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Analyse des facteurs de blocage de l'introduction des langues nationales dans le système éducatif formel au Sénégal: analyse de la perception des acteurs socioéducatifs de la commune de Fatick

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par Pape Samba Gueye
Université Gaston Berger de Saint-Louis Sénégal - Master 2 2010
  

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4.1. Aperçu sur l'enquête

Dans cette partie il est question de faire le compte rendu des donnés quantitatives et qualitatives obtenues sur le terrain et de pouvoir les analyser sociologiquement pour mieux visibiliser le comportement du fait étudié. Pour ce faire, nous présenterons des tableaux qui mettront en exergue les croisements de variables telles que le sexe, l'âge, les perceptions sur les LN, la catégorie socioprofessionnelle des acteurs socioéducatifs etc. Dans la suite nous allons en effet, interpréter nos investigations dans le but de vérifier nos hypothèses de recherche.

Notre questionnaire a été administré aux acteurs socio éducationnels notamment les PE en se basant sur un échantillon de 20 personnes comportant des hommes et des femmes dont la tranche d'âge se situe entre vingt (20) et plus de soixante(60) ans.

4.1.1. Présentation par identification sociologique des PE50 *

Tableau 1 : Répartition selon l'âge et le sexe

Age

20 -30

31-40

41-50

51-60

60 ou plus

Total

Sexe

 
 
 
 
 
 

Homme

00

03

06

01

03

13

Femme

01

00

03

01

02

07

Total

01

03

09

02

05

20

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

Le tableau ci-dessus met en exergue l'âge et le sexe des personnes enquêtées(les PE). Elles sont en effet, au nombre de vingt(20) dont treize (13) hommes et sept (07) femmes. L'âge moyen des personnes interrogées est de quarante sept (47) ans. Ce qui permet d'affirmer en substance que ces derniers ont une connaissance ou expérience sur le fonctionnement du SEF du fait de leur statut de PE. En effet, nous nous permettons de dire dans l'esprit de notre

50 Parent d'élève

recherche que : Le PE est un membre de la société qui peut être à la fois actif et passif par rapport à la vie de l'école .C'est un individu-acteur social qui a sa perception et son action à donner ou à faire sur l'enseignement par rapport à ses orientations, son fonctionnement et ses reformes. Il a, susceptible d'avoir ou avait des agents éducatifs (apprenants) sous sa responsabilité et sous sa tutelle. En effet, le PE n'est pas obligatoirement le parent ou le tuteur qui assiste aux réunions de l'établissement ou participe aux activités élaborées par l'association des PE, mais il peut être passif tout en ayant sa vision par rapport aux données éducatives de sa localité ou de sa société.

*Tableau 2 : Répartition selon l'ethnie et le sexe

Ethnie

sexe

Sérère

Wolof

Peulh

Autres

Total

Homme

05

03

04

01

13

Femme

05

01

01

00

07

Total

10

04

05

01

20

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

Notre démarche quantitative n'a pas manqué de prendre en compte la dimension genre au niveau des PE en la mettant en corrélation avec la dimension ethnique. Ainsi, cette dernière constitue un élément fort en ce qui concerne le choix et la conception des PE sur la problématique des langues ou de la langue d'enseignement.

Par ailleurs, la configuration ethnique et linguistique plurielle de la commune da Fatick, comme partout dans le pays, nous amène et nous oblige à procéder à un diagnostic dèmolinguistique de nos résultats. Notre enquête au niveau des PE a fait ressortir généralement ces trois appartenances ethnolinguistiques : les sérères, les wolofs et les peulhs. En effet, le tableau montre que la majorité des enquêtés appartienne à l'ethnie sérère et par conséquent la langue sérère constitue leur langue maternelle. Nous avons eu : dix (10) sérères dont cinq(05) hommes et femmes, quatre(04) wolofs dont trois (03) et une (01)

femme, cinq(05) peulhs dont quatre (04) hommes et une 01 femme.51En effet, cette analyse socio ou ethnolinguistique de nos données nous permettra plus tard de décrypter les déterminants socioculturels ou multilinguistiques (s'ils existent) sur les facteurs de blocage de l'insertion des LN à l'école élémentaire formelle.

*Tableau 3 : Répartition selon la catégorie socioprofessionnelle

Catégorie socioprofessionnelle

Fonctionnaire de l'Etat

Travailleurs du secteur privé

Travailleurs du secteur informel

Sans activité

Total

Effectifs

14

00

04

02

20

Pourcentage

70 %

0%

20%

10%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

Notre entretien directif constitue en outre, le moment de repartir les répondants en fonction de leur catégorie socioprofessionnelle. En effet, soixante dix pour cent (70 %) des PE interrogés sont des fonctionnaires de l'Etat contre vingt pour cent (20 %) et dix pour cent (10%) qui sont respectivement dans le secteur informel et des non travailleurs.

51 Nous avons mis en exergue seulement les ethnies ou LN dominantes dans notre questionnaire. Celles qui ne sont pas fortement représentées sont mises dans la rubrique « Autres ».

*Tableau 4 : mesure de la volonté des PE sur l'introduction des LN à l'école

Position

Pour

Contre

Tacite

Total

Effectifs

19

01

00

20

Pourcentage

95 %

05 %

00%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

« Ce sont les parents qui n'aiment pas l'introduction des langues nationales à l'école » : disait plus d'une fois le ministre de l'Education nationale, Kalidou DIALLO dans certains medias sénégalais. Cette affirmation du ministre nous a poussé à vouloir diagnostiquer la conduite des PE face à la problématique d'introduction des LN dans le SEF. Les parents sontils contre un enseignement bilingue (français +LN) à l'école ? Voila la question à laquelle tente de répondre notre démarche quantitative en essayant de mesurer le sentiment des PE sur l'enseignement de nos langues dans les programmes scolaires.

Ainsi, sur vingt (20) PE enquêtés, dix neuf (19 %) approuvent l'introduction des LN dans le système éducatif .En valeur relative, ils constituent quatre vingt quinze pour cent (95 %) des répondants.

Cependant, cet accord n'est pas sans raison dans la mesure où la justification de cette volonté est sous tendue par des arguments de ce type : « parce que cela permet la connaissance de toutes nos valeurs (enracinement) et l'ouverture s'en suivra » ; « c'est un point positif dans la mesure où nos enfants deviennent performants surtout dans les domaines scientifiques » ; « permet à l'élève d'avoir une plus grande connaissance et une plus nette maitrise des apprentissages » ; « permet une bonne communication entre les enseignants et les apprenants, permet une bonne compréhension des enseignements, c'est dans sa langue nationale que l'enfant a une meilleure compréhension des apprentissages » ; « mieux on utilise sa propre langue, plus on est à l'aise dans les autres langues. Ça permet aussi la sauvegarde des valeurs culturelles propres » ; « peut permettre une mobilisation sociale autour de nos valeurs nationales » ; « permet une amélioration des résultats scolaires ». (Enquête de terrain, commune de Fatick, avril 2011). La problématique de l'enseignement bilingue à l'école intéresse les PE. Ces discours témoignent une volonté ô combien déclamée par les PE par rapport au projet d'introduction des LN dans le SEF. En effet, l'utilisation des LN dans les programmes scolaires permettrait

au moins deux choses : le développement cognitif rapide des jeunes apprenants et leur endoculturation-rèenculturation » 52 par rapport à leurs environnement et valeurs culturels. En effet, les parents sont conscients que la transmission de connaissances n'est facile que si le moyen linguistique utilisé émane de sa propre culture. Si nous sommes d'avis avec cet argumentaire, il serait alors pertinent de dire que le choix et le comportement éducatif d'un pays doivent avoir une relation avec son comportement socioculturel. C'est dans ce sens que KI ZERBO parlait d'Education endogène pour le continent africain. Comment analysons - nous les pléthoriques dictons et proverbes en LN très souvent utilisés dans la vie sociale sénégalaise sans qu'ils puissent avoir accès au SEF de base ? L'absence de ces proverbes et dictions dans le SEF est la résultante de l'absence des LN dans ce dit système. Intitule de rappeler que l'essai de leur traduction ou leur équivalence en langues occidentales trahirait en substance leur sens et par là, les apprenants pourraient en amont ignorer le vrai sens et le contexte culturel des codes sociaux mis en exergue par ces styles linguistiques. Par conséquent, ces mediums de transmission de connaissances mis en oeuvre dans l'enseignement élémentaire formel, auraient comme atouts la compréhension des cours qui corsera ensuite les résultats scolaires. A supposer que ces arguments soient pertinents, nous confessons que ce projet d'introduction des LN à l'élémentaire conduirait à un double succès qui se range, entre autres, dans le domaine cognitif et socioculturel.

En effet, par le biais de notre questionnaire les PE n'ont pas passé sous silence leur ferme dessein à l' égard de l'accueil des langues maternelles des jeunes sénégalais à l'école formelle.

En conséquence, sont fausses et aberrantes les thèses qui affirment que les parents n'aiment pas l'introduction des LN dans le SEF. Ces dernières s'inscrivent soit dans une perspective de tromper l'opinion publique en usant du pseudo- refus des parents, soit qu'elles sont le fruit d'une politique mal définie dont la communication publique/sociale n'est pas bien formulée ou entreprise. Si les parents n'ont pas manqué de montrer leur désapprobation par rapport aux réformes linguistiques de l'école, c'est parce que la couverture communicationnelle n'était pas assurée par l'Etat. Beaucoup de nos enquêtés chargés de piloter les classes expérimentales ont eu à déplorer ce manque d'information à l'égard des parents. Ainsi, la majorité d'entre eux ne sait pas comment doivent se passer les reformes de l'école et les programmes qui s'y passent ou qui y sont envisagés. De ce fait, certains parents n'ont pas su accueillir le

52 Selon le professeur Gora MBODJ, les termes endoculturation et rèenculturation constituent le processus de retour et de recours à sa culture après une phase d'acculturation ou d'assimilation culturelle vécue.

projet de l'enseignement bilingue ou multilingue à l'école puisqu'ils le considéraient comme anodin par rapport au système classique. En somme, le tableau qui suit montrera l'enthousiasme des parents face l'introduction des LN dans les programmes scolaires.

*Tableau 5 : considérations des LN dans le SEF par les PE

Considérations

Très bonne

Bonne

Très mauvaise

Mauvaise

Non précis

Total

Effectifs

13

07

00

00

00

20

Pourcentage

65%

35%

00%

00%

00%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011

Ce tableau ci-dessus témoigne d'une interrelation par rapport au tableau 4. Ainsi, décrire et analyser le comportement des acteurs socioéducatifs (les PE) face à une éventuelle réforme linguistique de l'enseignement élémentaire, revient à s'interroger sur les perceptions ou considérations par rapport à l'insertion des LN dans les enseignements de l'école formelle. Par ailleurs, à travers les réponses collectées au niveau des PE, les considérations des LN dans le SEF sont bonnes voire très bonnes. En effet, soixante cinq et trente cinq pour cent (65 % et 35%) des parents interrogés estiment qu'il serait bon d'introduire les LN dans le système d'enseignement actuel.

Cependant, notre enquête quantitative ne décèle pas de mauvaises considérations venant des PE par rapport à la mise en oeuvre des LN dans le SEF. Formellement, ces acteurs socioéducatifs déclarent être consentants à un système d'enseignement bilingue. En effet, le tableau 5 nous fait remarquer que sur vingt répondants il n'y en a aucun qui fait preuve de mauvaises considérations sur l'introduction de nos langues dans le système éducatif actuel.

En somme, la majorité des parents considère l'enseignement bilingue comme un atout pour le développement des instances éducationnelles et socioculturelles. En effet, cette conduite formellement exprimée par les PE dans le questionnaire est-elle toujours le cas dans les discours formels ou/et informels de la réalité sociale?

*Tableau 6 : Types de causes de la non-introduction des LN dans le SEF selon les PE

Causes

Politique

Economique et

didactique

Multilinguisme social

Autres

Sans réponse

Total

Effectifs

12

03

02

00

03

20

Pourcentage

60%

15%

10%

00%

15%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

La connaissance empirique durable et certaine sur le système d'enseignement de la plupart des PE nous a permis d'évaluer leurs perceptions sur les facteurs de blocage c'est-à-dire les faits qu'ils estiment être les causes de la non introduction des LN à l'école élémentaire formelle. En d'autres termes, la connaissance des parents du mode de fonctionnement, des reformes et des politiques linguistiques sur l'éducation formelle nous permet de faire une analyse sur la vision ou la compréhension sociale des blocages de l'enseignement de nos langue à l'école formelle.

Selon les données de l'enquête, les déterminants politiques, économico didactiques et multilingues ont été signalés par les répondants. En effet, la majorité des parents déclarent le manque de détermination politique comme un facteur de blocage fondamental. Par ailleurs, pusillanimité des politiques est ainsi mentionnée par l'enquête : sur les vingt (20) PE, douze (12) soutiennent l'aspect politique comme le premier facteur qui empêche d'introduire nos langues à l'école. En valeur relative, ils constituent soixante pour cent (60%) des enquêtes. Dans ce même ordre d'idée, les illustrations faites par les parents sur la question de la velléité politique sont sous tendues par des propos de ce genre : « les expériences entamées ne sont jamais arrivées à terme » ; « les politiques portent plus de considérations aux projets d'enseignement d'un autre pays qu'à l'introduction des langues nationales » ; « le SEF sénégalais se fonde sur la volonté et les orientations des bailleurs de fonds » ; « chaque année on nous parle de l'introduction des LN dans le SEF.je pense que ça ne se produira pas car nous vivons une nouvelle système de

colonisation »53 ; « le gouvernement n'a pas mis les moyens » ; « depuis qu'on a lancé l'idée ,on constate un manque de suivi de la part des autorités » ; « si l'Etat voulait l'introduction des langues à l'école ,il y aurait mis les moyens » ; « est ce que le gouvernement aime ça » ; « les finalités éducatives dépendent des décideurs ».(Enquête de terrain, commune de Fatick, Avril 2011).

Les parents interrogés dans notre enquête ayant un niveau d'instruction élevé, moyen ou faible et même ceux qui sont sans niveau ont conscience des blocages de l'enseignement bilingue au Sénégal dus, selon la majorité d'entre eux à une carence de traduction en actes concrets des projets, programmes et politiques éducatifs. Lorsque nous analysons les propos des PE, la responsabilité des politiques est mise en exergue par des concepts comme : décideurs, Etat, autorité, gouvernement, bailleurs de fonds. En effet, ces concepts mis en rapport causal avec les blocages de l'introduction signifieraient que ces types- idéaux nommés par les répondants, constituent en amont le noeud du problème. Pour les parents, les acteurs ou agents cités n'ont pas su et pu s'engager à fond afin de concrétiser les politiques théoriquement élaborées depuis des décennies.

Ainsi, par rapport au comportement timoré des politiques, certains PE ne manqueront pas de signaler l'influence de la politique étrangère sur les orientations éducatives sénégalaises. L'introduction des LN dans le système éducatif est-elle ralentie, déconseillée ou « interdite » par les grandes puissances qui financent en partie « notre Education nationale » ? En tout état de cause, nous ne sommes pas aptes à apporter une réponse à cette interrogation dans la mesure où certaines de ces puissances interviennent même sur la mise en oeuvre d'un enseignement bilingue au Sénégal.54Comment comprendre donc l'intervention de ces anciennes puissances « dèculturatrices » dans notre politique éducative et linguistique ? En effet, nous tenterons d'y apporter des réponses dans nos futures recherches.

Cependant, d'autres enquêtés ont axé leurs réponses dans le domaine économico didactique et plurilingue. Contrairement à la vision précédente, celle-ci n'est pas très bien représentée ou prise en compte par les PE. Seul quinze pour cent (15%) et dix pour cent (10%) soutiennent respectivement les facteurs économiques et multilingues comme les blocages premiers liés à ce projet d'enseignement des LN à l'école. En valeur absolue, ils constituent seulement trois

53 Dans le souci de respecter la méthode de transcription des réponses des enquêtés, nous nous sommes nullement engagés à corriger certaines fautes ou erreurs d'orthographe ou grammaticales.

54 Le projet EMILE (première édition 2010-2011) financé par World Vision dans le département de Fatick pour l'enseignement du sérère dans certaines classes des écoles élémentaires formelles.

(03) et deux (02) parents qui soutiennent cette thèse : les facteurs de blocage sont à rechercher dans le comportement économique et socioculturel de l'Etat du Sénégal.

Ainsi, le contexte de dépendance économique de notre pays fait que le système éducatif est anéanti et ne parvient pas en retour à se doter de moyens pour la réalisation de ses entreprises élaborées. Ils utilisent des propos de ce type pour justifier leur vision : « les langues nationales qui ont été introduite l'ont été avec beaucoup de difficultés faute de support, de matériel et de formation continuée et de suivi » ; « parce que se serait difficile de payer des enseignants en wolof, sérère ; peulh etc. ». (Enquêtes de terrain, commune de Fatick, Avril 2001).

En outre, selon la configuration sociographique et sociolinguistique du pays certains la considère comme un facteur de blocage à ne pas négliger. En effet, ces facteurs sévissent dans l'espace intra et extra scolaire dans la mesure où certains comportements linguistiques de la vie sociale sont transposés dans le milieu éducatif. Ceci peut être remarqué dans les propos suivants avancés par certains répondants : « Certains enseignants sont mal à l'aise dans cette LN » ; « problème de cohésion nationale ». (Enquêtes de terrain, commune de Fatick, Avril 2001).

En somme, ces dernières remarques sont en amont rangées dans le système de représentation sociale que les sénégalais font des LN par rapport à une historique linguistique marquée par la domination de la langue française. En effet, cette situation sera prise en compte dans notre analyse et interprétation des entretiens que nous aurions à réaliser.

*Tableau 7 : relation entre la langue de l'ethnie et le choix de la LN à introduire dans le SEF

Ethnie

LN

préférée

Sérère

Wolof

Peulh

Autres

Total

Sérère

09

01

00

00

10

Wolof

00

03

01

00

04

Peulh

01

02

02

00

05

Autres

00

01

00

00

01

Effectifs

10

07

03

00

20

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

Nous avons dans notre recherche jugé opportun de ressortir la relation qui existe entre langue de l'ethnie des PE et leur choix ou préférence de la LN pour l'éducation de leurs enfants. Dans la mesure où le facteur multilinguisme social est prononcé comme un élément lié à la non introduction des LN dans les programmes scolaires, il serait pertinent de mesurer et d'analyser le comportement des sénégalais (surtout des PE) face au plurilinguisme par rapport à l'éducation formelle. Ainsi, dans le tableau 7 il apparait clairement que la langue maternelle ou ethnique est primée sur toutes les autres par les répondants. En effet, sur dix (10) PE appartenant à l'ethnie sérère, les neuf(09) prônent pour l'enseignement de la langue sérère, trois (03) PE de l'ethnie wolof sur quatre (04) préfèrent en premier l'introduction du wolof et sur cinq (05) parents de l'ethnie peulh, deux(02) recommandent la langue peulh contre deux (02) sont pour le wolof et un(01) seul pour le sérère. En effet, la justification du choix des enquêtés est à rechercher dans leur appartenance socio ethnique et non dans la logique des faits. C'est que nous appellerons plus tard la tendance à l'ethnocentrisme de la société sénégalaise.

En effet, seul un(01) PE sérère, par ailleurs maitre expérimentateur, donne la priorité au wolof dans la mesure où, selon lui la langue wolof regorge des richesses techniques et sémantiques qui rendent facile la transmission de connaissance, par exemple les dictons et proverbes largement partagés par tous les groupes ethniques sénégalais.

En conséquence, cet ethnocentrisme peut être qualifié d'aveugle ou d'irrationnel dans le fait que même les agents qui s'y adonnent n'ont, pour la plupart, pas de compétences formelles (écriture ou lecture) sur leurs langues d'appartenance ethnique. Le tableau suivant mettra en exergue ce que nous venons d'aborder.

*Tableau 8 : compétences en LN des enquêtés

Capacités

Lire seulement

Ecrire seulement

Lire et

écrire

Ni lire ni

écrire

Total

Effectifs

02

00

13

05

20

pourcentage

10 %

00%

65%

25%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

La compétence linguistique ou pour parler comme BOURDIEU le « capital

linguistique »constitue un indicateur éminent concernant la politique de promotion des langues et le sens donné à la langue par la société où elle est parlée. Ainsi, à travers notre enquête nous remarquons que la société sénégalaise n'est pas en reste pour ce qui est de l'écrire et de la lecture des LN. Notre tableau ci -dessus montre que sur vingt (20) PE, les treize (13), soit soixante cinq pour cent (65%) déclarent être en mesure de lire et d' écrire leur langue maternelle. Par contre vingt cinq pour cent (25%), soit cinq sur vingt (5 /20) des répondants ne savent ni lire ni écrire leur langue maternelle.

Par ailleurs, le capital linguistique en LN existant chez la plupart des PE peut s'expliquer par un contexte sociohistorique bien déterminé. En effet, pendant les premiers moments des indépendances et un peu plus tard dans les années 1990 avec la redéfinition de nouvelles politiques linguistiques, le Sénégal s'était inscrit sur les bases d'une politique dynamique de promotion des LN. Cette politique était sous tendue par ce qu'on appelé l` alphabétisation. Cette dernière consiste à enseigner la lecture et l'écriture d'une langue aux adultes et aux adolescents qui n'ont pas été scolarisés. Cependant, au Sénégal cette alphabétisation était aussi ouverte aux personnes instruites ou scolarisées en français mais qui ne le sont pas en langue nationale.

C'est dans ce sillage que la quasi-totalité des PE interrogés fait parti de la génération qui a eu à se doter des attributs linguistiques plus soutenus que les générations actuelles.

*Tableau 9 : information sur les programmes d'introduction des LN dans le SEF au niveau des PE

PE

PE informés

PE non informés

Total

Effectifs

12

08

20

Pourcentage

60%

40%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

L'existence des programmes ou projets d'un enseignement bilingue ou multilingue n'a jamais été non connue par les populations sénégalaises. La grande majorité des parents ou des acteurs socioéducatifs est plus ou moins consciente de l'idée sur les reformes linguistiques élaborées par l'Etat du Sénégal. Ainsi, ce qui reste à savoir ou à mentionner c'est la non- connaissance totale ou suffisante de ces programmes. En effet, nos enquêtes nous ont permis de remarquer que la plupart des PE argue avoir connu les projets mis en oeuvre par l'Etat. Par ailleurs, soixante pour cent (60%) des PE disent être informés(être ou courant) des programmes qui ont eu lieu en ce qui concerne l'introduction des LN dans le SEF ,soit douze (12)sur un total de vingt(20) PE. Cependant, quarante pour cent(40) des PE ignorent l'existence de la mise en oeuvre des programmes d'enseignement bilingue, soit huit (08) PE sur un total de vingt (20).A rappeler, que certains PE déclarent être au courant de ces programmes tout en se versant dans un amalgame : ils cofondent l'introduction des LN dans les programmes scolaires avec les programmes d'alphabétisation que nous avons récemment explicités.

