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Le role du ministère public en droit camerounais

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par Moustapha NJOYA NJUMOU
Université de Yaoundé II - DEA droit privé fondamental 2006
  

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B. Le déclenchement des poursuites par d'autres personnes

L'article 60 du code de procédure pénale dispose que « l'action publique est mise en mouvement et exercée par le Ministère public. Elle peut aussi être mise en mouvement par une administration (II) ou par la victime (I) dans les conditions déterminées par la loi ». La situation des juges nécessite également d'être étudiée (III)

I. Le déclenchement des poursuites par la partie civile ou victime

La partie civile bénéficie de la faculté de déclencher l'action publique, soit pour vaincre l'éventuel blocus opéré par le Procureur de la République, soit tout simplement pour éviter de passer par ce dernier. Il convient de présenter les conditions (a) et les modalités de cette mobilisation des poursuites (b).

a. Les conditions du déclenchement de l'action publique par la partie civile

84. Toute victime peut engager les poursuites qu'elle soit une personne physique ou morale. Mais le problème s'est posé relativement aux personnes morales représentant un groupe car leur action présente l'aspect d'une action publique surtout lorsqu'elles agissent pour ne pas demander grand-chose comme indemnisation120. Le législateur y a apporté des solutions en fixant certaines conditions pour le déclenchement de l'action publique par la partie civile en

117 L'exercice de ce pouvoir nécessite un courage énorme au regard de l'instrumentalisation possible du régime disciplinaire des magistrats du parquet.

118 La liberté de parole ne pouvant intervenir qu'après le déclanchement de l'action publique nécessite une information préalable de l'autorité hiérarchique directement supérieure (art 3 (3) du Décret portant statut de la magistrature).

119 L'article 133 (2) dispose que « il (le Procureur Général près la Cour d'Appel) a autorité sur tous les magistrats du Ministère public de son ressort >>.

120 Lire LARGUIER (J), L'action publique menacée (à propos de l'action civile des associations devant les juridictions répressives), Recueil Dalloz 1958, chron. VI pp 6 et s.

générale (1) et celles relatives aux personnes morales en particulier (2).

1. Les conditions générales de déclanchement des poursuites par la partie civile

Aux termes de l'article 71 du code de procédure pénale, toute personne qui aurait subi un préjudice résultant d'une infraction est recevable en justice à l'exception des mineurs non émancipés et des majeurs frappés d'une incapacité. Ceux-ci ne peuvent agir que par le biais d'un représentant. Il suffit donc pour une personne physique de prouver qu'elle a subi un préjudice que celui-ci résulte de l'infraction et qu'il s'agit d'un préjudice direct, certain et actuel. Les ayants droits d'une personne décédée peuvent également exercer l'action civile née d'une infraction devant une juridiction répressive.

Des conditions supplémentaires existent pour les personnes morales.

2. Les conditions particulières aux personnes morales

L'article 74 CPP fixe les conditions particulières aux personnes morales. Le paragraphe 1 de cet article est relatif aux associations, syndicats et ordres professionnels. Ces personnes morales ne sont recevables que sous la condition d'invoquer un dommage certain et un intérêt collectif ou professionnel. C'est dire qu'elles sont irrecevables si l'intérêt en cause est particulier à un des membres ou si le préjudice n'est qu'éventuel.

Le paragraphe 2 quant à lui est relatif à l'assureur de responsabilité. Celui-ci est irrecevable devant les juridictions répressives.

85. Il ne suffit pas d'être recevable et d'exercer une action devant une juridiction répressive pour voir l'action publique mobilisée. Il faut en plus le faire par les modalités appropriées.

b. Les modalités du déclenchement de l'action publique par la partie civile

La partie civile peut mettre l'action publique en mouvement par citation directe (1) ou par plainte avec constitution de partie civile (2)

1. La citation directe

86. La citation directe est la sommation à comparaître devant une juridiction de jugement délivrée par exploit d'huissier à la requête soit, du Ministère public, soit de la partie lésée par l'infraction ou de toute autre personne intéressée. Elle permet à la personne ayant subi un préjudice résultant de l'infraction de mettre l'action publique en mouvement. Lorsque

la victime le fait, elle est tenue d'élire domicile au siège du tribunal saisi si elle n'y est pas domiciliée. La citation portera éventuellement la mention de ce domicile élu ainsi que d'autres indications telles que la date de sa délivrance, les noms, prénoms, adresses, profession et résidence du requérant ; les noms, prénoms et adresses de l'huissier ; les noms, prénoms, filiation et l'adresse complète du destinataire, particulièrement son domicile ou son lieu de travail. La citation doit en outre énoncer les faits incriminés et viser le texte de loi qui les réprime121.

87. L'huissier doit faire toutes diligences nécessaires pour servir la citation au destinataire. Il mentionne sur l'original ainsi que sur les copies ses diligences, ainsi que les réponses faites à ses éventuelles interpellations122. L'huissier de justice est tenu de signifier la citation dans les 5 jours de sa délivrance sauf si le destinataire réside hors de la ville du lieu de comparution. La prorogation est de 1 jour/25 km et de 90 jours si le prévenu réside à l'étranger. Le non respect des délais entraîne la nullité de la citation. Celle-ci est prononcée par la juridiction qui ordonne une nouvelle citation. Elle peut aussi être annulée en cas d'inobservation d'autres formalités portant atteinte aux droits du concerné. Les frais d'annulation sont à la charge de l'huissier de justice si elle résulte de son fait.

On peut tout de même signaler que les frais nécessaires pour procéder par voie de citation directe ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Ce qui rend cette modalité sélective123.

2. La plainte avec constitution de partie civile

88. La plainte avec constitution de partie civile est l'acte par lequel une personne qui s'estime lésée par une infraction saisit le juge d'instruction pour obtenir réparation du préjudice qu'elle prétend avoir subi. Elle est soumise à certaines conditions pour son admission124 et met l'action publique en mouvement.

La constitution de partie civile n'est pas possible pour les infractions dont la poursuite est réservée au seul Ministère public et pour les contraventions. La personne qui entend se constituer initialement partie civile doit consigner au greffe du tribunal une somme fixée par une ordonnance du juge d'instruction suivant les nécessités des enquêtes ; un supplément de consignation pouvant être demandé au cours de celles-ci.

89. Lorsque ces conditions sont remplies, la saisine du juge est valable et met l'action

121 Art. 41 CPP.

122 Lire pour complément l'art. 42 et suivants CPP.

123 Surtout lorsqu'on sait que les aider judiciaires n'est pas facile à obtenir au Cameroun.

124 Il faut de savoir qu'il existe deux types de constitution de partie civile ; la constitution de parte civile initiale (celle que nous étudions ici) et la constitution de partie civile incidente qui vient se greffer à l'action publique déjà engagée.

publique en mouvement. Cela n'a pas toujours été ainsi c'est la jurisprudence qui, opérant un revirement, a eu à l'admettre dans un arrêt de la Cour de Cassation française125. Le législateur camerounais vient confirmer cette jurisprudence dans les dispositions de l'article 157, paragraphe 2 CPP.

Toute constitution de partie civile abusive engage la responsabilité civile de son auteur, ce qui permet d'éviter l'engorgement des cabinets d'instruction par des constitutions de partie civile fantaisistes.

Le législateur prévoit, en dehors du déclenchement de l'action publique par la partie civile, la possibilité pour certaines administrations de le faire.

II. Le déclenchement de l'action publique par certaines administrations

90. Certaines administrations peuvent également mettre en mouvement l'action publique mais seulement lorsque l'infraction porte sur la violation d'une disposition de la législation dont elles ont la charge de veiller au respect. Il s'agit des administrations telles que les eaux et forets, les douanes, le fisc, la prévoyance sociale...il s'agit en fait d'un droit de déclanchement spécial pour les infractions touchant à leur domaine d'activité. En effet si une infraction est commise dans ces domaines, ces autorités joueront à la fois le rôle de la police judiciaire et, dans une moindre mesure, celui du Ministère public qu'elles assistent devant la juridiction de jugement.

91. A l'examen on se rend compte que les voies ouvertes aux autres personnes pour mobiliser les poursuites sont assez sélectives, soit du fait du manque de moyens financiers pour les emprunter, soit pour des causes relatives à la spécialisation du domaine d'intervention. Ceci rend donc l'utilisation de la voie principale assez incontournable.

On pourrait dire que c'est le Ministre de la justice ou le pouvoir exécutif qui est juge des poursuites puisqu'il dispose non seulement des moyens de pression sur le Ministère public susceptibles de réduire son pouvoir d'apprécier l'opportunité des poursuites, mais également, peut autoriser ou « demander » l'arrêt des poursuites à toutes les étapes de la procédure même lorsque c'est d'autres personnes ou administrations qui les ont déclenchées.

Le législateur aurait pu prévoir un organisme national ad hoc composé de magistrats de la cour de cassation qui déciderait du bien fondé des classements sans suite politiques ou non, et de l'arrêt de la procédure. Ceci pourrait obliger le Procureur de la République récalcitrant à délivrer le réquisitoire litigieux, d'éviter les frustrations et de

125 Cass. 8 /12/1906 (arrêt Laurent ATTHALIN) D 1907, I, p207 « qu'en investissant la partie lésée du droit de

saisir de l'action civile le juge d'instruction, le législateur a nécessairement entendu que le dépôt même de la

plainte entre les mains du magistrat, avec constitution de partie civile, mettrait également en mouvement

l'action publique »

respecter le principe de la séparation des pouvoirs. Ce serait une adaptation de la commission des requêtes qu'avait proposée en France, la commission TRUCHE126, dans notre système judiciaire. Aussi l'article 64 devrait être revisité par le législateur.

III. Le déclenchement de l'action publique par les juges

Les juges dont il s'agit sont le juge d'instruction (a) et le juge de jugement (b).

a. Le juge d'instruction et la mise en mouvement de l'action publique

92. Dans le CIC, le juge d'instruction avait la possibilité de se saisir d'une affaire en cas de crimes ou de délits flagrants. Avec le code de procédure pénale, aucune permission ne lui est accordée pour déclancher l'action publique. Les articles 143 et 157 sont assez clairs à ce sujet. L'information judiciaire ne peut être ouverte que si le juge d'instruction est saisi par un acte du Procureur de la République ou par une plainte avec constitution de partie civile. A ce niveau la séparation des fonctions de justice répressive est respectée. Qu'en est il du juge de jugement ?

b. Le juge de jugement et le déclenchement de l'action publique

93. En principe, le juge de jugement ne dispose pas du pouvoir de mettre l'action publique en mouvement. Mais la loi lui donne la possibilité de le faire lorsqu'une infraction est commise à l'audience. A ce niveau il faut distinguer selon que l'infraction est une contravention, un délit ou un crime.

En cas de contravention, le tribunal dresse sur le champ un PV des faits et entend les contrevenants, les témoins et le Ministère public, et statue. Il met donc l'action publique en mouvement (art. 624 a) CPP).

Lorsque l'infraction est un délit, le tribunal procède comme dans le cas des contraventions.

En cas de crime, « le président du tribunal ordonne l'arrestation de son auteur, procède à son audition, dresse PV de ses déclarations et le fait conduire devant le Procureur de la République qui procède conformément à la loi » (art. 624 c) CPP). On peut au regard de ces dispositions, dire que le président de la juridiction ne dispose pas du pouvoir de déclancher l'action publique. Ce d'autant plus que suivant les dispositions de l'article 142 CPP, l'information judiciaire est obligatoire en matière de crime. Donc en disposant que le

126 ROBERT (J-H), De la nécessité d'un Ministère public, l'office du juge : par de souveraineté ou puissance nulle. Etudes rassemblées par CAYLA (O), MARIE-France, RENOUX-ZAGAME, Bruyant LGDJ, 2001.

Procureur de la République procède conformément à la loi, l'article 624 c renvoie certainement à l'exercice par ce dernier de son pouvoir d'appréciation de la mise en mouvement de l'action publique. Ce déclanchement des poursuites qui ne peut se faire que par le truchement du réquisitoire introductif d'instance. Ce qui rend aussi le juge d'instruction actif. C'est cette mobilisation qui caractérise le Ministère public à l'audience pénale.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote