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L'application par le Cameroun des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques

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par Dieudonné MEVONO MVOGO
Université de Limoges, France - Master II Droit International et Comparé de l'Environnement ( DICE) 2016
  

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Paragraphe II : Les obstacles liés à la menace sécuritaire

La montée en puissance de la menace sécuritaire au Cameroun ne va pas sans conséquences. En effet, depuis un moment, le pays fait face à des menaces d'envergure importante. Après les attaques répétées des pirates sur les côtes camerounaises, le groupe BOKO HARAM du Nigéria a étendu ses exactions au Cameroun depuis 2013. Depuis lors, le pays est en guerre, mais officialisée en 2014 par le Chef de l'Etat à l'occasion du sommet de Paris sur BOKO HARAM80. De l'autre côté, à la frontière avec la République Centrafricaine, les combattants centrafricains font des incursions en territoire camerounais. Ainsi, le Cameroun a dû déployer ses troupes le long de la frontière. La menace sécuritaire pourrait influencer l'application des textes internationaux de lutte contre les changements climatiques. Il serait dès lors judicieux d'étudier la menace terroriste (A) et l'insécurité transfrontalière (B).

79 Pour rendre ces actions efficaces, il est nécessaire que les populations, principaux destinataires de ces mesures soient informées, telle que le recommande la Convention d'Aarhus du 25 juin 1998 sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement. Pour accéder à l'information, il faut une certaine instruction. Voir Raphael ROMI, « les mécanismes juridiques de contrôle et de suivi des mesures environnementales en droit comparé », in Michel Prieur (dir), Vers un nouveau droit de l'environnement, Limoges, CIDCE, 2003, pp. 217-226 (spéc. p. 217).

80 Voir site de la Présidence de la République du Cameroun www.prc.cm consulté le 25 août 2016.

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A. La menace terroriste

En quoi la menace terroriste constitue-t-elle un obstacle pour l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques au Cameroun ? Telle est la question qui sous-tendra notre réflexion dans ce paragraphe. La menace terroriste constitue un obstacle pour l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques dans la mesure où elle peut freiner la mise en oeuvre des projets relatifs à ladite application. En effet, le terrorisme frappe la partie septentrionale du Cameroun. Cette zone est d'ailleurs considérée comme celle où les conséquences des changements climatiques sont très importantes. Ainsi, l'impact des exactions du terrorisme est également important. De fait, l'activité terroriste freine la mise en oeuvre des projets dans cette partie du pays, notamment les projets relatifs aux changements climatiques programmés dans cette zone. A titre d'exemple, les terroristes ont procédé à l'enlèvement de nombreuses personnes, y compris des expatriées engagés dans certains projets au nord du Cameroun. C'est le cas de dix chinois d'une entreprise chargée de construire une route enlevés au cours du mois de mai 201481. Si l'exemple pris ne porte pas sur des projets de lutte contre les changements climatiques, ces derniers ne sont néanmoins pas à l'abri. Ce d'autant plus qu'un projet important de lutte contre les changements climatiques y est engagé : le projet « sahel vert » pourrait subir les affres de la guerre ; dans la mesure où, cette guerre a déjà entraîné entre 100. 000 et 150. 000 déplacés, et près de 200.000 réfugiés Nigérians82. L'afflux de ces populations pourrait avoir pour conséquence une empreinte importante sur le couvert végétal mis en place dans le cadre du projet « sahel vert ». En effet, ce projet vise l'implantation d'une ceinture d'arbres. Mais avec cet afflux de réfugiés et de déplacés entraine l'augmentation de besoins en bois de chauffe, besoins également pour faire des cultures. L'espace et les arbres de ce projet n'en seraient pas épargnés.

Par ailleurs, une guerre comme celle-là constitue une poche supplémentaire de dépenses avec une diminution de ressources. En effet, la guerre contre BOKO HARAM a entraîné une chute des revenus fiscaux. Selon une étude du Ministère de l'Economie, de la Planification et de l'Aménagement du Territoire de 2014, le conflit entraînerait une baisse des recettes fiscales de la zone touchée. En effet, la fermeture de la frontière avec le Nigéria aurait favorisé la contrebande. L'administration a dû prendre des mesures fiscales accommodantes pour éviter des tensions sociales83. Pour ce qui est de l'allocation des ressources au MINEPDED, département ministériel en charge de la lutte contre les changements climatiques, l'enveloppe budgétaire de ces cinq (05) dernières années n'a pas beaucoup

81 Cette information fut relayée en son temps par la presse, notamment le site du journal Le monde.fr, un article du 19 mai 2014.

82 Voir Armel MEWOUTH, « Crises environnementales et conflit Boko Haram-Forces Armées Camerounaises dans la région de l'Extrême-Nord du Cameroun », in www.africa-and-science.com, n°00195 du 17 mai 2016, p.4

83 MINEPAT, Impact de la crise sécuritaire aux frontières sur l'économie camerounaise, décembre 2014, 14p (p.8).

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progressé. Au cours des exercices budgétaires de 2013 et 2014, le montant alloué est resté stable, se situant à six mille quatre cent soixante et un millions de francs CFA (6.461.000 F.CFA).

En somme, la présence de la menace terroriste au Cameroun et notamment dans la région de l'Extrême Nord, l'une des plus pauvres du pays, constitue un véritable frein pour l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques, au regard des conséquences de ce fléau sur le processus d'application de ces instruments.

B. L'insécurité transfrontalière

L'insécurité qui sévit dans la région de l'Est constitue également un obstacle pour l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques. En effet, les troubles en République Centrafricaine RCA ont eu des répercussions en territoire camerounais.

D'abord, les bandes armées causent des exactions au Cameroun. Ceci a pour conséquence de ralentir les activités dans cette zone du pays. Leurs actions instaurent une situation d'insécurité favorable à un certain nombre de pratiques au rang desquelles l'exploitation abusive de certaines ressources forestières, comme le bois, cette zone faisant partie du massif forestier du Congo. Une telle situation est susceptible de mettre à mal les programmes de préservation de la forêt (REDD+, FLEGT, APV, etc.) lesquels visent à conserver ce puits carbone qu'est la forêt du bassin du Congo en la protégeant de la surexploitation. Cette situation est aggravée par des attaques que subissent les agents des eaux et forêts qui ont pour mission de veiller au respect des règles d'exploitation forestière. Le fait que ces rebelles soient lourdement armés que les agents des eaux et forêts entraîne un rapport de force déséquilibré. Ainsi, le gouvernement a dû déployer l'armée dans cette zone.

En plus, la guerre en RCA a instauré une situation d'insécurité qui a entraîné des déplacés. Certains d'entre eux ont franchi la frontière pour trouver refuge en territoire camerounais. Cette insécurité a fait accroître la vulnérabilité des populations non seulement des réfugiés, mais également celle de la région de l'Est. Cet afflux de réfugiés occasionnerait une empreinte considérable sur le couvert forestier84, et partant la destruction de la forêt.

En résumé, l'insécurité transfrontalière a des répercussions sur l'application des textes juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques, car l'insécurité freine les activités dans la région. L'afflux de réfugiés pourrait réduire à néant les efforts faits pour la mise en oeuvre des projets climatiques.

84 Selon le HCR-Cameroun, au 31 décembre 2015, le Cameroun accueillait 233 890 réfugiés centrafricains installés au moins dans 314 sites et villages dispersés le long de la frontière avec la RCA. Voir site http://www.unhcr.org/fr/cmr.html, consulté le 08 août 2016.

CONCLUSION DE LA SECONDE

PARTIE

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La volonté du Cameroun d'appliquer les instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques bute sur un certain nombre de difficultés. Ces difficultés sont regroupées en deux catégories : les insuffisances et les obstacles. Pour ce qui est des insuffisances, il convient de retenir que les limites techniques et technologiques freinent le processus d'application des textes sur le climat. En plus, les insuffisances des moyens financiers constituent un handicap majeur pour cette activité. Quant aux obstacles, il y a les obstacles structurels qui portent sur les failles et défaillances du système de lutte contre les changements climatiques. C'est ainsi qu'on a dû relever les insuffisances textuelles et organiques. En ce qui concerne les obstacles conjoncturels, ils intègrent les éléments contingents et fortuits qui affectent la lutte contre ce danger climatique. Dès lors, les aspects économiques, sociaux et sécuritaires peuvent-ils entacher la volonté du Cameroun dans l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques.

CONCLUSION GENERALE

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L'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques par le Cameroun soulève un certain nombre d'interrogations. De ces interrogations, l'on a choisi de répondre à celle de savoir comment le Cameroun applique-t-il les instruments juridiques internationaux. Cette difficulté soulevée, une tentative de réponse s'en a découle. Il s'agit de démontrer qu'il y a une volonté au Cameroun d'appliquer les instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques. La suite de cette hypothèse montre la présence d'un certain nombre de facteurs qui freinent l'application des textes internationaux de lutte contre les changements climatiques.

Pour ce qui est de la manifestation de la volonté du Cameroun, elle est perceptible sur deux plans : dans l'application proprement dite et dans son contrôle. De fait, pour appliquer les textes internationaux de lutte contre les changements climatiques, le Cameroun a d'abord procédé à la réception dans son ordre juridique des instruments juridiques internationaux. Ainsi, le pays a ratifié les conventions et protocoles climatiques, et a par la suite procédé à leur introduction dans son système juridique. Pour ce faire, divers textes nationaux ont été adoptés. En ce qui concerne l'exécution, des textes juridiques et non juridiques à plusieurs échelles de la hiérarchie sont adoptés. Pour plus de précision, la loi-cadre environnementale intègre les considérations environnementales, il en est de même pour la loi sur la gestion des forêts. Quant aux règlements, plusieurs en ont été adopté. C'est le cas du décret portant création, organisation et fonctionnement de l'institution du climat. C'est également le cas des règlements constituant des comités ministériels. En sus, des institutions pour conduire la lutte contre les changements climatiques existent, en premier lieu les ministères (le MINEPDED, le MINTRANS, le MINEE, etc.), ensuite les collectivités publiques décentralisées à l'instar des communautés urbaines et les communes d'arrondissement85. Enfin, les établissements publics appliquent les instruments juridiques de lutte contre les changements climatiques (l'ONACC, l'IRAD, etc.). Voilà pour ce qui est des institutions publiques. Le secteur privé participe également dans l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques, et ce de manière considérable. Cette participation se concentre dans des actions de certaines entreprises et des ONG. Les ONG notamment jouent un rôle important en matière climatique. Leurs actions portent essentiellement sur le contrôle de l'application par l'administration des instruments juridiques de lutte contre les changements climatiques. Elles font également un travail d'information, de sensibilisation, d'éducation des

85 Les régions ne sont pas encore fonctionnelles au Cameroun.

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populations pauvres, les plus exposées aux effets des changements climatiques86 sur les effets des changements climatiques et les éduquent. Quant aux entreprises, elles sont tenues de respecter la législation climatique en vigueur au Cameroun. De surcroît, ces entreprises participent aux MDP. L'entreprise d'assainissement des villes camerounaises, HYSACAM enregistre à son compteur deux centrales de captage du biogaz, en vue de la réduction des émissions de GES. Cette entreprise envisageait ventre ces unités de réductions au marché carbone.

Par ailleurs, la volonté de l'Etat se manifeste en matière de contrôle et de suivi de l'application de ces instruments. En matière de contrôle, il convient de relever que plusieurs institutions et organes ont été recensés au niveau national et au niveau international. Mais l'orientation donnée portait sur la division : contrôle juridictionnel et contrôle non juridictionnel. En matière de contrôle juridictionnel, l'on a relevé le contrôle juridictionnel international sous la houlette de la CIJ, suivie d'autres instances à l'instar de l'ORD, des tribunaux arbitraux, les juridictions régionales des droits de l'homme, etc. Quant au contrôle juridictionnel national, il convient de relever que le juge national y intervient soit pour des questions de juridicité soit pour des questions de responsabilité. Toujours est-il que les juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif sont des acteurs principaux.

Quant au contrôle non juridictionnel, il est assuré au niveau international par la pression internationale exercée par la diplomatie climatique et par l'opinion publique internationale. Au niveau national, ce contrôle est porté par les mouvements nationaux ; qu'ils soient institutionnels ou non. Ainsi, on a relevé l'action des institutions comme le parlement, certains autres organismes tels la CNDHL, la CONAC, etc. Aussi, la société civile est très active dans le contrôle de l'application par le Cameroun des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques, comme l'atteste l'activité des médias.

La réponse à la question posée nous a amenés à étudier les difficultés auxquelles fait face ce pays dans l'application des instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements climatiques. En réalité, l'étude de ces difficultés s'articule autour de l'insuffisance des moyens et des obstacles qui freinent l'ardeur du Cameroun. Au rang des insuffisances, l'on a relevé l'insuffisance de moyens techniques et technologiques. L'insuffisance des moyens techniques se traduit par le suivi limité de l'évolution du climatique et par les moyens limités d'atténuation et d'adaptation aux effets des changements climatiques. Par ailleurs, l'insuffisance des moyens technologiques se traduit par un déficit de connaissances climatiques et une assistance internationale insuffisante. Pour ce qui est de l'insuffisance des moyens financiers, l'on a étudié le déficit des moyens consacrés au climat, dû à la primauté des contraintes économiques et des problèmes de gouvernance. Ensuite, il existe des limites à l'aide internationale par le fait que celle-ci est dirigée vers des objectifs ciblés et parcellaires. Cette aide n'est d'ailleurs pas à la hauteur des besoins qu'implique la lutte contre les changements climatiques. Enfin, les obstacles structurels et conjoncturels ont été relevés. Ces obstacles portent sur les insuffisances légales et réglementaires. Les

86 MEVONO MVOGO D. op. cit.

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insuffisances institutionnelles se déclinent dans les insuffisances des institutions publiques et dans les institutions privées.

Si le processus d'application de ces instruments fait ressortir la volonté du Cameroun, qui est freinée par des difficultés rencontrées. Pour pallier ces difficultés et rendre l'action de ce pays davantage efficace, il convient d'optimiser le financement de la lutte contre les changements climatiques. En effet, ce sont des opérations qui coûtent extrêmement chers et que ne peuvent pas supporter les pays en développement comme le Cameroun. Ainsi, il serait nécessaire de rendre économiquement rentables les projets carbones afin d'attirer plus d'investisseurs. Cette rentabilisation intègrerait les avantages écologiques et économiques des MDP87. Pour ce faire, l'on devra restructurer le marché carbone, et prévoir des garanties institutionnelles pour cette catégorie d'investisseurs en activant un mécanisme d'assurance internationale. Le FEM pourrait être une institution idoine pour l'accomplissement d'une telle politique88.

Par ailleurs, la création d'une juridiction environnementale internationale avec une section climatique serait de bon aloi. Car l'environnement présente des spécificités dont les contours n'épousent pas toujours la logique classique du droit international public. A titre d'exemple, la CIJ qui est la juridiction internationale ne peut être saisie par les individus ; or le droit à l'environnement est avant tout un droit subjectif dont les individus devraient en jouir mais également en exercer. Dans la logique actuelle du système juridictionnel international, cela s'avère compliqué. Dès lors, l'avènement d'une juridiction intégrant ces spécificités est nécessaire. Une reconfiguration de la CIJ pourrait partiellement résoudre ce problème qui de plus en plus se fait ressentir, et auquel la doctrine accorde de plus en plus d'attention.

87 Le manque à gagner connu par certaines entreprises dans les projets MDP pourrait décourager plus d'un investisseur.

88 A titre d'exemple, Michel NGAPANOUN, le PDG D'HYSACAM envisage un plan Marshall pour le climat en Afrique.

BIBLIOGRAPHIE

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A. Ouvrages

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci