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De l'efficacité des limites du pouvoir de révision constitutionnelle en droit positif congolais

( Télécharger le fichier original )
par Aaron DJENGO
Université de Kinshasa - Licence 2015
  

Disponible en mode multipage

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EPIGRAPHE

« On parle du pouvoir constituant comme s'il était toujours présent ; quand la Constitution d'un peuple est établie, le pouvoir disparait, c'est la parole du créateur qui commande une fois pour gouverner pour toujours ; c'est sa main toute-puissante qui se repose pour laisser agir les causes secondes après avoir donné le mouvement et la vie à tout ce qui existe. »

PORTALIS cité par SERRIGNY, Traité du droit publicdes Français, Paris, 1846, p. 59.

REMERCIEMENTS

Au terme de nos études universitaires, il nous incombe de nous acquitter d'un agréable devoir : celui d'exprimer notre gratitude à ceux qui, d'une manière ou d'une autre, ont contribué à leur succès.

Tout naturellement, nous pensons à nos père et mère Joseph DJENGO Y'ONENGU et Henriette BANZE NDAMBA, pour les constantes attentions : les nécessaires, les déterminantes, dont nous porterons les marques jusqu'à notre dernier soupir.

Par ailleurs, notre gratitude s'adresse au professeur Jacques DJOLI ESENG'EKELI qui a bien voulu assurer la direction de ce mémoire. Nous nous souviendrons toujours de nos contacts aisés et humains, de sa simplicité si attachante sur fond d'une rigueur et d'une exigence scientifiques propres à former un juriste mieux, un chercheur en droit. A cet hommage, nous associons l'assistant Daniel MBAU SUKISA pour son encadrement efficace.

Dans cette optique, nous sommes redevable à tous les professeurs de la faculté de droit, spécialement ceux de droit public interne dont les diverses méthodes et appréhensions du droit apparemment contradictoires, constituent aujourd'hui notre richesse scientifique et suscitent en nous le gout du droit constitutionnel. Par la même occasion, que les assistants Clovis ELONGAMA, Patrick MENDE et Laurent ONYEMBA trouvent, à travers ce mémoire, l'expression de nos sincères remerciements pour les divers concours.

Puisse la communauté chrétienne « LA BONTE DIVINE » accepter notre parfaite reconnaissance pour son soutien spirituel. Ainsi pensons-nous au pasteur Timothée IFOLI et ses collaborateurs Doudou MATABO et Fidèle BONKOSO.

En terminant, nous serions ingrat si nous omettons nos oncles et tantes notamment Roger IMPONGA, Tina BANZE et BOSOLI WETSHI. Aussi, l'amitié constante et agissante de Stav SAMIBWA, Arnaud KATASI, Arsène ITOFE, Glodi MUBELA, Bled NZAMA, Olivier ANGOKO, Jonathan SABANGA, Emmanuel MAGBUNDUKU et Emmanuel BOKO KOFI mérite d'être souligner.

LISTE DE PRINCIPALES ABREVIATIONS

ART 

: Article

DES 

: Diplôme d'études supérieures

EUA 

: Editions universitaires africaines

JO 

: Journal officiel

LGDJ 

: Librairie générale de droit et de jurisprudence

MC 

: Moniteur congolais

MPR 

: Mouvement populaire de la révolution

PUAM 

: Presses universitaires d'Aix-Marseille

PUB 

: Presses universitaires du Benin

PUC 

: Presses universitaires du Congo

PUF 

: Presses universitaires de France

PUK 

: Presses de l'Université de Kinshasa

RADG 

: Revue africaine de la démocratie et la gouvernance

RDC 

: République Démocratique du Congo

RFDA 

: Revue française de droit administratif

RFDC 

: Revue française de droit constitutionnel

RJPIC 

: Revue juridique et politique. Indépendance et coopération

UNIKIN 

: Université de Kinshasa

VOL. 

: Volume

INTRODUCTION GENERALE

1. Problématique

La question des limites du pouvoir de révision constitutionnelle passe pour l'une des plus sensibles et des plus intéressantes du droit constitutionnel contemporain. Elle mérite approfondissement pour sonder les causes de la rébellion quasi permanente contre les clauses intemporelles. Elle se pose avec acuité en Afrique subsaharienne où la banalisation de la révision constitutionnelle est monnaie courante1(*). Ainsi donc, la présente étude tourne autour de l'efficacité des limites du pouvoir de révision constitutionnelle en droit positif congolais. Afin de mieux évaluer le problème, il est impérieux de faire l'état de la question avant de fixer l'objet de la présente étude.

1.1. Etat de la question

Depuis 1960, la RDC a connu une multitude de textes constitutionnels2(*) dont le nombre varie manifestement selon les auteurs3(*). Ce phénomène de production constitutionnelle abondante s'est particulièrement accentué tant par la succession des événements qui jonchent l'histoire politique de la République que par les révisions constitutionnelles intempestives ou astucieuses progressivement identifiées par la doctrine sous les expressions de changements constitutionnels4(*), mutations constitutionnelles5(*) et même mobilité constitutionnelle6(*). Ainsi, la RDC accuse une inflation de textes constitutionnels qui lui vaudrait la palme d'or7(*).

Loin de procurer l'euphorie, l'abord pratique de la production constitutionnelle congolaise cède à la dysphorie. Cette affirmation trouve indistinctement sa justification dans les analyses de certains auteurs8(*) qui stigmatisent le manque de constitutionnalisme dans le mouvement constitutionnel congolais. Ces analyses attestent que les textes constitutionnels ont souffert depuis belle lurette d'un défaut de suprématie et de légitimité si bien qu'ils apparaissent comme de simples emplâtres sur des jambes de bois qui aident à prendre en otage une population par une classe politique irresponsable, majoritairement incompétente et corrompue9(*).

Du coup, ces textes constitutionnels se révèlent incapables de domestiquer la violence, d'arrêter la poussée de l'arbitraire et d'étreindre le jeu politique dans les règles juridiques tant il est vrai qu'au lieu d'obliger les acteurs à formuler de plus en plus leurs interventions en termes juridiques, ils font l'objet des manipulations dictées par les humeurs de ces derniers et matérialisées par des modifications constitutionnelles inopportunes.

Dès lors, la RDC à l'instar de nombreux Etats africains, est restée une terre fertile des fraudes à la Constitution, l'antre des referenda pour l'adoption frauduleuse de « nouvelles Constitutions », des révisions intempestives des Constitutions et des dispositions protégées10(*). Il va de soi que dans ces conditions, la théorie des limites du pouvoir de révision constitutionnelle ne connaisse pas d'application aisée sur l'espace congolais.

Ce sont ces modifications excessives qui ont fait dire à Ambroise KAMUKUNI qu'au titre des révisions constitutionnelles, la RDC a vraiment atteint des cimes insoupçonnées dans l'art des productions constitutionnelles modificatives. Si certains ont été mineures et ont servi à modifier un ou quelques aspects des dispositions, d'autres, qualifiées de majeures, auront fait subir aux textes antérieurs une telle chirurgie qu'ils y ont parfois perdu tous leurs membres11(*).

Pour mémoire, à l'exception de la Constitution du 18 février 2006, les Constitutions définitives antérieures n'ont pas consacré des limites matérielles imposables au pouvoir de révision constitutionnelle. Dans la Constitution du 1er aout 1964, seuls les articles 175 à 178 concernaient la révision constitutionnelle, alors que dans la Constitution du 24 juin 1967, cette question est traitée par les articles 74 et 75, auxquels il faut éventuellement ajouter l'article 28. Il s'ensuit que les devancières de l'actuelle Constitution ont uniquement prévu les limites de forme. Est-ce pour autant une ouverture pour une révision totale de ces Constitutions ?12(*)

En effet, la Constitution du 1er aout 1964 a connu à la suite des crises politiques comme le coup d'Etat de novembre 1965, les révisions irrégulières à l'instar de l'ordonnance-loi n°7 du 30 novembre 1965 accordant des pouvoirs spéciaux au président de la République13(*), l'ordonnance-loi n°66-92 bis attribuant le pouvoir législatif au président de la République14(*), l'ordonnance-loi n°66-621 du 21 octobre 1966 relatif aux pouvoirs du président de la République et du parlement15(*) et l'ordonnance n°66-612 du 27 octobre 1966 conférant au président de la République les pouvoirs du premier ministre16(*).

De même, la Constitution du 24 juin 1967 n'était pas à l'abri du révisionnisme frénétique. Elle fit l'objet de plusieurs révisions constitutionnelles dont les principales instituent frauduleusement de nouvelles Constitutions. Quant à elle, la Constitution du 18 février 2006 vit déjà ses péripéties révisionnistes. En neuf ans d'existence, elle connait plusieurs tentatives de révision et une initiative réussie.

Ainsi donc, si par enchantement les Constitutions congolaises ont emboité le pas aux Constitutions occidentales sur les mécanismes d'encadrement juridique du pouvoir de révision constitutionnelle, elles n'ont pourtant transféré la dimension métaphysique de ce droit comparé si bien que le suivisme et le servilisme qui caractérisent le mouvement constitutionnel congolais n'ont pas permis l'ancrage du droit importé dans les moeurs des dirigeants politiques. Cette difficulté s'explique non seulement par le fait qu'en matière constitutionnelle l'Afrique a rarement innové, mais aussi parce que la réception de ce droit étranger est restée superficielle17(*). En effet, on ne peut prétendre transférer un droit seulement en transférant le texte. Le droit c'est d'abord les représentations associées au texte. Or, ces représentations ne s'exportent pas18(*).

Dès lors, il est inopportun de s'interroger si le cycle aussi inimitable de production des Constitutions peut aider à l'instauration du constitutionnalisme dans le pays19(*) ; d'autant plus que le fait pour un pays d'avoir une Constitution ne signifie pas que le gouvernement de ce pays obéit aux règles du constitutionnalisme20(*).

La faiblesse de ces différentes Constitutions aura aussi été celle des limites du pouvoir de révision constitutionnelle. Depuis toujours, ces limites tant explicites qu'implicites n'ont pas pu enserrer l'action du pouvoir de révision dans les règles juridiques. Si bien que même l'actuelle Constitution n'offre pas de garantie d'efficacité du cadre juridique dans lequel le pouvoir de révision se trouve fixé. Ainsi, cette protection juridique demeure un leurre, mieux, une utopie.

1.2. Objet de la recherche

Malgré son image flétrie21(*), la révision constitutionnelle participe de la longévité de la Constitution. Julien LAFERRIERE écrivait à ce propos :

« La notion même de la Constitution implique la possibilité de sa révision. Juridiquement la Constitution est une loi ; or, de par sa nature, la loi est un acte perpétuellement modifiable. Politiquement, la Constitution fixe l'organisation de l'Etat en fonction des données politiques et sociales existant à un moment déterminé ; ces données étant destinées à se modifier, on ne peut prétendre fixer l'organisation de l'Etat par une formule invariable. Enfin, là où la Constitution procède du principe de la souveraineté nationale, son immutabilité serait inconciliable avec ce principe. S'interdire de modifier sa Constitution serait, de la part de la nation, renoncer à l'élément essentiel de sa souveraineté »22(*)

Plus d'un demi-siècle plus tard, Philippe ARDANT émet sur la même longueur d'ondes en notant : « il n'est pas de Constitution qui puisse être définitive. Il faudra donc lui apporter des retouches, des compléments, des adaptations. Les constituants eux-mêmes devront avoir la sagesse de prévoir et d'insérer dans leur oeuvre les procédures qui permettront de réparer ses imperfections et l'usure du temps23(*) ». Francis DELPEREE constate avec enthousiasme que sur cette question, la Constitution parle d'elle-même24(*).Elle établit son propre statut en déterminant de manière précise qui révise la Constitution, ce qui peut être révisé et quelle est la procédure à observer de manière impérative. Personne, gouvernement ou gouverné, ne peut méconnaitre ce message25(*).

A l'instar de la Constitution française de 1958, la Constitution du 18 février 2006 organise une procédure de révision plus exigeante que la procédure législative ordinaire et fixe certaines limites à son usage26(*). Diversifiées, les limites prévues sont formelles, temporelles et matérielles. Les matières prévues à l'article 220 et les dispositions auxquelles ce dernier renvoie, sont dites par la doctrine des limites explicites et implicites, et constituent ce que L. HAMON appelle à juste titre « les éléments essentiels de l'ordre établi par la loi fondamentale, c'est-à-dire ceux qui font son identité27(*) » ; le pivot, le socle et l'armature de toute l'architecture constitutionnelle28(*).

Aussi convient-il de noter que toutes ces limites ne sont pas le fruit d'une invention intellectuelle aléatoire. Elles résultent du compromis historique matérialisé par l'accord global et inclusif de SUN CITY, et constituent des réponses que le constituant tente d'apporter à tous les dérapages qui ont jalonné l'évolution constitutionnelle du pays. Tels sont les cas des récurrentes crises politiques, et même du détournement du rôle des textes constitutionnels qui, selon J-L ESAMBO, était désormais la protection des dirigeants au pouvoir ou de ceux qui aspirent29(*). Leur consécration laisse indubitablement penser que la Constitution de 2006 porte l'empreinte de son temps. Ces limites répondent donc à un défi majeur, celui de la protection juridique de la Constitution du 18 février 2006, mieux le respect de la souveraineté du peuple.

Cependant, l'opinion émise par Jacques DJOLI30(*) sur l'Afrique postcoloniale ne laisse indifférente la RDC sous l'empire de l'actuelle Constitution. Celle-ci est, dès l'année suivante de sa promulgation bousculée par les appétits voraces des acteurs politiques, dont les agissements sont venus mettre en doute sa capacité de résistance. C'est ainsi que J-L ESAMBO, l'un de Ses rédacteurs, arborait déjà son scepticisme quand il écrivait : « on peut en effet douter de la capacité de la Constitution de 2006 à résister aux épreuves du temps. En quatre années d'existence, cette Constitution est déjà manipulée par les gouvernants qui semblent s'y soumettre difficilement 31(*) ». En neuf ans d'existence, elle connait plusieurs tentatives de révision et une initiative réussie. Toutes ces péripéties révisionnistes laissent planer le doute sur sa capacité de résistance face à certaines manipulations pré-électorales32(*).

Il s'ensuit que la simple existence de ces limites ne garantit pas une telle protection. Encore faut-il que les dispositions constitutionnelles qui les renferment soient appliquées ou efficaces. KEMAL GOZLER écrit : «  l'efficacité de la norme se détermine par la correspondance entre la norme et les comportements de ses destinataires. Elle s'apprécie par le fait qu'elle est suivie ou obéie par les sujets qui en sont destinataires. Sa recherche implique une comparaison entre le contenu de la norme et les comportements effectifs de ses destinataires 33(*)». Et DEBBASCH de renchérir : « non appliquée, la meilleure des Constitutions serait un exercice de style inutile, voire une tromperie vis-à-vis du peuple qui en est le destinataire34(*)».

S'il faut par simple connivence affirmer que les limites consacrées par le constituant de 2006 sont efficaces, il faut néanmoins reconnaitre que cette efficacité ne dispose d'aucune garantie. Ce qui justifie l'interrogation suivante : Les limites imposées au pouvoir de révision par le constituant de 2006 sont-elles efficaces en l'absence d'une quelconque garantie ? C'est ce qu'il convient de démontrer.

En réalité, une Constitution ne prend son sens et sa valeur que par l'application qui en est faite35(*). C'est le gage de son efficacité. Or, l'assurance d'une telle application implique l'existence des sanctions qu'encourt l'emprunt d'une démarche contraire. Donc, si en l'absence d'une quelconque sanction, la Constitution du 18 février 2006 est l'objet des tentatives révisionnistes ou des révisions qui violent les limites qu'elle a prescrites, et brisent le subtil équilibre qu'elle a consacré, elle n'est donc pas efficace, encore moins dans les dispositions qui restreignent l'action du pouvoir de révision. Dans ces conditions, sans toutefois éluder la question de la justification d'une telle inefficacité, n'est-il pas permis d'envisager un autre mécanisme de protection de la constitution dans le contexte de sa révision ?

2. Revue de la littérature

Dressant le bilan de trente années de pratique constitutionnelle sur le continent noir, Pierre François GONIDEC s'interrogeait déjà sur l'utilité même des Constitutions africaines, laissant ainsi poindre son scepticisme sur l'évolution du constitutionnalisme africain36(*). Curieusement, cette interrogation prémonitoire et ce scepticisme averti valent encore leur pesant d'or, particulièrement sur la question de la révision car, l'Afrique est restée un espace qui «  adopte, remet en cause, suspend, abroge, puis renouvelle la Constitution à son souhait37(*) ».

Ce peut être pour cette raison que la question de l'exercice du pouvoir de révision constitutionnelle domine la littérature constitutionnelle et les réflexions sur le continent africain en général38(*), et en RDC en particulier39(*). Cyrille GOUGBEDJI en sait assurément quelque chose, puisqu'il note : « il n'y a pas de matière qui ait soulevé plus d'intérêt et de polémiques pour les chercheurs sur le nouveau constitutionnalisme africain que les questions relatives à l'exercice du pouvoir politique et à la révision constitutionnelle40(*) ». L'ordre constitutionnel se trouve constamment menacé41(*)sur ce continent par les querelles relatives à l'accession au pouvoir et par la mise en oeuvre que les représentants du peuple font de la souveraineté nationale dont l'exercice des prérogatives leur est délégué par la Constitution, enchaine-t-il.

En Afrique, ces altercations, souvent entre la majorité et l'opposition, s'explique par l'image bilieuse de la révision constitutionnelle : en effet, ce mécanisme d'adaptation de la Constitution a perdu toutes ses vertus d'adaptations. Il n'est plus un moyen de prise en compte du dynamisme de la vie politique et sociale, de rectification des erreurs et insuffisances relevées au cours de la mise en application du texte constitutionnel et d'amélioration des mécanismes institutionnels42(*). Il n'est encore moins initié dans la rationalité et traduit en revanche l'émergence des intérêts politiques des uns et des autres, ne laissant aucune place à une révision innocente de la Constitution, dont Jean WALINE doutait déjà de l'existence43(*).

Dans ces conditions, qu'une Constitution africaine puisse évoluer sans rupture de légalité et sans faire l'objet de multiples révisions gênantes, ce serait donc une avancée considérable44(*). D'autant plus que généralement, en dépit de quelques singularités, le pouvoir de révision est intervenu pour ré-constitutionnaliser certains instruments du présidentialisme déconstitutionnalisés et pour en introduire de nouveaux, renchérit Stéphane BOLLE45(*).

S'il faut restreindre l'analyse à la RDC, le phénomène est presque similaire. C'est possiblement Jacques DJOLI qui mesure mieux la portée de cette corrélation dans un article fraichement publié : « nos Constitutions semblent fades, limitées à trancher la question du pouvoir et des mandatures. En révisions permanentes, elles traiteront toujours des mandats d'un président, des rapports de ce président avec les autres centres de décisions, des prérogatives du président et de ses ascendants sur les chambres élues46(*)... »

Et Philippe BIYOYA de compléter :«  dans ces cas, la révision constitutionnelle ici envisagée opère comme une stratégie de conservation des pouvoirs issus d'un processus électoral lui-même perçu comme une stratégie de sortie de crises politiques graves , quand ce ne sont pas des guerres civiles ou insurrectionnelles éprouvantes. Le problème en ce moment serait celui de l'impression d'instrumentalisation de la Constitution que donnerait la technique de révision, et par ricochet, le problème plus fondamental de la fonction politique, économique et sociale de la Constitution dans la politique africaine47(*) ».

Partant, le tableau sombre que dresse Evariste BOSHAB est donc fondé : « la révision constitutionnelle passe pour un tabou inviolable, surtout en Afrique subsaharienne où sa simple évocation soulève des passions et suscite des réactions inexplicables. Une lourde suspicion pèse sur toute révision constitutionnelle depuis que l'épidémie de conférences nationales souveraines a redonné voix au chapitre aux peuples autrefois bâillonnés48(*). »

D'où l'intérêt d'affirmer avec Dieudonné KALUBA que le contrôle de constitutionnalité reste ouvert lorsqu'une révision constitutionnelle est susceptible de dépasser les limites matérielles imposées par le constituant de 200649(*). C'est donc un mécanisme de neutralisation de toute suspicion autour de la révision constitutionnelle.

3. Hypothèses de travail

Comme on le sait, l'hypothèse, de façon simple, est une explication anticipée du ou des phénomènes observés. Elle est une invention du chercheur qui insère, à titre provisoire, la production survenue dans les principes, les lois, la théorie déjà connus avant de soumettre cette invention à la rigueur de la science50(*).

Dans la Constitution du 18 février 2006, l'efficacité des limites imposées au pouvoir de révision n'est pas garantie. C'est ce qui explique que toutes les expériences de révision enregistrées font l'objet des suspicions et des contestations justifiées par la nécessité de respecter le texte constitutionnel dans ce contexte de sanction imprévue. Cette situation déconcertante accuse en effet la pertinence d'une difficulté globale liée à l'inapplicabilité des dispositions constitutionnelles en RDC.

En somme, deux hypothèses se dégagent :

Ø L'absence de contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle comme garantie de l'efficacité et, implicitement ;

Ø Le risque permanent de non-respect des limites consacrées débouchant sur la crise de la norme constitutionnelle.

4. Intérêt du sujet

Le sujet, objet de la présente étude, comporte naturellement un double intérêt théorique et pratique d'autant plus qu'il est d'actualité.

En effet, cette analyse qui vise la protection effective de la Constitution du 18 février 2006 obtenue non sans difficulté, fait partie de l'histoire immédiate de la RDC. Car, il est de notoriété publique que tout le microcosme politique congolais s'agite encore autour de la question d'une éventuelle révision constitutionnelle. Alors comment dans ces conditions mettre l'identité du texte constitutionnel à l'abri des ambitions des acteurs politiques ?

Sur le plan théorique et pratique, ce travail se veut respectivement un condensé d'arguments en faveur de la justiciabilité des lois de révision constitutionnelle et un outil qui interpelle les acteurs politiques sur la nécessité de préserver ce qui constitue tout le peuple congolais.

Une telle étude mérite d'être délimitée.

5. Délimitation du sujet

« Qui ne sait se limiter ne sait écrire dit-on ».

La complexité et la nature du sujet commandent qu'il soit délimité dans le temps et dans l'espace. De même, qu'un obstacle doit être localisé, un problème délimité, une difficulté circonscrite51(*).

Depuis son existence juridique, la RDC a connu plusieurs révisions constitutionnelles. Cependant, notre étude ne porte que sur les limites du pouvoir de révision constitutionnelle dans la Constitution du 18 février 2006. Une telle étude implique l'analyse de toutes les péripéties révisionnistes enregistrées sous son empire.

Pour y parvenir, il implique d'adopter un itinéraire méthodologique.

6. Indications méthodologiques

Pour PINTO et GRAWITZ, la méthode est l'ensemble d'opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à étudier les vérités qu'elle poursuit, les démontre et les vérifie52(*). Elle peut aussi être entendue selon  MBOKO D'JANDIMA, comme la marche rationnelle de l'esprit pour arriver à la connaissance ou à la démonstration d'une vérité53(*).

La matière sous examen relève du droit public où il n'existe pas une seule méthode de travail. Et quand bien même elle existerait, elle risquerait fort de se muer à un dogme sclérosant la pensée54(*). Ainsi, une démarche interdisciplinaire est inévitable car la vision traditionnelle d'une recherche juridique hautaine et coupée de méthodes ou des réflexions de l'ensemble des sciences humaines est écartée par l'ensemble des juristes55(*). Yves CHEROT conclut d'ailleurs que le droit est à la fois l'école de la réflexion et de l'imagination. D'où le recours à la fois aux méthodes juridique, sociologique, historique et comparative.

6.1. La méthode juridique

Elle est normative c'est-à-dire elle consiste à exposer et à analyser les textes de lois et divers documents relatifs à la matière traitée en recherchant sans cesse le droit posé applicable à un cas d'espèce. Elle tend à résoudre un problème de dogmatique ou de casuistique juridique à travers ces interprétations56(*).Elle nous permettra de recenser toutes les limites explicites consacrées par le constituant de 2006.Pour la rendre utile, elle sera exploitée à travers ses différentes approches.

6.1.1. Approche téléologique ou contextuelle

Cette approche rend plus aisée la compréhension de certaines dispositions constitutionnelles en ce qu'elle nous permet de les interpréter au regard de leur raison d'être c.à.d. en fonction de l'objectif visé lors de leur création.

D'une autre manière, cette approche situe l'analyste ou l'interprète qui s'intéresse à la norme constitutionnelle dans le contexte de son élaboration.

6.1.2. Approche génétique

La compréhension des dispositions relatives aux limites du pouvoir de révision constitutionnelle passe par l'approche génétique. Plusieurs acteurs nationaux ou internationaux ont été associés au processus d'élaboration de la Constitution du 18 février 2006. Cette situation a conduit le constituant à recourir à une diversité de sources. Il est donc utile, à travers cette approche, de chercher à comprendre la genèse de certaines dispositions, en recherchant l'intention de leurs auteurs, généralement dans les travaux préparatoires ou le mémoire explicatif.

6.1.3. Approche systémique

Le droit constitutionnel est aussi défini comme un ensemble de normes écrites dotées d'une certaine cohérence interne, destinées à organiser l'Etat et de régir l'univers politique en fonction d'un but rationnellement choisi57(*).

Partant, l'étude des dispositions constitutionnelles relatives au pouvoir de révision constitutionnelle risque de fournir des résultats incomplets si elle ne prend pas en compte l'intégralité du texte constitutionnel. Cette approche permet donc de comprendre les dispositions visées à travers d'autres dispositions auxquelles les premières renvoient forcément, considérant qu'elles constituent un tout, mieux un système.

6.1.4. Approche fonctionnelle

L'approche fonctionnelle vise à attribuer à la règle une fonction objective qui peut être différente de celle visée par l'auteur. On s'interroge non pas sur ce que l'auteur du texte a réellement voulu dire, mais maintenant que la règle doit être appliquée dans une situation historique différente, quel sens il convient de lui donner si l'on veut obtenir le résultat recherché58(*).

Ainsi donc, cette approche nous aidera à comprendre la fonction objective des dispositions relatives au pouvoir de révision tout en insistant sur le fait que le contexte d'élaboration de la Constitution du 18 février 2006 peut avoir changé, la fonction de certaines dispositions aussi.

6.1.5. Approche sémiologique

Il s'agit de l'interprétation exégétique que beaucoup de chercheurs réduisent à l'unique méthode juridique, uniquement fondée sur une interprétation littérale ou grammaticale. Elle nous permettra d'enrichir nos arguments par la maitrise du langage dans lequel sont exprimées certaines dispositions. S'agit-il de la permissivité ou de l'obligatoriété à l'article 220 par exemple ?

En définitive, Cette méthode, même si elle offre un cadre d'investigation susceptible d'éviter de s'égarer dans l'inextricable confusion des faits et des événements, peut pécher par sa superficialité, sa cécité ou sa sécheresse empêchant ainsi de comprendre la faiblesse des limites consacrées. Car, elle cherche à apprécier les faits plutôt que de les expliquer. D'où le recours impératif à la méthode sociologique.

6.2. La méthode sociologique

Elle observe et elle explique les faits dont elle est tributaire ; elle ramène le droit dans son environnement social et le texte dans son contexte et considère la Constitution du 18 Février 2006 comme un fait social parmi tant d'autres c'est-à-dire comme l'expression des rapports de compromis, de forces économique et sociale, des armistices, des enjeux, des postures, et du jeu voilé des acteurs à un moment donné de l'histoire du Congo. Elle nous aidera non seulement à comprendre les contraintes et les réalités de la vie politique congolaise mais aussi à saisir le rôle que joue la Constitution dans les Etats à forte tradition autocratique comme la RDC dans son histoire.

6.3. La méthode historique

Elle consiste à étudier les faits selon leur succession dans le temps. Aussi la Constitution du 18 Février 2006 est-il le résultat d'un continuum diachronique et synchronique dans la production constitutionnelle Congolaise. Elle nous sera d'une si grande utilité qu'elle nous permettra de comprendre que les influences que subit la constitution actuelle à travers ses péripéties révisionnistes, font partie d'une totalité avec des interdépendances et des interactions qui n'échappent pas au déterminisme de l'histoire constitutionnelle du Congo, comparativement à d'autres Etats.

6.4. La méthode comparative

Pour étancher notre soif de l'application inéluctable de l'approche interdisciplinaire, les méthodes juridique, sociologique et historique doivent être complétées par la méthode comparative. Celle-ci pourrait éclairer d'un jour nouveau nos arguments en faveur de la justiciabilité des lois de révision constitutionnelle par la mise en parallèle qu'elle permet de plusieurs systèmes juridiques.

Certes, l'étude portant uniquement sur l'efficacité des limites du pouvoir de révision constitutionnelle, il ne saurait être question de multiplier à l'infini des cadres de comparaisons. Bien au contraire, la démarche consiste à cibler certains Etats pour appréhender la manière dont les différents juges constitutionnels ont réagi face à une telle problématique. Car, en effet, ainsi que le reconnait le doyen Jean RIVERO, « tout constitutionnaliste est un comparatiste virtuel59(*) ». Comme tel, le juriste ne peut rejeter la comparaison sous prétexte de la platitude60(*).

L'ambition est donc d'éviter de s'enfermer dans une sorte de « tour d'ivoire » qui empêche au chercheur à s'intéresser à d'autres systèmes juridiques, comportant pourtant des informations dites susceptibles de contribuer à l'épanouissement de sa recherche. Plus précisément, l'on sera attentif, à ce que Marc VERDUSSEN appelle le « comparatisme d'évaluation », technique consistant «... à apprécier et, le cas échéant, à améliorer son propre système normatif à l'aune des repères tirés de l'analyse d'un ou de plusieurs autres systèmes normatifs, jugés comparables61(*) ».

Il y a donc nécessité, dans le souci de l'interdisciplinarité, de combiner l'ensemble de ces méthodes pour mieux rendre compte de la recherche, dont il convient à présent d'indiquer le plan sommaire.

7. Plan sommaire

Le travail se veut bipartite. Alors que la première partie porte sur la mise en oeuvre du pouvoir de révision sous la double dimension théorique et pratique, la seconde, quant à elle, tente de concilier la théorie et la pratique en proposant un schéma de contrôle de constitutionnalité.

Ière PARTIE : LA MISE EN OEUVRE DU POUVOIR DE REVISION CONSTITUTIONNELLE : CADRE THEORIQUE ET DIMENSION PRATIQUE.

Avant d'aborder le cadre théorique (chap. 2) et la dimension pratique (chap.3) de l'exercice du pouvoir de révision constitutionnelle, il est utile de planter le décor conceptuel du pouvoir constituant (chap. 1).

CHAPITRE 1 : LE POUVOIR CONSTITUANT : CADRE CONCEPTUEL.

D'aucuns peuvent s'interroger sur l'utilité de ce chapitre préliminaire consacré aux précisions conceptuelles. De toute évidence, ce chapitre revêt une grande utilité car, les implications qui résultent des concepts indistinctement employés peuvent conduire à des conceptions différentes. C'est donc le lieu d'opérer un choix conceptuel correspondant aux conclusions que nous comptons tirer de nos analyses.

A en croire Evariste BOSHAB, il n'est pas utile de relancer l'action en recherche de paternité qui divise les auteurs américains et français sur le fait de savoir, entre Emmanuel Sieyès et Thomas Young, qui est le véritable géniteur du concept « pouvoir constituant ». Il affirme que c'est une entreprise qui, pour l'instant, ne révèle d'aucune utilité, même s'il est indéniable qu'en situant historiquement une notion, on peut mieux appréhender son évolution62(*).

Cependant, l'histoire de la notion du pouvoir constituant n'est pas notre cible. Il sera plutôt question d'exploiter la notion dans ces différentes appellations sur fond de présentation des vues doctrinales incompatibles ou compatibles avec les arguments à développer dans les lignes qui suivent.

De manière syncrétique, le pouvoir constituant est l'ensemble d'organes chargés d'élaborer ou de réviser la Constitution63(*). De cette définition, l'on distingue deux types de pouvoir constituant sous les appellations diverses. Le premier type de pouvoir est appelé indistinctement par les auteurs pouvoir constituant originaire64(*), pouvoir constituant initial ou pouvoir constituant stricto sensu65(*), pouvoir constituant primaire66(*) ou même « pouvoir constituant67(*) » tout court. Et le second type de pouvoir est généralement désigné pouvoir constituant institué ou pouvoir constituant dérivé68(*), pouvoir de révision constitutionnelle ou simplement pouvoir de révision69(*).

De toutes ces appellations, quelques-unes retiennent notre attention pour une double raison : D'une part parce qu'elles dominent la doctrine constitutionnelle en raison de leur usage ; d'autre part parce qu'elles peuvent nous servir de catégorisation pour les principaux courants. Il s'agit en effet du pouvoir constituant originaire et du pouvoir constituant dérivé d'un coté, ainsi que du pouvoir constituant et du pouvoir de révision constitutionnelle de l'autre coté.

Alors que la première catégorisation nous aide à présenter les controverses doctrinales (section1), la deuxième, quant à elle,révèle le choix conceptuel opéré (section 2).

Section 1 : Du pouvoir constituant originaire et du pouvoir constituant dérivé

La distinction entre pouvoir constituant originaire et pouvoir constituant dérivé fait partie des notions consacrées en droit constitutionnel. Elle est reprise dans tous les manuels de droit constitutionnel70(*). En raison du caractère accessoire de la démarche dans cette étude, cette distinction est axée essentiellement sur les caractéristiques et l'étendue d'action de chaque pouvoir.

§1. Le pouvoir constituant originaire

Le pouvoir constituant originaire est celui qui intervient pour élaborer une Constitution, soit lorsqu'aucune Constitution n'est en vigueur, soit lorsque l'ordre juridique ancien disparait71(*). Ce pouvoir a ses caractéristiques propres (A) et son étendue d'action (B).

A. Caractéristiques

Ce pouvoir est à la fois initial, discrétionnaire et inconditionné :

- Initial et discrétionnaire parce qu'il n'existe au dessus aucun autre pouvoir. Il intervient dans un espace vierge.

- Inconditionné parce que dans sa mise en oeuvre, il n'est soumis à aucune condition de forme ni de fond.

Qu'en est-il de l'étendue de son action ?

B. Etendue de son action

La question qui se pose est en réalité celle de savoir si le pouvoir constituant originaire est bel et bien illimité ou si quelque part celui-ci ne serait pas limité, même de façon tacite. Et s'il est dans une certaine mesure limité, par quoi est-il limité ?

En effet, le pouvoir constituant originaire est présenté comme un pouvoir illimité. Car, par définition, il n'est soumis à aucune règle préalable72(*). En revanche, d'autres auteurs avancent un point de vue nuancé. Jacques DJOLI écrit : «  Ainsi, le pouvoir constituant originaire bénéficie en principe d'une liberté totale. Cependant, la souveraineté serait arbitraire si elle n'était pas limitée. En effet, le caractère illimité et prométhéen du pouvoir constituant originaire, pouvoir démiurge quasi-divin doit être relativisé. Tout pouvoir se fonde sur un grand récit, un ordre politique imprégnant toute la société. Une constitution reflète toujours un certain nombre des valeurs supra-constitutionnelles. Il faut donc tenir compte de la finalité politique ; et s'il est démocratique, de ce que la conscience sociale est prête à accepter73(*) ». Et Robert BADINTER dit à ce sujet que « la supra-constitutionnalité réside dans la proclamation par le constituant ou le juge constitutionnel, qu'il existe dans la hiérarchie des normes, des valeurs supérieures à l'ordre constitutionnel existant ». Sinon, renchérit Jacques DJOLI, nous sommes dans une position d'abus ou de fraude constitutionnelle.

Sur cette question, Ambroise KAMUKUNI note : « en tout état de cause, dans l'établissement du nouveau régime, le constituant, profitant de la souveraineté de son pouvoir originaire, peut vouloir tricher avec les principes de base qui fondent la nécessité d'un texte juridique relatif à l'organisation des règles du jeu politique limitant les pouvoirs des gouvernants et garantissant la protection des droits humains74(*).

Dès lors, l'affirmation qui tient à la reconnaissance d'une certaine fraude résultant du comportement du pouvoir constituant originaire, suppose l'idée de sa limitation à l'instar du pouvoir constituant dérivé.

§2. Pouvoir constituant dérivé

Certes, il est permis de penser que la Charte fondamentale de l'Etat a été murement réfléchie lorsqu'elle a été élaborée et qu'elle est faite pour durer. Cependant, rien n'est immuable dans la vie et il peut être nécessaire de la modifier sur certains points, sans que pour autant le régime soit remis en cause75(*). Le pouvoir constituant dérivé a vocation à modifier la Constitution. Il est donc reconnu par ses caractéristiques (A) même si l'étendue de son action ne fait l'unanimité (B).

A. Caractéristiques

Généralement, ce pouvoir est institué et subordonné d'une part, et autolimité d'autre part :

- Le caractère institué ou subordonné : D'entrée de jeu, il sied de souligner le caractère controversé et nuancé de cet aspect du pouvoir constituant dérivé. La controverse ou la nuance est introduite par les auteurs positivistes. Selon ces derniers, le pouvoir constituant dérivé est l'équivalent du pouvoir constituant originaire du point de vue de la fonction. En ce sens, Georges BURDEAU affirmait que « l'autorité chargée des révisions constitutionnelles » est un « organe constituant par son but, mais un organe constitué par son origine76(*). Et Georges VEDEL d'amplifier : « il est constituant par ses effets et il est constitué quant à ses conditions d'exercice77(*). C'est donc une opinion hostile à la théorie de la limitation matérielle du pouvoir constituant dérivé.

Il nous semble par ailleurs, que le caractère institué ou subordonné de ce pouvoir est mieux exprimé par d'autres auteurs dont Jacques DJOLI : « le constituant originaire prévoit à l'avance, sous l'aspect des clauses de révision, les conditions selon lesquelles son oeuvre sera modifiée le moment venu. D'où la subordination de principe du pouvoir dérivé au pouvoir constituant originaire ».

- Le caractère autolimité : Nous notons avec le même auteur qu'en principe, la révision est en théorie limitée dans sa démarche, de manière à parvenir à un équilibre entre le souci d'adapter la Constitution à de nouvelles réalités et celui, malgré tout, de préserver son identité, et surtout la fixité de l'Etat.

Qu'en est-il de son étendue d'action ?

B. Etendue d'action

La question de l'étendue d'action du pouvoir constituant dérivé implique celle des limites de ce pouvoir analysée principalement dans cette étude.

De manière succincte, la doctrine constitutionnelle nous présente des limites relatives au moment, à la période et à la matière78(*). Mais, en réalité, cette affirmation occulte une grande divergence. En effet, selon les positivistes, les limites de ce pouvoir sont uniquement celles relatives à la forme et à la procédure c.à.d. celles liées à son organisation et à son fonctionnement. En d'autres termes, sur le plan matériel ou fonctionnel, il n'y a aucune différence entre les deux facettes du pouvoir constituant ; car, il s'agit de l'exercice de la fonction constituante. En revanche, la conception matérielle de la distinction, développée par Carl SCHMITT et Olivier BEAUD, insiste sur l'objet ou la matière comme élément de distinction entre les deux pouvoirs. D'où l'intérêt de faire le choix entre les deux conceptions.

Section 2 : Pouvoir constituant et pouvoir de révision constitutionnelle.

En réalité, comme l'affirme Olivier BEAUD « il ne saurait y avoir «  de pouvoir constituant » qu'originaire, le pouvoir constituant dérivé correspond à ce qu'il faut appeler le pouvoir de révision79(*). »

De ces divergences doctrinales découle la nécessité d'opérer un choix conceptuel car, derrière les concepts, les conséquences ne sont pas toujours identiques. Les appellations ainsi adoptées ne sont pas innocentes. Elles occultent des hypothèses liées aux éléments de différence (§ 1) et au rapport (§ 2).

§1. Distinction.

La différence entre le pouvoir constituant et le pouvoir de révision constitutionnelle s'explique à travers les caractéristiques de chaque pouvoir (A) et leur étendue d'action (B).

A. Caractéristiques

Il appert de noter que le pouvoir constituant est avant tout un pouvoir inconditionnel parce que dans sa mise en oeuvre, il n'est soumis à aucune condition de forme et de fond. Et quand bien même, il le serait, il n'existe pas de sanction à lui imposer. Par contre, le pouvoir de révision constitutionnelle est un pouvoir limité et conditionné, car subordonné à la Constitution en vigueur tant sur les plans formel que matériel. Il est donc constitué.

En d'autres termes, le premier relève de la politique et évoque l'image sulfureuse d'un gouvernement de pur fait. Et le second relève de la norme constitutionnelle et est auréolé du sceau de la conformité au droit.

B. Etendue d'action.

Même si l'existence de certaines valeurs et principes constitutionnels de base entraine la relativité du caractère illimité du pouvoir constituant, il sied tout de même d'affirmer que ce pouvoir ne peut être sanctionné. De ce point de vue, la remise en cause de ces limites d'ordre moral à l'absence d'une sanction éventuelle est dépourvue des conséquences juridiques manifestes. Le pouvoir constituant est donc plus ou moins limité dans la mise en oeuvre d'une Constitution.

En revanche, le pouvoir de révision constitutionnelle est un pouvoir constitué ou constitutionnel au même titre que les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Sa subordination à la Constitution, ne serait-ce que pour les règles formelles, interdit donc de le qualifier de souverain, car dès qu'une autorité exerce une compétence, c.à.d. dès qu'elle est un organe lié par le droit positif, elle n'est plus souveraine.

Au-delà de sa subordination aux règles formelles, le pouvoir de révision est aussi subordonné à la Constitution sur certaines matières. Il s'agit de la théorie de la limitation matérielle qui repose sur une notion plus large de la Constitution que la notion étroite de la Constitution écrite. Elle part d'une idée toute simple ; Comment peut-on s'imaginer que les auteurs d'une Constitution aient pu prévoir et justifier la possibilité même de l'anéantissement de l'oeuvre par une révision ? Elle est donc apparue comme une réaction contre la neutralité de la révision constitutionnelle insinuée par les positivistes en arguant que l'organe de révision peut tout faire à l'instar du pouvoir constituant. Or, l'idée même d'une Constitution interdit des conséquences aussi absurdes. Comme l'écrit SCHMITT « quand une Constitution prévoit la possibilité de révision constitutionnelle, elle ne veut pas, par là, fournir une méthode légale à l'abolition de sa propre légalité et encore moins, le moyen légitime de destruction de sa propre légitimité80(*).

Donc, cette doctrine de la limitation matérielle de la révision constitutionnelle présuppose une distinction entre la disposition constitutionnelle intangible et la distinction constitutionnelle révisable. Elle a été vite traduite en termes de dogmatique juridique, notamment par la Constitution du 18 février 2006 qui interdit la révision de certaines dispositions.

Dans le même ordre d'idées, cette théorie de la limitation matérielle n'introduit nullement l'idée de la supra-constitutionnalité, car, les limites matérielles sont avant tout immanentes à la Constitution.

Par conséquent, le prétexte selon lequel, le pouvoir de révision serait amené à observer des règles supra-constitutionnelles, n'est pas fondé. En effet, tant qu'on s'en tient à la thèse selon laquelle c'est le pouvoir de révision constitutionnelle, et non le pouvoir constituant, qui est constitutionnellement limité, on demeure dans le cadre de la positivité81(*). Ce qui implique l'existence d'un rapport entre les différents pouvoirs.

§2. Rapport

Consécutivement à la distinction entre les deux pouvoirs, la question du rapport entre les deux pouvoirs se pose. D'une autre manière, la distinction ci-haut élucidée est-elle relative ou absolue ?

Pour y répondre, Olivier BEAUD critique de la manière la plus virulente le raisonnement quelque peu spécieux des positivistes avant de conclure à une distinction absolue c.à.d. de nature entre les deux pouvoirs82(*).

CHAPITRE 2 : LES LIMITES DU POUVOIR DE REVISION CONSTITUTIONNELLE SOUS LA CONSTITUTION DU 18 FEVRIER 2006.

Ce chapitre constitue la trame de cette étude. Il tente de ressortir toutes les limites auxquelles doit se soumettre le pouvoir de révision constitutionnelle. Aussi intéressant que cela puisse paraitre, le recensement de toutes ces limites n'est pas facile à réaliser. Cette difficulté s'explique par les divergences de vues doctrinales sur la question.

Pour notre part, la question des limites du pouvoir de révision constitutionnelle tient tant à la lettre qu'à l'esprit de la Constitution. De cette réalité, se dégage le critère de l'expression directe du constituant, à la base de la catégorisation-limites expresses et implicites de l'organe chargé de la révision (Section 1). Outre l'évidence qu'une autre doctrine fait écho d'une nouvelle catégorisation (Section 2).

Section 1 : Les limites expresses et implicites du pouvoir de révision constitutionnelle

Les limites sont expresses (§ 1) ou implicites (§ 2) selon qu'elles sont expressément ou implicitement prévues dans la Constitution et parfois même découlant de l'esprit de la Constitution.

§1. Les limites expresses

Elles sont ainsi qualifiées puisqu'elles sont consacrées expressément dans la Constitution. Il s'agit des limites qui se rapportent soit à la matière de la révision, soit à des circonstances qui entourent l'intervention de l'organe de révision, soit à la procédure de la révision.

S/§ 1. Les limites matérielles

La problématique des dispositions constitutionnelles intangibles est encore sujette à controverse dans la littérature juridique. Les uns y voient de simples dispositions constitutionnelles pouvant être révisées à coeur joie en usant de la technique de la double révision83(*); des dispositions constitutionnelles introduisant l'idée d'une supra-constitutionnalité de certains droits, principes ou règles de la Constitution84(*); des dispositions banales dépourvues de valeur juridique et dont le soubassement laisse à désirer85(*). En revanche, les autres y voient de véritables dispositions constitutionnelles, n'emportant pas l'idée d'une supra-constitutionnalité86(*).

Au-delà de toutes ces divergences, nous pensons que ces dispositions sont instituées pour pérenniser les valeurs considérées comme les plus essentielles d'un système politique. Elles sont souvent des réponses appropriées contre les abus du passé ; elles ont l'ambition de conjurer l'avenir en proclamant l'immutabilité des principes qu'elles défendent et traduisent les meurtrissures d'autrefois et la ferme résolution de ne pas les voir se reproduire. Pour s'en convaincre, l'identification de la portée juridique de chaque matière sera précédée de l'établissement d'un lien entre le phénomène du passé et la matière protégée.

A. Répertoire.

L'article 220 de la Constitution du 18 février 2006 dispose : « la forme républicaine de l'Etat, le principe du suffrage universel, la forme représentative du Gouvernement, le nombre et la durée des mandats du Président de la République, l'indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical, ne peuvent faire l'objet d'aucune révision constitutionnelle.

Est formellement interdite toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées. »

Il ressort de cet article que huit matières sont sanctuarisées par le constituant :

1. La forme républicaine de l'Etat.

Au nombre des phénomènes de triste mémoire observés dans l'histoire de la République, figure celui de la forme du gouvernement, ici l'Etat. Consacrée dans la Constitution, la forme républicaine a été souvent remplacée de facto, puis de jure87(*)par des interludes monarchiques (a) avant d'être verrouillée par le constituant de 2006 (b).

a) Les interludes monarchiques88(*)

Dans un style beaucoup plus illustratif que d'habitude, Ambroise KAMUKUNI rappelait ce phénomène en ce sens : «  le fonctionnement des institutions politiques congolaises ressemble à une pièce de théâtre, souvent interrompue pour un changement d'acteurs. A chaque interruption plus ou moins longue, les organisateurs de la pièce servent aux spectateurs que sont les congolais, en attendant la reprise des rôles par les acteurs attitrés, une sorte de séquences, d'intermèdes destinés à les divertir. A deux reprises, ils ne sont pas gênés de leur servir, en guise d'intermèdes, deux monarchies absolues : la première sous la houlette du président fondateur du MPR, la seconde découlant d'une rébellion-invasion déclenchée par les dirigeants de l'AFDL et leurs alliés89(*)».

En effet, la RDC a connu deux fois dans son histoire des institutions politiques monarchiques. Le premier interlude fut sous la deuxième république où la Constitution du 24 juin 1967 a été progressivement altérée à travers les tactiques frauduleuses du pouvoir de révision constitutionnelle, dont l'une des pires expériences débouche sur la loi n°74-20 du 15 aout 1974. Par ailleurs, le second entracte intervient après l'intervention d'un mouvement-rebelle chapeauté par les dirigeants de l'AFDL et leurs alliés. Ce nouveau régime adopte le décret-loi dont le caractère constitutionnel est largement contesté. Ce décret-loi concentre l'essentiel des pouvoirs entre les mains du président de la république. Comme s'il était convenu, la mort du président Laurent Désiré KABILA s'ensuit des gesticulations monarchiques procédant d'une coutume héréditaire sortie des manches des dignitaires du régime de l'AFDL. Le pouvoir d'Etat fut patrimonialisé et rendu du père au fils sans égards pour aucune règle constitutionnelle90(*).

Partant, la crainte de la survivance ou de la répétition de ces expériences sombres est à la base de la prévention consacrée.

b) Portée de l'interdiction de modifier la forme républicaine de l'Etat.

Prévu sous d'autres cieux91(*) sous l'estampille « forme républicaine du Gouvernement », cette interdiction est formulée comme « forme républicaine de l'Etat ». Mais, en réalité, il n'y a pas de différence, car, comme l'écrivait Olivier BEAUD pour la formulation française : «  Cette interdiction ne vise que la république au sens restreint de forme du gouvernement. Mais, cette république, d'abord et avant tout, un Etat avant d'être l'Etat républicain. Par conséquent, l'art. 89 de la Constitution française, qui prévoit la protection de la forme républicaine du gouvernement, implique la protection de l'Etat92(*).

A la supposer établie, la république est définie contrairement à la monarchie93(*), comme la forme du gouvernement dans lequel le Chef de l'Etat n'est pas héréditaire. Et VEDEL d'ajouter : «  tant qu'un chef de l'Etat héréditaire n'est pas institué, on est en république94(*) ».

A ce sujet, l'on note avec P-G NGONDANKOY : «  qu'il s'agit, comme en France, de l'interdiction du retour à toute forme monarchique du Pouvoir d'Etat, la « république » étant l'affaire de tous (respublica). Cette interdiction emporte pour conséquence le refus de toute mesure ou de toute pratique politique tendant à restaurer les mécanismes du pouvoir monarchique, comme par exemple l'hérédité ou la concentration des pouvoirs entre les mains du monarque. Il s'ensuit que toutes les dispositions de la Constitution prévoyant un mécanisme plus démocratique de désignation des dirigeants (l'élection par exemple) ou introduisant le principe de la séparation/distribution du pouvoir (Pouvoir législatif, Pouvoir exécutif, Pouvoir judiciaire...) ne peuvent être modifiées sans abaisser les standards démocratiques acquis95(*) ».

2. Le principe du suffrage universel

Présenté comme l'un des principes essentiels de l'ordre démocratique, en ce qu'il traduit l'idée du peuple comme source éternelle du pouvoir, le principe du suffrage universel fit malheureusement long feu dans le parcours institutionnel de la république. Son rejet total survient avec l'avènement de la loi du 15 aout 1974, qui transfère tout le pouvoir au MPR (a). Mais, aujourd'hui, ce principe est placé dans les verrous (b).

a) Le transfert de la source de pouvoir : Du peuple au MPR et son président.

Evariste BOSHAB se pose la question suivante : « L'élévation du suffrage universel au niveau des principes constitutionnels intangibles par le constituant est-ce une réponse à un grief précis de l'histoire récente de la République démocratique du Congo ou un choix politique qui ne nécessite aucune explication ?96(*) » A cette question, nous répondons par la première hypothèse.

Sous la deuxième république, un phénomène émergea à un moment donné de l'histoire de la république, celui lié au transfert de la source du pouvoir. Etouffé jusque-là, le phénomène connut une bonne respiration dès l'avènement de la loi du 15 aout 1974. Son illustration fut rendue possible tant par le nombre de mandat du président de la république que par le mode d'élections désormais établi97(*).

Ambroise KAMUKUNI renseigne : « Ce système de « souveraineté présidentielle » relève d'une conception bien originale de la conquête et de l'exercice du pouvoir grâce au parti unique et n'est qu'une sorte de monarchie constitutionnelle qui rappelle la lointaine « souveraineté royale » européenne. Malheureusement, le MPR demeure le détenteur, l'émanation de tout pouvoir et son président, qui n'en est pas un organe, demeure son incarnation98(*).

b) Portée de l'interdiction de supprimer le principe du suffrage universel.

Définie comme le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple, la démocratie implique aussi le respect du principe de suffrage universel. Ce dernier traduit l'idée selon laquelle chaque citoyen a le droit de désigner librement ses gouvernants. Ainsi, de par la volonté du constituant, ce droit ne peut être ôté à n'importe quel congolais sous réserves de certaines lois.

Cependant, cette interdiction peut soulever d'autres questions notamment celles de savoir si, pour la désignation de certaines autorités de la république, l'on peut passer d'u suffrage universel direct à un suffrage universel indirect.

A ce sujet, il s'ensuit que si le pouvoir constituant a prévu, à titre d'exemple, l'élection du Président de la république au suffrage universel direct (art. 70), le respect de l'intégrité du principe de suffrage universel, doublé de celui de la volonté du constituant, impose qu'un tel article ne soit pas susceptible de modification dans le sens de l'abaissement des standards démocratiques. Dans ce cas, le passage du suffrage universel direct à l'indirect serait un recul démocratique qui n'écorcherait pas moins l'interdiction de l'article 220.

3. La forme représentative du gouvernement.

Fort de l'idée démocratique, le constituant sort du champ de la révision toute tentative qui remettrait en cause la forme représentative du gouvernement. En réalité, l'option levée n'est pas hasardeuse. Pour s'en convaincre, il suffit de dire un mot sur les crises multiformes constatées qui ont émaillé l'histoire de la république (a) avant de scruter la portée du principe (b).

a) La RDC : le bastion des crises multiformes.

Si la RDC est championne de production constitutionnelle, Sa terre loge, dès sa naissance, des crises multiformes. Elle est restait une terre de conflictualités : guerres, rebellions, insurrections, complots, assassinats, répressions massives, mouvements sociaux, grèves, villes mortes désobéissances, contestations postélectorales etc ; le lieu de rupture et de confrontation sournoise entre communautés : mutinerie de l'armée nationale et les sécessions99(*).

Ainsi que le rappelle l'exposé des motifs, l'une des causes fondamentales de ces crises est la contestation de la légitimité des institutions et de leurs animateurs. Pendant longtemps, les élections régulières et transparentes sont restées un leurre. Les animateurs des institutions politiques étaient cooptés de manière arbitraire sur fond des combines politiques. Ce mode de désignation était parfois à la base de déséquilibre sur les origines des personnes choisies. Ce qui fait du jeu politique un terrain de conflits à dimension personnelle, d'opportunisme, de retournement ; entre radicaux et traitres, entre colombes et faucons, des mutineries, des pillages, des villes mortes, des actes graves de xénophobie au Katanga contre les Kasaiens, et les micro-conflits ethno-régionaux qui vont fragmenter le Congo par le Kivu100(*). D'où l'option de constitutionnaliser ce principe.

b) Portée de l'interdiction de passer outre la forme représentative du gouvernement.

Généralement présentée comme une mosaïque de tribus et d'ethnies, la RDC ne peut méconnaitre cette donne. Le Gouvernement de la république doit, ainsi que le veut le constituant, assurer la représentativité nationale. Celle-ci traduit inévitablement la représentativité de toutes les couches ethniques, régionales et tribales. Une telle exigence répond au souci de nourrir la cohésion nationale longuement mise en mal par des conflits de divers ordres.

4. Le nombre et la durée du mandat du président de la république.

La technique de limitation du nombre et de la durée du mandat du président de la république a évolué à dents de scie en RDC. Consacrée sous la Constitution du 1er aout 1964101(*), elle fut maintenue, du moins de manière partielle sous la Constitution du 24 juin 1967102(*) avant d'être supprimée, pour le compte du président fondateur du MPR sous la loi du 15 aout 1974 et rétablie par la Constitution du 18 février 2006 où elle jouit d'une protection beaucoup plus accrue.

En revanche, de facto, les différentes dispositions de la Constitution qui renferment ladite technique n'ont pas été d'application aisée avec le phénomène de monarchisation présidentielle (a). D'où la réaction du constituant (b).

a) Le phénomène de la monarchisation présidentielle103(*).

André MBATA écrit : « il s'observe une certaine monarchisation des présidences ou les monarchisations présidentielles en construction dans certains pays africains au travers des révisions constitutionnelles intempestives et un simulacre d'élections qui sont généralement organisées pour permettre aux dirigeants et aux partis au pouvoir de s'y maintenir ». Aucun des chefs de l'Etat n'a affiché la volonté d'abandonner le pouvoir à la fin du mandat. Le premier quitta le pouvoir à la suite du Coup d'Etat perpétré par le Général Joseph Désiré MOBUTU. Après 32 ans de règne, celui-ci ne peut résister face à l'avancée des troupes rebelles de l'AFDL dirigées par Laurent Désiré KABILA. Lui à son tour sera assassiné et remplacé par son fils Joseph KABILA, dont la fin du mandat suscite des réactions interminables.

b) Portée de l'interdiction de revenir sur le nombre et la durée du mandat du président de la république.

La portée de cette double interdiction n'est pas difficile à circonscrire. Il suffit d'analyser l'article 70 al. 1 de la Constitution qui dispose : « le président de la république est élu au suffrage universel directe pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois ». Et P-G NGONDANKOY de noter : « la double interdiction frappe, en réalité, personnellement tout citoyen ayant déjà accédé à la magistrature suprême de l'Etat sous l'empire d'une Constitution déterminée104(*) ».

Par ailleurs, cette énième limitation soulève quelques inquiétudes liées au manque de justice, d'équité et de logique. Cependant, la formulation de cette limitation démontre à quel point un lien existe entre l'interdiction et un passé peu reluisant de l'histoire.

5. L'indépendance du pouvoir judiciaire.

A en croire Pierre PACTET, la théorie de la séparation des pouvoirs ne rend plus compte de la réalité contemporaine : désormais sa portée se limite à l'indépendance nécessaire de l'autorité judiciaire. Son intérêt actuel ne subsiste plus guère dans la distinction pouvoir législatif-pouvoir exécutif. Si la séparation des pouvoirs mérite actuellement d'être inscrite dans la Constitution, ce n'est plus que pour réaliser un mode d'aménagement des institutions. Cependant, la théorie conserve un grand intérêt sous l'aspect qui était le plus négligé, des rapports du pouvoir avec l'autorité judiciaire105(*).

En effet, l'indépendance du pouvoir judiciaire constitue une garantie efficace contre l'arbitraire de deux autres et en réalise par-là même la limitation106(*). Sur le plan formel, l'arsenal constitutionnel congolais semble depuis l'indépendance se préoccuper de faire apparaitre le principe de la séparation des pouvoirs....

Cependant, cette constance plus ou moins durable n'a pas empêché des phénomènes autres que ceux prévus dans la Constitution. La praxis de la vie institutionnelle révèle que l'indépendance du pouvoir judiciaire a été mis en mal par des stratégies de concentration de pouvoirs (a), même sous le règne de la Constitution du 18 février 2006 où le principe a été sanctuarisé (b).

a) Le phénomène de concentration des pouvoirs

Point n'est besoin d'évoquer les sombres périodes de l'histoire où la concentration des pouvoirs était consacrée dans la Constitution107(*). Ce phénomène s'explique par l'hyperbolisation du pouvoir présidentiel, la fragilisation du parlement, une recentralisation rampante et un pouvoir judiciaire instrumentalisé108(*). Ces différents épiphénomènes participent de la concentration des pouvoirs entre les mains d'un seul homme. Dans ce contexte, la justice est tout simplement instrumentalisée, ballotée dans des mouvements de nomination, des mises en place et des retraites inconstitutionnelles et clientélistes109(*) ; des arrêts sont rendus sur commandes politiques110(*).

b) Portée de remettre en cause l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Définie comme la faculté laissée aux magistrats d'exercer librement leurs fonctions111(*), l'indépendance du pouvoir judiciaire ne peut faire l'objet d'aucune révision constitutionnelle. Elle a été d'ailleurs renforcée par un certain nombre de garanties112(*) pour son effectivité, quand bien même celles-ci se révèlent cependant insuffisantes.

L'on note avec P-G NGONDANKOY que : «  la portée de cette interdiction apparaît plus large que certaines autres interdictions de l'article 220 puisque, en l'absence de toute précision, elle est présumée concerner toute mesure ou toute pratique ayant pour objet ou pour effet la diminution de cette garantie importante pour la bonne administration de la justice. C'est par exemple le cas d'une mesure qui soumettrait le magistrat, dans l'exercice de sa fonction juridictionnelle, au contrôle ou aux orientations d'une institution de la République ; ou de celle qui réduirait les prérogatives actuellement dévolues aux cours et tribunaux ».

6. Le pluralisme politique et syndical

Le pluralisme politique et syndical suppose l'existence d'un régime démocratique où les droits de créer un parti politique et de fonder un syndicat sont reconnus par la Constitution et les lois de la république.

Curieusement, dans l'histoire politique congolaise, cet élément de la démocratie fit l'objet de balbutiement voire même de reniement, si bien que les droits qu'il renferme ont été restreints, parfois supprimés (a) avant d'être constitutionnalisés et protégés (b).

a) Le monopartisme du parti-Etat et le mono syndicalisme

Alors que l'article 4 de la Constitution du 24 juin 1967 prévoyait la possibilité de créer un deuxième parti politique, le MPR est demeuré le seul maitre jeu politique. L'absence de la création de la seconde formation politique confirme le caractère d'une simple clause de style que représente le fameux article. Les explications de ce coup de bluff sont jadis fournies dans le manifeste de la N'Sele qui avait définit les objectifs et le programme du parti, dont les articles 1 et 4 disposent que le MPR est un parti unique de la république du Congo et qu'il est l'institution suprême.

L'évolution politique d'alors ne va pas à l'opposé de l'épouvantail quand on sait que le parti unique de fait était devenu de droit, puis le parti-Etat grâce aux lois de révision constitutionnelle113(*) qualifiées par certains de véritables Constitutions. Malgré cela, ce système ne fit long feu. Les tensions entre acteurs politiques, doublées de pressions internationales, ont conduit à la chute de la dictature. Ambroise KAMUKUNI écrit à ce propos : « Mais ce fonctionnement ne s'est pas déroulé sans résistances internes concrétisées par la lettre dite de treize parlementaires à travers laquelle des élus dénonçaient les égarements du parti unique et projetaient de rentrer à la constitutionalité de l'article 4 en créant un deuxième parti. Appuyée plus tard par des pressions internationales provenant tant de l'Est, par la désagrégation de l'Union soviétique, bastion du parti unique que de l'ouest, à travers la politique des conditionnalités prônées par l'Occident avant d'octroyer de l'aide aux dirigeants africains, les résistances internes eurent finalement raison du monopartisme décadent114(*) ».

b) Portée de l'interdiction de supprimer le multipartisme politique et syndical.

Le multipartisme politique et syndical ne peut faire l'objet d'aucune révision constitutionnelle. La portée de cette prohibition se traduit par la lecture combinée des articles 6 al.1, 7, 8 et 38 de la Constitution qui protègent les droits et libertés de la personne.

7. Les droits et libertés de la personne.

L'interdiction de toute tentative de réduction des droits et libertés de la personne n'est pas innocente. Elle tend non seulement à dissuader toutes les pratiques liberticides en vogue pendant certaines périodes (a) mais aussi à instaurer un régime véritablement démocratique (b).

a) Les interludes liberticides

Les périodes qui coïncident aux intermèdes monarchiques correspondent avec celles des interludes liberticides, car, en réalité, la monarchie de fait, de surcroit absolue, ne laisse aucun interstice à la liberté comme fondement de tout régime démocratique. Sous la monarchie mobutiste et particulièrement sous la Constitution du 24 juin 1967- qui consacre d'ailleurs un certain recul par rapport à l'affirmation de certains droits politiques, comme la liberté partisane, des actes de décès de ces droits sont pris sans commune mesure.

b) Portée de l'interdiction de réduction des droits et libertés de la personne.

Qualifiée par P-G NGONDANKOY comme l'interdiction de réduction du niveau de reconnaissance et de protection des droits fondamentaux, ladite interdiction est une belle illustration de la consécration constitutionnelle de l'effet de standstill115(*). Ce dernier interdit aux autorités publiques de légiférer à rebours des droits déjà garantis et de diminuer le niveau de reconnaissance ou de protection déjà acquis par les droits fondamentaux116(*).

En ce sens, l'article 220 al. 2 revêt donc une double portée juridique : d'une part, il interdit de manière directe toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet la réduction des droits fondamentaux ; et d'autre part, il interdit par ricochet la réduction du niveau des droits fondamentaux touchant la liste de leur reconnaissance et les garanties de leur protection117(*).

8. Les prérogatives des provinces et entités territoriales décentralisées.

Loin d'être un acquis de circonstances, la sanctuarisation des prérogatives des provinces et entités territoriales décentralisées est due à la persistance des tendances centralisatrices dans la production et la pratique constitutionnelles (a). Le constituant entend donc y remédier en interdisant la réduction de ces prérogatives (b).

a) La résurgence des tendances centralisatrices dans la production et la pratique constitutionnelles

La production constitutionnelle reste dominée depuis 1960 par des tiraillements entre les tenants des tendances fédéralistes et ceux des tendances unitaristes dans l'articulation verticale des pouvoirs. On aboutit à des textes de compromis accordant une large autonomie aux provinces sous forme de fédéralisme administratif ou composite, assourdi ou annoncé, ou encore de régionalisme constitutionnel mais, dans la pratique, il y a une centralisation constante et rampante118(*).

b) Portée de l'interdiction de réduction des prérogatives des provinces et entités territoriales décentralisées

En 2006, le constituant contente judicieusement tous les acteurs impliqués au processus d'élaboration et d'adoption de la nouvelle Constitution en optant pour le régionalisme constitutionnel au niveau provincial et la décentralisation administrative au niveau local. Ce compromis historique est verrouillé à l'al. 2 de l'article 220. Ces prérogatives ne peuvent être réduites, sinon augmentées. Ainsi donc, les articles 197, 198, 199 et 201 à 206 ne peuvent faire l'objet d'une révision constitutionnelle que dans le sens du renforcement. Les réduire équivaudrait à porter atteinte à l'essence même de l'Etat congolais qui se veut unitaire et fortement décentralisé.

B. Appréciation

Loin d'être des simples déclarations programmatiques, des « dispositions distordues ou imposées » dépourvues « de réelles plus-values juridiques mais uniquement dotées d'une charge symbolique et morale, ces dispositions constitutionnelles intangibles représentent des valeurs autour desquelles communie toute la nation et qui ne peuvent être ébranlées par le pouvoir de révision, sans compromettre l'équilibre réalisé par le constituant de 2006.

Nous disons avec P-G NGONDANKOY que : « L'existence de ces matières intangibles renforce ainsi le caractère rigide de la Constitution du 18 février 2006 et la rend, sur ces matières, invulnérable aux armes de la révision. Elle traduit les préoccupations majeures du Constituant exprimé lors du référendum de 2005, lesquelles constituent l'âme même de la Constitution : assurer le fonctionnement harmonieux des institutions de l'Etat ; éviter les conflits ; instaurer un Etat de droit ; contrer toute dérive dictatoriale ; garantir la bonne gouvernance ; lutter contre l'impunité et assurer l'alternance démocratique (Exposé des motifs de la Constitution). Voilà pourquoi toucher aux matières intangibles de la Constitution équivaut à un acte de destruction de l'édifice constitutionnel lui-même. Voilà pourquoi toute tentative d'utilisation de la procédure de révision constitutionnelle aux fins de toucher aux matières intangibles est contraire à la Constitution elle-même119(*).

Qu'en est-il des limites prévues à l'article 219 ?

S/§2. Les limites circonstancielles.

Certaines Constitutions interdisent leur révision lorsque certains événements apparaissent. La Constitution du 18 février 2006 en est une illustration. Son article 219 dispose: « Aucune révision ne peut intervenir pendant l'état de guerre, l'état d'urgence ou l'état de siège ni pendant l'intérim à la Présidence de la République ni lorsque l'Assemblée nationale et le Sénat se trouvent empêchés de se réunir librement ».

Il ressort de cette disposition principalement trois circonstances au cours desquelles la révision est écartée. Ces circonstances méritent d'être élucidées (A) avant d'appréhender la nature de ces limites (B).

A. Elucidation des circonstances incompatibles avec la révision constitutionnelle.
1. Les circonstances exceptionnelles.

Ces circonstances sont au nombre de deux : il s'agit de l'état de siège et de l'état d'urgence. Dans, les deux cas, l'interdiction se justifie dans ce sens que la crainte d'un excès de pouvoir de la part des autorités qui, dans les circonstances exceptionnelles que traverse le pays, peut être fondée. Les autorités qui ont déjà substitué à la légalité ordinaire la légalité d'exception peuvent être tentées d'initier une révision constitutionnelle qui viderait la Constitution de toute sa substance.

2. L'intérim à la présidence de la république.

L'intérim à la présidence de la république tire son régime juridique des articles 75 et 76 de la Constitution et 84 à 87 de la loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle. A la lumière de leur analyse, deux observations peuvent être dégagées : s'agissant de la première, elle est relative aux causes de l'intérim à la présidence de la république. Il résulte de ces dispositions que l'intérim s'ouvre en cas de vacance pour cause de décès, de démission ou pour toute autre cause d'empêchement définitif120(*).

Par ailleurs, la deuxième observation est liée aux compétences reconnues au président par intérim et à la période au cours de laquelle ses compétences sont exercées. D'emblée, il faut noter que ce dernier exerce toutes les fonctions dévolues au président de la république, à l'exception de celles mentionnées aux articles 78, 81 et 82 de la Constitution. Mais seulement, pour la période de soixante jours ou quatre-vingt-dix et parfois cent vingt jours, le président par intérim veille à l'élection du nouveau président dans les conditions et délai prévus dans la Constitution.

Pendant cette période, la révision constitutionnelle est inenvisageable. L'interdiction a l'avantage de prévenir le risque de voir le président par intérim procéder à une modification constitutionnelle importante alors même que sa mission principale se limite à celle décrite ci-haut.

3. Impossibilité pour l'Assemblée nationale et le Sénat de se réunir.

Cette dernière limitation se fonde sur l'idée que l'absence du Parlement risque de priver la procédure de révision constitutionnelle de son étape importante qui est l'examen du bien-fondé. Car, une telle privation remet en cause la validité de la loi de révision constitutionnelle ainsi promulguée, même si préalablement sanctionnée par un referendum.

B. La nature des limites circonstancielles.

Il sied de retenir avec André MBATA que «  les limitations circonstancielles et temporelles au pouvoir de révision sont relatives dans ce sens qu'elles tombent lorsque les circonstances cessent d'exister ou lorsque l'on se retrouve en dehors des périodes au cours desquelles les révisions constitutionnelles sont interdites.

S/§ 3. Les limites formelles.

Il s'agit ici des limites liées à la procédure de révision constitutionnelle. La démarche consiste à passer en revue les différentes étapes de cette procédure (A) avant d'analyser les conséquences de leur irrespect (B).

A. Les étapes de la procédure.

A la lumière de l'article 218 de la Constitution, la procédure de révision comprend trois étapes : L'initiative de la révision, la discussion du bien-fondé et l'adoption du projet, de la proposition ou de la pétition.

1. L'initiative de la révision constitutionnelle.

L'initiative appartient concurremment au président de la république, au gouvernement après délibération en conseil des ministres, à chacune des chambres du parlement à l'initiative de la moitié de ses membres et à une fraction du peuple congolais, en l'occurrence 100.000 personnes, s'exprimant par une pétition adressée à l'une de deux chambres.

2. La discussion du bien-fondé.

Selon l'alinéa 2 de l'article 218, chacune de ses initiatives est soumise à l'Assemblée nationale et au Sénat qui, décident à la majorité absolue de chaque chambre, du bien-fondé du projet, de la proposition ou de la pétition de révision. Le bien-fondé se définit par ailleurs comme l'examen des motifs politique et juridique qui justifient la révision constitutionnelle au double point de vue de son opportunité et de sa régularité, avec cette conséquence que lorsque l'une des chambres juge l'initiative non fondée, celle-ci est considérée comme rejetée121(*).

3. L'approbation du projet, de la proposition ou de la pétition.

En principe, la révision n'est définitive que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvée par referendum sur convocation du président de la république. Toutefois, le projet, la proposition ou la pétition n'est pas soumis au referendum lorsque l'Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès l'approuvent à la majorité de trois cinquièmes des membres les composant122(*).

Néanmoins, lorsqu'il s'agit de la révision des dispositions majeures de la Constitution, il est souhaitable de convoquer le peuple qui est à la base de la Constitution-pouvoir constituant-même si dans ce contexte, il agit comme pouvoir de révision constitutionnelle et est tenu de respecter la procédure de révision dont l'irrespect n'est pas sans conséquence.

B. Conséquences de la violation de la procédure.

La question des conséquences de l'irrespect des limites formelles mérite d'être précisée car, elle diffère de celles des limites matérielles. En effet, une loi de révision constitutionnelle qui viole une limite matérielle peut être invalidée partiellement lorsque la violation de la Constitution est constatée par le juge constitutionnel. En revanche, la violation d'une étape de la procédure remet en cause la validité de la loi de révision, en ce sens que le juge constitutionnel annule la loi dans son entièreté.

§ 2. Les limites implicites

Dans le cadre de la Constitution sous-examen, les limites implicites sont celles déduites tant des matières intangibles de l'article 220 (S/§ 1) que de l'esprit de la Constitution perceptible à travers les circonstances de Son élaboration et certains principes et valeurs contenus dans l'exposé des motifs (S/§ 2).

S/§ 1. Les limites implicites déduites de l'interprétation de l'article 220

Contrairement à d'autres Constitutions, la Constitution du 18 février 2006 a fait le choix d'immuniser expressément certaines matières plutôt que des dispositions formelles. Cette immunité est portée par l'article 220 alors même que les matières sont organisées par d'autres dispositions constitutionnelles. Partant, l'interdiction de réviser ces matières emporte celle de modifier les dispositions qui les renferment123(*). Celles-ci sont donc des limites intangibles implicites, des clauses irréformables, mieux des dispositions verrouillées. Leur identification passe par l'analyse des matières qu'elles portent.

A. La forme républicaine de l'Etat

La protection de la forme républicaine de l'Etat suppose l'interdiction de consacrer toute technique du pouvoir monarchique comme par exemple l'hérédité ou la concentration des pouvoirs entre les mains d'un seul homme. Par conséquent, toutes les dispositions constitutionnelles, fondées sur le postulat selon lequel « le pouvoir appartient au peuple », prévoyant des mécanismes plus démocratiques de désignation des gouvernants ou introduisant le principe de la séparation des pouvoirs, sont extirpées du champ de révision.

Telle est la réputation des dispositions relatives à l'élection du président de la république124(*), des députés nationaux125(*), des sénateurs126(*), des gouverneurs et vice-gouverneurs127(*) ainsi que des députés provinciaux128(*).

Tel est en outre le cas des dispositions qui traduisent l'idée de la séparation des pouvoirs. Ces dispositions ne peuvent être révisées au profit d'un autre pouvoir de l'Etat sans méconnaitre le principe de la séparation/distribution des pouvoirs. C'est l'hypothèse d'un article qui confère une compétence au pouvoir exécutif, et qui serait modifié pour reconnaitre la même compétence au pouvoir législatif. Compte tenu de leur multitude, à titre illustratif, nous citons des dispositions relatives aux attributions du président de la république129(*), du gouvernement130(*), du pouvoir législatif131(*) et même du pouvoir judiciaire132(*).

B. Le principe du suffrage universel

L'intouchabilité du principe de suffrage universel emporte la prohibition de réviser toutes les dispositions qui organisent le suffrage universel direct ou indirect. Il s'agit des articles 5 al. 4, 70, 101, 104, 109 et 198 de la Constitution.

C. La forme représentative du gouvernement

L'interdiction de passer outre l'exigence de la forme représentative du gouvernement suppose celle de réviser les dispositions relatives à la représentativité tant démocratique que de toutes les sensibilités ethniques, tribales, et régionales. C'est le cas des articles 5, 90 al.3, 101 al.4, 1O4 al.2et 197 in fine de la Constitution.

D. Le nombre et la durée du mandat du président de la république

De cette interdiction découle l'interdiction de modifier l'article 70 de la Constitution.

E. L'indépendance du pouvoir judiciaire

La garantie de l'indépendance du pouvoir judiciaire reste un voeu pieux si l'idée de l'interdiction de réviser certaines dispositions de la Constitution n'est pas comprise. Ainsi, les articles 149, 150, 151 et 152 de la Constitution sont irréformables. Les dispositions qu'ils renferment constituent une part importante du fondement de l'Etat de droit en RDC.

F. Le pluralisme politique et syndical

Le respect effectif de ce principe essentiel de la démocratie emporte l'interdiction de modifier certaines dispositions telles que les articles 6133(*), 7134(*) et 8135(*)de la Constitution.

G. L'interdiction de réduction des droits et libertés de la personne

Cette énième prohibition allonge la liste des articles insusceptibles de révision ou susceptibles de révision que dans le sens du renforcement. Il s'agit des articles dont les dispositions sont relatives aux droits et libertés de la personne. Ils forment le deuxième titre de la Constitution, soit de l'article 11 à 61.

H. L'interdiction de la réduction des prérogatives reconnues aux provinces et aux ETD

La stabilité de la nouvelle forme politico-administrative implique la non-révision des articles relatifs aux compétences des provinces et des ETD136(*).

I. La question de la révision de l'article 220

Dans la Constitution du 18 février 2006, le choix aura été d'immuniser certaines matières et non les dispositions formelles, même si l'immunité de celles-ci découle de ces matières. Cette technique du constituant est à l'aune d'une controverse entre ceux qui pensent que l'article 220 n'est pas révisable et ceux qui envisagent le contraire. Certes, la Constitution elle-même n'a pas pris en charge la question, quand on sait que Ses rédacteurs ont voulu s'inspirer de l'article 89 de la Constitution française mais sans prévenir la controverse.

Juridiquement parlant, l'article 220 de la Constitution n'est pas exempt d'une révision d'autant plus qu'aucune disposition constitutionnelle ne s'y oppose. Cependant, la finalité de pareille entreprise peut paraitre pernicieuse. Est-ce pour extirper une des matières prévues ou pour en ajouter ? Si dans la première hypothèse, la tentative risque d'entrainer un recul démocratique, dans la seconde, en revanche, elle consoliderait peut être des acquis démocratiques, mais créerait par conséquent un précédent, susceptible de susciter des révisions malencontreuses dans l'avenir. D'où l'intérêt de l'affirmation de l'immunité implicite de l'article 220.

S/§ 2. Les limites implicites déduites du sens profond de la Constitution du 18 février 2006 ou de l'esprit de Celle-ci

Edouard DUBOUT soutient que « le droit, que ce soit dans son élaboration et dans sa réalisation, repose nécessairement sur des considérations extra et méta juridiques, un « devoir-être » que l'on nommera « valeurs ». Certes ces valeurs sont en théorie inconnaissables dans une science (pure) de droit. Elles font pourtant que le système juridique est perçu comme juste et en légitime aussi le caractère obligatoire137(*). » Et Jacques DJOLI d'ajouter : « c'est sur la notion de la notion de « valeurs » que se structure l'identité constitutionnelle. Une Constitution repose avant tout sur un ordre de valeurs qui fonde le pouvoir. Ces valeurs suprêmes et fondatrices donnent force et cohérence d'ensemble à un ordre juridique. Ces valeurs sont inhérentes à un ordre constitutionnel, elles font sa substantialité, sa crucialité, son essentialité, son impérativité, son intangibilité. Et c'est cette absence d'identité qui est au coeur de la tragi-comédie du droit constitutionnel africain en général et congolais en particulier138(*) ».

Une Constitution est le « livre des valeurs fondamentales » autour desquelles s'organise l'Etat, valeurs qu'elle trouve « dans les profondeurs de la conscience sociale où les lois s'élaborent et puisent leur autorité139(*) »

Toutefois, l'absence de cette dimension invisible dans la plupart des Constitutions africaines140(*)ne fait pas de celles-ci des textes tombés des nues ; car, il est difficile de trouver une Constitution qui ne soit pas le reflet des préoccupations fondamentales de ses auteurs. En effet, la Constitution du 18 février 2006 doit son existence à un certain nombre de principes, devenues de valeurs, dont certaines sont d'ailleurs traduites en normes141(*). Cette évidence nous incite à distinguer dans les limites déduites de l'esprit de la Constitution, des limites déduites des préoccupations fondamentales à la base de la Constitution (A) et celles déduites de certains principes ou valeurs se trouvant dans l'exposé des motifs ou le préambule (B).

A. Les limites implicites déduites des préoccupations majeures ayant présidé à l'élaboration de la nouvelle Constitution

L'exposé des motifs142(*) indique que les préoccupations majeures qui président à l'organisation de ces institutions sont les suivantes :

1. Assurer le fonctionnement harmonieux des Institutions de l'Etat ;

2. Eviter les conflits ;

3. Instaurer un Etat de droit ;

4. Contrer toute tentative de dérive dictatoriale ;

5. Garantir la bonne gouvernance ;

6. Lutter contre l'impunité ;

7. Assurer l'alternance démocratique.

Ainsi que la relève P-G NGONDANKOY, l'existence des matières intangibles prévues à l'article 220 renforce ainsi le caractère rigide de la Constitution et la rend, sur ces matières, invulnérables aux armes de la révision. Elle traduit des préoccupations majeures du constituant exprimées lors du referendum de 2005, lesquelles constituent l'âme de la Constitution.

S'il faut adhérer à ce point de vue, l'âme de la Constitution doit être protégée. Les sept vaches sacrées ne peuvent être torturées par une révision constitutionnelle importante soit-elle. Certes, elles transparaissent dans les dispositions de l'article 220 ; mais elles constituent en elles mêmes de véritables limites au pouvoir de révision car, elles empêchent la révision de certaines dispositions non immunisées143(*) par l'article 220.

B. Les limites implicites déduites de certains principes et valeurs prévus dans l'exposé des motifs et le préambule.

En rappelant le contexte historique, le constituant dénote quelques principes et valeurs qui fondent certaines dispositions de la Constitution, savoir : La légitimité, l'unité nationale, la démocratie, le consensus national, le sens du compromis, la clause de la responsabilité gouvernementale, l'indépendance du pouvoir judiciaire, la solidarité etc.

De notre point de vue, une révision constitutionnelle qui serait compatible avec l'article 220 et violerait ces principes ou valeurs, n'égratignerait pas moins la Constitution dans Sa substance. Par conséquent, Cette dernière perdrait son identité à cause de l'altération d'un ou de ses principes axiologiques144(*).

Section 2. Les limites hétéronomes et autonomes

L'objet de cette seconde section peut paraitre superflu à bien des égards. Seulement, il nous permet de dire un mot sur les limites qui proviennent d'un ordre juridique extérieur (§1). Cela dit, nous n'allons pas insister sur les limites autonomes (§2) suffisamment analysées dans la première section de ce chapitre.

§ 1. Les limites hétéronomes

Les limites hétéronomes sont celles venant d'un ordre juridique extérieur à la Constitution, qui est l'ordre juridique international145(*). Même si ces limites sont rejetées par une partie de la doctrine, parce que, semble-t-il, n'affectent jamais le pouvoir constituant, elles valent à nos yeux tout leur pesant d'or. En effet, dans ce contexte de floraison des Organisations internationales d'intégration, la RDC ne peut demeurer inflexible face à l'évolution du droit communautaire africain. Les règles secrétées par ces organisations s'appliquent directement sur le sol congolais sans obéir à la procédure classique d'intégration des règles de droit international en droit interne. Dès lors, les Constitutions adoptées ne peuvent faire fi de ces règles.

En effet, la souveraineté nationale n'est pas absolue. Elle connait des limites explicites et implicites en droit interne mais aussi des limites hétéronomes au plan international. Et au plan international, aucun ordre juridique ne saurait revendiquer une autonomie absolue face aux instruments régionaux relatifs aux droits de l'homme146(*). Ainsi, l'article 23 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de gouvernance, interdit tout amendement ou toute révision constitutionnelle ou des instruments juridiques qui portent atteinte au principe de l'alternance démocratique.

§ 2. Les limites autonomes

Les limites autonomes sont celles dérivant d'un ordre juridique interne à la Constitution. Elles sont autonomes parce qu'immanentes à l'ordre constitutionnel d'un Etat. Ces limites autonomes de l'ordre constitutionnel congolais sont celles examinées dans la première section de ce chapitre. A titre illustratif, nous pouvons rappeler certaines données immanentes à l'ordre constitutionnel actuel telles que : la démocratie, l'Etat de droit, les droits de l'homme, la clause de la responsabilité gouvernementale, le régionalisme constitutionnel et le principe de la séparation des pouvoirs.

En effet, toute révision constitutionnelle qui dédaignerait ces données, serait inconstitutionnelle et annulable.

CHAPITRE 3 : LE POUVOIR DE REVISION CONSTITUTIONNELLE A L'EPREUVE DE LA PRATIQUE

Si la RDC a brillé dans l'entreprise de production de nouvelles Constitutions, elle n'en demeure pas moins reluisante dans celle de révisions constitutionnelles. Son outil de production est resté compétitif si bien que l'afflux des révisions constitutionnelles d'antan (Section 1), ne semble pas s'arrêter sous le règne de l'actuelle Constitution (Section 2).

Section 1 : Les péripéties révisionnistes d'avant la Constitution du 18 février 2006

De toutes les révisions constitutionnelles connues avant la Constitution du 18 février 2006, seules celles entreprises sous les Constitutions adoptées par referendum nous intéressent. Il s'agit de la Constitution du 1er aout 1964 (§1) et la Constitution du 24 juin 1967 (§2).

§1. Les révisions constitutionnelles sous la Constitution du 1er aout 1964

De toutes les Constitutions adoptées par referendum, la Constitution du 1er aout 1964 se distingue par son brièveté. Une année après Sa promulgation, Elle connut, sans respect de la procédure régulière, des révisions intervenues à la suite du coup d'Etat de novembre 1965. Ce fut les cas de l'ordonnance-loi n°7 du 30 novembre 1965 accordant des pouvoirs spéciaux au président de la république, l'ordonnance-loi n°66-92 bis attribuant le pouvoir législatif au président de la république, l'ordonnance-loi n°66-621 du 21 octobre 1966 relatif aux pouvoirs du président de la république et du parlement et l'ordonnance n°66-612 du 27 octobre 1966 conférant au président de la république les pouvoirs du premier ministre.

Il en résulte que la valeur constitutionnelle de ces textes de révision constitutionnelle peut être remise en cause sous la Constitution du 1er aout 1964. Cependant, de manière passagère, deux d'entre elles seront analysées.

A. Ordonnance-loi n°66-92 bis du 7 mars 1966 attribuant le pouvoir législatif au président de la république

L'analyse de cette ordonnance-loi passe par la précision de son contenu (1) et de son impact sur la Constitution du 1er aout 1964 (2).

1. Contenu de l'ordonnance-loi

Cette ordonnance est prise en remplacement de l'ordonnance-loi (à article unique) du 30 novembre 1965 accordant des pouvoirs spéciaux au président de la république.

Article 1 : Le pouvoir législatif est attribué au Président de la République, qui l'exerce par ordonnances-lois.

Article 2 : Les ordonnances-lois sont transmises pour information à la chambre des députés et au Sénat dans les deux mois qui suivent la date de leur signature.

Article 3 : L'ordonnance-loi n°7 accordant des pouvoirs spéciaux au Président de la République.

2. Portée de l'ordonnance-loi

Cette ordonnance-loi abroge l'al. 1 de l'article 90 de la Constitution qui reconnait la compétence d'exercer le pouvoir législatif national à la chambre des députés et au Sénat. En cela, elle crée une situation de confusion des pouvoirs entre les mains du Lieutenant-Général J.D. MOBUTU. Ce qui est donc une violation de l'esprit de la Constitution adoptée selon la technique classique d'aménagement des pouvoirs.

B. Ordonnance-loi n°66-612 du 26 octobre 1966 conférant au président de la république les pouvoirs du 1er ministre

Son analyse passe aussi par l'identification de son contenu (1) et de la portée de son adoption (2).

1. Contenu de l'ordonnance-loi

Les deux premiers articles disposent :

Article 1 : Le Général de brigade Léonard Mulumba est déchargé de ses fonctions de Premier ministre.

Article 2 : Les fonctions de Premier ministre seront, à la date de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, exercées par le Président de la République, en sus des pouvoirs lui reconnus par la Constitution du 1er aout 1964.

2. Portée de l'ordonnance-loi

Intervenue dans un contexte d'instauration d'un nouveau régime, l'ordonnance-loi suspend l'application des articles 62, 63, 64, 65 et 66 de la Constitution du 1er aout 1964. Partant, l'orientation vers le régime semi-présidentiel avec d'une part, l'autorité absolue du président de la république, et d'autre part, le parlement qui peut, dans les limites du texte constitutionnel, mettre le gouvernement en difficulté, se recroqueville vers le régime présidentiel pour ne pas dire présidentialiste.

§2. Les révisions constitutionnelles sous la Constitution du 24 juin 1967

L'histoire retient que la Constitution du 24 juin 1967 a connu au moins dix-sept révisions constitutionnelles147(*). Ainsi, pour ne pas aller au-delà de notre objet de recherche, l'analyse sur ce point porte uniquement sur la loi du 23 décembre 1970 consacrant «  l'institutionnalisation » du Mouvement Populaire de la Révolution et la loi du 15 aout 1974 instituant le « mobutisme comme doctrine » du Mouvement Populaire de la Révolution et consacrant la « plénitude » de l'exercice du pouvoir par le président de la république.

A. La loi n°70-001 du 23 décembre 1970 portant institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution

Adoptée comme la deuxième révision constitutionnelle sous la Constitution du 24 juin 1967, cette loi change fondamentalement l'identité de celle-ci à travers ses articles 4, 19, 21, 37 et 39. Les nouvelles dispositions sont les suivantes :

Article 4 : Le Mouvement populaire de la révolution est le seul parti politique de la république.

Article 19 : Les principales institutions de la république sont : Le Mouvement populaire de la révolution, le Président de la république (Président du parti et chef du gouvernement), l'Assemblée nationale, le Gouvernement, la Cour constitutionnelle et les Cours et tribunaux.

Article 19 bis : Le Mouvement Populaire de la Révolution est l'institution suprême de la République. Il est représenté par son président.

Article 21 (al. 5) : Une loi organique fixe les conditions de la présentation du candidat, du déroulement du scrutin, du dépouillement et des proclamations des résultats.

Article 37 : La loi électorale fixe les conditions de présentation des candidats, le régime des incompatibilités, les modalités des opérations électorales et les conditions dans lesquelles sont désignées les personnes appelées, en cas de vacance du siège, à remplacer les membres de l'Assemblée nationale jusqu'au renouvellement du parlement.

Article 39 : Lorsqu'un député se rend coupable de manquement grave à la discipline du parti, il perd son mandat à l'Assemblée nationale et y est remplacé par un suppléant.

Il ressort de toutes ces dispositions révisées que la loi du 23 décembre 1970 institutionnalise le MPR comme le seul parti existant sur le territoire congolais. Ce passage du bipartisme au monopartisme peut être considéré comme un changement de régime politique148(*). Ce monopartisme corsète les droits des citoyens et consacre un véritable recul démocratique ouvrant la voie à l'émergence de la dictature.

B. La loi n°74/020 du 15 aout 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967

Dans moins d'un lustre, la loi qui tire toutes les conséquences de l'institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution fut adoptée. On peut lire au titre 1er de cette Constitution révisée : « le régime politique adopté est authentiquement zaïrois. Il diffère à plusieurs égards de celui instauré en 1967, en ce qu'il ne comprend plus qu'une seule institution, le Mouvement Populaire de la Révolution qui détient la plénitude du pouvoir et dont le Président est l'incarnation. En conséquence, toutes les anciennes institutions sont devenues des organes du Mouvement Populaire de la Révolution fonctionnant sous la responsabilité, la direction et la présidence du Président du Mouvement Populaire de la Révolution. Le Président du Mouvement Populaire de la Révolution a donc la plénitude du pouvoir... »

A l'époque, la RDC marque son entrée dans la nouvelle phase dictatoriale car, le peuple a été remplacé par le MPR en sa qualité de détenteur ultime du pouvoir. Jacques DJOLI écrit à ce propos : « le Mouvement Populaire de la Révolution constitue la véritable source de légalité dont toutes les décisions s'imposent aux organes subordonnés149(*) ».

Cette loi n'a pas empêché les chercheurs à s'empoigner sur sa véritable valeur juridique. Alors que les uns considèrent qu'il s'agit d'une simple révision constitutionnelle, les autres par contre, insinuent l'idée d'une nouvelle Constitution frauduleusement adoptée. En tout état de cause, la révision du 15 aout 1974 compte parmi les révisions majeures de l'histoire constitutionnelle congolaise, actuellement suspendue par la Constitution du 18février 2006.

Section 2 : Les péripéties révisionnistes sous la Constitution du 18 février 2006

En neuf ans d'existence, l'actuelle Constitution fait l'objet de plusieurs tentatives de révisions avortées (§1) et d'une initiative réussie (§2).

§1. Les tentatives avortées

Ces tentatives sont au nombre de trois.

A. La première tentative avortée

Jacques DJOLI renseigne : « Le 5 novembre 2007, le Bureau de l'Assemblée Nationale a été saisi officiellement d'une proposition de loi portant révision de la Constitution assortie d'une pétition signée par 300 députés de la Majorité. Le processus de cette révision constitutionnelle avait été déclenché le 04 juillet 2007 par le député TSHIBANGU KALALA. La révision constitutionnelle concernait les articles 110, relatif à la fin du mandat parlementaire, 152 se rapportant à la composition et à la présidence du Conseil Supérieur de la Magistrature et 197 en rapport avec les attributions des Assemblées Provinciales et le statut de leurs membres150(*) ».

Cette tentative échoua suite à la mobilisation de l'opinion. Le président de la République, dans son discours devant le Congrès, affirma : « je ne peux en finir avec les réformes juridiques sans nous mettre en garde contre la tentation de vouloir régler tout dysfonctionnement éventuel des institutions par une révision constitutionnelle. En principe, la loi fondamentale d'un pays ne devrait être modifiée qu'en cas d'extrême nécessité et uniquement dans l'intérêt supérieur de la nation151(*) »

B. La deuxième tentative avortée

Pour une fois encore, l'on note dans les écrits de Jacques DJOLI ce qui suit : « Deux ans après la tentative du député KALALA TSHIBANGU, le débat sur la révision a refait surface au sein de la classe politique congolaise. En effet, au courant du mois d'aout 2009, par une lettre officielle, le directeur du cabinet du Chef de l'Etat a saisi les présidents de deux chambres du parlement aux fins d'obtenir la désignation de deux représentants de chaque chambre du parlement à l'effet de faire partie d'une commission chargée d' évaluer la mise en oeuvre de la révision de la Constitution. S'appuyant sur les réflexions des experts, il a été envisagé la modification de certaines dispositions de la Constitution en vue d'un recentrage autour de certains impératifs majeurs. Il fut envisagé de réviser les dispositions concernant, notamment, le mandat présidentiel, la composition du pouvoir judiciaire, l'installation de nouvelles provinces sur la base des articles 2 et 226152(*) ». Cette tentative avorte suite à la contestation des forces vives et surtout de l'Opposition qui dénonça le caractère inconstitutionnel de la démarche initiée par un organe non prévu par la Constitution et surtout l'illégitimité des experts.

C. La troisième tentative avortée

C'est encore le Constitutionnaliste Jacques DJOLI qui développe l'historique de cette troisième tentative : « A l'issue du Conseil des ministres du 9 juin 2014, le porte-parole du gouvernement a annoncé la révision de quelques articles de la Constitution. Et cette révision se justifie, selon le ministre, par la nécessité de corriger les faiblesses qui ont été à la base des dysfonctionnements observés, notamment, lors des élections législatives et présidentielle de novembre 2011 ; des dysfonctionnements ayant engendré de nombreuses irrégularités tant décriées aussi bien par la communauté nationale que par la communauté internationale153(*) ».

§2. L'initiative réussie du 20 janvier 2011

Avant d'analyser les dispositions révisées (B), il sera question de définir le contexte historique (A).

A. Le contexte historique

Lors de la session extraordinaire de décembre 2010, l'Assemblée Nationale inscrit à son calendrier un point relatif à la révision constitutionnelle souhaitée par une proposition de loi portant révision de la Constitution du 18 février 2006. Cette initiative était signée par plus de 350 députés, essentiellement de l'Alliance pour la Majorité Présidentielle (AMP). Cette initiative, déposée au bureau de l'Assemblée Nationale le 10 janvier, fit l'objet d'un examen en séance plénière le 11 janvier 2011. Sur 337 députés qui ont pris part au vote, 334 ont voté pour, 1 a voté contre et 2 se sont abstenus. L'opposition a boycotté cette séance. Le débat sur le bien-fondé du texte eut également lieu au Sénat le 14 janvier où les sénateurs dénoncèrent la violation des articles 116 et 125 de la Constitution. Usant de sa majorité, le pouvoir confirma le bien-fondé de cette révision.

Dans l'exposé des motifs, le pouvoir de révision constitutionnelle justifie son oeuvre en ces termes : «  Depuis l'entrée en vigueur, le 18 février 2006, de la Constitution de la République Démocratique du Congo, le fonctionnement des institutions politiques tant centrales que provinciales a fait apparaitre des situations concrètes, des contraintes et des problèmes non prévus par le constituant originaire. En effet, d'une part, certaines dispositions se sont révélées handicapantes et inadaptées aux réalités politiques et socio-économiques de la République Démocratique du Congo. D'autre part, des dysfonctionnements imprévus par le constituant originaire sont apparus dans la vie des institutions de la République tant au niveau national que provincial. La présente loi a pour finalité de donner des réponses adéquates aux problèmes posés aux institutions de la République depuis le début de la première législature de la 3ème République afin d'assurer le fonctionnement régulier de l'Etat et de la jeune démocratie congolaise ».

B. L'analyse des dispositions révisées

Les huit articles concernés sont les suivants :

- L'art. 71 qui institue désormais l'élection du président de la république à la majorité simple des suffrages exprimés ;

- L'art. 110 qui institue le droit du député national ou du sénateur de retrouver son siège après l'exercice d'une fonction incompatible ;

- L'art. 126 qui prévoit désormais l'ouverture de crédits provisoires dans le cas de renvoi au parlement par le président de la république du projet de loi des finances ;

- L'art. 149 qui affirme que seuls les cours et tribunaux exercent le pouvoir judiciaire à l'exclusion du parquet qui serait sous l'autorité hiérarchique de la chancellerie ;

- Les articles 197 et 198 qui donnent au président de la république le pouvoir de dissoudre les assemblées provinciales et de relever de ses fonctions un gouverneur de province en cas de crise grave et persistante menaçant le fonctionnement régulier des institutions provinciales ;

- L'art. 218 qui reconnait au président de la république le pouvoir de convoquer le peuple au référendum prévu pour l'approbation d'une révision constitutionnelle ;

- L'art. 226 qui transfère à la loi la compétence de fixer les modalités d'installation de nouvelles provinces citées à l'article 2 de la Constitution.

Il apparait qu'aussi bien la forme que le fond de cette révision soulèvent des préoccupations sur les limites du pouvoir de révision constitutionnelle

1. Sur la forme

Sans toutefois heurter les limites de forme prévues à l'article 218 de la Constitution, la révision constitutionnelle de 2011 n'est pas à l'abri des critiques fondées sur les articles 116 et 125 de la Constitution. En effet, l'article 116 dispose : « chaque chambre du Parlement peut être convoquée en session extraordinaire par son Président sur u ordre du jour déterminé, à la demande soit de son Bureau, soit de la moitié de ses membres, soit du Président de la république, soit du gouvernement. La clôture intervient dès que la Chambre a épuisé l'ordre du jour pour lequel elle a été convoquée et, au plus tard, trente jours à compter de la date du début de la session.»

Dans ce contexte de révision, les sénateurs ont fustigé le fait que la matière relative à la révision constitutionnelle n'était pas inscrite à l'ordre du jour de la session extraordinaire. Et ce, violant l'article 116.

Par ailleurs, l'article 125 soustrait notamment les propositions et projets d'amendement de la Constitution de la procédure législative d'urgence. De ce fait, cette question ne pouvait être traitée en urgence sans tenir compte de la particularité et de la sensibilité du fond de la révision.

2. Sur le fond

Un brin de lucidité permet d'extirper des fourches caudines de certaines dispositions révisées les violations de la lettre et de l'esprit de la Constitution :

a. Le nouvel article 71

« Le président de la république est élu à la majorité simple des suffrages exprimés »

Certes, la nouvelle formulation de cet article n'énerve pas l'article 220. Cependant, la possibilité offerte à un candidat président de la république d'être élu à la majorité simple des suffrages exprimés, peut être à l'aune de la résurgence de l'une des causes fondamentales des crises politiques connues dans le pays : la contestation de la légitimité des institutions et de leurs animateurs.

D'un point de vue sociologique et dans contexte de pluralité des candidatures, la légitimité du président élu par une minorité d'électeurs, vraisemblablement majoritaire par rapport aux suffrages accordés à d'autres concurrents, peut être contestée eu égard à l'immensité de la population.

Dès lors, la solution fournie par le constituant- l'élection du président de la république à la majorité absolue des suffrages exprimés- est détournée par une poignée de politiciens, altérant ainsi l'esprit de la Constitution154(*).

b. Le nouvel alinéa 2 de l'article 149

« Il est dévolu aux cours et tribunaux qui sont : la Cour constitutionnelle, la Cour de cassation, le Conseil d'Etat, la Haute Cour militaire ainsi que les Cours et Tribunaux civils et militaires. »

Il ressort de cette nouvelle formulation que l'incise « ainsi que les parquets rattachés à ces juridictions » a été supprimée. La remise en cause de la structure du pouvoir judiciaire viole tant la lettre que l'esprit de la Constitution. Cette affirmation tire son fondement non seulement du droit positif mais aussi des opinions doctrinales récentes.

En effet, l'indépendance du pouvoir judiciaire consacré à l'article 220 de la Constitution transparait dans les libellés des articles 149, 150, 151 et même 152 de la Constitution. Ces articles ne peuvent donc faire l'objet d'une révision constitutionnelle sans violer le principe de l'indépendance du pouvoir judiciaire. De plus, cette indépendance est affirmée dans l'exposé des motifs. Ainsi, cette consécration et cette affirmation révèlent l'entendement du pouvoir constituant sur la composition du pouvoir judiciaire155(*).

De ce point de vue, extirper le parquet du pouvoir judiciaire, alors qu'il dispose avec les cours et tribunaux du même organe de gestion- partageant d'ailleurs les responsabilités au sein cet organe- parait absurde. Cette absurdité se révèle grandissante car, l'option levée par de la considération selon laquelle le parquet serait un organe du pouvoir exécutif, duquel il reçoit injonction.

Curieusement, conformément à l'article 70 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013, ce pouvoir d'injonction s'exerce par la saisine du procureur général près la Cour de cassation ou le procureur général près la Cour d'appel selon le cas sans avoir à interférer dans la conduite de l'action publique. Il est dès lors illogique que ce fameux pouvoir d'injonction vienne ébranler la place du parquet au sein du pouvoir judiciaire en droit positif congolais.

Madame Rassat LAURE note d'ailleurs : « il n'est pas vrai qu'en ce qui concerne la mise en mouvement de l'action publique les officiers du ministère public ne sont que des fonctionnaires chargés d'exécuter la volonté du gouvernement sans que la considération de la loi ait à intervenir. En effet, le ministère public est lié par le principe de la légalité des infractions et des peines, ce qui lui interdit de poursuivre si aucune loi pénale n'a été violée. La conséquence de ce principe est que la distinction traditionnelle entre l'officier du ministère public, fonctionnaire dans son parquet, et le magistrat à l'audience, où il devient l'homme de la loi à grande importance et même plus à l'origine du procès pénal que pendant son déroulement156(*) ».

Ce point de vue reste partagé par Raoul DECLERQ : « Les magistrats du parquet ne sont pas des fonctionnaires de l'ordre administratif. Ils ne font pas partie du pouvoir exécutif, mais du pouvoir judiciaire. Ils n'agissent pas pour le compte du gouvernement, mais tiennent leurs pouvoirs d'une délégation directe de la nation157(*) ».

En définitive, le magistrat du parquet reste magistrat aussi bien durant l'instruction pré juridictionnelle qu'à l'audience158(*).

c. Les articles 197 et 198

Ils reconnaissent au président de la république le pouvoir de dissoudre une assemblée provinciale et de relever de ses fonctions un gouverneur de province en cas de crise grave et persistante menaçant le fonctionnement régulier des institutions provinciales. Cette nouvelle attribution apparait aux yeux de certains observateurs159(*)comme le brisement de l'équilibre institué et l'atteinte aux prérogatives des provinces.

En effet, Bob KABAMBA abonde dans ce sens : « nous avons doté la RDC d'une bonne Constitution (sic) qui permet d'avoir des institutions où aucune institution n'est supérieure par rapport à l'autre. Cette Constitution a été faite pour qu'il y ait une gestion pacifique de l'après-conflit, avec équilibre entre le président de la république, et le premier ministre, entre le Sénat et l'Assemblée nationale, entre l'Etat central et les provinces, entre la gendarmerie (sic) et la police, etc., donc une série des mécanismes qui permet d'avoir une gestion équilibrée sans que celui qui prend le pouvoir puisse se permettre d'écraser d'autres institutions. C'est cela la philosophie de la Constitution de 2006 (...) en faisant la modification de 2011, on a modifié l'équilibre des institutions. C'est-à-dire que l'on a renforcé le pouvoir du président de la république par rapport à ce qui a été décidé par referendum en 2006 (...) on n'est plus dans un mécanisme équilibré entre les institutions, mais vers le présidentialisme160(*) ».

Par ailleurs, il est à noter que la révision de ces dispositions porte atteinte aux prérogatives des provinces, partant à la forme de l'Etat consacré. Sur la question, la doctrine considère unanimement qu'il s'agit du régionalisme constitutionnel. Cette forme de l'Etat est définie comme une organisation caractérisée par la reconnaissance constitutionnelle d'une réelle autonomie politique et normative au profit des collectivités régionales tout en sauvegardant le caractère unitaire de l'Etat161(*).

Il se dégage de cette réelle autonomie politique que les autorités politiques sont élus et disposent en même temps des pouvoirs exécutif et législatif. Par conséquent, elles sont habilitées à résoudre toutes les crises politiques qui surviennent dans le fonctionnement des institutions provinciales selon les mécanismes de contrôle et de collaboration prévus dans la Constitution.

Au regard de ce qui précède, la nouvelle attribution dont s'abreuve le président de la république s'annonce comme une méconnaissance de l'autonomie politique des provinces et témoigne de la volonté de contrôler politiquement la province, peu importe la justification162(*).

L'on parle de crise institutionnelle persistante. Aux termes de l'article 19 de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant Principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces : « il y a crise institutionnelle persistante lorsque : 1) pendant 6 mois successifs, l'Assemblée provinciale n'arrive pas à dégager une majorité ; 2) elle ne peut se réunir pendant une session faute de quorum ; 3) au cours de deux sessions d'une même année, le gouvernement provincial est renversé à deux reprises. Dans ces cas les Présidents du parlement constatent la dissolution de plein droit et en font rapport au Président de la République qui en prend acte par ordonnance contresignée par le Premier ministre. »

Y voir de près, ces hypothèses sont toutes politiques et insusceptibles d'entrainer le blocage indéfini du fonctionnement de la province. Elles peuvent se résoudre politiquement entre les institutions de la province à travers notamment des coalitions politiques. Les raisons avancées sont donc à prendre avec des pincettes.

d. L'article 218

La révision de l'article 218 ne laisse pas la doctrine indifférente. Une partie d'elle estime qu'en modifiant la procédure de révision, le pouvoir de révision transforme une partie de la Constitution et change l'autorité maitresse de Celle-ci163(*).

IIème PARTIE : SCHEMA DU CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS DE REVISION CONSTITUTIONNELLE

Quelle est l'efficacité des clauses constitutionnelles intouchables ? Cette efficacité ne peut se mesurer que par rapport à la probabilité des dispositions limitant la révision constitutionnelle à être appliquées par le juge, répond Evariste BOSHAB. Là où le contrôle de constitutionnalité n'est pas organisé, la présence des dispositions sanctuarisées équivaut à une simple clause de style en l'absence d'organe devant lequel le respect desdites dispositions peut être exigé164(*).

La première partie de cette étude atteste sans ambages que l'efficacité des limites du pouvoir de révision constitutionnelle laisse à désirer. Il s'observe un hiatus manifeste entre le cadre juridique du pouvoir de révision dans la Constitution du 18 février 2006 et la praxis de ce même pouvoir. Prenant les allures d'une fraude à la Constitution165(*), ce vieux décalage suscite de sérieuses inquiétudes sur l'avenir de cette Constitution qui s'échinent à enserrer les phénomènes politiques dans l'étreinte juridique.

Fondamentalement, les expériences de révision constitutionnelle soulèvent une problématique inédite en droit positif congolais : le contrôle de constitutionnalité de l'oeuvre du pouvoir de révision constitutionnelle. Malgré les objections qu'il éveille sous d'autres cieux166(*), ce mécanisme de rationalisation des limites du pouvoir de révision constitutionnelle connait du vent en poupe par ailleurs167(*). Son succès se propage jusqu'en RDC où il est perçu, à n'en point douter, comme la panacée ultime au phénomène de violation des limites consacrées.

Cette seconde partie tentera donc de présenter le schéma de mise en oeuvre de contrôle de constitutionnalité (chap. 2). Avant cela, il sera question de passer en revue les expériences étrangères avant d'en trouver les justifications (chap.1).

CHAPITRE 1 : LE CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS DE REVISION CONSTITUTIONNELLE : EXPERIENCES EN DROIT COMPARE ET JUSTIFICATIONS

Le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle fait l'objet d'une riche épreuve en droit comparé (section 1). Binaire qu'elle soit, cette épreuve met en évidence deux options principales. Prévu ou imprévu, ce contrôle trouve des justifications dont celles favorables à son organisation méritent d'être élucidées (section 2).

Section 1 : Expériences en droit comparé

La question du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle dévoile un contraste sur la solution trouvée par les Etats. Ainsi qu'il nous arrive de remarquer, les uns sont hostiles à ce contrôle (§ 1), et les autres sont, en revanche, favorables (§ 2).

§1. Les Etats hostiles au contrôle

Il s'agit principalement de la France (A) et du Sénégal (B).

A. La France168(*)

Comme l'écrivent Armel le DIVELLEC, Anne LEVADE et Carlos Miguel PIMENTEL, « la question du contrôle de constitutionnalité des lois constitutionnelles peut, au seul prisme franco-français, sembler ne pas devoir être posée puisque, à trois reprises sollicité, le Conseil constitutionnel a, par deux fois, conclu à son incompétence pour statuer et, dans le troisième cas, rappelé que « le pouvoir constituant est souverain ». Bien connues et abondamment commentées, les décisions n'en méritent pas moins d'être évoquées dans la mesure où, relatives à des textes de nature différente, elles ont, en trois temps, contribué à l'affirmation de l'idée selon laquelle, en France, les lois constitutionnelles échapperaient à tout contrôle de constitutionnalité ».

C'est, tout d'abord, la loi relative à l'élection du président de la République au suffrage universel direct qui, adoptée par le référendum du 28 octobre 1962, fut soumise au Conseil constitutionnel par le président du Sénat. Non exclusivement constitutionnelle par son objet, la loi voyait sa constitutionnalité contestée « tant en raison de son contenu que des irrégularités flagrantes de la procédure qui a abouti à son adoption ». Celles des dispositions de la loi qui révisaient la Constitution étaient explicitement visées, conduisant l'auteur de la saisine à considérer que « intrinsèquement, le référendum du 28 octobre 1962 était irrégulier, car la seule procédure instituée par la Constitution pour sa propre révision est celle définie par l'article 89 ». Pressentant que la nature référendaire de la loi pourrait être un obstacle au contrôle, il ajoutait que « l'exercice de la souveraineté nationale (···) n'est en effet légitime que dans le respect des règles et des procédures instituées par la Constitution. Admettre qu'il puisse en être autrement en cas de référendum conduirait nécessairement à admettre que les représentants du peuple ne sont également soumis à aucune règle constitutionnelle dans l'exercice de la souveraineté qui leur est déléguée. Ce serait donc ruiner, non seulement la base même du Droit, mais celle de toute stabilité des institutions ». L'argument n'a guère porté puisque, en appelant à la lettre autant qu'à « l'esprit de la Constitution », le Conseil constitutionnel a décidé qu'il « n'avait pas compétence pour se prononcer sur la demande susvisée du président du Sénat169(*) ».

Ensuite, la deuxième étape, c'est à l'occasion du contrôle de compatibilité d'un traité avec la Constitution que le Conseil constitutionnel trouva matière à livrer son analyse quant à la nature des révisions constitutionnelles. Saisi pour la seconde fois, sur le fondement de l'article 54 de la Constitution, de la compatibilité du traité sur l'Union européenne avec la Constitution après que celle-ci avait été révisée afin de prendre en considération les incompatibilités qu'il avait, par sa première décision, révélées, le Conseil constitutionnel estima nécessaire de préciser les conditions dans lesquelles il considérait devoir statuer. En premier lieu, le Conseil constitutionnel indique que, saisi d'un traité déjà examiné, après que les obstacles constitutionnels ont, par une révision, été levés, il limite son contrôle, dans le respect de l'article 62 de la Constitution, aux hypothèses dans lesquelles, d'une part, la Constitution révisée demeurerait contraire à une ou plusieurs stipulations du traité et, d'autre part, une disposition insérée dans la Constitution aurait pour effet de créer une incompatibilité nouvelle avec le trait 10. En second lieu, conscient que sa décision pouvait être perçue comme contrôlant la pertinence de la révision réalisée, le Conseil expose, en préalable, les conditions constitutionnelles d'exercice du pouvoir de révision. Ainsi considère-t-il que « sous réserve, d'une part, des limitations touchant aux périodes au cours desquelles une révision de la Constitution ne peut pas être engagée ou poursuivie, qui résultent des articles 7, 16 et89, alinéa 4, du texte constitutionnel et, d'autre part, du respect des prescriptions du cinquième alinéa de l'article 89 en vertu desquelles «la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une révision», le pouvoir constituant est souverain ; qu'il lui est loisible d'abroger, de modifier ou de compléter des dispositions de valeur constitutionnelle dans la forme qu'il estime appropriée ; qu'ainsi rien ne s'oppose à ce qu'il introduise dans le texte de la Constitution des dispositions nouvelles qui, dans le cas qu'elles visent, dérogent à une règle ou à un principe de valeur constitutionnelle ; que cette dérogation peut être aussi bien expresse qu'implicite170(*)» .

Ultime étape, enfin, une décision de 2003 donnait, pour la première fois, au juge constitutionnel l'occasion de statuer sur une loi de révision. Saisi par soixante et un sénateurs de la révision de la Constitution relative à l'organisation décentralisée de la République approuvée par le Congrès le 17 mars 2003, le Conseil constitutionnel considère, lapidaire, qu'il « ne tient ni de l'article 61, ni de l'article 89, ni d'aucune autre disposition de la Constitution le pouvoir de statuer sur une révision constitutionnelle », concluant, fort logiquement, à son incompétence. Abondamment commentée, la décision fut jugée prévisible, mais la prévisibilité n'emporta pas, loin s'en faut, l'assentiment. La double circonstance d'une décision laconique et d'une démonstration - convaincante autant qu'autorisée - prouvant qu'une autre solution aurait pu être envisagée contribua à ce que la doctrine analyse le raisonnement comme rigide à l'excès Si, jurisprudentiellement, le principe de l'incompétence du Conseil constitutionnel pour contrôler les lois de révision était ainsi et à la première occasion, affirmé, le « verrou » qu'il comportait sembla, un temps, de nature à relancer une dispute que l'on aurait pu croire apaisée171(*).

B. Le Sénégal172(*)

Au Sénégal, depuis l'avènement du Conseil constitutionnel en 1992, comme dans la plupart des Constitutions africaines issues du processus de transition démocratique, en vue de renforcer l'État de droit par une « authentique justice constitutionnelle », le juge a été saisi plusieurs fois d'un recours dirigé contre une loi constitutionnelle concernant soit la réforme des institutions soit, là aussi, le mandat du président ou des députés ou tout simplement d'une demande d'avis concernant un projet de révision de la Constitution.

La solution constante défendue par le juge constitutionnel sénégalais est de déclarer son incompétence pour contrôler les lois constitutionnelles favorisant une instrumentalisation de la révision constitutionnelle alors, qu'à l'analyse, une reconnaissance de compétence contribue au renforcement de l'Etat de droit.

§2. Les Etats favorables au contrôle

Ici, le choix porte exclusivement sur les Etats africains. Il s'agit du Mali (A) et du Benin (B).

A. Le Mali173(*)

Au Mali, une loi portant révision de la Constitution, adoptée le 21 juillet 2001, a été déférée à la Cour constitutionnelle par un groupe de députés contestant sa constitutionnalité par deux requêtes.

L'articulation de la saisine fait état de plusieurs moyens. D'abord, en son article 5, la loi portant révision de la Constitution propose une nouvelle rédaction de la Constitution du 25 février 1992 qui dispose que « l'État reconnaît et garantit, dans les conditions fixées par la loi, la liberté d'aller et de venir, le libre choix de la résidence, la liberté d'association, de réunion, de cortège, de manifestation». Par la révision, d'abord le pouvoir constituant décide de ne plus engager l'État dans la reconnaissance et la garantie des droits constitutionnels mentionnés.

Ensuite, la loi constitutionnelle propose une nouvelle rédaction de l'article 41 de la Constitution selon laquelle le président de la République, « après avis de la Cour constitutionnelle, (...), peut soumettre au référendum toute question d'intérêt national ». Par cette modification, les auteurs de la révision remettent en cause le caractère obligatoire de l'avis du juge constitutionnel en matière de référendum, ce qui, selon les saisissants, viole la compétence reconnue à la Cour de donner son avis sur la révision de la Constitution qui « constitue un acte d'intérêt national.

Enfin, dans un autre domaine, la révision procède au changement de plusieurs statuts et régimes notamment en accordant une immunité constitutionnelle au président de la République pour les crimes et délits commis dans l'exercice de ses fonctions.

Mais l'un des arguments les plus sérieux invoqués par les saisissants pour contester la révision est sans doute le moyen tiré de la violation flagrante par le Gouvernement de la procédure de révision de la Constitution. En effet, le texte que le Gouvernement soumet à l'approbation du peuple est différent de celui voté par l'Assemblée nationale. Quatorze articles ont été corrigés « à la main » dans le sens favorable au Gouvernement en violation des règles les plus élémentaires applicables en matière de procédure de révision.

Dans ses moyens de défense, le Gouvernement invoque des arguments peu convaincants relatifs au non-respect des délais de saisine, à l'incompétence de la Cour, ou encore le défaut de qualité des saisissants, moyens assez curieux puisqu'ils émanent tous de l'Assemblée nationale. Le juge, avant de se prononcer au fond, a d'abord soulevé la question de la recevabilité de la requête en ces termes : « Considérant que la loi portant révision de la Constitution qui est l'objet du référendum n'étant pas une loi organique, fait donc partie des autres catégories de lois prévues à l'article 88 de la Constitution ; qu'en conséquence, elle est susceptible de recours en contrôle de constitutionnalité devant la Cour constitutionnelle ».

Selon donc le juge constitutionnel malien, il n'y a pas expressément une reconnaissance d'immunité juridictionnelle des lois constitutionnelles. Il considère qu'il n'y a que deux catégories de lois prévues par la Constitution: les lois organiques, qui sont obligatoirement soumises par le premier Ministre à la Cour constitutionnelle avant leur promulgation et les autres lois. La loi constitutionnelle est à ranger dans cette seconde catégorie et est donc recevable en contestation devant la Cour.

B. Le Benin174(*)

Au Bénin, en 2006, une révision constitutionnelle a été adoptée par les députés pour augmenter la durée du mandat parlementaire avec effet rétroactif pour ce qui concerne la législature en vigueur. La Cour constitutionnelle a été saisie par un grand nombre de requérants comprenant des députés mais aussi des membres de la société civile, voire de simples particuliers, ce qui traduit l'intérêt mais aussi l'émotion suscitée par la révision.

La saisine de la Cour par des membres d'Association de statuts différents (société civile, associations politiques, mouvements d'association de jeunes, regroupements à caractère culturel ou religieux) met, en effet, en évidence deux éléments essentiels, qui, au fond, peuvent avoir une influence plus ou moins directe sur la construction du raisonnement du juge constitutionnel béninois.

C'est d'abord l'enjeu de la question posée, laquelle comporte plusieurs dimensions. Au-delà du débat juridique de conformité de la loi portant révision à la Constitution, il semble bien que le « litige » ait un aspect politique : il s'agit de défendre l'engagement citoyen pour l'État de droit, qui serait en quelque sorte menacé par les termes de la modification du mandat.

C'est ensuite la place ou plutôt l'attente de la place du juge constitutionnel dans le paysage institutionnel. Une analogie peut, en effet, être faite entre le recours des saisissants et une plainte contre les députés en ce sens que les moyens invoqués mettent en évidence cet argument : il vous appartient à vous, juge constitutionnel, de rappeler les élus de la Nation à l'ordre parce qu'ils ont transgressé la « Loi ».

Sans soulever la question de sa compétence pour connaître des lois constitutionnelles, la Cour déclare l'inconstitutionnalité de la loi portant révision en ces termes : « Considérant que le mandat de quatre ans, qui est une situation constitutionnellement établie, est le résultat du consensus national, dégagé par la Conférence des Forces Vives de la Nation de février 1990 et consacré par la Constitution en son Préambule qui réaffirme l'opposition fondamentale du peuple béninois à la confiscation du pouvoir ; que si la Constitution a prévu les modalités de sa propre révision, la détermination du peuple béninois à créer un État de droit et de démocratie pluraliste, la sauvegarde de la sécurité juridique et de la cohésion nationale commandent que toute révision tienne compte des idéaux qui ont présidé à l'adoption de la Constitution du 11 décembre 1990, notamment le consensus national, principe à valeur constitutionnelle... » .

Sur la base de ce fondement, le juge déclare invalide la loi portant révision de la Constitution. Cette décision a fait l'objet de beaucoup de commentaires et de critiques de la part de la doctrine africaine.

Section 2 : Les justifications favorables au contrôle

Les justifications favorables au contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle tiennent au respect du principe de la hiérarchie des normes (§ 1), à la protection des droits et libertés des citoyens ainsi que de l'expression de la volonté de ces derniers (§ 2).

§1. Le respect du principe de la hiérarchie des normes

Condition nécessaire à la réalisation de l'Etat de droit, la hiérarchisation des normes repose sur l'idée selon laquelle l'exercice des compétences normatives doit avoir pour fondement d'autres dispositions habilitantes, soit des normes qui déterminent les organes chargés d'élaborer le droit. Il s'agit, pour reprendre la définition proposée par Otto PFERSMAN, de faire en sorte que la production des normes (de même que leur abrogation, leur modification ou leur suspension d'application) soit systématiquement encadrée par des normes supérieures175(*).

Dans un ordre juridique bien défini, les lois de révision constitutionnelle tant parlementaire (A) que référendaire (B) s'insèrent dans la hiérarchie des normes.

A. Les lois de révision constitutionnelle émanant du parlement

Le respect du principe de la hiérarchie des normes implique que tous les actes des pouvoirs publics obéissent donc à cette hiérarchie en tirant leur validité des actes immédiatement supérieurs. Ainsi par exemple, les lois de révision constitutionnelle adoptées par le Congrès tirent leur validité de la Constitution et sont susceptibles de contrôle aux fins de la protection de Celle-ci. Ce qui ne semble pas être si évident pour les lois votées par le peuple.

B. Les lois de révision constitutionnelle approuvées par referendum

Marthe Fatin- Rouge STEFANINI note : « le referendum est aussi source de fragilité car le peuple peut être trompé sur les intentions véritables du texte sur lequel il se prononce. Il peut être brimé dans sa liberté d'expression par des questions ambigües et des fraudes peuvent survenir au cours des opérations de vote. Les citoyens disposent toujours du droit de rejeter la proposition en votant « non » mais encore faut-il qu'ils soient pleinement conscients des conséquences de l'adoption du texte ou de la question qui leur est soumise. Ce n'est donc pas le peuple lui-même qui présente un danger - affirmer cela conduirait à renoncer à la démocratie - mais l'utilisation du vote populaire et de la légitimation qui en découle176(*)»

Et d'ajouter : « ... le contrôle des normes exigé par le juge n'est pas une simple commodité, il est exigence voire un droit dans l'Etat de droit177(*). En effet, tout citoyen devrait être en mesure de demander au juge que la hiérarchie des normes soit garantie. Cette considération doit aussi concerner les actes référendaires qui, malgré la légitimité incomparable dont ils bénéficient, ne peuvent constituer une exception dans l'Etat de droit178(*)».

A en croire Georges BURDEAU, « dire que l'expression directe de la souveraineté nationale ne peut être assujettie à aucun contrôle, c'est rabaisser la Constitution au rang d'un recueil de recettes techniques valables seulement pour les activités des représentants. C'est aussi, et plus gravement, confondre les deux qualités du peuple, selon qu'il agit comme souverain ou comme gouvernant. En tant que souverain, il est absolument libre car c'est la force politique qui s'exprime par sa volonté. Mais comme gouvernant - et c'est le cas de la démocratie directe - son activité est, au même titre que celle des autres gouvernants, dominée par le statut que la Constitution impose aux agents d'exercice du pouvoir 179(*)»

Et d'ailleurs, la qualité de citoyen reconnue au peuple n'est nullement incompatible avec le respect du droit positif. Dès lors, le contrôle de constitutionnalité des dispositions adoptées par referendum est une des conséquences de la possibilité pour le peuple d'agir en tant qu'organe institué. Ce contrôle permet, en outre, de veiller à la protection des droits du même peuple.

§2. La protection des droits et libertés des citoyens ainsi que de l'expression de leur volonté

«  ...les institutions, qui servent de barrières au pouvoir, leur servent en même temps d'appuis. Elles le guident dans sa route : elles le soutiennent dans ses efforts ; elles le modèrent dans ses excès de violence, et l'encouragent dans ses moments d'apathie180(*) ».

Longtemps perçue négativement, l'intervention du juge constitutionnel mérite d'être ennoblie. La fonction première de la juridiction constitutionnelle est d'assurer le respect de la volonté du peuple souverain telle qu'elle exprimée dans la norme suprême. Or, cette volonté formule tant les droits et libertés lui reconnus (A) qu'elle tient à la déférence de ses propres choix (B).

A. La protection des droits et libertés des citoyens

La conception de la démocratie a évolué : outre l'idée d'un « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », elle se fonde sur une reconnaissance des droits et libertés fondamentaux et sur le respect du pluralisme qui justifie une protection des droits des minorités181(*).

En dépit de la fonction régulatrice exercée entre les pouvoirs publics, les juridictions constitutionnelles ont depuis lors, une nouvelle fonction axée sur la protection des droits et libertés des citoyens. Louis FAVOREU reconnait pour sa part que, quelle que soit son organisation, la justice constitutionnelle remplit quatre types de missions : le contrôle de la régularité des élections et des votations politiques, le respect de l'équilibre entre l'Etat et les collectivités composantes, la garantie du bon fonctionnement des pouvoirs publics et de la répartition entre eux, ainsi que le contrôle de constitutionnalité des lois et la protection des droits fondamentaux182(*).

Le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle permet donc d'éviter que les gouvernants brisent l'équilibre requis entre l'autorité et la liberté.

B. La protection de l'expression de la volonté du peuple

Outre le fait de protéger les droits et libertés des citoyens, l'intervention du juge est utile pour le contrôle du respect de la volonté du peuple. Selon que les intérêts divergent, l'organisation d'un referendum pour l'adoption d'une loi de révision constitutionnelle peut être teintée des tripatouillages et des triches altérant la volonté du peuple. C'est pourquoi la recherche de la régularité de toutes ces opérations confirme l'idée que le contrôle d'une de révision constitutionnelle et de la décision dont elle fait l'objet est indispensable dans un Etat de droit démocratique.

CHAPITRE 2 : LA MISE EN OEUVRE DU CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS DE REVISION CONSTITUTIONNELLE EN RDC

Le contrôle de constitutionnalité, ce n'est pas autre chose que la vérification par une autorité compétente que ce principe de constitutionnalité est respecté, avec, comme sanction, la possibilité d'annuler ou de paralyser l'acte constitutionnel183(*). Et COHENDET d'ajouter : « c'est l'appréciation de la conformité d'un acte juridique à la Constitution, généralement confiée à un organe juridictionnel et assortie d'une sanction, en vue de garantir le respect de la Constitution et donc Sa primauté dans la hiérarchie des normes184(*) ».

Ainsi donc, ce chapitre est consacré à l'état de question du contrôle de constitutionnalité en droit positif (section 1) avant d'envisager l'avenir de la même question au regard du droit positif actuel (section 2).

Section 1 : Etat de la question en droit positif

Du point de vue de droit positif, le contrôle de constitutionalité des lois constitutionnelles n'est possible que s'il est prévu par la Constitution ou par la jurisprudence de la Cour constitutionnelle185(*).

Or, dans la Constitution du 18 février 2006, le contrôle de constitutionnalité est prévu. Il reste cependant à vérifier si ce contrôle s'étend jusqu'aux lois de révision constitutionnelle ou si une solution est prévue dans la jurisprudence.

§1. Consécration constitutionnelle

Avant de répondre à la question relative au fondement constitutionnel du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle (B), il convient de définir la portée du contrôle de constitutionnalité organisé (A).

A. Le contrôle de constitutionnalité organisé dans la Constitution du 18 février 2006

Aux termes de l'article 160 al. 1 «  la Cour constitutionnelle est chargée du contrôle de constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi ». Ce contrôle peut être par voie d'action ou par voie d'exception ; a priori ou a posteriori.

En effet, les normes de contrôle sont notamment les lois organiques et les lois :

- Les lois organiques : elles sont soumises à un contrôle de constitutionnalité obligatoire186(*)mais non automatique. Ce contrôle est donc global même lorsque l'autorité saisissante saisit la Cour pour quelques dispositions.

- Les lois : selon les articles 160 al.3 et 139, les lois sont soumises à un contrôle de constitutionnalité facultatif. Ici aussi l'autorité de contrôle peut envisager la loi dans son intégralité au lieu de s'appesantir uniquement sur les dispositions contestées. Ce contrôle est dit objectif.

Par ailleurs, l'article 162 autorise toute personne à saisir la Cour constitutionnelle par voie d'action ou par voie d'exception pour inconstitutionnalité de tout acte législatif ou réglementaire.

Qu'en est -il des lois de révision constitutionnelle ?

B. Fondement constitutionnel du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle

Il ressort de ce point précédent que le contrôle des lois de révision constitutionnelle peut être envisagé sur pied des articles 139 et 160 de la Constitution. Ainsi, deux arguments sont mis en contribution. Le premier se rapporte à la nature des lois de révision constitutionnelle. Ces lois sont de nature constitutionnelle par rapport à leur objet, et des actes législatifs au regard de la procédure mise en oeuvre pour leur édiction. En effet, la procédure d'élaboration de ces lois est identique à celle des lois ordinaires, excepté la condition de 3/5 exigée pour l'approbation des lois constitutionnelles. Cette évidence juridique reste perceptible en droit comparé où au Benin par exemple, le juge constitutionnel a assimilé la loi de révision constitutionnelle à la catégorie des autres lois en vue de fonder sa compétence.

Le second argument par ailleurs, se rapporte à l'interprétation des dispositions constitutionnelles en faveur de la prise en charge implicite, par le constituant au moment de l'élaboration de la Constitution, de la question des lois de révision constitutionnelle. L'analyse circonspecte des dispositions constitutionnelles nous permet d'alléguer qu'au moment de l'élaboration de la Constitution, le constituant n'avait fait fi des lois de révision constitutionnelle. En cela, l'article 125 dispose : « Si un projet ou une proposition de loi est déclaré urgent par le Gouvernement, il est examiné par priorité dans chaque Chambre par la commission compétente suivant la procédure prévue par le Règlement intérieur de chacune d'elles. La procédure normale est appliquée aux propositions ou aux projets de loi portant amendement de la Constitution ou modifiant les lois organiques ainsi qu'aux projets de loi d'habilitation prévue à l'article 129 ».

La Constitution évoque la procédure normale à appliquer aux propositions ou aux projets de loi portant amendement de la Constitution. De cette formulation, déduction peut être faite de l'existence d'une procédure législative normale et d'une procédure législative urgente. Ainsi n'est-il pas permis de conclure que la procédure de révision constitutionnelle est par essence législative en dépit des particularités mineures ? Une telle conclusion n'a aucune incidence juridique dangereuse tant il est vrai qu'elle permet d'aboutir à l'unicité du régime de contentieux.

§2. Consécration jurisprudentielle

Aux termes de l'article 157 de la Constitution, il est institué une Cour constitutionnelle chargée de la constitutionnalité des lois, des actes ayant force de loi, des règlements des chambres parlementaires ainsi que ceux des institutions d'appui à la démocratie.

Malheureusement, Sa jurisprudence n'offre aucune expérience de contrôle des lois de révision constitutionnelle. Ce mutisme, justifié peut être par le défaut de saisine, incite à tourner vers l'avenir.

Section 2 : Prospective constitutionnelle

Quel est l'avenir de la Constitution du 18 février 2006 et des valeurs qu'elle renferme ? S'il faut certifier Son avenir, ne faudrait-il pas corriger ses faiblesses (§1) dans une perspective de rationalisation (§2) ?

§1. Faiblesses tirées de la déduction du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle de certains articles de la Constitution

La déduction du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle tirée des articles 139 et 160 de la Constitution, rend l'entreprise irrésolue (A) si bien qu'elle offre la voie à la spéculation (B).

A. L'entreprise reste irrésolue

La première phrase de l'article 139 est formulée de la manière suivante : « La cour constitutionnelle peut être saisie d'un recours visant à faire déclarer une loi à promulguer non conforme à la Constitution... »

Une interprétation large de la disposition induit à inclure dans la catégorie de lois, les lois de révision constitutionnelle. Dès lors, la Cour constitutionnelle peut être saisie d'un recours visant à faire déclarer une loi de révision constitutionnelle à promulguer non conforme à la Constitution. Une telle formulation rend l'entreprise - le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle - irrésolue en ce sens que les autorités citées peuvent saisir la Cour constitutionnelle pour ce faire ; ce qui n'est pas une obligation mais plutôt une faculté.

Or, la reconnaissance d'une faculté aux acteurs politiques dénote une certaine résignation d'aller au bout de la logique. Car, les actions de ces derniers sont très souvent motivées par les intérêts politiques et réalisées sur fond des combines politiciennes. Ainsi donc, la préséance des lois de révision constitutionnelle et la nature de leur disposition auraient du pousser le constituant à obliger leur contrôle en vue de taire toute spéculation.

B. La spéculation autour de la question

En RDC, la spéculation autour de la question du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle dérive de l'absence d'une position tranchée du constituant. Nourrie par la doctrine, cette spéculation divise les auteurs favorables au contrôle et ceux opposés à cette entreprise. Elle laisse donc la possibilité à la Cour constitutionnelle de se déclarer, à l'occasion de sa saisine, compétente ou incompétente selon qu'elle emboite le pas aux juges constitutionnels malien ou sénégalais, alors qu'une simple disposition constitutionnelle expresse peut définitivement fonder sa compétence.

§2. Quelques propositions de rationalisation des limites du pouvoir de révision constitutionnelle

La présente étude gravite autour de l'efficacité des limites du pouvoir de révision constitutionnelle. Son évolution nous laisse perplexe sur l'efficacité de ces limites car, elles acquièrent le statut des boeufs parfois immolés sur l'autel des intérêts politiques. Pour stopper cette hécatombe, il est pressant d'envisager la révision constitutionnelle des articles 160 et 218 de la Constitution (A) et l'élargissement des règles de référence lors d'un contrôle de constitutionnalité (B).

A. La révision constitutionnelle des articles 160 et 218 de la Constitution

Le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle doit, dans la Constitution du 18 février 2006, être une obligation plutôt qu'une faculté. Pour ce faire, nous proposons la révision de l'article 160 de la Constitution. La nouvelle formulation peut être la suivante : « la Cour constitutionnelle est chargée du contrôle de constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi. Les lois d'amendement de la Constitution et les lois organiques, avant leur promulgation ainsi que les règlements intérieurs des chambres parlementaires et du congrès, de la commission électorale nationale indépendante et du conseil supérieur de l'audiovisuel et de la communication, avant leur mise en application, doivent être soumis à la Cour constitutionnelle qui se prononce sur leur conformité à la Constitution. »

Par ailleurs, la révision de l'article 218, quoique sujet à polémique187(*), vise à renforcer cette obligatoriété même à l'égard des propositions ou des projets d'amendement de la Constitution devant être approuvés par referendum. Sans pour autant rejeter l'idée d'un contrôle du referendum constitutionnel, le contrôle a priori de cette oeuvre - à soumettre à la ratification populaire - nous parait plus attrayant. Ainsi, l'article 218 peut être reformulé de la manière suivante en ajoutant un troisième alinéa. Après les deux premiers alinéas, la suite peut être la suivante : « Si le bien fondé est décidé par l'Assemblée nationale et le Sénat, le projet, la proposition ou la pétition de révision n'est soumis au référendum qu'après déclaration par la Cour constitutionnelle obligatoirement saisie par le Président de la République de leur conformité à la Constitution dans un délai de quinze jours. La révision n'est définitive que si le projet, la proposition ou la pétition est approuvée par référendum sur convocation du Président de la République. Toutefois, le projet, la proposition ou la pétition n'est pas soumis au référendum lorsque l'Assemblée nationale et le Sénat réunis en Congrès l'approuvent à la majorité de trois cinquièmes des membres les composant ».

Comme on peut s'en rendre compte, la révision de ces deux dispositions constitutionnelles présente un certain nombre d'avantages. Par ce mécanisme de protection de la Constitution, le contrôle de constitutionnalité permet la participation de tous les pouvoirs - exécutif, législatif et judiciaire - dans la procédure de révision constitutionnelle. Pareille participation permet de veiller au respect de l'équilibre institutionnel dégagé par le principe de la séparation des pouvoirs.

En sus, l'instauration du contrôle a priori offre beaucoup de privilèges surtout dans l'éventualité du referendum. Outre le fait que ce contrôle évite une confrontation directe entre le peuple et le juge constitutionnel188(*), les gains de temps et d'argent peuvent être mis à l'actif de ce même contrôle.

B. L'élargissement des règles de référence

D'aucuns peuvent s'interroger sur le rapport à établir entre la rationalisation des limites du pouvoir de révision constitutionnelle et l'élargissement des règles de référence. En effet, les limites expressément prévues dans la Constitution concourent toutes à la protection juridique de la Constitution. Or, la protection juridique de la Constitution passe par sa protection substantielle.

A le supposer établi, le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle soulève l'épineux problème des règles de référence. En d'autres termes, quelles sont les règles auxquelles se réfère le juge constitutionnel pour apprécier la constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle ?

De notre point de vue, la constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle passe par la conformité de celles-ci aux limites tant explicites qu'implicites dégagées dans la première partie de cette étude. Par conséquent, les dispositions constitutionnelles, le préambule et l'exposé des motifs contiennent des règles, des principes et même des valeurs que le législateur constitutionnel doit coute que coute observer au prix de la protection substantielle de la Constitution du 18 février 2006. Ces règles, principes et valeurs constituent donc des règles de référence qui servent d'assiette à beurre au juge constitutionnel.

Que dire, en guise de conclusion générale ?

CONCLUSION GENERALE

La question des limites du pouvoir de révision constitutionnelle passe pour l'une des plus sensibles et des plus intéressantes du droit constitutionnel contemporain189(*). Cette délicatesse et ce regain d'intérêt se manifestent amplement à travers deux séries d'observation nourries d'évidence éclatante sur l'espace congolais.

La première observation se rapporte à l'objet des révisions constitutionnelles en RDC. Il ressort de cette modeste étude que les révisions constitutionnelles congolaises recèlent de forts enjeux du pouvoir. La Constitution en RDC, et particulièrement celle du 18 février 2006, est une sorte d'ustensile au service de la conservation du pouvoir. Les discussions qui ont lieu lors de la révision de 2011, ont tourné essentiellement sur la question des mandats, prérogatives et élections : mandat du député national et du sénateur190(*), prérogatives du président de la république191(*) et élection de ce dernier192(*).

Les sujets posés sont celui du statut des gouvernants et celui du maintien au pouvoir. Il s'agit donc des sujets très fortement « politisés », et le débat autour de la Constitution du 18 février 2006 reproduit les clivages politiques traditionnels. Pas plus tard qu'en 2014, l'initiative de la révision annoncée s'inscrivait dans la logique d'entrevoir les modalités pratiques d'organiser les élections provinciales au suffrage universel indirect. Il est donc question de « situation des gouvernants, de posture de puissance et de mécanismes de conservation du pouvoir ».

De ce tableau, découle l'idée qu'en 2011, la révision de la Constitution a mis en évidence un personnage précis : le président de la république. Elle pose donc - ou repose - le problème du présidentialisme. Jacques DJOLI note : « ce n'est plus le régime semi-présidentiel que nous avions à l'origine, mais on s'oriente vers un régime de mono-puissance, dans un Etat macrocéphale, risquant à tout moment de s'écrouler par trop de déséquilibre entre ses différentes institutions. Il y a une accentuation du caractère présidentialiste du régime politique193(*) ».

Par ailleurs, la seconde observation est liée à l'ambiance dans laquelle les révisions constitutionnelles ont souvent lieu. Est-ce dans une atmosphère consensuelle ou conflictuelle ? Les faits observés sous l'empire de la Constitution du 18 février 2006 démontre que l'unilatéralisme qui domine le processus de révision constitutionnelle pose le problème de la légitimité des modifications entreprises, pas plus. En effet, toutes les péripéties révisionnistes que connut la Constitution du 18 février 2006 résultent du bon vouloir d'un camp politique, celui qui est au pouvoir et qui s'appuie sur des majorités « mécaniques ». C'est ainsi que, généralement, le processus de révision imprime une sorte d'image grossissante de la dévalorisation du parlement.

Malheureusement, cette atmosphère délétère des révisions constitutionnelles plante le décor des conflits entre acteurs politiques. Autant dire, pendant la proposition ou la réalisation d'une révision constitutionnelle, il y a des crises et des tensions. Pour s'en convaincre, il suffit de revenir sur la période de janvier 2011 et même celles des tentatives de révisions avortées194(*). On se limite donc à produire des textes de méfiance et opportunistes qu'on peut changer dès que l'équilibre des forces change.

Dès lors, les limites du pouvoir de révision constitutionnelle sont inefficaces. Les règles, principes et valeurs qui constituent la substantialité, l'essentialité et même la fondamentalité de la Constitution du 18 février 2006 ne sont pas portés à leur juste valeur. La résurgence de la question de la légitimité, la remise en cause de la structure du pouvoir judiciaire et la remise en question de l'autonomie des provinces en constituent des illustrations tangibles.

Comme concluait Jacques DJOLI : « La crise constitutionnelle en République Démocratique du Congo est d'abord celle de la norme constitutionnelle en soi et plus particulièrement des valeurs qu'elle véhicule et qui la fondent. Cette crise pose fondamentalement la question du devoir d'obéissance, naturelle et spontanée à la norme, la reconnaissance de la supériorité transcendantale, de la « fondamentalité » qui ne dépendent pas exclusivement des mécanismes techniques et procéduraux, mais aussi et surtout d'une dimension invisible et anthropologique195(*) ». Ici, cette crise généralisée de la norme peut être limitée à celle de la méconnaissance ou de la violation délibérée des limites du pouvoir de révision constitutionnelle. L'article 220 et les dispositions auxquelles il renvoie font l'objet d'une banalisation éhontée, sous prétexte que le débat de leur juridicité persiste à cause de l'absence de contrôle de constitutionnalité des lois de révisions constitutionnelles196(*).

L'occasion faisant le larron, il n'est pas exclu d'envisager une autre hypothèse à partir de ce raisonnement spécieux. En effet, Evariste BOSHAB note : « l'efficacité des clauses intouchables ne peuvent se mesurer que par rapport à la probabilité des dispositions limitant la révision constitutionnelle à être appliquées par le juge. Car, si le juge constitutionnel n'invalide pas une disposition prise en violation d'une limite à la révision constitutionnelle, comment dès lors, apprécier la validité d'une clause d'éternité ? En fait, le rôle du juge est déterminant dans la préservation des dispositions intangibles197(*).

Les limites matérielles prévues à l'article 220 et les dispositions auxquelles elles renvoient constituent des réponses appropriées que le constituant entend apporter contre les abus du passé. C'est ainsi que, tout au long de cette étude, chaque matière a été reliée à un phénomène sombre du passé. Pour empêcher la survivance de ces différents phénomènes, il sied de reconnaitre la pleine valeur constitutionnelle aux dispositions intangibles en obligeant le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle. Cette exigence passe par la révision des articles 160 et 218 que nous proposons. C'est alors que la protection de la Constitution du 18 février pendant les périodes de révision peut être effective ; même si l'on s'interroge avec Evariste BOSHAB sur le point de savoir si l'organisation du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelles garantit automatiquement l'efficacité totale des clauses d'éternité. Nous disons donc que ce contrôle est un mécanisme idéal mais non ultime, car c'est le peuple en définitive qui protège sa Constitution.

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V. COURS, THESES ET MEMOIRES

· ESAMBO (J-L.), La République Démocratique du Congo à l'épreuve de l'alternance au pouvoir, Mémoire DES, Faculté de droit, Unikin, 2005.

· GOZLER (K.), Le pouvoir de révision constitutionnelle, Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 1997.

· KAMUKUNI (A.), Contribution à l'étude de la fraude en droit constitutionnel congolais, thèse de doctorat en droit public, Université de Kinshasa, 2007.

· MENDE (P.), Contribution au débat africain et congolais sur l'encadrement juridictionnel du pouvoir de révision constitutionnel, Mémoire DES, Faculté de droit, Université de Kinshasa, 2011-2013.

· NGONDANKOY (P-G.), Cours de droit de la fonction publique, IIème licence, Faculté de droit, Unikin, 2014-2015.

· NGONDANKOY (P-G.), Le contrôle de constitutionnalité en RDC. Etude critique d'un système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte tradition autocratique, thèse de doctorat, Université de Louvain, 2007-2008.

· NGONDANKOY (P-G.), Cours des libertés publiques, Faculté de droit, Université de Kinshasa, 2014-2015.

VI. COMMUNICATIONS ET DOCUMENTS DIVERS

· DELPERRE (F.), « Le processus de modification de la Constitution belge », La révision de la Constitution. Journées d'études des 20 mars et 16 décembre 1992, PUAM, 1993.

· HAMON (L.), La Constitution et l'Europe, Journée d'étude du 25 mars 1992, Paris, Montchrestien, 1992.

· KENGO WA DONDO, Allocution à l'occasion de l'ouverture de la session parlementaire de septembre 2014.

TABLE DES MATIERES

EPIGRAPHE I

REMERCIEMENTS II

LISTE DE PRINCIPALES ABREVIATIONS III

INTRODUCTION GENERALE 1

1. PROBLÉMATIQUE 1

1.1. Etat de la question 1

1.2. Objet de la recherche 5

2. REVUE DE LA LITTÉRATURE 8

3. HYPOTHÈSES DE TRAVAIL 10

4. INTÉRÊT DU SUJET 11

5. DÉLIMITATION DU SUJET 12

6. INDICATIONS MÉTHODOLOGIQUES 12

6.1. La méthode juridique 13

6.1.1. Approche téléologique ou contextuelle 13

6.1.2. Approche génétique 13

6.1.3. Approche systémique 14

6.1.4. Approche fonctionnelle 14

6.1.5. Approche sémiologique 14

6.2. La méthode sociologique 15

6.3. La méthode historique 15

6.4. La méthode comparative 15

7. PLAN SOMMAIRE 16

IÈRE PARTIE : LA MISE EN OEUVRE DU POUVOIR DE REVISION CONSTITUTIONNELLE : CADRE THEORIQUE ET DIMENSION PRATIQUE. 17

CHAPITRE 1 : LE POUVOIR CONSTITUANT : CADRE CONCEPTUEL. 18

SECTION 1 : DU POUVOIR CONSTITUANT ORIGINAIRE ET DU POUVOIR CONSTITUANT DÉRIVÉ 19

§1. Le pouvoir constituant originaire 19

A. Caractéristiques 20

B. Etendue de son action 20

§2. Pouvoir constituant dérivé 21

A. Caractéristiques 21

B. Etendue d'action 22

SECTION 2 : POUVOIR CONSTITUANT ET POUVOIR DE RÉVISION CONSTITUTIONNELLE. 22

§1. Distinction. 23

A. Caractéristiques 23

B. Etendue d'action. 23

§2. Rapport 24

CHAPITRE 2 : LES LIMITES DU POUVOIR DE REVISION CONSTITUTIONNELLE SOUS LA CONSTITUTION DU 18 FEVRIER 2006. 26

SECTION 1 : LES LIMITES EXPRESSES ET IMPLICITES DU POUVOIR DE RÉVISION CONSTITUTIONNELLE 26

§1. Les limites expresses 26

S/§ 1. Les limites matérielles 26

A. Répertoire. 27

1. La forme républicaine de l'Etat. 27

a) Les interludes monarchiques 28

b) Portée de l'interdiction de modifier la forme républicaine de l'Etat. 29

2. Le principe du suffrage universel 30

a) Le transfert de la source de pouvoir : Du peuple au MPR et son président. 30

b) Portée de l'interdiction de supprimer le principe du suffrage universel. 31

3. La forme représentative du gouvernement. 31

a) La RDC : le bastion des crises multiformes. 31

b) Portée de l'interdiction de passer outre la forme représentative du gouvernement. 32

4. Le nombre et la durée du mandat du président de la république. 32

a) Le phénomène de la monarchisation présidentielle. 33

b) Portée de l'interdiction de revenir sur le nombre et la durée du mandat du président de la république. 33

5. L'indépendance du pouvoir judiciaire. 34

a) Le phénomène de concentration des pouvoirs 34

b) Portée de remettre en cause l'indépendance du pouvoir judiciaire. 35

6. Le pluralisme politique et syndical 35

a) Le monopartisme du parti-Etat et le mono syndicalisme 36

b) Portée de l'interdiction de supprimer le multipartisme politique et syndical. 36

7. Les droits et libertés de la personne. 37

a) Les interludes liberticides 37

b) Portée de l'interdiction de réduction des droits et libertés de la personne. 37

8. Les prérogatives des provinces et entités territoriales décentralisées. 38

a) La résurgence des tendances centralisatrices dans la production et la pratique constitutionnelles 38

b) Portée de l'interdiction de réduction des prérogatives des provinces et entités territoriales décentralisées 38

B. Appréciation 38

S/§2. Les limites circonstancielles. 39

A. Elucidation des circonstances incompatibles avec la révision constitutionnelle. 39

1. Les circonstances exceptionnelles. 39

2. L'intérim à la présidence de la république. 40

3. Impossibilité pour l'Assemblée nationale et le Sénat de se réunir. 40

B. La nature des limites circonstancielles. 41

S/§ 3. Les limites formelles. 41

A. Les étapes de la procédure. 41

1. L'initiative de la révision constitutionnelle. 41

2. La discussion du bien-fondé. 41

3. L'approbation du projet, de la proposition ou de la pétition. 42

B. Conséquences de la violation de la procédure. 42

§ 2. Les limites implicites 42

S/§ 1. Les limites implicites déduites de l'interprétation de l'article 220 43

A. La forme républicaine de l'Etat 43

B. Le principe du suffrage universel 44

C. La forme représentative du gouvernement 44

D. Le nombre et la durée du mandat du président de la république 44

E. L'indépendance du pouvoir judiciaire 44

F. Le pluralisme politique et syndical 45

G. L'interdiction de réduction des droits et libertés de la personne 45

H. L'interdiction de la réduction des prérogatives reconnues aux provinces et aux ETD 45

I. La question de la révision de l'article 220 45

S/§ 2. Les limites implicites déduites du sens profond de la Constitution du 18 février 2006 ou de l'esprit de Celle-ci 46

A. Les limites implicites déduites des préoccupations majeures ayant présidé à l'élaboration de la nouvelle Constitution 47

B. Les limites implicites déduites de certains principes et valeurs prévus dans l'exposé des motifs et le préambule. 48

SECTION 2. LES LIMITES HÉTÉRONOMES ET AUTONOMES 48

§ 1. Les limites hétéronomes 49

§ 2. Les limites autonomes 49

CHAPITRE 3 : LE POUVOIR DE REVISION CONSTITUTIONNELLE A L'EPREUVEDE LA PRATIQUE 50

SECTION 1 : LES PÉRIPÉTIES RÉVISIONNISTES D'AVANT LA CONSTITUTION DU 18 FÉVRIER 2006 50

§1. Les révisions constitutionnelles sous la Constitution du 1er aout 1964 50

A. Ordonnance-loi n°66-92 bis du 7 mars 1966 attribuant le pouvoir législatif au président de la république 50

1. Contenu de l'ordonnance-loi 51

2. Portée de l'ordonnance-loi 51

B. Ordonnance-loi n°66-612 du 26 octobre 1966 conférant au président de la république les pouvoirs du 1er ministre 51

1. Contenu de l'ordonnance-loi 51

2. Portée de l'ordonnance-loi 52

§2. Les révisions constitutionnelles sous la Constitution du 24 juin 1967 52

A. La loi n°70-001 du 23 décembre 1970 portant institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution 52

B. La loi n°74/020 du 15 aout 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967 53

SECTION 2 : LES PÉRIPÉTIES RÉVISIONNISTES SOUS LA CONSTITUTION DU 18 FÉVRIER 2006 54

§1. Les tentatives avortées 54

A. La première tentative avortée 54

B. La deuxième tentative avortée 55

C. La troisième tentative avortée 55

§2. L'initiative réussie du 20 janvier 2011 56

A. Le contexte historique 56

B. L'analyse des dispositions révisées 56

1. Sur la forme 57

2. Sur le fond 58

a. Le nouvel article 71 58

b. Le nouvel alinéa 2 de l'article 149 58

c. Les articles 197 et 198 60

d. L'article 218 61

IIÈME PARTIE : SCHEMA DU CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS DE REVISION CONSTITUTIONNELLE 62

CHAPITRE 1 : LE CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS DE REVISIONS CONSTITUTIONNELLES : EXPERIENCES EN DROIT COMPARE ET JUSTIFICATIONS 63

SECTION 1 : EXPÉRIENCES EN DROIT COMPARÉ 63

§1. Les Etats hostiles au contrôle 63

A. La France 63

B. Le Sénégal 65

§2. Les Etats favorables au contrôle 66

A. Le Mali 66

B. Le Benin 67

SECTION 2 : LES JUSTIFICATIONS FAVORABLES AU CONTRÔLE 69

§1. Le respect du principe de la hiérarchie des normes 69

A. Les lois de révision constitutionnelle émanant du parlement 69

B. Les lois de révision constitutionnelle approuvées par referendum 69

§2. La protection des droits et libertés des citoyens ainsi que de l'expression de leur volonté 71

A. La protection des droits et libertés des citoyens 71

B. La protection de l'expression de la volonté du peuple 72

CHAPITRE 2 : LA MISE EN OEUVRE DU CONTROLE DE CONSTITUTIONNALITE DES LOIS DE REVISION CONSTITUTIONNELLE EN RDC 73

SECTION 1 : ETAT DE LA QUESTION EN DROIT POSITIF 73

§1. Consécration constitutionnelle 73

A. Le contrôle de constitutionnalité organisé dans la Constitution du 18 février 2006 74

B. Fondement constitutionnel du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle 74

§2. Consécration jurisprudentielle 75

SECTION 2 : PROSPECTIVE CONSTITUTIONNELLE 76

§1. Faiblesses tirées de la déduction du contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle de certains articles de la Constitution 76

A. L'entreprise reste irrésolue 76

B. La spéculation autour de la question 76

§2. Quelques propositions de rationalisation des limites du pouvoir de révision constitutionnelle 77

A. La révision constitutionnelle des articles 160 et 218 de la Constitution 77

B. L'élargissement des règles de référence 78

CONCLUSION GENERALE 80

BIBLIOGRAPHIE 83

TABLE DES MATIERES 90

* 1BOSHAB (E.), Entre la révision de la Constitution et l'inanition de la nation, Bruxelles, Larcier, 2013, p.11.

* 2Sans prétendre à l'exhaustivité, nous citons : la loi fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo, la loi fondamentale du 17 juin 1960 relative aux libertés publiques, le décret-loi constitutionnel du 29 novembre 1960 relatif à l'exercice des pouvoirs législatif et exécutif à l'échelon central, le décret-loi constitutionnel du 4 novembre 1960 relatif au pouvoir judiciaire, la Constitution du 1er aout 1964 dite de « Luluabourg », la Constitution « révolutionnaire » du 24 juin 1967 ; sous l'empire de cette dernière Constitution, plusieurs révisions ont frauduleusement institué des nouvelles Constitutions. Il s'agit entre autres de : la loi n° 70/001 du 23 décembre 1970 consacrant l'institutionnalisation du Mouvement Populaire de la Révolution, la loi n° 74/020 du 15 aout 1974 instituant le mobutisme comme doctrine du Mouvement Populaire de la Révolution et consacrant la plénitude de l'exercice du pouvoir au Président du MPR, de droit Président de la République, la loi n° 78/010 du 15 février 1978 libéralisant l'exercice du pouvoir au sein du MPR en rendant tout organe de l'Etat responsable par l'abandon de la plénitude de l'exercice du pouvoir par le président du MPR, président de la République et par la restauration du principe de la séparation de l'exercice des pouvoirs au sein du MPR, la loi n° 90/002 du 5 juillet 1990 restaurant le multipartisme mais limité à trois partis, la loi n° 90/008 du 25 novembre 1990 portant institution du multipartisme intégral ; la loi n° 93/001 du 2avril 1993 portant Acte constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition ; Acte constitutionnel n° 003 du 27 mai 1997 relatif à l'organisation et à l'exercice du pouvoir en République Démocratique du Congo ; la Constitution de la transition du 4 avril 2003 et la Constitution du 18 février 2OO6. Lire en ce sens DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, l'Harmattan, 2013, p.34-35.

* 3Sans déterminer les critères de leur classification, aux six Constitutions, dont une provisoire (les lois fondamentales du 19 mai et 17juin 1960), trois définitives (les Constitutions du 1er aout 1964, du 24 juin 1967 et 18 février 2006) adoptées par le peuple et deux intérimaires (l'Acte constitutionnel de la transition du 9 avril 1994 et la Constitution de la transition du 4 avril 2003) de Félix VUNDUAWE-te-PEMAKO, Jean-Louis ESAMBO, rejoint par MUKADI BONYI, en arrive à huit en ajoutant l'Acte constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition du 2 avril 1993 et le décret-loi constitutionnel n°003 du 27 mai 1997, Faustin TOENGAHO LOKUNDO totalise dix en y annexant deux autres (la loi constitutionnelle n°74-20 du 15 aout 1974 et l'Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de la transition du 4 aout 1992) et Jacques DJOLI dénombre une vingtaine de textes constitutionnels depuis l'indépendance, soit une moyenne d'une Constitution tous les deux ans. Lire en ce sens VUNDUAWE-te-PEMAKO (F.), Traité de droit administratif, Bruxelles, Larcier, 2007, p.209 ; ESAMBO (J-L.), La Constitution congolaise du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, Louvain-La-Neuve, Academia- Bruylant, 2010, p.22 ; MUKADI BONYI (dir.), Cinquante ans de législation postcoloniale au Congo-Zaïre : Quel bilan ?, Bruxelles, CRDS, 2010, p.110 ; TOENGAHO LOKUNDO, Les Constitutions de la République Démocratique du Congo de Joseph Kasavubu à Joseph Kabila, Kinshasa, PUC, 2008, p.235 ; DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise,op.cit., p. 33.

* 4MONTESQUIEU, L'esprit des lois, Livre VIII, Chapitre 14.

* 5MODERNE (F.), « Réviser » la Constitution. Analyse comparative d'un concept indéterminé, Paris, Dalloz, 2006.

* 6DJOLI (J.),« La mobilité constitutionnelle en Afrique postcoloniale : dimension structurelle et opportunisme conjoncturel » in Congo-Afrique, 2014, pp. 676-699.

* 7C'est la récompense en forme de feuille de laurier dorée attribuée par le jury au meilleur film de la sélection du Festival International du film de Cannes.

* 8 Lire en ce sens DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., p.36 ; KAMUKUNI (A.), Droit constitutionnel congolais, EUA, 2012, p.339.

* 9 DJOLI (J.), In : Congo-Afrique, n° spécial juin 2005, pp.18-27.

* 10DJOLI (J.), In : Congo- Afrique, 2014, pp. 676-699.

* 11KAMUKUNI (A.), op.cit., p.334.

* 12Il sied de noter avec Evariste BOSHAB que la révision totale n'est plus la révision. Lorsque l'on procède à la révision d'un moteur, on n'invente pas un autre. On adapte l'ancien pour le rendre plus opérationnel ou plus performant. Parvenir à une nouvelle Constitution, par le biais d'une révision, est un abus de langage connu en droit sous l'expression de la fraude à la Constitution. On fait semblant de respecter la forme, tout en détruisant irrémédiablement le socle. Lire en ce sens BOSHAB (E.), op.cit., p. 37.

* 13MC, 7ème année, Léopoldville, n°1 du 1er janvier 1966.

* 14MC, 7ème année, Léopoldville, n°7 du 15 avril 1966.

* 15MC, 8ème année, Léopoldville, n°1 du 1er janvier 1967.

* 16MC, 7ème année, Léopoldville, n°21 du 15 novembre 1966.

* 17BOSHAB (E.), « Le conseil national pour l'unité nationale et la réconciliation, une institution à promouvoir dans les Constitutions africaines pour la prévention des conflits ethniques et la protection des minorités. Cas du Burundi » in BULA-BULA Sayeman (dir.), Pour l'épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum Marcel Antoine LIHAU, Kinshasa, PUK et Bruxelles, Bruylant, 2006.

* 18KUYU MWISSA (C.), Parenté et famille dans les cultures africaines, Paris, Karthala, 2005, p. 13.

* 19KAMUKUNI (A.), « La Constitution de la transition congolaise à l'épreuve du constitutionnalisme »in BULA-BULA Sayeman (dir.), Pour l'épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum Marcel Antoine LIHAU, Kinshasa, PUK et Bruxelles, Bruylant, 2006.

* 20MBATA (A.), « Perspectives du constitutionnalisme et de l a démocratie en République Démocratique du Congo sous l'empire de la Constitution du 18 février 2006 »»in BULA-BULA Sayeman (dir.), Pour l'épanouissement de la pensée juridique congolaise, Liber Amicorum Marcel Antoine LIHAU, Kinshasa, PUK et Bruxelles, Bruylant, 2006.

* 21Actuellement en Afrique, la révision constitutionnelle est dépouillée de toutes ses vertus d'adaptation. Elle n'est plus un moyen de prise en compte du dynamisme de la vie politique et sociale, de rectification des erreurs et insuffisances relevées au cours de la mise en application du texte constitutionnel et d' amélioration des mécanismes institutionnels. Elle n'est encore moins initiée dans la rationalité. Elle traduit plutôt l'émergence des intérêts politiques des uns et des autres ne laissant aucune place à une révision innocente de la Constitution. En ce sens DANELCIUC-COLODROVSCHI (N.), « Retour sur la question des limites aux révisions constitutionnelles. De la portée de leur contrôle durant la période de reconstruction étatique (l'exemple de la Moldavie et de l'Ukraine) in Revue française de droit constitutionnel, 2012, pp.757-775.

* 22 LAFERRIERE (J.), Manuel de droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 1943, p.279.

* 23ARDANT (PH.), Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2004, p. 75.

* 24 DELPERRE (F.), « Le processus de modification de la Constitution belge », La révision de la Constitution. Journées d'études des 20 mars et 16 décembre 1992, PUAM, 1993, p.67.

* 25 DANELCIUC-COLODROVSCHI (N.), op.cit., pp. 757-775.

* 26 LASCOMBE (M.), Le droit constitutionnel de la Vème République, Paris, 8ème édition, L'harmattan, 2002, p. 275.

* 27 HAMON (L.), La Constitution et l'Europe, Journée d'étude du 25 mars 1992, Paris, Montchrestien, p. 222.

* 28 KENGO WA DONDO, Allocution à l'occasion de l'ouverture de la session parlementaire de septembre 2014, p. 6.

* 29ESAMBO (J-L.), « La Constitution congolaise du 18 février 2006: Valeurs, élaboration et utilité. » in Congo-Afrique, 2014, pp. 671-675.

* 30 Il pense qu'« Il s'observe en Afrique postcoloniale une volonté de perversion du pouvoir souverain du peuple par la production protéiforme des textes, mais également par des révisions intempestives et chaotiques de ces textes fondamentaux...Cette perversion ou l'abus du pouvoir souverain...donne naissance à des coups constitutionnels. Il s'agit, en somme, des opérations des fraudes constitutionnelles ». Lire en ce sens DJOLI (J.), « La mobilité constitutionnelle en Afrique postcoloniale : dimension structurelle et opportunisme conjoncturel », op.cit., pp. 676-699.

* 31 ESAMBO (J-L.), La Constitution du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives,Bruylant, 2010, p. 317.

* 32 C'est le cas de la révision de 2011. Elle a réduit l'élection du président de la République à un seul tour et à la majorité simple, soi-disant pour en réduire le cout, mais elle a simultanément élargi les pouvoirs du président en lui conférant le droit de dissoudre une Assemblée Provinciale (art. 197) et de relever de ses fonctions un Gouverneur de province (art. 198). Elle a aussi réduit l'indépendance du pouvoir judiciaire en excluant les parquets des institutions auxquelles ce pouvoir est dévolu (art. 149). Simultanément, elle a accordé aux parlementaires tant nationaux que provinciaux de pouvoir reprendre leur mandat de plein droit au terme de l'exercice d'une fonction politique incompatible avec ce mandat (art. 110 et 197). Ces modifications sont donc un élargissement des prérogatives des personnes au pouvoir. Lire en ce sens Léon de SAINT MOULIN, «  l'instabilité constitutionnelle, un voile trompeur pour les vrais problèmes de la RD Congo » in Congo-Afrique, 2014, pp. 700-708.

* 33 GOZLER (K.),Le pouvoir de révision constitutionnelle, Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 1997, p. 250.

* 34 DEBBASH (R.), Droit constitutionnel, Paris, Litec, 2000, p. 27.

* 35Idem.

* 36GONIDEC (P-F.), « A quoi servent les Constitutions africaines ? Réflexion sur le constitutionnalisme africain », RJPIC, octobre-décembre, 1988, n°4, p.849.

* 37GLELE (M-A), « La Constitution ou loi fondamentale », Encyclopédie juridique de l'Afrique, tome I, Abidjan, NEA, 1982, p.33.

* 38Voy. SINDJOUN (L.), Lesgrandes décisions de la justice constitutionnelle africaine. Droit constitutionnel jurisprudentiel et politiques constitutionnelles au prisme des systèmes politiques africains, Bruxelles, Bruylant 2009, pp.185-310 ; OMAR DIOP (E-A.), « Réflexions sur un phénomène constitutionnel inédit : la prorogation du mandat présidentiel de la République en Côte d'Ivoire », Revue de Droits africains, n° 41 Bruxelles, 2007, pp.3-70 ; BOSHAB(E.), Entre la révision de la Constitution et l'inanition de la constitution, op.cit., p.11; MBATA B. MANGU(A.), « Monarchies présidentielles : le syndrome du troisième mandat ou d'une présidence à vie dans les États membres de l'Union africaine », RADG, n°3, 2014, pp. 47-66 ; DJOLI ESENG?EKELI(J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., pp. 241-245 ; KAMUKUNY MUKINAY(A.), Contribution à l'étude de la fraude en droit constitutionnel congolais, Kinshasa, EUA, p.407-442; KAMUKUNY MUKINAY (A.), Droit constitutionnel congolais, op.cit., 2011, pp. 18-20 ; ESAMBO KANGASHE (J-L.), La constitution congolaise du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, AcadémiaBruylant., pp. 227-307 ; ESAMBO KANGASHE (J-L.), Le droit constitutionnel, Louvain-la-Neuve, Académia-L'harmattan, 2013, pp. 22- 24; KALUBA DIBWA (D.), La justice constitutionnelle en République démocratique du Congo. Fondements et modalités d'exercice, Louvain-la-Neuve, Académia-L'Harmattan, 2013, pp. 361-501 ; SOMA(A.), « Le contrôle de constitutionalité des normes supra législatives », Annuaire béninois de justice constitutionnelle, PUB, 2013 ; KLEIN(CL.), « Le contrôle de lois constitutionnelles : Introduction à une problématique moderne », Cahiers du Conseil constitutionnel, n°27, janvier 2010, pp. 1-27.

* 39MENDE (P.), Contribution au débat africain et congolais sur l'encadrement juridictionnel du pouvoir de révision constitutionnelle, Mémoire DES, Faculté de droit, Université de Kinshasa, 2011-2013, p. 19.

* 40GOUGBEDJI (C.), « Le pouvoir constituant dérivé à l'épreuve de la rigidité constitutionnelle en Afrique », inConstitutionnalismes africains, 1996, pp. 29-63.

* 41La Constitution, la souveraineté constituante donc, est également menacée par les autorités chargées de la réviser. L'histoire constitutionnelle du 20ès nous enseigne que les autorités de révision ont revendiqué le droit d'abroger la Constitution et donc de remettre en cause ce que le constituant, le peuple ou ses représentants avaient voulu. La souveraineté du peuple serait donc confrontée au défi de la révision constitutionnelle. Lire en ce sens BEAUD (O.),La puissance de l'Etat, Paris, PUF, 1994, p. 308.

* 42DANELCIUC-COLODROVSCHI (N.), op.cit., pp. 757-775.

* 43WALINE (J.), «  Les révisions de la constitution de 1958 », in Droit et politique à la croisée des cultures.Mélanges Philippe ARDANT, LGDJ, 1999, pp. 243-254.

* 44CABANIS (A.) et MARTIN (M-L.), « Un espace d'isomorphisme constitutionnel : l'Afrique francophone », in Mélanges Dmitri Georges Lavroff, Paris, Dalloz, 2005, pp. 343-361.

* 45 BOLLE (S.), « Des Constitutions « made in  Afrique », mai 2005 :http://www.La Constitution-en- Afrique.org

* 46DJOLI (J.), « La mobilité constitutionnelle en Afrique postcoloniale : dimension structurelle et opportunisme conjoncturel », op.cit., p. 676-699.

* 47BIYOYA (PH.), « L'Afrique face à la révision constitutionnelle en période pré-électorale : problèmes et perspectives »,in Congo-Afrique, 2014, pp. 709-715.

* 48BOSHAB (E.), op.cit., p.278.

* 49KALUBA DIBWA (D.), La justice constitutionnelle en République démocratique du Congo. Fondements et modalités d'exercice, op.cit., pp. 361-501.

* 50SHOMBA KINYAMBA (S.), Méthodologie et épistémologie de la recherchescientifique, Kinshasa, PUK, 2013, p.33.

* 51 MUKUNA-MUTANDA et ILUNGA TSHIPAMA, Méthodologie de la recherche scientifique. De la direction à l'évolution d'un travail de fin d'études, 2005, p.113.

* 52 PINTO et GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 2001, p.351.

* 53 MBOKO D'JANDIMA, Principes et usages en matière de rédaction d'un travail universitaire, 2004, p.11.

* 54 COHENDET (M-A.), Méthodes de droit public, Paris, Montchrestien, 1998, p.13.

* 55 CHEROT (Y.), Livre blanc sur la recherche juridique, Paris, LGDJ, 1996, p. 6.

* 56 DJOLI (J.), Concentration des pouvoirs et développement en Afrique Postcoloniale, mémoire de licence, UNIKIN, 1984, p.5 cité par DJENGO (J.), étude comparée despouvoirs du chef de l'Etat sous la loi fondamentale du 19 Mai 1960 et l'acte constitutionnel de la transition du 09 Avril 1994, mémoire de licence, UNIKIN, 1994, p. 5.

* 57KAMTO (M.), Pouvoir et droit en Afrique noire. Essai sur les fondements du constitutionnalisme dans les Etats d'Afrique noire francophone, Paris, LGDJ, 1987, p.248.

* 58DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., p.20.

* 59Cité par VERDUSSEN (M.), Contours et enjeux du droit constitutionnel pénal, Bruxelles, Bruylant, 1995, p. 28.

* 60NGONDANKOY (P-G.), Cours de droit de la fonction publique, IIème licence, Faculté de droit, Unikin, 2014-2015, p.8.

* 61VERDUSSEN (M.), Contours et enjeux du droit constitutionnel pénal, op.cit., p.28.

* 62BOSHAB (E.), op.cit., p. 9.

* 63DJOLI (J.),Droit constitutionnel. Principes structuraux, Tome I, Kinshasa, EUA. 2010, p.118.

* 64C'est l'appellation la plus influente.

* 65BURDEAU (G.), Essai d'une théorie de la révision des lois constitutionnelles en droit français, thèse de doctorat, Faculté de droit de Paris, Paris, Macon, p.79 cité par GOZLER (K.), op.cit., p.13.

* 66NTUMBA LUABA, Droit constitutionnel général, Kinshasa, EUA, 2005, p. 146.

* 67 BEAUD (O.), op.cit., p.167.

* 68C'est aussi une appellation influente.

* 69 BEAUD (O.), op.cit., p.167.

* 70WIGNY (P.), Cours de droit constitutionnel, Bruxelles, Bruylant, 1973, pp. 54-55 ; GICQUEL (J.), Droit constitutionnel et institutions politiques, 9è éd., Paris, Montchrestien, 1987, pp. 177-179 ; LECLERCQ (C.), Droit constitutionnel et institutions politiques, 7è éd., Paris, Litec, 1990, pp. 109-110 ; ARDANT (PH.), Droit constitutionnel et institutions politiques, 9è éd., Paris, LGDJ, 1997, pp. 74-75 ; BURDEAU (G.), HAMON (F.) et TROPER (M.), Droit constitutionnel, 26è éd., Paris, LGDJ, 1998, pp. 40-41 ; DE LA SAUSSAY (F.), Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Hachette, 2000, pp. 37-39 ; RICCI (J-C.), Droit constitutionnel et institutions politiques, 4è éd., Paris, Economica, 2001, pp. 107-108 ; PORTELLI (H.), Droit constitutionnel, 5è éd., Paris, Dalloz, 2003,pp. 21-22 ; JACQUE (J-P.), Droit constitutionnel et institutions politiques, 5è éd., Paris, Dalloz, 2003, pp. 45-46 ; CHAGNOLLAUD (D.), Droit constitutionnel contemporain, 3è éd., tome I, Paris, Dalloz et Armand Colin, 2003, pp. 30-37 ; CHANTEBOUT (B.), Droit constitutionnel, 21è éd., Paris, Armand Colin, 2004, pp. 30-35 ; MATTHIEU (B.) et VERPEAUX (M.), Droit constitutionnel, Paris, PUF, 2004, pp. 222-223 ; PACTET (P.) et MELIN-SOUCRAMANIEN (F.), Droit constitutionnel, 29è éd., Paris, LGDJ, 2009, pp. 34-36 ; FAVOREU (L.) et alii, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 13è éd., 2010, p. 104 ; GOHIN (O.), Droit constitutionnel, Paris, Litec, 2010, pp. 140-142 ; DEBBASCH (R.), Droit constitutionnel, 7è éd., Paris, Litec, 2010, pp. 28-29 ; UYTTENDAELE (M.), Trente leçons de droit constitutionnel, Bruxelles, Bruylant, 2011, pp. 62-64.

* 71DJOLI (J.), Droit constitutionnel. Principes structuraux, op.cit., p. 81.

* 72LABOULAYE (E.), Questions constitutionnelles, 2è éd., Paris, Charpentier, 1973, p. 371.

* 73DJOLI (J.), Droit constitutionnel. Principes structuraux, op.cit., p. 182.

* 74KAMUKUNI MUKINAY (A.), Droit constitutionnel congolais, op.cit., p. 171.

* 75PACTET (P.), Institutions politiques. Droit constitutionnel, 20è éd., Paris, Armand Colin, 2001, p.73.

* 76Cité par GOZLER (K.), op.cit., p. 28.

* 77Cité par GOZLER (K.), op.cit., p. 29.

* 78DJOLI (J.), Droit constitutionnel. Principes structuraux, op.cit., p. 185.

* 79 BEAUD (O.), La puissance de l'Etat, Paris, PUF, 2009 cité par DJOLI (J.), Principes fondamentaux de droit constitutionnel, Kinshasa, Collection droit et vie, 2015, p. 157.

* 80BEAUD (O.), op.cit., p. 342.

* 81 BEAUD (O.), op.cit., p. 349.

* 82Cette distinction semble a priori tout à fait acceptable ; elle décrit parfaitement le droit positif. Elle ne suffit pourtant pas, et de loin, à résoudre tous les problèmes. Le premier touche au caractère juridique du pouvoir constituant originaire qui divise les auteurs. Si Roger BONNARD soutenait « la juridicité de l'oeuvre constitutionnelle du pouvoir constituant originaire », la plupart des juristes qui reprennent sa distinction lui dénient un tel caractère. Mais, le plus intéressant pour notre propos se situe dans le fait que la doctrine est infidèle à l'esprit de la distinction qu'elle pose. En effet, elle est inconséquente en admettant, d'un coté, la nature différente de ces deux pouvoirs (inconditionné et conditionné ou absolu et limité) et de l'autre, en persistant à les englober dans la même catégorie constituante. Or, on ne peut pas à la fois soutenir le caractère juridiquement inconditionné du pouvoir constituant originaire, celui juridiquement habilité du pouvoir dérivé, et les qualifier tous deux de pouvoir constituant comme s'ils étaient de nature identique. L'erreur de la doctrine - une faute de logique en fait - est donc de ranger ces deux pouvoirs dans un genre unique, d'adopter une différenciation relative (différence de degré), alors qu'elle devrait être absolue. L'opposition entre un pouvoir absolu et un pouvoir non absolu constitue une différence de nature, comme nous l'enseigne la notion de souveraineté. Pour éviter de tirer cette conclusion logique, la doctrine dominante soit ajoute au pouvoir de révision le correctif de « dérivé », soit dissimule l'opposition de deux pouvoirs en définissant le pouvoir constituant de manière syncrétique comme « le pouvoir d'établir ou de modifier la Constitution ». Le « ou » permet d'éviter de combler le fossé qui sépare les deux notions. Mais ces artifices de langage n'éliminent pas le problème de la définition des notions qui reste entier. Notre hypothèse consiste donc à dire que l'acte constituant est l'acte de révision sont, ainsi que les pouvoirs qui s'y attachent, fondamentalement distincts et opposés. Il faut donc les dénommer de manière différente : l'acte de qui édicte la Constitution s'appellera ici l'acte constituant et l'acte qui révise la Constitution s'appellera ici l'acte de révision, de même que l'autorité qui prend le premier se nommera le « pouvoir constituant » tout court (à la place du pouvoir constituant originaire) et le second le pouvoir de révision, ou le pouvoir de révision constitutionnelle (à la place du pouvoir constituant dérivé). Lire avec bonheur BEAUD (O.), op.cit., p. 315.

* 83PACTET (P.), Institutions politiques et droit constitutionnel, 12è éd., Paris, Masson, 1993, pp. 75-78 ; CHANTEBOUT (B.), Droit constitutionnel et science politique, 10è éd., Paris, Armand colin, 1997 pp. 44-45.

* 84VUNDUAWE (F.) et MBOKO D'JANDIMA (J-M.), Droit constitutionnel du Congo : textes et documents fondamentaux, Vol. 2, Academia-Bruylant, 2012, p. 1073.

* 85GICQUEL (J.), Droit constitutionnel et institutions politiques, 15è éd., Paris, Montchrestien, 1997 p. 179 ; BOSHAB (E.), op.cit., pp. 102-126.

* 86MBATA (A.), « Monarchies présidentielles et révisions constitutionnelles : le syndrome du troisième mandat ou d'une présidence à vie dans les Etats-membres de l'Union africaine », op.cit., pp. 47-66.

* 87 Loi n°74-020 du 15 aout 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967, JO, 14ème année, Kinshasa, numéro spécial du 1er janvier 1975.

* 88 Cette expression coïncide non seulement avec l'expression « intermèdes monarchiques » évoquée par le professeur Ambroise KAMUKUNI mais aussi avec l'expression « monarchie présidentielle » ou « monarchie de la présidence » mentionnée par le professeur André MBATA. Cette dernière expression renvoie à un régime politique qui est constitutionnellement une république, mais qui au travers des tripatouillages constitutionnels et des fraudes électorales finit par fonctionner comme une monarchie à cause de la volonté du chef de l'État de se maintenir au pouvoir en faisant sauter tous les verrous de limitation du mandat présidentiel, de se comporter en monarque quasi-absolu ayant concentré entre ses mains tous les pouvoirs d'État, y compris les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire qui sont transformés en chambres d'enregistrement, et aussi à cause des pouvoirs reconnus aux membres de sa famille (frères, soeurs, mère, cousins, oncles, tantes, neveux et autres parents) alors que ces derniers n'exercent aucune fonction publique officielle. Lire en ce sens MBATA (A.), «  Monarchies présidentielles et révisions constitutionnelles : le syndrome du troisième mandat ou d'une présidence à vie dans les Etats-membres de l'Union africaine » op.cit.

* 89 Lire avec splendeur KAMUKUNI MUKINAY (A.), op.cit., pp. 183-160.

* 90ESAMBO (J-L.), La République Démocratique du Congo à l'épreuve de l'alternance au pouvoir, Mémoire DES, Faculté de droit, Unikin, 2005, pp. 32-33.

* 91En France par exemple.

* 92BEAUD (O.), « La souveraineté de l'Etat, le pouvoir constituant et le Traité de Maastricht : Remarques sur la méconnaissance de la limitation de la révision constitutionnelle », RevueFrançaise de droit administratif, 1993, p.1045-1068.

* 93Pour nous, le critère de distinction entre la monarchie et la république est le mode juridique d'accession à la fonction du chef de l'Etat. La monarchie est la forme de gouvernement dans lequel le chef de l'Etat est un roi héréditaire. Lire en ce sens GOZLER (K.), op.cit., p. 141.

* 94VEDEL (G.), Droit constitutionnel, Paris, Sirey, 1949, (réimpression, 1989).

* 95NGONDANKOY (P-G.), « La problématique de la révision ou du changement de la Constitution », in Le Potentiel, 2014, n°2307, pp. 1-8.

* 96 BOSHAB (E.), op.cit., p.339.

* 97 Le mode d'élections introduit par ce système consistait d'ailleurs à rassembler les électeurs sur la place publique pour prendre acte du choix du parti par voie d'applaudissement après lecture du nom des « élus ». En ces sens, les mandats politiques ne sont plus fondés sur les élections, mais sur la volonté et le choix du chef de l'Etat. Et donc ce transfert de la source du pouvoir du peuple au MPR remettait en cause le principe du suffrage universel et même la démocratie.

* 98KAMUKUNI (A.), op.cit., p. 221.

* 99DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., p. 39.

* 100Idem.

* 101Article 55 de cette Constitution.

* 102Article 21 de cette Constitution. Nous disons de manière partielle parce que cette disposition indique la durée du mandat sans en limiter le nombre.

* 103Cette expression renvoie à un régime politique qui est constitutionnellement une république, mais qui au travers des tripatouillages constitutionnels et des fraudes électorales finit par fonctionner comme une monarchie à cause de la volonté du chef de l'État de se maintenir au pouvoir en faisant sauter tous les verrous de limitation du mandat présidentiel, de se comporter en monarque quasi-absolu ayant concentré entre ses mains tous les pouvoirs d'État, y compris les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire qui sont transformés en chambres d'enregistrement, et aussi à cause des pouvoirs reconnus aux membres de sa famille (frères, soeurs, mère, cousins, oncles, tantes, neveux et autres parents) alors que ces derniers n'exercent aucune fonction publique officielle. Lire en ce sens MBATA (A.), «  Monarchies présidentielles et révisions constitutionnelles : le syndrome du troisième mandat ou d'une présidence à vie dans les Etats-membres de l'Union africaine » op.cit., pp. 47-66.

* 104NGONDANKOY (P-G), op.cit., pp. 1-8.

* 105PACTET (P.), Institutions politiques et droit constitutionnel, op.cit., pp. 150-151.

* 106KAMUKUNI (A.), op.cit., p. 34.

* 107Avec la concentration des pouvoirs entre les mains d'une personne, le Congo a évolué d'une dictature au départ voilée par des artifices de toutes sortes jusqu'à une dictature ostentatoire parfaitement consolidée et même constitutionnalisée avec l'institutionnalisation du MPR par la loi n°70/001 du 23 décembre 1970, la suprématie du parti-Etat en 1974, la concentration, la plénitude du pouvoir entre les mains d'un seul individu. En ce sens KAMUKUNI (A.), op.cit., p. 381.

* 108DJOLI (J.), op.cit., p. 234.

* 109DJOLI (J.), op.cit., p. 235.

* 110NGONDANKOY (P-G), Le contrôle de constitutionnalité en RDC. Etude critique d'un système de justice constitutionnelle dans un Etat à forte tradition autocratique, thèse de doctorat, Université de Louvain, 2007-2008, p. 378.

* 111ESAMBO (E.), la Constitution du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, op.cit., p. 137.

* 112 Plusieurs garanties peuvent être évoquées : elles sont notamment liées aux modes de désignation des membres du pouvoir judiciaire, aux incompatibilités, à l'autonomie financière et réglementaire.

* 113 Loi n°70-001 du 23 décembre 1970 portant révision de la Constitution, MC, 12ème année, Kinshasa, n°1 du 1er janvier 1971 et Loi n°74-020 du 15 aout 1974 portant révision de la Constitution du 24 juin 1967, JO, 14ème année, Kinshasa, numéro spécial du 1er janvier 1975.

* 114KAMUKUNI (A.), op.cit., p. 290.

* 115Littéralement parlant, « standstill » est un anglicisme dérivant de l'expression populaire « to stand still » ; ce qui signifie « rester tranquille ». En droit des droits de l'homme, l'expression a été transposée, non sans quelque talent humoristique, pour apporter une double assurance :la certitude citoyenne de pouvoir bénéficier d'un niveau de reconnaissance et de protection acceptable des droits fondamentaux et la confiance politique d'appartenir à un système démocratique conforme aux standards internationaux en matière de reconnaissance et de protection des droits de l'homme. Lire en ce sens NGONDANKOY (P-G.), Cours des libertés publiques, Faculté de droit, Université de Kinshasa, 2014-2015, p. 95.  

* 116NGONDANKOY (P-G.), Cours de libertés publiques, op.cit., p. 96.

* 117Idem.

* 118DJOLI (J.), op.cit., p. 49.

* 119NGONDANKOY (P-G), Problématique de la révision ou du changement de la Constitution, op.cit., pp. 1-8.

* 120Il y a empêchement définitif lorsque le Président de la République se trouve dans l'impossibilité absolue d'exercer personnellement les fonctions qui lui sont dévolues par la Constitution et par les Lois de la République. En ce sens, article 84 al.3 de la loi n°15 /026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

* 121Article 36 al.3 de la loi n°15 /026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

* 122 Article 36 de la loin°15 /026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.

* 123A titre illustratif, nous pouvons noter avec le professeur André MBATA ce qui suit : « D'un point de vue doctrinal, il y a lieu d'opérer une distinction entre les dispositions intangibles expresses ou explicites comme l'article 220 et les dispositions intangibles non expresses ou implicites qui sont également non révisables étant donné leur close relation avec l'Article 220. C'est le cas des dispositions telles que les Articles 1 et 5 qui se réfèrent à la souveraineté nationale et à l'indépendance du pays; l'Article 14 qui consacre la parité homme-femme dans les institutions, l'Article 64 qui impose à tout citoyen le devoir de faire échec à tout celui qui prend le pouvoir par la force ou l'exerce en violation des dispositions de la Constitution et tous les autres articles qui protègent les droits de la personne. Lire en ce sens MBATA (A.), «  Monarchies présidentielles et révisions constitutionnelles : le syndrome du troisième mandat ou d'une présidence à vie dans les Etats-membres de l'Union africaine » op.cit., pp. 47-66.

* 124 Article 70 de la Constitution.

* 125 Article 101 de la Constitution.

* 126 Article 104 de la Constitution.

* 127 Article 198 de la Constitution.

* 128 Article 197 de la Constitution.

* 129 Il s'agit par exemple des articles 69, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 87 et 88 de la Constitution. Ces dispositions ne peuvent être révisées au profit des pouvoirs législatif et judiciaire.

* 130 Il s'agit par exemple des articles 90 al. 4, 92, 93, 94 et 95 de la Constitution.

* 131 Il s'agit par exemple de l'article 100 de la Constitution. Cette disposition ne peut être révisée au profit des pouvoirs exécutif et judiciaire.

* 132 Il s'agit par exemple des articles 149 à 167 de la Constitution. Ces dispositions ne peuvent être révisées au profit des pouvoirs exécutif et législatif.

* 133Cette disposition consacre le pluralisme politique.

* 134Cette disposition proscrit l'institution du parti unique et érige en infraction de haute trahison toute tentative de monopartisme.

* 135Cette disposition est la marque de la reconnaissance constitutionnelle de l'opposition politique.

* 136Il s'agit des articles 197, 198, 199, 201, 203, 204, 205 et 206 de la Constitution.

* 137 DUBOUT (E.), «  Les règles ou principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France », RFDC, n°83, 2010, pp. 451-482.

* 138 DJOLI (J.), op.cit., p. 51.

* 139BOSHAB (E.), « le conseil national pour l'unité nationale et la réconciliation, une institution à promouvoir dans les Constitutions africaines pour la prévention des conflits ethniques et la protection des minorités ;cas du Burundi », op.cit., pp. 114-142.

* 140L'on note avec Jacques DJOLI que cette absence fragilise le droit africain. Le professeur KAYEMBA NTAMBA MBILANJI parle de la dysfonctionnalité ou de l'impuissance du droit en général et du droit constitutionnel en particulier. Il s'agit, ajoute-t-il d'un ensemble des paralysies structurelles et mentales interdépendantes qui bloquent toute capacité d'initiative ou d'innovation sociale suite au primat de la mysticité et la parenté ou du système bio sociétal en tête de la hiérarchie systémique ». En ce sens DJOLI (J.), op.cit., p. 52.

* 141Le professeur Jean-Louis ESAMBO écrit ce qui suit : « Dans le domaine de production constitutionnelle, la notion de valeur occupe une place de choix et se dispute souvent d'audience avec d'autres notions, notamment le principe et la norme. Considéré comme une indication qui oriente l'élaboration d'une règle juridique, le principe dérive d'une aspiration ou d'une idée philosophique n'emportant pas d'obligations ni d'effet juridiques. On le retrouve généralement dans l'exposée des motifs ou le préambule d'une loi ou d'une Constitution dont l'essentiel est puisé des travaux préparatoires. Lorsqu'une disposition morale est édictée et acceptée par ses destinataires, ces derniers peuvent en faire usage et donc s'y référer en cas de besoin ; elle cesse d'être un principe pour devenir une valeur dans laquelle les citoyens se reconnaissent. La transformation d'un principe en valeur s'opère par sa reconnaissance comme une prédisposition morale obligatoire. Une fois coulée en disposition impérative dans un texte juridique, la valeur acquiert la marque d'une norme opposable à tous. Une valeur constitutionnelle est donc symbolisée par tout ce que la Constitution dispose pour assurer son existence et résister à tout cyclone dévastateur. On le voit dans la manière dont un peuple se dote ou souhaite se doter d'une constitution. » En ce sens ESAMBO (J-L.), « La Constitution congolaise du 18 février 2006: Valeurs, élaboration et utilité. », Op.cit., pp. 671-675.

* 142N'en déplaise aux positivistes. La protection effective de la Constitution du 18 février 2006 peut être renforcée par la reconnaissance de la valeur constitutionnelle de l'exposé des motifs. En effet, en dépit d'être un instrument politique et une architecture juridique, la Constitution est aussi un moment historique et une oeuvre littéraire (BADINTER). La découverte du sens profond de certaines dispositions constitutionnelles n'est possible que lorsqu'elles sont replacées dans leur contexte historique d'élaboration. Cette découverte permet donc au juge constitutionnel de fournir une interprétation qui révèle l'entendement du pouvoir constituant. D'où l'intérêt pour le juge de se fonder notamment sur l'exposé des motifs pour la protection de la substance de la Constitution. C'est ainsi que Jacques DJOLI pouvait écrire : « la Constitution du 18 février 2006 comprend un exposé des motifs, un préambule, huit titres divisés en chapitres et regroupant au total 229 articles ». En ce sens DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., p. 187.

* 143C'est le cas de l'article 71 de la Constitution. Sa formulation actuelle viole l'esprit de la Constitution en ce qu'elle repose le problème de la légitimité jadis résolu depuis 2006.

* 144GUASTINI (R.), Leçons de théorie constitutionnelle, Paris, Dalloz, 2010, p. 45.

* 145 BEAUD (O.), op.cit., p. 336.

* 146DANELCIUC-COLODROVSCHI (N.), op.cit., pp. 757-784.

* 147DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., p.34 ; TOENGAHO LOKUNDO, op.cit., 2008, p.22.

* 148Actuellement, il y a une classification moderne des régimes politiques fondée sur le rôle des partis politiques. Lire en ce sens DJOLI (J.), Droitconstitutionnel. Principes structuraux, op.cit., p. 230.

* 149DJOLI (J.), Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, op.cit., p. 136.

* 150DJOLI (J.), « La mobilité constitutionnelle en Afrique postcoloniale : dimension structurelle et opportunisme conjoncturel », op.cit., p. 676-699.

* 151Idem.

* 152Idem.

* 153Ibidem.

* 154C'est la volonté ferme du constituant de résoudre définitivement le problème de la légitimité des institutions notamment celle du Président de la République.

* 155 Dans son entendement, le conseil supérieur de la magistrature, organe de gestion du pouvoir judiciaire, est composé des magistrats des cours et tribunaux ainsi que du parquet.

* 156 LAURE (R.), le MP entre son passé et son avenir, Paris, 1967, n°48 à 164.

* 157 DECLERCQ (R.), Eléments de procédure pénale, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 75.

* 158LUZOLO BAMBI (E-J.) et BAYONA BA MEYA (N-A.), Manuel de procédure pénale, Kinshasa, PUC, 2011, p. 203.

* 159A l'instar des professeurs DJOLI, MAMPUYA et KABAMBA.

* 160KABAMBA (B.), « La révision de l'article 220 : Bob KABAMBA fixe l'opinion », in Le Potentiel, Kinshasa, n°5869, du 6 juillet 2013, p.3.

* 161DJOLI (J.), Droit constitutionnel. Principes structuraux, op.cit., p. 136.

* 162Il semble que les récents conflits survenus entre les autorités provinciales à l'Equateur, au Nord-Kivu, au Kasaï occidental et au Bas-Congo justifieraient cette innovation constitutionnelle. Encore faut-il chercher à savoir si le pouvoir central n'en tire pas de ficelles.

* 163MPONGO BOKAKO, Institutions politiques et droit constitutionnel, Kinshasa, EUA, 2003, p. 101.

* 164 BOSHAB (E), op.cit., p. 121.

* 165Charles DEBBASCH, Jean Marie PONTIER, Jacques BOURDON et Jean Claude RICCI ont défini la fraude à la constitution comme étant « le procédé par lequel l'autorité de révision utilise ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés, c'est-à-dire dans le but d'établir un régime fondamentalement différent ». En ce sens KAMUKUNI (A.), Contribution à l'étude de la fraude en droit constitutionnel congolais, Thèse de doctorat en Droit public, Université de Kinshasa, 2007, p.44.

* 166 France, Sénégal et Irlande.

* 167 Allemagne, Italie et Benin par exemple.

* 168Nous devons ce développement sur la France à ces trois auteurs. Lire avec bonheur LEDIVELLEC (A.), LEVADE (A.) et PIMENTEL (C-M.), «  le contrôle de constitutionalité des lois constitutionnelles », Cahiers du Conseil constitutionnel, n°27, janvier 2010.

* 169Décision n°62-20 DC du 6 novembre 1962 du Conseil constitutionnel français.

* 170 Décision n°93-312 DC du 2 septembre 1992 du Conseil constitutionnel français.

* 171 Décision n°2003-469 du 26 mars 2003 du conseil constitutionnel français.

* 172 Nous devons ce développement sur le Sénégal à AIDARA (M.), « Le juge constitutionnel Africain et les lois portant révision de la constitution : contribution à un débat » Revue d'étude et de recherche sur le droit et l'administration dans les pays d'Afrique Université Montesquieu - Bordeaux IV.www.Afrilex.org

* 173Nous devons encore ce développement sur le Mali à Moustapha AIDARA qui fournit des informations très précieuses sur le contrôle de constitutionnalité des lois de révision constitutionnelle.

* 174Nous devons ce développement à Moustapha AIDARA.

* 175TAILLON (P.), Le référendum expression directe de la souveraineté du peuple ? Essai critique sur la rationalisation de l'expression référendaire en droit comparé, Paris, Dalloz, 2012, p. 363.

* 176 STEFANINI FATIN-ROUGE (M.), Le contrôle du référendum par la justice constitutionnelle, Paris, Economica, 2004, p. 36.

* 177CHEVALIER (J.), « le discours de l'Etat de droit », in les régimes politiques européens en perspectives, Cahiers français, 1994, n°268, p. 3.

* 178 STEFANINI FATIN-ROUGE (M.), op.cit., p.79.

* 179BURDEAU (G.), Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, LGDJ, 1969, p.111.

* 180 CONSTANT (B.), Ecrits politiques, Paris, Gallimard, 1997, p. 252.

* 181STEFANINI FATIN-ROUGE (M.), op.cit., p.36.

* 182FAVOREU (L.), Cours constitutionnelles européennes et droits fondamentaux, Paris, Economica-PUAM, 1982, p.30.

* 183VEDEL (G.), Manuel de droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2002, p. 122.

* 184COHENDET (M-A.), Droit constitutionnel, 12ème éd., Paris, Sirey, 2002, p. 326.

* 185 GOZLER (K.), op.cit., p. 203.

* 186Article 160 de la Constitution.

* 187Une certaine doctrine estime que le pouvoir de révision ne peut pas modifier la procédure de révision constitutionnelle. En ce qui nous concerne, nous pensons qu'il n'est pas dangereux que le pouvoir de révision modifie la procédure de révision dans le sens du renforcement des standards démocratiques.

* 188Ce contrôle préventif a surtout l'avantage de minimiser l'atteinte au principe de la souveraineté. Ce contrôle est nécessaire, car une fois les résultats proclamés, le juge est devant un fait accompli. Tôt ou tard les conséquences politiques du scrutin influencent son comportement. La légitimité des choix exprimés par le peuple risque alors de prendre le pas sur la non-conformité du projet aux normes hiérarchiquement supérieures et, parfois même, d'opérer une modification de facto du droit ou une « révolution » au sens juridique du terme. Pour le dire à la manière de F. Hamon : « une fois adoptée, la loi référendaire bénéficie d'une présomption presque irréfragable de légitimité démocratique ». Et d'ajouter : «  force est de constater que lorsqu'un juge se trouve placé devant l'alternative d'exercer un contrôle a posteriori ou de ne pas exercer de contrôle du tout, c'est souvent le second terme qu'il choisit ». Lire en ce sens TAILLON (P.), op.cit., p. 428.

* 189BOSHAB (E.), op.cit., p.11.

* 190La révision de l'article 110 de la Constitution.

* 191La révision des articles 197 et 198 de la Constitution.

* 192La révision de l'article 71 de la Constitution.

* 193DJOLI (J.), op.cit., p. 240.

* 194Pendant cette période, la rivalité entre acteurs politiques cède à la violence de toutes formes. Pour la révision de 2011, les partis politiques de l'opposition avaient d'ailleurs boycotté la séance.

* 195DJOLI (J.), op.cit., p. 241.

* 196 BOSHAB (E.), op.cit., p. 126.

* 197Idem.






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