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Attributions des prénoms nouveaux en RDC:cas des enfants nés au cours de la guerre civile de décembre 1998 à  novembre 2000

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par Anouar Jodel Givner Bouamoutala Samba
Université Marien Ngouabi du Congo-Brazzaville  - Maà®trise 2010
  

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Section II. Analyse et interprétation des données

II.1. Données qualitatives relatives à la population d'étude

Dans cette étude nous avons analysé cent vingt (120) prénoms soit un total de 100% dont 52,5% des enfants de sexe masculin et 47,5% des enfants de sexe féminin. L'analyse de ces prénoms a été motivée par le fait que ces enfants sont nés dans un contexte de guerre. L'effectif de sexe féminin (47,5%) est faible par rapport à celui des enfants de sexe masculin (52,5%), ceci peut s'expliquer par le fait qu'il y a plus eu de naissances des enfants de sexe masculin que ceux des enfants de sexe féminin.

Sur 100% des enquêtés répartis par année, nous avons 50% d'individus enquêtés par année qui va de décembre 1998 à novembre 1999 et de décembre 1999 à novembre 2000. De nos enquêtés, nous avons 24,17% des enfants de sexe féminin et 25,17% de sexe masculin.

Les différents types de prénoms que nous avons recueillis dans les registres de naissances de la mairie de Makélékélé nous ont donnés les résultats suivants :

1. "Dieu Merci ou Vainqueur" (23,33%) ;

2. "Dieu Veille" (20,83%) ;

3. "Ça - Ira" (17,50%) ;

4. "Guervie" (10,83%) ;

5. "Sacrifice" (9,17%) ;

6. "Consolât - Shaloom" (7,50%) ;

7. "Croyance" (5,83%) ;

8. "Bonheur " (5,00%).

Les prénoms "Dieu Merci ou Vainqueur" avec 23.33% viennent en tête du peloton, du point de vue statistique, ce prénom est celui qui a été le plus donné aux nouveaux-nés durant la guerre. Ce prénom a été attribué à la fois aux filles et aux garcons. D'où le plus grand pourcentage qu'il a obtenu. Il constitue à notre humble avis, un hommage rendu à Dieu qui a protégé les parents et l'enfant venu au monde des affres de la guerre. Du reste, les parents pensent avoir triomphé de la mort avec l'assistance bienveillante de Dieu.

Le prenom "Vainqueur" est très révélateur de la toute puissance de Dieu qui, opère des miracles.

Les recherches sur le terrain nous ont révélé que le prénom "Dieu Veille" est apparu au Congo avant la guerre de 1998 a 1999. Il est arrivé avec les églises de réveil et a connu une sorte de renouvelement pendant la guerre civile concernée.

Quant au prénom "Consolât Shaloom" avec un pourcentage de 7,50%, ce prénom qui a une forte connotation religieuse n'est pas attribué au hasard. Nous constatons que ce type de prénom vient pour apporter quelque chose de nouveau dans le vécu des parents et explique leur attachement envers les associations dites religieuses implantées au Congo - Brazzaville.

Le prénom "Ça - Ira" qui présente un pourcentage de 17,50% connaît une progression assez importante pendant la guerre. Les parents géniteurs, en prénommant leurs enfants avec crainte et arrière pensée, pensent, qu'ils ont quand même réussi à survivre dans les difficultés, malgré les ennuis, les situations difficiles à surmonter que leur a imposé la guerre.

Le prénom "Bonheur", avec un pourcentage de 5,00% montre l'image d'une attribution faible de tous les prénoms donnés aux enfants nés durant cette période de guerre civile allant de novembre 1998 à décembre 2000. Très limité dans le temps, ce prénom semble-t-il traduit le Bonheur qu'a dû vivre les parents pendant cette période de guerre, mais une guerre qui ne les a pas touchés, inquiétés physiquement et financièrement. Parmi ces hommes heureux figurent les personnes qui ont été protégées par des différentes milices.

Le prénom "Croyance" avec un pourcentage de 5,83% témoigne la foi, la motivation que les parents géniteurs avaient en leur Dieu. Par ce prénom, nous comprenons que pour certains géniteurs, la foi, la croyance étaient considérées comme une arme capable de défendre l'individu durant tous ces moments difficiles que la plupart des parents ont connus.