*Tableau 10 : Langue parlée dans les lieux de travail

Langue

LN

Français

LN et Français

Total

Effectif

14

05

01

20

Pourcentage

70%

25%

05%

100%

Sources : enquêtes de terrain dans la commune de Fatick, Avril 2011.

Il existe un déphasage entre la langue de l'administration qui est l'officielle et les langues
locales/nationales et parfois dites vernaculaires qui sont communément utilisées dans les

interactions sociales, professionnelles ou interpersonnelles à l'enceinte de tous les secteurs et services administratifs formels du pays (écoles, institutions judiciaires etc.).C'est dans ce sillage que nous nous sommes intéressé à ressortir le comportement et le choix linguistiques des sénégalais par rapport au comportement de la langue officielle optée par l'Etat du Sénégal. A ce titre, nous décrirons à travers le tableau 10 la relation existante entre langue officielle et LN dans les instances administratives par rapport aux lieux de travail. En effet, dans les données obtenues soixante dix pour cent (70%) soit quatorze (14) sur vingt (20) répondants utilisent les LN pour communiquer dans leur lieu de travail. Par ailleurs, ces chiffres peuvent être illustrés clairement par les remarques faites sur ce sujet lors de nos observations : dans un de nos lieu d'investigation ; l'école élémentaire Darel 2 dont le directeur faisait parti des maitres expérimentateurs des classes bilingues (2002-2010), nous avons pu assister à trois scènes qui mettent en exergue le problème que nous venons d'exposer :

D'abord, une réunion du corps professoral tenue en LN plus exactement en Wolof a attiré notre attention. Même le directeur dans notre entrevue n'a pas manqué de nous signaler le fait dans le but de mentionner l'incontournable recours aux LN dans les lieux de travail formel: « tu as vu toi-même tout à l'heure, on faisait notre réunion en wolof » disait-il. (Observations sur le terrain, commune de Fatick, Avril 2011).

Ensuite, une enseignante qui répondait au téléphone devant ses élèves n'a pas échappé à l'automatisme linguistique déterminé par la langue maternelle. Nous entendîmes ces propos : « allô !ca va. Nanga deff ? (...) mala raw (....) Ana sèn waa keur(...) naka ligguèy bi nak (....) ah diam rek (.....) ». (Observations sur le terrain, commune de Fatick, Avril 2011).

Nous avons pu remarquer en fin, des discussions permanentes entre collègues de l'école. Ainsi, les enseignants échangeaient des propos par le biais des LN, soit en wolof, soit en sérère.

En somme, lorsque nous poussons l'analyse de ces faits jusqu'à son terme nous dirons que les LN sont plus représentées et plus usitées que le français dans les instances administratives formelles. Ainsi, au Sénégal nous passons d'une période d'interdiction des LN à un moment de laisser parler au sein des secteurs ou services administratifs. La première période remonte

au temps de la colonisation et quelques années après l'indépendance où l'usage des LN dans les lieux formels de travail (par exemple dans les bureaux) était formellement et symboliquement proscrit. Par ailleurs, dans le deuxième moment (de nos jours) la ligne de démarcation qui existait entre LN et langue officielle est franchie. Il n'existe quasiment plus de limite en ce qui concerne l'usage d'une LN ou de la langue officielle dans les services administratifs formels. En conséquence, l'usage exclusif du français est noté dans des cas rares.

Selon les données obtenues, seuls vingt cinq pour cent (25%), soit cinq sur vingt (5/20) des répondants utilisent seulement le français dans le leur lieu de travail. En revanche, seuls cinq pour cent (5%) des enquêtés déclarent utiliser à la fois langue officielle et langue (s) nationale (s).

En somme, d'après nos enquêtes la langue officielle, constitutionnellement comme medium de communication dans les services administratifs formels, est fortement engloutie par les LN à travers les interactions des acteurs socioprofessionnels. Ce fait s'explique t-il par un refus de parler la langue d'autrui ? L'habitus linguistique agit-il en permanence dans les lieux de travail ?

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera