique encourt une amende de 750 € et l'employeur personne morale une amende de 3 750 € . Il s'agit de contraventions de la quatrième classe à effet dissuasif afin de protéger au mieux les droits des salariés.

Bien que le règlement intérieur soit une obligation, d'autres documents peuvent être facultatifs. Il s'agit notamment du cas de la charte éthique.

C ) La charte éthique

La charte éthique peut aussi être appelée charte de bonne conduite. Il s'agit d'un document qui fixe un ensemble de valeurs et de règles comportementales qu'une entreprise respecte et souhaite faire respecter par ses salariés, dirigeants et parfois même ses fournisseurs.

Cette charte vise à compléter les lois et règlements ainsi qu'à sensibiliser les sujets de l'entreprise afin de les pousser à avoir un comportement respectueux, convenable, représentant au mieux la morale et l'image de l'entreprise .

Elle n'a pas de portée juridique et constitue seulement un outil de communication avec les salariés. De plus, la circulaire DGT (Direction Générale du Travail) 22 du 19 novembre 2008 considère que les dispositions de la charte peuvent être considérées comme des adjonctions au règlement intérieur et donc soumises au même régime que ce dernier. La Cour d'Appel de Versailles a considéré dans un arrêt du 14 novembre 2007 (n°07-405)54 que la qualification

52 ) Article L.1321-4 du Code du travail

53 ) Article R. 1321-1 du Code du travail

54 ) La solution a été reprise par le Tribunal de Grande Instance de Nanterre le 19 octobre 2007 (n°06-6460)

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d'adjonction au règlement intérieur doit être retenue dès lors que les dispositions de la charte éthique relèvent essentiellement de la discipline et que leur violation donne lieu à sanctions. Ainsi donc, cette qualification est donc limitée selon la jurisprudence.

Concernant sa création, la charte de bonne conduite peut être instituée par voie de convention ou d'accord collectif. Cependant, le plus souvent il s'agit d'une décision unilatérale de l'employeur prise en vertu de son pouvoir de direction.

Dans le cas où elle comporterait des dispositions relevant du champ du règlement intérieur, elle doit être soumise à l'avis des représentants du personnel puis communiquée à l'inspecteur du travail accompagnée de l'avis des représentants du personnel. Ensuite, elle devra être affichée de la même manière que le règlement intérieur soit, « à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux et à la porte des locaux où se fait l'embauche. » .

En revanche, il n'y a pas de transmission obligatoire à l'inspecteur du travail si elle ne comporte pas de dispositions relevant du règlement intérieur ou si elle est élaborée dans une entreprise employant moins de 20 salariés et ne comportant pas de règlement. Toutefois, dans une telle situation , l'employeur pourra prendre connaissance du règlement et ce, en raison de sa compétence de contrôle de l'application de la législation du travail. Il pourra alors établir des observations écrites si certaines dispositions ne sont pas en adéquation avec ces normes .

Pour exemple , la Charte éthique EDF55 fixe dans un premier temps les objectifs du groupe

en s'engageant notamment à :

- Assurer la sécurité et protéger les personnes concernées par son activité, ainsi que la sûreté

de ses installation et de ses ouvrages .

- Développer la compétence de ses salariés , reconnaître leur contribution, veiller à la qualité

de leur vie au travail et entretenir un dialogue constructif avec eux et leurs représentants.

- Prévenir et traiter dans la vie au travail toute situation d'injustice et de discrimination , ainsi

que toute situation de contrainte, de violence ou de harcèlement.

- Être à l'écoute des parties prenantes de son activité

- Garantir le droit d'alerte .

Par la suite , elle fixe les engagements de ses salariés qui devront entre autres :

- Respecter les personnes et leurs droits , et s'interdire tout comportement d'intolérance, de

discrimination ou de violence physique ou morale .

55 ) Annexe 3

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- Travailler en se conformant aux règles de sécurité et de protection de la santé.

De plus, le groupe EDF s'engage à respecter les Droits de l'Homme ainsi que le Droit du travail .

D ) L'information et la formation des acteurs de l'entreprise

· Informer constitue le commencement de la prévention des actes de harcèlement sexuel. Il s'agit de sensibiliser les sujets de l'entreprise sur ces phénomènes perturbateurs et sur leurs conséquences. Une personne qui sait ce qu'est un risque psychosocial pourra détecter plus simplement les différents actes constitutifs et alerter au plus tôt sa hiérarchie.

Pour débuter il y a bien évidemment l'affichage des textes par l'employeur (règlement intérieur et charte éthique) mais aussi de possibles sessions de formation sur ces sujets.

Selon l'article L.4141-1 du Code du travail, l'employeur doit délivrer aux salariés lors de l'embauche et aussi chaque fois que nécessaire , une information relative aux risques liées à leur santé et à leur sécurité.

Concernant l'affichage de textes , les employés doivent avoir accès au règlement intérieur qui comporte des dispositions relatives au harcèlement sexuel notamment. Au même endroit doit se trouver l'avis indiquant les modalités d'accès au document unique d'évaluation des risques professionnels 56.

Ensuite, l'article L.1153-5 du Code du travail prévoit que l'article 222-33 du Code pénal relatif au harcèlement sexuel doit être affiché dans le lieu de travail et dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche. Ceci permet donc d'informer les salariés sur le fait que le harcèlement est un délit sévèrement puni. Cependant, chose surprenante, l'employeur n'encourt aucune sanction si il manque à cette obligation d'affichage de l'article 222-33 du Code pénal.

De plus , certaines coordonnées doivent aussi être affichées selon l'article D.4711-1 du Code

du travail telles que celles :

- du médecin du travail

- de l'inspection du travail compétente ainsi que de l'inspecteur compétent

- des services de secours

Le manquement à cette obligation est puni d'une amende prévue pour les contraventions de

4ème classe et est appliquée autant de fois qu'il y a de personnes employées dans les conditions

56 ) Supra

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susceptibles d'être sanctionnées57.

Enfin, pour aider l'employeur à remplir cette obligation, le gouvernement a mis en place des affichettes pouvant être utilisées afin d'informer les salariés 58.

· La formation quant à elle ne manque pas d'importance. Il s'agit aussi d'un bon moyen de prévention des risques psychosociaux.

Des formations peuvent seulement viser une certaine catégorie du personnel comme par exemple le personnel des ressources humaines qui a pour mission de définir et de piloter la mise en oeuvre de la politique de prévention, de traiter des alertes.

Elles peuvent aussi cibler l'ensemble des salariés afin de les aider à gérer plus facilement leur stress ou à développer des capacités psychologiques telles que le contrôle des émotions ou l'adoption d'attitudes mentales efficaces. Ceci est d'ailleurs très en vogue actuellement dans les grandes entreprises.

La formation des managers n'est pas à sous-estimer. En effet , selon le rapport Nasse et Légeron de 200859 , la formation des managers doit « inclure une dimension humaine de la gestion des entreprises en mettant l'accent sur l'impact psychologique et les effets sur la santé non seulement des organisations de travail mais aussi des méthodes de management des hommes ».

Ils bénéficient d'une proximité certaine avec les salariés et sont ainsi les mieux placés pour détecter des signes témoignant d'un harcèlement sexuel . De plus, étant gestionnaires , certaines méthodes de gestion peuvent être facteurs de stress ou même de harcèlement , ils doivent donc être préparés afin d'accéder aux objectifs demandés par la hiérarchie tout en respectant la santé mentale des salariés dont ils sont responsables.

De nombreux organismes dispensent de telles formations relatives au management, à l'accompagnement des salariés en souffrances, à la détection des cas de souffrance ... Ces formations entrent dans le cadre de la formation professionnelle continue. Elles s'effectuent donc pendant l'horaire habituel de travail et donnent lieu au versement normal de la rémunération du salarié60. Le coût des actions de formation est à la charge de l'employeur . Mais, si il occupe au moins 10 salariés, il pourra ,sous conditions, imputer le coût des ces formations sur la participation-

57 ) Article R.4741-3 du Code du travail

58 ) Annexe 4

59 ) Nasse Ph. Et Légeron P-Y., Rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail, mars 2008

60 ) Article L.6321-2 du Code du travail

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formation continue ou bien, si il adhère à un fond d'assurance formation, en demander la prise en charge ou le remboursement à cet organisme. En revanche, si il y a moins de 10 salariés, l'employeur ne pourra que demander la prise en charge du coût de ces formation auprès de l'organisme collecteur.

Enfin, les membres du CHSCT ou, à défaut de CHSCT, les délégués du personnel assurant les attributions de ce dernier pourront bénéficier, dès leur première désignation, d'une formation d'au moins 3 (établissements de moins de 300 salariés) ou 5 jours (établissements de plus de 300 salariés)61 ayant pour objet de développer leur aptitude à déceler et à mesurer les risques professionnels . Cette formation doit être renouvelée quand ils ont exercés leur mandat pendant 4 ans consécutifs ou non62.

Concernant les organismes formateurs, l'employeur pourra se tourner vers l'ANACT (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail ), l'INRS ( Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles) ou encore le RFFST ( Réseau francophone de formation en santé au travail).

E) Le droit d'alerte des salariés

Il s'agit d'un dispositif spécifique permettant à l'employeur d'être prévenu de l'émergence dans l'entreprise d'un risque psychosocial faisant courir un danger immédiat à la personne qui en est victime. Ceci est très utilisé dans les situations de harcèlement et de violence envers un salarié.

L'intérêt de mettre en place un tel dispositif est de pouvoir repérer et faire cesser une situation qui pourraient avoir des effets néfastes sur la santé et la sécurité des travailleurs. De plus, ces effets pourraient avoir pour conséquence d'affecter la quantité et la qualité du travail.

Le législateur a donc mis en place l'article L.4131-1 du Code du Travail qui dispose que « le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection ».

Dans son rapport, La responsabilité du salarié en matière de santé et prévention des risques

61 ) Article L.4614-15 du Code du travail

62 ) Article L.4614-14 du Code du travail

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professionnels 63, A.Coeuret démontre que plutôt que de délivrer un droit aux salariés, le texte institue ,en vérité, une véritable obligation. Cette disposition faisait d'ailleurs l'objet d'un article 13.2 dans la directive-cadre du 12 juin 198964 ce qui prouve toute sa portée obligatoire.

Par ailleurs, l'alerte, bien que devant être initiée par la victime , peut être initiée par autrui. Ceci est appréciable dans la situation où un salarié serait au courant d'agissements répréhensibles sur la personne d'un collègue de travail. Cependant aucune disposition législative ne prévoit une quelconque procédure relative à un tel cas de figure.

Seul l'article 4 § 1 de l'ANI sur le harcèlement et la violence au travail65 prévoit que « lorsqu'une situation de harcèlement ou de violence est repérée ou risque de se produire, le salarié peut recourir à la procédure d'alerte prévue en cas d'atteinte au droit des personnes ». Cette disposition semble minime face aux risques qu'un harcèlement sexuel peut engendrer. Un réel vide juridique subsiste donc ici. Seule la protection du salarié qui témoigne semble établie par l'article L.1153-3 du Code du travail66.

Ainsi donc, il semble judicieux pour l'employeur de mettre en place un dispositif spécial concernant ce droit d'alerte. Ceci peut être mis en place par le biai d'une charte de prévention des harcèlements. C'est notamment le système choisi par la Société Air France qui a mis en place tout d'abord un processus informel avec une phase d'écoute et de résolution du problème en lien avec des acteurs tels que le responsable des ressources humaines , le médecin du travail, l'assistante sociale.

Cependant si ce dispositif informel n'est pas venu à bout du problème, un recours devant la commission locale composée d'un responsable des ressources humaines, d'un médecin du travail, d'une assistante sociale, d'un représentant du personnel au CHSCT et d'un cadre peut être formé.

La commission devra alors établir des mesures motivées et veiller à leur bonne application.

Concernant les précautions à prendre avant d'instituer un dispositif spécifique d'alerte, l'employeur doit garder à l'esprit que ceci doit rester un complément des prérogatives des représentants du personnel notamment celles du CHSCT ou des délégués du personnel67.

Il conviendra aussi de se tenir à une obligation de discrétion et de confidentialité pendant cette

63 ) Coeuret A., La responsabilité du salarié en matière de santé et prévention des risques professionnels, Rapp.C.cass 2002

64 ) Supra

65 ) Supra

66 ) L'article L.1153-3 du Code du travail dispose que «Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés. »

67 ) Infra Titre I, Chapitre II

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procédure. Ainsi, la protection des données personnelles occupera une place primordiale . Il est important de rappeler ceci notamment dans le cas où la procédure d'alerte pourrait être mise en oeuvre à l'aide d'une adresse électronique censée recueillir tout signalement. De telles données seront donc protégées par la loi « Informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée maintes fois et dernièrement par la loi du 17 mars 2014. Concernant les dispositifs d'alerte en matière de discrimination et de harcèlement , le traitement automatisé des données doit être autorisé par la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés). Les demandes d'autorisation étant traitées au cas par cas, il est conseillé à l'employeur de contacter directement la CNIL.

Enfin, dernier élément subjectif mais non des moindres, ce dispositif d'alerte devra véritablement favoriser la sincérité des acteurs de la mise en oeuvre dudit dispositif. En effet, une dénonciation erronée et volontairement mensongère pourra justifier une sanction disciplinaire et même un licenciement et, dans les cas les plus extrêmes, être considérée comme une diffamation ou une dénonciation calomnieuse punies pénalement par les articles R.621-1 et 226-10 du Code pénal .

F) La mise en place de la démarche QVT

C'est donc par un ANI du 19 juin 2013 qu'un cadre général dans lequel entre la QVT a été proposé notamment par le réseau ANACT (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail).

Le but est de promouvoir « les conditions dans lesquelles les salariés exercent leur travail et leur capacité à s'exprimer et à agir sur le contenu de celui-ci. » Ces éléments déterminent la perception de la qualité de vie au travail qui en résulte .

Mettre en place une démarche QVT n'est pas obligatoire mais demeure tout de même intéressant dans la mesure où la qualité de vie au travail est intimement liée avec la qualité des prestations fournies et donc de la bonne marche de l'entreprise. C'est donc par le biai de formations du personnel et de questionnaires sur la qualité de vie des travailleurs que peut se faire une première approche. Une phase d'expérimentation peut ensuite permettre d'explorer une nouvelle manière de travailler, un nouveau fonctionnement qui intègrent performance et conditions d'emploi et de travail en tirant des conclusions des résultats des enquêtes menées dans l'entreprise.

La démarche étant nouvelle ; peu de démarches QVT ont été initiées depuis l'ANI de 2013. Cependant cette démarche expérimentale pourrait bien se développer largement étant donné la place de plus en plus omniprésente des conditions de vie au travail et de la prévention des risques psychosociaux.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams