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Sexe, contestation, drogue et rock'n'roll

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par Damien VAQUIE
Université Paul Valéry - Montpellier III - Maà®trise de musique 2003
  

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3. Students for a Democratic Society et ses origines idéologiques

Le comportement des contestataires des années 1960 a été imaginé par l'écrivain David Thoreau dans un ouvrage intitulé Civil Disobedience publié en 1849 qui devint un véritable guide de la contestation. Selon Patrick J.

Dougharty17, 63% environ des contestataires avaient lu ce penseur, personnage essentiel du transcendantalisme, courant littéraire opposé à l'ordre établi et au matérialisme rabaissant et banalisant l'homme d'après les adeptes de ce mouvement. Ce dernier mettait l'être humain en valeur de par la croyance en une parcelle de divinité en chacun de nous. David Thoreau pensait que l'individu doit apprendre à obéir à ses propres règles et non à celles imposées par un gouvernement « injuste ». Son ouvrage cité ci-dessus débute par une formule qui resta célèbre : «That government is best which governs least.» (NdT : « Ce gouvernement est meilleur en gouvernant le moindre possible. »). Cela indique que moins le gouvernement dicte des lois se référant à l'individu même, mieux cela est. Cette vision des choses pousse celui qui l'adopte à penser que le meilleur des cas serait pour le respect de l'individu une absence de gouvernement. Mais David Thoreau poursuit en ces termes : «That government is best which governs no at all.» (NdT : « Ce gouvernement est meilleur en gouvernant que pas du tout. »). Il ne préconise pas du tout l'anarchie. Il est donc préférable que l'Etat ait un meilleur gouvernement que pas du tout d'où sa formule : «Let every man make known what kind of government would command his respect, and that will be one step toward obtaining it.» (NdT : « Laissons chaque homme faire savoir quelle sorte de gouvernement pourrait commander son respect, et cela sera un pas de plus pour l'obtention de cela. »). L'individu doit donc être capable de connaître sa façon d'agir quelles que soient les circonstances sans se sentir obligé de respecter les lois d'autant plus que certaines peuvent paraître « injustes ». L'individu doit faire un choix devant trois possibilités : obéir à ces lois, obéir tout en essayant de les changer ou bien les transgresser dans les plus brefs délais en ayant parfaitement conscience des risques encourus. Une fois que la contestation est mise en place par rapport à un nouveau projet législatif, le gouvernement ne doit pas s'en prendre aux

17 La statistique qui suit a été rapportée par Frédéric Robert de l'ouvrage suivant : DOUGHARTY Patrick J., The American Left, New York, Bantam, 1972, pp. 136-139.

contestataires mais à lui-même parce qu'il est responsable de la promulgation des lois. De ce fait, si l'Etat est « corrompu » dans ses choix ou dans ses décisions, la désobéissance civile apparaît comme un ultime recours. Les contestataires des années 1960 ont tous adopté cette solution. L'une des figures emblématiques de la contestation Noire, le pasteur Martin Luther King, s'efforça de mettre en application les principes de David Thoreau. Les deux hommes divergent seulement sur l'objectivité de la désobéissance civile. Pour Martin Luther King, cette dernière permettait à la société une prise de conscience tandis que chez David Thoreau, la désobéissance se fait à titre individuel. Pour Martin Luther King, l'individu doit franchir quatre étapes avant de devenir contestataire : «Collection of the facts to determine whether injustices exist, negociation, self-purification and action.»18 (NdT : « Collection des faits afin de déterminer quelles injustices existent, négociation, auto-purification et action. »). Il s'agit donc d'une méthode progressive fondée sur le questionnement intérieur permettant d'exprimer le mal-être au grand jour. D'après Martin Luther King, la désobéissance civile est étroitement liée à l'action directe concrète. La revendication peut être verbale mais elle reste malgré tout physique dans la mesure où le comportement corporel du manifestant devient à la fois l'expression du malaise et le remède, prêt à encaisser les attaques physiques ou morales de l'ordre établi. Le contestataire possède une parfaite connaissance des risques et est donc prêt à les encourir pour lui-même et pour ses camarades. Selon Martin Luther King, il existe deux sortes de lois : les justes et les injustes. Ces dernières sont arbitraires et impersonnelles. Elles servent les intérêts d'une minorité, que cette dernière ne respecte pas toujours, et entrave l'épanouissement de l'être humain, ce qui est contraire à l'esprit divin. Seules ces lois dites injustes doivent être transgressées par les contestataires selon les voeux du pasteur : «I would be the first to

18 Frédéric Robert a extrait cette citation de la célèbre Letter from Birmingham Jail, lettre écrite par Martin Luther King dans une prison de Birmingham.

advocate obeying just laws. One has not only a legal but moral responsability to obey just laws. Conversely, one has a moral responsibility to disobey unjust laws.»19 (NdT : « Je veux être le premier à défendre l'obéissance des lois justes. Chacun n'a pas qu'une responsabilité seulement légale mais aussi morale d'obéir aux lois justes. Par contre, chacun a une responsabilité morale que de désobéir à des lois injustes. »). Une loi juste se rapproche de la loi divine car elle permet d'élever l'âme de celui qui la respecte tandis que la loi injuste avilisse et asservit l'homme.

La nouvelle gauche disparaît en 1969 après la désintégration de l'association Students for a Democratic Society. Cette nouvelle gauche n'est pas un mouvement à proprement parler. Elle correspond plutôt à une étiquette regroupant plusieurs mouvements contestataires en désaccord avec la politique menée par le gouvernement américain. Ses adeptes formaient ce qui était plus communément nommé The Movement (NdT : Le Mouvement.) Cette nouvelle gauche se démarquait de l'ancienne gauche et de sa vision binaire du monde. En effet, l'idée de passé et de présent était révolue ainsi que le bipartisme. Ses précurseurs furent Charles Wright Mills, Paul Goodman et Herbert Marcuse pour qui la tension sociale provenait de diverses origines, aussi bien dans le monde du travail que par rapport à certaines minorités assujetties. Elle se démarque surtout sur le fait que toute théorie politique est à proscrire car cette dernière est synonyme de perte de temps nécessaire à la mis en place de l'action directe. Ses adeptes sont plus jeunes que ceux de l'ancienne gauche, pour la plupart des idéalistes qui réagissaient aux phénomènes sociaux pensant façonner un monde meilleur. Le vocable nouvelle gauche est issu de la Grande Bretagne dans les années 1950 par des jeunes socialistes désireux de donner une nouvelle impulsion au Parti Travailliste. En 1960, il créèrent une revue intitulée The New Left Review qui connut un vif succès sur les campus américains. L'apparition de la nouvelle gauche correspond avec celle de la Students for a Democratic

19 Idem.

Society (SDS), si bien que plusieurs historiens et sociologues spécialistes des années 1960 pensent que cela ne fait qu'un seul block. Ce dernier mouvement est le successeur de la Student League for Industrial Society (NdT : Ligue Etudiante pour la Société Industrielle). Le SDS apparaît en janvier 1960 et lutte contre la pauvreté, le chômage, le racisme, l'impérialisme américain, la politique étrangère menée par Washington et pour l'adoption des droits civiques sous la direction de Tom Hayden et de Al Haber. Leur première préoccupation fut de recruter des militants afin d'obtenir une base dynamique et active. Dès lors, ce mouvement veut donner une image de détermination et de solidification. Ses projets furent publiés dans deux manifestes : The Port Huron Statement en 1962 et America and the New Left Era l'année suivante. Ce premier manifeste dénonçait une faible implication directe des individus aux prises de décision aussi bien au niveau national qu'international. L'université était présentée comme une institution formatrice qui semblait être l'endroit idéal pour condamner cette société et offrant une éducation qui se concrétiserait dans la vie quotidienne répondant aux exigences estudiantines, chacun étant capable d'influencer les décisions prises par le gouvernement. La communauté intellectuelle cherchait des parades en essayant d'introduire de nouvelles relations entre institutions et population qui deviendrait plus libre et plus autonome par une participation à l'élaboration des codes régissant la vie de la nation. Le deuxième manifeste quant à lui est une critique plus radicale des institutions libérales en soulignant l'impact de la révolution technologique et de la croissance démographique sur la société. Il dénonce la pauvreté ambiante et les mesures prises par John Fitzgerald Kennedy qui se montre peu favorable aux réformes. Ce manifeste s'intéresse plus aux problèmes sociaux tandis que le premier prône une politique de gestion collective permettant le bien-être matériel de tout être humain. Le but de ces deux manifestes est de faire prendre conscience aux étudiants de leur rôle social. Le principal objectif du SDS est d'arriver à une démocratie de participation dans laquelle l'être humain pourvu

d'un minimum d'intelligence et de sensibilité participerait à la vie politique, économique et sociale. Cette participation démocratique devait toucher les ghettos et les universités. Les membres du SDS pensaient que l'université devait remplir un rôle plus important par rapport à l'insertion des jeunes dans la vie active. Pour cela, les étudiants devraient suivre une formation pratique permettant l'amélioration des rouages de la société puisqu'ils ont en main les connaissances théoriques nécessaires. Le SDS mit en place un projet nommé ERAP (Economic Research and Action Program, traduisible par Programme d'Action et de Recherche Economique) qui fut lancé par Richard Flacks et consistant à envoyer les étudiants dans les quartiers défavorisés permettant un soutien moral à toute personne exclue du rêve américain, à savoir ceux qui vivent dans la misère et la communauté Noire. Pour ce dernier, la contestation devait se vivre sur le terrain. En 1965, la nouvelle gauche était présente sur le quart des campus américains et comptait 200 000 membres (dont les étudiants représentaient que 4%) et 12 000 militants. Elle applique les principes issus de ses manifestes jusqu'en juin 1967. Le mois suivant, Carl Oglesby prend la tête du SDS devenant ainsi plus radical en raison des hostilités croissantes au Vietnam. De célèbres manifestations en furent l'illustration la plus voyante comme Stop the Draft Week (NdT : Stoppez la Semaine de Recrutement) en octobre 1967 ou encore Ten Days of Resistance (NdT : Dix Jours de Résistance) en avril 1968. Ce dernier eut pour conséquence la quasi-paralysie du système universitaire américain. Autre fait marquant, le 24 avril 1968, le SDS appela au soulèvement des étudiants de l'Université de Columbia afin de protester contre la construction d'un gymnase qui expropriait de nombreuses familles Noires résidant à Harlem. Le campus fut bloqué durant une semaine entière et la police dû intervenir. 7000 manifestants pour la plupart issus du monde universitaire furent mis en détention et une centaine fut blessée. Cela conduit à une grève des étudiants contre ces mesures répressives durant deux mois. Le lot des manifestants était réparti en deux groupes : d'un côté les modérés et de l'autre

les révolutionnaires menés par Mark Rudd qui préconisait la destruction de l'université ainsi que la révolution à la place de la démocratie de participation. A la fin de 1968, le SDS a perdu de son influence à cause de ses divergences stratégiques. Une scission officielle fut établie lors de la convention du SDS de juin 1969. Deux groupes en furent constitués :

- The Revolutionary Youth Movement 1 dit The Weatherman en hommage à l'un des vers de la chanson de Bob Dylan intitulée Subterranean Homesick Blues disant «You don't need a weatherman to know which way the wind blows» (NdT : « Tu n'as pas besoin de météorologiste pour savoir dans quel sens tourne le vent ») sous la direction de Mark Rudd désireux d'une collaboration avec le mouvement Noir ainsi que d'une mise en place d'une aide aux pays du Tiers-Monde.

- The Revolutionary Youth Movement 2 dit The Mad Dogs dirigé par Carl Davidson dont le principal objectif était de militer contre la guerre au Vietnam. Cette radicalisation du SDS s'est fait sentir en décembre 1969 lorsque certains adeptes Weathermen commirent des actions terroristes en visant de leurs bombes des juges et des policiers qui représentent l'ordre établi. L'une des ultimes actions du SDS fut nommée The Days of Rage (NdT : Les Jours de Rage) en octobre 1969 lors desquels les participants cherchèrent la confrontation physique avec les forces de l'ordre. Mais cette action fut peu suivie par ses militants et donna une image néfaste du mouvement. En novembre 1970, les Weathermen mirent un terme à leurs exactions après le décès de l'un des leurs lors d'un attentat à la bombe le 6 mars de la même année à Greenwich Village. Le mouvement Weathermen disparaît officiellement trois ans plus tard et marque la chute du dernier bastion de la contestation estudiantine américaine.

La situation économique des Etats-Unis des années 1960 est plutôt positive malgré la contestation : la pauvreté régresse, les femmes deviennent de plus en plus indépendantes grâce à une meilleure insertion dans la vie active, le racisme ambiant a tendance à s'atténuer, une nouvelle classe moyenne Noire

entre dans la sphère socio-économique due à une augmentation des salaires plus rapide que celle des Blancs ce qui leur permet de suivre des études supérieures puisque les universités sont à présent ouvertes à la communauté Noire. Les années 1960 sont synonymes de réformes sociales importantes aux Etats-Unis sous l'impulsion du Président Lyndon Baines Johnson : les écoles privées et les écoles publiques se partagent de manière équitable le même budget équivalant à 1 300 000 dollars en 1965, adoption de Medicare en juillet de la même année prévoyant le remboursement des frais médicaux pour les Américains âgés de plus de 65 ans au travers de leur assurance maladie, disparition du système des quotas par nationalité pesant sur les immigrés, adoption par le Congrès de la loi sur les droits civiques le 6 août 196520. Cela dit, malgré une situation économique et sociale favorable, les jeunes diplômés commencèrent à éprouver un certain malaise, surtout ceux qui accèdent au niveau collège américain et ceux qui vont en terminale dès la fin de cette décennie. En effet, la contestation est née d'une déception qui apparaîtra de plus en plus présente et persiste de nos jours. La démocratisation des études supérieures, reflet de l'amélioration du niveau de vie général, a entraîné une chute de la valeur des diplômes à cause d'une demande inférieure à l'offre. Ceci est dû à une inadéquation entre le niveau d'étude obtenu et les qualifications demandées dans le monde du travail. Ce décalage entre la carrière voulue et la réalité du monde de l'emploi suscite chez les jeunes une forte déception, si bien que la sociologue Françoise MuelDreyfus qualifie cette jeunesse de la fin des années 1960 de génération abusée.21

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon