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Les dimensions du droit à  la vie privée en droit positif congolais

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par Jean Robert MUHANZI BISIMWA
Université de Goma - Licence 2014
  

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Section II : LA PROTECTION DE LA VIE PRIVEE A L'ERE DES

NOUVELLES TECHNOLOGIES

Les moyens technologiques de surveillance, de communication et d'information constituent des véritables armes de destruction massive de la vie privée et du coup, fatalement de la démocratie et bien entendu de l'Etat de droit. Déjà en 1990 dans l'arrêt Duarte, le juge LAFOREST de la Cour de cassation française faisait cette importante mise en garde : « La surveillance électronique et les moyens technologiques modernes sont à ce point efficace qu'ils rendent possible, en l'absence de réglementation, l'anéantissement de tout espoir que nos communications et nos secrets restent privés. Une société nous exposant, au gré de l'Etat, au risque qu'un enregistrement électronique permanent soit fait de nos propos chaque fois que nous ouvrons la bouche, disposerait peut-être d'excellents moyens de combattre le crime, mais serait une société où la notion de vie privée serait vide de sens.»58

Les défis spécifiques posés par le progrès technologiques a fait que la notion du droit au respect de la vie privée soit de plus en plus remise en question au fil des années. Ces défis se présentant sous diverses formes, il est important de les analyser selon qu'il s'agit de ceux posés par l'informatique, l'internet, les réseaux et la téléphonie (§1) d'une part, et ceux posés par l'éclatement des médias (§2) d'autre part.

§1. L'INFORMATIQUE, L'INTERNET, LES RESEAUX, LA TELEPNONIE ET LA VIE PRIVEE

L'apparition de l'informatique et de l'internet (1), des réseaux sociaux (2) et de la téléphonie mobile (3) a changé la nature des problèmes posés par la notion de vie privée. Si l'informatisation des données a été généralement considérée comme un progrès, elle s'est aussi accompagnée de dangers liés à la possibilité pour autrui ou un pouvoir institué ou même un fournisseur de service d'avoir un accès non contrôlé aux informations de nombreuses personnes.

58 ANNE PINEAU, Op cit, R. C/ Duarte, 1990, 1RCS, 30

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1.1. L'INFORMATIQUE ET L'INTERNET

Les réseaux informatiques et notamment l'internet introduisent des nouvelles pratiques également susceptible de porter atteinte à la vie privée. Chaque individu est répertorié dans une multitude des fichiers informatiques et de réseaux, de la sécurité sociale, du fisc, de la banque et beaucoup d'autres. Les réseaux de télécommunication désormais sans limite de distance, de capacités ni de temps assurent immédiatement une publicité mondiale à la moindre affaire ou moindre scandale. En 1999, les frasques du Président des Etats-Unis avec une jeune stagiaire ont été connues dans tous leurs détails et immédiatement, partout dans le monde. Les transactions commerciales sur l'internet permettent d'accumuler sur chaque client une série de données capable d'en définir le «profil», c'est-à-dire les goûts et les habitudes d'achat. Au rebours de la tradition qui veut que l'actualité d'un fait s'atténue avec le temps, la mémoire devient permanente. Toute donnée enregistrée peut être stockée pour l'éternité et réutilisée à tout moment. Toutes ces techniques, en réduisant les protections naturelles de la vie privée ont fait de l'internet une importante source d'information et par là un élément majeur dans la facilitation de violation de la vie privée.

Il est vrai, et nous l'avons dit, l'internet permet de rendre accessibles à tous les internautes du monde entier des informations et/ou des images mais il est aussi vrai que pour la plupart, ces informations et/ou ces images sont de nature à porter atteintes à la vie privée des personnes célèbres ou inconnues. A l'exemple du propriétaire du café de BESANCON qui avait en Janvier 1996 mis à la disposition du public via internet, «le grand secret», l'ouvrage sur la maladie du Président Mitterrand publié par son médecin le Docteur GUBLER qui venait d'être interdit par une décision de justice.59

Les atteintes à la vie privée ou au droit à l'image par la diffusion d'images sur le net sont certainement celles qui sont les plus courantes et les plus spécialement spectaculaires. Généralement, ce sont des photos de personnalités en tenue d'Eve qui sont ainsi mises à l'insu de celles-ci sur le net comme on peut simplement le constater en ouvrant juste les pages de publication de certains groupes crées sur des réseaux sociaux dont les membres ne sont pas forcément connus.

Parler de «vie privée» sur un espace public paraît presque incohérent mais pourtant bien réel. Ces nouveaux usages laissent sur la toile de nombreuses données caractérisant la

59 Ord. Réf. Du 18 janvier 1996, conf. en appel CA 1ère ch., 13 mars 1996, 1, J162, obs. B. GIZARDIN Cité par André BERTRAND, op cit. , p 128

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vie privée des internautes qui permettent de les rendre célèbres en quelques clics seulement ! Ainsi, les deux mondes s'entrecroisent pour ne former plus qu'un. Alors que certains obstacles du « monde réel» ont pu être sanctionnés, ils peuvent désormais être contournés dans « le monde virtuel». L'exemple du livre du Docteur GUBLER sur la santé du Président MITTERRAND paraît être le mieux pour illustrer cela. Alors que sa publication avait été interdite, ce livre fut numérisé et mis en ligne sur internet peu de temps après.

Les opinions et/ou les comportements des internautes sont identifiables et peuvent être enregistrés notamment pour la création de bases des données comportementales à des fins marketings, dès lors que les utilisateurs participent à des forums de discussion thématiques ou qu'ils commandent des produits ou des services via le réseau. Quelquefois, ces enregistrements ont lieu de manière plus critiquable par l'accès aux fichiers de connexion ou par l'inscription de cookies par les sites internet sur les terminaux des utilisateurs si ce n'est même par interception illicite de courriers électroniques.

En outre, il se pose encore un problème actuellement avec l'informatique dit « en nuage ». Il s'agit en fait d'un développement relativement récent dans lequel des volumes croissants des données, y compris des données personnelles sont stockées dans un nuage en ligne.60 Lors du stockage, les données personnelles sont transmises sur internet, ce qui constitue déjà un risque pour le contrôle individuel sur ces données. Une fois les données stockées dans ce nuage, ces risques subsistent, par exemple, un fournisseur de nuage peut sans en avertir un usager, déplacer les informations de celui-ci d'une juridiction à une autre, d'un fournisseur à un autre ou d'une machine à une autre.61 De plus, les données personnelles des usagers dans le nuage peuvent subir des modifications dynamiques en termes de service car une entreprise de l'internet se réserve toujours le droit de modifier les conditions ou les politiques de confidentialité sans limitation.

De toute évidence, l'internet pose problème de par son caractère transfrontalier mais, bien qu'il faut considérer l'internet comme un monde sans frontière, constatation qui n'est en rien remise en cause, penser avec un grand «P» pour assurer la protection de la vie privée dans un monde aux rêves utopiques tant au niveau international qu'au niveau national n'est pas impossible. Voilà pourquoi au stade actuel des choses, la nécessité d'une réglementation spéciale introduisant tant soit peu des nouveaux concepts juridiques s'avère être de mise.

60 Toby Mendel et Alii, op cit. , p. 33

61 Ibidem, p. 34

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S'il demeure tout aussi clair que les évolutions technologiques sont généralement bénéfiques pour la société, elles n'en ont pas moins accru les risques en matière de protection de la vie privée. Dans un environnement mondialisé, le traitement de données à caractère personnel ne cesse de progresser. Assurer la libre circulation des données personnelles tout en garantissant le niveau de protection des droits des personnes est une exigence toujours plus forte. C'est pour cette raison qu'il apparaît nécessaire de repenser le processus d'évaluation du caractère adéquat de la protection.

La menace reste présente. Il revient donc à l'Etat de par ses obligations principales en matière des droits de l'homme d'envisager une bonne fois pour toute des mesures palliatives durables.

1.2. LES RESEAUX SOCIAUX

Il n'est plus un secret de constater et d'affirmer actuellement que les atteintes à la vie privée sont facilitées par la toile des réseaux sociaux.62 S'il est vrai que Facebook pourrait bien avoir réussi à devenir irremplaçable pour beaucoup de ses usagers, cela a des implications substantielles pour la confidentialité sur l'internet.63

En effet, les usagers sont vulnérables aux modifications unilatérales apportées par Facebook et aussi par d'autres réseaux sociaux à leurs politiques et pratiques en matière de confidentialité. Les usagers sont si captifs des réseaux sociaux que même s'ils désapprouvent dans le fond leurs politiques de confidentialité, ils ne risquent pas de quitter le réseau. Cela augmente substantiellement le pouvoir des réseaux sociaux sur la vie privée de leurs usagers.

Comme pour le moteur de recherche comme Google, le modèle d'affaire des réseaux sociaux est fondé sur la publicité et il n'y a pas de relation financière directe entre les usagers des réseaux sociaux et ces réseaux eux-mêmes. Toutefois, les réseaux sociaux poussent cette logique plus loin que le moteur de recherche étant donné que les contenus qu'ils produisent sont aussi des contributions des usagers. Comme presque tous les contenus fournis par les usagers des réseaux sociaux sont des informations personnelles et des données privées, il ne paraît pas déraisonnable de penser que les usagers des réseaux sociaux échangent leurs données privées contre un service financier gratuit. Il existe pourtant des relations financières contractuelles entre les réseaux sociaux et leurs partenaires de publicité, qui sont responsables du financement du réseau. En conséquence, les réseaux sociaux sont du point de vue

62 Maître HADDAD SABINE, les réseaux sociaux et les atteintes à la vie privée : Fondements juridiques pour poursuivre (I), in «Lega vox», 2011, p 2

63 Toby MENDEL et Alii, Op cit. p. 37

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commercial naturellement incités à constamment améliorer le ciblage de leur publicité à l'aide des données personnelles de leurs usagers. Il peut y avoir d'autres moyens de générer des recettes au sein des réseaux sociaux par des modèles d'abonnement ou de transactions, mais le gros des recettes de la plupart des grands réseaux continue à provenir de la publicité.64 En conséquence, les données personnelles des usagers des réseaux sociaux sont toujours la monnaie clé, une masse critique qu'il faut obtenir pour que les réseaux sociaux demeurent profitables.

On fait souvent valoir que les usagers des réseaux sociaux consentent explicitement à ces utilisations des données personnelles dans les conditions de service et politique de confidentialité.65 Il se peut que cet argument dégage la responsabilité juridique des réseaux sociaux, mais un consentement éclairé ou de fond présupposerait que les usagers soient conscients de la politique de confidentialité, capable de comprendre le langage juridique complexe employé dans ces politiques, disposés à prendre le temps de lire des politiques et capable d'accepter certaines parties de la politique de confidentialité tout en rejetant d'autres. Cependant, même si les usagers agissent ainsi, les politiques de confidentialité peuvent être modifiés à tout moment, ce qui fait que même l'usager le mieux informé est vulnérable aux modifications soudaines, inattendues et unilatérales apportées à la politique de confidentialité par les fournisseurs des réseaux sociaux.

Dans toutes les recherches effectuées pour ce travail, cette dimension d'organisation interne au sein des réseaux sociaux n'a cessé de réapparaître comme un obstacle majeur à la mise en place de protections plus efficace à la vie privée des usagers.

1.3. LA TELEPHONIE MOBILE

L'explosion de l'utilisation de l'internet au 21ème siècle a contribué à beaucoup des préoccupations actuelles concernant la confidentialité, la protection des données et de la vie privée sur les réseaux de téléphonie mobile.

En comparaison avec les communications sur ligne fixe, les communications mobiles présentent plusieurs attributs qui ont un effet négatif sur la confidentialité. Ces attributs comprennent le numéro international unique d'identification d'appareil (IMEI) et le numéro unique de la carte SIM (IMSI), l'aptitude à déterminer régulièrement la localisation géographique des appareils mobiles et l'aptitude des tiers à intercepter les communications mobiles sans fils lors de leur transmission. Ces préoccupations pour la confidentialité qui

64 NDUKUMA ADJAYI KODJO, Cyberdroit : telecoms, internet, contat de E-Commerce. Contribution au Droit congolais, Kinshasa, PUC, 2009, p 76

65 Toby MENDEL et Alii, Op cit. p. 40

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concernent spécifiquement l'internet mobile et les communications sur téléphone portable doivent toutes être prises en considération en sus des préoccupations existantes pour la confidentialité sur internet.

Au-delà des préoccupations spécifiques pour la confidentialité concernant les réseaux mobiles eux même, les Smartphones posent plus de problème de confidentialité que les téléphones mobiles moins intelligents. Les Smartphones sont généralement utilisés comme appareils de l'internet mobile et sont habituellement capables de transférer des quantités beaucoup plus grande des données que les téléphones mobiles ordinaires grâce à ce qu'on appelle aujourd'hui les réseaux mobiles de deuxième (2G), troisième (3G) et quatrième (4G) génération. Cela veut dire qu'ils sont aussi capables de transférer beaucoup plus de données personnelles sur l'internet public qu'un téléphone mobile ordinaire. De plus, ces téléphones sont conçus pour être constamment connectés à l'internet. Plus encore, divers services sont intégrés dans les Smartphones qui envoient régulièrement des informations sur l'internet souvent à l'insu de l'utilisateur du téléphone.

S'il est fréquemment présumé que ces préoccupations ne s'appliquent qu'aux téléphones intelligents (Smartphones), elles s'appliquent aussi tout autant à tout appareil mobile capable d'accéder à l'internet via les réseaux de téléphonie mobile. Ainsi, il faut prendre en considération ces préoccupations en tenant compte de la confidentialité dans le monde en développement et le monde développé pour tout appareil capable d'accéder à l'internet. Elles s'appliquent aussi bien pour un agriculteur de Rusthuru qui envoi des courriels à sa famille sur un vieux Nokia qu'à un avocat d'affaire de Bruxelles qui se sert d'un IPhone pour contacter son client.

Comme dans le cas des réseaux sociaux, les concepteurs des téléphones et des plates-formes de l'internet mobile trouvent un intérêt commercial à obtenir le maximum d'informations personnelles de leurs usagers. Plus ils en savent sur leurs usagers, plus rentable a des chances d'être la publicité ciblée sur les plates-formes de l'internet mobile et le marque de téléphone, surtout que la grande partie des données collectées sur les téléphones intelligents (Smartphones) est stockée sur le téléphone pendant une durée non spécifiée et l'usager n'a guère de contrôle sur leur existence ou leur suppression ce qui suppose que si le téléphone est perdu, volé ou simplement pris à son propriétaire, les implications pour sa vie privée se relève grave encore que pour le concepteur, l'accès aux données lui est facile par un simple clic seulement.

C'est en fait le cas d'un Cabinet d'assistance judiciaire de la ville de GOMA qui est saisi d'un cas de ce genre : un homme demande à son ami de lui transférer une chanson par

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Bluetooth. Confiant en lui, l'ami lui passe son téléphone. Ironie du sort, plutôt que de se limiter à l'objet de sa demande, le Monsieur en profite pour se transférer des données supplémentaires se trouvant dans la carte mémoire de son ami et en particulier ses appels téléphoniques. Il en a sélectionnés ceux passés avec des femmes, pour lesquels il fait actuellement une large diffusion pour diffamer son ami [...] la victime a consulté le cabinet pour initier une procédure judiciaire contre son ami...66

Outre le problème posé par l'informatique, l'internet, les réseaux et la téléphonie, la prolifération des médias constitue, elle aussi un danger assez fort en ce qui concerne la vie privée des individus. L'ingérence des médias dans la sphère privée devient de plus en plus remarquable qu'elle déclenche un débat qu'il convient d'analyser.

§2. LES MEDIAS ET LA VIE PRIVEE

L'irruption de la vie privée dans le champ médiatique est actuellement générale : les émissions de téléréalité, l'actualité politique, l'image, la starisation,67... Tout un chacun, personnalité en vue ou simple citoyen anonyme, expose à son insu ou de son plein gré, faits et gestes qui oscillent en permanence entre sphère privée et sphère publique.

Le rôle de la presse est d'informer les citoyens pour leur permettre de juger. Il est aussi d'obliger les gouvernants à agir dans la transparence et de les aider aussi à éviter certaines tentations du pouvoir. Au nombre de ces valeurs, figure la protection de la personnalité d'autrui, notamment l'obligation de respecter la vie privée de l'individu admise comme l'une des limites possibles à la liberté de la presse. En effet, la frontière vie publique et vie privée est souvent confuse. L'équilibre entre presse et vie privée dépasse ainsi la protection des personnes pour devenir un délicat enjeu de société et mettre en cause les libertés et le fonctionnement même de la démocratie.

C'est dans ce cadre que le CDH conclu dans Mosley C. Royaume-Unis ; affaire qui avait trait à la publication de photographies privées de Max Mosley, alors Directeur de la fédération internationale de l'automobile, se livrant à des activités à caractère sexuel sous le titre « le patron de la F1 participant à une sinistre orgie nazie avec cinq prostituées », que le R-U a, à travers ce journal bel et bien violé la vie privée et a porté atteinte à l' honneur et à la

66 Source orale privée, obtenue le 21 Septembre 2015 à 14h 30

67 Christophe BIGOT, Médias et vie privée : Problèmes politiques et sociaux, questions de communications, 2011, p 347

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réputation de Mosley parce que le journal s'était trompé en évoquant une soirée sur le thème « Nazi », ce qui en aurait fait une affaire publique.68

L'équilibre entre médias et vie privée est un problème de société dont la complexité croissante résulte des techniques nouvelles, des pratiques commerciales des médias et de ce qu'il est convenu d'appeler les politiques de communication.69

En droit congolais, la liberté de la presse étant une composante de la liberté d'expression est garantie par la constitution. A l'article 23, la constitution congolaise dispose : «Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit implique la liberté d'exprimer ses opinions ou ses convictions notamment par la parole, l'écrit et l'image, sous réserve du respect de la loi, de l'ordre public et des bonnes moeurs ». En outre, l'article 8 de loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités d'exercice de la liberté de la presse envisage cette liberté comme le droit d'informer, d'être informé, d'avoir ses opinions, ses sentiments et de les communiquer sans aucune entrave quel que soit le support utilisé, sous réserve du respect de la loi, de l'ordre public, des droits d'autrui et des bonnes moeurs.70 La liberté de la presse est généralement admise comme une condition nécessaire pour l'exercice des autres libertés liant le caractère précieux de cette liberté à la profession de ceux qui la mettent en branle. Mais alors, si le principe de la liberté d'expression, qui comporte aussi bien le droit pour les médias de diffuser des informations que celui pour le public d'en recevoir, n'a pas une valeur absolue, ses limites doivent néanmoins présenter un caractère exceptionnel.

La presse est en fait voué à lever les secrets. Sa raison d'être est bien évidement de divulguer ce qui peut rencontrer l'intérêt du public. Voilà pourquoi il est établi que la presse est libre. Mais, cette liberté se heurte inévitablement à la protection de la vie privée.71

Cependant, les nouvelles techniques de communications réduisent l'espace de la vie privée. Les médias disposent eux-mêmes de nouvelles techniques d'accès très puissantes. Des téléobjectifs captent sans peine l'image de la veuve du Président KENNEDY à la plage ou les ébats imprudents de jeunes princesses monégasques. Des microphones hypersensibles enregistrent des conversations dans les lieux clos. Des confidences téléphoniques sont surprises sans peine. Le traitement numérique de documents écrits, d'images ou de sons

68 Comité des droits de l'homme, Mosley c. Royaume-unis (Article 17-Droit à la vie privée) Rév. Trim. Drh(55/2003)

69 Christophe BIGOT, Op cit., p.345

70 Article 8 de loi n°96-002 du 22 juin 1996 sur les modalités d'exercice de la liberté de la presse

71 Henri PIGEAT, Presse et vie privée in « Groupe d'études société d'information et vie privée », chap.12 disponible sur http://www.asmp.fr consulté le 04 Février 2015

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permet de généraliser des facilités de montages connues depuis longtemps dans la vidéo. Au prix de manipulations diverses et des copies plus ou moins diverses, la vérité des documents devient aléatoire et la vie privée des personnes en souffre. La problématique de la presse électronique met en péril l'efficacité de la protection de la vie privée en ce qu'elle dénote d'une grande difficulté sur la preuve des délits.

Les nouvelles techniques de communications ont également favorisé la multiplication de nouveaux médias, radio, télévision, services en lignes de plus en plus spécialisés. La liberté d'expression y gagne généralement dans un premier temps. Il n'est pas certain qu'il en aille de même pour la qualité de l'information. Ce qui explique très souvent des ingérences inexpliquées dans la vie privée des individus. Dès lors, la surexposition médiatique de la sphère privée fait écho à une pratique juridique contrainte à mesurer et délimiter le point d'équilibre entre «le droit à la vie privée » et « le droit à l'information ».

Face aux problèmes que pose l'éclatement des technologies de l'information et de la communication (TIC) sur le droit à la vie privée des personnes, il se dégage une nécessité de s'interroger sur les obligations spécifiques des Etats, en l'occurrence la RD Congo (II. a) dans la recherche des garanties accordées à ce droit. Cependant, le droit à la vie privée étant relatif au regard des diversités culturelles et sociologiques propre à chaque Etat, les mesures protectrices peuvent se présenter différemment. C'est pourquoi, il importe de passer au peigne la vie privée en droit comparé (II. b) pour interroger les prévisions des législations étrangères sur cette question.

II. A. LES OBLIGATIONS SPECIFIQUES DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO DANS LA MISE EN OEUVRE DU DROIT A LA VIE PRIVEE

Le droit international relatif aux droits de l'homme énonce les obligations que les Etats sont contraints de respecter. Ainsi, en devenant partie aux traités internationaux en l'occurrence la DUDH et le Pacte, la République Démocratique du Congo s'est engagée à respecter (A), protéger (B) et réaliser (C) les droits de l'homme.

A. L'obligation de respecter

L'obligation de respecter appelée aussi obligation négative signifie que l'Etat doit se retenir ou s'abstenir de toute immixtion illégale dans un droit garantit aux individus sans respecter certaines conditions. Cette obligation contraint l'Etat Congolais à adopter une

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attitude passive et à ne pas intervenir. L'adjectif « illégale » signifie qu'aucune immixtion ne peut avoir lieu, sauf dans les cas envisagés par la loi.72 Les immixtions autorisées par l'Etat ne peuvent, elle aussi, avoir lieu qu'en vertu d'une loi qui doit être conforme aux dispositions, aux buts et aux objectifs du pacte. S'agissant du droit à la vie privée, l'Etat congolais doit donc s'abstenir lui-même d'agissements non conforme et s'assurer que les autres entités ne s'y livrent. Le devoir de respect donne donc aux titulaires du droit à la vie privée (toute personne), la possibilité de se défendre contre l'Etat.

B. L'obligation de protéger

L'obligation de protéger appelée obligation de prévention ou obligation positive, exige à la République Démocratique du Congo d'empêcher les violations par d'autres intervenants, d'un droit reconnu aux individus. Cette obligation dite de prévention est violée si le résultat n'est pas atteint et les mesures adoptées ne sont pas suffisantes. A cet égard, le Comité des droits de l'homme de l'ONU dans son observation générale n°16 sur l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, tient à faire observer que les parties au pacte (dont la RDC) sont tenues en considération de l'article 17, protéger les individus contre les immixtions illégales et arbitraires. Cela signifie que c'est précisément dans la législation des Etats qu'il faut avant tout prévoir la protection des droits énoncés dans cet article.73

En s'abstenant a priori d'être à la base de ces violations, l'Etat congolais doit s'assurer que les perquisitions domiciliaires soient limitées à la recherche des éléments de preuve nécessaires et que celles-ci ne donnent pas lieu à des vexations, que la surveillance par des moyens électroniques ou autres, que l'interception des communications téléphoniques, télégraphiques ou autres, l'écoute et l'enregistrement des conversations soient interdits, que les fouilles soient faites d'une manière compatible avec la dignité de la personne qui en est l'objet,... Dans tous les cas mentionner, ce ne sont que des mesures efficaces prises au préalable qui doivent s'assurer que ces interdictions ont bel et bien été prises en compte dans la pratique.

C. L'obligation de réaliser

Les Etats sont tenus de garantir les droits de l'homme, c'est-à-dire de veiller à ce que ceux-ci deviennent le plus possible une réalité pour leurs titulaires. Cela nécessite, selon les

72 Observation générale n°16 : Article 17 (Droit au respect de la vie privée), in office of the commissionner for Human right, Vol I, 32e session, adoptée le 8 Aout 1988, par. 2

73Ibidem, par. 2

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circonstances, des mesures légales ou administratives qui créent les conditions juridiques, institutionnelles et procédurales nécessaires pour que le droit puisse être pleinement réalisé.74

L'article 17 du pacte prévoit le droit de toute personne à être protégée contre les immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile et sa correspondance ainsi que contre les atteintes illégales à son honneur et à sa réputation.75

Les obligations imposées par cette disposition exigent à la RD Congo l'adoption des mesures d'ordre législatif ou autres, destinés à rendre effective l'interdiction des immixtions et atteintes à la protection de ce droit. L'Etat congolais doit donc elle-même s'abstenir d'agissements non conformes et créer le cadre législatif nécessaire pour empêcher que des personnes physiques ou morales ne s'y livrent.76 Voilà pourquoi le comité estime fondé le fait que doivent figurer dans les rapports, des renseignements sur les autorités et organes prévus par le système juridique interne du pays qui ont compétence pour autoriser les immixtions admises par la loi.

La RD Congo est donc tenue à mettre en place des mesures compatibles avec les obligations inhérentes à la Déclaration et au Pacte. Le système juridique national servira alors à fournir la protection juridique principale du droit à la vie privée garantit par le droit international. Ainsi, lorsque les procédures juridiques internes ne remédient pas aux violations des droits, les mécanismes et procédures pour traiter les plaintes individuelles et des groupes au niveau régional ou international seront alors déclencher pour veiller à ce que les normes internationales de droits de l'homme soient effectivement respectées, mise en oeuvre et appliquées au niveau local.77

II. B. LE DROIT A LA VIE PRIVEE EN DROIT COMPARE

Etant donné que toutes les personnes vivent en société, la protection de la vie privée est nécessairement relative.78 L'impact réel des mesures protectrices est souverainement apprécié par les autorités publiques de chaque Etat destinées à rendre effectif l'exercice d'un droit. Ainsi par exemple, la protection de la vie privée en droit Américain (II.B.1) ne s'apprécie pas de la même façon en droit Chinois (II.B.2). De la même manière, le contenu de

74 Me Nyaluma MULANGO Arnold, Les obligations de l'Etat dans la mise en oeuvre des droits de l'homme in «Manuel de formation des défenseurs des droits de l'homme» ; DSB Calabi, Juillet 2009, p. 10

75Observation générale n°16 : Article 17 (Droit au respect de la vie privée), in office of the commissionner for Human right, Vol I, 32e session adoptée le 8 Aout 1988, par. 1

76 Ibidem, par. 9

77 Me Nyaluma MULANGO Arnold, Op cit., p. 99

78 Observation générale n°16 : Article 17, Op cit., par. 7

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la vie privée en droit Sud-Africain (III.B.3) ne serait pas forcément identique que celui du droit Nigérian (III.B.4) par exemple.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon