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Les états de la CEMAC face aux défis de la sécurité humaine

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par Marius Judicael TOUATENA SIMANDA
Université de Yaoundé 2 - Master en Droit Public International et Communautaire 2015
  

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Chapitre II : LES CONSEQUENCES DE L'INEFFICACITE DE RIPOSTE AUX MENACES A LA SECURITE HUMAINE

Après avoir élucidé le contexte sous régional de la sécurité humaine, la posture des Etats de la CEMAC face aux défis de la sécurité humaine, l'effort de garantie de la sécurité humaine assortie des obstacles et de l'inefficacité, il s'avère important de montrer les conséquences de cette inefficacité de riposte aux menaces qui se présentent par la persistance des menaces (Section I) afin de proposer quelques pistes pour une garantie efficace de la sécurité humaine dans la sous région CEMAC et en particulièrement pour chaque Etat de la CEMAC (Section II).

Section I : La persistance des menaces

La persistance des menaces classiques et les nouvelles formes de menaces (Paragraphe I) ainsi que les autres types de menaces existantes (Paragraphe II) constituent la suite logique entrainée par l'inefficacité de riposte des Etats de la CEMAC.

Paragraphe I : La persistance des menaces classiques et les nouvelles formes de menaces

Les facteurs générateurs de l'insécurité humaine, de tensions et de conflits sont multiples et suivent les contours de l'évolution politique et sociétale des États. Ils se situent sur différents plans, économique, social et politique, et obéissent à des logiques diverses. Sans prétendre à l'exhaustivité, il convient de faire la distinction entre les situations issues de déstabilisations violentes ou de la confrontation à de nouvelles formes de menaces (B), et celles liées soit à des tensions structurelles, propres au processus de construction nationale, soit à la mutation de sociétés qui entrent dans des processus de changement (A), comme ceux inaugurés par les « Printemps arabes » par exemple.

A- La persistance des menaces classiques

De récents évènements survenus dans l'espace CEMAC démontrent réellement les difficultés rencontrées par certains États dans leur processus de démocratisation ou de stabilisation, alors même qu'ils avaient amorcé une transition tournée vers le multipartisme et la construction de l'État de droit.

L'une des manifestations les plus courantes de ces difficultés est la survenance de coups d'État. Leur avènement est toujours le symptôme d'impasses et d'échecs institutionnels accumulés. Loin de résoudre les conflits dont ils se présentent comme des antidotes et des remèdes, les coups d'État sont d'abord générateurs de complications et de complexité. Ils signifient l'arrêt des efforts d'institutionnalisation de la vie politique et constituent le plus souvent des obstacles importants sur la voie des transitions. L'une des grandes aspirations de la Déclaration de Bamako, dans son effort d'enraciner la démocratie, était précisément d'en souligner la gravité et de signifier la fin de l'ère des coups de force : « pour préserver la démocratie, la Francophonie condamne les coups d'État et toute autre prise de pouvoir par la violence, les armes et ou quelque autre moyen illégal » (chapitre 3, article 5).

À Yaoundé, en avril 2014, lors du Colloque international sur les problématiques sécuritaires des frontières en Afrique, dont nous avons eu la chance de participer, les participants sont revenus avec insistance sur l'importance de rompre avec le cycle des intrusions militaires dans la vie politique des États. Il a été convenu qu'il ne peut y avoir de « bons coups d'État ». Il n'y va pas seulement de l'improbabilité, voire de l'impossibilité, d'assainir la vie politique, mais du fait même que la régulation par le droit, les élections et le jeu des institutions était bafouée.

Cette condamnation unanime demeure nécessaire à la stabilisation de la vie démocratique. Toutefois, une analyse plus fine doit prendre en compte les facteurs qui ont engendré le recours à la force dans l'ordre interne des États. Si, dans les années qui ont suivi les indépendances, les prises de pouvoir par la force portaient la marque d'une idéologie militante, voire révolutionnaire, en vue de la mise en place d'un nouvel ordre social, cela ne semble plus être le cas aujourd'hui. Les coups d'État ne sont plus portés par la volonté d'instaurer un ordre égalitaire ou de justice sociale par la force, comme dans un contexte de guerre froide qui leur permettait de s'appuyer sur des clivages idéologiques ou de jouer de la rivalité entre les deux grandes puissances qui leur assuraient des marges de manoeuvre et un soutien.

L'environnement international impose désormais ses « conditions » et façonne, à travers des règles de gestion, de transparence et de « bonne gouvernance », des rapports nouveaux entre investissement, aide au développement et stabilité de la vie politique. Les rapports aux grandes institutions financières et bancaires, la participation de bailleurs de fonds et le nombre de parties prenantes au processus de construction de l'État ont pesé dans l'émergence d'un climat réfractaire à des interruptions récurrentes du cours de la vie politique.

Enfin, les évolutions sociales et politiques internes ainsi que le changement des mentalités ont contribué à modifier durablement les rapports entre l'armée et la société. En effet, les forces armées ont été associées de façon croissante aux efforts de démocratisation et à la construction d'un ordre politique d'intégration nationale. Elles tendent progressivement à devenir une composante des institutions étatiques et ne se perçoivent plus systématiquement en surplomb par rapport à la société, investies d'une mission de salut public. La construction progressive de l'État de droit, la légitimité accordée à un pouvoir civil démocratiquement élu ont placé les forces armées dans un cadre dont les limites sont désormais mieux définies. Par ailleurs, le multipartisme - même naissant - se révèle peu propice à l'accueil de coups de force militaire, en dépit des querelles politiques et des difficultés socio-économiques qui peuvent l'accompagner.

Les changements induits par cette nouvelle donne sont réels et révélateurs d'une lente évolution des moeurs et des institutions. Pourtant, ces indicateurs positifs de changement ne mettent pas les États à l'abri de coups de force.

La zone CEMAC a connu ces vingt dernières années de telles ruptures de la démocratie : au Tchad, le Président putschiste Hissein Habré renversé par le militaire Idriss Deby (décembre 1990) ; au Congo Brazzaville, le Président élu Pascal Lissouba a été renversé par Déni Sassou Nguesso en 1997, un militaire et homme politique congolais, qui a été auparavant Président de la République populaire du Congo de 1979-1992; en République centrafricaine, des coups d'Etat successifs ont eu lieu dans le pays, dont nous notons entre autres celui du Général François Bozizé renversant le Président Ange Félix Patasse en 2003 et qui lui-même a été également écarté du pouvoir dix ans après par la Séléka (mars 2013), une coalition de mouvements rebelles issus du nord du pays, dirigée par Michel Djotodia.

Si certains coups d'État relèvent encore, parfois, de missions dites de salut public, visant à défendre une démocratie « menacée », la plupart des motifs qui animent leurs auteurs relèvent de griefs plus circonstanciés, à l'encontre d'un pouvoir civil jugé trop faible et indécis. Les raisons des putschistes vont des justifications les plus politiques (critique du pouvoir civil, défense d'intérêts partisans étroits, etc.) aux revendications corporatistes les plus diverses (paiement des soldes, absence de moyens, manque de reconnaissance sociale). De fait, les formes de mobilisation sont moins idéologiques, plus contestataires que révolutionnaires, et s'inscrivent plus dans le cadre de revendications portant sur des moyens ou un statut que dans celui d'une confiscation du pouvoir au profit d'une dictature militaire pérenne.

Toutefois, ces ressorts de la contestation ne se cantonnent pas au seul niveau de la revendication professionnelle ou politique. Au-delà d'un positionnement de défiance vis-à-vis de l'autorité politique, ces mouvements sécurisent parfois à leur avantage des portions entières de territoire national, disposent d'armes et d'appuis en provenance de pays frontaliers et vont jusqu'à s'allier à des mouvements rebelles. Il reste à définir la place et la fonction de l'armée au sein de l'État. Il ne s'agit pas d'entretenir un sentiment de méfiance vis-à-vis des forces armées, ni d'en marginaliser le rôle, ni de se limiter à les condamner dans le cas de leur ingérence dans la vie politique mais, au contraire, de leur donner toute la place qui leur revient dans le cadre d'une vie institutionnelle respectueuse de la séparation des pouvoirs, des principes de l'État de droit, et dans le strict cadre des missions qui leur sont dévolues.

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