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La figure du père dans "Quelques adieux " de Marie Laberge. Discours de l'implicite et stratégies narratives

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par Massiva AIT OUARAB
Université d'Alger - Licence de français 2011
  

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CHAPITRE UN

« Temps et Significations »

1- Etudes des indices paratextuels

Le sens implicite véhiculé par ce roman de M. Laberge se dégage à partir du discours liminaire à l'oeuvre, mis en place grâce au titre, à la dédicace et à la présence d'épigraphes au début de chaque chapitre.

Dans un premier temps, nous allons définir ces trois notions avant de les mettre en relation avec le contenu de l'oeuvre. De cette manière, nous pourrons constater que certains thèmes ressortent et sont présents dans le roman. Notre lecture du paratexte aura pour objet d'apporter non seulement des éclaircissements concernant les thèmes redondants dans les épigraphes, puis éventuellement dans l'oeuvre ; il s'agira aussi pour nous de retrouver le point commun de ces derniers, c'est-à-dire, de mettre en évidence ces pratiques d'écriture liées au paratexte.

La première notion mentionnée ci-dessus, le titre, est définit comme une  « formule signifiante et la plus raccourcie du roman (...), elle renvoie aux quatre fonctions que Genette emprunte à Grivel et à Hoeuk, il désigne et identifie l'ouvrage, il le décrit, il connote et il séduit »37(*). Cette définition retient l'idée que le titre suggère le contenu et a la même fonction qu'un message publicitaire, celui d'attirer l'attention du lecteur.

Il doit, également, l'attirer, éveiller sa curiosité et son désir de lire l'ouvrage d'où la fonction de séduction. L'analyse du titre se donnera comme tâche d'interroger la pertinence de ces quatre fonctions par rapport au contenu de l'oeuvre.

Le Robert (1995) définit la dédicace comme un hommage que « l'auteur fait de son oeuvre à quelqu'un, par une inscription imprimée en tête de l'ouvrage »38(*) , c'est-à-dire que l'auteur, à travers sa dédicace, affiche une relation entretenue ou qu'il entretient toujours avec des dédicataires. Ces derniers peuvent être des personnes connues ou méconnues du public, comme elles peuvent faire partie de l'environnement de l'auteur et donc, connues de lui seul.

On en retrouve une concernant les soeurs de l'écrivaine.

La dernière notion à laquelle nous ferons référence dans notre analyse est la présence d'épigraphes. L'épigraphe par définition est une inscription, une sentence placée au début de chaque partie ou au début d'une oeuvre, afin d'en suggérer le contenu.

Dans notre analyse, nous nous intéresserons au rapport existant entre l'épigraphe et le chapitre qu'elle préside ainsi que la fonction et le choix des épigraphiés par l'épigrapheur.

En d'autres termes, le titre, la dédicace et les épigraphes soulignent l'idée de la relation qui s'établit entre le paratexte et le contenu de l'oeuvre. De ce rapport, nous pouvons faire ressortir un aspect de la socialité de l'oeuvre ou du texte, c'est-à-dire mettre en avant des préoccupations littéraires, sociales, qui pourraient expliquer le choix des indices paratextuels par l'écrivaine.

1.1- Le titre :

Le titre est l'élément premier qui attire l'attention du lecteur, il doit remplir certaines fonctions : informative, conative et incitative. Il agit tel un message publicitaire dont l'objectif est de séduire, il est à la fois partie d'un ensemble et étiquette de cet ensemble. (...) on éditeur, auteur, typographe se préoccupe de cet aimant de lecture qui doit être stimulation et début d'assouvissement de la curiosité du lecteur 39(*)

Quelques Adieux est directement lié à des événements fictifs. L'adjectif indéfini Quelques associé au nom masculin pluriel Adieux est un syntagme nominal qui nous permet de généraliser  tous les adieux. Adieu, nom masculin, fait référence à «quelqu'un que l'on ne reverra pas de longtemps ou que ne l'on reverra plus »40(*), il dénote des situations plurielles de ruptures : la mort, le divorce et la séparation mais aussi le départ. A priori, le titre n'étant pas long et comportant un sens universel commun à tous les hommes, suppose une aisance d'interprétation pour le lecteur.

Cet énoncé facile à mémoriser, est considéré comme thématique selon G.GENETTE qui déclare que: « (...) Les titres indiquant, de quelque manière que ce soit, le « contenu » du texte seront dits, le plus simplement possible, thématiques (...) » 41(*) et trace aussi la trajectoire de l'acte de lecture et assume la fonction mnésique c'est-à-dire que le titre « (...) travaille sur du déjà familier au lecteur (...) »42(*)

Ce titre aux caractères thématique et mnésique, suggère une histoire qui deviendra claire une fois que nous aurons entrepris la lecture de l'oeuvre. Donc, le titre transmet un savoir qui permet une meilleure compréhension de l'oeuvre. Le lecteur est préparé à une histoire tragique qui annonce, soit une séparation soit la mort d'un personnage. Effectivement, dans Quelques Adieux, les deux protagonistes sont confrontés aux souvenirs douloureux d'une séparation, celle de François avec sa mère: « Elle était morte (...) et Il se sentit terriblement orphelin. Il se dit qu'elle était vraiment morte maintenant (...) Elle était morte toute seule, à l'hôpital, pendant que ses frères étaient allés manger (...) Elle était morte poliment, en secret, fidèle à elle-même (...) »43(*), ses frères qui s'éloignèrent de lui et ne donnèrent aucun signe de vie « (...)Elle (la mère) les avait tenus tous ensemble et, après sa mort, la famille s'était disloquée, comme si tout ce qui les empêchait de se disperser ne tenait qu'à elle. »44(*), et celle de son père qui dans un premier temps n'est pas présent dans son enfance et dans un deuxième temps meurt « Rangé dans une place de vieux,où celui-ci n'en finissait plus de dégringoler les années à rebours et de baver, gâteux (...) »45(*) . La séparation qu'a connue Anne, va influencer sur tout son être et son comportement à venir. Elle perd son père dans un accident, « (...) une mort au volant d'une voiture trop rapide »46(*), et garde en elle l'espoir d'un « retour (...) tant attendu et jamais survenu de son père »47(*). Cette mort aura pour conséquence une fuite redoutable face à tout ce qui peut ressembler à de l'amour. Mais plus pour longtemps, la jeune étudiante tombe dans les filets d'une passion tragique où l'amant, François, brûlant de désir et de passion, meurt d'un cancer, et donc elle vivra une autre séparation.

Cet énoncé dénotatif cède sa place à un foyer connotatif 48(*) c'est-à-dire qu'on passe du thème de la séparation au thème du désarroi : celui d'Anne qui a perdu à jamais le sentiment d'amour et cela après la mort de F. Bélanger. Et celui de François qui est conscient de son incapacité à retrouver la mémoire de son enfance, tente de vivre avec ce sentiment de déchirement et se sent comme coupé d'un arbre, un être déraciné « Personne ne pouvait plus l'aider. Déserté, délaissé, des phrases obsédantes tournaient dans sa tête : rien ne servait à rien, aucun amour n'avait jamais existé. Comment peut-on être un arbre si on n'a pas de racines ? Comment être un homme sans enfance ? » 49(*)

Le titre de l'oeuvre suggère aux lecteurs des troubles psychiques manifestés par les personnages, suite à leurs séparations. Il suffit d'analyser les extraits cités ci-dessus pour saisir que la dimension psychique a une place prépondérante, ainsi que la présence des thèmes de l'amour, de la passion et de la mort, qui entraînent des comportements pour la plupart incompréhensibles.50(*)

Nous constatons que les thèmes redondants dans ce roman sont des thèmes d'actualité et qu'on retrouve, également, dans les autres romans de M. Laberge. Parler de  la vie, de la mort, de l'amour, de la passion et de l'enfance, c'est parler de l'Homme, de son existence, de sa condition et de sa place dans la société. Ces thèmes qui ressortent à travers le titre sont universels et touchent l'humanité, ainsi le lecteur est prédisposé à les recevoir.

L'intérêt que nous portons aux thèmes de Quelques Adieux n'est pas fortuit, il s'agit de mettre en avant les préoccupations de M. Laberge, et par la même occasion celles des écrivains québécois et cela à la même période, également, d'autres écrivains appartenant à d'autres littératures.

Qu'ils soient québécois, maghrébin, africain ou autres, les écrivains exposent ces thèmes universels de différentes manières. Cette diversité est liée, à la fois, au contexte socioculturel et aux procédés d'écritures utilisés par chaque créateur. Nous allons voir comment ces thèmes apparaissent dans le contexte québécois et plus précisément dans Quelques Adieux de M. Laberge.

Après une ère de conservatisme, le Québec assiste à son renouveau dans les années soixante avec la Révolution Tranquille51(*). Celle-ci provoque d'importants bouleversements d'ordre économique, social et culturel. Ce changement va se faire ressentir dans le domaine de la littérature : on assistera à l'émergence d'une catégorie d'écrivains qui désirent s'imposer sur la scène littéraire avec des créations originales. Ils tentent, également, d'écrire sous le sceau de la modernité jusqu'à se libérer complètement de toute norme littéraire et réinventer l'écriture romanesque à partir : de  thèmes considérés, jadis, comme tabous, nous pouvons prendre à titre d'exemple : l'amour, la passion, la sexualité, la mort et l'homosexualité.

Et d'une écriture hybride qui mêle les genres littéraires pour le plus grand plaisir du lecteur, cette écriture métissée donne naissance à plusieurs courants littéraires tels que le nouveau roman ; son objectif est d'échapper à la forme traditionnelle et de s'ouvrir aux autres cultures.

Cette approche de la titrologie, nous a permis de signaler certaines constantes dans l'écriture québécoise. Ces invariants sont : d'ordre du renouveau, ou de celui de l'esthétique. A partir de cette constatation, nous pouvons considérer que le choix d'écriture de notre auteure, sur le plan formel et thématique, vient d'un désir de changement et de liberté.

Pour appuyer notre hypothèse sur les indices partextuels, nous allons étudier les dédicaces et les citations.

* 37 -J. Reymond, « Paratexte et échec des formules dans Brazzaville Beach de William Boyd », Etudes Britaniques contemporaines n°1. Montpellier : Presses Universitaires de Montpellier, 1992, p.50.

* 38 -Dictionnaire Le Robert, 1995, p. 327.

* 39 -Christiane ACHOUR, Amina BEKKAT, Clefs pour la lecture des récits Convergences critiques II, Tell, 2002, p71.

* 40 -Petit Larousse illustré1991, librairie Larousse, 1990, p.37.

* 41 -G.GENETTE, Seuils, seuil, février 1987, p.75.

* 42 - C. ACHOUR, A .BEKKAT, Clefs pour la lecture des récits Convergences critiques II, Tell, 2002 p73.

* 43 -M. Laberge, Quelques Adieux, Boréal, 1992, p.108.

* 44 - Ibid, p.109.

* 45 -Idem, p.109.

* 46 -Idem, p.162.

* 47 -Ibidem, p. 162.

* 48 - C. ACHOUR, A .BEKKAT, Clefs pour la lecture des récits Convergences critiques II, Tell, 2002 p147.

* 49 -M. Laberge, Quelques Adieux, Boréal, 1992, p.140.

* 50 -Nous allons étudier cette dimension psychique dans notre prochain chapitre.

* 51 -« (...) Au sens strict, la Révolution tranquille désigne habituellement la période de réformes politiques, institutionnelles et sociales réalisées entre 1960 et 1966 par le gouvernement libéral de Jean Lesage.(...) Au sens large, l'expression est aussi utilisée pour caractériser l'ensemble des décennies 1960-1970, marquées par le triomphe du néo-libéralisme et du néo-nationalisme et par une remarquable continuité dans les orientations des divers gouvernements qui se succèdent à Québéc. » René DUROCHER, Paul-André LINTEAU, François RICARD et Jean-Claude ROBERT, Le Québec depuis 1930, Montréal, Boréal, 1986, p.393.

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