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La garantie des droits fondamentaux au Cameroun

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par Zbigniew Paul DIME LI NLEP
Université Abomey-Calavi, Bénin - DEA en Droit international des Droits de l'Homme 2004
  

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PARAGRAPHE 2.- LES MECANISMES DE PORTEE SECTORIELLE

Ils sont prévus dans divers secteurs tels que la Fonction publique, l'énergie électrique, mais nous nous intéresserons ici aux secteurs des élections et de la communication. Le premier (A) est dévolu à la compétence d'un organe de contrôle, l'Observatoire national des élections (ONEL), tandis que le second (B) relève de la compétence du Conseil national de la communication (CNC).

A.- Le secteur des élections : la garantie des droits électoraux par l'Observatoire national des élections (ONEL)

L'élection est l'unique mode de dévolution du pouvoir dans tout système qui se réclame de la démocratie. Elle est une période charnière de la vie politique de tout Etat pendant laquelle le citoyen exerce l'un de ses droits constitutionnellement reconnus, le droit de vote, et un autre de ses attributs non moins importants, la liberté de candidature. Le Cameroun se veut un Etat dans lequel ces libertés fondamentales sont reconnues au citoyen et dans lequel un contentieux peut être ouvert à la suite des consultations électorales. Ce contentieux est au premier abord un contentieux complexe, car assorti de multiples spécificités.

D'abord, il faut relever la diversité des lois électorales en vigueur au Cameroun et spécifiques à tel ou tel type d'élection325(*). Ensuite, la diversité des organes intervenant tout au long du processus électoral et qui sont des instances non juridictionnelles et juridictionnelles326(*). C'est cette organisation du processus qui a le plus souvent été à l'origine des contestations relatives aux différents scrutins organisés depuis la réintroduction du multipartisme au Cameroun. Les partis politiques de l'opposition, les observateurs de la scène politique estiment que l'administration, qui organise les opérations électorales au Cameroun, a la main mise sur celles-ci et les influence dans l'intérêt du pouvoir en place. L'indépendance et l'impartialité des différentes structures participant au processus électoral étaient ainsi fortement remises en cause.

Dans ce contexte de crise de confiance à l'égard des organes traditionnels devant assurer la régularité des élections au Cameroun, le législateur crée le 19 décembre 2000, par une loi n° 2000/016, une structure sensée apporter un souffle virginal au processus électoral, l'Observatoire national des élections du Cameroun (ONEL). Ce texte est d'emblée perçu comme « un énième monument d'illusionnisme normatif et de remplissage institutionnel »327(*) qui institue une structure « mort-née ». C'est que l'ONEL naît alors qu'aucun consensus entre le gouvernement et l'opposition sur la structure à retenir n'est observé, pas plus qu'on observe une participation de la société civile à cette édification d'une structure sensée garantir la sincérité des scrutins au Cameroun328(*). Cette institution reçoit alors un accueil mitigé auprès des milieux politiques, en raison de l'ambiguïté de son statut et de sa structuration (1), mais surtout des difficultés liées à sa mission dans le processus électoral camerounais (2).

1.- Le statut et la structuration de l'ONEL

La loi n° 2000/016 du 19 décembre 2000 crée l'ONEL sensé garantir à tous les citoyens, électeurs comme acteurs politiques, la sincérité et la transparence des scrutins. Or, de l'avis de M. OLINGA, « une institution est charpentée en fonction de l'idée d'entreprise qui lui sert de boussole, de principe actif et de régulateur. Entre l'idée d'oeuvre et la structure de la faire accéder à l'effectivité, il y a une relation dialectique forte :l'idée n'est rien sans une institution de concrétisation adaptée, l'institution n'est rien sans une idée qui lui insuffle une âme »329(*). S'agissant du statut de l'ONEL, on peut être amené à penser que l'idée pionnière était d'en faire une structure autonome de l'administration.

L'article 1er de la loi est à cet égard révélateur puisqu'il énonce qu'il est institué une structure indépendante330(*) chargée de la supervision et du contrôle des opérations électorales et référendaires, dénommée ONEL. C'est l'article 3 en ses alinéas 1 et 2 qui énonce la durée du mandat de l'institution qui débute dès la convocation du corps électoral et s'achève une fois les résultats proclamés, soit par la Commission Communale de Supervision (CCS) pour les élections locales, soit par le Conseil constitutionnel pour les élections nationales331(*).

Cependant, quand on s'attarde sur sa dénomination, l'institution est un observatoire, c'est-à-dire, selon les termes de M. OLINGA, « une structure de vigilance de l'ensemble du processus électoral, avec un rôle de rassemblement de l'information utile à transmettre aux décideurs, à l'effet d'éclairer leurs décisions et démarches futures »332(*). Sa nature juridique dans l'ordre juridique camerounais est dès lors évidente, c'est un organe consultatif qui de par sa structuration officie comme une juridiction, car pouvant connaître des réclamations non examinées au niveau des commissions mixtes de supervision. Le problème de l'indépendance de l'institution semble alors se poser avec acuité, un problème qui aura un impact évident sur la conduite de sa mission.

De l'avis des membres de l'opposition camerounaise, l'ONEL ne peut qu'être une structure inféodée au pouvoir en place au regard de l'autorité qui nomme les membres, de l'origine des moyens qui lui sont alloués et de son mandat.

Au regard de la structure de l'ONEL, qu'elle soit centrale ou déconcentrée, aucun rattachement formel à une autre structure de l'Etat n'est observé, ce qui dénote d'une relative autonomie vis-à-vis de toute structure étatique. Cependant, l'ensemble des membres est nommé de façon discrétionnaire par le président de la République, même lorsque ce dernier est candidat à sa propre succession, ce qui est critiquable et pour le moins incohérent. Une garantie est toutefois offerte aux membres relativement à leur mandat, car celui-ci court tout au long de celui de l'institution et qui plus est, ils sont inamovibles. Mais, ainsi que le relève M. OLINGA, ils n'ont aucune garantie de retrouver leur poste à la prochaine mise en place de l'institution333(*).

Le pouvoir discrétionnaire du président de la République sur l'institution est prépondérant, car il peut nommer, selon son bon vouloir, des membres pour telle année électorale qui ne seront pas reconduits lors de la mise en place prochaine de l'institution. N'ont-ils pas ainsi intérêt à oeuvrer pour la stratégie mise en place par le pouvoir en place afin d'espérer être reconduits à leur poste ?

Les membres de l'ONEL bénéficient d'immunités pour les opinions ou actes commis dans l'exercice de leurs fonctions et il est prévu un certain nombre d'incompatibilités à l'exercice de celles-ci ce qui en principe est susceptible de renforcer l'indépendance de la structure. Toutefois, certaines incohérences de la loi de 2000 remettent en cause cette autonomie de l'institution.

Sur les plans financier et matériel, la totalité des moyens mis à la disposition de l'ONEL viennent de l'Etat. Son budget est inséré dans le budget général de l'Etat, ce qui a conduit M. OLINGA à écrire que « l'Etat maîtrise intégralement les moyens de l'indépendance de l'ONEL »334(*). L'institution n'a pas la possibilité de s'autofinancer ou de procéder à des appels de fonds étrangers à ceux de l'Etat camerounais335(*) et les indemnités allouées à ses membres ainsi que les frais de mission qu'ils perçoivent sont accordés sur des conditions fixées par décret, « du président de la République vraisemblablement », précise M. OLINGA336(*).

Si dès lors, on peut effectivement admettre que le président de la République a un pouvoir important en ce qui concerne la nomination des membres de l'ONEL et que l'Etat est le principal bailleur de fonds de l'institution, on est amené à penser que l'ONEL doit par son propre engagement et des actions concrètes bâtir progressivement son indépendance. Elle a eu à le faire, au demeurant, en s'acquittant de sa mission lors de certaines consultations électorales.

* 325 C'est la loi n° 91/020 du 16 déc. 1991 fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée nationale modifiée par la loi n° 97/13 du 19 mars 1997 qui régit les élections législatives. S'agissant des élections municipales, c'est la loi n° 92/002 du 14 août 1992 fixant les conditions d'élection des conseillers municipaux qui reçoit application. L'élection présidentielle est régie par la loi n° 92/10 du 17 sept. 1992 fixant les conditions d'élection et de suppléance à la présidence de la République modifiée par la loi n° 97/020 du 9 sept. 1997.

* 326 - S'agissant des élections municipales, les organes mixtes de caractère non juridictionnel sont les Commissions communales de supervision (CCS) et la juridiction compétente en matière de contentieux est la Chambre administrative de la Cour Suprême aux termes de l'art. 33 de la loi de 1992.

- S'agissant des élections législatives, les organes mixtes sont les Commissions départementales de supervision (CDS) régies par le Chap. 3 de la loi n° 91/020 du 16 déc. 1991 et 3 types de juridiction sont compétents en matière de contentieux : la juridiction civile pour les inscriptions sur les listes électorales et la distribution des cartes d'électeur. La juridiction pénale qui intervient avant la proclamation des résultats pour les cas de flagrant délit et enfin la juridiction constitutionnelle qui connaît des réclamations et contestations relatives aux opérations électorales, statue sur les faits diffamatoires et peut disqualifier le candidat qui en est l'auteur, statue sur l'éligibilité d'un candidat et peut annuler tout ou partie des opérations électorales.

- S'agissant de l'élection présidentielle, les organes mixtes sont les commissions de révision des listes électorales et les CDS et les juridictions compétentes en matière de contentieux sont : la Cour d'Appel qui statue sur les recours contre les décisions de la CDS relatives aux inscriptions ou retranchements sur les listes électorales ; le Conseil constitutionnel qui statue sur les réclamations et contestations liées aux élections, examine les recours relatifs aux décisions de rejet ou d'acceptation d'une candidature, ainsi que celles relatives à la couleur, au sigle ou au symbole, statue sur toute requête en annulation partielle ou totale des opérations électorales. Il statue en premier et dernier ressort.

* 327 A. D. OLINGA, L'ONEL: Réflexions sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire national des élections, Yaoundé, Presses de l'U.C.A.C., 2001, p. 7.

* 328 Lors de la 1e législature de l'ère multipartite en 1992, l'Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès (UNDP) avait déposé une proposition tendant à l'institution d'une Commission électorale nationale autonome (CENA) qui restera lettre morte. Par la suite, en 1997, les différents partis de l'opposition rassemblèrent les signatures de leurs élus en vue de proposer une révision de la Constitution à l'effet d'y insérer une Commission électorale indépendante (CENI). Proposition une fois de plus contrecarrée par le président de l'Assemblée nationale. Sur ces propositions d'instauration d'une Commission électorale au Cameroun, v. A. D. OLINGA, op. cit., pp. 7-13.

* 329 Ibid., p. 13.

* 330 C'est nous qui soulignons.

* 331 BEDJOKO MBASSI, ``Le vote au Cameroun depuis 1992 : Exigences normatives et pratiques sociales'', in Cahier africain des droits de l'homme, n° 9, op. cit., p. 142.

* 332 A. D. OLINGA, op. cit., p. 14.

* 333 Ibid. p. 21.

* 334 Ibid. p. 21.

* 335 Au contraire de cette situation, la CENI au Tchad peut compléter son budget par des concours financiers extérieurs, cité par A. D. OLINGA, op. cit., p. 22.

* 336 Ibid., p. 22.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams