WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La norme conventionnelle en droit international de l'environnement : "l'exemple de la diversité biologique"

( Télécharger le fichier original )
par Aviol FLEURANT
Université de Limoges / Faculté de droit et des sciences économiques de Limoges - Master 2 Droit international et comparé de l'environnement 2008
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

UNIVERSITE DE LIMOGES

FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE LIMOGES

PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE

AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

MASTER DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE L'ENVIRONNEMENT

Formation à distance, Campus Numérique « ENVIDROIT »

LA NORME CONVENTIONNELLE EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT : L'EXEMPLE DE LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

Mémoire présenté par Aviol FLEURANT,

Sous la Direction de M. le Professeur Aenza KONATE

AOUT / 2009

UNIVERSITE DE LIMOGES

FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE LIMOGES

PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE

AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

MASTER DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE L'ENVIRONNEMENT

Formation à distance, Campus Numérique « ENVIDROIT »

LA NORME CONVENTIONNELLE EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT : L'EXEMPLE DE LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

Mémoire présenté par Aviol FLEURANT,

Sous la Direction de M. le Professeur Aenza KONATE

AOUT / 2009

SOMMAIRE

4 INTRODUCTION

9 Première Partie : ASSISES DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

10 CHAPITRE I : PRINCIPES APPLICABLES A LA BIODIVERSITE

10 Section 1 : Approches fondatrices du droit international de la biodiversité

18 Section 2 : La structuration du droit de la biodiversité, les principes généraux

24 CHAPITRE II: UN CADRE NORMATIF HETEROGENE ASSORTI D'OBLIGATIONS MOLLES, GENERALES ET PEU CONTRAIGNANTES

24 Section 1 : Les Instruments de conservation des ressources de la biosphère et de protection de la nature

34 Section 2 : La Convention sur la Diversité Biologique

44 2ème PARTIE : CONSOLIDATION DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

45 CHAPITRE I : FONDEMENTS DU RENFORCEMENT DE LA NORME

45 Section 1 : Nécessité d'une norme régulatrice efficace

53 Section 2 : Les avantages de l'affermissement de la norme

58 CHAPITRE II : VERS UN REGIME JURIDIQUE, INSTITUTIONNEL ET FINANCIER EFFICACE

58 Section 1 : Renforcement du régime juridique et juridictionnel existant

65 Section 2 : Renforcement des mécanismes institutionnels et financiers

INTRODUCTION

L'érosion de la biodiversité s'inscrit, selon la doctrine, «dans l'histoire de l'évolution de la biosphère»1(*). Elle s'explique notamment par les phénomènes de dégradation des sols, de transformation des paysages, de fragmentation des habitats, de disparition des espèces, par l'industrialisation, l'exploitation sans frein des mines et carrières, les pollutions, le réchauffement climatique et autres processus affectant l'environnement. Il est rapporté qu'avant la naissance de l'homo sapiens l'humanité a connu cinq vagues d'extinction importante des espèces2(*). Aussi, avec l'apparition de celui-ci le sort de la diversité biologique s'est-il aggravé puisque les activités du fait de l'homme coïncidant avec l'essor de la science, de la technologie et du commerce, ont censé compromettre le droit des générations futures à un environnement de qualité.

La prise en compte de l'environnement dans les politiques économiques n'a pas semblé constituer une préoccupation pour l'humanité. Traitant de l'époque préindustrielle, J. DORST a relaté que poursuivant la satisfaction de leurs besoins primaires les sociétés ont profondément bouleversé les milieux naturels entrainant l'assèchement des zones humides, le déboisement massif, la raréfaction de nombreuses espèces d'animaux sauvages3(*). En revanche, ces dommages ont un tant soit peu suscité une prise de conscience puisque se sont éclos les premiers rayons du droit de la nature avec la parution des premières conventions. Néanmoins, ce droit, pris dans l'engrenage d'un anthropocentrisme attenant au droit et à la liberté de détruire, a prôné le dogme cartésien de l'homme maitre et possesseur de la nature4(*).

L'ère industrielle aura été encore moins indulgente envers la biodiversité. Car, si l'essor de la science a favorisé l'intensification de la production, ces progrès ont pourtant occasionné une transformation non rationnelle de la nature. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, écrit Sadeleer, les rapports entre les sociétés humaines et le monde naturel allaient connaitre une rupture complète5(*). Les déprédations commises au nom du progrès furent telles que les Etats durent se doter de normes de protection. Ainsi, des règles vinrent à organiser la pêche, à protéger les phoques à fourrure6(*), les oiseaux utiles7(*), à réglementer la chasse à baleine8(*). Mais, ces normes n'ont pas su assurer une protection efficace des espèces de la faune sauvage.

Elles ne sauraient aucunement constituer un cadre de protection efficace des espèces puisqu'elles recèlent une finalité plus économique qu'écologique et sont coulées dans une approche utilitariste. Elles n'ont visé à protéger les espèces que dans la mesure où ces dernières ont pu faire le bien-être de l'homme. La nature n'a eu tout au plus qu'une valeur instrumentale ou utilitaire au service de l'homme9(*), écrit un doctrinaire. Entretemps, la civilisation causa de graves dommages à la biodiversité tandis que, pour sa part, l'humanité édicta des normes en dehors de toutes éthiques environnementales. Quel devrait-être donc le degré d'efficacité de la norme avec l'anthropocentrisme et l'utilitarisme à la base de l'instrument conventionnel ?

On a connu dans le temps une norme de protection très faible. Face à ce problème d'importance un mouvement d'opinion, sous l'impulsion de l'UICN, s'est développé en faveur d'une nouvelle politique de conservation de la nature. Celle-ci aura cessé d'être ce réservoir de ressources pour l'individu et ce cadre incontrôlé de la croissance économique. On aura connu le passage d'une philosophie ``utilitariste'' à une approche ``conservationniste'' et ``d'une conception anthropocentrique de la protection des ressources biologiques à une approche plus écocentrique''10(*). Cette approche, reposant sur une éthique bio-centrique, promeut la conservation des espèces en tant qu'obligation de l'Etat. On aura assisté à l'adoption d'un ensemble de règles sur la conservation de la biodiversité. Néanmoins, véhiculant le concept d'une nature «sanctuaire»11(*),  ces normes furent tout aussi limitées et insusceptibles d'efficacité.

La norme conventionnelle a, pour ainsi dire, souffert d'un manque d'énergies. Il a fallu attendre 1970 pour voir émerger des principes capables de l'alimenter. Ces principes ont été cette fois fondés sur des approches intégrées où conservation de la nature et développement économique sont d'importance égale. Ainsi, pour préserver le patrimoine, prévenir l'irréversible, garantir le droit des générations futures à un environnement sain, il a été établi des normes morales de comportement envers la nature. Autant de principes - prônés par Stockholm, Rio, Action 21, l'UICN - qui s'inscrivent dans la logique du développement durable. Cependant, ils relèvent d'actes concertés non conventionnels12(*) et ne sont que pure expression de la soft Law. Cet état de fait n'a pour vertu que de rendre incertain l'avenir de la diversité biologique.

Ce fut logiquement à cause de l'érosion alarmante de la biodiversité et pour pallier la mollesse des principes généraux que les Etats ont adopté les conventions mondiales de protection de la nature, notamment celles de l'Unesco, de Ramsar, de Bonn, la Cites. Pourtant, ces traités recèlent une approche sectorielle tandis que le développement durable requiert une approche plutôt globale. En revanche, ce fut pour combler l'insuffisance du cadre juridique défini et pour restructurer ce régime fragmenté en conventions sectorielles que la société internationale a adopté la Convention sur la Diversité Biologique. Toutefois, les attentes n'ont pas été comblées, car tous ces instruments n'ont constitué qu'un cadre normatif hétérogène, sans articulation réelle, assorti d'obligations molles, générales et peu contraignantes. D'où le problème de l'effectivité du droit international de l'environnement.

Le droit international de la Biodiversité tel que conçu semble davantage relever de la prospective. Or, la société internationale entend poursuivre concrètement les objectifs de conservation et d'utilisation durable des ressources de la biosphère. Comment atteindre ces objectifs si s'agissant des obligations conventionnelles, les Etats ne sont tenus que dans la mesure du possible et selon qu'il conviendra ? Comment donc enrayer la crise sans bornes de la biodiversité si le régime juridique y relatif s'inscrit dans un cadre programmatoire ?

Comment en outre s'assurer de la réalisation des objectifs de conservation, d'utilisation durable de la biodiversité si, en cas de conflit normatif, la norme régulatrice est généralement évincée par des règles transversales, notamment celles régissant le commerce international et la propriété intellectuelle ? Comment finalement s'assurer de la mise en oeuvre de la norme conventionnelle si le réseau institutionnel tel que conçu est complexe et les mécanismes financiers lourds et inefficients ?

Ces considérations conduisent au constat d'un cadre normatif insuffisant, d'un régime institutionnel dense, de mécanismes financiers déficients, en conséquence, au constat du faible degré de normativité des principes régissant le droit international de la biodiversité. Cela explique la pertinence de notre thème de recherche, son importance considérable en ce carrefour crucial du droit international général où nombre de normes se croisent, s'épaulent, s'affrontent et se broient. Nous allons démontrer en quoi le fait de l'inefficacité et l'ineffectivité de la norme conventionnelle pourra causer des dommages graves, voire irréversibles, à la biodiversité. C'est justement pour démêler l'écheveau d'une telle problématique que nous avons conçu, élaboré ce travail. D'où le titre de notre mémoire : « La norme conventionnelle en Droit international de l'environnement : l'exemple de la diversité biologique ».

Nos hypothèses sont les suivantes :

1) La refonte du cadre juridique, le renforcement des mécanismes institutionnels et la redéfinition de l'assistance financière aux pays en développement permettront la mise en oeuvre réelle de la norme relative à la biodiversité.

2) L'effectivité de la norme conventionnelle impliquera une conservation réelle et une utilisation durable de la biodiversité et de ses éléments.

Ce mémoire obéit à un plan en deux parties. Celles-ci comprennent respectivement deux chapitres. Chaque chapitre est divisé en deux sections et ces dernières subdivisées en sous-sections.

La première partie s'inscrit dans un cadre à la fois analytique et critique. Nous traiterons des assises de la norme relative à la diversité biologique. Dans le premier chapitre, nous présenterons les approches fondatrices et les principes généraux qui structurent le droit de la biodiversité. Il sera question pour nous dans le second chapitre d'analyser les instruments de conservation des ressources de la biosphère et de protection de la nature. La Convention sur la Diversité Biologique sera analysée dans tous ses aspects. Nous présenterons le tableau d'un cadre normatif hétérogène, postulant des obligations molles, générales et peu contraignantes, donc, insusceptibles de permettre la réalisation des objectifs de conservation rationnelle et d'utilisation durable de la diversité biologique.

La seconde se veut par contre constructive. Il va falloir chercher à pallier les insuffisances du cadre normatif. Ainsi, nous opterons pour la consolidation de la norme conventionnelle relative à la matière. Au premier chapitre, nous évoquerons la nécessité d'élaborer une norme régulatrice efficace, un instrument fédérateur, une norme capable d'harmoniser les règles éparses du droit international de la biodiversité, une norme ayant valeur obligatoire, au caractère sanctionnateur. Le second chapitre est celui de la mise en oeuvre de la norme. Ce cadre repose sur l'adoption d'un régime juridique fort, l'institution de mécanismes de recours, la restructuration du réseau institutionnel et la redéfinition des mécanismes financiers.

Cela aura justifié nos hypothèses de départ. En effet, il est plausible que l'institution d'un régime juridique, institutionnel et financier efficace aura permis la mise en oeuvre réelle de la norme. Aussi, l'effectivité de l'instrument conventionnel aura-t-elle favorisé la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité.

1ère PARTIE : ASSISES DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

La crise de la diversité biologique, caractérisée entre autres par la surexploitation des ressources de la biosphère, a suscité une prise de conscience au point que les Etats ont conçu, élaboré puis adopté des conventions internationales régissant la protection des espèces, des écosystèmes, des paysages, en fait, relatives à la conservation et à l'utilisation durable de la biodiversité. A donc été créé un droit de la protection de la nature dont les racines sont notamment ancrées dans le principe du « développement durable ». Sur ce principe, entre autres, repose un corpus juridique générateur de normes susceptibles de freiner la perte de la biodiversité. A cette fin ont été édictées des règles capables de pallier la mollesse des prescrits déclaratoires. D'où, les Conventions de RAMSAR et de l'UNESCO portant respectivement sur la conservation des zones humides et la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel ; des normes fondées sur l'éthique écocentrique définissant un régime juridique articulé autour de la conservation des espèces migratrices de la vie sauvage (Convention de Bonn), axé sur le commerce international des espèces de la faune et de la flore sauvages menacées d'extinction (CITES). Aussi, l'humanité a-t-elle vu naitre la Convention sur la Diversité Biologique dont l'objet s'articule autour de la conservation, l'utilisation durable, la gestion, la restauration de la diversité et de ses éléments13(*). Ces instruments, outre les Déclarations, les Résolutions, les Agendas et les Principes qui les complètent, forment les assises du droit international de la biodiversité.

Cette branche du droit international de l'environnement repose néanmoins sur des approches et des principes qui lui sont propres (Chapitre I). Aussi, s'agit-il d'un cadre normatif hétérogène en ce que les instruments préexistant présentent des difficultés d'agencement avec la Convention sur la Diversité Biologique (Chapitre II).

CHAPITRE I : PRINCIPES APPLICABLES A LA BIODIVERSITE

Le droit international de la biodiversité recèle certaines approches dont l'appréciation ne parait totale que si l'on remonte aux processus de négociations ayant entouré la formulation de la Convention sur la Diversité biologique. Ces négociations officialisaient un dialogue Nord-Sud autour de la biodiversité, soit comme « patrimoine commun ou préoccupation commune de l'humanité » ou comme relevant exclusivement de la souveraineté des Etats. De la conciliation des divergences naquit le principe des «responsabilités communes mais différenciées ». Aussi, constatera-t-on l'émergence de certaines approches de conservation (section 1) et la résurgence de certains principes généraux incontournables du droit international de l'environnement (section 2).

Section 1 : Approches fondatrices du droit international de la biodiversité

Le concept « approches fondatrices » diffère des « approches conceptuelles de la conservation de la biodiversité14(*) ». Celles-ci renvoient aux mesures adéquates de conservation suivant qu'il s'agit d'espèces, d'écosystèmes, d'habitats, de paysages tandis que les premières que nous qualifions de «fondatrices du droit de la biodiversité» ont été les approches dominantes à l'origine de la Convention sur la Diversité Biologique. D'entrée de jeu nous verrons la biodiversité comme « préoccupation commune de l'humanité ». Cette approche, le verra-t-on, n'occultera pas celle relative à la souveraineté des Etats sur leurs ressources mais préconise une coopération entre Etats et un mode d'exploitation de la diversité suivant une philosophie écocentrique où conservation de la nature et développement économique sont d'importance égale.

A. Biodiversité, préoccupation commune de l'humanité

Aux termes de la Convention sur la Diversité Biologique, la biodiversité, est « une préoccupation commune de l'humanité »15(*). Ceci s'inscrit alors comme un principe applicable au droit international de la biodiversité en ce sens que loin d'être du domaine exclusif et réservé de l'Etat la biodiversité intéresse au plus haut point la société internationale. D'ailleurs, faut-il se rappeler qu'à l'origine l'esquisse de la Convention élaborée avait stipulé que la diversité biologique relevait du «patrimoine commun de l'humanité»16(*). Ainsi, elle serait accessible à tous, y compris les communautés scientifiques et industrielles, indépendamment du lieu de sa situation17(*). Tout compte fait, cette approche dite conservationniste prônée par les pays développés se heurtera à l'opposition des pays en développement qui y voient un obstacle à leur souveraineté sur leurs ressources naturelles. D'où un enjeu majeur qui divisait l'humanité en ce qui a trait à la conservation, l'utilisation, la gestion, la restauration de la diversité et de ses éléments.

B. Souveraineté étatique sur les ressources naturelles

C'est au nom de ce principe - découlant d'une approche utilitariste fondée pratiquement sur le droit des peuples à disposer librement d'eux-mêmes - que la communauté internationale, lors des négociations ayant entouré la formulation de la Convention, a été contrainte d'abandonner la notion de «Patrimoine commun de l'humanité». En effet, selon ARBOUR et LAVALLEE,  « les pays du Sud n'ont pas voulu avec raison du concept de patrimoine commun, lequel aurait garanti aux sociétés privées un libre accès à leurs ressources pour qu'elles puissent développer ensuite de nouvelles variétés végétales qu'elles se seraient empressées de protéger juridiquement par des brevets... »18(*). J. Rifkin a clairement démontré les enjeux d'une absence de souveraineté de l'Etat sur ses ressources naturelles en expliquant que cela permettrait aux industries agroalimentaires, pharmaceutiques et pétrolières d'accéder librement au patrimoine biologique d'un Etat donné, d'isoler un gène et de le breveter19(*). Fort de ces balises, il est plausible que la souveraineté étatique sur les ressources - expression du droit à l'autodétermination - est tout à fait spécifique au droit international de la biodiversité et ne saurait souffrir de limitation que dans la mesure où l'exercice de ce droit est susceptible de causer des dommages à la diversité.

C. L'approche de coopération Nord-Sud

Si la Convention sur la Diversité Biologique, aux termes des articles 3 et 15, reconnait aux Etats des droits souverains sur leurs ressources, il n'en demeure pas moins que les pays du Sud - riches en ressources - ne disposent pas de moyens technologiques pour exploiter, conserver et utiliser de manière durable ces ressources. Ils doivent logiquement solliciter l'intervention du Nord industrialisé dans ce domaine «réservé» qui ne rime pas avec la notion de patrimoine commun. Cet état de fait ouvre la voie à des négociations entre pays en développement et pays développés autour de l'utilisation durable de la biodiversité. A ce propos, ARBOUR et LAVALLEE écrivent « dans la mesure où la diversité biologique est plus riche dans les pays du Sud que dans les pays du Nord, l'intérêt bien compris des pays en développement est de faire financer par les pays riches les surcoûts liés à la conservation de la biodiversité, puis de tirer un avantage financier de l'exploitation effective de leurs ressources génétiques ... »20(*). L'ensemble de ces considérations nous amène à comprendre qu'il s'opère en ce domaine, certainement sous un angle mercantile, une coopération entre le Nord et le Sud autour de l'organisation d'un marché des ressources génétiques. Néanmoins, l'accès à ces ressources n'est permis aux pays développés que dans la mesure où ils financent les surcoûts que nécessite la conservation et dans la mesure où ils facilitent le transfert des biotechnologies aux pays en développement. D'où, le donnant-donnant entre le Nord et le Sud21(*) que nous qualifions ici d'approche de coopération pour l'exploitation et la conservation de la biodiversité.

D. Responsabilités communes mais différenciées

Le 15ème considérant du préambule, combiné à l'article 20, établit sans conteste que le principe de «responsabilités communes mais différenciées» est l'un des fondements de la Convention sur la Diversité Biologique. Toujours, cela s'inscrit-il dans le dialogue Nord Sud en matière de conservation de la biodiversité en ce que les obligations des pays en développement ne peuvent être celles des pays développés. Les premiers doivent permettre l'accès à leurs ressources génétiques. Les seconds financent et font le transfert des biotechnologies. A ce propos, l'article 20 de la Convention sur la Biodiversité édicte « les pays en développement ne pourront s'acquitter effectivement des obligations qui leur incombent en vertu de la convention que dans la mesure où les pays développés s'acquitteront des leurs s'agissant du financement et de transfert de technologies »22(*)

Si en réalité les Etats ont pu définir une stratégie de protection globale de la diversité biologique, la « conservation » de celle-ci, le verrez-vous, aura impliqué une pluralité d'approches suivant qu'il s'agit d'espèces, d'écosystèmes et d'habitats, de paysages et d'activités à risques pour la biodiversité.

E. Les approches de conservation

Du dispositif conventionnel ont émergé des « approches de conservation ». Celles-ci semblent justifier la nécessité de conserver la biodiversité dans ses formes génétique, spécifique et écosystémique. Néanmoins, malgré son statut juridique, la conservation de la biodiversité parait s'inscrire dans un cadre normatif non contraignant, du moins, programmatoire. D'abord, le droit de la nature dont les prémices remontent à la convention de 1902 sur la protection des oiseaux utiles à l'agriculture s'inscrit à l'origine dans un cadre économique bien plus qu'écologique et a semblé dégager un objectif utilitaire23(*). Ensuite, les déclarations de Stockholm, de Rio, préconisant la conservation de la biodiversité sont des instruments déclaratoires sans force obligatoire. De plus, si la Convention sur la Diversité Biologique est un instrument ayant valeur normative, il n'en demeure pas moins que les Etats ne sont tenus que d'une obligation de moyen. Enfin, le caractère coutumier d'un tel principe de conservation en droit international de l'environnement est difficile à prouver24(*). Ainsi, s'avère-t-il plus sage de parler d'« approches » au lieu de « principes » de conservation vu leur faible degré de normativité.

De ces approches découle une pluralité d'obligations : l'exploitation des ressources biologiques marines sans compromettre leur viabilité, la lutte contre certains phénomènes néfastes pour la biodiversité25(*). Ces approches de conservation26(*), rappelons-le, diffèrent suivant qu'il s'agit d'espèces, d'écosystèmes, de paysages.

1. L'approche par espèce

L'insertion de cette approche, notamment dans les conventions relatives à la protection de la nature, aura permis à la communauté internationale de contrer les politiques utilitariste et anthropocentrique au nom desquelles l'homme, exerçant un certain droit de détruire, privait la planète d'espèces rares, migratrices ou vulnérables. Cette approche préconise l'édiction de mesures adéquates portant sur la conservation et la gestion durable des espèces à partir de listes établies. Elle est d'une importance capitale en ce qu'elle concourt à la protection de toute espèce menacée et prévient efficacement son déclin, voire son extinction définitive. De plus, la protection d'une espèce utile, tels les animaux pollinisateurs, est susceptible de protéger nombre d'écosystèmes. Ainsi, s'agit-il d'une approche intégrée puisqu'elle implique la préservation d'habitats dans lesquels des populations d'espèces vivent à l'état naturel. Aussi, constitue-t-elle la toile de fond des stratégies mondiales de la conservation de l'UICN. Néanmoins, l'approche par espèce présente certaines limites. Car, outre la difficulté de s'étendre à certains groupes d'espèces dans le cadre d'une protection directe, elle semble ignorer les exigences écologiques de certaines espèces. Elle ne sous-tend à l'endroit des Etats, débiteurs de responsabilités en matière de conservation de la biodiversité, qu'une obligation de comportement : « Chaque partie contractante, selon qu'il conviendra, adopte des mesures... »27(*) stipule l'article 9 de la Convention sur la Diversité Biologique. En fait, l'approche par espèce n'a pas su intégrer un large dispositif conventionnel ou un dispositif contraignant, ce qui peut compromettre l'efficacité de la norme conventionnelle.

2. L'approche par écosystème et par habitat

L'approche par écosystème et par habitat va au-delà des stratégies sectorielles de conservation privilégiant la création de sanctuaires. Elle préconise une politique de conservation capable de sauvegarder les processus écologiques et les écosystèmes, le maintien de la biodiversité et l'utilisation durable des espèces et des écosystèmes28(*). Aux termes de cette approche, la conservation et l'utilisation durable des écosystèmes, telles les forêts, sous-tend la conservation des espèces et des habitats qui y sont inféodés. Elle établit avec netteté l'interdépendance entre les parties d'un écosystème et souligne avec force que l'affectation d'une composante du système peut avoir des conséquences sur le système dans son ensemble. C'est pourquoi le régime juridique qui la soutient inclut à la fois des normes régissant la protection du patrimoine culturel et naturel, la protection des zones humides d'importance internationale, la conservation des habitats, la recherche scientifique et la chasse, le commerce international des espèces menacées d'extinction, la conservation de la biodiversité. Bref, coulée dans un moule conventionnel relativement grand, l'approche par écosystème et par habitat traduit la portée d'un consensus universel autour d'une approche intégrée où conservation de la nature et développement sont d'importance égale et fondamentale. En revanche, sa valeur obligatoire demeure controversée puisque le système conventionnel y afférent définit des engagements plutôt souples.

3. L'approche par paysage

Les caractéristiques écologiques associées aux formes visuelles du paysage sont susceptibles de jouer un rôle prépondérant pour la conservation de la biodiversité. Ainsi, en vertu de leurs richesses, les paysages consolident-ils l'équilibre écologique de la Terre en demeurant un patrimoine naturel et culturel à léguer aux générations futures. Partant, cette approche conceptuelle de conservation, admettant toute démarche préventive allant d'études d'impact environnementales aux audits écologiques, s'inscrit dans un cadre de protection des paysages en ce qu'elle favorise la gestion des processus écologiques (migrations) et des activités humaines (réseaux de transports) et en ce que cette protection s'étend aux régions, aux assemblages climatiquement homogènes de paysages29(*). L'approche par paysage intègre respectivement les approches par espèce et par écosystème dans l'optique d'une conservation et une utilisation durable de la biodiversité dans tous ses aspects. Elle doit sa juridicité notamment à la Convention de l'Unesco de 1972.

4. L'approche par processus affectant la biodiversité

La conservation de la biodiversité serait un leurre si, en plus de la protection des espèces, des écosystèmes et des espaces, on ne cherchait pas à lutter contre les pollutions et nuisances, la désertification, les changements climatiques et tout autre processus anthropique affectant l'écologie. Cette approche constitue le socle de la réglementation des phénomènes affectant la biodiversité. Elle sous-tend le principe d'intégration des préoccupations environnementales dans les politiques de l'Etat.

L'intégration des approches de conservation dans une seule stratégie renvoie au concept de « réseau écologique ». Cette notion repose sur des théories explicatives du comportement des espèces en milieu fragmenté30(*). Néanmoins, aussi utiles que ces approches puissent être à la biodiversité, la protection de celle-ci ne peut gagner en efficacité que par la prise en compte des mesures spécifiques de conservation.

F. Les mesures spécifiques de conservation

Différentes des approches conceptuelles de conservation, ces mesures spécifiques sont des obligations en matière de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité. Elles sont qualifiées de mesures in situ et ex situ en ce qu'elles visent la conservation des éléments de la biodiversité dans et en dehors de leur milieu naturel.

1. Mesures de conservation in situ

Il s'agit globalement d'une obligation de conservation des éléments de la biodiversité dans leur milieu naturel. Selon l'article 2 de la Convention sur la Diversité Biologique, ces mesures de conservation s'étendent aux écosystèmes, aux habitats naturels. Elles visent la reconstitution de populations viables d'espèces dans leur milieu naturel et, s'agissant des espèces domestiquées ou cultivées, dans le milieu où se sont développés leurs caractères distinctifs31(*). Elles incluent la remise en état d'écosystèmes endommagés et facilitent la reconstitution des espèces menacées grâce à la mise en oeuvre de plans de gestion. Elles impliquent certaines stratégies de conservation.

Les Stratégies de conservation in situ, telles que définies par la Convention sur la Diversité Biologique, reposent notamment sur le choix, la création, la gestion d'aires protégées, d'une part, et sur l'adoption de mesures de conservation en dehors de ces zones, d'autre part. Ainsi, les Etats sont-ils conviés à concevoir, élaborer et mettre en oeuvre des plans directeurs portant sur la création d'aires protégées, appelées réserve naturelle, arboretum, zone de protection spéciale, réserve forestière, jardin zoologique.

De ces mesures de conservation découlent d'autres obligations à l'égard des Etats. Il leur incombe le devoir d'utiliser de manière durable les lieux limitrophes aux aires protégées, de concevoir des normes juridiques appropriées en vue d'une protection spéciale des espèces menacées. De plus, ils ont la charge de la réglementation des activités à risques affectant la biodiversité. En outre, ils sont tenus d'un devoir de renseignement sur l'impact défavorable des OGM avant leur éventuelle introduction sur le territoire d'un Etat32(*). Enfin, ils sont débiteurs d'une obligation de coopération dans l'optique d'un support financier aux fins de conservation.

2. Mesures de conservation ex situ

La conservation des ressources génétiques et des espèces menacées d'extinction, bref, des éléments de la biodiversité en dehors de leur milieu naturel, est l'axe fondamental autour duquel s'articulent les mesures de conservation ex situ. Elles impliquent, à des fins de reproduction, la création de banques de gènes, de semences, de sperme, d'ovules. Elles s'étendent aux assemblages de micro-organismes en culture ainsi qu'aux espèces végétales et animales. Néanmoins, selon Nicolas de Sadeleer et Charles-Hubert Born, les mesures de conservation ex situ souffrent d'une limitation en ce qu'elles ne favorisent pas la conservation des écosystèmes dans leur ensemble33(*). Dans cette optique, et pour pallier cette insuffisance, le législateur conventionnel, aux termes de l'article 9 b, c, d, assigne aux Etats l'obligation de procéder à des installations ex situ, de prendre des mesures allant de la reconstitution, de la régénération des espèces à leur réintroduction dans leur milieu naturel, d'éviter - par faute de gestion de la collecte des ressources dans les habitats naturels - que soient exposés les écosystèmes et les groupes d'espèces in situ34(*). Enfin, les Etats sont tenus de coopérer pour l'allocation d'une aide financière dans le cadre de la mise en oeuvre de ces mesures notamment dans les pays en développement.

Si certaines mesures - dont le maintien des populations d'espèces à des niveaux correspondant à leurs exigences écologiques - semblent générer des obligations de résultat écologique, la norme qui les définit ne stipule pourtant qu'une obligation de moyens. A ce propos, les articles 8 et 9 de la Convention sur la Diversité Biologique portant sur les mesures in et ex situ édictent : « Chaque partie contractante, dans la mesure du possible (...) adopte des mesures... ». Ceci nous amène à comprendre que la norme conventionnelle qui sous-tend la conservation de la biodiversité est, depuis sa racine, dénuée de valeur positive. Paradoxalement, les principes applicables à la biodiversité sont l'essence de la norme relative à la matière.

Section 2 : La structuration du droit de la biodiversité, les Principes généraux

Le terme « principes généraux » ne renvoie pas ici aux « principes généraux de droit acceptés par les nations civilisées » mais à certains « principes directeurs » du droit international de l'environnement qui, également, forment le cadre juridique du droit international de la biodiversité. Ce sont en fait des principes qu'on qualifie de fondamentaux « sans lesquels le droit international de l'environnement serait sevré de sa dynamique évolutive intrinsèque»35(*). Les Etats sont en effet tenus des obligations de prévention du dommage transfrontière, de précaution pour éviter l'irréversible lorsqu'à cheval sur l'incertitude et l'innovation, l'humanité entrevoit les retombées de technologies mal maitrisées. Ils doivent coopérer en vue d'une utilisation rationnelle de la diversité, ce, selon une approche axée sur le développement durable.

A. Le principe de prévention

Le principe de prévention implique la connaissance d'un risque prévisible et certain et exige de la part des Etats la prise de mesures capables d'empêcher la survenance d'atteintes graves, voire irréversibles, à l'environnement. Il anticipe l'occurrence du dommage à la diversité et se veut complémentaire à tout dispositif curatif. Mieux vaut prévenir que guérir, rappelle Agathe Van Lang, en ce que « la possibilité d'une indemnisation parait bien dérisoire au regard de l'extinction définitive des espèces, de la contamination des sols pour des millénaires ou de l'assèchement total des mers intérieures ... »36(*).

Le principe de prévention sous-tend des considérations particulières. Il traduit une limitation au droit de l'Etat d'exploiter ses ressources selon sa politique d'environnement. Celui-ci a le devoir de faire en sorte que les activités exercées sur son territoire ou sous son contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans les régions ne relevant d'aucune juridiction nationale37(*). Ensuite, il rappelle le concept de Patrimoine commun puisqu'il renvoie à la préservation du patrimoine biologique en quelque lieu où il se trouve. Il renforce l'approche faisant de la biodiversité une préoccupation commune de l'humanité. Ainsi, la convention, en son préambule, stipule : la « conservation de la biodiversité est une préoccupation commune de l'humanité »38(*). Enfin, la prévention réfère à la théorie de l'équité intergénérationnelle selon laquelle « chaque génération est gardienne et usagère des ressources de la Terre et doit transmettre celle-ci dans un état qui n'est pas inférieur à celui dans lequel elle l'a reçue »39(*).

Ce principe doit sa juridicité au droit de Stockholm et de Rio. Son effectivité a été consacrée par une sentence arbitrale dans l'affaire de la fonderie de Trail40(*) où le Canada s'est vu imputé la responsabilité de dommage transfrontière pour avoir ignoré le principe de prévention et celui de l'utilisation non dommageable du territoire. Ainsi, le droit international conditionne-t-il la réalisation d'ouvrage - certes justifié au plan économique - à des études d'impact préalables aux vertus anticipatrices, dans l'optique d'une prise en compte réelle de l'environnement. En fait, par ce principe déjà consacré par la coutume comme norme obligatoire, la souveraineté territoriale de l'Etat souffre d'une certaine limitation au profit d'un intérêt supérieur, celui de l'humanité.

B. Le principe de précaution

Selon Van Lang «la logique de précaution prend en compte des menaces potentielles, incertaines, hypothétiques, toutes celles à propos desquelles aucune preuve tangible ne permet d'affirmer qu'elles se concrétiseront»41(*). Pour ainsi dire, en raison des lacunes que recèlent les connaissances actuelles en matière de biodiversité, l'absence de certitude scientifique - précaution oblige - ne saurait empêcher la prise de mesures susceptibles de prévenir un dommage grave et irréversible au patrimoine génétique, spécifique et écologique de la Terre. L'illustration de ce principe se fait avec éloquence dans la Directive du Conseil des Communautés européennes interdisant l'importation de viande provenant d'animaux auxquels ont été administrées des hormones de croissance. L'Europe, en effet, dans l'affaire du boeuf aux hormones, soutenait que « le manque de connaissances scientifiques sur le risque du cancer n'était pas une raison suffisante pour ne pas prendre des mesures de précaution42(*).

L'approche de précaution, consacrée par le principe 15 de Rio, a aujourd'hui rang de norme conventionnelle à valeur obligatoire puisqu'il figure dans plusieurs conventions internationales, notamment dans les traités de lutte contre les processus et activités à risque pour la biodiversité (pollution, destruction physique, eutrophisation, dissémination d'OGM, désertification). ARBOUR Jean Maurice, à ce propos, écrit : « le principe de précaution a été à l'origine de la négociation de la Convention sur la Protection de la couche d'ozone, alors qu'on n'avait pas encore la preuve scientifique irréfutable des liens entre le chlore et la destruction de l'ozone stratosphérique »43(*). Aussi, figure-t-il respectivement dans la Convention cadre sur les changements climatiques, la Convention de Bamako de 1991 interdisant l'importation de déchets dangereux en Afrique, la Convention sur la Diversité Biologique, le Protocole de Cartagena. Par ailleurs, aux termes du Protocole de Barcelone sur la mer Méditerranée, il ne se pose pas de problème quant à son applicabilité immédiate. Toutefois, le juge international tarde à lui reconnaitre son statut de règle de droit international coutumier.

C. Le principe de coopération

Il s'agit surtout d'un « devoir de coopération » impliquant pour les Etats la double obligation de coopérer en vue de la protection de l'environnement et de rendre effectives certaines obligations conventionnelles susceptibles de prévenir d'éventuels dommages à la diversité biologique. Ce devoir de coopération est inhérent à la conservation et à l'utilisation durable de la diversité biologique et de ses éléments. Il permet la conservation des ressources partagées : espèces migratrices, cours d'eaux internationaux. Ce principe s'avère important pour lutter contre les risques liés aux biotechnologies, à la fabrication de substances dangereuses, bref, des risques liés à des activités dangereuses44(*). Ce principe doit sa juridicité au droit de Stockholm, principe 24. Il a été consacré par la Convention sur la Diversité Biologique en son article 5. Aussi, cette obligation de coopération a-t-elle été proclamée par toute une panoplie de conventions de portée régionale ou globale, ce qui semble traduire un consensus universel autour de sa reconnaissance. De plus, le Tribunal International du droit de la mer l'a expressément consacrée aux termes de son ordonnance du 3 décembre 2001 dans l'affaire de l'usine MOX opposant l'Irlande au Royaume Uni, ce qui pour plus d'un tend à lui conférer le statut d'une « coutume instantanée »45(*). Par ailleurs, le devoir de coopération a su interpeller les Etats dans le cadre d'une utilisation rationnelle et équitable de leurs ressources, ce, dans l'optique d'un développement durable.

D. Le principe du développement durable

L'approche du développement durable est la toile de fond du droit international de la biodiversité. Elle sous-tend un développement selon un mode de croissance économique qui respecte les limites écologiques de la Planète et qui ne met pas en danger ses ressources biologiques46(*). Partant, c'est avec raison que Sadeleer écrit : «l'impact potentiel de ce principe pour le droit de la biodiversité est potentiellement considérable, en ce qu'il fédère l'ensemble des dispositions préconisant l'utilisation durable ou rationnelle de la diversité et de ses éléments »47(*). Consacré par Rio, par l'Agenda 21 et par un ensemble d'instruments conventionnels, le principe du développement durable justifie la défaillance des approches anthropocentriques faisant de l'homme le maitre de la nature. Car, comme le préconise la Convention sur la Diversité Biologique, en son article 2, il s'avère impérieux pour l'humanité « d'utiliser les éléments de la diversité biologique d'une manière et à un rythme qui n'entrainent pas leur appauvrissement à long terme et sauvegardent ainsi leur potentiel pour satisfaire les besoins et les aspirations des générations présentes et futures »48(*). Ainsi, repose-t-il sur les principes d'utilisation durable et équitable des ressources et d''équité intergénérationnelle. En fait, Il promeut l'approche de l'égalité des espèces face à la vie.

E. Le principe du pollueur-payeur et de la responsabilité pour dommage écologique

Il nous a malheureusement été donné de constater l'effacement quasi absolu du principe pollueur-payeur et celui de la responsabilité pour dommage écologique dans le corpus conceptuel et normatif du droit international de la biodiversité. Le premier, chargeant le pollueur d'assumer les coûts externes causés par sa pollution49(*), n'y intervient que de manière transversale et dans des domaines connexes à la diversité biologique, tels les systèmes normatifs portant réglementation des processus affectant la biodiversité. Ne semble, à cet effet, y faire référence que la convention OSPAR instituant un régime de protection pour l'Atlantique du Nord-est contre les activités à risques pour le milieu marin50(*), pollutions d'origine tellurique, immersions, incinérations, etc.... Le second, impliquant généralement l'existence d'un fait internationalement illicite, n'a aucune consécration normative, encore moins coutumière, en droit international de la biodiversité. Car, s'il est vrai que le droit de Stockholm et celui de Rio, assises du droit de la diversité biologique, s'accordent à reconnaitre le principe de la responsabilité étatique en droit international, il est tout aussi sans conteste, d'une part, que ce système déclaratoire relève de la soft Law, d'autre part, aucune juridiction internationale ou nationale n'a encore sanctionné la responsabilité des Etats pour des dommages causés à la biodiversité51(*). En fait, la Convention sur la Diversité Biologique n'assigne pratiquement aux Etats aucune obligation de réparation des dommages causés à la diversité.

En somme, il nous a été donné d'exposer dans ce chapitre les approches fondatrices du droit international de la biodiversité ainsi que les principes généraux structurant cette branche du droit international de l'environnement. En fait, du choc des approches utilitariste et conservationniste, liées aux disparités entre pays en développement et pays développés, a jailli la nécessité d'un dialogue entre Etats, ce, dans le cadre d'une politique inhérente à la conservation de la diversité biologique et de ses éléments. Aussi, a-t-on pu remarquer que certains principes incontournables du droit international de l'environnement forment le corpus juridique du droit de la biodiversité. Et si ce droit doit son originalité et sa spécificité à l'émergence de l'approche de conservation, pierre d'angle de tout le système, ladite approche, socle des mesures de conservation in et ex situ et fondement même de la norme conventionnelle, ne s'inscrit que dans le cadre d'une obligation de moyen, ce qui fait présumer l'inefficience du cadre juridique. Qui plus est, l'absence du principe pollueur-payeur enlève au droit de la biodiversité tout caractère sanctionnateur. Qu'en est-il en conséquence de l'effectivité de la norme conventionnelle relative à la matière ?

CHAPITRE II: UN CADRE NORMATIF HETEROGENE, ASSORTI D'OBLIGATIONS

MOLLES, GENERALES ET PEU CONTRAIGNANTES

Ce cadre normatif repose essentiellement sur les instruments de soft Law, les traités de protection de la nature, les conventions relatives à la conservation de la diversité biologique. Les premiers - comprenant notamment les instruments déclaratoires - sont assortis d'obligations molles et forment la base du droit international de l'environnement. Les seconds - se rapportant à la vie sauvage - définissent un régime particulier de conservation des espèces, des habitats, des écosystèmes. Certains remettent en question l'utilitarisme où la conservation des ressources a été subordonnée aux besoins de l'homme. Ils promeuvent pour la plupart des approches intégrées s'inscrivant dans une dynamique de préservation de la biodiversité et de la conservation des ressources vivantes dans l'optique du développement durable. Ils sont assortis d'obligations générales et peu concrètes. Les derniers - dont la Convention sur Diversité Biologique - traitent de la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité et de ses éléments. Ces instruments forment cependant un cadre normatif hétérogène, sans articulation réelle. Il va être question dans le cadre de ce chapitre d'une analyse des instruments de conservation des ressources, de protection de la nature (section 1) et de la Convention sur la Diversité Biologique (section 2).

Section 1 : Les Instruments de conservation des ressources de la biosphère et de protection de la nature

Le cadre juridique de la conservation des ressources repose entre autres sur les instruments de soft Law - Déclarations, Agendas, Chartes, Stratégies (A) - et sur les traités de protection de la nature dont ceux relatifs à la conservation des paysages et des habitats (Conventions de l'Unesco et de Ramsar), ceux se rapportant à la conservation des espèces (Convention de Bonn, Système du Traité sur l'Antarctique) et ceux se rapportant au commerce international des espèces (CITES) (B).

A. Les instruments de soft Law

La Déclaration de Stockholm, les stratégies mondiales de la conservation, l'Agenda 21, la Charte mondiale de la nature, sont des instruments de soft Law, sans portée juridique réelle, en ce sens que leurs postulats n'ont aucune valeur obligatoire à l'égard des Etats signataires. Ils sont l'équivalent d'actes concertés non conventionnels52(*) à la base d'un double consensus scientifique et politique sur la nécessité de conserver la biodiversité. Ils jouent un rôle essentiel dans le processus de création de la norme conventionnelle et participent de la mise en oeuvre d'une politique efficace au profit de la diversité biologique.

1. La Déclaration de Stockholm

La Déclaration de Stockholm de 1972 a su alimenter de valeur la norme conventionnelle en matière de biodiversité. Ses principes 2, 3 et 21 définissent respectivement l'obligation de conserver les ressources naturelles, la responsabilité de l'homme dans la sauvegarde de la nature et une gestion écologiquement viable des ressources. Le principe 2 postule que « les ressources naturelles doivent être préservés dans l'intérêt des générations présentes et futures (...)»53(*). En outre, en raison des menaces et des processus affectant la biodiversité, la Déclaration, en son principe 3, assigne à l'homme « la responsabilité particulière dans la sauvegarde et la sage gestion du patrimoine constitué par la flore et la faune sauvages et leur habitat (...) »54(*). Enfin, le principe 21 de ladite déclaration tout en consacrant la souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles impute à ceux-ci « le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale »55(*). En fait, la Déclaration de Stockholm soutient un tant soit peu la norme conventionnelle relative à la biodiversité.

2. La Déclaration de Rio de 1992

La Déclaration de Rio consacre l'interdépendance entre les notions « environnement » et « développement » et démontre que de leur juste équilibre il résulte à coup sûr un modèle de développement capable de « répondre aux besoins actuels sans compromettre l'aptitude des générations futures à répondre aux leurs »56(*). Il préconise le développement durable. Ainsi, admet-il un modèle de développement fondé sur un parfait équilibre entre le progrès économique et la protection de l'environnement, un modèle de développement insusceptible de compromettre la protection des espèces, des écosystèmes et des paysages, la conservation, la restauration et l'utilisation de la biodiversité et de ses éléments. Par ailleurs, si la Déclaration, au terme de ses vingt sept principes n'a pas semblé assigner le devoir de conserver la diversité biologique, il n'en demeure pas moins que les mesures qu'elle prescrit, telles les études d'impact, sont de taille à prévenir des dommages graves à la biodiversité et à ses éléments. Néanmoins, la Déclaration de Rio est de nature transversale et fortement anthropocentrique57(*). Fallait-il bien la compléter par Action 21.

.

3. l'Agenda 21

D'aucuns disent de l'Agenda 21 un inventaire complet des problèmes environnementaux et des stratégies susceptibles de les solutionner58(*). D'autres y voient un instrument de lutte contre les processus affectant la biodiversité (pollutions, changements climatiques, transformation des terres et des habitats, désertification) et un plan d'action favorable au développement durable. En fait, outre ces aspects, Action 21 exprime un consensus universel pour la mise en place d'une stratégie mondiale de conservation de la biodiversité. Celle-ci s'articule autour de « la conservation des espèces et des écosystèmes, la lutte contre les causes d'érosion de la biodiversité, l'application d'approches intégrées dans la gestion du territoire (...)59(*)». Action 21 préconise entre autres objectifs le développement de stratégies nationales de conservation de la biodiversité et l'intégration de celles-ci dans des plans et politiques publiques de développement. La grande particularité de cet instrument tient au fait qu'il prescrit la démocratie citoyenne en tant qu'impératif pour assurer la protection des écosystèmes. Ainsi, par l'exercice des droits à l'information, à la participation et à la justice, cet instrument, quoique non contraignant, accorde-t-il à la norme conventionnelle une intégration certaine en droit interne et une certaine efficacité.

4. La Charte mondiale pour la nature

Relevant certes du domaine de la soft Law, la Charte mondiale de la nature, texte fondateur, aura pourtant prescrit l'approche écocentrique comme celle devant plus tard imprégner la norme conventionnelle relative à la conservation de la biodiversité. Elle rejette les conceptions utilitaristes où la raison d'être des espèces, des écosystèmes et des paysages fut subordonnée aux besoins de l'être humain. Elle préconise l'égalité des espèces face à la vie puisqu'elle postule clairement que « toute forme de vie est unique et mérite d'être respectée quelle que soit son utilité pour l'homme (...) ». Aussi, proclame-t-elle : « la nature sera respectée et ses processus essentiels ne seront pas altérés ». Elle se veut un code moral d'action servant à guider l'humanité dans ses équations scientifiques et dans ses spéculations économiques, ce, selon un modèle de développement compatible avec un environnement de qualité et qui ne soit pas un legs empoisonné pour les générations futures. La Charte édicte la mise en oeuvre de principes allant de l'intégration des exigences de conservation dans des plans et programmes nationaux à l'adoption de législations nationales en matière de diversité biologique. Sa particularité tient au fait qu'elle aura inspiré le législateur international dans la conception et l'élaboration de la norme conventionnelle de protection de la nature et de conservation de la biodiversité

5. Les Stratégies mondiales de la conservation

Elles impliquent « la conservation des ressources vivantes au service du développement durable » et sont à l'origine l'oeuvre de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses Ressources (IUCN). Elles visent notamment le maintien et la sauvegarde des processus écologiques fondamentaux, la préservation de la diversité génétique et l'utilisation durable des espèces et des écosystèmes60(*). Cet instrument diffère des Déclarations de Stockholm et de Rio en ce sens qu'il ne s'agit pas une Déclaration de principes. Néanmoins, elle a permis d'appréhender et de définir les principes élémentaires en matière de diversité biologique. Aussi, ont-elles servi de cadre d'inspiration dans l'élaboration des conventions se rapportant à la vie sauvage.

B. Les conventions de protection de la nature

Les rapports entre l'homme et la nature, définis pour satisfaire les besoins de l'homme et caractérisés par la surexploitation des ressources, n'ont pas été sans incidences sur les espèces, les habitats et les écosystèmes. En plein 20ème siècle, les scientifiques parlaient déjà d'une véritable décimation des espèces du fait des activités de l'homme. «Les quelques millions d'espèces qui existent à l'heure actuelle sont les survivants du demi-milliard d'espèces ayant existé à un moment ou à un autre »61(*). Toutefois, affectée, la conscience universelle n'a pas sombré dans un silence qui serait complice de la destruction du patrimoine écologique de la Terre. Ainsi, il a été question de protéger la nature en recourant à des règles susceptibles de pallier  l'inefficience des instruments de soft Law. D'où, les conventions se rapportant à la conservation des écosystèmes, des habitats et des espèces

1. Les traités internationaux de conservation des écosystèmes et des habitats

Du nombre des traités internationaux de conservation des écosystèmes et des habitats figurent la Convention de l'Unesco pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (Convention de l'Unesco) et la Convention relative aux zones humides d'importance internationale (Convention de Ramsar). On se bornera à en faire la radiographie en tant que règle obligatoire tout en démontrant le degré relatif de leur normativité dans le cadre de la conservation de la diversité écosystémique.

a) La convention de l'Unesco pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel

Cet instrument à vocation universelle a pourtant une portée limitée puisqu'il ne régit que les habitats et les écosystèmes et ne vise pas à établir au sens large les principes fondateurs applicables à la conservation de la nature. Il tire sa raison d'être du fait que certains biens du patrimoine culturel et naturel présentaient un intérêt si grand qu'il s'est imposé à l'humanité l'urgente nécessité de les préserver «en tant qu'éléments du patrimoine mondial de l'humanité»62(*). Partant, on s'incline à croire que la Convention du 23 Novembre 1972 respire les principes généraux du droit de l'environnement pour avoir consacré la notion de «patrimoine commun de l'humanité». Aussi, son origine s'inscrit-elle dans la prévention des lourdes menaces qui pesaient sur le patrimoine mondial et qui semblaient capables de provoquer la dégradation des écosystèmes et des habitats. Ainsi, la convention devrait-elle permettre à la société internationale d'oeuvrer, notamment par l'octroi d'assistance collective, à la conservation de tout patrimoine culturel et naturel revêtant une valeur universelle rare. De plus, elle définit l'obligation pour l'Etat partie d'identifier, de protéger, de conserver, de mettre en valeur le patrimoine culturel et naturel sur son territoire et d'en assurer la transmission aux générations futures. En outre, aux termes de l'article 6.3, la partie contractante s'engage «à ne prendre délibérément aucune mesure susceptible d'endommager le patrimoine culturel et naturel». La grande particularité de la convention est «d'être parvenue à réunir dans un même instrument juridique les notions de protection de la nature et de préservation des sites culturels »63(*). Enfin, la Convention de l'Unesco est un instrument contraignant en ce sens que les règles qu'elle édicte ont rang d'obligations juridiques. En effet, il y est plus d'une fois écrit : « les Etats s'engagent ... ».

En revanche, on y décèle un caractère «programmatoire» qui atténue sa force normative. Car si à l'Etat on oppose des obligations, il s'agit pour la plupart d'obligations de moyen. L'Etat partie s'efforce et s'engage, certes, mais dans la mesure du possible.

b) la Convention relative aux zones humides d'importance internationale (RAMSAR)

Le déclin accentué des populations d'oiseaux d'eau au cours du 20ème siècle a favorisé la conclusion de la Convention de Ramsar. Celle-ci vise la conservation et l'utilisation rationnelle des zones humides en tant que ressource d'importance écologique première, de valeur scientifique capitale, et comme «régulateurs du régime des eaux et en tant qu'habitats d'une flore et d'une faune caractéristiques et, particulièrement, des oiseaux d'eau»64(*). Son objectif principal est «d'enrayer les empiètements progressifs sur les zones humides et la disparition de ces zones»65(*). Tout un régime juridique de conservation des zones humides a été défini dans le cadre de la convention puisque ces zones, en raison de leur localisation géographique, de la richesse de leur végétation, de la particularité de leur propriété chimique et physique, présentent une diversité toute spéciale. Ainsi, cette protection s'étend aux étendues de marais, d'eaux marines d'une profondeur de plus de six mètres à marée basse, aux zones humides désignées, zones estuariennes, lacustres, riveraines, palustres, ainsi qu'aux étendues d'eaux artificielles, lacs de retenue d'eau, marais salants.

La convention de Ramsar du 2 février 1971 est d'une haute portée normative puisqu'elle présente un vrai régime d'obligations. En plus de définir l'obligation de conservation et d'utilisation rationnelle des zones humides se trouvant sur leurs territoires, elle oblige les Etats à désigner des zones humides d'importance aux fins de leur inscription dans la liste de Ramsar. Enfin, elle promeut la coopération internationale pour une gestion rationnelle de ces zones. Elle stipule des engagements plutôt souples.

En revanche, si la convention se veut souple, il n'en demeure pas moins que les articles 2, 3, 4, 5 et 6 semblent concourir aussi efficacement que possible à la conservation des zones humides, à la sauvegarde de leur faune et de leur flore, ce, aux termes d'engagements plutôt fermes. Aussi, définissant une approche écosystémique, la convention de Ramsar édicte-t-elle des mécanismes institutionnels et financiers capables d'assurer sa mise en oeuvre et de justifier son efficacité.

2. Les traités internationaux de conservation des espèces

Sont rares les traités internationaux de conservation des espèces à avoir pris le parti de protéger l'ensemble des espèces d'un milieu donné puisque la grande majorité visent en priorité à préserver les espèces réputées rares, en voie d'extinction ou migratrices. Néanmoins, adoptés sous l'impulsion des communautés scientifiques, ces traités ont su marquer le passage d'une perception utilitariste de la nature à une éthique conservationniste, ou encore, celui d'une approche anthropocentrique de la conservation des ressources à une approche fortement écocentrique. Alors, on prendra soin d'examiner les instruments relatifs à la conservation des espèces migratrices et ceux portant sur le commerce international des espèces menacées d'extinction.

a) La Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (BONN).

La Convention de Bonn du 23 Juin 1979 s'inscrit à ce jour dans l'ordre des instruments à portée universelle les plus judicieux en matière de conservation des espèces. Elle campe un régime particulier de protection des espèces migratrices dont l'état de conservation est jugé défavorable. Elle établit des mécanismes susceptibles de prévenir la mise en danger de ces espèces. Ces mécanismes de protection renvoient aux approches conceptuelles de conservation, notamment à l'approche par espèce. Celle-ci préconise l'édiction de mesures adéquates portant sur la gestion durable des espèces à partir de listes établies. Cette approche, rappelons-le, concourt à la protection des espèces menacées et prévient efficacement leur déclin, voire leur extinction. Néanmoins, le régime juridique de la protection n'est pas uniforme puisque les mesures de conservation varient selon qu'il s'agit d'espèces inscrites à l'annexe I ou à l'annexe II de la convention. En effet, si aux termes de la convention, les Etats partie doivent s'efforcer d'accorder une protection immédiate aux espèces migratrices inscrites à l'annexe I, s'agissant des espèces migratrices inscrites à l'annexe II, les Etats partie ne sont conviés qu'à conclure des accords spécifiques en vue de rétablir ou de maintenir l'espèce en question dans un état de conservation favorable.

La référence aux accords spécifiques présente à la fois des avantages et des inconvénients. Si, dans le premier cas, ces accords complètent la convention et définissent un régime spécifique à chaque espèce, dans le second, il s'agit d'une pyramide conventionnelle sans articulation puisque les instruments qui la composent n'ont pas la même force normative. Selon Sadeleer, «la technique de conclusion des accords spécifiques s'éloigne de celle de l'adoption des protocoles d'application des conventions cadres qui sont légions en droit international de l'environnement»66(*).

En somme, ce système est efficace en ce que la convention de Bonn ne peut faire l'objet de réserves, qu'elle n'admet de réserves que concernant les annexes et les espèces listées et en ce que de ces accords, conclus sous l'égide de la Convention de Bonn et prenant en compte les spécificités de chaque groupe d'espèces, devront découler des plans de gestion, des programmes d'action, tous, répondant aux approches de la conservation. Toutefois, les mécanismes financiers du système conventionnel sont déficients67(*), ce qui risque de compromettre l'effectivité de la norme.

b) La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore menacées d'extinction (CITES)

La non réglementation du Commerce international des espèces a présenté une menace tant pour les espèces que pour les écosystèmes. Ainsi, il a fallu la Convention de Washington de 1973 pour régir et réglementer le commerce international et le transport des espèces sauvages menacées. A ce propos, Arbour Jean Maurice écrit « La CITES réglemente les transferts transfrontaliers commerciaux de quelque 30 000 espèces (...) ainsi que leurs parties et les produits qui en sont issus»68(*). Partant, la CITES garantit que le commerce international et le transport des espèces de la flore et de la faune sauvages n'affectent pas la conservation de la biodiversité et reposent sur une utilisation durable des espèces69(*).

Néanmoins, la CITES ne définit pas un régime juridique de réglementation du commerce interne des espèces. Ceci peut être considéré comme une faiblesse du système conventionnel dans la mesure où le commerce interne, malheureusement non pris en compte, constitue un facteur de régression et de raréfaction des espèces, notamment en Afrique et en Asie. La CITES étend plutôt son régime de conservation aux espèces inscrites dans ses annexes, espèces menacées par les échanges commerciaux, et non pas à l'ensemble des espèces animales et végétales que compte la biosphère. Elle vise en particulier les spécimens ou populations d'espèces.

Aussi, la convention de Washington établit-elle un régime d'autorisations allant du contrôle des exportations à celui des importations de certaines espèces, ce, selon leur fragilité. En effet, le mécanisme de contrôle diffère suivant que l'espèce animale ou végétale soit gravement menacée, qu'elle soit vulnérable ou qu'elle nécessite un régime spécifique de protection, ce, suivant son annexe d'inscription. Il est, en revanche, sans conteste que le permis d'importation ou d'exportation garantit au mieux le contrôle du commerce des espèces en ce que qu'il prévient les fraudes et le trafic illicite.

En somme, la CITES est un instrument à caractère obligatoire. Elle permet aux Etats d'adopter des mesures allant jusqu'à l'interdiction du commerce à l'encontre des Etats contrevenants. Elle contourne le principe de l'effet relatif des traités en ce qu'elle définit un régime applicable aux Etats non partie. Elle institue des procédures d'information aux termes desquelles les Parties sont tenues d'informer le Secrétariat de la Convention du degré d'application de celle-ci sur leurs territoires. Enfin, promeut-elle les principes généraux applicables à la biodiversité, notamment le principe de précaution puisqu'en cas d'incertitude quant à l'état d'une espèce les parties doivent agir au mieux dans l'intérêt de la conservation de cette espèce70(*). La CITES est donc un outil intéressant pour la conservation des espèces en droit international de la nature.

Section 2 : La Convention sur la Diversité Biologique

C'est de l'érosion sans bornes de la biodiversité malgré l'existence de nombre d'instruments juridiques, du constat de l'insuffisance des instruments de portée globale et de l'évidence d'un régime fragmenté entre cette pléthore de conventions sectorielles, mondiales et régionales que vient la raison d'être de la Convention sur la Diversité Biologique. Ce traité-cadre du 5 Juin 1992 n'a certainement pas la vertu d'un instrument codificateur des principes et des normes préconisés par les instruments de soft Law, par les traités relatifs à la biodiversité terrestre et d'eau douce et par ceux relatifs à la biodiversité en général. Il s'agit néanmoins d'un traité de portée mondiale dont le rôle se veut pour le moins fédérateur dans l'élaboration d'un régime international cohérent en matière de biodiversité. La Convention respire les principes du droit international de l'environnement. Elle exprime les principes généraux du droit de l'environnement (A) et poursuit des objectifs d'importance (B). Elle définit à l'égard des Etats des obligations fondamentales - incluant notamment des stratégies de conservation, des mécanismes économiques de conservation (C), un régime de transfert des technologies (D). Enfin, nous passerons en revue le régime de financement de la Convention (E).

A. Principes fondamentaux

Etant à l'origine le résultat d'un dialogue entre pays développés et pays en développement dans l'optique d'un accès pour le Nord aux ressources génétiques du Sud, ce, en contrepartie et au profit de ceux-ci du financement des surcoûts que nécessite la conservation et du transfert des biotechnologies vers le Sud, la Convention sur la Diversité Biologique semble d'entrée de jeu s'articuler autour d'un cadre de coopération entre Etats. Il va falloir ne pas heurter les souverainetés nationales en matière de gestion des ressources naturelles tout autre qu'il importe de conserver et d'utiliser durablement la biodiversité. Cette équation en appelle à un cadre régulateur qu'exprime d'ailleurs la Convention, les principes fondamentaux sous-tendant celle-ci.

1. La souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles.

Nous croyons plus haut avoir démontré en quoi la souveraineté étatique sur les ressources naturelles se veut un principe fondateur du droit international de la biodiversité. Point n'est alors besoin d'en faire un plus long développement. Il importe tout simplement de rappeler que si, en raison de son importance, la diversité biologique est considérée comme « une préoccupation commune de l'humanité », en revanche, la Société internationale, reconnaissant aux Etats aux termes de l'article 3 de la Convention leurs droits sur leurs ressources naturelles, a fait du principe de «Souveraineté des Etats» l'une des assises fondamentales de la Convention. Fort de cette balise, le Nord ne pourra nullement considérer les ressources du sud comme « relevant du patrimoine commun de l'humanité », y accéder et les exploiter à ses fins.

2. Les responsabilités communes mais différenciées

Ce principe, rappelons-le, est formellement consacré par l'article 20 de la Convention. Ceci dénote qu'en tant que « préoccupation commune de l'humanité », la conservation de la biodiversité relève de la responsabilité de tous les Etats. Néanmoins, les obligations des pays en développement diffèrent de celles des pays développés en ce sens que le Nord, disposant de capacité technologique et de moyens financiers adéquats, est censé tenu d'une obligation de résultat tandis que le Sud, pauvre et endetté, est tenu d'une obligation de moyen. Ainsi, en ce domaine, il ne semble pas s'établir au profit des pays développés une obligation de réciprocité puisque ces derniers sont tenus de s'exécuter alors que le Sud ne peut s'acquitter de ses obligations que dans la mesure du possible. Le Nord est donc tenu d'une obligation de résultat pure et dure tandis que l'obligation de réciprocité n'a été conçue que dans l'intérêt des pays du Sud. A ce propos, la CDB postule «les pays en développement ne pourront s'acquitter des obligations qui leur incombent que dans la mesure où les pays développés s'acquitteront effectivement des obligations qui leur incombent s'agissant des ressources financières et du transfert de technologie »71(*). De plus, ils sont astreints au financement des surcoûts liés à la mise en oeuvre de la convention.

3. Les principes de prévention et de précaution

Pour atteindre les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité, la mise en oeuvre des principes de prévention et de précaution s'avère primordiale. Ainsi, grâce à un mécanisme d'évaluation des incidences sur la biodiversité, la CDB prévient des dommages transfrontières. En outre, cet instrument se veut anticipateur puisque - précaution oblige - elle évite l'érosion de la biodiversité même en cas d'absence de certitudes scientifiques. A ce propos, le 9ème considérant du préambule stipule « lorsqu'il existe une menace de perte de la biodiversité, l'absence de certitudes scientifiques totales ne doit pas être invoquée comme raison pour différer les mesures qui permettraient d'en éviter le danger ou d'en atténuer les effets »72(*)

En fait, tous les principes du droit international de l'environnement n'ont pas intégré la convention. On en veut pour preuve l'absence du principe pollueur-payeur. A ce propos, De Sadeleer écrit « concernant la responsabilité et la réparation des dommages causés à la diversité biologique, la CDB est particulièrement floue et ne prévoit aucune obligation même conditionnelle »73(*). Néanmoins, les principes fondamentaux qu'elle prescrit concourent à la réalisation des objectifs poursuivis.

B. Les Objectifs

Les objectifs fixés dans la Convention sur la Diversité Biologique s'inscrivent dans la perspective de la réduction du rythme très alarmant de la perte de la biodiversité sur les plans mondial, régional et national. La radiographie de l'article 1er permet d'identifier trois grands objectifs : la conservation de la biodiversité, l'utilisation durable de ses éléments et le partage équitable découlant de l'exploitation des ressources génétiques.

1. La conservation de la biodiversité

La notion de « conservation », telle que définie dans le 10ème considérant du préambule de la Convention, renvoie aux mesures de conservation in et ex situ des écosystèmes et habitats naturels respectivement dans leur milieu naturel et en dehors de ce milieu. Aussi, vise-t-elle le maintien et la reconstitution de populations viables d'espèces dans ce milieu naturel. Il s'agit, certes, d'obligations fondamentales en matière de conservation, pourtant, non contraignantes. En effet, écrit Arbour Jean Maurice, « les obligations de conservation qui sont à la charge de l'Etat le sont toujours dans la mesure du possible, en fonction des moyens qui sont propres à chaque Etat et selon qu'il conviendra »74(*). Les doctrinaires ont donné deux explications à ce propos. La première tient au fait que l'un des principes fondamentaux qu'énonce la Convention demeure le droit souverain de l'Etat d'exploiter ses ressources selon un plan librement défini. La seconde, exprimant clairement une obligation de moyens, est plutôt réaliste en ce que l'Etat, quant aux mesures de conservation à adopter et tenant compte des coûts financiers importants qu'impliquent l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie de conservation, ne peut aller au-delà de ses moyens.

a. L'utilisation durable des éléments de la biodiversité

Selon l'article 2 de la Convention, cette notion réfère à «l'utilisation des éléments constitutifs de la diversité biologique d'une manière et à un rythme qui n'entrainent pas leur appauvrissement à long terme, et sauvegardent ainsi leur potentiel pour satisfaire les besoins et les aspirations des générations présentes et futures». Ainsi, le développement durable, défini comme associant environnement et développement, est le préalable à l'exploitation des éléments de la biodiversité.

En outre, les articles 6, 10 et 14 traitant de l'utilisation durable de la biodiversité renvoient respectivement aux mesures générales en vue de la conservation et de l'utilisation durable, à l'utilisation durable des éléments constitutifs de la diversité biologique, aux études d'impact et réduction des effets nocifs. S'agissant des mesures générales d'utilisation durable, elles impliquent l'élaboration de stratégies, de plans, de programmes nationaux, l'intégration de l'utilisation durable de la biodiversité dans des politiques sectorielles ou intersectorielles pertinentes. S'agissant de l'utilisation durable des éléments de la biodiversité, elle consiste entre autres à l'intégration des considérations y relatives dans le processus décisionnel national, en l'application de mesures correctives dans les zones où on a connu une érosion de la biodiversité. S'agissant enfin des mesures d'impact et de réduction des effets nocifs, elles renvoient aux mécanismes d'utilisation et d'évaluation des incidences. Ainsi, elles préviennent la mise en oeuvre de tout projet susceptible de causer des dommages à la biodiversité.

Toutefois, s'il s'agit d'autant de mesures favorables à une utilisation rationnelle de la diversité biologique et de ses éléments, il n'en demeure pas moins qu'elles s'inscrivent dans un champ d'obligations générales, donc non contraignantes, puisque, comme le veut le législateur international, si les Etats s'engagent, c'est « dans la mesure du possible », « en fonction de leurs moyens » et « selon qu'il conviendra »

2. Le partage équitable des bénéfices découlant de l'exploitation des ressources génétiques

« Ressources génétiques contre biotechnologies » : cela traduit un vaste marchandage dans lequel s'inscrit l'exploitation des éléments de la biodiversité. C'est le donnant-donnant entre le Nord et le Sud déterminé par l'accès aux ressources et le partage des bénéfices découlant de leur exploitation. Cet objectif, en réalité, reflète une approche foncièrement utilitariste en ce qu'en plus d'un accès satisfaisant aux ressources il vise « un partage juste et équitable des avantages qui en sont issus ». Les conditions de cet accès, selon l'article 15 de la Convention, supposent le consentement préalable en connaissance de cause de l'Etat propriétaire. A cette fin, sont déterminées au niveau des législations nationales de l'Etat les conditions d'accès aux ressources génétiques, celles portant sur le transfert des technologies, sur la participation des nationaux à la recherche et sur le partage équitable des avantages découlant de l'utilisation des dites ressources.

En fait, si les objectifs de la convention sont conçus en des termes souples et sous-tendent un cadre de coopération mercantile, ce traité-cadre définit des obligations concrètes en matière de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité.

C. Le régime des obligations souscrites

La Convention sur la Diversité Biologique circonscrit les obligations en matière de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité dans un cadre multidimensionnel incluant des stratégies et plans nationaux de conservation, des mesures de conservation in et ex situ, l'utilisation durable de la biodiversité et la mise en oeuvre d'une approche écosystémique. Ce régime inclut des obligations non molles, moins générales et plus ou moins concrètes. Néanmoins, ces obligations revêtent un caractère programmatoire en ce que si les Etats s'engagent, ils ne le font « qu'en fonction des conditions et des moyens qui leur sont propres »75(*). Encore une nuance, pour le moins subtile, capable d'atténuer le degré de force de la norme conventionnelle relative à la diversité biologique.

1. Stratégies, plans et programmes nationaux

L'article 6 de la CDB assigne aux parties l'obligation d'élaborer des stratégies, plans ou programmes nationaux destinés à la conservation et à l'utilisation durable de la biodiversité. Ceci dénote une approche nationale de la conservation clairement définie. Cette approche dite nationale traduit la haute portée du principe de la souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles. En outre, selon les stratégies élaborées, les Etats ont l'obligation d'identifier, de surveiller les éléments de la biodiversité et les causes de son érosion. Toujours est-il que ces stratégies et programmes nationaux de conservation, variant d'un Etat à un autre en fonction des priorités publiques de chaque Etat, peuvent receler nombre d'incohérences. Ainsi, celles-ci, génératrices de disharmonies entre stratégies nationales de conservation, auront carrément des incidences sur l'obligation parallèle qu'ont les Etats d'appliquer des politiques de conservation écologiquement rationnelles.

Cette obligation accuse par ailleurs d'autres faiblesses. En effet, aucune précision n'a été fournie aux termes de la Convention quant à la manière pour les Etats d'élaborer des stratégies et plans de conservation. De plus, s'il est du devoir des Etats d'intégrer des considérations relatives à la conservation dans des programmes non spécifiques, l'élaboration d'une stratégie nationale, selon les doctrinaires, n'est pas suffisante pour en garantir la pérennité76(*). Aussi, l'intégration de telles considérations ne peut-elle se faire que « comme il convient »77(*) d'autant plus que cela implique des difficultés majeures, notamment, celles consistant pour l'Etat de modifier et d'adapter sa politique de développement économique aux plans de conservation.

Par ailleurs, il convient de rappeler l'obligation des mesures de conservation in et ex situ, plus haut définies. Les premières, selon l'article 8 de la Convention, s'articulent autour de deux axes fondamentaux : la création d'aires protégées - réserve forestière, zone de protection spéciale, réserve naturelle, parc national, etc. - et la prise des mesures de conservation en dehors de ces zones. Les secondes ne viennent qu'en complément des mesures de conservation in situ78(*).

2. Mécanismes d'utilisation et d'évaluation des incidences

Plus d'un s'accorde à reconnaitre que l'une des conditions essentielles du maintien de la biodiversité consiste en la « durabilité » des utilisations qui en sont faites. C'est donc pour éviter des dommages irréversibles à la biodiversité et dans l'optique d'une utilisation écologiquement viable que le législateur international assigne aux Etats le devoir d'adopter des procédures d'évaluation des incidences de tout projet à risque sur l'environnement. A ce propos, la Convention en son article 14.1 prescrit aux Etats « l'obligation d'adopter dans l'ordre interne des mécanismes d'évaluation des impacts de tout projet sur la biodiversité ». Ceci relève d'une approche de précaution.

Ce mécanisme recèle toutefois une grande faiblesse : le peu d'intérêt accordé à l'implication du public au processus d'évaluation des incidences. En effet, l'obligation que stipule l'article 14.1 de la Convention est conditionnelle puisque le public participera « s'il y a lieu » aux procédures d'évaluation des incidences. Partant, est un constat d'évidence la faiblesse du dispositif normatif de la Convention en ce que d'une part la participation du public au processus décisionnel est un droit procédural favorable à l'applicabilité directe de la norme conventionnelle en droit interne et d'autre part l'exercice de ce droit justifie l'existence d'une démocratie citoyenne, ou pour répéter PRIEUR, d'une éco-citoyenneté79(*). Donc, ceci est de force à faire admettre le manque d'efficacité de la norme conventionnelle en droit international de la biodiversité.

3. Mécanismes économiques de conservation

La CDB, aux fins de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité, prescrit des mesures d'incitation, dites mécanismes économiques de conservation. L'article 11 édicte « l'adoption de mesures économiquement et socialement rationnelles » capables d'inciter à conserver et utiliser durablement la biodiversité. Ces mécanismes économiques de conservation comprennent, entre autres, l'assistance financière en faveur de certaines activités, l'application de politique fiscale au profit de la biodiversité. Toujours est-il, en revanche, que les Etats ne sont tenus à s'exécuter que « dans la mesure du possible », d'où une obligation de moyen et non de résultat.

4. Approche écosystémique

L'approche écosystémique est d'une importance capitale puisqu'elle serait «la seule susceptible d'appréhender les causes profondes de l'érosion de la biodiversité»80(*). Elle est globale et diffère en conséquence de l'approche par écosystème. Elle prend en compte les incidences des activités humaines et promeut la préservation des processus écologiques. Il s'agit d'une nouvelle technique de gestion des ressources, laquelle «implique la définition d'unités d'évaluation et de gestion de nature écologique et l'adoption de mesures souples et adaptatives visant à garantir l'intégrité de la structure et des fonctions de l'écosystème»81(*). Elle vise une gestion intégrée et requiert pour sa mise en oeuvre la participation du public au processus décisionnel.

Toutefois, eu égard à la question de la participation du public, la mise en oeuvre de cette approche parait absolument hypothétique puisqu'une telle participation, selon la Convention, est de nature conditionnelle. Partant, contrairement au voeu exprimé par la Conférence des parties aux termes du principe 12 relatif à cette approche, comment compter sur l'implication des secteurs pertinents des sciences humaines dites exactes  dans la mise en oeuvre des objectifs de la Convention ?

D. Le régime du transfert des technologies

Si les pays du Sud doivent permettre aux pays du Nord un accès satisfaisant à leurs ressources génétiques, le Nord, en contrepartie, est tenu de la double obligation de faire accéder à sa technologie et du transfert de celle-ci vers le Sud. A ce propos, l'article 16.1 de la Convention édicte : « Toute partie s'engage à assurer et/ou faciliter à d'autres parties contractantes d'une part l'accès aux technologies (...) et d'autre part le transfert desdites technologies ». De plus, la convention prévoit que l'accès à la technologie et son transfert se feront « à des conditions justes et les plus favorables, y compris des conditions de faveur préférentielles »82(*). La mise en oeuvre de ces dispositions n'est pas, néanmoins, sans incidences sur la norme conventionnelle tenant compte des enjeux économiques et commerciaux d'importance.

En effet, si l'accès à la technologie et son transfert sont des éléments inhérents à la réalisation des objectifs de la Convention, cette opération peut pourtant heurter les règles du commerce international et de la propriété intellectuelle. Or, ordinairement, la technologie fait l'objet de brevet. A ce propos, la convention en son article 16 précise que le transfert de la technologie devra être conforme aux normes régissant la propriété intellectuelle et en compatibilité avec leur protection adéquate et effective83(*).

En somme, le régime du transfert des technologies n'est certainement pas sans incidences sur l'équilibre du droit international général puisqu'aux principes de conservation et d'utilisation durable de la diversité biologique s'opposent des enjeux d'ordre économique et commercial, partant, le constat d'une difficulté d'harmonisation de la Convention avec nombre d'instruments conventionnels.

E. Le régime de financement

La crise de ressources financières auxquels sont confrontés les pays en développement est de nature à compromettre la réalisation des objectifs de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité et de ses éléments. Comment, en effet, les pays en développement, pauvres et endettés, pourront-ils mettre en oeuvre leurs stratégies nationales de conservation sans financement des mesures en faveur de la biodiversité ? Comment pourront-ils alors s'acquitter de leurs obligations comme le prévoit la Convention sur la Diversité Biologique ?

Ces interrogations en appellent aux considérations suivantes. D'abord, si, aux termes de l'article 20 de la Convention, les Parties s'engagent à financer les activités nationales tendant vers la réalisation des objectifs fixés, c'est toutefois « en fonction des moyens respectifs » des Etats. Ensuite, le terme « moyens respectifs » illustre avec éloquence les fondements du principe de « responsabilités communes mais différenciées » en droit international de la biodiversité. Tout compte fait, le régime de financement se veut inefficient puisque d'une part les normes qui le constituent sont loin d'être contraignantes tandis que d'autre part on ne peut absolument compter sur la bonne foi des Etats développés en termes de ressources financières dans le cadre de la réalisation des objectifs de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité.

Fort de ce qui précède, ne doit-on pas, au constat de l'insuffisance du cadre normatif régissant la biodiversité, opter pour la consolidation de la norme conventionnelle y relative ? Aussi, pour étayer ce point de vue, ne faudra-t-il pas en démontrer les avantages ? Aussi, tout cela devra-t-il s'inscrire dans le cadre d'un régime juridique, institutionnel et financier efficace.

2ème PARTIE : CONSOLIDATION DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

La norme conventionnelle relative à la biodiversité, rappelons-le, repose sur un ensemble d'approches, de principes juridiques qui, malheureusement, n'ont pas valeur de règles coutumières. Aussi, cette norme, martelons-le, est-elle alimentée par les faibles énergies d'actes concertés non conventionnels - Déclarations, Stratégies, Programmes d'action, Conférences diplomatiques, Agenda, Chartes - qui sont des instruments sans portée juridique réelle. C'est à ce titre que Valentin Y. AMEGANKPOE a avancé « ces instruments (...) sont généralement considérés comme de simples engagements politiques »84(*). De plus, affirmons-le avec force, les traités de protection de la nature dont RAMASAR, BONN, UNESCO, CITES, BERNE, qui sont censés être pourvus de valeur positive obligatoire, ne procèdent généralement que d'une approche utilitariste et ne sont largement assortis que d'obligations de moyen. Enfin, la Convention sur la Diversité Biologique, instrument fédérateur des grandes préoccupations relatives à la biodiversité, l'a-t-on souligné, s'inscrit pratiquement dans un cadre programmatoire puisque « les obligations qui sont à la charge de l'Etat le sont toujours dans la mesure du possible, en fonction des moyens propres à chaque Etat et selon qu'il conviendra »85(*). L'ensemble de ces considérations nous a amené au constat d'un cadre normatif insuffisant, donc, au constat de l'inefficacité de la norme conventionnelle en droit international de la biodiversité. Ainsi, nous est-il donné dans le cadre de la seconde partie, de portée constructive, de proposer le renforcement de la norme conventionnelle, d'en démontrer les fondements et les avantages (Chapitre I) et d'opter pour un régime juridique, institutionnel et financier efficace (Chapitre II).

CHAPITRE I : FONDEMENTS DU RENFORCEMENT DE LA NORME

Ce serait trop facile, fort de l'insuffisance du cadre normatif relatif à la diversité biologique, d'opter en faveur de la consolidation de la norme conventionnelle sans démontrer les fondements d'une telle proposition. Nous ferons valoir la nécessité d'une norme juridique régulatrice, capable d'harmoniser les règles éparses du droit international de la biodiversité, une norme libre de tout conflit avec les règles du commerce international et de la propriété intellectuelle, une norme capable de s'articuler avec les règles transversales, une norme soutenant le principe de prévention des risques en matière de biotechnologies, une norme pourvue de valeur obligatoire constante, une norme susceptible d'applicabilité directe en droit interne, une norme aux vertus sanctionnatrices (section 1). En outre, nous démontrerons les avantages de l'affermissement de la norme, ce, dans l'optique d'une meilleure politique de conservation et d'utilisation de la biodiversité, dans la logique d'une lutte contre les pollutions et les changements climatiques et dans la perspective d'une réparation effective des dommages à la diversité biologique (section 2).

Section 1 : Nécessité d'une norme régulatrice efficace

Cette section aura pour vertu de justifier la nécessité de la norme régulatrice tenant compte du fait que le diagnostic du régime juridique actuel de la biodiversité fait état d'un cadre normatif hétérogène où les règles tant connexes que transversales ont une difficulté d'harmonisation les unes avec les autres. Ainsi, la norme régulatrice à venir revitalisera-t-elle le droit international de la biodiversité.

A. Une norme capable d'harmoniser les règles éparses du droit international de la biodiversité

La Convention sur la Diversité Biologique, rappelons-le, n'est pas le premier instrument juridique à avoir traité de la biodiversité. Les conventions de portée sectorielle - Ramsar, Unesco, Bonn, Cites - avant l'adoption de la CDB, représentaient le seul cadre formel des discussions internationales sur la diversité biologique86(*). C'est, en effet, en raison de leur portée limitée, du constat de leur insuffisance et de leur hétérogénéité qu'est venue l'idée de l'élaboration d'une convention de portée non sectorielle, plutôt globale : la CDB. Néanmoins, si le but du dit instrument lors de son élaboration était de consolider l'ensemble de ces règles éparses, sans articulation réelle, dans un instrument unique, les résultats attendus n'ont pas été atteints87(*). En réalité, la Convention sur la Diversité Biologique n'a pas su constituer ce fil conducteur capable de regrouper dans un cadre commun les conventions sectorielles sus parlées. Ainsi, il serait exagéré de dire qu'avec la CDB la société internationale a trouvé les solutions aux problèmes de préservation de la diversité biologique.

Face à ce problème juridique d'importance capitale, il nous est donné de proposer, selon les techniques juridiques applicables en matière de traités-cadres, le renforcement de la norme conventionnelle relative à la biodiversité. Ce renforcement, reposant notamment sur l'harmonisation des règles éparses relatives à la diversité biologique, devra laisser place à la norme à venir de jouer un rôle codificateur des principes et des règles préconisés par les instruments relatifs à la biodiversité en général et permettre ainsi d'atteindre les objectifs de conservation, d'utilisation durable de la biodiversité et de ses éléments.

B. Une norme pouvant s'articuler avec les instruments de lutte contre les processus affectant la biodiversité

Les doctrinaires reconnaissent une difficulté d'agencement de la Convention sur la Diversité Biologique avec les traités de protection de la nature d'une part et avec les instruments de lutte contre les processus affectant la biodiversité, ceux portant notamment sur les pollutions, les changements climatiques, la désertification, d'autre part. A ce propos, Sadeleer écrit « ... La CDB ne comprend que peu de dispositions relatives aux liens institutionnels à établir avec les autres traités en vigueur en matière de conservation et d'utilisation de la biodiversité »88(*).

Ce problème d'agencement, disons-le, est l'une des causes de l'inefficacité de la norme conventionnelle dans l'état actuel du droit international de la biodiversité. Sans une articulation réelle de la norme conventionnelle avec les règles de lutte contre les pollutions, les changements climatiques, la désertification, l'appauvrissement de la couche d'ozone, il sera difficile, voire impossible, de réaliser les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la diversité biologique. En effet, la déforestation a été, entre autres, l'une des causes génératrices de l'érosion la plus alarmante de la diversité biologique. Aussi, l'appauvrissement de la couche d'ozone n'a pas été sans incidence sur les réchauffements climatiques.

En fait, la présentation de ce problème permet de mieux asseoir la nécessité de parvenir à la création d'une norme qui pourra s'articuler avec les instruments de lutte contre les processus affectant la biodiversité. On ne saurait procéder d'une approche sectorielle en la matière étant entendu que les domaines respectifs de la conservation de la biodiversité, de la lutte contre la désertification, de l'appauvrissement de la couche d'ozone et des changements climatiques sont à la fois interdépendants, intimement liés et indivisibles. Ainsi, en plus de leur interpénétration, requièrent-ils la conception, l'élaboration et la mise en oeuvre d'une approche globale. Donc, la norme à venir devra pouvoir s'articuler avec l'ensemble de ces instruments.

C. Une norme devant être compatible avec les règles du commerce international et de la propriété intellectuelle

L'état actuel du droit international général présente une situation de conflit potentiel entre normes environnementales et normes commerciales. Ceci est dû au fait que nombre d'Etats ont priorisé leurs intérêts économiques sur la protection de l'environnement. La politique commerciale internationale et la politique internationale de l'environnement ne vont pas de pair. D'ailleurs, le GATT, en son préambule, parait sans réserve recommander la pleine utilisation des ressources naturelles. Ceci dénote le peu de souci accordé à la conservation de la biodiversité. Aujourd'hui, le constat est on ne peut plus évident : «les règles de l'OMC se trouvent en situation de force par rapport aux règles destinées à garantir la conservation de la biodiversité (...)»89(*).

Il existe en effet divers contentieux entre les règles environnementales, celles relatives à la prévention des risques en matière de biotechnologies et les accords de l'OMC. Les règles édictées par l'OMC auraient interdit aux Etats parties à des accords environnementaux d'adopter des sanctions commerciales pour forcer des Etats tiers à appliquer des politiques écologiquement viables. En revanche, la CDB admet que le transfert de toute technologie faisant objet de brevet ne peut se faire que dans le respect des droits de la propriété intellectuelle. D'où, une situation de conflit potentiel entre différentes règles du droit international général.

Pourtant, la résolution de ces conflits ne va pas sans incidences sur la règle environnementale. Car, au nom du principe ``lex posterior derogat'', certains accords environnementaux, pour être antérieurs à l'accord instituant l'OMC, ne peuvent aucunement y déroger. D'où la préséance relative des normes commerciales sur les normes environnementales. On conviendra, alors, que ce mode de règlement va à l'encontre des principes du développement durable, de la préservation du patrimoine commun et du droit des générations futures à un environnement de qualité.

Ces considérations nous amènent, dans la perspective du renforcement de la règle environnementale, à proposer une norme qui soit compatible avec les règles du commerce international et de la propriété intellectuelle, du moins, une norme non susceptible d'être évincée par des règles parallèles. Aussi, face à ce problème, doit-on soutenir l'application du principe de précaution, socle de tant de mesures unilatérales prises par les Etats, lesquelles mesures, en vue de protéger les espèces et les écosystèmes, vont jusqu'à interdire certaines importations. L'affaire du boeuf aux hormones90(*) en est l'illustration la plus éloquente.

D. Une norme pourvue de valeur obligatoire constante

Les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité sont trop importants pour ne pas y greffer une obligation de résultat. L'on doit comprendre mal que le droit international de l'environnement relève de la prospective plutôt que du droit positif. Il devra cesser d'être le domaine privilégié de la soft Law tenant surtout compte du fait que les obligations molles ne peuvent aucunement constituer un frein aux politiques écocides que bien de sociétés, industrielles et commerciales, guidées par de pâles intérêts économiques, appliquent partout dans le monde. Il est effectivement temps que l'on ne subordonne plus la protection des espèces, des espaces, des écosystèmes aux intérêts de l'homme. Les philosophies utilitariste et anthropocentriste n'ont presque plus leur raison de citer face à l'extinction des espèces, la destruction des terres et des habitats, la désertification, les pollutions, les changements climatiques, bref, face à l'érosion alarmante de la biodiversité. La conscience universelle - on ne peut plus bouleversée et choquée - parait réclamer à corps et à cri la consécration par le droit positif du principe de « l'égalité des espèces face à la vie ».

Toutefois, l'état actuel du droit international de la biodiversité, en termes d'obligations souscrites par les Etats et par les acteurs concernés, ne semble pas prescrire des solutions à moyen terme, encore moins à court terme. La radiographie du régime juridique relatif à la biodiversité nous a offert le constat d'un cadre normatif assorti d'obligations molles, générales et peu contraignantes. Il nous a concrètement été donné de remarquer que si « les Etats s'engagent », ils ne le font néanmoins que « dans la mesure du possible », « en fonction de leurs moyens respectifs » et « selon qu'il conviendra ». Il ne s'agit ici que d'une double obligation de comportement et de moyens et non de résultats, d'où la cause essentielle de l'inefficacité de la norme conventionnelle relative à la diversité biologique.

Fort de cela, il nous est impérieux, toujours dans l'optique du renforcement de la règle environnementale, d'opter pour une norme conventionnelle pourvue de valeur obligatoire constante en ce sens que les Etats ne s'efforceront plus mais seront tenus de la double obligation de résultat d'une part et de résultat écologique d'autre part.

E. Une norme ayant rang de règle impérative

Il nous a été donné plus haut de constater la préséance accordée en droit international général aux règles commerciales et de la propriété intellectuelle sur la règle environnementale en cas de conflit normatif. Si d'un côté la raison de la primauté de la règle commerciale peut être d'ordre subjectif, voire pauvre, puisque déterminée par des intérêts économiques, de l'autre, elle peut être de nature objective en ce sens que la résolution du conflit de normes s'opère à la lumière de la Convention de Vienne sur le droit des traités suivant le principe ``Lex posterior derogat''. Dans les deux cas la norme environnementale destinée à protéger la biodiversité est évincée par la règle commerciale qui ne vise que l'enrichissement des acteurs par application d'une politique écologiquement non viable. Or, il est écrit dans la Déclaration de Rio : « la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considéré isolément »91(*). Ce fut d'ailleurs en référence à ce principe que le Canada, dans l'affaire de la fonderie de Trail, s'est vu imputé la responsabilité de dommage transfrontière.92(*) Cependant, il ne s'agit que d'un principe et non d'une obligation. Ainsi, dépendamment du juge appréciateur, il pourra être écarté.

La valeur relative de ce principe pourtant consacré par des conventions internationales traduit l'inefficacité de la norme, par surcroit, l'inefficience du régime juridique de la biodiversité. Ainsi, s'avère-t-il nécessaire de renforcer la norme existante en lui attribuant la valeur d'une règle de droit impérative. Il s'agira alors d'une norme essentiellement protectrice de la biodiversité puisque nulle règle antérieure ou postérieure ne pourra y déroger. Elle s'imposera alors à tous les Etats puisqu'également elle aura le rang d'une coutume instantanée, donc, universellement acceptée comme étant le droit. De plus, il sera utile pour la consolidation du caractère impératif de la norme qu'elle soit d'application immédiate et qu'on n'admette de réserve d'aucun Etat s'agissant du protocole qui la fera naitre. Ainsi, on protègera l'essence de la norme et par extension le coeur de la diversité biologique.

F. Une norme d'applicabilité directe en droit interne

L'adoption en tout domaine d'une convention internationale traduit objectivement la volonté manifeste de la Société internationale d'appréhender un problème qui va au-delà des compétences nationales étatiques. En revanche, la ratification de toute convention, notamment dans le domaine de la diversité biologique, révèle l'engagement de l'Etat d'introduire dans son système normatif la norme conventionnelle et d'instituer des mécanismes de mise en oeuvre de ladite norme. Ces mécanismes, toutefois, varient d'un espace à un autre dépendamment des priorités gouvernementales en matière de politiques publiques ou selon que l'Etat entend lutter efficacement ou non contre les processus affectant la diversité biologique. Ainsi, la norme, selon l'ordonnancement juridique de l'Etat en question, s'introduit en droit interne par une procédure particulière et peut être soit d'application immédiate ou d'application progressive. D'où, l'institution d'une machine à deux vitesses susceptible de produire des effets différents et capable de relativiser les résultats attendus dans le cadre de l'application de la convention internationale sur le territoire des Etats partie.

Il se pose alors la question de l'applicabilité directe ou progressive de la norme conventionnelle introduite en droit interne. Or, l'application progressive de la norme a des incidences à court, à moyen et même à long terme sur les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité. En effet, si la norme n'est pas d'application directe en ce sens que le citoyen et les Organisations de la Société civile pourront en demander l'application immédiate par devant le juge national on ne peut absolument conclure à l'efficacité de la convention. Aussi, ne pourra-t-on parler de démocratie environnementale consistant à la participation des citoyens au processus décisionnel et en l'exercice d'un droit de recours efficace pour dommage écologique.

Par ailleurs, si le problème de l'applicabilité directe de la norme conventionnelle est dû en aval à la nature des mécanismes institués en droit interne, mécanismes consistant notamment à l'exigence d'un texte d'application, en amont, une analyse des obligations prescrites nous a révélé l'existence d'un problème à la source. En effet, les conventions de droit de l'environnement ne semblent pas être auto-exécutoires puisqu'elles comportent des dispositions programmes, qu'elles édictent des obligations de comportement, de moyens et des responsabilités certes communes mais différenciées. Si le principe de «responsabilités communes mais différenciées» parait fondé vu que tous les Etats ne disposent pas de moyens économiques, de capacités techniques et technologiques similaires, toutefois l'édiction des obligations de comportement dans les conventions révèle la volonté expresse du législateur international de circonscrire l'environnement, la biodiversité en particulier, dans le domaine de la prospective. Autant de problèmes qui traduisent l'inefficacité, l'inefficience et l'insuffisance du cadre normatif actuel.

Fort de ces considérations et analyses, nous estimons nécessaire de repenser en amont, à l'échelle internationale, le processus de création de la norme en la faisant assortir d'obligations de résultat et en aval, en droit interne, de refaire les mécanismes de mise en oeuvre. Ainsi, en vue de l'application de la convention sur le territoire des Etats partie, il ne sera question d'aucun texte d'application, ni d'aucune mesure d'exécution complémentaire. D'où les fondements de l'applicabilité directe de la norme conventionnelle à édicter en matière de diversité biologique.

G. Une norme aux vertus sanctionnatrices

Nous avons souligné plus haut, ceci, avec peine, l'absence du principe pollueur-payeur et de la responsabilité pour dommage écologique du nombre des principes régissant et structurant le droit international de la biodiversité. Aussi, en avons-nous démontré les conséquences fâcheuses d'une telle omission sur l'effectivité de la norme conventionnelle puisqu'aucune juridiction internationale ou nationale n'a encore sanctionné la responsabilité des Etats pour dommages à la biodiversité93(*).

Ainsi, importe-t-il de remédier à de telles failles et faiblesses en édictant aux termes d'un protocole additionnel à la Convention sur la Diversité Biologique une norme aux vertus sanctionnatrices, donc, susceptibles de faire réparer par les Etats les graves dommages qu'ils ont causés à la diversité biologique.

Section 2 : Les avantages de l'affermissement de la norme

L'affermissement de la norme conventionnelle relative à la diversité biologique parait se vouloir la condition essentielle pour la pleine réalisation des objectifs poursuivis par la Société internationale aux termes de la Convention sur la Diversité Biologique. Cette solution, sans être la panacée, sera source de grands avantages en matière de conservation des ressources de la biosphère, en matière d'utilisation durable de la biodiversité et dans le cadre d'une vraie lutte contre les processus affectant la diversité biologique. De plus, aura-t-elle la vertu de conférer au droit international de la biodiversité ce qui lui manquait depuis longtemps et qui marquerait son efficacité, son caractère impérativement sanctionnateur.

A. Une meilleure conservation des ressources

Il nous a été donné de constater que les obligations fondamentales, en matière de conversation des ressources, prescrites par la Convention sur la Diversité Biologique sont formulées en des termes éminemment «souples». D'autant plus que la définition juridique de la notion se fait dans le préambule, ce qui de plus laisse croire que ces obligations sont à la fois générales et molles et ne sauraient en conséquence obliger impérativement les Etats à appliquer des politiques concrètes, viables et rationnelles, telles celles qui renvoient aux mesures de conservation in et ex situ des écosystèmes et habitats naturels respectivement dans leur milieu naturel et en dehors de ce milieu. Ainsi, l'affermissement de la norme conventionnelle génèrera de grands avantages.

Cette solution permettra effectivement une meilleure conservation des ressources. Car, aux termes de la norme à édicter les obligations de conservation à la charge de l'Etat ne le seront plus ni « dans la mesure du possible », ni « selon qu'il conviendra ». Il sera alors question d'une obligation de résultat en termes de maintien et de reconstitution de populations viables d'espèces tant dans leur milieu naturel qu'en dehors de ce milieu. Il est pourtant souhaitable qu'à cette mesure d'affermissement on adjoigne l'obligation formelle d'assistance financière en faveur des pays en développement tenant compte des coûts qu'impliquent la conception, l'élaboration et la mise en oeuvre de toute stratégie de conservation.

B. Une utilisation durable et concrète de la biodiversité

C'est par l'affermissement de la norme conventionnelle que l'on pourra parvenir non seulement à une utilisation «durable» mais aussi «concrète» de la diversité biologique et de ses éléments. On s'accordera certainement à reconnaitre que la Convention de 1992 conçoit l'utilisation de la biodiversité d'une manière et à un rythme qui ne soit pas capable d'entrainer l'appauvrissement des ressources. Nous sommes aussi d'accord que les mesures générales y relatives, prescrites par l'article 6, sont viables puisqu'elles impliquent l'intégration de l'utilisation durable de la biodiversité dans des politiques sectorielles ou intersectorielles pertinentes. En outre, nous admettrons que les études d'impacts et de réduction des effets nocifs, prévus à l'article 14, font la beauté de l'instrument conventionnel puisque de tels mécanismes sont à même de prévenir de grands dommages à la biodiversité. En revanche, dirons-nous sans réserves, en raison du caractère programmatoire de la norme, que ces mesures prescrivent certes une utilisation durable, mais non concrète de la diversité biologique.

Encore une fois, ces analyses justifient la portée de notre position en faveur de l'affermissement de la norme relative à la biodiversité. Il faut en effet se défaire du caractère général de la norme telle que conçue par la Convention de 1992. Il va falloir, par l'adoption d'un protocole y relatif, accorder un fort degré de normativité à l'obligation portant sur l'utilisation durable de la diversité biologique. Ainsi, on parviendra à une règle concrète qui aura marqué l'efficacité du cadre juridique relatif à la matière.

C. Un outil efficace contre les processus affectant la biodiversité

L'objectif consistant en l'affermissement de la norme conventionnelle ne pourra être atteint que si l'on tient compte de l'articulation de ladite norme avec les règles transversales du droit de l'environnement et surtout du degré de normativité des instruments de lutte contre les processus affectant la biodiversité, étant entendu que les règles existantes ont une valeur non obligatoire. On doit en effet concevoir un cadre normatif qui soit capable de lutter contre la désertification, la pollution des écosystèmes, l'extinction des espèces, la destruction de l'ozone et le réchauffement climatique.

1. La lutte contre la désertification et l'extinction des espèces

La désertification est, entre autres, considérée comme l'une des causes génératrices de l'érosion alarmante de la diversité biologique. Ce phénomène met directement en cause les espaces écologiques, constituées notamment en zones forestières. La désertification est notamment liée au traitement que l'on impose aux sols dans les régions habitées par des gens de conditions de vie précaires. Les activités humaines exercées dans ces zones ne sont pas écologiquement viables - déboisements sauvages, défrichements anarchiques, incendies intempestifs. Autant de facteurs révélateurs d'une destruction sans bornes de la nature, des écosystèmes et des ressources. Aussi, faut-il noter que ces processus qui affectent la biodiversité ne sont pas sans conséquences sur la destruction des habitats, la migration, la raréfaction, voire, l'extinction des espèces. L'humanité, toutefois, assiste, impuissante, à cette vaste érosion de la diversité biologique. Impuissante, disons-nous, en ce que selon Jean Marie BRETON « aucun des instruments internationaux actuellement disponible n'apparait juridiquement suffisant pour satisfaire de manière optimale à l'objectif de contrôle de la dégradation et de conservation des sols »94(*).

Toujours est-il que le problème de l'insuffisance du cadre normatif en matière de conservation de la biodiversité se pose. Ce cadre juridique réfère à des instruments de soft Law, insusceptibles d'obliger les Etats (Déclarations de Stockholm & de Rio, l'Agenda 21, la Charte mondiale des Sols, la Stratégie mondiale de la Conservation, etc.). De plus, le régime commun du droit international de l'environnement incluant des instruments à valeur positive - la Convention de lutte contre la Désertification, la Convention sur les changements climatiques, le Protocole de Kyoto - est inapte à répondre aux principaux besoins en matière de législation environnementale envers les sols95(*). Cela se doit, poursuit BRETON, à l'insuffisance des instruments à valeur obligatoire existant puisqu'ils n'édictent nulle disposition capable d'assurer la protection, la conservation et un usage durable des sols.

Ces analyses et considérations remettent en question le cadre juridique afférent à la conservation et à l'utilisation durable de la biodiversité. Elles justifient d'ailleurs notre position quant à l'affermissement de la norme conventionnelle relative à la matière. On ne saurait procéder d'une approche sectorielle qui ne tiendrait pas compte de l'articulation de la norme conventionnelle de référence avec les règles éparses du droit international de la biodiversité et avec les règles transversales du droit international de l'environnement en général. On ne saurait pas ne pas envisager la création d'une norme codificatrice. « Conservation de la diversité biologique » et « lutte contre la désertification » sont des domaines interdépendants, intimement liés et indivisibles. Ainsi, l'hétérogénéité du cadre juridique est un problème majeur dont la solution dépend de l'affermissement de la norme de référence et de l'articulation de celle-ci avec les autres instruments du droit international de l'environnement.

2. La lutte contre la pollution des écosystèmes et les changements climatiques

L'analyse de la question des pollutions révèle des problèmes à deux niveaux : l'atmosphère, le milieu marin. La pollution atmosphérique, selon ARBOUR, réfère aux problèmes à l'origine de la destruction de la couche d'ozone, de l'effet de serre, aux problèmes liés au smog photochimique et aux pluies acides96(*). Pourtant, cette forme de pollution résulte généralement des activités de l'homme. Par leur portée nocive, celles-ci mettent en danger la santé humaine et sont susceptibles de détruire les écosystèmes, de provoquer le dépérissement des espèces et d'endommager les ressources de la biosphère. Le milieu marin, d'autre part, est utilisé par l'homme comme un dépotoir incommensurable capable d'absorber tous les déchets de quelque provenance que ce soit. A ce propos, il est rapporté que des millions de tonnes de déchets de toute nature, constitués de résidus de fumiers et d'engrais, d'eaux usées, de pesticides, d'herbicides, de fongicides, drainés par les fleuves et les rivières et provenant notamment d'activités industrielles et de transports, sont jetés dans les mers et constituent à ce jour la plus grande source de pollution du milieu marin97(*).

Rappelons que ces processus affectent non seulement la diversité écologique terrestre mais aussi la biodiversité marine. En effet, lit-on dans le préambule du Protocole d'Helsinki de 1985, « des dommages sévères sont causés aux ressources naturelles d'importance vitale pour l'environnement et l'économie comme les forêts, les sols, les eaux ». Aussi, a-t-il été prouvé que la combustion du charbon en Europe et en Asie a provoqué des retombées jusqu'en Arctique et est à l'origine de la brume arctique »98(*). Les écosystèmes marins d'un autre côté se trouvent gravement affectés par l'effet des pollutions dues au trafic de déchets dangereux. Le désastre de Seveso en est la grande illustration. Ainsi, les espèces et écosystèmes terrestres et marins risques de disparaitre par le fait d'une si vaste pollution. Aussi, la Terre risque-t-elle de connaitre un réchauffement de nature à faire fondre les glaces des régions polaires. Autant de dangers et de dommages que, malheureusement, le cadre juridique actuel ne permet pas de prévenir suffisamment et de réparer concrètement.

La refonte du régime juridique de la CDB et de toute règle transversale aura conforté le processus de l'affermissement de la norme. S'agissant des instruments transversaux, disons à titre d'exemple que si la Convention de 1979 sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance vise à réduire et à limiter la pollution atmosphérique, néanmoins, celle-ci n'assigne aux Etats qu'une obligation de comportement puisqu'il leur est demandé de « s'efforcer de limiter et autant que possible » de telles pollutions. Par ailleurs, si la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer prescrit en son article 192 l'obligation générale de protection et de préservation du milieu marin, un tel principe ne peut toutefois être mis en oeuvre qu'en recourant à des mesures législatives nationales efficaces. Donc, autant de facteurs qui montrent que le renforcement de la norme se veut un instrument efficace de lutte contre les processus affectant la diversité biologique en général.

CHAPITRE II : VERS UN REGIME JURIDIQUE, INSTITUTIONNEL ET FINANCIER EFFICACE

La biodiversité est le poumon de l'humanité. A ce titre, le régime juridique qui la définit et les mécanismes institutionnels qui la confortent doivent absolument être efficaces. Ce régime ne peut reposer que sur des approches et principes juridiques efficients. Les principes généraux qui l'alimentent doivent être élevés au rang de règles coutumières internationales. Aussi, la norme conventionnelle y relative se devra-t-elle être susceptible d'effectivité. Il est désormais impérieux que l'on n'inscrive plus ladite norme dans un cadre juridique programmatoire et sans valeur obligatoire réelle. Les engagements pris par les Etats en ce qui concerne la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique doivent aller au delà de simples engagements politiques. Aux approches utilitaristes et anthropocentriques, on va devoir substituer les approches intégrées, socle fondamental du développement durable. Partant de la radiographie de la norme conventionnelle existante et du constat de son inefficacité, nous optons pour un régime juridique, institutionnel et financier efficace. Ainsi, nous sera-t-il donné de définir les conditions du renforcement du cadre juridique (section 1) et celles du cadre institutionnel et financier (section 2).

Section 1 : Renforcement du régime juridique et juridictionnel existant

Le Professeur Claude Imperiali pose la question de l'effectivité des Conventions internationales comme une des « préoccupations essentielles actuelles de la doctrine »99(*). Comment s'attendre en effet à ce que les objectifs de conservation et d'utilisation de la diversité biologique soient réalisés si la norme conventionnelle ne peut être appliquée, du moins, n'est pas susceptible d'effectivité ? Voilà une question cruciale à laquelle nous allons répondre dans la présente section. A ce propos, nous traiterons de la nécessité d'un cadre juridique anticipatif et sanctionnateur (A) et de l'utilité d'un recours international en la matière (B).

A. Un cadre juridique anticipatif et sanctionnateur

Le cadre juridique susceptible d'efficacité sera anticipatif en ce sens qu'il s'articulera inconditionnellement et fondamentalement autour des principes de prévention et de précaution. Ainsi, va-t-il falloir redéfinir ces principes et les mesurer à l'aune du droit de la responsabilité pour dommage écologique. Ce cadre sera également sanctionnateur puisque, par la redéfinition du droit de la responsabilité pour dommage écologique, aucun brevet d'impunité ne sera accordé aux pollueurs et ces derniers tomberont certainement sous le coup de l'application de règles obligatoires et contraignantes. Aussi, le contrôle de la mise en oeuvre de ces règles justifiera-t-il l'efficacité du cadre juridique à élaborer.

1. Redéfinition des principes de prévention et de précaution

Les principes de prévention et de précaution, tels que conçus et « juridicifiés » en droit international de l'environnement sont, comme tous les autres principes, dénués d'effectivité. Ils relèvent en grande partie d'instruments non conventionnels sans portée juridique réelle. Rappelons que le doctrinaire AMEGANKPOE les a qualifiés de « produits d'une morale écologique (...) ayant un rang de simples engagements politiques »100(*). Rappelons également que si, en revanche, ces principes ont été consacrés dans des conventions, il ne s'agit néanmoins que de Conventions à caractère programmatoire qui ne relèvent que de la prospective. Ainsi, va-t-il falloir redéfinir l'enveloppe qui contient les principes de prévention et de précaution, à savoir le moule conventionnel, élever ces principes au rang de règles à valeur positive, et oeuvrer finalement à leur reconnaissance sur le plan international comme normes impératives ayant au moins rang de règles coutumières internationales, donc, contraignantes et insusceptibles de dérogations. Ainsi, par la redéfinition et la mise en oeuvre des principes de prévention et de précaution on évitera tant de dommages à la diversité biologique peu importe que le risque encouru soit connu et certain, d'une part, non encore identifié ou incertain d'autre part.

2. Redéfinition du principe de la responsabilité pour dommage écologique

La radiographie de la Convention sur la Diversité Biologique nous a permis de noter l'absence des principes « pollueur-payeur » et de la « responsabilité pour dommage écologique » dans cet instrument de référence universelle et de portée globale. Rappelons à ce propos qu'un grand doctrinaire a écrit « concernant la responsabilité et la réparation des dommages causés à la diversité biologique, la CDB est particulièrement floue et ne prévoit aucune obligation même conditionnelle »101(*). L'omission de cette balise dissuasive ne va pas pourtant sans conséquence sur le système normatif en général. Il serait illusoire de s'attendre au respect des obligations souscrites, à la réalisation des objectifs poursuivis, au rendement d'un système en termes de prévention et de réparation des dommages à la biodiversité si le caractère sanctionnateur de la norme fait défaut. L'état actuel du droit international de la biodiversité en appelle à une réforme substantielle.

Ainsi, le cadre juridique à définir devra inclure les principes fondamentaux du droit international de l'environnement, notamment celui de la responsabilité pour dommage écologique. Ce principe, par son caractère sanctionnateur, dissuadera les acteurs à ne pas causer de dommages transfrontières et préviendra, par la menace qu'il aura brandie, toute atteinte à la diversité biologique. Sa redéfinition, non en termes conditionnels, contribuera à rendre efficace le régime juridique à définir. Ainsi, on sauvegardera la santé humaine, on préservera les écosystèmes, on luttera contre les pollutions d'origine diverse. On conservera de manière durable la biodiversité.

3. Ediction de règles obligatoires et contraignantes

Ici, nous ne voulons que rappeler la nécessité d'élaborer une règle impérative, qui ne sera pas pure expression de la soft Law, ni ne relèvera de conventions à caractère programmatoire, une règle qui ne sera pas supplantée par les règles du Commerce international et de la propriété intellectuelle ou par toute autre règle transversale en cas de conflit. Une règle dure et favorable au développement durable.

4. Redéfinition du principe de coopération

Rappelons que le principe de coopération semble aujourd'hui acquérir la valeur d'une règle coutumière puisque « consacrée formellement par l'ordonnance relative à l'affaire de l'usine Mox »102(*) et figurée dans nombre d'instruments conventionnels. Ce principe, soulignons-le, implique une obligation conjointe et solidaire pour les Etats d'oeuvrer à la réalisation des objectifs de protection globale de l'environnement. C'est à cet égard que la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques a souligné qu' «en raison du caractère planétaire des changements climatiques les Etats ont le devoir de coopérer et de participer à une action internationale, efficace et appropriée»103(*). «Une action internationale efficace», voilà un but qui parait pourtant hors d'atteinte à cause de certains enjeux économiques, à cause de l'inefficience du cadre normatif et surtout du caractère imperméable de la souveraineté des Etats.

Nous avons plus haut démontré que le cadre normatif régissant la diversité biologique souffre d'une grande insuffisance et qu'en raison de l'effacement du principe de la responsabilité pour dommage écologique un brevet d'impunité a été accordé aux pollueurs. Pourquoi, nous avions proposé le renforcement du cadre juridique et juridictionnel existant, notamment par l'édiction de règles capables de dissuader les Etats à oeuvrer à la protection de l'environnement. Toutefois, ces normes ne seront que des lettres mortes et la conservation de la biodiversité un leurre si on ne fonde pas la coopération internationale sur l'intérêt supérieur de l'humanité.

Il est en effet sans conteste que le droit international de l'environnement relève du consensualisme. Ainsi, vu l'inefficience du cadre normatif et l'absence d'une juridiction obligatoire, on ne peut rien attendre des modes de règlement des différends. Or, par crainte d'être mis sur la sellette, les Etats hésiteront à s'ouvrir au processus de refonte du régime juridique. On ne peut alors que les convier à ce sursaut et trouver un consensus autour de l'effectivité de la norme pour une meilleure conservation de la biodiversité. A ce titre, la redéfinition du principe de coopération parait la panacée.

B. Institution de mécanismes de recours

La question de l'utilité du recours international en droit de l'environnement a préoccupé plus d'un doctrinaire. A ce propos, IMPERIALI écrit « Le contentieux international serait conçu comme un moyen d'obtenir le respect des obligations conventionnelles, la conformité du comportement des Etats aux engagements pris »104(*). A notre avis, il s'avère impérieux d'instituer formellement des voies internationales de recours tant pour les Etats que pour les acteurs non étatiques. Aussi, va-t-il falloir définir le recours étatique et celui offert aux autres acteurs du droit de l'environnement.

1. Les juridictions internationales de droit de l'environnement

Il importe à ce stade de souligner le rôle joué par les organes conventionnels - Secrétariats, Conférences des Parties, Conseils scientifiques - dans la mise en oeuvre des traités. Ils apprécient les plaintes et prennent des mesures à l'encontre des Etats contrevenants. A ce titre, ces organes semblent s'attribuer des fonctions juridictionnelles. Faut-il également rappeler qu'aux termes de la Convention de Bâle, les parties ont accepté la compétence de la Cour Internationale de Justice ou d'une juridiction arbitrale en cas de litige d'interprétation ou de non-conformité au traité. Aussi, la Convention de Montego Bay a-t-elle institué le Tribunal international du droit de la mer dans le cadre du règlement de différends. Autant d'exemples qui traduisent la tendance actuelle vers l'institution de juridictions internationales de recours.

En fait, le recours international parait nécessaire. Il se justifie également par l'inefficacité des voies nationales de recours. A ce propos, IMPERIALI écrit « la voie internationale est apparue utile puisqu'en cas de difficultés d'interprétation et d'application des Conventions, les voies de recours nationales étaient fort diverses, inégales et n'assuraient pas une pleine efficacité aux dispositions en cause105(*). En revanche devra-t-on penser à une juridiction universelle puisque le foisonnement de juridictions conventionnelles pourra davantage alourdir le cadre institutionnel existant ?

2. Le recours étatique

La procédure de non-conformité instituée par le Protocole de Montréal de 1987 est un exemple typique du recours interétatique. Il s'agit en fait d'un « suivi du respect des engagements internationaux » selon lequel « toute partie qui suspecte un non respect de ses obligations par une autre partie peut formuler ses griefs auprès du Secrétariat de la Convention qui en saisit un Comité de mise en oeuvre »106(*). Ce comité procède à l'examen de l'affaire, envisage tout règlement amiable, saisit la Conférence des Parties qui décide des mesures à prendre à l'encontre de l'Etat contrevenant.

A ce propos, la Commission du Développement Durable, lors de sa 4ème session en 1996, a défini des modalités pour un suivi efficace du respect des engagements internationaux. A ce titre, il a été établi l'obligation pour les Etats de se soumettre à un contrôle collectif de conformité, le devoir de communiquer l'information utile, d'admettre la vérification et l'inspection, de favoriser la mise en oeuvre de procédures de surveillance multilatérales107(*). Aujourd'hui, la convention sur les changements climatiques (1992), celle sur les armes chimiques (1992), celle de New-York de 1995 sur la conservation des poissons chevauchants, admettent la procédure de non-conformité. Voilà, un contrôle - d'orientation plutôt que de sanction - qu'il conviendra de renforcer et d'intégrer dans les conventions de droit de l'environnement.

Si ce contrôle est d'orientation en ce qu'il fait appel aux méthodes souples de résolution des conflits - discussion, négociation - des sanctions sont pourtant possibles. Elles peuvent être juridiques en ce qui a trait à la suppression des droits et prérogatives de l'Etat défaillant au sein de la communauté conventionnelle ou matérielles en ce qu'elles entrainent le retrait des avantages techniques et financiers du traité. Ces mesures sont dissuasives. Selon IMPERIALI, ces éléments illustrent comment la procédure de non compliance peut être un élément pivot d'un contrôle international renforcé de la mise en oeuvre des conventions sur l'environnement108(*).

3. Le recours des acteurs non étatiques

Si la participation des citoyens au choix et aux décisions est dite consubstantielle au développement durable109(*), il s'avère nécessaire, outre l'accès aux tribunaux nationaux, de leur ouvrir des voies internationales de recours, ce, pour une meilleure protection de la diversité biologique et de l'environnement en général. Ainsi, comme en droit international des droits de l'homme, les grands groupes sociaux - les femmes, les jeunes, les populations autochtones, les travailleurs, les syndicats, les agriculteurs, les communautés scientifiques et techniques - pourvu qu'on leur reconnaisse la personnalité juridique et la capacité d'agir sur le plan international, pourront saisir les juridictions internationales du droit de l'environnement. A ce titre, les acteurs non étatiques auront comme les Etats la qualité de sujets de droit international de l'environnement et s'en prévaudront contre tous Etats violateurs des normes et qui, comme de violents prédateurs, causeront de graves dommages à la biodiversité.

Nous avons pris la précaution de parler de « groupes sociaux » au lieu de nous référer à « l'individu » en ce qui concerne la qualité de sujets de droit international de l'environnement pour des raisons précises. D'abord, dans le cadre de l'information, la participation et l'évaluation environnementale, les principaux instruments juridiques relatifs à la matière - Action 21, Déclaration de Rio, Convention d'Aarhus - en parlant du « public », réfère à un ensemble de citoyens et non à un individu. Ensuite, le droit à un environnement sain, fondement de la qualité de sujets de droit international à accorder aux acteurs non étatiques, est un droit de solidarité en ce qu'il traduirait une conception de la vie en communauté et ne pourrait à ce titre être réalisé que par la conjonction des efforts de tous les partenaires sociaux110(*). Tout compte fait, l'accès des acteurs non étatiques aux juridictions internationales confortera ce que Prieur appelle la démocratie environnementale et participera de l'effectivité de la norme conventionnelle.

Section 2 : Renforcement des mécanismes institutionnels et financiers

Le renforcement du système institutionnel et financier aura permis de combler davantage les insuffisances du cadre juridique et concouru réellement à l'effectivité de la norme conventionnelle. A cet effet, les Organisations et Institutions internationales du droit de l'environnement ont multiplié les mécanismes d'incitation et de contrôle, ce, en vue de pallier la « mollesse » des principes et des méthodes de résolutions des différends111(*). A cette fin, l'aura-t-on constaté, il a même été institué un droit à l'aide multilatérale pour la mise en oeuvre du traité, lié au respect des obligations contractées et notamment celles relatives au contrôle avec les conséquences qui en découlent112(*). En dépit de tout, ces mécanismes demeurent lourds, inefficients et sans efficacité. D'où, la nécessité d'une restructuration en profondeur dans ce domaine.

A. Restructuration du mécanisme institutionnel

Le réseau institutionnel, tel que conçu en droit international de l'environnement, est à la fois dense et complexe. Dense, car ce cadre institutionnel s'opère par de multiples recours à des mécanismes de protection, de surveillance, de contrôle, d'incitation, de négociation continue, de coordination et de suivi. En effet, en plus des structures préexistantes sur les plans universel et régional (PNUE, FEM, CDD, ALENA, BERD, etc.), il a été établi des mécanismes de suivi propres aux conventions, aux conventions-cadres et aux protocoles y afférents. Complexe, car chaque avancée normative est régulièrement conditionnée par la création d'organismes spécifiques qui ne sont pas à même de pouvoir contraindre et sanctionner les acteurs « puisque généralement dépourvus de pouvoirs de commandement ou de décisions »113(*). Complexe, disons-nous, en ce que cette nébuleuse, créatrice d'un enroulement institutionnel, impliquera certainement «un problème de moyens devant permettre à ces Organes de fonctionner et de remplir leurs missions respectives»114(*).

Ainsi, à cause de ces structures lourdes dont fait objet le réseau institutionnel mondial, il se justifie la solution consistant en la restructuration de tels mécanismes. Il va falloir à cet effet alléger le fonctionnement du système sans que ne puissent dans leur essence s'en trouver affectées les structures préexistantes, tels le Programme des Nations-Unies pour l'Environnement (PNUE), le Fonds International pour l'Environnement Mondial (FEM), la Commission du Développement Durable (CDD), la Commission de Coopération Environnementale/ALENA, le Comité pour l'Environnement/OCDE. A noter que ces Institutions, gardiennes du droit international de l'environnement, en dehors du modèle conventionnel triptyque (Conférence des Parties, Secrétariat Permanent, Conseil scientifique ou technique), se voient attribuer des fonctions de contrôle dans le cadre de l'application des traités qui n'ont pas prévu dans leurs dispositions des mécanismes de mise en oeuvre. Rappelons notamment que la mission des Institutions à vocation universelle consiste à « Assurer la coordination la plus efficace entre les Programmes des nations Unies en matière d'environnement »115(*). A ce titre, l'allègement de telles structures doit être sans préjudices à leurs missions fondamentales, essentielles et premières.

En toute logique, il parait inconcevable, en plus des Institutions préexistantes sur les plans universel et régional, en plus des Organes créés par les traités-cadre, que chaque protocole relatif auxdits traités institue respectivement une Conférence des parties, ce qui est facteur d'un éclatement institutionnel. A ce propos, la Convention de Bonn sur la conservation des espèces migratrices dispose en son article 5 « chaque accord devrait (...) établir si nécessaire les mécanismes institutionnels appropriés pour aider à la mise en oeuvre de l'Accord, en surveiller l'efficacité, et préparer des rapports pour la Conférence des Parties ». Critiquant ce fait, facteur d'enroulement des Conférences des Parties établies par la convention-mère avec celles créées par les protocoles ou accords spécifiques, Sandrine MALJEAN-DUBOIS écrit «les Conventions cadres donnent naissance à une pluralité de Conférences des Parties, sans qu'il y ait forcément de correspondance entre les Etats qui y sont représentés»116(*).

Fort de tout cela, nous optons pour une restructuration intelligible du mécanisme institutionnel. Certes, des raisons pratiques, fondées notamment sur une logique de spécialisation dans des domaines distincts, ont été à l'origine de cette prolifération institutionnelle, néanmoins, celle-ci entraine des conflits de compétences, ce qui risque de compromettre la réalisation des objectifs de conservation de la biodiversité. En fait, ce foisonnement institutionnel révèle l'incohérence du système conventionnel. Ceci est contraire au principe 25 de la Déclaration de Stockholm qui assigne aux Etats la mission de « s'assurer que les Organisations internationales jouent un rôle coordonné, efficace et dynamique pour la protection de l'environnement »117(*). C'est en effet à juste titre que Maljean-Dubois renchérit « la mise en place des Institutions conventionnelles s'est réalisée au coup par coup, de manière décentralisée et sans vision d'ensemble, et il est bien difficile a posteriori de rendre cohérent ce non-système... »118(*).

En dépit de tout, il faut vraiment, pour répéter Imperiali, prendre les voies d'une rationalisation institutionnelle. Celles-ci, exigeant à notre avis non pas une refonte générale du système mais une restructuration du mécanisme institutionnel, auront débouché sur une meilleure coordination entre les Institutions Universelles et régionales entre elles, sur une meilleure coopération entre les Organes conventionnels entre eux, donc, sur un meilleur fonctionnement des systèmes. Tout cela aura concouru à une protection efficace de l'environnement, de la diversité biologique en particulier.

B. Redéfinition du contrôle de la mise en oeuvre de la norme conventionnelle

Le chapitre 38 de l'Agenda 21 réfère au contrôle de l'application de la norme conventionnelle. On ne peut, en effet, évaluer l'efficacité de la norme, voire son apport au traitement des problèmes, que par une connaissance des conditions de mise en oeuvre de l'instrument qui la postule. Ce contrôle requiert aussi une meilleure connaissance du comportement des Etats à l'égard des obligations souscrites. On a pu constater que les Etats agissent « selon qu'il leur convient » et « dans la mesure du possible », ce qui altère la portée de la norme et compromet la réalisation des objectifs poursuivis. On a aussi remarqué que le législateur international, aux termes des conventions récentes, a institué un contrôle préventif pour éviter toute violation de la norme, d'en assurer le respect et la promotion119(*). Il s'agit en fait d'un contrôle systématique fait par les Organes conventionnels dont les techniques et procédures s'inscrivent largement dans un système de rapports, un système insuffisant et insusceptible d'obliger les Etats à respecter leurs obligations conventionnelles.

En raison de cette insuffisance, nous optons pour la redéfinition du contrôle, car, malgré l'institution des Comités scientifiques et techniques notamment dans la Convention sur la Diversité Biologique et la Convention sur les changements climatiques les résultats escomptés n'ont pas été atteints. De plus, en dépit du suivi réactif que peut impliquer ce contrôle, enquête, inspection, il s'avère difficile d'en admettre l'efficacité. L'aboutissement des procédures est facultatif et se heurte au consentement préalable de l'Etat. En outre, si malgré tout le contrôle s'opère, la mise en oeuvre des conclusions et recommandations y relatives repose sur le dialogue, la négociation et la conciliation120(*). Tout compte fait, il faut redéfinir le contrôle de la mise en oeuvre de la norme. Il faut, certes, un contrôle d'orientation mais surtout de sanction.

C. Redéfinition du régime de financement

La complexité des mécanismes institutionnels n'allait pas sans incidence sur le régime de financement puisque le foisonnement des Organes conventionnels en appelle logiquement à l'élargissement des mécanismes de financement. Or, le régime actuel est insuffisant. A ce propos, DAILIER et PELLET écrivent «le financement des mécanismes institutionnels eux-mêmes est très couteux (...). Les contributions, presque toujours exclusivement volontaires, sont loin de répondre aux attentes et les maigres ressources du Fonds pour l'Environnement et des fonds d'affectation spéciale gérés par le PNUE sont d'autant plus insuffisantes que les programmes adoptés se font de plus en plus ambitieux et lourds »121(*).

Ces considérations et analyses, venant notamment de hautes autorités doctrinales, expliquent l'existence d'une relation d'interdépendance entre mécanismes institutionnels et mécanismes financiers. Ainsi, l'insuffisance des mécanismes de financement s'explique également par la complexité des mécanismes institutionnels. Aussi, peut-elle être la conséquence des maigres apports volontaires des Etats. En somme, il faut redéfinir le régime de financement, aligner celui-ci sur des mécanismes institutionnels opérationnels, trouver un consensus sur des contributions étatiques raisonnables et sur l'augmentation de l'aide multilatérale.

D. Redéfinition de l'assistance internationale

Les doctrinaires s'accordent sur le fait que les Etats n'ont pas toujours nourri de façon manifeste la volonté de violer les obligations qu'ils ont souscrites. La «bonne foi», telle que prescrite par la convention de Vienne, semble à bien des égards déterminante mais noyée dans l'incapacité économique des Etats «défaillants». A ce propos, IMPERIALI écrit « le non-respect des traités sur l'environnement ne résulte pas en général (...) d'une attitude délibérée de violations des obligations; il découle de causes plus empiriques dont (...) l'incapacité d'ordre institutionnel ou économique (des Etats)122(*). Ainsi, les doctrinaires prescrivent l'aide, l'assistance technique et financière que les autres Parties pourront apporter à l'Etat défaillant pour améliorer le respect de l'instrument conventionnel. Mais quelle aide ? Quelle assistance ?

Nous convenons que les conventions récentes, dont la CDB, ont institué un droit à l'aide multilatérale. Toutefois, cette aide est liée au respect des obligations. Cette conditionnalité, certes incitative, recèle néanmoins une anomalie. Car, si le non respect des traités est dû à la défaillance de l'Etat, il faut d'abord octroyer l'aide et exiger, sous peine du retrait des avantages financiers, l'application de la Convention. L'inverse parait illogique puisque les pays en développement sont présumés défaillants et semblent à ce titre mériter en tout premier lieu l'aide financière. De plus, cette aide repose sur les contributions des Etats. D'ailleurs, on ne peut contraindre ces derniers même en brandissant le principe des responsabilités communes mais différenciées.

CONCLUSION

La conservation rationnelle et l'utilisation durable de la biodiversité semble entrer dans l'ordre des défis majeurs pour l'humanité. Cet objectif ne semble pouvoir être atteint facilement puisque nombre d'Etats, de Sociétés industrielles et commerciales, d'acteurs importants, refusent aujourd'hui encore de reconnaitre à la diversité écologique sa qualité hautement intrinsèque, laquelle est pour le moins indissociable de l'existence de l'humanité. Ils ont persisté et comme de fait ils persistent à ne la mesurer qu'à l'aune d'un instrument utile pour l'homme, en tant que ressource destinée à être exploitée. Cette approche utilitariste, l'avons-nous souligné, va à l'opposé du principe combien cher aux éthiciens de l'environnement, celui de «l'égalité des espèces face à la vie». Elle explique avec éloquence le peu d'effectivité des mesures prises jusqu'ici en matière de conservation, de gestion, d'utilisation et de restauration de la biodiversité et de ses éléments. Aussi, l'approche utilitariste justifie-t-elle l'arrière-plan qu'occupe la biodiversité dans la hiérarchie des valeurs notamment face au progrès économique, aux règles régissant le commerce et la propriété intellectuelle.

Nous l'avons souligné dans le cadre de cette recherche, malgré l'adoption depuis 1992 de la Convention sur la Diversité Biologique, comme instrument fédérateur dans l'élaboration d'un régime international de portée globale, le droit de la biodiversité n'est pas encore parvenu à briser le carcan de l'anthropocentrisme qui ne cesse l'atrophier. Aussi, se veut-il un droit à double sens, ambigu, étant entendu que ses règles, celles visant à maintenir les espèces, les écosystèmes, les paysages, les habitats, peuvent aussi avoir une connotation écocentrique. A ce propos, certains doctrinaires estiment que loin de voir en cette ambigüité pour le moins frappante une irrégularité susceptible de l'affaiblir, le droit international de la biodiversité se veut régulateur vu qu'il appréhende la diversité écologique à la fois comme ressource et comme patrimoine. A ce titre, poursuivent-ils, «il tente de concilier la conservation des potentialités génétiques de la planète avec le développement socio-économique»123(*).

Cependant, eu égard au regard critique que nous avons porté sur le système de la biodiversité, dans ses approches conceptuelles, dans son cadre normatif, dans ses aspects institutionnels et financiers, nous estimons que l'approche anthropocentrique qui en constitue le socle est ce ver qui ronge le fruit et vide la norme de sa substance. Nous convenons que le droit international de l'environnement relève en grande partie de la soft Law, que par voie de conséquence le droit de la biodiversité est tout aussi alimenté par les faibles énergies d'instruments déclaratoires sans valeur obligatoire. Nous convenons également que les conventions de protection de la nature, pour être de portée sectorielle, sont loin d'être les instruments appropriés pour la mise en oeuvre d'une meilleure politique de conservation. Par contre, c'est de façon délibérée que les Etats ont inscrit l'instrument fédérateur, la Convention sur la Diversité Biologique, dans un cadre essentiellement programmatoire. Car, si aux fins d'enrayer la perte de la biodiversité, les Etats s'engagent ils ne le font que « dans la mesure du possible et selon qu'il conviendra ». Fort de l'absence de toute obligation de résultat, que pouvait-il être alors du degré d'efficacité de la norme conventionnelle ?

La norme conventionnelle en droit de la biodiversité accuse une faiblesse que la société internationale va devoir pallier si on entend juguler la crise de la diversité biologique et sauver par surcroit la vie sur Terre. Nous l'avons démontré, il s'agit d'une norme sans valeur obligatoire, une norme qui peut être supplantée par les règles du commerce international, une norme insusceptible d'applicabilité directe en droit interne, une norme sans efficacité réelle. En outre, la norme doit sa faiblesse aux insuffisances du cadre juridique qui la soutient. Ce cadre juridique, a-t-on remarqué, ne permet pas un contrôle efficace de mise en oeuvre de la règle de droit environnementale sur le territoire des Etats parties. Or, selon la doctrine, dans le cadre de la mise en oeuvre d'une politique de conservation et d'utilisation de la biodiversité, la fonction du droit est essentielle en ce qu'il devra attacher une valeur obligatoire aux objectifs fixés et en ce qu'il devra préconiser les moyens permettant de les réaliser124(*). En fait, l'impuissance de la norme traduit le peu d'effectivité du droit de la biodiversité.

Il nous a été, par ailleurs, donné de souligner dans le cadre de ce travail le caractère non sanctionnateur du contrôle de mise en oeuvre de la norme en droit international de la biodiversité. A cette fin, nous avons prescrit l'intégration des principes ``pollueur-payeur'' et de la ``responsabilité pour dommage écologique'' dans le régime juridique à élaborer. De plus, nous avons mis l'emphase sur l'absence d'un cadre juridictionnel formel en cas de dommages à la biodiversité, en cas de litige d'interprétation ou de non-conformité au traité. Car, les Organes conventionnels auxquels il est dévolu une mission de surveillance et de contrôle n'ont pas, comme le Tribunal International du droit de la Mer ou la Cour Internationale de Justice, la latitude et le champ d'action nécessaire pour rendre effective la norme et sanctionner les prédateurs de la biodiversité. Ainsi, nous avons prescrit l'institution formelle des juridictions de droit de l'environnement et l'ouverture des voies de recours tant aux Etats qu'aux acteurs non étatiques. Enfin, pour y parvenir, devra-t-on pallier la grande déficience des mécanismes institutionnels et financiers existant.

En somme, ces critiques auront permis au droit international de l'environnement de s'ajuster en fonction des exigences que requièrent les objectifs de conservation et d'utilisation durable de la biodiversité. Car, pour être une convention-cadre, donc capable de faire naitre suivant la volonté des Etats d'éventuels protocoles aux caractères régulateur, fédérateur, harmonisateur, impératif et sanctionnateur, la Convention sur la Diversité Biologique pourra certainement assurer une protection efficace des écosystèmes, des paysages, des espèces, des habitats, bref, une conservation rationnelle et une utilisation durable des ressources de la biosphère. Pourquoi, nous avons fait la radiographie du régime international de la biodiversité et avons proposé la refonte du système dans la perspective d'un régime juridique, institutionnel et financier efficace. Il ne faut à cette fin qu'un sursaut de la part des Etats pour sacrifier leurs intérêts personnels, redéfinir la coopération, l'assistance internationale et agir dans l'intérêt supérieur de l'humanité.

Aviol FLEURANT

BIBLIOGRAPHIE

1) AMEGANKPOE et AVODE in La Protection de l'environnement au coeur du système juridique international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001, Université de Liège, BRUYLANT, 2003. 482 pages

2) ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, 835 pages

3) DORST J., Avant que nature ne meure, Paris, Delachaux & Niestlé, 1978.

4) BEURRIER Jean Pierre, Envidroit, Droit international de l'environnement, cours n0 5, La Biodiversité, année académique 2008-2009, 36 pages

5) DAILIER Patrick, Alain Pellet, Droit international Public, 7ème éd. LGDJ, 2002. 1510 pages

6) DREYFUS Simone, Nicolas-Vullierme Laurence, La Thèse de Doctorat et le mémoire, 3ème édition, Cujas, 2000. 486 pages

7) FROMAGEAU J., Réflexions relatives à l'histoire du droit et de la protection de la nature, Protection de la nature : histoire et idéologie, Paris, l'Harmattan, 1998, p. 208-220

8) IMPERIALI Claude, L'Effectivité du Droit International de l'Environnement, Ed. Economica, 1998. 291 pages

9) LAVEILLE Jean Marc, Les Principes généraux du droit international de l'environnement et un exemple : Le principe de Précaution, Master DICE, Tronc commun, Cours no 4, Année académique 2008-2009. 15 pages

10) LE FUR DOMINIQUE, Le Robert, Dictionnaire des synonymes et nuances, collection les usuelles, 2005, 1259 pages

11) LEROY Etienne, La réforme du droit de la Terre, envidroit, cours # 4, in LES SOLS ET LA DESERTIFICATION, année académique 2008-2009, 25 pages

12) MALJEAN-DUBOIS Sandrine, Le foisonnement des Institutions Conventionnelles, in L'effectivité du Droit International de l'environnement, Ed. Economica, 1998

13) NATIONS UNIES, Recueil des sentences arbitrales, vol. III, p. 1938; [1949] 3 Reports of international Arbitration Awards 1905.

14) PRIEUR Michel, Droit de l'Environnement, 5ème édition, Dalloz, 2004.

15) PRIEUR Michel, Les Principes généraux du Droit de l'environnement, Envidroit, Tronc commun, Cours n0 : 5, année académique 2008-2009, 99 pages

16) PRIEUR Michel, L'information, la Participation et l'Evaluation environnementale, Master DICE, Tronc commun, cours N0 : 6

17) Rapport du Groupe d'experts sur l'identification des principes du droit international pour le développement durable, Genève, 26-28 Septembre 1996 (division Nations Unies pour le Développement durable, doc. Travail no : 3, Avril 1996, paragraphes 155 à 160)

18) RIFKIN J. Le siècle Biotec. Le commerce des gènes dans le meilleur des mondes, éd. La Découverte, Paris, 1998

19) SADELEER N. D., Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, 780 pages

20) SADELEER N. D., Les principes du pollueur-payeur, de prévention et de précaution : essai sur la genèse et la portée juridique de quelques concepts du droit l'environnement, Bruxelle, Bruylant, 1999

21) SUDRE Frédéric, Droit européen et international des droits de l'homme, 6ème édition refondue, puf, 2003,

22) VAN LANG Agathe, Droit de l'environnement, PUF, 2002, 502 pages.

INSTRUMENTS DECLARATOIRES CONVENTIONNELS

1) Action 21

2) Charte mondiale pour la nature

3) Convention de l'Unesco pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel

4) Convention relative aux zones humides d'importance internationale (RAMSAR)

5) Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (BONN)

6) Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore menacées d'extinction (CITES)

7) Convention sur la Diversité Biologique

8) Convention-cadre sur les changements climatiques

9) Convention de lutte contre la désertification (1994)

10) Déclaration de Stockholm de 1972

11) Déclaration de Rio de 1992

12) Stratégies mondiales de la conservation

TABLE DES MATIERES

Pages

4 INTRODUCTION

9 PREMIERE PARTIE : ASSISES DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

10 CHAPITRE I : PRINCIPES APPLICABLES A LA BIODIVERSITE

10 Section 1 : Approches fondatrices du droit international de la biodiversité

10 A.- Biodiversité, préoccupation commune de l'humanité

11 B.- Souveraineté étatique sur les ressources naturelles

12 D.- L'approche de coopération Nord-Sud aux fins d'exploitation et d'utilisation durable de la biodiversité

12 C.- Responsabilité commune mais différenciée

13 E.- Les approches de conservation

14 1.- L'approche par espèce

15 2.- L'approche par écosystème et par habitat

15 3.- L'approche par paysage

16 4.- L'approche par processus affectant la biodiversité

16 F.- Les mesures spécifiques de conservation

16 1.- Mesures de conservation in situ

17 2.- Mesures de conservation ex situ

18 Section 2 : La structuration du droit de la biodiversité, les principes généraux

19 A.- Le principe de prévention

20 B.- Le principe de précaution

21 C.- Le principe de coopération

22 D.- Le développement durable

22 E.- Le principe du pollueur-payeur et de la responsabilité du dommage écologique

24 CHAPITRE II: UN CADRE NORMATIF HETEROGENE ASSORTI D'OBLIGATIONS MOLLES, GENERALES ET PEU CONTRAIGNANTES

24 Section 1 : Les Instruments de conservation des ressources de la biosphère et de protection de la nature

25 A.- Les Instruments de soft Law

25 1.- La Déclaration de Stockholm

26 2.- La Déclaration de Rio

26 3.- L'Agenda 21

27 4.- La Charte mondiale pour la nature

27 5.- Les stratégies mondiales de la conservation

28 B.- Les conventions de protection de la nature

28 1.- Les traités internationaux de conservation des écosystèmes et des habitats

29 a.- La convention de l'Unesco pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel

30 b.- la Convention relative aux zones humides d'importance internationale (RAMSAR)

31 2.- Les traités internationaux de conservation des espèces

31 a.- La Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (B)

32 b.- La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore menacées d'extinction (CITES)

34 Section 2 : La Convention sur la Diversité Biologique

34 A.- Principes fondamentaux

35 1.- La souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles

35 2.- Responsabilités communes mais différenciées

36 3.- Les principes de prévention et de précaution

36 B.- Objectifs

36 1.- La conservation de la biodiversité

37 2.- L'utilisation durable des éléments de la biodiversité

38 3.- Le partage équitable des bénéfices découlant de l'exploitation des ressources génétiques

39 C.- Le régime des obligations souscrites

39 1.- Stratégies, plans et programmes nationaux

40 2.- Mécanismes d'utilisation et d'évaluation des incidences

41 3.- Les mécanismes économiques de conservation

41 4.- Approche écosystémique

42 D.- Le régime du transfert des technologies

43 E.- Le régime de financement

44 DEUXIEME PARTIE : CONSOLIDATION DE LA NORME RELATIVE A LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

45 CHAPITRE I : FONDEMENTS DU RENFORCEMENT DE LA NORME

45 Section 1 : Nécessité d'une norme régulatrice efficace

45 A.- Une norme capable d'harmoniser les règles éparses du droit international de la biodiversité

46 B.- Une norme pouvant s'articuler avec les instruments de lutte contre les processus affectant la biodiversité

47 C.- Une norme devant être compatible avec les règles du commerce international et de la propriété intellectuelle

49 D.- Une norme pourvue de valeur obligatoire constante

50 E.- Une norme ayant rang de règle impérative

51 F.- Une norme d'applicabilité directe en droit interne

52 G.- Une norme aux vertus sanctionnatrices

53 Section 2 : Les avantages de l'affermissement de la norme

53 A.- Une meilleure conservation des ressources

54 B.- Une utilisation durable et concrète de la biodiversité

54 C.- Un outil efficace contre les processus affectant la biodiversité

55 1.- La lutte contre la désertification et l'extinction des espèces

56 2.- La lutte contre la pollution des écosystèmes et les changements climatiques.

58 CHAPITRE II : VERS UN REGIME JURIDIQUE, INSTITUTIONNEL ET FINANCIER EFFICACE

58 Section 1 : Renforcement du régime juridique et juridictionnel existant

59 A.- Un cadre juridique anticipatif et sanctionnateur

59 1.- Redéfinition des principes de prévention et de précaution

60 2.- Redéfinition du principe de la responsabilité pour dommage écologique

60 3.- Ediction de règles obligatoires et contraignantes

61 4.- Redéfinition du principe de coopération

62 B.- Institution de mécanismes de recours

62 1.- Les Juridictions internationales de droit de l'environnement

63 2.- Le recours étatique

64 3.- Le recours des acteurs non étatiques

65 Section 2 : Renforcement des mécanismes institutionnels et financiers

65 A.- Restructuration du mécanisme institutionnel

67 B.- Redéfinition du contrôle de mise en oeuvre

68 C.- Redéfinition du régime de financement

69 D.- Redéfinition de l'assistance internationale

70 CONCLUSION

* 1 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 435

* 2 J. FROMAGEAU, Réflexions relatives à l'histoire du droit et de la protection de la nature, Protection de la nature : histoire et idéologie, Paris, l'Harmattan, 1998, p. 208-220

* 3 J. DORST, Avant que nature ne meure, Paris, Delachaux & Niestlé, 1978, p. 16

* 4 M. Remond-Gouilloud, Du droit de détruire, Paris, PUF, 1989

* 5 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 32

* 6 Traité de Washington du 7 juillet 1911 relatif à la préservation et à la protection des phoques à fourrure

* 7 Convention de 1909 pour la protection des oiseaux utiles à l'agriculture

* 8 Convention de Washington du 2 Décembre 1946 pour la réglementation de la chasse à baleine

* 9 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.443

* 10 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 33

* 11 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 33

* 12 DAILIER Patrick,PELLET Alain, Droit International Public, 7ème ed. LGDJ, 2002, p. 385

* 13 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 20

* 14 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p.52

* 15 Préambule de la Convention de Rio sur la Diversité Biologique

* 16 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.443

* 17 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.446

* 18 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.447

* 19 J. Rifkin, Le siècle Biotec. Le commerce des gènes dans le meilleur des mondes, éd. La Découverte, Paris, 1998

* 20 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.450

* 21 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.449

* 22 Article 20 de la Convention sur la Diversité Biologique

* 23 DAILIER Patrick,PELLET Alain, Droit International Public, 7ème ed. LGDJ, 2002, p.1237

* 24 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 75

* 25 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 75

* 26 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 52

* 27 Convention sur la Diversité Biologique, article 9

* 28 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, pp. 350, 351

* 29 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p.58

* 30 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p.59

* 31 Convention sur la diversité Biologique, article 2

* 32 Convention sur la Diversité biologique, article 19.4

* 33 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 108

* 34 Convention sur la Diversité biologique, article 9

* 35 AMEGANKPOE et AVODE in La Protection de l'environnement au coeur du système juridique international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001, Université de Liège, BRUYLANT, 2003, p. 342

* 36 VAN LANG Agathe, Droit de l'environnement, PUF, 2002, pp. 70, 71

* 37 Principe 21 de la Déclaration de Stockholm de 1972 sur l'environnement.

* 38 Convention sur la Diversité Biologique, Préambule et article 3

* 39 ARBOUR Jean-Maurice, LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 29.

* 40 NATIONS UNIES, Recueil des sentences arbitrales, vol. III, p. 1938; [1949] 3 Reports of international Arbitration Awards 1905.

* 41 VAN LANG Agathe, Droit de l'environnement, PUF, 2002, p. 95

* 42 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.57

* 43 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p. 48

* 44 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 74

* 45 AMEGANKPOE et AVODE in La Protection de l'environnement au coeur du système juridique international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001, Université de Liège, BRUYLANT, 2003, p. 340

* 46 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.66

* 47 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 77

* 48 Convention sur la Diversité Biologique, article 2

* 49 N. DE SADELEER, Les principes du pollueur-payeur, de prévention et de précaution : essai sur la genèse et la portée juridique de quelques concepts du droit l'environnement, Bruxelle, Bruylant, 1999, p. 51

* 50 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 250

* 51 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, Droit international et communautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, p. 355

* 52 DAILIER Patrick,PELLET Alain, Droit International Public, 7ème ed. LGDJ, 2002, p. 385

* 53 Déclaration de Stockholm de 1972, principe 2

* 54 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 81

* 55 Déclaration de Stockholm de 1972, principe 21

* 56 Rapport Brundtland

* 57 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 83

* 58 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, Ed. Yvon BLAIS, 2006, p.36

* 59 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. pp. 85, 86

* 60 La stratégie mondiale de la conservation, UICN/PNUE/WWF/UNESCO

* 61 Commission mondiale sur l'environnement et le développement, Notre avenir à tous, Montréal, les publications du Québec, Editions du fleuve, 1988, p.179.

* 62 Convention de l ;Unesco, Préambule, par. 7

* 63 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 160

* 64 Préambule de la Convention de Ramsar.

* 65 Préambule de la Convention de Ramsar.

* 66 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 203

* 67 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 374.

* 68 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 386

* 69 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 386.

* 70 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.394.

* 71 Article 20.4 de la Convention sur la Diversité Biologique

* 72 Préambule de la Convention sur la Diversité Biologique

* 73 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 110

* 74 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 453

* 75 Article 6, a, de la Convention sur la Diversité Biologique

* 76 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 104

* 77 Article 6, b, de la Convention sur la Diversité Biologique

* 78 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p.108

* 79 PRIEUR Michel, L'information, la Participation et l'Evaluation environnementale, Master DICE, Tronc commun, cours N0 : 6, p. 2.

* 80 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p.64

* 81 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p.64

* 82 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p.123

* 83 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 487

* 84 AMEGANKPOE et AVODE, in La Protection de l'environnement au coeur du système juridique international et du droit interne, Acteurs, Valeurs et Efficacité, Actes du colloque des 19 et 20 Octobre 2001, Université de Liège, BRUYLANT,.2003, pp. 337, 338.

* 85 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 453

* 86 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 440

* 87 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p.440

* 88 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 129

* 89 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p.390

* 90 ARBOUR J. M. & LAVALLE S. Droit International de l'Environnement, op. cit. p. 57

* 91 ARBOUR Jean-Maurice, LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 66.

* 92 NATIONS UNIES, Recueil des sentences arbitrales, vol. III, p. 1938; [1949] 3 Reports of international Arbitration Awards 1905.

* 93 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. Dalloz, 2004, p. 355

* 94 BRETON Jean Marie, Les sols et la désertification, cours N0 4, Master Dice, Option 1, p. 10

* 95 BRETON Jean Marie, op. cit. p.13

* 96 ARBOUR Jean-Maurice, LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 279

* 97 ARBOUR Jean-Maurice, LAVALLEE Sophie, op. cit. p.311

* 98 ARBOUR Jean-Maurice, LAVALLEE Sophie, op. cit. p. 283

* 99 IMPERIALI Claude, L'Effectivité du Droit International de l'Environnement, Ed. Economica, 1998, p. 7

* 100 AMEGANKPOE et AVODE, op. cit., 2003, pp. 337, 338.

* 101 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 110

* 102 AMEGANKPOE et AVODE, op. cit. p. 340

* 103 Arbour Jean Maurice & Lavallée Sophie, op. cit. p. 45

* 104 IMPERIALI Claude, op. cit. p. 19

* 105 IMPERIALI Claude, op. cit. p. 19

* 106 IMPERIALI Claude, op. cit. p. 14

* 107 Rapport du Groupe d'experts sur l'identification des principes du droit international pour le développement durable, Genève, 26-28 Septembre 1996 (division Nations Unies pour le Développement durable, doc. Travail no : 3, Avril 1996, paragraphes 155 à 160)

* 108 IMPERIALI Claude, op. cit. p. 15

* 109 DOUMBE-BILLE Stéphane, Les Acteurs du droit international de l'environnement, Master DICE, Tronc commun, cours no : 2, p. 2

* 110 Sudre Frédéric, Droit européen et international des droits de l'homme, 6ème édition refondue, puf, 2003, p. 105

* 111 Patrick Dailier, Alain Pellet, op.cit., page 1277

* 112 IMPERIALI Claude, op. cit. p. 17

* 113 Patrick Dailier, Alain Pellet, Droit international Public, 7ème éd. LGDJ, 2002, pp. 1278, 1279

* 114 Patrick Dailier, Alain Pellet, Droit international Public, 7ème éd. LGDJ, 2002, pp. 1278, 1279.

* 115 Patrick Dailier, Alain Pellet, op.cit., page 1277.

* 116 MALJEAN-DUBOIS Sandrine, Le foisonnement des Institutions Conventionnelles, in L'effectivité du Droit Int. de l'environnement. p. 30

* 117 Principe 25 de la Déclaration de Stockholm

* 118 MALJEAN-DUBOIS Sandrine, Le foisonnement des Institutions Conventionnelles, in L'effectivité du Droit Int. de l'environnement. p. 49

* 119 IMPERIALI Claude, L'Effectivité du Droit International de l'Environnement, Ed. Economica, 1998, p.9

* 120 IMPERIALI Claude, op. cit. p. 13

* 121 DAILIER Patrick,PELLET Alain, Droit International Public, 7ème ed. LGDJ, 2002, p. 1279

* 122 IMPERIALI Claude, L'Effectivité du Droit International de l'Environnement, Ed. Economica, 1998, p. 16

* 123 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 21

* 124 Nicolas de Sadeleer, Charles-Hubert Born, op. cit. p. 22






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry