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L'Union Africaine et le projet des Etats-Unis d'Afrique: Identification et Analyse des facteurs entravant la concrétisation de cet idéal panafricain

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par Djibril FOFANA
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise de sciences politiques 2007
  

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DEUXIEME PARTIE

CONSTRUIRE LES ETATS- UNIS D'AFRIQUE : TEL EST L'OBJECTIF !

CHAPITRE III LA STRATEGIE DES ETATS-UNIS D'AFRIQUE

SECTION 1 : La nécessaire reforme des structures et organes clés de l'Union Africaine

L'UA telle qu'elle se présente aujourd'hui constitue un obstacle certain à l'édification des Etats-Unis d'Afrique. La configuration ambiguë et parfois imprécise des dispositions de son Acte Constitutif en constitue la parfaite illustration.

Pour ce faire, de profondes réformes devraient être engagées afin de permettre à l'UA de baliser la voie vers les Etats-Unis d'Afrique. A cet effet, il conviendra d'apporter des transformations aussi bien au plan politique et militaire, qu'au plan social et économique. S'agissant du domaine politique et militaire, les réformes à ce niveau consisteront tout d'abord, à dépoussiérer l'Acte constitutif afin de le rendre compatible avec les objectifs d'unité politique du continent. Ensuite, il s'agira de mettre en oeuvre les mécanismes appropriés qui permettront à l'Afrique d'arriver à bout du fléau des conflits qui entrave considérablement toutes les ambitions de développement solidaire et intégré des Etats africains (paragraphe1) . En ce qui concerne les domaines économique et social, les réformes préconisées, s'articulent essentiellement autour de la redynamisation du projet « NEPAD » et de la mise en fonctionnement effectif des institutions financières africaines prévues dans le cadre du Traité instituant la Communauté économique Africaine et reprises par l'UA (paragraphe2).

Paragraphe 1 : les nécessaires réformes au plan politique et militaire

Reformer l'UA revient à faire de celle-ci, une institution crédible à même de mener le continent vers l'unité politique. A cette fin, et eu égard aux difficultés que rencontre l'UA dans la réalisation de ces nobles objectifs, il conviendra de la moderniser en vue de l'adapter aux exigences panafricaines.

Au plan politique, c'est l'Acte constitutif qui doit être foncièrement dépoussiérer. Celui-ci recèle en effet, de nombreuses dispositions qui font que l'UA s'apparente beaucoup plus à une organisation de coopération qu'à une organisation d'intégration régionale évoluant vers les Etats-Unis d'Afrique.

C'est ainsi que, l'Acte ne définit pas clairement les pouvoirs et fonctions des divers organes, ni leurs liens opérationnels dans le processus d'intégration. Les organes déjà mis en place sont la Conférence de l `Union, le Conseil Exécutif composé des ministres des Affaires Etrangères, la Commission dont le siège est à Addis Abéba, le Comité des Représentants Permanents composé des ambassadeurs accrédités auprès de la République Fédérale d'Ethiopie, le Parlement Panafricain en Afrique du Sud, et le Conseil Economique Social et Culturel, dont le siège reste à déterminer. Il y a lieu de souligner toutefois que, le parlement a été mis en place sur la base du Traité d'Abuja, et qu'il ne joue pas encore sa pleine fonction législative, aux fins d'assurer la pleine participation des peuples africains au développement et au processus d'intégration du continent.

D'autres organes de l'Union sont les comités techniques spécialisés composés des ministres chargés des différents secteurs économiques. Il y a également la Cour Africaine de Justice, des droits de l'Homme et des Peuples dont le fonctionnement n'est pas encore effectif.

La Conférence de l'Union qui est l'organe suprême de l'UA, prend la plupart des décisions, mais ses réunions portent essentiellement sur des questions d'actualité, généralement les crises politiques et les conflits. Elle devrait plutôt se consacrer davantage aux questions directement liées au processus d'intégration à l'échelle continentale.

Il en est de même du Conseil Exécutif et du Comité des Représentants Permanents. En effet, s'agissant de cette dernière, qui peut être considérée comme la seule véritable nouveauté de l'UA48(*), sept grandes spécialités y sont distinguées49(*). Toutefois, ces regroupements ne semblent pas prendre en compte la donne récente de la mondialisation et de la nouvelle économie. Les technologies de l'information et de la communication, la formation adaptée, la valorisation des brevets et la promotion de la propriété intellectuelle sont autant de secteurs qui doivent faire l'objet d'une attention particulière de la part de l'UA.

Les articles 15 et 16 de l'Acte Constitutif de l'UA qui traitent des attributions et de l'organisation des comités techniques spécialisés auraient pu être intégrés dans l'article 14. Plutôt que de se formaliser sur les détails de procédure, il aurait aussi été intéressant de fixer des objectifs réalisables avec des sources budgétaires fiables et de proposer une date buttoir pour faciliter les évaluations, ainsi que, une éventuelle sanction par la société civile.

Au contraire, tout ce qui pourrait permettre d'inscrire un tel mécanisme de contrôle par la société civile se trouve écarté du texte. Il n'y a donc pas de possibilité d'évaluation, ni de sanction des urnes quelle que soit la résultante des actions initiées dans le cadre de ces comités techniques, ni plus globalement au niveau des autres entités proposées dans l'Acte.

La Commission quant à elle, a été définie dans l'Acte Constitutif comme un Secrétariat, alors que dans la pratique, les Etats membres, les pays et les organisations non africains, tout comme les organisations internationales, la perçoivent comme l'organe principal d'élaboration et de mise en oeuvre des politiques de l'UA. En effet, c'est essentiellement sur elle, ou plutôt sur son dynamisme que repose la mise en oeuvre efficace du processus d'intégration devant culminer avec la concrétisation du projet de création des Etats-Unis d'Afrique. Toutefois, bien que conçu comme un Secrétariat dans l'Acte constitutif, les statuts de la Commission lui confèrent un pouvoir exécutif dans certains domaines. Mais, la Commission n'a malheureusement pas les ressources humaines et financières adéquates pour exercer ce pouvoir et mener à bien toutes ces activités. Pour ce faire, il faut que les Etats honorent régulièrement leurs cotisations auprès de l'UA afin que celle-ci puisse conduire harmonieusement les réformes qui permettront de faire de l'unité politique du continent une réalité tangible. En outre, les domaines d'activités de la Commission qui correspondent à des départements, sont vastes et manquent de précision. Ils couvrent la paix et la sécurité, les affaires politiques, les affaires sociales, l'Agriculture et l'Economie rurale, les Ressources humaines, le Commerce et l'Industrie et les Infrastructures. A cela, s'ajoute le cadre actuel de gestion, en particulier le fait que les responsables des départements soient directement élus à leurs fonctions. Ce qui ne favorise pas le travail d'équipe, pourtant essentiel pour la conduite harmonieuse du processus d'intégration.

Sous ces éclairages, il apparaît que la reforme de l'Acte constitutif notamment, en ce qui concerne les attributions et les compétences des organes politiques de l'Union est plus que nécessaire dans l'optique de placer le processus d'intégration politique du continent dans une dynamique positive.

Au plan militaire, il s'agira de donner à l'organe principale en charge de cette question, en l'occurrence le Conseil de Paix et de Sécurité, les moyens d'oeuvrer à la pacification du continent, car comme le disait Alpha Oumar Konaré, « que la paix soit le socle du développement n'est plus un secret pour personne ». En effet, le conditionnement réciproque, entre le développement d'institutions et d'une culture démocratique fortes, le respect des droits de l'Homme et de l'Etat de droit, et la promotion de la sécurité collective, d'une paix et d'une stabilité durables n'est plus à démontrer. Ce lien dialectique doit constituer une motivation supplémentaire pour l'UA à faire face au fléau des conflits, en jouant un rôle de premier plan dans la restauration de la paix, de la sécurité et de la stabilité.

A cet effet, Le protocole portant création du Conseil de Paix et de Sécurité énonce la nécessité pour l'Afrique de mettre en oeuvre un système fiable, non seulement pour les préventions et les interventions, mais aussi pour la défense du continent africain. L'entrée en vigueur du protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité depuis 2003, commande donc l'accélération du processus de mise en place d'une politique de défense commune. A ce propos, l'UA doit se doter d'une force africaine en attente, qui puisse être opérationnelle et capable d'une réponse rapide aux crises éventuelles. Seulement, cette politique de défense commune tant souhaitée est en proie à de nombreuses difficultés pour sa mise en place, du fait notamment de divergences politiques et de problèmes financiers. En effet, même si, l'adoption par la troisième réunion des chefs d'états major d'Afrique, tenue à Addis Abéba les 15-16 Mai 2003, d'un document-cadre sur la réalisation des objectifs de l'Union en matière de défense commune a ravivé les espoirs, rien de définitif ne s'est toujours dégagé des travaux des organes de décision.

L'examen par le Conseil Exécutif du « projet-cadre de politique commune de défense et de sécurité »50(*), lors de sa troisième session extraordinaire tenue du 21 au 25 Mai 2003 à Sun City (Afrique du Sud), et les discussions plutôt passionnées sur la question au sommet de Maputo, ont plutôt fait ressortir des divergences entre les pays membres. Celles-ci se cristallisent aussi bien sur le principe même de la constitution d'une force permanente que sur les cas ou son intervention pourrait être décidée, ou encore sur les moyens de financer de telles opérations.

S'il est vrai que la réunion des ministres de la Défense prévue pour Novembre 2007 devrait de toute évidence apporter des éléments de réponse à propos des statuts et modes d'intervention de la force africaine, le problème reste en revanche entier en ce qui concerne le budget des opérations de paix. Or, c'est en grande partie, faute de moyens financiers que l'OUA s'était contentée d'intervenir « à minima », sous la forme de missions d'observations temporaires (composées de quelques dizaines de civils et de militaires) financées presqu'exclusivement par l'aide extérieure.

A ce propos, les contraintes auxquels a été confrontée l'UA dans la gestion du conflit au Darfour illustrent de fort belle manière la difficulté avec laquelle l'organisation fait face aux crises et conflits qui sévissent sur le continent. Ils révèlent en même temps, l'impérieuse nécessité d'engager des transformations au niveau du dispositif militaire de l'UA afin de la rendre plus efficace. C'est ainsi, qu'à l'occasion du 7ème anniversaire de l'UA célébré à Syrte le 12septembre 2006, le président de la Commission Alpha Oumar Konaré a justifié l'incapacité des forces de l'UA à intervenir durablement au Darfour, par l'absence des moyens financiers dus au fait que les Etats membres ne s'acquittent pas régulièrement de leurs cotisations. Il a, par la même occasion rappelé que,  « 75°/° des moyens financiers utilisés pour le maintien de la paix au Darfour proviennent des soutiens occidentaux ».

Ces handicaps renvoient inexorablement aux difficultés financières et structurelles de l'UA. Celle-ci est toujours confrontée aux importants arriérés de contributions et aux réticences des partenaires extérieurs à soutenir certaines initiatives de paix. A titre indicatif, à la date du 3 Juillet 2003, le montant des arriérés de contributions s'élevait à plus de 39millions de dollars51(*), soit l'équivalent du budget annuel de l'Organisation.

A coté des questions politiques et militaires où des réformes doivent être nécessairement opérées, la donne économique et sociale devrait également faire l'objet de transformations pour permettre à l'UA de relever le défi de la construction des Etats-Unis d'Afrique. Car, l'union politique n'a de matérialité que si elle est fondée sur une union économique.

Paragraphe 2 : Les nécessaires réformes au plan social et économique :

Pour une redynamisation du NEPAD

La crise socio-économique dans laquelle stagne le continent, est révélatrice des difficultés des Etats africains et de l'UA de venir à bout de cette dramatique situation, dont la persistance constitue un obstacle majeur à tout projet d'unité politique du continent. Face à cet impératif de redressement économique et social du continent, les Chefs d'Etat et de Gouvernement d'Afrique ont adopté lors du sommet de Lusaka en 2001, la Nouvelle Initiative Africaine (NIA), qui était une fusion entre le Programme de Redressement de l'Afrique (MAP) initié par le président Thabo Mbéki de l'Afrique du Sud, et le Plan Oméga du président Abdoulaye Wade du Sénégal. La NIA est ensuite devenue le Nouveau Partenariat Pour le Développement de l'Afrique (NEPAD), avec le soutien des partenaires au développement, notamment ceux du Groupe des pays les plus industrialisés (G8).

Le but premier du NEPAD était de mettre les pays africains, collectivement sur la voie de la croissance et du développement durable afin qu'ils deviennent des acteurs majeurs de l'économie mondiale et des affaires monétaires et politiques de la planète.

Ainsi, avec le lancement quasi simultané de l'UA et du NEPAD, les Chefs d'Etat africains ont voulu s'assurer que la seconde serve d'outil facilitant la mise en oeuvre de la première.

Le Plan d'Action du NEPAD, couvre les six axes prioritaires suivants : la Bonne Gouvernance politique et économique, l'Agriculture et l'accès aux marchés, le développement des Ressources Humaines, les Infrastructures, l'Environnement et la mobilisation des ressources.

Seulement voilà. Depuis son adoption, le NEPAD peine à mettre en pratique son programme. Ici encore, l'absence de moyens financiers fait de celui-ci un catalogue de bonnes intentions sans possibilité d'application effective et efficiente. A ce propos, le 21 Mars 2007, à l'occasion de la journée internationale du NEPAD célébrée en Algérie, le président Abdel Aziz Bouteflika a mentionné au nombre des facteurs qui retardent la mise en oeuvre du NEPAD, la non tenue par les partenaires économiques et les bailleurs de fonds de leurs promesses d'aide financière. Face à cette situation, il est impérieux de mettre en oeuvre les stratégies et mécanismes qui permettront à l'Afrique d'auto financer ses programmes de développement, au lieu de tout attendre de l'extérieur. Pour ce faire, la mise en place des institutions financières africaines, à savoir la Banque Centrale Africaine, le Fonds Monétaire Africain et la Banque Africaine d'Investissement conformément aux dispositions de l'article 19 de l'Acte constitutif de l'UA devrait être accélérée afin que le développement du continent puisse s'opérer de manière « endogène ».

Aujourd'hui, de l'avis de nombreux observateurs l'avenir du NEPAD n'est pas des plus prometteurs. Il est vrai que depuis sa création, très peu de réalisations sont à mettre à son actif. Pire, on assiste à un essoufflement de cette structure du fait de la démission flagrante et manifeste des leaders politiques africains qui en avaient fait la promotion. Le refus du président Sénégalais Abdoulaye Wade d'assister au dernier sommet du NEPAD en Mars dernier à Alger(Algérie), tout comme le retrait du nigérian Olesegun Obassanjo de la scène politique africaine depuis son départ de la tête de son pays, sont autant de signes qui augurent d'une extinction future du projet NEPAD.

Pourtant, il n'est plus un secret pour personne que le NEPAD est une réponse originale et pertinente des Africains à leur marginalisation, et à une stagnation économique et sociale aux allures inquiétantes, qui compromet par ricochet, toutes les ambitions d'unification politique du continent.

La redynamisation de ce projet est à l'heure actuelle la voie la plus pertinente pour une solution africaine aux problèmes économiques qui fragilisent considérablement le tissu sociopolitique du continent. En effet, le NEPAD concerne l'ensemble du continent et répond au cadre de l'UA. Il peut ainsi permettre de jouer sur les complémentarités entre les pays disposant de capacités financières et technologiques (Afrique du Nord et du Sud) et l'Afrique intermédiaire. Il peut aussi, permettre aux grandes puissances africaines de jouer un rôle de pôle de développement régional. Pour les pays industrialisés réunis au sein du G8, il constitue un cadre de référence dépassant les anciens clivages issus de la colonisation.

De toute évidence, le NEPAD est une initiative politique endogène qui doit être prise au sérieux par les Africains, car visant à promouvoir un développement autocentré de l'Afrique et à offrir une vision opérationnelle englobant les activités sociales, politiques et économiques. Pour ce faire, le NEPAD doit collaborer avec l'UA. En effet, c'est un programme qui vise à favoriser la réalisation des objectifs de l'UA à savoir, l'intégration économique et politique du continent. Cette collaboration est d'autant plus nécessaire que, l'une des causes de l'échec relatif du projet NEPAD tenait au fait qu'il a été perçu et a fonctionné comme une organisation autre que l'UA, avec ses propres structures (Le comité de mise en oeuvre des chefs d'Etat et de Gouvernement, le comité directeur, et le Secrétariat). La déclaration de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de Maputo en 2003, a réaffirmé que le NEPAD est un programme de l'UA, et qu'il doit par conséquent être intégré dans les structures et les procédures de celle-ci.

Ce ne sera qu'à ce prix et, bien sûr avec le soutien des populations africaines, que l'UA pourra bâtir sur le continent un espace politique unifié, prospère et paisible, traduisant ainsi le destin unitaire des Etats africains.

SECTION 2 : L'exigence d'une plus grande implication de l'acteur social

Le projet d'unification politique du continent sous la forme des Etats-Unis d'Afrique dont la réalisation incombe à l'UA, ne pourra être effectif qui s'il emporte l'adhésion de l'ensemble des acteurs sociaux africains. La création du Parlement panafricain, s'inscrit dans cette volonté de faire entendre la voix des africains au sujet du projet panafricain dont est porteur l'UA.

Pour ce faire, il est d'une impérieuse nécessité que les acteurs de la société civile s'impliquent activement dans le processus d'intégration à l'échelle continentale (paragraphe1). Egalement, les médias en tant que support de diffusion de l'information et des moyens de communication à très large échelle devront être des acteurs principaux de ce processus (paragraphe2).

Paragraphe 1 : le rôle capital des acteurs de la société civile africaine

En Afrique comme partout ailleurs, le concept de « société civile » est complexe. Il renvoie à une réalité mouvante et diversifiée. Dans ses manifestations concrètes, la société civile constitue le baromètre du degré de conscience des populations de leurs problèmes, et d'appréciation des formes de mobilisation dont elles sont capables pour prendre en charge la résolution de ceux-ci.

La particularité de la société civile africaine par rapport à celle occidentale, relève de trois ordres : D'abord, il est difficile en Afrique de spécifier les véritables composantes de la société civile, même si beaucoup s'en réclament. Ensuite, le niveau de sous-développement et le retard démocratique du continent fixent à sa société civile des objectifs essentiellement politiques et socio-économiques. Enfin, la société civile africaine est elle-même en phase de maturation, d'où son déficit organisationnel et structurel. Cependant, par la lucidité dont elle fait preuve dans la définition de ses projets et actions, elle est un acteur privilégié de développement. N'est-il pas permis de dire que sans paix sociale et stabilité, le développement, et à fortiori la mise en place d'un espace politique intégré en Afrique est compromise ? Dès lors, la société civile participe par son action au processus d'intégration politique et économique du continent, dont le succès dépend de nombreux facteurs au nombre desquels on peut citer la Paix et la Démocratie.

La complexité des problèmes sociaux, requiert une approche à la fois globale et différenciée des défis que doit relever la société civile africaine. Elle implique le combat pour l'éducation, le civisme, la laïcité, la bonne gouvernance, la promotion de l'intégration africaine etc. Ce combat doit aboutir à une culture de démocratie et de paix, socle sur lequel pourra alors, être édifié les Etats-Unis d'Afrique.

Au plan politique et social, la société civile africaine lutte pour aider à l'affirmation d'une démocratie véritable et à l'émergence d'une nouvelle citoyenneté panafricaine. Car, comme le disait le président sud africain Thabo Mbéki, « pour être un véritable africain, il faut être un rebelle, il faut se battre pour la cause de la renaissance africaine »52(*).

Une compétition politique régulière, une très large participation politique et la garantie des libertés civiles sont les conditions essentielles à la démocratie. C'est pourquoi, la réforme électorale est un des canaux par lesquels la société civile peut accroitre son influence. L'intérêt, suscité par le débat sur l'Observatoire nationale des élections(ONEL) et la Commission électorale nationale autonome(CENA) au Sénégal, montre par exemple qu'un type nouveau de citoyen émerge dans ce pays. Il s'agit au-delà d'un besoin de transparence, d'une volonté d'appropriation du processus de désignation des représentants auxquels on délègue les pouvoirs. La question de la légitimité devient donc centrale en Afrique, pour la stabilité des régimes politiques. Ceux dépourvus de légitimité se caractérisent par des crises politiques et socio économiques à répétition. Ainsi, pour lutter contre le sous-développement, la nécessité de moderniser la société doit être une priorité. Seule, une société civile forte peut parer à d'éventuels dérapages.

La société civile aspire à la paix civile et à la sécurité. Donc, elle tient au respect des règles communes qui permettent de faire l'économie des conflits et le long terme nécessaire à la réalisation des projets du continent, notamment son unification politique. Ainsi, dans le champ politique, la société civile doit amener les acteurs politiques à être fidèles à la démocratie en rejettent l'usage et la rhétorique de la violence.

Cette nécessité est non seulement liée à la promotion des valeurs démocratiques, mais aussi à leur enracinement dans les traditions historiques et culturelles. En effet, « La culture politique traditionnelle africaine contrebalançait les valeurs autoritaires par une tendance naturelle au débat ainsi que par la limitation constitutionnelle de l'autorité monarchique »53(*).

Une vie associative riche peut contribuer à accroitre qualitativement le rôle des partis en stimulant la participation politique et en renforçant l'attachement au système démocratique. Des associations bénévoles s'investissent dans la défense de la liberté de la presse, des activités civiques et des droits de la femme.

Là où la vie associative est dense, institutionnalisée et autonome, elle agit pour faire reculer le pouvoir autoritaire. Ce qui se traduit par des pressions efficaces en faveur de la démocratie. Une société civile et l'autorité de l'Etat sont toutes deux indispensables pour promouvoir la justice sociale en Afrique. Il faut que les citoyens s'investissent dans le contrôle des mécanismes politiques et économiques auxquels ils sont assujettis.

Au plan économique, l'exacerbation des crises a contribué au développement d'un imaginaire économique auprès des Africains. Ceci justifie et explique le triomphe de « l'informel » sur le secteur structuré. Cette vitalité de l'informel témoigne du dynamisme de la société civile dans les agglomérations urbaines en particulier. On peut noter une série d'innovations réellement productives constituant des réponses et des formes d'adaptation des populations à la conjoncture économique difficile.

A un niveau économique plus élevé, on trouve les opérateurs économiques se regroupant autour d'organisations patronales. Ils font face à l'abaissement des barrières douanières et à l'envahissement des marchés africains par des produits étrangers. En l'absence d'espace politique effectivement intégré sur le continent africain, ils essaient par diverses stratégies, de lutter contre les effets pervers de la mondialisation, en diversifiant par exemple les partenaires extérieurs.

En définitive, la construction et l'enracinement de la démocratie en Afrique exigent la création et l'affirmation d'un espace à la société civile. Une démocratie forte signifie un Etat capable de répondre à la demande de ses citoyens, des partis politiques, et d'une société civile puissante et organisée. Le dynamisme des organisations de défense des droits humains, la meilleure structuration des associations paysannes et féminines fondent les espoirs à placer en la société civile africaine quant au développement socio-économique du continent.

Elle doit aussi, être un gage de stabilité dans une Afrique confrontée simultanément à une crise économique très aigue et au défi de l'intégration politique. Dans le même registre, les médias devront servir d'appui à l'oeuvre gigantesque de développement et de réalisation de l'unité politique en Afrique.

Paragraphe 2 : Le rôle des médias dans le processus d'intégration en Afrique

Les médias sont un support de diffusion de l'information et des moyens de communication à très large échelle. Par l'influence qu'ils exercent sur l'opinion publique, les médias peuvent amener l'Etat ou des acteurs sociaux particuliers à reconsidérer leurs rapports avec leurs protagonistes, dans un sens plus conforme aux attentes des citoyens. La médiatisation des causes légitimes permet aux médias indépendants de jouer un rôle de « défenseur de la société ». Porte parole des sans- voix, des victimes et des personnes opprimées, ils offrent une tribune à ces derniers pour alerter l'opinion sur leur sort.

Ce rôle critique des médias s'observe à mesure que grandit le mécontentement populaire. En effet, l'insuffisance des mesures prises en réponse à la demande sociale, représente un terreau favorable à l'émergence d'une presse libre et critique. Les médias africains sont devenus ainsi des acteurs déterminants de la quotidienneté par leurs analyses axées sur les domaines perçus comme vitaux pour les groupes sociaux. Ils créent l'évènement et accompagnent le changement social en Afrique. Relais de la société, ils conditionnent l'évolution des attitudes et comportements des citoyens. Grâce à leur pouvoir d'influence sur les moeurs, les institutions et les lois, les médias peuvent jouer un rôle de conscientisation des masses.

S'agissant de l'intégration africaine, les médias y jouent un rôle capital à plus d'un titre. Car, comme le disait Me Abdoulaye WADE, « la sous-information des peuples africains constitue l'une des principales barrières qui les séparent de l'unité »54(*). Forts de ces constats, l'UA a fait de l'information un des axes prioritaires sur lesquels repose sa stratégie pour la réalisation de l'unité politique continentale. A ce titre, l'UA a initié en 2005 un projet de création d'une Chaine panafricaine de Radio et de Télévision.

Cette chaine, selon SEM Alpha Oumar Konaré, s'attellera

« A redresser la fausse image que le monde se fait de l'Afrique ; c'est-à-dire l'image d'un continent miné par la famine, les conflits, les maladies endémiques telles que le paludisme, les maladies du système immunitaire et bon nombre de crises qui sont évoquées toutes les fois qu'il est question de l'Afrique »55(*)

Ainsi, avec cette chaine les Africains seront maitres de leur destinée, et pourront dire non à toutes les crises.

Qu'à cela ne tienne, l'Afrique doit traduire ses rêves en réalités et le moment est venu pour le continent de passer de la parole à l'action et de s'atteler à changer la fausse image qui lui est attribuée. C'est en cela, que le projet de création d'une chaine panafricaine de radio et de télévision est salutaire. En effet, elle est porteuse d'espoir quant au développement et au rayonnement international du continent africain.

Elle présente de nombreux avantages pour les futures générations africaines, dans la mesure où elle sera la vitrine de l'Afrique de part le monde, et permettra de faire de l'Afrique un marché attrayant pour les investisseurs internationaux. Fort heureusement, ce projet a été entériné lors du Sommet de l'UA à Khartoum en Janvier 2006, et mandat a été donné aux experts en charge du dossier, d'accélérer la mise en place et le fonctionnement effectif de cette Chaine panafricaine de radio et de télévision.

Au plan politique, les médias jouent le rôle d'intermédiaires et d'arbitres en donnant la parole à tous les acteurs du système politique en général, et du jeu partisan en particulier. En démocratisant l'accès aux médias, publics surtout, chaque formation politique pourra exposer son programme et défendre son point de vue devant l'opinion. L'organisation à la radio et la télévision de débats contradictoires sur les sujets politiques de l'heure permet à l'électeur citoyen d'avoir une vision claire sur les choix et les orientations politiques des uns et des autres. En période électorale, les médias assurent la couverture de la campagne de tous les candidats. En dénonçant les fraudes, ils préviennent les contentieux post électoraux, qui sont le plus souvent source de violence et d'instabilité politiques en Afrique. Ainsi, accompagnant le processus électoral en amont et en aval, la presse veille à la régularité du scrutin et se prononce sur l'opportunité d'accepter ou de rejeter les résultats issus du vote.

Enfin, au plan culturel, le caractère multiethnique des sociétés africaines assigne aux médias un combat singulier à mener. Tout d'abord en utilisant toutes les langues parlées dans un pays, ils démocratisent l'accès à l'information. En sensibilisant les masses sur des thèmes majeurs du développement et de l'unité africaine, les médias facilitent la pénétration et l'acceptation des décisions politiques par les populations. En permettant à toutes les sensibilités de s'exprimer, ils promeuvent la compréhension mutuelle et l'intégration nationale par la réduction des frustrations. Ainsi, les médias renforcent le sentiment national dans les différents groupes socioculturels au détriment du sectarisme. De ce fait, ils réduisent les risquent de revendications irrédentistes ou sécessionnistes. Ce rôle de médiateur donne aux médias une place très importante dans la prévention des conflits en Afrique. Ce qui permettra la mise en place de conditions favorables à l'édification des Etats-Unis d'Afrique.

CHAPITRE VI S'unir ou Périr : les Etats-Unis d'Afrique comme ultime alternative pour le développement et le rayonnement international de l'Afrique

SECTION 1 : Les préalables politiques et économiques

Pour construire les Etats- unis d'Afrique de nombreux obstacles devraient être préalablement surmontés. L'obligation de compromis, qu'il a fallu trouver au moment de la création de l'UA entre partisans d'une unité politique continentale forte sous la forme des Etats-Unis d'Afrique, et ceux favorables à une forme souple d'union préservant la souveraineté et l'indépendance des Etats membres, a fait de celle- ci une institution qui constitue à bien des égards une négation du projet fédéral africain.

En effet, le rêve panafricain des Etats-Unis d'Afrique ne pourra être transformé en réalité par l'UA, que si des politiques adéquates orientées vers une intégration véritable étaient menées, et des structures supplémentaires à vocation fédérative, mises en place.

Dès lors, au plan politique d'abord, il conviendra d'élargir les compétences du parlement panafricain déjà fonctionnel, et par la suite, de mettre en place un gouvernement de l'Union qui aura en charge la coordination des politiques de développement à l'échelle continentale (paragraphe1). Au plan économique ensuite, il s'agira, à l'instar des Etats européens avec l'Union Européenne (UE) de doter l'Afrique d'une monnaie unique qui servira de fondement à l'élaboration de politiques économiques communes (paragraphe2).

Paragraphe 1 : L'élargissement des compétences du parlement panafricain et la création d'un gouvernement fédéral africain.

En lançant à Syrte en Septembre 1999, le projet de création d'une Union Africaine, les chefs d'Etats entendaient à travers cette initiative, impulser une nouvelle dynamique au processus d'intégration et d'unité du continent, amorcé depuis 1963 avec la création de l'OUA. La déclaration qui en fut issue et dénommée déclaration de Syrte, rappelait en substance que, pour relever les défis et faire face de manière efficace aux nouvelles réalités sociales, politiques et économiques en Afrique et dans le monde, les Chefs d'Etat étaient déterminés à répondre aux aspirations des peuples africains à une plus grande unité ; conformément aux objectifs énoncés dans la charte de l'OUA et le Traité instituant la CEA. C'est ainsi que fut mise en place l'UA après l'adoption en 2000 de sa charte constitutive (Acte constitutif).

En effet, l'Acte constitutif de l'UA a suscité de nouveaux espoirs de mise en place d'un cadre continental pour réaliser les aspirations communes des peuples africains. Il met un accent particulier sur la nécessité d'une vision commune pour l'Afrique et de partenariats effectifs entre les gouvernements et toutes les couches de la société.

Toutefois, une des plus grandes lacunes de l'Acte constitutif est qu'il se présente comme un cadre de coopération interafricaine, alors que l'UA a été conçue comme un cadre d'intégration devant aboutir à la création des Etats-Unis d'Afrique. Cette situation paradoxale est la résultante des divergences et de l'obligation de compromis qu'il a fallu trouver entre ceux qui voulaient la création immédiate des Etats-Unis d'Afrique et ceux qui y étaient opposés.

De toute évidence, l'UA s'est résolument engagée depuis quelques années dans la voie vers l'édification des Etats-Unis d'Afrique. En attestent, les réformes et transformations institutionnelles et structurelles engagées par celle-ci en vue de baliser la voie vers une unité politique continentale effective. Le lancement du parlement panafricain depuis 2004, ainsi que le projet de création d'un Gouvernement de l'Union qui sera d'ailleurs, qui a constitué l'unique point à l'ordre du jour du sommet de l'UA qui s'est tenu du 1er au 3 Juillet 2007 à Accra(Ghana) s'inscrivent dans cette dynamique.

Ainsi, face à l'impératif de construction des Etats-Unis d'Afrique, les organes politiques à savoir le parlement panafricain et le gouvernement de l'Union doivent être nécessairement fonctionnels à plein régime et le plus rapidement possible.

S'agissant du Parlement Panafricain, sa création a constitué une avancée majeure du continent dans la marche vers la réalisation de son unité politique. Cependant, ce dernier depuis son installation, ne fait office que d'un organe consultatif. Pour ce faire, il conviendra conformément aux dispositions du protocole portant sur sa création de la doter des pleins pouvoirs législatifs. En effet, celle-ci doit être une instance commune permettant aux peuples africains et à leurs organisations communautaires de participer davantage aux débats et à la prise de décisions concernant les problèmes et les défis auxquels le continent fait face. Le protocole stipule également que, « les membres du parlement sont choisis au sein des législatures nationales ou autres organes délibérants élus au suffrage universel dans les Etats membres »56(*). Au plan organique, chaque Etat a droit à cinq députés, dont une femme au moins. Ils exercent leur mandat en même temps que celui national. En sus, le parlement doit tenir au moins deux sessions par an.

Ceci étant, il convient par ailleurs de préciser que le parlement panafricain a un rôle vital à jouer dans le destin unitaire du continent africain. Le défi qu'il doit s'atteler à relever est celui d'être en mesure d'adopter des lois, de surveiller l'application par les Etats africains des normes convenues et d'intervenir de manière décisive pour défendre les droits de l'homme et la démocratie dans les Etats-membres.

En ce qui concerne le gouvernement de l'Union, il n'est pas encore créé, mais suscite déjà de nombreux espoirs pour la simple raison qu'il devra constituer l'organe central chargé de la coordination des politiques de l'Union dans les domaines diverses allant de la politique étrangère à l'énergie en passant par les infrastructures et l'agriculture, etc.

A cet effet, et consciente de l'impérieuse nécessité de doter l'Afrique d'un gouvernement fédéral afin de concrétiser l'idéal panafricain des Etats-Unis d'Afrique, la conférence des Chefs d'Etat de l'UA, au cours de sa quatrième session ordinaire en 2005 à Abuja, a pris une mesure majeure en mettant en place un Comité ad hoc de sept chefs d'Etat et Gouvernement, présidé par le président Yoweri Museveni de l'Ouganda. Ce comité avait pour mission d'examiner les propositions du Colonel Mouammar Kadhafi de la Libye visant à accélérer le processus d'intégration politique et économique du continent, notamment par la mise sur pied d'un gouvernement fédéral africain compétent dans les domaines tels que les infrastructures, les négociations internationales, les affaires étrangères, la défense etc. Ce comité a non seulement confirmé la proposition de création de postes ministériels, mais il a également réaffirmé que l'objectif ultime de l'UA est l'intégration politique et économique totale devant conduire le continent vers la réalisation des Etats-Unis d'Afrique.

Au sommet de Syrte en Juillet 2005, où fut présenté le rapport du comité, la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement a mis en place un second comité de sept Chefs d'Etat et de Gouvernement sous la présidence de Olesegun Obassanjo du Nigéria. Il avait pour mission d'élaborer une feuille de route en vue de la mise en place d'un gouvernement de l'Union Africaine. Ainsi, à l'initiative du président de ce nouveau comité, une conférence à base élargie a été organisée en Novembre 2005 à Abuja sur le thème suivant : « Bien-fondé d'un gouvernement de l'Union Africaine », avec en plus des membres du comité, la participation du monde universitaire, des représentants de la diaspora africaine, des représentants des Communautés Economiques Régionales(CER), et des membres de la société civile. La conférence a tiré les conclusions suivantes :

v Que la nécessité d'un gouvernement de l'Union ne fait plus aucun doute.

v Qu'il doit s'agir d'un Union des peuples africains et pas seulement une union des Etats et des Gouvernements.

v Que sa formation doit être fondée sur une approche multicouche et sur le principe « d'évolution graduelle ».

v Que le rôle des CER devrait être mis en exergue en tant que piliers du cadre continental.

Au regard des conclusions de cette conférence d'Abuja, le Comité a recommandé, et la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement l'a approuvé au cours du sommet de Khartoum (Soudan) en Janvier 2006, qu'un document cadre soit préparé, définissant l'objectif du Gouvernement de l'Union, les valeurs partagées qui la sous-tende, les étapes essentielles pour sa mise en place, y compris un projet de feuille de route à caractère indicatif.

C'est ainsi que, conscients de l'urgence qu'il y a à doter le continent d'un gouvernement qui sera chargé de traduire concrètement les objectifs d'unité politique et économique de l'Afrique, une étude intitulée, « Etude sur un Gouvernement de l'UA : Vers les Etats -Unis d'Afrique », a été réalisée et ses conclusions majeures ont été présentées par le président du Comité à Banjul en Juillet 2006, au cours de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement. Par la suite, et à la demande de ces derniers, l'étude a été examinée par le Conseil Exécutif lors de sa neuvième session extraordinaire de Novembre 2006, puis par la Conférence elle-même à sa huitième session ordinaire en Janvier 2007, toutes deux ayant été tenues à Addis Abéba. Et, étant donné la nature des propositions contenues dans l'étude et leurs implications aux niveaux national, régional, continental et international, la Conférence a décidé de s'y consacrer au cours de sa neuvième session prévue pour se tenir du 1er au 3 Juillet 2007 à Accra au Ghana.

A la veille de cette grande messe panafricaine où il sera question de la création de ce Gouvernement de l'Union tant souhaitable, il est nécessaire et utile de rappeler que l'ambition d'édification des Etats-Unis d'Afrique devrait impérativement s'appuyer sur un Gouvernement fédéral africain.

Certes, il existe de nombreuses voix qui s'élèvent contre ce projet, mais, force est de reconnaître qu'il est temps pour les Etats africains de passer à une autre phase dans le processus d'intégration qui n'a que trop longtemps duré. Il est temps en effet, de rompre avec cette attitude dont sont coutumiers les Chefs d'Etat africains, et qui consiste à énoncer des catalogues de bonnes intentions, des projets ambitieux et salutaires, mais qui ne sont jamais suivis d'application effective.

A cet effet, et en prélude à la Conférence sur le Gouvernement de l'Union, le guide libyen Mouammar Kadhafi a réuni à Tripoli les 20 et 21 Juin 2007, un forum des cadres africains pour apporter son soutien à la mise en place de ce gouvernement africain. A cette occasion, il a rappelé que « le temps, face à la mondialisation joue contre les africains ». En effet, le monde fonctionne aujourd'hui selon le système des grands ensembles, avec l'UE pour l'Europe, les Etats-Unis pour l'Amérique, la Chine le Japon et l'Inde pour l'Asie. Dès lors, on peut se demander, que peut l'Afrique qui malgré ses cinquante trois pays demeure une proie facile entre les mains de ces « Grands » ? Il est donc urgent et impératif, que l'Afrique se protège contre les velléités séparatistes et les divisions.

Sous ce rapport, il est recommandable que l'Afrique parle d'une seule voix sur les marchés financiers et dans les transactions commerciales et économiques avec les « grands pays ». Sur des questions telles que la réforme du Conseil de sécurité de l'ONU, le financement de son développement par le G8 par exemple, il est nécessaire que le continent ait un point de vue consensuel. Il est aussi souhaitable, qu'il lui soit possible d'assurer sa propre défense et sa sécurité. Tout cela, ne peut être réalisé qu'en mettant en place un gouvernement africain doté de moyens conséquents et de prérogatives bien déterminées.

A l'évidence, les Chefs d'Etat et de Gouvernement africains ont pris toute la mesure de l'importance cruciale de ce Gouvernement de l'Union en l'imposant comme unique thème à l'ordre du jour du sommet d'Accra. Malheureusement, ce sommet qui vient de s'achever, comme on pouvait s'y attendre, a consacré la division des Africains sur ce point. En effet, les Chefs d'Etat africains ne sont pas parvenus à adopter une position commune favorable à la création de ce gouvernement fédéral tant souhaité. Ce projet, est donc momentanément abandonné. Du reste, une commission d'experts a été constituée en vue de réfléchir et de faire des propositions concrètes sur la faisabilité de ce gouvernement fédéral africain. Leurs conclusions et recommandations seront soumises une nouvelle fois à discussion au cours prochain sommet de l'UA en Janvier 2008. Nous osons espérer que ce prochain sommet se soldera par un accord des Chefs d'Etats pour la mise en place de ce Gouvernement. Faute de quoi, l'ambition panafricaine d'édification dans un futur proche des Etats-Unis d'Afrique devrait être définitivement abandonnée.

Paragraphe 2 : L'élaboration de politiques économiques communes et la création d'une monnaie unique africaine.

La création d'une monnaie unique africaine comme levier de la croissance économique a toujours été au coeur des préoccupations des défenseurs et promoteurs de l'unité continentale.

Déjà, en adoptant à Abuja en Juin 1991, le Traité instituant la Communauté Economique Africaine, dont l'entrée en vigueur est intervenue en Mai 1994, les Etats africains, avaient réaffirmé leurs ambitions de construire un espace économique intégré, devant servir de base à une future union politique. L'objectif de la CEA était la mise en place au bout de 34 ans, c'est-à-dire en 2025, d'un Marché Commun Africain. A cet effet, le Traité a prévu la création d'institutions financières qui auront pour mission d'accompagner ce processus. Il s'agit, de la Banque Centrale Africaine, du Fonds Monétaire Africain et de la Banque Africaine d'Investissement. En intégrant dans ces objectifs ceux du Traité instituant cette CEA, l'UA a, du même coup fait sienne, le projet de création de ces institutions financières57(*) .

Pour Abdoulaye WADE, « si, la production de marché est le moteur de la croissance économique, la monnaie en est le levier »58(*). Il se trouve cependant que les pays africains n'ont pas à proprement parler, de système monétaire. Soit, parce qu'ils n'ont pas la maitrise de leur monnaie, soit parce que leur marge de manoeuvre est trop étroite.

En effet, l'une des principales causes du retard économique de l'Afrique en dépit de ses immenses potentialités minières, minéralières et hydrauliques, réside dans le fait, qu'après les indépendances, les Etats africains se sont exclusivement tournés vers l'extérieur pour financer leur développement. Par conséquent, la mise en place des institutions financières africaines devrait être accélérée en vue d'amorcer l'oeuvre d'auto financement du développement du continent, indispensable pour la construction des Etats-Unis d'Afrique.

Manifestement, la création d'une monnaie unique africaine est aujourd'hui un impératif pour la prospérité économique de l'Afrique. Car, pris individuellement, à l'exception d'une petite minorité, les Etats africains ne sont pas viables économiquement dans ce contexte de mondialisation tous azimuts.

En s'inspirant de l'expérience européenne, le moins que l'on puisse dire est qu'une monnaie unique africaine, en supprimant les obstacles de change, stimulera le commerce inter africain dans un environnement totalement intégré. Ce qui du même coup, dynamisera la croissance et la production. Pour preuve, les pays européens sinistrés, qui ne pouvaient pas être dans une situation pire, ont créé l'UE qui, grâce aux efforts conjoints des Etats membres, et à une ferme volonté politique de faire de l'Europe un espace compétitif et prospère sur le plan économique, sont parvenus à se doter d'une monnaie unique. Tel est, le défi lancé à l'UA et aux institutions financières africaines qui seront bientôt créées, afin de traduire concrètement le rêve de voir l'Afrique unie politiquement et prospère économiquement.

* 48 On peut légitimement se demander quel est l'apport substantiel effectif de la transformation de la « Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement » de l'OUA en une « Conférence de l'Union dont les mêmes chefs d'Etat et de gouvernement sont membres de droit. Une remarque identique vaut pour le « Conseil des ministres » qui devient le « Conseil Exécutif des ministres de l'Union ».

* 49 Voir article 14 de l'Acte Constitutif de l'Union Africaine. Annexe 1

* 50 www.africa-union.org, document EXT/EX/CL/2(III)

* 51www.africa-union.org, « Rapport du sous comité des contributions », présenté devant le comité exécutif à sa troisième session ordinaire, en Juillet 2003 à Maputo.

* 52 Thabo MBEKI, « Eloge de la rébellion », discours prononcé en Aout 1998 à Midrand en Afrique du Sud, alors qu'il était vice-président de l'Afrique du Sud, in Jeune Afrique, n°1970, 13-19 Octobre 1998, p26-27.

* 53 Penda MBOW « la société civile sénégalaise : identification et rôle dans le processus démocratique », in Revue Sénégalaise de sociologie, n°7et 8, 2002-2003, p.226.

* 54 Abdoulaye WADE, un destin pour l'Afrique, op.cit. p.128

* 55 www.africa-union.org, communiqué de presse n° 02/2005, Caire, Egypte du 21 novembre et portant sur la réunion des experts sur la création de la chaine panafricaine de radio et de télévision.

* 56 www.africa-union.org, voir protocole portant création du parlement panafricain

* 57 Cf. article 19 de l'Acte Constitutif de l'Union Africaine

* 58 A.WADE, un destin pour l'Afrique, op.cit p.74

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