Le prénom "Sacrifice" avec un pourcentage de 9,17% révèle les situations qui ont évoqué des conséquences émotionnelles que les parents ont finies par expliquer sur les prénoms de leurs enfants. Certains parents peuvent ou déterminer la réparation avec certains membres de leurs familles, des pertes d'êtres chers, les modifications des conditions financières, sociale, la perte de capacité financière de subvenir aux besoins de la famille, soins médicaux, alimentation saine, peuvent être conçus comme des situations qui sont à l'origine de certains nouveaux prénoms. Ce phénomène qui est bien évidemment lié à la guerre a donné naissance à des prénoms correspondant à leurs vécus de la guerre.

Le prénom "Guervie", avec un pourcentage de 10,83%, sous-tend la multiplicité des problèmes vécus par les parents. Il est constitue comme nous l'avons déjà dit de deux éléments, la guerre et la vie et n'exclu pas l'hypothèse d'un choix concerté entre le père et la mère qui s'appuie sur les situations les plus complexes et les plus horribles qu'ont vécues les deux parents. Les parents géniteurs en attribuant ce prénom à leurs enfants pensent que malgré la guerre, les gens peuvent vivre. Par là, nous confirmons qu'il est un prénom qui a un rapport étroit avec la guerre puisqu'il a fait son apparition en temps de guerre et disparaît en temps de paix.

S'agissant du niveau d'instruction des parents, nous constatons que toutes les fiches examinées montrent que ces derniers sont tous lettrés et ceux qui ont le niveau d'instruction le plus bas se sont arrêtés au primaire avec un pourcentage de 14,17% de la population d'étude. Ces résultats ne nous inquiètent pas tout en sachant que de grands investissements furent faits dans ce domaine pour une scolarisation massive. La République populaire du Congo devenue la République du Congo a atteint par exemple le plus haut pourcentage du taux de scolarisation après les années 1965.

« L'expérience scolaire du Congo retient cependant une certaine attention. D'abord l'enseignement nationalisé depuis 1965 est laïc, gratuit et obligatoire pour tous les enfants de six à seize ans. Ensuite, le Congo est l'un des rares pays en Afrique dont le taux de scolarisation atteigne les 100%. Par ailleurs, l'expérience scolaire au Congo, premier pays d'orientation socialiste au coeur de l'Afrique, a une signification scientifique et politique de premier ordre »20(*).

Le cas des parents qui ont un niveau secondaire et qui ont déclaré leurs enfants représente un pourcentage de 59,17%, sur les fiches enquêtées. Ceci montre que le système éducatif remplissait bien ses fonctions : produire des savoirs, développer des intelligences, former des compétences, donner au niveau du secondaire les capacités d'écrire une langue.

D'autre part nous constatons que l'instruction scolaire était assimilée à un tamis qui sélectionnerait des aptitudes ou des attitudes et le redoublement demeurait élevé surtout pour le collège vers le lycée. Et il faut aussi ajouter que l'explosion démographique a conduit à une implosion scolaire et semble -t-il à une détérioration de la qualité de l'enseignement.

De ces prénoms retenus dans notre échantillon, trois types de prénoms nous reviennent souvent : "Dieu Veille", "Dieu Merci ou Vainqueur", "Ça - Ira". L'ordre dans lequel nous venons de les énumérer dans le tableau tient compte de la persistance dont tel prénom est plus redondant par rapport aux autres. Ceci montre que les types de prénoms qui reviennent beaucoup expliquent la protection, la réussite, la sécurité. Le Congo étant un pays fortement chrétien, nous pensons que ces habitants du Congo qui subissent l'influence des autres types des sociétés ou des églises installées au Congo ont réveillé les consciences des congolais au changement des autres types des prénoms tout en rejetant les vieux prénoms. Cette crise qui éclate en décembre 1998 a provoqué des situations qui ont fait qu'une partie de la population vivent dans les sites, dans les secteurs nord et centre de la capitale, tandis que la grande majorité de cette population est bloquée sans secours à l'intérieur des régions méridionales du Congo : Pool, Bouenza, Lekoumou, Niari, Kouilou forestier.

Les sites de Brazzaville présentaient un nombre pléthorique des déplacés, soit 3 à 4 mille personnes par site. Les hommes et les femmes du troisième âge présentent un état de santé inquiétant.

Plusieurs maladies sont régulièrement rencontrées à chaque poste de santé installé dans chaque site ; la diarrhée, le paludisme, la toux et la grippe étaient présentes partout à cause de la promiscuité du nombre élevé de gens dans les sites ; ces maladies se propageant facilement. Il en est de même pour la toux et la grippe qui se transmettent facilement par un simple contact humain.

Par ailleurs, la distribution de l'aide humanitaire des organisations internationales provoque des polémiques dans les sites, compte tenu du nombre élevé des déplacés et surtout de la longueur du séjour. Cette aide qui au départ était accordée à tous les déplacés, petit à petit ne concerne plus que les plus vulnérables. Mais cette décision est jugée injuste. Pour les parents tous les déplacés connaissent les mêmes difficultés. Même les fonctionnaires sont tombés dans la paupérisation, en raison du manque de salaire depuis plusieurs mois. Le pillage ayant détruit les petits ateliers, provoque la fermeture des magasins, fait disparaître des centaines de petites sociétés de services, les responsables ne recueillant plus rien comme revenus.

Par ces faits, nous pouvons dire que ces prénoms sont considérés comme une influence de la guerre qui a poussé à exprimer leur sentiment de faiblesse devant une situation qui leur a été redondante. Cela montre que l'un des traits le plus fort de ces prénoms c'est le vécu quotidien de la guerre. Ces prénoms sont considérés comme une victoire sur la guerre civile qui leur a permis de se défendre contre le mauvais vent.

La guerre civile qui a secoué les populations sud de Brazzaville a annoncé un véritable renversement au niveau d'attribut des prénoms. Le prénom qui est perçu comme un deuxième élément qui individualise l'être avec précision est devenu le noyau qui explique la vie des parents géniteurs et l'environnement dans lequel évoluent les parents géniteurs. Les parents en prénommant leurs enfants ont mis en place des prénoms secourables (qui portent volontiers secours aux autres, aux enfants), mesurables voire protecteurs, qui peuvent permettre à la personne humaine d'être protégée face aux dangers. Quand il est menacé d'un danger. Le sens et la valeur que les parents attribuent à ces prénoms déterminent des nouvelles situations. C'est en grande partie les circonstances vécues par les parents géniteurs qui font que tel parent prénomme un enfant par "Vainqueur ou Dieu Merci". Mais la plupart des parents géniteurs se détachent de plus en plus des vieux prénoms.

Les nouveaux prénoms qui concernent notre étude sont inscrits dans un contexte de la guerre civile qui change de temps en temps. Et cela a fait que certains parents géniteurs découvrent une autre réalité qui leur a permis de prénommer leurs enfants en prenant une décision consciente sur le choix redondant de leur vécu de guerre civile.

Ce changement qui a eu lieu pendant la guerre a provoqué des conséquences émotionnelles qui déterminent ou expliquent certains troubles subits, certaines agitations passagères ou persistantes causées par la guerre ou par un sentiment vif de peur.

Plusieurs raisons ou facteurs peuvent expliquer la forte montée des prénoms observés pendant la période de crise dans notre société. Ces raisons ou facteurs sont :

Le prénom "Sacrifice" avec un pourcentage de 9,17% révèle que les parents ont paye un lourd tribut a la guerre. Ce lourd tribut est constitue de pertes d'êtres chers, des pertes en bien matériel et argent vole pendant la guerre. La brutale et inattendue séparation avec les membres de la famille, la perte des êtres chers, la perte de soutien communautaire ou clanique, la perte des ressources financières destinées a subvenir aux besoins de la famille, les soins médicaux, a l'alimentation saine et équilibrée plongent dans le désespoir les citoyens pris de la tourmente de la guerre.

Aux maux susmentionnés, s'ajoutent d'autres difficultés, à savoir :

- L'impossibilité d'avoir un emploi rémunéré pendant la guerre civile ;

- Le fait de dépendre sur le plan alimentaire de l'aide d'une famille hôte et peu fortunée ;

- Le changement non souhaité des habitudes alimentaires ;

- Les viols ;

- Les menaces voire les sévices exercés par les hommes en armes sur les femmes et les hommes non armés ; etc.

A tout cela, s'ajoutent le désespoir, le sentiment d'être inutile dans la vie, l'absence de motivation, la haine, le désir de vengeance, la colère et les autres dits négatifs.

Certains prénoms révélateurs par le message peuvent raconter le drame qu'à du vivre les parents pendant leur vie de crise dans les camps, sites ou pendant qu'ils attendaient leur rapatriement soit de Kinshasa pour Brazzaville ou de la région du Pool pour Brazzaville.

Les travaux forcés pendant les moments difficiles successifs de la guerre civile ont donné aux parents géniteurs le réflexe de prénommer leurs enfants tout en tenant compte des aléas de la guerre civile. En prénommant les enfants ainsi, certains parents géniteurs se déclaraient dépassés ou insatisfaits d'un certain nombre des faits vécus pendant la guerre civile.

Plusieurs prénoms issus de la guerre ont en commun un même point de ressemblance, cela peut s'expliquer par le fait que peut-être ces parents géniteurs ont eu à affronter les mêmes types de situations pendant les événements, souvent ces genres des problèmes sont généralement définis par les prénoms qu'ils ont donnés à leurs enfants. La peur de parler en public peut aussi être un fait qui les a poussé à donner ces genres des prénoms aux enfants. Bon nombre des parents géniteurs ont vécu dans la peur de commettre des erreurs qui risqueraient de les exposer aux miliciens.

Ces prénoms attribués par les parents à leurs enfants nés pendant la guerre civile portent sur l'évolution de la crise politique, économique et sociale, le message qu'exprime un prénom, son son, les références qu'il apporte prennent en compte les changements significatifs qu'apporte la guerre civile. L'apparition ou le renouvellement de certains prénoms témoignent un moment de changement politique, économique et social.

Beaucoup des prénoms sembleraient exprimer un message de gloire au Seigneur pour les avoir sauvegardés pendant la guerre civile. L'image des prénoms montre son évolution dans un sens égalitaire, et le message que témoigne la reconnaissance des faits de la guerre.

Cependant, la guerre civile vécue par les parents est considérée comme un canevas dans la mesure où elle met en évidence les conditions sociales économiques, politiques, religieuses, idéologiques qui influent sur le choix des prénoms des leurs enfants. Ces prénoms donnés aux enfants pendant la guerre civile de décembre 1998 à novembre 2000 montrent les passions recherchées par les parents géniteurs mais très limités dans le temps. Cette étude portée sur l'ensemble des prénoms pouvait s'avérer informateur des faits vécus par les parents pendant la guerre civile de décembre 1998 a novembre 2000. Ces prénoms qui marquent les clivages, les affrontements des belligérants, dans un contexte socio politique économique difficile, ont pris le dessus au cours de la période de guerre concernée sur les vieux prénoms chrétiens. Ces prénoms d'une manière générale expliquent la réalité vécus par les parents pendant la guerre. La progression de ces prénoms devient constante et assez redondante tout au long de la guerre civile.

Cette étude met en évidence les mécanismes d'attribution des prénoms au cours de la guerre de la guerre civile. Certains prénoms comme "Ça - Ira" font des apparitions nouvelles utilisées comme véritables innovations et présentent des explications beaucoup plus liées aux faits vécus de la guerre. Ainsi on voit disparaître les prénoms comme serge, Aubin, des prénoms beaucoup plus empruntés aux personnages qui sont modèles dans les sociétés occidentales.

Il faudrait aussi ajouter, qu'il y a la disparition des prénoms masculins et féminins existant par des simples rajouts d'un suffixe (ie, ine, ette).Ainsi s'accroît les prénoms Dieu-Sauve, Guervie, Sauve moi et même dieu Vie, l'exemple des prénoms apparus sont étranges, ils présentent l'image d'un phénomène vécu qui fait la différence de ces prénoms.

La résurgence de certains prénoms est liée à des phénomènes religieux ou des modes, l'attribution de certains prénoms tend à se raréfier, tel est le cas des prénoms comme Sandrine, Evelyne.

La forme, le nombre des prénoms connaissent un changement important. On observe tout d'abord la multiplication des prénoms qui s'expliquent par l'adhésion d'un goût nouveau.

* 20 Prosper NGAKEGNI : Problèmes actuels d'éducation en République populaire du Congo, P. 10, éditions Bantoues.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery