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La gestion des ressources en eau dans le bassin conventionnel du Lac Tchad: état des lieux et perspectives

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par Mbodou Mbami ABDOULAYE
Université de Limoges - Master 2 en droit international de l'environnement 2006
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE LIMOGES

FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE LIMOGES

AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

LA GESTION DES RESSOURCES EN EAU DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL DU LAC TCHAD : ETAT DES LIEUX ET

PERSPECTIVES

Mémoire pour l'obtention du diplôme de Master 2 en droit international de l'environnement

Présenté par ABDOULAYE MBODOU MBAMI

Sous la direction de Frédéric BOUIN, maître de conférences

à l'Université de Perpignan, chercheur au CRIDEAU

Année Universitaire 2006/2007

SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

PARTIE I : LES DONNEES DE BASE DE LA GESTION DES RESSOURCES EN 4

EAU DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL DU LAC TCHAD 4

CHAPITRE I : LE CADRE JURIDIQUE ET SOCIO- ECONOMIQUE 6

SECTION I : LE CADRE JURIDIQUE 6

SECTION II : LE CADRE SOCIO-ECONOMIQUE 14

CHAPITRE II : LE REGIME JURIDIQUE DE LA PROTECTION DE 27

L'ENVIRONNEMEN DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL 27

DU LAC TCHAD 27

SECTION I : LA NECESSITE D'UNE PROTECTION ACCRUE DES 27

ECOSYSTEMES LACUSTRES 27

SECTION II: LA PROTECTION DES EAUX DU LAC TCHAD 35

PARTIE II : LES ACTIONS DE LA CBLT 42

CHAPITRE I : LES REALISATIONS DE LA CBLT 44

SECTION I : LES DIFFERENTS PROJETS REALISES 44

SECTION II : LE PROJET D'INVERSION DES TENDANCES A LA 48

DEGRADATION DES TERRES ET DES EAUX 48

DU BASSIN DU LAC TCHAD 48

CHAPITRE II : LES LIMITES D'ACTIONS DE LA CBLT 54

ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR 54

SECTION I : LES LIMITES D'ACTIONS DE LA CBLT 54

SECTION II : LES PERSPECTIVES ET LES SOLUTIONS POUR UNE GESTION 60

DURABLE DES EAUX DU LAC TCHAD 60

DEDICACE

A tous ceux et celles qui oeuvrent nuits et jours pour la protection et la sauvegarde des bassins fluviaux.

REMERCIEMENTS

Je tiens très sincèrement à exprimer ma profonde reconnaissance à tous ceux qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de ce travail.

Ma gratitude va particulièrement vers :

Le Pr. Frédéric Bouin sans lequel la réalisation de ce travail n'aura pas été possible ;

Aux responsables et enseignants du Master DICE qui nous ont permis de parfaire notre formation ;

Au personnel de département de la documentation de la CBLT pour leur permanente disponibilité.

ABREVIATIONS ET SIGLES

ADT : Analyse Diagnostique Transfrontalière.

ADESOL : Association pour le Développement Economique et Social du Lac.

AUF : Agence Universitaire de la Francophonie.

BAD : Banque Africaine de Développement.

CBLT : Commission du Bassin du Lac Tchad.

CEE : Communauté Economique Européenne.

CEEAC : Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale.

CIJ : Cour International de la Justice.

CITES : Convention sur le Commerce International des Espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction.

DIE : Droit International de l'Environnement.

FAC : Fonds d'Aide et de Coopération.

FAO : Organisation Mondiale pour l'Agriculture et l'Alimentation.

FEM : Fonds pour l'Environnement Mondial.

IEC : Information Education et Communication.

OMVS : Organisation de Mise en Valeur du Fleuve Sénégal.

ONG : Organisation Non Gouvernementale.

ONU : Organisation des Nations Unies.

OSSNU : Office Soudano Sahélien des Nations Unies.

PAS : Plan d'Action Stratégique.

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement.

PNUE : Programme des Nations Unies pour l'Environnement.

RCA : République Centrafricaine.

SODELAC : Société de Développement du Lac.

UA : Union Africaine.

UE : Union Européenne.

UDEAC : Union Douanière et Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

UICN : Union Internationale pour la Conservation de la nature.

UNESCO : Organisation des Nations pour l'Education, la Science et la Culture.

UREF : Université des réseaux d'expression Française.

INTRODUCTION

Le Lac Tchad ou « Tshad »1(*), jadis appelé la mer paléotchadienne, est l'un des plus grands lac d'Afrique. C'est un lac peu profond dont les eaux sont douces; ce qui est d'ailleurs rare pour un lac endoréique.

Son bassin hydrographique ou géographique, d'une superficie de 2.381.636 Km2 est partagé entre l'Algérie, la Libye, le Cameroun, le Nigeria, le Niger, la République Centrafricaine (RCA), le Soudan, et le Tchad.

Le bassin conventionnel dit bassin actif est la zone de juridiction de la commission du bassin du Lac Tchad. Il occupe le 1/6 du bassin géographique et constitue une ressource d'eau partagée par le Cameroun, le Nigeria, le Niger, le Tchad, la République Centrafricaine et le Soudan. Avec l'adhésion respective de ces deux derniers pays en 1994 et en 2000, le bassin conventionnel couvre aujourd'hui plus de 966.955 Km2 pour une population estimée à environ 30.000.000 d'habitants. L'approvisionnement en eau dépend principalement de l'hydrosystème Chari/Logone qui fournit environ 95%, de l'El-beid (3%) et du fleuve Komadougou-yobé (1%).

Le lac Tchad, berceau de merveilles et de curiosités, a été traversé par plusieurs explorateurs pour tenter de le découvrir vers le 19e siècle. C'est ainsi que l'explorateur Anglais Denham découvrit pour la première fois le lac Tchad le 04 février 1823 et donna les impressions suivantes : « Nous découvrîmes plus loin, à moins d'un mille du lieu où nous étions, le grand lac réfléchissant les rayons du soleil. La vue de cet objet si intéressant pour nous, produisit en moi une satisfaction et une émotion dont aucune expression ne serait assez énergique pour rendre la force et la vivacité »2(*).

L'oeuvre de la découverte du lac entamée par Denham fut parachevée par le Dr Gustav Nachtigal, Vogel et des conquérants français, à savoir le lieutenant colonel Monteil, Emile Gentil, etc. Les différents explorateurs et conquérants qui ont eu à parcourir cette vaste étendue d'eau ont tous démontré l'importance économique, écologique et culturelle jouée par ce Lac.

Juste après les indépendances des années 1960 et surtout avec la prise de conscience des problèmes relatifs à la dégradation de l'environnement en général et à la gestion des eaux des bassins fluviaux en particulier, les Etats riverains du lac Tchad ont engagé une série de concertation et de réflexion pour la mise sur pied d'une institution en charge de la gestion durable des eaux du lac Tchad.

Eu égard à l'importance indéniable que joue le lac Tchad dans le domaine écologique, économique et social, les Etats riverains ont décidé de la création de la commission du Bassin du lac Tchad (CBLT). Cette convention, signée à Fort-Lamy (N'Djaména) le 22 Mai 1964 par Le Cameroun, le Nigeria, le Niger et le Tchad, se fixe comme objectif « l'exploitation par tous les Etats membres de la zone conventionnelle dans le respect des droits souverains de chacun d'entre eux, en particulier l'utilisation des eaux superficielles et souterraines du bassin ainsi délimité pour des raisons de commodité et d'efficacité, pour les besoins de développement domestique, industriel, agricole et la collecte des produits de la faune et de la flore ».

A l'instar des autres régions et des bassins versants, «  les grands problèmes actuels de l'environnement, à savoir eau, climat, biodiversité, déséquilibre économique »3(*) se posent également au niveau du lac Tchad. C'est pourquoi, la CBLT a dû adopter d'autres accords pour compléter la convention de Fort -Lamy afin de prendre en compte certains problèmes spécifiques et nouveaux qui affectent la région du lac Tchad. Il s'agit notamment de l'accord de Moundou (Tchad) signé le 21 août 1970 entre le Cameroun et le Tchad relatif au prélèvement d'eau dans le Logone aux fins agricoles et de l'accord d'Enugu, au Nigeria, portant réglementation commune sur la faune et la flore du 03 décembre 1977.

Malgré cette prise de conscience et l'intérêt que les Etats riverains avaient accordé à la gestion commune et concertée du lac- car la CBLT est l'une des plus anciennes organisations africaines- la dégradation accélérée de l'écosystème du bassin conventionnel continue et demeure inquiétante.

Comme l'affirme le Pr. Maurice Kamto, « l'eau est, avec l'air, l'un des éléments abiotiques de la biosphère sans lesquels toute vie est impossible »4(*). Cette nécessité impérieuse de l'eau fait d'elle aujourd'hui l'un des biens les plus précieux et les plus disputés de la planète.

Selon le rapport du fonds mondial de la nature (WWF) de 2006, « plus d'un milliard d'êtres humains n'ont pas accès à l'eau douce »5(*). Pire encore, les zones humides, les cours d'eau et les lacs qui sont nos réserves d'eau douce, source de vie, sont en train de disparaître.

Cette triste réalité qui se pose au niveau mondial se pose également au niveau du lac Tchad, car la pluviométrie irrégulière, la pression démographique et économique, l'exploitation abusive et irrationnelle des ressources en eau en particulier et des ressources naturelles en général sont sources de graves d'atteintes à l'écosystème de cette région.

Le lac Tchad qui comptait en 1964 plus de 25.000 Km2 se retrouve aujourd'hui avec moins de 2.000 Km2. Selon les scientifiques les plus avertis de la planète, si rien n'est fait, le Lac Tchad pourra disparaître d'ici à vingt ans. Et si on arrivait à cela, on parlera de l'une des catastrophes la plus désastreuse du 21ème siècle. Il y a alors lieu de se poser la question sur l'éventuelle disparition de cette surface. Qu'adviendra-t-il si le lac Tchad arrivait à disparaître ? Quelles seront les conséquences? Existe-t-il des moyens pour sauver cet écosystème ? Existe-t- il des règles bien définies par la CBLT pour une gestion durable des eaux du lac Tchad ?

Pour nous permettre de répondre à ces questions, il nous paraît nécessaire de dégager d'abord les éléments de base de la gestion des ressources en eau du bassin conventionnel du Lac Tchad (Partie I) avant d'analyser les différentes actions qui sont menées par la commission du bassin du Lac Tchad (Partie II).

PARTIE I : LES DONNEES DE BASE DE LA GESTION DES RESSOURCES EN

EAU DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL DU LAC TCHAD

Couvrant une superficie de 966.955 Km², le bassin conventionnel du Lac Tchad qui regroupe le Cameroun, le Niger, Le Nigeria, La République Centrafricaine, le Soudan et le Tchad est un véritable centre d'échanges inter communautaires et un exemple symptomatique de coopération sous-régionale.

L'intérêt qu'a été accordé à cette région juste au lendemain des indépendances démontre à suffisance la prise de conscience des hommes politiques de la sous région qui ont mis tout en oeuvre pour la création de la commission du bassin du lac Tchad (CBLT) en 1964.

L'étude du cadre juridique et socio-économique (chapitre I) nous permettra de faire une analyse du régime juridique de la protection de l'environnement dans le bassin conventionnel du Lac Tchad (chapitre II).

CHAPITRE I : LE CADRE JURIDIQUE ET SOCIO- ECONOMIQUE

Il existe à nos jours plus de deux cent soixante et un bassins fluviaux dans le monde dont une soixantaine sont en Afrique. Le bassin du Lac Tchad est donc l'un des plus grands bassins d'Afrique qui regroupe plusieurs pays d'où l'intérêt d'un cadre juridique et institutionnel (Section 1) pour l'établissement des règles régissant les rapports entre les Etats relatives à la gestion des ressources communes d'une part et à la création des structures et des organes afin d'assurer la pérennité et la coordination des actions dans le bassin conventionnel d'autre part.

En outre, la position de la région du Lac Tchad a fait de ce bassin un centre du développement économique, du commerce et d'échanges culturels (Section 2).

SECTION I : LE CADRE JURIDIQUE

L'eau, source de vie, n'a jamais respecté les frontières politiques tracées par l'homme.6(*) Cette caractéristique de l'eau permet de définir les cours d'eau internationaux comme étant un cours d'eau qui traverse deux ou plusieurs pays et qui est navigable. Il s'agit donc d'un cours d'eau servant de frontière entre deux ou plusieurs Etats et offrant des avantages économiques dont la mise en valeur par l'un des riverains pourrait toucher les intérêts des autres riverains7(*).

Par sa caractéristique, le partage des eaux est une source de coopération, mais il peut également être une source de conflit. C'est pourquoi, les Etats riverains ont adopté en 1964 une convention créant la CBLT (paragraphe 1), laquelle convention qui prévoit des organes pour assurer le suivi d'une gestion rationnelle des ressources naturelles dans le bassin du Lac Tchad (paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : LA CONVENTION DE 1964

Au lendemain des indépendances des pays Africains en 1960, les quatre pays riverains du Lac Tchad, à savoir le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad ont pris conscience de l'intérêt de la protection des écosystèmes de cet espace commun. C'est dans cette optique qu'a été adoptée à N'djamena, au Tchad, le 22 mai 1964 la convention créant la Commission du Bassin du Lac Tchad. Cette convention qui s'est fixée plusieurs objectifs (A) a connu des évolutions (B).

A- LES OBJECTIFS DE LA CONVENTION DE 1964

Bien que le statut de la CBLT aborde brièvement la question de la pêche, les objectifs de la convention de 1964 étaient beaucoup plus politiques, voire sécuritaires qu'environnementaux. Les principaux problèmes écologiques ont été oubliés ou négligés, car les chefs d'Etats des pays riverains qui viennent tout juste d'obtenir leurs indépendances étaient beaucoup plus galvanisés à déterminer les lignes de démarcation entre eux « afin d'éviter toute appropriation de fait des eaux frontalières par une utilisation abusive de la part d'un Etat et prévenir les conflits éventuels »8(*).  Il s'agit de mettre en exergue le caractère frontalier du bassin conventionnel conformément à la souveraineté des Etats membres. Ainsi, la commission du bassin du lac Tchad a eu pour fonction de :

- Planifier le développement général du bassin, y compris les activités et projets prévus par les Etats membres ;

- Faire une proposition de réglementation uniforme à l'adoption des Etats membres en vue de préserver et de mettre en valeur les ressources du Lac et de son bassin, notamment en ce qui concerne l'utilisation des eaux de surface et du sous-sol pour la consommation humaine et animale, la pêche et la navigation, l'agriculture, les forets et le transport des marchandises ;

- arbitrer les différends entre Etats membres (concernant l'utilisation des ressources du bassin). La CBLT est chargée de recevoir des plaintes, contribuer au règlement des différends9(*) ;

- Veuillez à l'application de la constitution de la commission (convention et statuts).

-Assurer l'application des règlements (police et sanction).

Jusqu'à une date récente, la commission fonctionne avec très peu de moyens financiers, matériels et humains alors que « ces larges pouvoirs de réglementation, de planification, de conseil et d'arbitrage font appel à certains pouvoirs de décision et de sanction en vue d'assurer l'application de règlement  »10(*).

Pour donner à la CBLT tous les moyens nécessaires d'accomplir sa mission, les Etats membres ont décidé de la révision de la convention de 1964 afin de l'adapter aux exigences de l'heure.

B- L'EVOLUTION DE LA CONVENTION DE 1964

Généralement, il n'y a aucune institution ou norme juridique statique. Les institutions évoluent et s'adaptent aux circonstances nouvelles. C'est dans ce sens que les Etats riverains du Lac Tchad ont dû réviser en 1990 les documents de base (convention, statuts et règlement ) pour prendre en compte certaines réalités environnementales qui ont été perdues de vue lors de la rédaction de la convention en 1964. D'ailleurs, cette révision est prévue par la convention elle-même qui dispose en son article 7 que « la convention et le statut ci-annexé pourront être révisés sur la demande de deux au moins des Etats membres, adressé par écrit au secrétariat exécutif de la commission ».

Outre la convention proprement dite qui est constituée de huit articles traitant de procédure de ratification, de la possibilité de dénonciation de la convention après l'expiration d'un délai de dix ans, de règlement des différends relatifs à l'interprétation et à l'application de ladite convention et de sa révision, C'est le statut, partie intégrante de la convention qui forment la substance de celle-ci.

En effet, cette volonté de gestion commune des eaux du Lac Tchad est remarquable à travers l'article 1 du statut qui dispose que « les Etats membres affirment solennellement leur volonté d'intensifier leur coopération et leurs efforts pour la mise en valeur du bassin du Lac Tchad ».

Conformément au principe de l'exploitation par tous les Etats membres et ce, dans le respect des droits souverains de chacun d'entre eux, la prise de conscience de responsabilité à cet effet a été déterminante pour la coopération sous-régionale dans cet espace. Ceci est d'autant plus vrai encore lorsqu'il s'agit en particulier de l'utilisation des eaux superficielles et souterraines dont la commission entend donner une notion plus large en se referant notamment au besoin du développement domestique, industriel et agricole, et à la collecte des produits de sa faune et de sa flore11(*).

Concernant la faune et la flore et conformément à la volonté commune des dirigeants de la sous région de protéger les espèces qui sont menacées de disparition, il a été adopté le 3 décembre 1977 à Enugu, au Nigeria, un accord portant réglementation commune sur la faune et la flore.

Cet accord adopté par les quatre pays membres de la CBLT rentre dans le sillage de la convention de 1964. Il a pour objectif de promouvoir les mesures de conservation des ressources naturelles renouvelables des Etats membres du bassin et ce, par une gestion saine et rationnelle de la faune et de la flore.

L'accord de 1977 met plusieurs obligations à la charge des Etats membres. Il s'agit notamment de l'article 1 qui dispose que « les parties doivent établir une liste d'espèces protégées de la faune terrestre sur la base de l'annexe correspondante de la convention d'Alger de 1968 ». De même, l'article 3 interdit la chasse aux reptiles listés dans l'accord et ayant une taille inférieure aux mesures indiquées.

L'Accord fait également obligation aux états parties d'élaborer de mesures nationales permettant de réprimer les délits de chasse, en particulier le braconnage12(*). Les articles 7 et 10 se rapportent respectivement à l'interdiction de l'exploitation de la faune aquatique, de certaines méthodes de pêche et à la réglementation de l'importation et de l'exportation des poissons vivants, de leurs oeufs et d'autres espèces aquatiques.

Outre les deux dispositifs juridiques (convention de 1964 et accord de 1977) régissant la CBLT, le Tchad et le Cameroun ont signé à Moundou, au Tchad, le 21 Août 1970 un accord pour fixer le niveau de prélèvement de l'eau du Logone pour les aménagements hydroagricoles des deux parties. Cet accord rentre également dans la droite ligne d'une gestion écologiquement rationnelle des eaux du Lac Tchad.

Pour pérenniser les acquis de la CBLT, les chefs d'Etats des pays riverains ont mis en place des organes et des structures.

PARAGRAPHE 2 : LES ORGANES DE LA CBLT

Il y a d'une part les organes d'orientation et de décision (A) et d'autre part les organes d'exécution (B).

A- LA CONFERENCE DES CHEFS D'ETAT

La conférence des chefs d'Etat et de gouvernement est un organe d'orientation et de décision, mais force est de constater que la convention de 1964 est restée presque muette sur cette structure qui joue pourtant un rôle fondamental dans les organisations de ce genre. Seul l'alinéa 1 de l'article 12 dispose que « la commission proposera, à la majorité des chefs d'Etat qui nommeront, un secrétaire exécutif parmi les candidats proposés des Etats membres ».

A s'en tenir à cet article, la commission n'a eu que pour seule compétence la nomination du secrétaire exécutif alors qu'en Afrique en général « la vitalité des institutions dépend plus du rôle des chefs d'Etat et de gouvernement que des compétences reconnues aux organes communs quelques soit leurs importances»13(*).

Il est donc paradoxal que les chefs d'Etat n'ont pas voulu s'arroser des compétences exorbitantes alors que la commission n'a pas reçu une souveraineté sur le bassin conventionnel, car chaque Etat détenait la souveraineté sur sa portion dans le bassin. Même l'article 8 qui consacre la suprématie du sommet des Chefs d'Etats reste lacunaire.

L'essentiel des attributions des Chefs d'Etat s'est forgé dans la pratique et dans le temps. Sur cet aspect, le passage en revue de quelques sommets des Chefs d'Etat montre à suffisance l'importance desdits sommets pour la continuité des actions de la CBLT.

A cause des troubles politiques dans certains pays membres entre 1964 et 1971, le premier sommet des Chefs d'Etat n'a pu se tenir qu'en 1972. Ce sommet qui s'est déroulé à N'Djaména du 5 au 6 juillet 1972 a « défini les conditions matérielles de la mise en valeur du bassin tchadien14(*).

Au deuxième sommet, tenu à Yaoundé du 3 au 4 décembre 1973, les Chefs d'Etat ont décidé de déclarer la zone du bassin touchée par la sécheresse comme zone sinistrée. De même, il a été adopté l'accord sur la libre circulation des pêcheurs sur le Lac Tchad.

Il a fallu attendre encore quatre ans pour pouvoir tenir le troisième sommet du 1er au 3 décembre 1977 pour l'adoption de l'accord sur la réglementation commune de la faune et de la flore.

C'est respectivement au huitième sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement tenu à Abuja, en mai 1994 et au deuxième sommet tenu à N'Djamena, en juillet 2000, qu'a été approuvée l'adhésion de la République Centrafricaine et celle du soudan à la CBLT.

La conférence des Chefs d'Etat et du gouvernement est donc un organe décisif pour la survie de la CBLT, car il est un centre de coopération, des décisions politiques et de volonté commune des Chefs d'Etat pour la gestion concertée des eaux du Lac Tchad. L'importance de ces conférences a été confirmée lors du huitième sommet d'Abuja, car les Chefs d'Etat ont décidé de tenir les sommets tous les ans, contrairement aux pratiques actuelles où aucun rythme n'est respecté pour l'organisation de ces sommets bien que depuis la révision de la convention en 1990, il est prévu que le sommet se réunit une fois tous les deux ans.

B- LE SECRETARIAT EXECUTIF DE LA COMMISSION ET LES

ORGANES TECHNIQUES

La convention de 1964 dispose en son article 1 qu' « il est créé par la présente convention une commission du bassin du lac Tchad, ci-après appelée la Commission ».

La Commission qui gère le bassin conventionnel est composée de huit commissaires, à raison de deux par Etat membre. Mais après l'admission de la RCA, comme cinquième Etat membre, les commissaires sont aujourd'hui au nombre de neuf. La RCA n'avait eu droit actuellement qu'à un seul commissaire. Malgré le fait que la convention de 1964 n'ait pas été explicite sur la qualité des commissaires, dans la pratique, les commissaires sont généralement des membres du gouvernement des Etats membres. Certains pays comme le Niger se faisait représenter par les autorités administratives du département faisant frontière avec le Lac Tchad.

Comme nous l'avons indiqué plus haut, la commission est donc l'organe central qui a pour attribution entre autres, de maintenir la liaison entre les hautes parties contractantes en vue de l'utilisation la plus efficace des eaux du bassin, d'élaborer des règlements relatifs à la navigation, d'établir des règlements relatifs à son personnel et de veiller à leur application15(*).

La commission se réunit une fois par an, soit à son siège à N'djamena, ou en tout autre lieu qui lui paraîtra convenable (article 8 de la convention). La présidence de la commission est assurée à tour de rôle suivant l'ordre alphabétique des Etats membres.

Pour assurer et suivre l'exécution des décisions prises par les chefs d'Etats, lors des sommets des chefs d'Etat membres et les décisions prises par les commissaires lors des sessions annuelles, la convention a prévu un Secrétariat Exécutif. A ce titre, l'article 12 de la convention de 1964 définit le mode de nomination du secrétaire exécutif, qui sera nommé, à la majorité, par les chefs d'Etat, parmi les candidats proposés par les Etats membres. Le Secrétaire Exécutif est assisté d'un Secrétaire Exécutif adjoint nommé dans les mêmes conditions.

A la lumière de cet article, chaque Etat membre a le droit de proposer un candidat pour le poste de Secrétaire Exécutif, mais en réalité, le poste du Secrétaire Exécutif a toujours été occupé par un Nigérian, tandis que celui de l'Adjoint par un Camerounais.

Selon l'article 11 du règlement intérieur, les tâches du Secrétaire Exécutif sont les suivants :

- Préparer et organiser les réunions de la commission;

- entretenir la correspondance courante avec les délégations de chaque Etat membre et éventuellement avec le département ministériel ou l'organisme qui aura été désigné dans chaque Etat membre comme correspondant habituel du Secrétariat de la commission;

- informer les Etats membres et les organisations internationales ou étrangères intéressés des résultats des travaux en cours, ainsi que de l'opinion exprimée par les gouvernements des Etats membres ;

- assurer la garde des documents dans les archives de la commission ;

- tenir la comptabilité générale de la commission ;

- d'une façon générale, accomplir tous autres travaux dont la commission peut avoir besoin.

Le secrétariat exécutif, qui est un véritable organe de coordination et d'exécution, est en même temps le représentant légal de la CBLT. A ce titre, « le statut d'organisation internationale dont est doté la commission »16(*) permet au Secrétariat Exécutif d'entretenir des relations avec d'autres institutions internationales et des bailleurs de fonds dans le cadre de la mise en valeur du bassin conventionnel.

A coté du secrétariat exécutif qui est assisté d'un département administratif et financier et un département de la documentation, il y a des organes techniques qui remplissent des fonctions d'une importance capitale dans des domaines précis. Il s'agit entre autres de la division de l'Agriculture, de la division de pêche et foret, de la division des ressources en eau, de la division du génie civil et des télécommunications.

Après la reforme des institutions de la CBLT en 1989, la plupart de ces divisions techniques ont été transférées aux Etats membres pour éviter un double emploi et pour minimiser les coûts de fonctionnement de la CBLT.

Actuellement, les organes techniques de la CBLT sont le département de la planification et le département des ressources en eau et de l'environnement.

SECTION II : LE CADRE SOCIO-ECONOMIQUE

Comme dans la plupart des organisations, dans l'espace commun du lac Tchad, « chaque société s'organise en vue d'assurer d'une part la production des biens qui sont nécessaires à la vie des hommes et d'autre part, sa reproduction ». Cette société ainsi organisée a donné17(*) naissance naturellement à des structures socio-économiques.

Ainsi, le bassin conventionnel du Lac Tchad a réuni un ensemble hétérogène dans lequel cohabitent des personnes de différentes nationalités formant une même entité. Dans cette entité, la diversité des activités économiques (paragraphe 2) traduit la spécificité de cette société (paragraphe 1).

PARAGRAPHE 1 : L'ORGANISATION SOCIALE

La population (A) du lac Tchad est une population cosmopolite avec des pratiques (A) qui reflètent la diversité culturelle de cette région.

A-LA POPULATION

Le bassin conventionnel compte une population estimée à plus de trente millions d'habitants. Comme nous l'avons indiqué plus haut, il s'agit d'un bassin partagé entre le Cameroun, le Niger, le Nigeria, et le Tchad qui sont les quatre pays fondateurs de la CBLT. Avec l'adhésion de la RCA en 1994 et du Soudan en 2000, le bassin conventionnel a connu une extension.

De sa superficie initiale de 432.650 Km², le bassin conventionnel couvre du coup plus de 966.955 Km². Dans cette contrée, diverses ethnies s'y côtoient. Les communautés Boudouma, Kanouri, Haoussa, Foulbé, Arabes et Kotoko sont majoritaires.

En plus des populations des pays riverains, il y a également des ressortissants d'autres Etats Africains qui viennent au lac Tchad pour exercer principalement des activités relatives à la pêche. Nous pouvons citer à titre d'exemple des maliens, des guinéens, des sénégalais et des ghanéens.

En effet, à y regarder de près, l'organisation de l'espace autour du Lac Tchad repose sur des rapports inter-éthniques qui se sont forgés. L'essentiel de cette population cosmopolite est regroupée autour des villages de Foudna, Kinassarom, Koulfoua, Tchongolet et Banangoréa qui font tous partie du canton Bol, au Tchad. Cette partie du Lac forme toujours les eaux libres où la pêche demeure encore possible toute l'année. Dans la partie Nigérienne (région de Diffa), l'eau s'était pratiquement retirée et la majorité des pêcheurs se sont déversés dans la partie tchadienne. D'autres ont même dû abandonner cette activité et se sont reconvertis en agriculteurs ou éleveurs.

Cette cohabitation des populations de différentes couches a fait qu'aujourd'hui une grande partie des habitants vivant dans ce milieu parlent la même langue. C'est le cas notamment du Kanembou ou du Haoussa qui sont devenus des véritables langues d'échanges commerciaux et d'affaires dans le Lac Tchad profond.

A force donc de vivre ensemble, cette diversité linguistique a fini par former une véritable entité. Cependant, dans la pratique des us et coutumes, l'on peut noter des différences de nature.

B- LES PRATIQUES COUTUMIERES

Les coutumes dans la région du lac Tchad sont très diversifiées à cause du cosmopolitisme de cette région. Ainsi, les pratiques différent largement lorsqu'on essaie de comparer le mode de vie menée par les ressortissants des pays comme le Tchad, le Sénégal, la guinée, etc. Mais par contre, cette différence s'estompe lorsqu'on compare les coutumes entre les Boudoumas du Niger et ceux du Tchad ou encore entre ceux-ci et les Kanouri ou les Kanembous.

Cette analyse sera essentiellement axée autour des pratiques au sein de la famille, l'accouchement, le mariage, les tatouages, le divorce, la mort et les sépultures.

La famille : la famille est considérée comme la cellule sociale. La notion de la famille au lac diffère de celle de la famille en occident qui est constituée du mari, de l'épouse et de leurs enfants. En Afrique en général et dans la région du lac en particulier la notion de la famille a un contenu beaucoup plus large. Il s'agit notamment du mari, des épouses, des enfants, des frères et soeurs, des oncles, des tantes, bref de tous ceux qui vivent ensemble dans une concession, voire dans un village. C'est la notion de la famille comme étant une communauté villageoise.

Dans cette famille, l'autorité est exercée par un chef de famille qui est généralement le plus âgé (au niveau restreint), par un chef de village (au niveau du village) ou par le chef de canton (au niveau cantonal). Les décisions sont prises, après conseils des sages, par le chef de famille, le chef de village ou le chef de canton selon les différents cas de figure. La nourriture et l'habillement sont aussi à la charge de ceux-ci.

C'est pourquoi, au lac, on se rendra compte que dans une concession, plus de quarante personnes peuvent s'asseoir ensemble sur une natte pour le repas. C'est la notion de la solidarité qui gouverne cette communauté.

La naissance : la naissance chez les Boudoumas, les Kanouri ou Kanembous est un événement important. En effet, comme partout au monde, la grossesse des femmes lacustres dure neuf mois et dix jours à compter de l'arrêt des leurs règles, car c'est la seule référence pour cette communauté de comptabiliser le nombre des mois et s'apprêter a célébrer la naissance du nouveau venu qui est attendu comme un messie.

A défaut de centre de santé et des hôpitaux, ce sont les matrones (sages-femmes) qui apportent assistance aux femmes lors de l'accouchement. Tout se passe de manière traditionnelle et sans aucune assistance médicale. Le nouveau né est accueilli dans une condition d'insalubrité totale, car la mère accouche sur un sable aménagé pour la circonstance dans un coin de la maison. Une fois accouchée, la parturiente reste couchée pendant que la matrone s'occupe du nouveau né en coupant le cordon ombilical à l'aide d'un petit canif.

Ainsi, lorsqu'il s'agit d'un garçon, le cordon et le placenta sont immédiatement enterrés à droite de la porte de la maison où ont lieu les opérations, tandis que si le nouveau-né est de sexe féminin, le placenta et le cordon sont enterrés à gauche.

Une fois cette phase difficile terminée, place est laissée maintenant à la fête qui dure généralement sept jours, car le baptême est organisé au septième jour de la naissance.

Durant toute cette période, parents et amis de la femme ou du mari défilent au domicile du couple pour souhaiter la bienvenue au nouveau-né, apporter des cadeaux à la mère et au nouveau-né.

Au sixième jour, toutes les femmes du quartier, les parents et les connaissances viennent veiller au lieu de la cérémonie pour la préparation. le septième jour, à six heures du matin, les invités viennent de tous les coins du village pour la cérémonie. C'est un jour décisif, car c'est le moment où les marabouts viennent attribuer un nom au nouveau-né et récitent plusieurs versets du Coran pour lui souhaiter longue vie et bon séjour. Après une réjouissance populaire (tam-tam et danse folklorique), chacun repart chez lui et le couple retrouve sa vie normale.

L'autre événement majeur chez les Boudoumas, Kanembous, ou les Kanouris dans la région du lac Tchad est certes le mariage.

En effet, dans cette communauté, le mariage est un acte capital car il est non seulement l'union entre un homme et une femme, mais l'union entre deux familles, voire deux communautés. Le jeune marié ne choisit donc pas son épouse18(*). C'est pourquoi, le choix du premier mariage est toujours opéré par les parents. Il revient ainsi a ceux-ci de demander la main d'une fille et de payer la dot lorsque l'autre famille agrée la demande.

Le consentement des futurs mariés est presque inexistant. Généralement, le premier contact entre la jeune fille et son mari ne se réalise qu'au jour de la nuit nuptiale qui intervient deux jours après la célébration populaire du mariage (l'arrivée de la femme au domicile du mari). La célébration religieuse a lieu quelques jours ou mois avant la célébration populaire. C'est cette célébration religieuse qui forme le contrat de mariage par une « fatiha », C'est-à-dire la lecture des versets coraniques par le marabout après avoir publiquement constaté le versement de la dot.

Après le premier mariage, l'homme a acquis une certaine maturité et le choix des autres épouses lui incombe, car il s'agit d'une communauté où la polygamie fait partie de la vie quotidienne. Cet état des choses est souvent à l'origine des conflits au sein des couples qui se termine par des divorces. Le divorce est généralement prononcé par le mari pour mauvais comportement de la femme dans le foyer ou pour adultère. Comme le fait remarquer le Dr Robert Bouillé, « le droit de répudiation n'appartient qu'au mari »19(*). Outre ce droit de répudiation reconnu au mari, la femme serait amenée à rembourser la dot si le divorce est prononcé à son tort exclusif. Le jugement a lieu soit devant le chef de canton, le chef du village ou le président du comité islamique.

PARAGRAPHE 2 : L'ORGANISATION ECONOMIQUE

Le bassin conventionnel du lac Tchad est indéniablement une zone d'échanges et de développement économique. Outre l'agriculture, l'élevage et la pêche (A) qui sont des activités prédominantes dans la région du lac Tchad, le commerce s'avère également important dans certaines localités (B).

A- L'AGRICULTURE, L'ELEVAGE ET LA PECHE

Dans cet espace, l'agriculture est sans doute l'activité principale suivie de l'élevage et de la pêche. La population du Lac Tchad pratique pour plus de la moitié des activités agricoles. Depuis que le Lac Tchad a commencé à se retirer, la majorité des pécheurs se sont reconvertis à l'agriculture.

La superficie des terres cultivées du bassin est estimée à plus de 2.800.000 hectares20(*) dont la plus grande partie se trouve au Niger avec 2.010.000 hectares. Le Nigeria arrive en deuxième position avec 560.000 hectares. Le Tchad et le Cameroun ont respectivement 125.000 et 44.500 hectares des terres cultivées. Actuellement, avec l'assèchement d'une grande partie des eaux du lac, les superficies cultivables ont connu une extension et elles sont aujourd'hui estimées par la CBLT à plus de 7.000.000 d'hectares.

Dans la région du Lac Tchad, on y trouve trois types d'agriculture : l'agriculture pluviale, l'agriculture de décrue et l'agriculture par irrigation.

L'agriculture pluviale qui se pratique pendant la saison de pluie, entre juin et septembre, devient de plus en plus importante avec la disparition progressive des eaux du Lac Tchad. Traditionnellement, la population s'adonne à des cultures du mil sur la dune en saison pluvieuse. Mais ces derniers temps, la saison de pluie est également une occasion pour les agriculteurs de mettre en valeur les polders abandonnés par les eaux.

L'Agriculture de décrue est pratiquée presque au même moment que l'agriculture pluviale puisque la période de basse eau du lac se situe entre mai et octobre. Ce sont les bras du lac, provisoirement libérés, qui servent des terres cultivables pendant la décrue. Avec la montée des eaux du lac, ces zones deviennent inaccessibles et inappropriées à l'agriculture. La part de l'agriculture pluviale dans le revenu des habitants demeure très minime.

Depuis une vingtaine d'année, c'est l'agriculture par irrigation qui a fait susciter beaucoup d'intérêt et d'espoir dans la politique agricole des Etats membres. Faute de moyen financier des Etats membres, jusqu'à une date récente, seul le Nigeria a pu construire des barrages pour pratiquer l'irrigation grâce aux eaux du Lac ou à celles de ses affluents.

Bien avant le Nigeria, le Tchad a également eu un projet similaire avec la création de la société de développement du lac (SODELAC) en 1970 qui doit s'occuper du développement socio-économique de la partie Tchadienne du Lac Tchad. Avec la création des grands moulins du Tchad, la SODELAC a eu le monopole de la fourniture en blé pour la fabrication de farine. Ce projet, si ambitieux, n'a pu durer longtemps, car la SODELAC n'a pas été à mesure de fournir les 24 .000 tonnes de blé comme prévenu. La minoterie était donc contrainte de fermer ses portes.

Il a fallu donc attendre 1999 pour que le Tchad réalise, grâce à l'appui des bailleurs de fonds (BAD, BADEA), le projet Mamdi qui dormait dans les tiroirs depuis les années 1970. Il s'agit d'un projet pour l'aménagement de 1.200 hectares de polder à Mamdi, à environ 10 km de Bol, chef lieu de la région du lac. Grâce à ce projet, nous espérons que les grands moulins du Tchad rouvriront leurs portes.

Outre le Tchad et le Nigeria, le Cameroun avait également tenté une expérience qui a fini par un fiasco. C'est le cas du programme SEMRY (société d'expansion et de modernisation de la riziculture de Yagoua, dans le Nord Cameroun. Ce projet qui a commencé sur des bons résultats en 1971 a été confronté à des problèmes d'ordre financier et concurrentiel entraînant ainsi sa fermeture21(*).

L'irrigation est la seule possibilité pour les habitants de pratiquer une agriculture intensive et de se sédentariser. Malheureusement, les agriculteurs se trouvent confronter à des réels problèmes de baisse de niveau du Lac Tchad dont beaucoup d'experts pensent que les barrages sont l'une des causes de cette catastrophe écologique.

Malgré la présence des eaux du Lac Tchad et des polders fertiles, l'agriculture dans le bassin conventionnel est caractérisée par son faible rendement, par son caractère de culture vivrière et par la pauvreté des paysans. Ce faible rendement est dû aux moyens rudimentaires employés par les paysans.

Outre la culture du coton qui est pratiquée comme culture de rente au Tchad et au Cameroun et de la culture d'arachide au Niger et Nigeria, l'essentiel de la culture dans cette région est destinée à la subsistance des habitants. Il s'agit notamment de la culture du maïs, du blé, du mil, du riz, de la pomme de terre, de melon, de tomate, du poivron, d'ail, d'oignon, etc.

L'élevage qui constitue la deuxième activité dans le bassin a connu ces dernières années un développement jamais égalé, mais cet essor est parfois freiné par des maladies qui déciment les bétails.

Dans la partie Nigérienne du Lac Tchad, à savoir la région de Diffa, l'élevage occupe le premier rang dans l'économie de la région avec une valeur estimée à une cinquantaine de milliards de francs22(*). Il s'agit d'une zone aride et semi-aride qui a un climat de type sahélien propice à l'élevage.

L'importance des activités relatives à l'élevage, à l'agriculture et à la pêche varie d'une région à une autre dans le bassin conventionnel. L'exemple symptomatique est celui de la prépondérance de l'élevage dans la partie nigérienne.

Cependant, il est à noter que même dans les autres régions du bassin conventionnel, l'élevage a connu un essor remarquable avec la maîtrise de certaines maladies et la reconversion d'une grande partie des pêcheurs dans les activités pastorales. La population s'adonne principalement à l'élevage des bovins des camélins, des équins, des ovins et des asins.

En dehors des éleveurs peuls de l'Adamaoua qui demeurent toujours sédentaires, les Kanembous, les Boudoumas et les arabes sont devenus mobiles à cause de la perturbation du couvert végétal due principalement au réchauffement climatique. Ce nomadisme qui n'existait pas autrefois dans la région du Lac Tchad oblige les éleveurs à quitter leur terroir entre le mois de juin et octobre à la recherche du pâturage vers le Nord.

Ce déplacement provisoire des bétails permettra la reconstitution des herbes pour la nourriture des troupeaux pendant la saison sèche, car les éleveurs rentrent au bercail vers le début du mois d'octobre. Pendant cette période, un problème de surpâturage se pose dans les différentes zones à cause de la rareté des herbes.

En plus de ce problème de surpâturage, l'élevage dans le bassin du lac Tchad est également confronté à des maladies qui empêchent l'augmentation des troupeaux. La pathologie du cheptel du bassin se résume de la manière suivante: la peste bovine, le charbon symptomatique et bactérien, la fièvre aphteuse, la trypanosomiase, etc.

De toutes de ces maladies, la peste bovine est la plus dangereuse. Cette épidémie qui a fait son apparution dans le bassin pour la première fois vers 1962 et ensuite entre 1980 et 1983 a décimé plus de 20 % du cheptel du bassin23(*). Le manque de vaccins,  l'insuffisance des moyens financiers et les troubles politiques dans certaines régions ont empêché les Etats d'adopter des politiques pour faire face à ces épizooties.

Il a fallu attendre l'année 1983 pour que les pays de la sous région mettent en place des vastes campagnes de sensibilisation grâce à l'appui financier de certaines institutions telles que l'organisation mondiale pour l'agriculture et l'alimentation (FAO), Fonds d'aide et de coopération (FAC), le fonds européen de développement, financé par les pays de la communauté économique européen (C.E.E).

Depuis cette période jusqu'à nos jours, tous les Etats membres de la CBLT ont crée des laboratoires pour la fabrication des vaccins afin de lutter contre les maladies de bétails. C'est pourquoi, aujourd'hui l'élevage a connu un progrès net. Le seul chiffre officiel que nous détenons est celui de 197924(*) qui repartit le cheptel du bassin de la manière suivante :

- bovins : 4.571.453

- ovins: 7.401.392

- Camelin: 153.700

Malgré ce développement général constaté, la race bovine Kouri est la seule aujourd'hui qui est menacée de disparution. Cette race dénommée « boeuf Kouri » est une espèce absolument unique dans le monde. Elle se trouve dans la région du lac Tchad. C'est une race de grande taille qui produit abondamment du lait (5 à 6 litres/jours) et d'une qualité de viande excellente. Les causes principales de cette disparution sont entre autres, la dégradation de l'environnement de la région du lac Tchad, l'arrivée dans cette région d'autres races bovines provoquant des jumelages et les maladies.

Actuellement, la société de développement du Lac (SODELAC), par le biais du projet de développement rural de la préfecture du lac (PDRPL), a mis en place en 2003 un projet pour la sauvegarde de la race Kouri.

De même, l'Association pour le Développement Economique et Social du Lac (ADESOL), ONG nationale de développement basée au lac, a élaboré un plan d'action quinquennal (2005-2010) relatif à la sauvegarde du boeuf Kouri qui est menacé de disparution. Le boeuf Kouri constitue un patrimoine culturel des Boudoumas et sa disparution serait une véritable catastrophe pour cette communauté.

La pêche qui constitue autrefois l'une des activités la plus attractive fait face aujourd'hui à d'énormes difficultés. Avant les désordres écologiques de ces dernières années, les parties Camerounaise et Tchadienne du Lac Tchad produisent par eux seuls annuellement entre 60 et 80.000 tonnes de poissons frais25(*).

Cependant, depuis l'assèchement continu des eaux du Lac Tchad, les activités piscicoles se sont considérablement réduites et une grande partie des pêcheurs se sont reconvertis dans les activités agricoles ou pastorales.

En plus des contraintes naturelles (changement climatique, rareté des pluies), l'augmentation démographique de la population en est aussi pour quelque chose. La surpêche et l'utilisation de certains moyens de pêches (filets) ont réduit drastiquement la population des poissons estimée à plus de 120 espèces.

La pêche est naturellement dépendante de l'existence des eaux ou de la montée des eaux du lac Tchad, car les moyens utilisés pendant la décrue ou pendant la crue des eaux du lac Tchad différent sensiblement. C'est le cas notamment des filets dormants, des sennes et des chambres de capture qui sont utilisés pendant l'étiage du lac.

Compte tenu des moyens artisanaux utilisés, la pêche est principalement une source de subsistance pour les habitants. Son aspect commercial se limite à quelques rares commerçants qui exportent le poisson soit frais vers le marché de N'djamena, soit sous forme fumée vers Maiduguri, au Nigeria.

La pêche qui était pratiquée autrefois dans les quatre Etats membres ne l'est plus depuis l'assèchement complet de la cuvette Nord et plus précisément de la partie Nigérienne. C'est donc principalement dans la cuvette sud que la pêche demeure encore possible en toute période.

En somme, les fluctuations importantes du niveau des eaux du Lac après 1973 et la dégradation très avancée de l'environnement du bassin ont entraîné un changement de morphologie du lac. Une des caractéristiques de ce changement de morphologie est l'apparution de deux cuvettes Nord et Sud26(*).

De ce changement de morphologie, la pêche est certes la plus affectée et la plus éprouvée.

B-LE COMMERCE ET LES AUTRES ATOUTS

Bien que la région du lac Tchad soit considérée comme étant une zone d'échanges et de commerce, La CBLT ne s'est jamais fixée des objectifs relatifs à la coopération commerciale. Comme nous l'avions indiqué plus haut, la politique menée par la CBLT se résume essentiellement à la mise en valeur du bassin conventionnel et à la protection des écosystèmes dudit bassin. Ainsi, le domaine de relation commerciale était abandonné à d'autres organisations sous-régionales, notamment l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC) qui fût créée par le traité du 8 décembre 1964 entre le Cameroun, le Congo, le Gabon, la RCA et le Tchad ; à laquelle adhéra la guinée équatoriale en 1984 et la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC), instituée par le traité de Libreville de 1983, qui regroupe outre les Etats de l'UDEAC, l'Angola, le Burundi, le Rwanda, Sao Tomé et principé et Zaïre.

Toutes ces organisations sous-régionales ont pour but de renforcer la coopération dans le domaine commercial pour une intégration économique en libéralisant les échanges. Faute des résultats escomptés, l'UDEAC a été remplacée en 1999 par la Communauté Economique et Monétaire des Etats de l'Afrique Centrale (CEMAC) qui se fixe des objectifs plus ambitieux pour atteindre une vraie intégration économique sous-régionale.

Outre ces organisations sous-régionales, il existe des accords bilatéraux entre certains Etats de la CBLT qui traitent d'un problème commercial spécifique27(*).

Il s'agit de l'accord de 1963 entre le Nigeria et le Cameroun et de l'accord de 1978 entre le Tchad et le Nigeria relatif à la limitation des quotas d'exportation de bétail sur pieds.

En dehors de toute structure légalement mise en place par la CBLT, les activités commerciales ont connu un développement exceptionnel. L'essentiel de ces activités étaient axées autour de l'exportation du poisson fumé par les commerçants des Etats membres vers le Nigeria, l'importation à partir du Nigeria de certaines marchandises (pagne, sucre, farine, hydrocarbures, etc.) par les autres pays membres, de l'exportation par le Tchad et le Niger du bétail vers le Nigeria et le Cameroun.

Au vu des échanges effectués dans la sous région, le Nigeria demeure le principal fournisseur des pays riverains du bassin en produits manufacturés.

En plus de l'importance du commerce dans la région, l'extraction du natron dans la partie Tchadienne et la présence de l'algue bleue (spiruline) et du pétrole constituent des atouts d'une grande importance pour l'avenir de cette région.

Cette lueur d'espoir relative à la richesse du sous-sol du bassin Tchadien ne peut en aucun cas occulté la menace actuelle qui pèse sur l'environnement et l'écosystème du lac. Cette menace impose de prendre des mesures urgentes pour une protection maximale du milieu naturel afin de sauver le Lac Tchad.

CHAPITRE II : LE REGIME JURIDIQUE DE LA PROTECTION DE

L'ENVIRONNEMEN DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL

DU LAC TCHAD

A l'image de la plupart des bassins fluviaux et de la dégradation de l'environnement planétaire, le bassin tchadien a subi ces dernières années une détérioration sans précèdent de son écosystème. Ce désastre écologique a été particulièrement ressenti dans le bassin conventionnel à cause du caractère laxiste du régime juridique de ses ressources en eau, car la « réciprocité des droits et obligations respectifs des Etats faisant partie d'un même bassin »28(*) qui doit normalement acquérir la force d'une règle de conduite généralement applicable dans les relations entre ces Etats ont été foulés de pieds.

Au vu de cette menace qui continue de peser sur l'hydrosystème du bassin du Lac Tchad, les Etats membres ont compris la nécessité de mettre en place les mécanismes d'une protection accrue (section 1), mais ce régime de protection laisse transparaître des lacunes (section 2).

SECTION I : LA NECESSITE D'UNE PROTECTION ACCRUE DES

ECOSYSTEMES LACUSTRES

Bien que les dirigeants politiques de la région du lac Tchad aient très tôt compris l'importance que revêt cet espace commun, leur coopération n'a pu empêcher la dégradation de l'environnement dans le bassin conventionnel. C'est dans l'optique d'une protection renforcée au vu du droit international de l'environnement (DIE) que plusieurs initiatives, tendant à la protection de la biodiversité (paragraphe 1) et à la protection des autres composantes de l'environnement (paragraphe 2), ont été prises par les Etats membres.

PARAGRAPHE 1 : LA PROTECTION DE LA BIODIVERSITE

La biodiversité est la diversité des espèces vivantes et de leurs caractères génétiques29(*). Actuellement, sur une estimation de 10 à 20 millions d'espèces animales et végétales qui peuplent notre planète seulement 1 à 2 millions sont connues. De ces espèces connues, plus de la moitié est menacée aujourd'hui d'extinction. Mais force est de constater que la CBLT a accordé beaucoup plus d'importance à la protection de la faune qu'à celle de la flore (B)

A-LA FAUNE

La faune peut être définie comme l'ensemble des espèces animales vivant dans un espace géographique ou un lieu déterminé. De cette définition, on peut distinguer la faune terrestre de la faune aquatique :

La faune terrestre est l'ensemble des animaux sauvages qui vivent et se reproduisent sur la terre ferme. Par contre, la faune aquatique est l'ensemble des ressources halieutiques.

De par sa position, la région du Lac Tchad est une région à cheval entre la terre ferme, les îles et les eaux libres d'où la présence de la faune terrestre d'une part et de la faune aquatique d'autre part.

Outre la convention de 1964 et certaines conventions de portée régionale et universelle, la protection de la faune a fait, de la part des Etats membres, l'objet d'un sujet d'actualité.

Déjà en 1964, les Etats membres se sont engagés à s'abstenir de prendre sans saisir au préalable la commission, toutes mesures susceptibles d'exercer une influence négative sur certaines caractéristiques biologiques de la faune (article 4).

Dans le sillage de la convention de 1964, les Etats membres ont adopté à Enugu, au Nigeria, l'accord sur la règlementation commune de la faune et de la flore, le 03 décembre 1977. Il s'agit d'un véritable régime de protection de la biodiversité dans le bassin conventionnel.

Concernant la faune terrestre, les Etats membres se réfèrent à la liste commune des espèces protégées établie par la convention africaine pour la conservation de la nature et des ressources naturelles de 1968 pour instaurer une politique commune de protection30(*).

Sur la base de la liste commune des espèces protégées, les Etats membres se sont engagés à établir une réglementation visant à :

-prévenir le commerce des spécimens capturés ou abattus illégalement ;

-recommander aux Etats membres l'emploi d'un certificat d'origine commune nécessaire pour le transport ou le transit sur le territoire, des spécimens et trophées en question et qui ne pourra être délivré que lorsque lesdits espèces et trophées ont été obtenus légalement.

Quant à la faune aquatique, les Etats membres conviennent dans le cadre d'une réglementation commune, de prendre les mesures nécessaires visant à interdire comme moyens de pêche :

- les armes à feu et d'explosifs d'un appareillage électrique, de poison, de drogue, de produits nocifs ou polluants ;

- les digues, barrages ou autres obstacles pouvant gêner ou empêcher les migrations du poison.

-les mailles de filets de pêche inférieures à 35 mm.

En sus des efforts sous-régionaux faits au niveau de la CBLLT, les Etats membres ne sont pas restés en marge de la prise de conscience, sur le plan international et régional, du problème de l'environnement en général et de la faune en particulier.

Cette détermination était déjà perceptible lors de l'adoption de la convention d'Alger de 1968 relative à la conservation de la nature et des ressources naturelles. Les quatre Etats membres de la CBLT ont activement pris part à l'élaboration de cette oeuvre africaine dont ils ont tous ratifié par la suite.

Cette motivation s'est davantage matérialisée avec la ratification par les Etats membres des traités et conventions de portée universelle relative à la protection de la faune sauvage. Nous pouvons citer à titre d'exemple, la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, adoptée à Washington, le 13 mars 1973; la convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage du 23 juin 1979 à Bonn; la convention de Rio de 1992 sur la biodiversité.

En plus de ce mouvement d'ensemble résultant de la mondialisation des problèmes de l'environnement, la plupart des Etats membres ont élaboré des lois allant dans le sens d'une protection accrue de la faune. C'est le cas notamment de l'ordonnance N°14/63 du 20 mars 1963 réglementant la chasse et la protection de la nature au Tchad dont les lacunes ont été comblées par quelques textes plus récents.

Malgré ce régime de protection, la faune ne cesse de subir des graves atteintes dues à la pression des hommes et particulièrement du braconnage. Des espèces telles que le lion, le rhinocéros ont complètement disparu, alors que d'autres comme l'hippopotame et l'éléphant sont menacées de disparition. Toutefois, les gazelles, les antilopes (sitatunga), hyène, chacal, Autriche, crocodile, varan peuplent encore en grand nombre les forêts du Lac Tchad.

B- LA FLORE

On entend par flore, l'ensemble des espèces végétales croissant dans une région ou un milieu donné31(*). Une étude sur la protection de la faune et de la flore au niveau africain souligne en effet qu'en quelques décennies, le continent africain a perdu pas moins de 3/4 de son potentiel en flore32(*).

Ce qui a été observé par cette étude est à quelque différence prés la même réalité au niveau du bassin conventionnel. La région du lac Tchad fait partie des pays moins avancés, car plus de 57% des ménages vivent en dessous du seuil de pauvreté de 1 dollar par jour33(*). Cette pauvreté caractéristique de cette région est à l'origine de l'acharnement de la population sur les ressources naturelles. Les forêts et les animaux sauvages constituent les principaux moyens de subsistance des habitants. C'est pourquoi, le déboisement et la coupe abusive de bois demeurent de tout temps un problème chronique auquel l'urgence d'une solution s'impose.

D'ailleurs, la création de la CBLT en 1964 rentre dans cette droite ligne, bien que les textes constitutifs restent très lapidaires. Ce n'est qu'en 1977 que les Etats membres avaient adopté l'accord sur la règlementation commune de la faune et de la flore ci-dessus cité.

Sur les quinze articles qui constituent cet accord, seulement deux sont consacrés à la flore. La forêt qui constitue l'habitat principal des animaux ne fait donc pas l'objet d'une protection renforcée de la part de la CBLT. Toutefois, à la lecture de l'article 13 de l'accord, les Etats membres devront établir une réglementation commune visant à :

-interdire ou réglementer les feux de brousse, les ébranchages et les mutilations d'arbres;

-réglementer les cultures ou travaux en forêts classées ou sur les sols en restauration;

-interdire ou règlementer l'importation et l'exportation des espèces végétales.

Force est constater que ces intentions louables ne sont jamais suivies d'actions concrètes sur le terrain.

Sur le plan international, l'on peut noter avec satisfaction le progrès réalisé dans ce domaine, notamment l'adoption des conventions dont les plus importantes sont sans nul doute la convention africaine pour la conservation de la nature et des ressources naturelles, adoptée à Alger le 16 septembre 1968, la convention relative aux zones humides d'importance internationale de 1971, connue sous le nom de RAMSAR, la convention des nations unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et /ou la désertification, adoptée à Paris le 17 juin 1994.

L'insertion de ces différentes conventions dans l'arsenal juridique interne des Etats est un progrès décisif pour la protection de la flore en particulier et de l'environnement en général.

PARAGRAPHE 2 : LA PROTECTION DES AUTRES COMPOSANTES DE

L'ENVIRONNEMENT

A côté de la faune et de la flore, les autres composantes de l'environnement qui doivent attirer principalement notre attention dans le bassin conventionnel sont d'une part l'air et l'atmosphère (A) et d'autre part, les sols et les zones humides (B)34(*).

A-L'AIR ET L'ATMOSPHERE

On entend par air, un mélange gazeux contenant principalement de l'azote et de l'oxygène et qui forme l'atmosphère. L'atmosphère, quant à elle est définie comme la « mince pellicule d'air qui entoure notre planète et qui permet la respiration biologique et le cycle de l'eau »35(*). Elle est la couche gazeuse constituant l'enveloppe la plus externe de la terre.

L'Air est un élément essentiel à la vie de l'homme sur la terre. Sa pénurie et sa dégradation constituent des menaces graves à la survie de l'être humain sur la planète36(*). Son altération est due essentiellement à la pollution.

Pendant longtemps, le problème de la pollution atmosphérique était resté en marge de la protection de l'environnement dans le bassin conventionnel, car les Etats membres qui sont des pays en voie de développement ne disposent pas des industries lourdes et polluantes.

Cependant, ce sont les effets de la pollution atmosphérique à longue distance et l'apparution des problèmes de l'appauvrissement de la couche d'ozone et du réchauffement planétaire qui ont donné à cette question un rang de priorité dans le domaine de la protection de l'environnement37(*).

Le manque d'initiative relative à la protection de l'air et de l'atmosphère par les Etats membres de la CBLT s'explique donc par le fait qu'au niveau de la région, le problème de la pollution locale ne se pose pas. Actuellement aucun texte de la CBLT n'aborde spécifiquement cette question.

En effet, cette question qui est une véritable préoccupation fait l'objet de réglementation au niveau national. C'est le cas notamment de la loi N°014/PR/98 adoptée en 1998 par les législateurs Tchadiens pour définir les principes de la protection de l'environnement. Cette loi pose ainsi le principe de la protection de l'atmosphère des diverses formes de pollution qui contribuent à la dégradation de la qualité de l'air, au réchauffement climatique et à l'appauvrissement de la couche d'ozone38(*).

Cependant, la nécessité de la protection de l'air et de l'atmosphère s'était fait ressentir beaucoup plus tôt sur le plan international. Cette prise de conscience planétaire est le résultat du phénomène de la pollution atmosphérique à longue distance, appelée pollution transfrontière.

Ainsi, sous les auspices de l'ONU, une convention pour la protection de la couche d'ozone avait été signée en 1985. Elle a pour objectif de protéger la santé humaine et l'environnement contre les effets néfastes résultant des activités humaines qui modifient la couche d'ozone.

Mais avant celle-ci, la convention sur la pollution atmosphérique transfrontalière, adoptée en 1979 par les Etats européens a été déterminante, sachant que les pollutions proviennent principalement des pays développés fortement industrialisés.

Malgré l'adoption de quelques instruments à vocation universelle, la dégradation de l'environnement en générale et celle de l'air et de l'atmosphère ne cesse de s'aggraver. C'est pourquoi, l'ONU a adopté en 1982 la convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique et le protocole de Kyoto de 1997 pour lutter contre les conséquences des effets de gaz à effet de serre.

B-LE SOL ET LES ZONES HUMIDES

Le sol et les zones humides font partie de ce qu'on appelle les écosystèmes fragiles très sensibles aux perturbations et à ce titre une protection particulière est absolument nécessaire.

Le sol est la partie de la croûte terrestre qui se trouve à la surface, à l'état naturel ou aménagé par l'homme39(*). Il sert de support à l'essentiel des activités agro-pastorales. Quant aux zones humides, le Pr. Kamto Maurice les définit comme étant des espaces terrestres inondés ou des espaces semi-maritimes dotés d'un couvert végétal40(*).

Dans la région du lac Tchad, les observations et les études faites par l'ORSTOM en 1972 ont permis de dégager deux grands traits pédologiques. Au Sud, il y a la prédominance de l'argile qui s'explique par les vastes espaces inondables qui confèrent à cette région son caractère temporairement marécageux alors qu'au Nord, c'est le domaine du sable et de l'exonde41(*).

A l'instar de la plupart des organisations sous-régionales qui ont en charge la gestion des bassins fluviaux, la CBLT n'avait pas accordé une grande importance à la protection des sols. En dehors du seul article 5 de la convention de 1964 qui faisait référence à la protection du sol, aucune autre initiative n'a été prise à cette fin. Même au niveau national, exceptions faites de quelques principes vagues énoncés dans certaines législations nationales, les actions concrètes tendant à la protection du sol sont rares alors qu'avec l'augmentation vertigineuse de la population du bassin, la pression exercée sur les terres sont réelles et préoccupantes.

Au niveau international, l'apport de la convention d'Alger de 1968 relative à la conservation des ressources naturelles a été déterminant. Les Etats parties à cette convention se sont engagés à prendre des mesures de conservation et d'amélioration des sols et s'attachent particulièrement à lutter contre l'érosion et la mauvaise utilisation des terres.

La protection des zones humides comme étant des aires d'une importance écologique stratégique a longtemps été négligée. C'est la disparution d'une grande partie de ces zones avec comme corollaire la disparution de certaines espèces de faune et de flore sauvage habitant ces espaces qui ont été le déclic d'une prise de conscience généralisée sur le plan international. Cette prise de conscience s'était concrétisée avec l'adoption, en 1971, de la convention Ramsar relative aux zones humides d'importance internationale, particulièrement comme habitats des oiseaux.

Cette convention qui est entrée en vigueur en 1975 a été une véritable source d'inspiration pour la plupart des bassins fluviaux et lacustres dont le lac Tchad.

La CBLT vient en effet de signer le 23 Novembre 2002 à Valence, en Espagne, un mémorandum de coopération avec le bureau de la convention Ramsar sur les zones humides. Dans ce mémorandum, les deux partenaires se sont engagés à inscrire l'ensemble du lac Tchad en tant que zone humide transfrontalière d'importance internationale conformément au deuxième sommet des Chefs d'Etats et du gouvernement réuni à N'Djaména, le 28 Juillet 2000.

Ils se sont, en outre, engagés de veiller au renforcement du rôle des écosystèmes des zones humides en faveur du développement durable par l'apport d'eau propre et d'une diversité de produits des zones humides qui peuvent être issus de la démonstration de méthodes de gestion intégrée42(*).

SECTION II: LA PROTECTION DES EAUX DU LAC TCHAD

Le Lac Tchad représente tout un symbole de vie pour une population cosmopolite de plus de 30.000.000 d'habitants. Il est une source importante d'eau douce et d'activités économiques dont l'agriculture, l'élevage et la pêche.

Les images satellitaires de la Nasa révèlent un rétrécissement considérable du lac Tchad au cours des trente dernières années et si rien n'est fait, cette situation risque de s'aggraver43(*).

L'existence d'une volonté commune de protection (paragraphe 1) et la mise en oeuvre de cette volonté commune (paragraphe 2) pourraient, nous espérons, apporter une inversion de tendance.

PARAGRAPHE 1 : L'EXISTENCE D'UNE VOLONTE COMMUNE

Une gestion concertée des eaux du lac (A) d'une part et le respect des devoirs et obligations des Etats membres d'autre part, constituent des éléments déterminants pour la sauvegarde de cet espace.

A - UNE GESTION CONCERTEE DES EAUX DU LAC TCHAD

A travers le monde, plus de 40% des ressources en eaux douces continentales sont partagées d'où la nécessité de développer une stratégie de gestion commune pour prévenir d'éventuels conflits et protéger les écosystèmes. C'est dans ce sens que la conférence de Paris de mars 1998 sur l'eau et le développement souligne dans sa déclaration qu'une vision commune des pays riverains est nécessaire à la mise en oeuvre d'un aménagement, d'une gestion et d'une protection efficace des ressources en eau transfrontalière44(*).

Les Etats riverains sont tenus et encouragés à coopérer entre eux sur le problème de la gestion des eaux douces transfrontalières et ce, en prenant en compte les intérêts de tous les Etats concernés. A cette fin, il serait notamment souhaitable de favoriser les échanges d'informations fiables et comparables entre les pays riverains, notamment au sein d'institutions et des dispositifs internationaux pertinents.

Mais bien avant cette conférence, les Etats membres de la CBLT avaient mis en place une politique de gestion concertée des eaux du lac. C'est ce qui résulte de l'article 1 de la convention de 1964 qui dispose que « Les Etats membres affirment solennellement leur volonté d'intensifier leur coopération et leurs efforts pour la mise en valeur du bassin du lac Tchad ». De même, les Etats membres s'engagent à s'abstenir de prendre, sans saisir au préalable la commission, toutes mesures susceptibles d'exercer une influence sensible tant sur l'importance de pertes d'eau que sur la forme de l'hydrogramme et du limnigramme annuels et certaines caractéristiques biologiques de la faune ou de la flore du bassin45(*).

A la lumière des articles précités, il est indiscutable que les Chefs d'Etat et de gouvernement des Etats membres de la CBLT aient pris très tôt des initiatives relatives à une gestion concertée du bassin conventionnel bien que dans la plupart des cas, ces initiatives, si nobles soient-elles, ne sont pas suivies toujours d'actions concrètes. Ce handicap est dû au fait que le bassin conventionnel ne constitue pas une entité indépendante, car chaque Etat membre exerce la souveraineté sur sa portion déterminée. Cette souveraineté à des conséquences sur le principe sacro-saint de l'utilisation équitable et raisonnable des eaux partagées.

Sur le plan international, une revue historique des différents instruments juridiques nous permet de comprendre que ces conventions et traités ont été d'une importance décisive dans la gestion des eaux transfrontalières. Il s'agit notamment des traités relatifs à la liberté de navigation sur le fleuve Rhin, l'Oder, le Danube et l'Elbe. Ces règles sont posées dans les traités dont les plus célèbres sont Munster et Westphalie en 1648, Campo Formio en 1797, Venise en 1815, Paris en 1856 et Berlin en 1919. Ces vieux traités ont été suivis par d'autres plus récents dont les plus importants sont la convention d'Helsinki de 1992 et la convention de New York de 1997 sur les utilisations d'eaux internationales à des fins autres que la navigation.

Tant sur le plan mondial, régional, que sous-régional, la prise de conscience est réelle. Malheureusement, les Etats parties à ces différentes conventions respectent très rarement les obligations et les devoirs qui leur incombent.

B- LES OBLIGATIONS ET LES DEVOIRS DES ETATS MEMBRES

Les articles 1 et 5 de la convention de 1964 précités mettent à la charge des Etats membres des obligations et des devoirs. L'essentiel de ces obligations se résument pour l'Etat au devoir d'informer les autres Etats membres de la CBLT de tout acte ou projet qu'il entend entreprendre sur le bassin conventionnel.

Le Droit international de l'environnement, quant à lui, impose plusieurs obligations aux Etats partageant des bassins communs, à travers différentes conventions. Il s'agit de l'obligation pour les Etats de protéger et de préserver les écosystèmes des cours d'eau internationaux, le devoir de faire preuve de toute diligence pour utiliser les cours d'eau internationaux de manière à ne pas causer de dommages significatifs aux Etats membres, etc.

Dans le cadre spécifique du bassin conventionnel du Lac Tchad, il est important de noter que la convention de 1964 est une convention non contraignante laissant une certaine liberté aux Etats parties46(*).

Le devoir de conservation des eaux exigent q'un Etat, lorsqu'il utilise les eaux d'un cours d'eau, le fasse de façon qu'il ne prive pas les autres Etats membres riverains. C'est le principe de l'utilisation équitable et raisonnable qui a même trouvé son application dans des jurisprudences internationales dont la plus connue est l'affaire de la fonderie de Trail. Cette célèbre jurisprudence a été confirmée en 1949 par la cour internationale de justice (CIJ) dans l'affaire du détroit Corfou entre le Royaume Uni et l'Albanie, puis par la sentence arbitrale en 1957 entre la France et l'Espagne dans l'affaire du lac Lanoux.

En vertu de ce principe, l'Etat a l'obligation de faire une utilisation non dommageable de son territoire. Il a surtout le devoir d'éviter de modifier la composition chimique de l'eau en y déversant des substances polluantes.

Ce principe fondamental a été également consacré en 1997 dans une autre célèbre affaire opposant la Hongrie à la Slovaquie. Dans cette affaire, la CIJ a déclaré que la mise en service de l'aménagement de Gabcikovo par la Slovaquie était un fait internationalement illicite puisqu'elle prive la Hongrie d'une utilisation équitable et raisonnable des eaux du Danube.

En somme, sur le plan local et planétaire, il y a ce dernier temps un mouvement d'ensemble qui a débouché sur la prolifération des conventions relatives à la protection des eaux douces. Cependant, la mise en oeuvre desdites conventions cause d'énormes problèmes.

PARAGRAPHE 2 : LA MISE EN OEUVRE DE LA VOLONTE COMMUNE DES

ETATS MEMBRES DE LA CBLT

L'importance des accords multinationaux d'environnement (AME) est indéniable, car le phénomène de la dégradation prend dans la plupart des cas, une proportion transnationale, d'où l'importance du droit international de l'environnement (DIE) pour mener une vraie lutte afin de freiner la détérioration de la biosphère47(*).

A l'instar des autres organisations régionales et sous-régionales, les Etats membres de la CBLT ont intérêt à rendre effectif les accords qui les lient. Cette mise en oeuvre de la volonté commune au niveau du bassin passe naturellement sur le plan environnemental (A) d'une part et sur le plan sécuritaire (B) d'autre part.

A-SUR LE PLAN ENVIRONNEMENTAL

Il existe à ce jour plus de cinq cents traités et conventions conclus dans le domaine de l'environnement à travers la planète. Même si nous nous réjouissons de la prolifération de ces conventions dans divers secteurs de l'environnement, force est de constater que cette multiplication des conventions à tendance à poser de problème de cohérence relative à cette fragmentation du droit international de l'environnement. C'est ce qui a été relevé par une résolution de l'institut de droit international de l'environnement en 1997 qui déclare que « le développement du droit international de l'environnement s'est effectué d'une manière non coordonnée, se traduisant par des doubles emplois, des incohérences et des lacunes »48(*).

Cette incohérence et cette lacune du DIE sont des handicaps majeurs pour son efficacité et son effectivité. Ce défi fondamental que doit relever le DIE l'est également pour la CBLT, car plus de 80% des accords environnementaux entre les Etats membres ne sont pas respectés alors que le devoir du respect des écosystèmes a été consacré par la convention de 1964 aux articles 5 et 6.

Pire encore, même les textes qui ont une force juridique plus contraignante que la convention de 1964 connaissent d'énormes difficultés pour leur mise en oeuvre. Il s'agit notamment de l'accord de Moundou de 1970 entre le Tchad et le Cameroun relatif au prélèvement d'eau dans l'hydrosystème Chari/Logone et de l'accord d'Enugu de 1977 sur la faune et la flore. Ces différents accords qui viennent combler le vide laissé par la convention de 1964 sont des véritables outils d'une gestion écologiquement rationnelle du bassin Tchadien. Malheureusement, ces accords n'ont pas servi à grand-chose, car ils n'ont jamais trouvé une application juste.

B- SUR LE PLAN SECURITAIRE

Au lendemain des indépendances des pays riverains du bassin du lac Tchad, la préoccupation d'ordre politique et sécuritaire avait occulté les problèmes écologiques du bassin. Le mandat donné à la CBLT en 1964 et les différents sommets des chefs d'Etat et du gouvernement illustrent suffisamment cette tendance.

De par sa position, la région du lac a toujours été une zone de transit de drogue, de grand banditisme et quelquefois de conflits entre les Etats membres.

Les difficultés de démarcation de frontière et la nécessite de coopération ont amené certains Etats membres à mener conjointement des patrouilles sur le lac Tchad. Cet exemple est illustré par la formule de la patrouille mixte Tchado- Nigériane.

Mais cette patrouille mixte n'a pu empêcher l'éclatement d'un affrontement armé entre le Nigeria et le Tchad en 1983 et des conflits entre les autres Etats membres. C'est pourquoi, lors de la réunion de la CBLT, tenue à Maiduguri, le 12 novembre 1984, élargie aux autorités civiles et militaires des Etats membres du bassin conventionnel, il a été décidé de la mise sur pied d'une brigade mixte de patrouille dénommée brigade mixte quadripartite qui comprendra désormais les éléments des quatre pays membres.

Pour renforcer davantage la sécurité dans le bassin conventionnel, les Etats membres ont décidé de la mise en place d'une force multinationale de sécurité dans le bassin conventionnel lors d'une réunion tenue à Maiduguri (Bornou) du 10 au 13 Novembre 199449(*).

Cette force multinationale a pour mandat d'assurer la sécurité des personnes et des biens dans la zone par l'élimination de la grande criminalité et des bandes armées qui entravent son développement économique et social et menacent la stabilité politique des Etats membres.

Avec la création de la CBLT en 1964, les Etats membres ont posé le jalon d'une coopération sous-régionale pour une gestion concertée des ressources naturelles du lac Tchad. Cependant, les moyens d'actions limités et les difficultés d'ordre politique et financier ont posé d'énormes difficultés à la commission.

PARTIE II : LES ACTIONS DE LA CBLT

Quatrième plus grand lac africain après le lac Victoria, le lac Tanganyika et le lac Nyassa, le lac Tchad fait partie aujourd'hui des écosystèmes gravement menacés de disparution.

Déjà, les dirigeants des jeunes Etats indépendants avaient senti cette menace et décidèrent dès 1964 de mettre en place la commission du bassin du lac Tchad (CBLT).

Pour lui permettre de poser des actions concrètes afin d'atteindre ses objectifs, la commission a eu pour mandat entre autres de « suivre l'exécution des études et des travaux dans le bassin et de maintenir la liaison entre les hautes parties contractantes en vue de l'utilisation la plus efficace des eaux »50(*).

En effet, pour rendre plus opérationnelle la commission, au cours de la 35eme session tenue en octobre 1987, le Secrétariat Exécutif a été mandaté pour faire appel à l'assistance des organisations internationales, telles que le PNUD et la FAO afin de faire des propositions pour la restructuration de la CBLT.

Une analyse des réalisations de la CBLT (chapitre 1) depuis sa création nous permet de déterminer les limites aux moyens d'actions de la CBLT et les perspectives d'avenir (chapitre2)

CHAPITRE I : LES REALISATIONS DE LA CBLT

La pérennité et l'efficacité d'une organisation dépendent en général des actions concrètes qu'elle mène sur le terrain. A cet égard, la CBLT a eu à réaliser plusieurs projets tant au niveau local que régional.

De tous ces différents projets réalisés (section 1), le projet d'inversion des tendances à la dégradation des terres et des eaux du bassin (section 2) doit particulièrement attirer notre attention.

SECTION I : LES DIFFERENTS PROJETS REALISES

Au lendemain de sa création en 1989, la commission du bassin du lac Tchad s'est limitée à coordonner des projets au niveau local (paragraphe 2) dans les quatre pays membres.

Il a fallu donc attendre la reforme de 1989 pour que la CBLT s'engage à exécuter des projets à caractère exclusivement régional (paragraphe 1).

PARAGRAPHE 1 : AU NIVEAU REGIONAL

L'examen du projet planification et gestion des ressources en eau du bassin du lac Tchad (A) précédera celui du projet suivi et gestion des ressources en eau souterraine dans le bassin du lac Tchad (B).

A-PROJET PLANIFICATION ET GESTION DES RESSOURCES

EN EAU DU BASSIN DU LAC TCHAD

Depuis la reforme engagée par la CBLT en 1989, le résultat le plus tangible que l'on peut s'en réjouir est celui de la pertinence des projets à caractère exclusivement régional qui ont déjà commencer à porter leurs fruits. Parmi ceux-ci le projet planification et gestion des ressources en eau du bassin du lac Tchad occupe certainement une place de choix.

Ce projet, dénommé Projet RAF/88/029, a pour objectif global l'amélioration de la connaissance des ressources en eau du bassin du lac et l'établissement au sein de la CBLT d'un outil rationnel de gestion de ces ressources.

Les Objectifs Spécifiques sont 51(*):

-réhabiliter et renforcer les réseaux de collecte des données et transférer les données de base (données hydrauliques, hydrométéorologiques et socio-économiques du bassin.) ;

-mettre en place un système opérationnel de collecte, de traitement et de conservation des données de base (banque de données informatiques ou système informatisé) ;

-établir une unité d'acquisition et d'exploitation de données satellitaires sur l'ensemble du bassin (unité Télédétection) pour suivre l'évolution du lac Tchad ;

-organiser l'analyse et l'exploitation rationnelle des données collectées dans le cadre du développement économique et social de la région, en particulier définir une stratégie de mise en valeur des ressources en eau du bassin (modèle mathématique des simulations du comportement hydrologique du lac Tchad et des fleuves qui l'alimentent) ;

-mettre en place une structure et des moyens humains et matériels permettant à la CBLT de maintenir l'acquis et renforcer le système (formation du personnel et équipement).

B- PROJET SUIVI ET GESTION DES RESSOURCES

EN EAUX SOUTERRAINES

La planification et la gestion rationnelle des ressources en eau nécessitent la connaissance parfaite de l'eau souterraine. C'est pourquoi, les Chefs d'Etat et de gouvernement, conscients de cet enjeu, ont mis en place le projet suivi et gestion des ressources en eau souterraine dans le bassin du Lac Tchad.

Par la convention N° 98/C88/ITE/FAC-BRCM, la CBLT a signé avec les bailleurs de fonds cet important projet qui a pour objectif, entre autres la conception et la définition du réseau piézométrique, la prémodélisation des aquifères, et l'actualisation de la carte hydrogéologique.

Le projet a défini trois niveaux de réseaux de suivi piézométrique, à savoir le réseau minimum comprenant une centaine de points d'eau destinés à une surveillance globale des aquifères du bassin avec une logistique réduite, un réseau moyen et étendu permettant une perception plus fine des phénomènes affectant le bassin.

Avec ces deux projets relatifs à la gestion d'eau dans le bassin conventionnel, les dirigeants de cette région ont fait un pas de géant dans la perspective de la sauvegarde des eaux du lac.

PARAGRAPHE 2 : AU NIVEAU LOCAL

Au lendemain de sa création, la CBLT n'a réalisé que principalement des projets à caractère national dans les quatre Etats membres. L'essentiel de ces projets ont été réalisés entre 1964 et 1989. Il s'agit des projets menés au Cameroun et au Tchad(A) d'une part et au Nigeria et Niger (B) d'autre part.

A- AU CAMEROUN ET AU TCHAD

De 1964 jusqu'à 1989, la CBLT a réalisé au Cameroun et au Tchad plusieurs projets dans le domaine de l'élevage, de la pêche et des forets.

Dans le domaine de l'élevage, la CBLT a pour objectif de développer la production bovine, améliorer la qualité de la viande, organiser et faciliter le commerce du bétail entre les pays membres de la CBLT et la formation des éleveurs52(*).

Pour atteindre ses objectifs, la CBLT s'est dotée d'une division élevage qui a fait des réalisations dont les plus importantes sont les suivantes :

- Secteur Assalé : c'est un projet qui est installé à Karal, au Tchad. Ce projet a mené des actions pour l'éradication des glossines dans la partie Tchadienne, la campagne de déparasitage des veaux, l'organisation des séminaires d'éleveurs, l'étude agrostologique des pâturages, l'installation de deux pompes solaires à Karal et la réalisation de 29 puits cimentés ;

- secteur ferbeouel : le siège du projet a été construit a Makary, au Cameroun avec toutes les infrastructures nécessaires. Il y a eu la création de quatre postes vétérinaires à Fotokol, Afadé, woulky et Goulfey ; la réalisation de quatre forages artésiens, l'implantation des aménagements de surface et la mise sur pied d'une campagne de vaccination contre la peste bovine ;

- Le projet Yaerés : les Yaerés constituent une zone de pâturage aquatique du Nord Cameroun avec une superficie de 60.000 hectares. Il a été entrepris un projet de 25 mares judicieusement reparties avec l'appui du PNUD et de la FAO qui ont en charge l'exécution du projet ;

- Le projet de sauvegarde de la race bovine Kouri : l'avenir de cette race est lié au lac Tchad. C'est pourquoi un projet de sauvegarde a démarré en 1977 avec l'appui financier du FAC. Ce projet comporte un volet sanitaire ainsi qu'un volet zootechnique. Le projet est implanté à Bol, au Tchad.

Dans le domaine de la forêt, face à la désertification progressive autour du lac Tchad, la CBLT a créé deux centres forestiers dans les deux pays. Les deux centres sont implantés à Bol (Tchad) et à Makary (Cameroun). L e centre forestier de bol a mis en place une pépinière en 1975 et les premières plantations ont été réalisées en 1976.

Quant au centre forestier de Makary, les premières plantations à l'intérieur des zones protégées ont lieu en 1977.

Dans le domaine de la pêche, les réalisations de la CBLT dans les deux pays sont très minces au vu de l'importance de la pêche dans l'économie de deux pays.

Outre le centre de pêche de Djimtilo, au Tchad et celui de Blangoua, au Cameroun, la CBLT n'a mis en place aucun projet de grande envergure.

B- AU NIGERIA ET AU NIGER

Dans ces deux pays, la plupart des projets exécutés au Cameroun et au Tchad ont également été expérimentés. C'est le cas du projet d'aménagement de l'espace pastoral de Yaéré qui concerne non seulement le Cameroun, mais également le Nigeria.

Concernant le projet pour la sauvegarde de la race bovine Kouri, sa réalisation a été effective également au Nigeria et au Niger, car le boeuf Kouri est une espèce qui vit dans ces trois pays. Pour le Nigeria, le projet a été implanté à Baga-Kawa alors que pour le Niger, il est implanté à Nguiguimi.

Dans le domaine de la pêche, il est également important de relever la création des centres de pêche dans les deux pays. Ces centres sont fixés à Baga-Kawa (Nigeria) et Nguiguimi (Niger).

Dans le domaine des forêts, deux centres créés à Diffa, au Niger et à Baga-Kawa, au Nigeria sont opérationnels depuis 1977.

SECTION II : LE PROJET D'INVERSION DES TENDANCES A LA

DEGRADATION DES TERRES ET DES EAUX

DU BASSIN DU LAC TCHAD

Le projet d'inversion des tendances à la dégradation des terres et des eaux du bassin du lac Tchad est l'un des projets le plus prometteur que la CBLT avait initié après les reformes de 1989. C'est donc en fonction de son importance que nous lui avons consacrée toute une section pour son analyse.

A travers les différentes activités menées (paragraphe 1) dans le cadre de ce projet grâce au financement (paragraphe 2) des bailleurs de fonds et la détermination des Etats membres, il est aujourd'hui possible d'inverser la tendance de cette dégradation accélérée de l'écosystème du bassin conventionnel.

PARAGRAPHE 1 : LES ACTIVITES MENEES

L'étude diagnostique de la dégradation de l'environnement du bassin du Lac (A) a permis de mettre en place les différentes composantes du projet (B).

A-L'ETUDE DIAGNOSTIQUE DE LA DEGRADATION DE

L'ENVIRONNEMENT DU BASSIN DU LAC

L'étude diagnostique de la dégradation de l'environnement du bassin du Lac a été réalisée en 1990 par l'Institut d'Ingénierie Environnementale de l'Université Technique de Varsovie dirigée par Janus Kindler. Cette étude a été possible grâce à l'appui financier du programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), du programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et de l'office soudano sahélien des Nations Unies (OSSNU) en collaboration avec la CBLT et les experts nationaux du Cameroun, du Nigeria, du Niger et du Tchad.

Cette étude constitue un résumé des symptômes liés aux « maladies »53(*) de l'environnement telles que l'érosion de terres jadis productives, la surexploitation des eaux souterraines, la perte des espèces animales et végétales, les migrations forcées des populations durant les périodes de famine et de sécheresse. C'est une analyse de 237 pages qui essaie de déterminer les causes de la dégradation des plantes, des sols, de l'eau, de l'air et de la vie animale dans le bassin conventionnel du Lac.

Ce rapport contient quatre parties. La première partie traite des données de base concernant l'écologie, l'eau et les ressources humaines du bassin. La deuxième partie décrit les régions et traite aussi des problèmes rencontrés ainsi que leurs causes en divisant le bassin conventionnel en unités hydrographiques et écologiques appelées « bassins diagnostiqués ». La partie trois donne un diagnostic général de la situation de développement et de conservation des espèces du bassin. La dernière partie est consacrée aux recommandations.

L'importance de cette étude diagnostique n'est pas à démonter, car c'est elle qui a permis de trouver des remèdes aux maux dont souffre le lac Tchad. L'ensemble des ces remèdes sont contenus dans un document intitulé plan d'action statistique (PAS) pour une gestion intégrée et durable des eaux internationales du bassin du lac Tchad.

B- LES COMPOSANTES DU PROJET

Le projet d'inversion des tendances à la dégradation des terres et des eaux du bassin du lac Tchad, connu également sous le nom du projet CBLT/FEM a pour objectif de renforcer la capacité de la CBLT afin de lui permettre de mieux accomplir son mandat de gestion des terres et des eaux dans le bassin conventionnel. Elle devra à ce titre renforcer la collaboration entre les pays membres par l'accroissement d'une analyse diagnostique transfrontalière (ADT) et l'élaboration d'un programme d'action stratégique (PAS).

Ce projet si ambitieux se compose de plusieurs composantes dont les plus importantes sont :

- La restauration des sols ;

- La création des forêts communautaires ;

- La gestion rationnelle et intégrée des eaux ;

- Le renforcement de la capacité institutionnelle de la CBLT.

Pour assurer l'exécution du projet, des structures ont été mises en place. Il s'agit entre autres de l'unité de gestion du projet, du comité pilotage du projet, des comités inter- ministériels, des équipes techniques de travail.

La formulation de l'analyse diagnostique transfrontalière et le programme d'action stratégique doivent prendre en compte les résultats de cinq projets pilotes suivantes :

- projet pilote du littoral du lac Tchad et du diagnostic du bassin septentrional qui est exécuté dans la partie Nigérienne et Tchadienne ;

- Projet pilote impacts d'utilisation des terres dans le bassin supérieur du fleuve Chari, au Nord de la RCA ;

- Projet pilote de Waza Logone au Cameroun ;

- Projet pilote du lac Fitri, au Tchad.

A ce jour, le résultat est complètement accompli dans la mesure où les structures de gestion du projet ont été mises en place54(*).

Quant aux projets pilotes, les associations et les organisations non gouvernementales (ONG) sélectionnées dans les zones d'intervention du projet pour bénéficier des subventions ont démarré leurs activités depuis 2006. C'est le cas des activités du projet du littoral du lac dont l'exécution a été confiée à l'union internationale de la conservation de la nature (UICN). L'Ong ADESOL, le groupement RAOU, le groupement AS-SALAM et le groupement Alla houakbar assurent, sous la supervision de l'UICN, la réalisation des projets pilotes dans la partie Tchadienne du Lac Tchad.

De même, dans la partie Camerounaise, les deux projets pilotes identifiés à savoir le projet Waza Logone et le diagnostic environnemental du rivage et de la partie Nord du bassin dont l'exécution est également confiée à l'UICN sont presque achevés.

Les projets pilotes constituent une base importante à l'élaboration des plans d'aménagement et de suivi écologique du bassin Tchadien.

PARAGRAPHE 2 : LE FINANCEMENT

Le financement du projet inversion des tendances à la dégradation des terres est principalement l'oeuvre des bailleurs de fonds (A) avec les efforts conjugués des pays membres et des ONG nationales de développement (B).

A- LA CONTRIBUTION DES BAILLEURS DE FONDS

De tous temps, les bailleurs de fonds ont joué un rôle de premier plan dans la mise en valeur du bassin conventionnel du lac Tchad. L'intervention des bailleurs de fonds était déjà remarquable depuis 1964 jusqu'à 1989 où les actions de la CBLT ont un caractère essentiellement national.

Dans ce sens, les institutions telles que le FAO, le PNUD et la Banque Mondiale ont financé divers projets dans le domaine de la pêche, de la forêt et de l'hydraulique.

Depuis la reforme de 1989, la CBLT a diversifié ses partenaires et a orienté principalement ses interventions dans des projets à caractère exclusivement régional. C'est le cas notamment du projet d'inversion des tendances à la dégradation des terres et des eaux du bassin dont la phase des projets pilotes est financée pour l'instant par le fonds pour l'environnement mondial (FEM).

La mise en oeuvre du plan d'action stratégique nécessite, quant à lui, des ressources financières conséquentes et à ce titre, il est prévu l'organisation des conférences des donateurs lors desquelles leur appui au processus devra être sollicité.46

B- L'APPORT DES PAYS MEMBRES ET DES ONG

La mise en valeur du bassin conventionnel n'est pas seulement l'affaire des bailleurs de fonds et des institutions internationales, mais également des Etats membres, car cela y va de la prise de conscience des états membres et de toute la population du bassin.

C'est dans ce souci de sauvegarde de l'écosystème du bassin que les Etats membres apportent des appuis en ressources humaines (personnel) et en matériel (local) pour la mise en oeuvre de la plupart des projets dans la région du lac.

Quant aux ONG et association, il est important de noter que leurs apports s'élèvent à 20% du montant des projets. A titre d'exemple, les quatre organisations qui ont bénéficié des subventions du FEM dans la partie Tchadienne de l'ordre de cinq million (5.000.000 F CFA) par association ont apporté une contrepartie (en nature) de 20% du montant soit un million de francs (1.000.000 F CFA). Il s'agit d'une approche qui consiste à impliquer davantage la population locale dans la gestion des ressources naturelles.

Malgré les moyens limités des populations en général et de la CBLT en particulier, cette nouvelle approche a pour mérite de responsabiliser les organisations locales et les habitants du bassin.

CHAPITRE II : LES LIMITES D'ACTIONS DE LA CBLT

ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR

Au regard de l'état actuel de l'environnement dans le bassin conventionnel du lac Tchad, nous pouvons affirmer sans risque de se tromper que la CBLT n'a pas atteint des résultats escomptés. Créée en 1964 pour assurer une gestion rationnelle des eaux du lac Tchad, de son sol et de l'ensemble de son écosystème, la CBLT s'est trouvée confronter à des difficultés d'ordre politique, financière et stratégique.

Bref, ce sont les limites d'actions (section 1) qui n'ont pas permis à la CBLT de rayonner.

Cependant, les solutions et perspectives (section 2) tracées par les chefs d'Etats membres pourront certainement relever le défi du bassin du lac Tchad.

SECTION I : LES LIMITES D'ACTIONS DE LA CBLT

Les lacunes de la convention de 1964 (paragraphe 1) et des contraintes (paragraphe 2) d'ordre naturel, anthropique, financier et matériel ont posé d'énormes difficultés à la CBLT.

PARAGRAPHE 1 : LES LACUNES DE LA CONVENTION DE 1964

L'analyse des lacunes de la convention de 1964 par rapport aux conventions de portée universelle (A) précédera celle des conventions de portée régionale (B).

A-LES LACUNES PAR RAPPORT AUX CONVENTIONS

DE PORTEE UNIVERSELLE

Ces dernières années, les progrès réalisés au niveau international dans le domaine de la gestion intégrée des ressources en eau sont significatives et encourageantes.

Malheureusement, la CBLT qui est l'une des plus anciennes organisations Africaines n'a pas été à mesure de suivre ce rythme, car « les insuffisances observées dans la mise en valeur des ressources en eau du bassin conventionnel du lac résultent du contenu des dispositions de la convention de 1964 »55(*).

Sur le plan international, les premiers instruments qui ont précédé la prise de conscience des problèmes de l'environnement sont essentiellement des conventions ou traités non contraignants. Ce sont des conventions cadre qui se limitent à poser des principes généraux et des orientations pour la protection de l'environnement. Parmi celles-ci, nous pouvons citer à titre d'exemple la déclaration de Stockholm de 1972 sur l'homme et l'environnement, la charte mondiale de la nature de 1982, la convention de Rio de 1992 sur la diversité biologique et l'agenda 21 de 1992.

Ces conventions non contraignantes qui définissent le cadre général de la protection de l'environnement ont joué un rôle de premier plan, car la plupart des conventions qui ont un caractère obligatoire se sont imprégnées d'elles. Elles ont donc été le fondement des conventions ayant une force juridique obligatoire.

Dans le domaine précis de la gestion des ressources en eau, deux conventions d'une importance capitale méritent d'être citées :

- la convention de New York de 1997 : adoptée en Août 1997 à New York, ladite convention dénommée convention sur le droit relatif aux utilisations des cours d'eau à des fins autre que la navigation est une convention qui inclut en particulier le devoir pour les Etats membres parties de veuillez à la protection des écosystèmes, à prévenir les différentes formes de pollution et à protéger l'environnement ;

- la convention d'Helsinki de 1992 : la convention pour la protection et l'utilisation des cours d'eaux transfrontalières et des lacs internationaux a été adoptée à Helsinki le 17 mars 1992. Véritable outil de gestion des eaux partagées, cette convention a pour mérite de consacrer certains principes relatifs à l'utilisation des eaux transfrontalières.

Dans cette logique, les Etats parties se sont engagés de prévenir, de combattre et de réduire la pollution des eaux pouvant produire des effets néfastes dans d'autres pays (principe de gestion raisonnable et équitable), de ne pas transférer la pollution d'un secteur de l'environnement à un autre et enfin les Etats parties s'appuient sur le principe de précaution, le principe de polleur-payeur et la prise en compte des droits des générations futures pour assurer une gestion durable des eaux internationales.

Bien que les instruments juridiques élaborés par la CBLT fassent parties du droit des cours d'eau internationaux qui est d'ailleurs un droit émergent constitué d'une centaine des conventions relatives à la mise en valeur des différents bassin fluviaux à travers le monde, force est de constater que de tous ces instruments, ceux de la CBLT nécessitent une reforme profonde.

Malgré la révision opérée en 1990 par la CBLT, l'imprécision des droits et obligations des Etats membres, le manque des stratégies et surtout des déclarations des principes vaguement énoncés dans la convention de 1964 demeurent des handicaps majeurs pour une gestion concertée et intégrée du bassin conventionnel.

B- LES LACUNES PAR RAPPORT AUX PRINCIPES DE GESTION

DE CERTAINS BASSINS FLUVIAUX REGIONAUX

De tous les mécanismes mis en place pour la gestion concertée des ressources en eau partagées, les cas du Léman et du Rhin constituent des exemples types d'une bonne gestion de l'eau transfrontalière.

Créées respectivement en 1960 et 1968, la commission internationale pour la protection du Léman (CIPEL) et la commission internationale pour la protection du Rhin (CIPR) sont des véritables outils de gestion des eaux partagées.

En effet, contrairement à la convention de la CBLT de 1964, la convention sur le Rhin et celle sur le Léman avaient fixé des objectifs plus globaux et plus ambitieux relatifs à la gestion des bassins. A cette fin, les deux conventions font clairement référence aux grands principes du droit international de l'environnement, à savoir le principe de précaution, le principe d'action préventive, le principe polleur-payeur.

La convention de 1964 ne mentionne aucun de ces principes fondamentaux pour une protection efficace et efficiente de l'écosystème. En outre, il n'y a aucune règle de répartition de l'eau entre les Etats membres, en dehors de celle entre le Cameroun et le Tchad.

Au niveau des structures, outre des secteurs qui sont dirigés soit par un groupe de coordination (Léman), soit par une sous commission technique (Rhin), les deux conventions prévoient des organes beaucoup plus politiques pour l'orientation des actions . Il s'agit du comité plénier (Léman) et des conférences ministérielles.

Au niveau de la CBLT, il n'existe pas un organe politique de ce genre, mais les grandes décisions sont prises lors des sommets des chefs d'Etat des pays membres.

En comparant les trois systèmes, on relève une différence de nature. Cette différence peut s'expliquer par le fait que les pays membres de la CBLT sont des pays en voie de développement, alors que les pays membres du Rhin et du Léman sont des pays développés et disposent les moyens de leurs politiques. C'est pourquoi, une comparaison avec l'organisation des Etats riverains du fleuve Sénégal (OMVS) nous permettra de mieux appréhender la réalité africaine.

Créée en 1972 par le Mali, la Mauritanie et le Sénégal, l'OMVS est une émanation de la volonté commune des chefs d'Etat des pays riverains du fleuve Sénégal. Depuis sa création, l'OMVS a posé plusieurs actions concrètes dont la plus significative est la construction de barrage de Manantali en 1988 et celui de Diama qui sont considérés par les Etats membres comme des biens indivisibles et des objets d'une propriété conjointe.

Cette manière de voir les choses diffère largement au niveau de la CBLT, car les Etats ont tendance à réclamer la propriété des ouvrages réalisés sur leur territoire faisant partie intégrante de la CBLT. Contrairement à celle-ci, l'OMVS a mis en place un directoire avec le conseil et des commissions permanentes des eaux (CPE) qui ont eu en charge la programmation du prélèvement des eaux par les Etats membres.

En plus des préoccupations d'ordre environnemental, l'objectif de l'OMVS consistait également à planifier le développement socio-économique (agroalimentaire, mines, électricité, élevage, sylviculture, etc.). Pour l'OMVS, il ne s'agit pas seulement de gérer l'eau, mais également d'utiliser le fleuve comme l'axe de la recomposition politique du « grand » Etat sahélien qui devait s'unifier sur le territoire de l'ex-puissance coloniale56(*).

De ce qui précède, on peut en déduire que l'engagement et la détermination des pays membres de l'OMVS sont plus affichés et efficaces que ceux des pays membres de la CBLT.

Cependant, les deux organisations sont caractérisées par la pauvreté de leurs pays respectifs d'où le recours à des donateurs pour la réalisation de leurs objectifs.

PARAGRAPHE 2 : LES AUTRES CONTRAINTES

Les contraintes d'ordre naturel et anthropique (A) d'une part et les insuffisances d'ordre financier et matériel (B) d'autre part, ont empêché à la CBLT d'atteindre ses objectifs.

A- LES CONTRAINTES D'ORDRE NATUREL ET ANTHROPIQUE

Le développement du bassin conventionnel du lac Tchad est confronté à deux problèmes : les contraintes naturelles et les contraintes anthropiques.

Concernant les contraintes naturelles, ce sont essentiellement des contraintes qui pèsent sur les ressources en eau du bassin. Il s'agit du régime pluviométrique, de l'hydrologie des rivières et des eaux souterraines.

Si en quelques années le lac Tchad a perdu près de 90% de sa superficie passant de 25.000 km² en 1970 à 2.000 km² en 1990, les causes doivent être recherchées principalement au niveau du changement opéré dans le régime pluviométrique sur l'ensemble du bassin et au profil plat et peu profond du lac.

De manière générale, en Afrique tropicale sèche, les déficits pluviométriques marqués pour une première phase aiguë dans les années 1972 et 1973 n'ont jamais cessé, même s'ils ont varié en extension et en intensité suivant les années57(*).

Cette réalité constatée au niveau de l'Afrique tropicale sèche l'est également dans le bassin du lac Tchad, car les déficits pluviométriques relevés pour la première fois en 1972 demeurent inchangés avec une moyenne annuelle de 210 mm/an.

Ce déficit chronique du régime pluviométrique de la région du lac Tchad affecte négativement l'ensemble du lac et son hydrosystème, à savoir le Chari, le Logone l'Elbeid et la Komadougou-yobé.

En plus des causes d'ordre naturel ci-dessus soulignées, les contraintes d'origine humaine ont davantage compliqué la tâche de la CBLT. Il s'agit de l'exploitation irrationnelle et abusive des ressources en eau en particulier et des ressources naturelles en général. Cette exploitation abusive est due principalement à la croissance démographique, à la construction des barrages pour l'agriculture irriguée, à la surpêche, au surpâturage et aux activités industrielles et minières. Cette situation est donc à l'origine de l'aggravation de la dégradation de l'écosystème du bassin du lac Tchad.

B- LES CONTRAINTES D'ORDRE FINANCIER ET MATERIEL

Depuis sa création en 1964, la CBLT a fonctionné avec très peu de moyen financier et matériel. Pour cette raison, la CBLT était contrainte d'envisager une reforme des structures en 1989 pour minimiser le coût du fonctionnement. C'est dans ce sens qu'elle à supprimer la plupart des divisions techniques (division pêche, division forêt, division génie civil) pour ne maintenir que la division des ressources en eau et la division de la documentation.

Cet état de chose peut s'expliquer par le fait que les pays de la CBLT sont des pays en voie de développement. Malgré l'exploitation du pétrole dans quatre de six pays membres, le revenu par habitant du bassin est en deçà de seuil de pauvreté.

Cette pauvreté chronique ne permet pas aux pays membres de financer eux-mêmes les différents projets. C'est pourquoi, la totalité des projets du bassin sont soumis aux bailleurs pour financement.

Les conditions d'éligibilité, la lourdeur des procédures d'agrément et la lenteur de décaissement au niveau des différents bailleurs de fonds et institutions internationales constituent des freins aux moyens d'actions de la CBLT.

Conscients de l'enjeu du développement du bassin et de la protection de son écosystème, la CBLT et les Etats membres demeurent confiants pour l'avenir du lac Tchad.

SECTION II : LES PERSPECTIVES ET LES SOLUTIONS POUR UNE GESTION

DURABLE DES EAUX DU LAC TCHAD

Face à cette dégradation sans précédant des écosystèmes du bassin conventionnel, les Etats membres ne cessent de multiplier des initiatives pour la sauvegarde de ce patrimoine commun. C'est dans ce sens de sauvegarde qu'ont été mises en place des stratégies à court et long terme (paragraphe 1) pour endiguer les problèmes.

En plus de cette initiative, la révision des textes de la CBLT (paragraphe 2) s'avère nécessaire pour lui permettre d'être à jour.

PARAGRAPHE 1 : LES STRATEGIES A COURT ET A LONG TERME

A court terme, seul le transfert des eaux de l'Oubangui Chari (A) pourra être une solution aux problèmes que connaît le lac Tchad. En plus, la CBLT a ciblé un certain nombre d'actions prioritaires (B) pour son développement durable.

A- LE TRANSFERT DES EAUX DE L'OUBANGUI-CHARI

Les études entreprises sous le couvert du projet RAF/88/02958(*) par le PNUD ainsi que celles menées par l'ORSTOM ont montré que la baisse continue du lac Tchad est due principalement aux changements climatiques et non au pompage d'eau pour l'agriculture irriguée ou pour d'autres utilisations.

Selon une autre étude réalisée par la NASA, si rien n'est fait le lac Tchad disparaîtra d'ici à 20 ans. Au regard de cette alerte, la seule alternative pour augmenter les ressources en eau du bassin Tchadien est celle relative au transfert des eaux de l'Oubangui Chari jusqu'au lac Tchad qui est le seul bassin riche en eau et plus près du bassin du lac Tchad.

Cette solution est celle qui est retenue comme projet prioritaire dans le plan directeur de 1988 pour une gestion rationnelle des ressources naturelles du bassin conventionnel. C'est ainsi qu'un bureau d'étude Italien, dénommé BONIFICA a proposé un canal en pente de 2400 Km² de long qui contournait le Nord-Est du bassin du Congo pour se jeter au lac Tchad. La proposition de BONIFICA prévoit le transfert d'un débit de 3200 Km3/s, le développement de 7 millions d'hectares d'irrigation et la génération de 35 GWh/an d'hydro-électricité.51

Une deuxième étude faite par la compagnie Nationale d'électricité du Niger (NEPA) consiste à aboutir à l'augmentation du débit dans le bassin du lac Tchad en déviant l'eau du fleuve Oubangui. Les débits seront pompés d'un niveau de 250 m3 et envoyés à travers un canal de 100 km.

Après les analyses des deux propositions, la CBLT a retenu celle du NEPA, car estime-t-elle que celle de BONIFICA s'avère très onéreuse.

A l'heure actuelle, le projet est encore à sa phase d'étude de faisabilité qui a coûté une somme de 6.047.260 $ US fiancé à 90 % par le Nigeria.

B-LES ACTIONS PRIORITAIRES POUR UN DEVELOPPEMENT

DURABLE DU BASSIN DU LAC TCHAD

Pour orienter son action future, la CBLT a, en commun accord avec les pays membres et l'apport financier du FEM, élaboré son plan d'action stratégique (PAS). Ce document contient plusieurs actions à long terme dont les plus importantes consistent à :

- créer une dynamique de gestion partagée des ressources en eau avec des mécanismes de coopération et d'intégration intra et inter pays ;

- Mettre en place des réseaux viables de collecte d'information de base pour mieux connaître et suivre les ressources en eau, les écosystèmes et leurs exploitations ;

- Mener des actions sectorielles de base pour la maîtrise de la demande en eau et pour lutter contre la désertification et la perte de la biodiversité ;

- Assurer une prévention et un contrôle des contaminants et préserver les ressources halieutiques ;

- Améliorer les modes d'exploitation des écosystèmes et protéger les plaines d'inondation en relation avec l'aménagement du territoire.

Le plan d'action stratégique et la vision 2025 de la CBLT ont institué un véritable mécanisme de gestion du bassin du lac Tchad. Ce mécanisme renforce nécessairement la gestion concertée et intégrée des ressources du bassin.

La coopération, l'intégration et la responsabilisation sont des éléments qui doivent déterminer la gestion du bassin conventionnel dans l'avenir.

PARAGRAPHE 2 : LA NECESSITE D'UNE REFORME DES TEXTES DE LA

CBLT

Depuis la création de la CBLT en 1964 jusqu'à nos jours, le monde a connu beaucoup de bouleversement et surtout des perturbations d'ordre écologique dans le monde en global et dans le bassin conventionnel en particulier.

Pour permettre donc à la CBLT de suivre le rythme de cette évolution, il est nécessaire de réviser les textes constitutifs de la CBLT qui se caractérisent par leur vétusté. Cette révision doit s'opérer au plan juridique (A) et au plan institutionnel (B).

A- SUR LE PLAN JURIDIQUE

Le système conventionnel du bassin du lac Tchad est constitué de deux textes principaux : la convention de 1964 qui est le texte constitutif et l'accord d'Enugu de 1977 qui complète ladite convention. Malgré une révision en 1990, cette convention ne répond pas aux préoccupations écologiques du moment. Les efforts que les Etats membres, la CBLT et les bailleurs de fonds déploient pour la sauvegarde du lac Tchad doivent se faire principalement dans l'intérêt de l'environnement.

A cet effet, il est absolument nécessaire de réviser la convention de 1964 pour intégrer certains grands principes relatifs à la protection de l'environnement en général et des ressources en eau en particulier. Il s'agit entre autres, du principe de prévention, du principe polleur-payeur, du principe de précaution, du principe d'une gestion raisonnable et équitable.

En outre, la convention doit également préciser les droits et devoirs des Etats membres, car jusqu'aujourd'hui ces droits et devoirs sont vaguement énoncés dans la convention.

Dans l'optique toujours de la sauvegarde du lac Tchad, il est absolument nécessaire que les Etats membres adhèrent à toutes les conventions internationales relatives à la protection de l'environnement d'une part et à la gestion des eaux partagées d'autre part.

B- SUR LE PLAN INSTITUTIONNEL

A la reforme de 1989, la CBLT a dû supprimer certaines divisions pour ne laisser que la division de ressources en eau et transférer la compétence aux Etats membres concernant les autres divisions. Même si cette reforme peut s'expliquer sur le plan financier, dans la pratique il est important que ces divisions techniques soient gérées directement par la CBLT, car la sauvegarde des écosystèmes du bassin ne se résume pas seulement à la gestion des eaux. Le rétablissement de la division des forêts, de la pêche et de l'élevage aura le mérite d'avoir des données et des informations disponibles au niveau de la CBLT et lui permettre de suivre directement l'évolution sans passer par les Etats.

A l'instar des commissions du Rhin et du Léman ou de l'OMVS, il est nécessaire que la CBLT soit dotée d'organe consultatif ou d'organe intermédiaire qui aura pour mission de donner des avis sur certains projets de grandes envergures pouvant avoir d'impacts sur l'environnement.

Conclusion

Au début de ce troisième millénaire, la protection de l'environnement en général et celle des écosystèmes fluviaux et lacustres en particulier demeurent toujours des préoccupations réelles tant sur le plan national qu'international.

Malgré la prise de conscience généralisée des problèmes de l'environnement vers les années 1970 et la prolifération des instruments juridiques de portée universelle et régionale qui l'ont suivis, l'état de la biosphère devient de plus en plus catastrophique : diminution considérable de la biodiversité, l'avancement effréné du désert, détérioration de la couche d'ozone et rareté de l'eau.

Ce tableau macabre de l'état de la nature au niveau mondial reflète à quelques différences près certaines réalités qui se posent au niveau du bassin conventionnel du lac tchad.

En effet, quarante trois années après sa création, la CBLT qui était censée assurer la mise en valeur du bassin conventionnel n'a pu atteindre ses objectifs à cause des politiques de développement inappropriées, d'insuffisances de moyens financiers, matériels et humains, et surtout de l'inadaptabilité de la convention de 1964 aux réalités écologiques actuelles.

Bien que certaines réformes aient été initiées en 1989 et 1990 pour prendre en compte certaines préoccupations du moment, la situation de l'environnement dans le bassin du lac Tchad est alarmante.

Le lac Tchad qui est non seulement le patrimoine commun des six Etats membres, mais également de toute l'humanité est menacé de disparition et sa disparition emportera celle de tout son écosystème qui subit actuellement une grave perturbation.

Face à cette triste réalité, le lac Tchad mérite une attention particulière. Les Etats membres, les bailleurs de fonds et les organisations de protection des bassins versants doivent accourir à son chevet pour le sauver.

D'ailleurs, conscients de cet enjeu, la CBLT et les Etats membres, avec l'appui financier et technique des bailleurs de fonds ont élaboré des nouvelles stratégies pour une gestion concertée et intégrée des eaux du lac. L'essentiel de cette politique est contenu dans le plan d'action stratégique de 1994, le plan directeur de 1988 et la vision 2025 pour une gestion intégrée du bassin fluvial.

Cependant, dans l'immédiat le seul moyen pour sauver le lac Tchad est le transfert des eaux de l'Oubangui Chari vers le lac. Il s'agit d'un projet si ambitieux et porteur d'espoir, mais très coûteux. C'est pourquoi une mobilisation de masse de tous les bailleurs de fonds de la CBLT s'impose pour le financement de ce mega projet.

La sage gestion des ressources en eau du bassin conventionnel nécessite ainsi une redéfinition globale de la politique de l'eau, une sincère coopération entre les Etats membres et une participation plus active des habitants de la région. Cette participation nécessite au préalable une campagne d'information, d'éducation et de communication (IEC) à l'intention de toute la population et de tous les acteurs impliqués dans la gestion du bassin conventionnel du lac Tchad.

ANNEXES

COMMISSION DU BASSIN DU LAC TCHAD

MENT DE BASE

(Révisé)

· Convention et Statut

CONVENTION

ET STATUTS

CONVENTION

La République Fédérale du Cameroun, la République du Niger, la République

Fédérale du Nigeria et la République du Tchad ;

Vu la charte des Nations Unies du 26 juin 1945 ;

Vu la résolution du Conseil Economique et Social de l'Organisation des

Nations Unies relative à la coopération internationale dans le contrôle et la mise en valeur des eaux en particulier n° 417 (XIV) du 2 janvier 1952,

533 (XVIII) du 2 août 1954, 599 (XXXI) du 3 mai 1956 et 675 (XXXV) du 2 mai 1958 ;

Vu la charte de l'Organisation de l'Unité Africaine du 25 mai 1963 ;

RECONNAISSANT le besoin de formuler les principes pour l'utilisation des ressources du Bassin du Lac Tchad à des fins économiques, y compris l'aménagement des eaux ;

CONSIDERANT que les Etats membres de l'Organisation de l'Unité

Africaine ont résolu de coordonner et intensifier leur coopération et leurs efforts pour réaliser une meilleure vie pour les peuples africains ;

CONSIDERANT que les projets rédigés par les Etats membres pour l'utilisation des eaux du Bassin du Lac Tchad étant susceptibles d'affecter son régime et par conséquent son exploitation par les autres Etats membres, il est souhaitable de créer une Commission qui aura pour but de préparer les règlements généraux, d'assurer leur application effective, d'examiner les projets préparés par les Etats membres, de recommander une planification en vue de la réalisation des études et des travaux dans le

Bassin du Tchad, et, en général, de maintenir la liaison entre les Etats membres ;

RESOLUES de conclure une convention afin d'atteindre les objectifs ci-dessus;

SONT CONVENUES de ce qui suit :

Article I : il est crée par la présente Convention une COMMISSION DU

BASSIN DU LAC TCHAD, ci-après appelée « la Commission ».

Article II : Le statut ci-annexé fait partie intégrante de cette convention.

Article III :

1. Cette Convention sera soumise à la ratification des Etats membres ;

2. Les instruments de ratification seront déposés auprès du

Gouvernement du Tchad qui en donnera notification aux autres Etats membres ;

3. Cette convention entrera en vigueur dès réception par le Gouvernement du Tchad du dernier instrument de ratification.

Article IV : Cette Convention, après ratification, sera déposée par le

Gouvernement du Tchad auprès du Secrétariat de l'Organisation de l'Unité

Africaine et enregistrée auprès du Secrétariat de l'Organisation des Nations

Unies.

Article V : Chacun des Etats membres peut dénoncer la présente Convention après l'expiration d'un délai de dix ans à compter de la date de son entrée en vigueur.

La dénonciation sera faite sous la forme d'une notification écrite adressée au

Secrétaire Exécutif de la Commission qui en accusera réception. Elle prendra effet un an après l'accusé de réception, à moins qu'elle n'ait été retirée auparavant. Elle ne portera atteinte, à moins d'accord contraire, aux engagements relatifs à un programme d'études ou des travaux sur lequel l'accord aurait été réalisé avant la dénonciation.

Article VI : La Convention et le statut ci-annexé pourront être révisés sur la demande de deux au moins des Etats membres, adressé par écrit au Secrétariat

Exécutif de la Commission. Un tel projet de révision devra être approuvé par tous les Etats membre, et prendra effet six mois après la date de son adoption.

Article VII : Tout différend concernant l'interprétation ou l'application de la présente Convention qui n'aurait pas été résolu par la Commission, sera soumis à la Commission de Médiation, de Conciliation et d'Arbitrage de l'Organisation de l'Unité Africaine, pour règlement.

Article VIII :

1. Les textes en anglais et français de la présente Convention font également foi.

2. Les langues de travail de la Commission seront si possibles, les langues africaines, l'anglais et le français.

EN FOI DE QUOI, Nous, Chefs d'Etat et de Gouvernement des Etats riverains du Bassin du Tchadien avons signé la présente Convention.

Fait à Fort-Lamy, ce jour du 22 mai 1964.

LA REPUBLIQUE FEDERALE DU CAMEROUN (signé) AHMADOU AHIDJO

LA REPUBLIQUE DU NIGER (signé) HAMANI DIORI

LA REPUBLIQUE FEDERALE DU NIGERIA (signé) ABUBAKAR TAFA BALEWA

LA REPUBLIQUE DU TCHAD (signé) FRANÇOIS TOMBALBAYE

STATUT

CHAPITRE I

PRINCIPES ET DEFINITIONS

Article I : Les Etats membres affirment solennellement leur volonté d'intensifier leur coopération et leurs efforts pour la mise en valeur du Bassin du Tchad tel qu'il est défini à l'article II.

Article II : On entend par Bassin du Tchad la superficie dont les limites sont définies par la carte annexée à la présente Convention.

Article III : Le Bassin du Tchad est ouvert à l'exploitation à tous les Etats membres partis de la Convention, dans le respect des droits souverains de chacun d'entre eux, selon les modalités définies par le présent statut, les révisions ou réglementations ultérieures ou des accords spéciaux.

Article IV : L'exploitation du Bassin et en particulier l'utilisation des eaux superficielles et souterraines s'entend au sens le plus large, et se réfère notamment aux besoins du développement domestique, industriel et agricole, et à la collecte des produits de sa faune et de sa flore.

CHAPITRE II

L'UTILISATION DOMESTIQUE, AGRICOLE

ET INDUSTRIELLE DES EAUX

Article V : Les Etats membres s'engagent à s'abstenir de prendre sans saisir au préalable la Commission, toutes mesures susceptibles d'exercer une influence sensible tant sur l'importance des pertes d'eau que sur la forme de l'hydrogramme et du limnigramme annuel et certaines caractéristiques biologiques de la faune ou de la flore du Bassin.

En particulier, les Etats membres s'engagent à ne procéder sur la portion du

Bassin relevant de leur juridiction à aucun travail d'aménagement hydraulique ou d'aménagement du sol susceptible d'influencer sensiblement le régime des cours d'eau et des nappes du bassin, sans préavis suffisant et consultation préalable de la Commission, pourvu cependant que les Etats membres puissent poursuivre l'exécution des études et projets déjà en cours ou susceptibles d'être lancés ans une période de trois (3) ans à dater de la signature de cette Convention, autant que de tels plans et projets ne modifieront pas dans un sens défavorable le régime des eaux du bassin du Lac Tchad.

Article VI : En vue d'obtenir une coopération aussi parfaite que possible sur les points de l'article V, les Etats membres s'engagent à informer la Commission dès leur phase initiale, de toutes études et tous projets qu'ils se proposeraient de lancer.

CHAPITRE III

NAVIGATION

Article VII : Les Etats membres établiront des règlements communs pour faciliter au maximum la navigation et le transport sur le Lac et les voies navigables du bassin et en assurer la sécurité et le contrôle.

CHAPITRE IV

LA COMMISSION DU BASSIN DU LAC TCHAD

Article VIII

1. L'instance suprême de la Commission est le Sommet des Chefs d'Etat qui se réunit une fois tous les deux ans.1

2. La Commission du Bassin du Lac Tchad est composée de huit

Commissaires, à raison de deux par Etat membre.2

3. La Commission se réunira une fois par an, soit à son siège à N'djamena (ex Fort-Lamy), ou en tout autre lieu qui lui paraîtra convenable.

4. La Commission se réunira exceptionnellement à la demande de deux

Etats membres par lettre conjointe adressée à son Secrétaire Exécutif.

Article IX : La Commission aura les attributions suivantes :

(a) De partager des règlements communs, permettant la pleine application des principes affirmés dans le présent statut et dans la Convention à laquelle il est annexé, et en assurer une application effective ;

(b) De rassembler, d'examiner et de diffuser des informations sur les projets préparés par les Etats membres et recommander une planification de travaux communs et de programmes conjoints de recherches dans le Bassin du Lac Tchad ;

(c) De maintenir la liaison entre les Hautes Parties Contractantes en vue de l'utilisation la plus efficace des eaux du Bassin ;

(d) De suivre l'exécution des études et des travaux dans le Bassin du Lac

Tchad relevant de la présente Convention, et d'en tenir informés les

Etats membres au moins une fois par an, par l'exploitation des comptes rendus systématiques et périodiques que chaque Etat s'engage à lui adresser ;

(e) D'élaborer les règlements communs relatifs à la navigation ;

(f) D'établir les règlements relatifs à son personnel et de veiller à leur application ;

(g) D'examiner les plaintes et de contribuer à la solution de différends ;

(h) De veiller à l'application des prescriptions du présent statut et de la

Convention à laquelle il est annexé.

Article X :

1. La Commission établira son propre règlement intérieur ;

2. La Commission ne peut valablement délibérer qu'en présence d'au moins un représentant de chaque Etat ;

3. Les décisions de la Commission seront prises à l'unanimité des Etats membres.

Article XI : Le règlement commun et les recommandations de la Commission seront transmis aux Gouvernements des Etats membres pour décisions.

Article XII :

1. La Commission proposera, à la majorité, aux Chefs d'Etat qui le nommeront, un Secrétaire Exécutif, parmi les candidats proposés des

Etats membres ;

2. Chaque Etat membre aura le droit de présenter un candidat pour le poste de Secrétaire Exécutif ;

3. Les fonctions du Secrétaire Exécutif ont une durée de trois ans renouvelable. Les conditions de son affectation sont définies par le statut du personnel ;

4. Le Secrétaire Exécutif sera assisté d'un Secrétaire Exécutif Adjoint nommé dans les mêmes conditions que le Secrétaire Exécutif.

Article XIII : Le Secrétaire Exécutif sera assisté dans ses fonctions d'un

Secrétaire Exécutif Adjoint et du personnel que déterminera la Commission.

Article XIV :

1. Le Secrétaire Exécutif assisté d'un Secrétaire Exécutif Adjoint dirige le personnel ; il exerce les pouvoirs et remplit les fonctions que déterminera la Commission. Il est responsable devant elle.

2. Le Secrétaire Exécutif Adjoint assurera sous l'autorité du Secrétaire

Exécutif la coordination de l'administration générale et des projets de développement. Il assurera également la préparation du budget, l'élaboration du programme annuel de travail et le Secrétariat des travaux de la Commission.

Article XV : La Commission peut, par un vote à la majorité, suspendre le

Secrétaire Exécutif ou le Secrétaire Exécutif Adjoint de leurs fonctions. Si cette décision est approuvée par les Chefs d'Etat et de Gouvernement, le Secrétaire

Exécutif ou le Secrétaire Exécutif Adjoint seront révoqués.

Article XVI :

1. La Commission aura tous les égards, le Statut d'un Organisme

International ;

2. Les Commissaires, le Secrétaire Exécutif et le Secrétaire Exécutif

Adjoint jouiront des privilèges et immunités diplomatiques accordés par les Etats membres.

Le personnel de la Commission jouira des privilèges et immunités habituellement accordés aux fonctionnaires d'un rang équivalent de l'Organisation de l'Unité Africaine.

REGLEMENT

INTERIEUR

En application de l'article X.1 du statut annexé à la Convention relative à la mise en valeur du Bassin du Lac Tchad signée à Fort-Lamy (actuel N'djamena) le 22 mai 1964, par le Président de la République Fédérale du Cameroun, le Président de la République du Niger, le Premier Ministre de la République Fédérale du Nigeria et le Président de la République du Tchad, la Commission du Bassin du Lac Tchad, adopte le règlement intérieur suivant :

Article premier : La Commission se réunit en session ordinaire une fois par an, en octobre/novembre, à son siège à N'djamena, ex-Fort-Lamy ou en tout autre lieu décidé d'un commun accord. Elle peut être réunie en session extraordinaire à tout moment, à la demande de deux ou plusieurs Etats membres, par lettre conjointe adressée au Secrétaire Exécutif.

Article 2 : Le Secrétaire Exécutif de la Commission envoie, au moins 60 jours à l'avance, sauf cas d'urgence, des invitations à chaque session, indiquant la date de la réunion et le lieu (lorsqu'il aura été décidé qu'elle se tiendrait ailleurs qu'au siège de la Commission) ainsi que l'ordre du jour provisoire accompagné de copies des documents de base y afférents.

Article 3 : La présidence de la Commission est assurée à tour de rôle suivant l'ordre alphabétique des Etats (en français) pour une durée de deux ans par chaque Etat membre en la personne de l'un de ses Commissaires.

En cas d'empêchement du Président en exercice, c'est l'autre Commissaire du même Etat qui assure la Présidence.

Article 4 : Les réunions sont privées, à moins que la Commission n'en décide autrement. Des experts nationaux ou internationaux, permanents ou occasionnels, peuvent participer aux réunions comme conseillers ou observateurs.

Article 5 : Le président convoque les séances et en prononce l'ouverture et la clôture. Il peut suspendre la séance à la demande de l'un des Commissaires. Il en dirige les débats et il proclame, séance tenante, les décisions et le résultat éventuel des votes. Il assure en général l'application du présent règlement.

Article 6 : Les langues africaines, si possible et l'anglais sont les langues de travail de la Commission.

Article 7 : Le premier point de l'ordre du jour provisoire d'une session après la nomination du Président, est l'adoption de l'ordre du jour.

Article 8 : Au début de chaque session le Secrétaire Exécutif reçoit au nom de la Commission les pleins pouvoirs des nouveaux Commissaires. Il présente à la Commission un rapport sur le programme de travail du Secrétariat pendant la période qui va de la session précédente à la session en cours.

Article 9 : A la session annuelle de la Commission, le Secrétaire Exécutif lui soumet un programme de travail et un budget correspondant pour l'année suivante.

Article 10 : Le Secrétariat établit le compte-rendu analytique des séances de la Commission en français et en anglais, et le fait parvenir aussitôt que possible aux Commissaires ainsi qu'aux organisations internationales ou étrangères qui ont participé aux séances.

Si les Commissaires n'ont pu donner leur approbation au texte du compte-rendu pendant la session, ils ont huit semaines, à compter du jour de la remise ou de l'expédition du document, pour faire parvenir au Secrétariat leurs éventuelles observations. Passé ce délai, le Secrétaire Exécutif peut considérer le texte proposé comme accepté par les délégations.

Le Président en exercice est saisi de toute contestation au sujet des modifications ; sa décision est définitive.

Article 11 : Dans l'intervalle des sessions, les tâches du Secrétariat sont les suivantes :

- Préparer et organiser les réunions de la Commission ;

- Entretenir la correspondance courante avec les délégations des Etats membres et éventuellement avec le département ministériel ou l'organisme qui aura été désigné dans chaque Etat membre comme correspondant habituel du Secrétariat de la Commission ;

- Informer les Etats membres et les organisations internationales ou étrangères intéressées des résultats des travaux en cours, ainsi que de l'opinion exprimée par les Gouvernements des Etats membres ;

- Assurer la garde des documents dans les archives de la Commission ;

- Tenir la comptabilité générale de la Commission, avec le concours d'un fonctionnaire spécialisé et préparer un projet de budget pour l'année suivante;

- D'une façon générale, accomplir tous autres travaux dont la

Commission peut avoir besoin.

Article 12 : A la réception des projets d'études, le Secrétariat assurera leur distribution aussitôt que possible aux Commissaires et aux Ministères appropriés des Etats Membres. Au cours de la prochaine réunion, ordinaire ou extraordinaire, la Commission examinera ces documents.

Article 13 : En application de l'article XVI des Statuts de la Commission du

Bassin du Lac Tchad, le Secrétaire Exécutif présentera à la Commission lors de sa session ordinaire (l'année financière coïncidera avec l'année civile) un budget à deux volets détaillé comme suit :

1. un volet recettes et dépenses pour le fonctionnement du Secrétariat qui comptera :

a) Salaire du personnel ;

b) Equipement et entretien nécessaire à un fonctionnement efficace du Secrétariat ;

c) Transports et voyages ;

d) Frais de séjour des Commissaires ;

e) Frais de réception ;

f) Toutes autres dépenses nécessaires pour le fonctionnement efficace du Secrétariat.

2. Un volet recettes et dépenses pour études communes et élaboration des projets qui comportera :

a) Equipement et entretien ;

b) Transport et voyages ;

c) Salaire du personnel ;

d) Toutes autres dépenses nécessaires pour une conduite efficace

des études communes et l'élaboration des projets.

Article 14 :

a) Le Secrétaire Exécutif est responsable de la gestion financière de la Commission ;

b) Si la somme allouée à un article du budget est épuisé, le

Secrétaire Exécutif a le droit en cas de nécessité, d'autoriser jusqu'à concurrence de 20% du montant alloué à l'article donné du budget, d'effectuer la dépense au compte des économies qui se sont présentées à d'autres articles ;

c) Le comptable doit tenir le détail des comptes de tous paiement set recettes d'argent ;

d) Le compte de la Commission sera tenu à une banque agréée et tous chèques tirés d compte devront être signés par le Secrétaire

Exécutif ou le Secrétaire Exécutif Adjoint (dans la limite des délégations qui lui seront imparties) et le comptable e) Les Commissaires auront le droit d'accès aux relevés bancaires de la Commission, et toute information relative au compte de vraleur être fournie sur demande.

Article 15 : Le Secrétaire Exécutif présentera à la Commission un relevé annuel des transactions financières, certifié par des Inspecteurs financiers ou

Vérificateurs de comptes indépendants et nommés par la Commission au début de chaque année budgétaire.

Article 16 : La Commission peut modifier toutes dispositions du présent règlement ou en suspendre l'application.

BIBLIOGRAPHIE

I- OUVRAGES GENERAUX

Boisson Laurence et Desgagné R, protection internationale de l'environnement, Pedone, Paris, 1998.

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II- OUVRAGES SPECIALISES

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III- THESES ET MEMOIRES

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IV- CONVENTIONS INTERNATIONALES ET REGIONALES

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V- RAPPORTS, ETUDES, REVUES ET SITES INTERNETS

CBLT, projet de lutte contre la peste bovine, 1983.

CBLT, rapport de la réunion des experts de la mise place d'une force commune de sécurité dans le bassin du lac Tchad 1994.

CBLT, 26e session de la commission du bassin du Lac Tchad, Maroua, septembre 1991.

CBLT, 26e session de la commission du bassin du Lac Tchad, Maroua, septembre 1991.

Conférence sur l'eau et l'environnement, Paris, 1998

CTFT, étude de la commercialisation et des marchés du poisson du lac Tchad, 1965.

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IEMVT, rapport préliminaire sur l'élevage dans les pays de la région de CBLT, 1979.

ONU, expérience de mise en valeur et de gestion des fleuves et lacs internationaux, 1993.

ORSTOM, première contribution à la connaissance de la pêche dans le bassin du lac Tchad, 1962.

PNUD, étude en vue du développement du bassin du lac Tchad, 1980.

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PRODEPECHE, rapport d'évaluation, février 2005.

Rapport 2006 WWF sur l'eau douce, 2006.

Site www. unesco.org

Site www. Fao.org

TABLE DES MATIERS

DEDICACE III

REMERCIEMENTS IV

ABREVIATIONS ET SIGLES V

INTRODUCTION 1

PARTIE I : LES DONNEES DE BASE DE LA GESTION DES RESSOURCES EN 4

EAU DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL DU LAC TCHAD 4

CHAPITRE I : LE CADRE JURIDIQUE ET SOCIO- ECONOMIQUE 6

SECTION I : LE CADRE JURIDIQUE 6

PARAGRAPHE 1 : LA CONVENTION DE 1964 7

A- LES OBJECTIFS DE LA CONVENTION DE 1964 7

B- L'EVOLUTION DE LA CONVENTION DE 1964 8

PARAGRAPHE 2 : LES ORGANES DE LA CBLT 10

A- LA CONFERENCE DES CHEFS D'ETAT 10

B- LE SECRETARIAT EXECUTIF DE LA COMMISSION ET LES 12

ORGANES TECHNIQUES 12

SECTION II : LE CADRE SOCIO-ECONOMIQUE 14

PARAGRAPHE 1 : L'ORGANISATION SOCIALE 15

A-LA POPULATION 15

B- LES PRATIQUES COUTUMIERES 16

PARAGRAPHE 2 : L'ORGANISATION ECONOMIQUE 19

A- L'AGRICULTURE, L'ELEVAGE ET LA PECHE 19

B-LE COMMERCE ET LES AUTRES ATOUTS 25

CHAPITRE II : LE REGIME JURIDIQUE DE LA PROTECTION DE 27

L'ENVIRONNEMEN DANS LE BASSIN CONVENTIONNEL 27

DU LAC TCHAD 27

SECTION I : LA NECESSITE D'UNE PROTECTION ACCRUE DES 27

ECOSYSTEMES LACUSTRES 27

PARAGRAPHE 1 : LA PROTECTION DE LA BIODIVERSITE 28

A-LA FAUNE 28

B- LA FLORE 30

PARAGRAPHE 2 : LA PROTECTION DES AUTRES COMPOSANTES DE 32

L'ENVIRONNEMENT 32

A-L'AIR ET L'ATMOSPHERE 32

B-LE SOL ET LES ZONES HUMIDES 34

SECTION II: LA PROTECTION DES EAUX DU LAC TCHAD 35

PARAGRAPHE 1 : L'EXISTENCE D'UNE VOLONTE COMMUNE. 36

A - UNE GESTION CONCERTEE DES EAUX DU LAC TCHAD 36

B- LES OBLIGATIONS ET LES DEVOIRS DES ETATS MEMBRES 37

PARAGRAPHE 2 : LA MISE EN OEUVRE DE LA VOLONTE COMMUNE DES 39

ETATS MEMBRES DE LA CBLT 39

A-SUR LE PLAN ENVIRONNEMENTAL 39

B- SUR LE PLAN SECURITAIRE 40

PARTIE II : LES ACTIONS DE LA CBLT 42

CHAPITRE I : LES REALISATIONS DE LA CBLT 44

SECTION I : LES DIFFERENTS PROJETS REALISES 44

PARAGRAPHE 1 : AU NIVEAU REGIONAL 44

A-PROJET PLANIFICATION ET GESTION DES RESSOURCES 44

EN EAU DU BASSIN DU LAC TCHAD 44

B- PROJET SUIVI ET GESTION DES RESSOURCES 45

EN EAU SOUTERRAINES 45

PARAGRAPHE 2 : AU NIVEAU LOCAL 46

A- AU CAMEROUN ET AU TCHAD 46

B- AU NIGERIA ET AU NIGER 48

SECTION II : LE PROJET D'INVERSION DES TENDANCES A LA 48

DEGRADATION DES TERRES ET DES EAUX 48

DU BASSIN DU LAC TCHAD 48

PARAGRAPHE 1 : LES ACTIVITES MENEES 49

A-L'ETUDE DIAGNOSTIQUE DE LA DEGRADATION DE 49

L'ENVIRONNEMENT DU BASSIN DU LAC 49

B- LES COMPOSANTES DU PROJET 50

PARAGRAPHE 2 : LE FINANCEMENT 51

A- LA CONTRIBUTION DES BAILLEURS DE FONDS 51

B- L'APPORT DES PAYS MEMBRES ET DES ONG 52

CHAPITRE II : LES LIMITES D'ACTIONS DE LA CBLT 54

ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR 54

SECTION I : LES LIMITES D'ACTIONS DE LA CBLT 54

PARAGRAPHE 1 : LES LACUNES DE LA CONVENTION DE 1964 54

A-LES LACUNES PAR RAPPORT AUX CONVENTIONS 54

DE PORTEE UNIVERSELLE 54

B- LES LACUNES PAR RAPPORT AUX PRINCIPES DE GESTION 56

DE CERTAINS BASSINS FLUVIAUX REGIONAUX 56

PARAGRAPHE 2 : LES AUTRES CONTRAINTES 58

A- LES CONTRAINTES D'ORDRE NATUREL ET ANTHROPIQUE 58

B- LES CONTRAINTES D'ORDRE FINANCIER ET MATERIEL 59

SECTION II : LES PERSPECTIVES ET LES SOLUTIONS POUR UNE GESTION 60

DURABLE DES EAUX DU LAC TCHAD 60

PARAGRAPHE 1 : LES STRATEGIES A COURT ET LONG TERME 60

A- LE TRANSFERT DES EAUX DE L'OUBANGUI-CHARI 61

B-LES ACTIONS PRIORITAIRES POUR UN DEVELOPPEMENT 62

DURABLE DU BASSIN DU LAC TCHAD 62

PARAGRAPHE 2 : LA NECESSITE D'UNE REFORME DES TEXTES DE LA 62

CBLT 62

A- SUR LE PLAN JURIDIQUE 63

B- SUR LE PLAN INSTITUTIONNEL 64

Conclusion 65

* 1 Dr Vogel, le lac Tchad ou tshad, 1854, p.459.

* 2 Christian Bouquet, insulaires et riverains du lac Tchad, tome 1, l'Harmattan, Paris, 1991, P.38.

* 3 Abdoulaye Mbodou Mbami, mémoire de magistrature, Lomé, 2005, p.26.

* 4 Maurice Kamto, droit de l'environnement en Afrique, Edicef, 1996, p.326.

* 5 Voir le rapport 2006 du wwf sur l'eau douce.

* 6 FAO, le régime juridique des ressources en eau internationale, 1981, p.3.

* 7 Yokabdjim Mandigui, la coopération entre les quatre Etats riverains du lac Tchad, thèse de doctorat en droit,

Paris, 1988, p.24.

* 8Yokabdjim mandigui, op.cit, p.55.

* 9 Voir l'article 9 des statuts de la convention de 1964 créant la commission du bassin

du lac Tchad (CBLT).

* 10 CBLT, 26eme session de la commission du bassin conventionnel, Maroua, du 11 au 25 septembre 1991.

* 11 Voir l'article 4 des statuts de la CBLT

* 12 Voir l'article 5 de l'accord de 1977 sur la réglementation commune de la faune et de la flore.

* 13 François constantain, régionalisme international et pouvoirs africains, revue française de sciences

Politiques, 1976, p.80.

* 14 Mandigui Yokabdjim, la coopération entre les quatre Etats riverains du lac Tchad, thèse de doctorat en droit

Paris, 1988, p.84.

* 15 Voir l'article 9 de la convention de la CBLT révisée en 1990.

* 16 Banté Mangaral, exploitation commune du lac Tchad : un exemple de coopération régionale africaine

pour le développement, DEA en relations internationales, Dijon, 1980, p.69.

* 17 Mangnant J.P, identité communautaire dans les Etats tchadiens précoloniaux, recueil

d'articles 1990-1991, p.2.

* 18 Bouillé robert, les coutumes familiales au Kanem, thèse de doctorat en droit, 1937, p.288

* 19 Ibid, p.289.

* 20 ONU, expérience de mise en valeur et de gestion des fleuves et lacs internationaux, 1993, p.202.

* 21 William J.C, les avatars d'un libéralisme planifié, politique africaine, juin 1985, p.44.

* 22 Voir le site www.unesco.org.

* 23 CBLT, projet de lutte contre la peste bovine, 1983.

* 24 IEMVT, rapport préliminaire sur l'élevage dans les pays de la région de la CBLT, 1979, p.7.

* 25 ORSTOM, première contribution à la connaissance de la pêche dans le bassin du lac Tchad, Paris, 1962, p.15.

* 26 Zakaria ousmane, le bassin conventionnel du lac Tchad : écosystème en danger et qui nécessite d'être

sauvé urgemment, CBLT, Abuja, 2004, p.6.

* 27 Yokabdjim Madjiguim, op.cit., p.285.

* 28 FAO, le régime juridique des ressources en eau internationales, Rome, 1984.

* 29 Le petit Larousse illustré, 100e édition, 2005. 

* 30 Voir l'article 5 de l'accord sur la réglementation commune de la faune et de la flore de 1977.

* 31 Le petit Larousse, année 2004

* 32 Narcisse Ogoussan, étude de la codification de l'environnement au Bénin, mémoire de maîtrise en

droit, 2000, p.20.

* 33 Voir le rapport d'évaluation du PRODEPECHE, février 2005, p.25.

* 34 Abdoulaye Mbodou Mbami, op.cit, p.42.

* 35 Demangeot jean, les milieux naturels du globe, Masson, Paris, 1990, p.176.

* 36 Ibid, p.25.

* 37 Voir l'article 37 de la loi N° 014/PR/98 définissant les principes généraux de la protection de

l'environnement, P.43.

* 38 Abdoulaye M. M. op.cit., P.52.

* 39 Dictionnaire le Robert & clé, avril 2003, P.957.

* 40 Maurice Kamto, op.cit, P.236.

* 41 Christian bouquet, insulaires du lac Tchad, tome 1, l'Harmattan, P.123.

* 42 Voir l'article 1 du mémorandum, P.25.

* 43 Voir le site www.unep.org.

* 44 Conférence sur l'eau et l'environnement, Paris, mars 1998.

* 45 Voir l'article 5 de la convention de 1964.

* 46 Djatelbei nasson, problématique juridique de la gestion des hydrosystèmes partagés, mémoire de

DEA en droit, limoges, 2004, P.42.

* 47 Abdoulaye Mbami M, les défis du droit international de l'environnement, devoir DIE, 2007, P.5.

* 48 IDI, procédure d'adoption et de mise en oeuvre des règles en matière d'environnement, 1997.

* 49 Voir le rapport de la réunion des experts de la mise en place d'une force commune de sécurité dans le bassin du lac Tchad, 1994, P.5.

* 50 Voir l'article 9 de la convention de 1964.

* 51 Tam Lambert, contribution à la réunion constitutive du réseau des organismes des bassins

frontaliers, novembre 2002.

* 52 La CBLT, ses dix sept premières années, Maroua, 1981, P.39.

* 53 Kindler Janus, étude diagnostique de la dégradation de l'environnement du bassin du

Lac Tchad, 1990, p.2.

* 54 Voir le rapport sur l'état d'avancement du projet CBLT/FEM, 2006, p.3

* 55 Djatelbei Nasson, op.cit., p.12.

* 56 Guy Meublat, la nouvelle politique de l'eau, p.440.

* 57 Voir le plan d'action stratégique, mai 1998, p.27.

* 58 Voir le projet RAF/88/029.






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