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Harmonisation de la fiscalité de l'épargne en Europe

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par Moussa Sidibé
université Paris XIII - Master Recherche droit européen et international (droit fiscal) 2006
  

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    Sommaire

    Introduction 2

    1ère Partie : 8

    Nécessité d'une harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne dans l'espace européen 8

    Chapitre 1 : Les facteurs économiques et juridiques 9

    Section 1 : Les facteurs économiques : la construction du marché intérieur 9

    Section 2 : Les facteurs juridiques et institutionnels : 18

    Chapitre 2 : L'instrument juridique utilisé : la Directive « épargne », une gestation difficile mais nécessaire 24

    Section 1 : Le champ d'application de la Directive épargne 24

    Section 2 : Les mécanismes prévus pour assurer une imposition effective des revenus de l'épargne et les divergences suscitées 36

    2ème Partie : 45

    Les limites de l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne au sein de l'Union Européenne et les perspectives d'évolution 45

    Chapitre 1 : Les Limites internes: l'environnement juridique communautaire et ses conséquences sur le processus : 47

    Section 1 : La problématique de la fiscalité directe dans la construction communautaire 47

    Section 2 : La profonde divergence des politiques d'imposition de l'épargne en Europe 55

    Chapitre 2 : Les limites externes de l'harmonisation de la fiscalité de l'épargne et les perspectives d'évolution : nécessité d'un cadre multilatéral 62

    Section 1 : Les limites externes à la Communauté : l'imposition de l'épargne, une question de concurrence fiscale mondiale 64

    Section 2 : Les perspectives d'évolution : un cadre de négociation plus large 70

    Conclusion 78

    Bibliographie 81

    Introduction

    L'un des traits marquants de l'histoire économique de la fin du 20éme siècle est la construction de grands ensembles économiques. Ces espaces économiques sont constitués dans le but de mettre en place un marché unique regroupant les territoires de plusieurs Etats membres ; marché unique caractérisé principalement par l'abolition des restrictions de toutes sortes à la libéralisation des échanges et à son bon fonctionnement.

    La construction de l'Union européenne rentre dans ce cadre.

    Cependant, du fait de la contradiction entre d'une part la fluidité recherchée des personnes, des marchandises, des services ou des capitaux au sein d'un espace unique, et d'autre part la segmentation de l'espace communautaire en juridictions fiscales autonomes1(*), des problématiques fiscales nationales se sont nécessairement heurtées à cet objectif de construction d'ensemble économique. Pour le réaliser, la nécessité d'une harmonisation des règles fiscales s'est progressivement imposée.

    Il convient de relever que le concept harmonisation a une acception large, renvoyant à la fois à la notion de coordination fiscale, de coexistence fiscale ou d'uniformité fiscale.

    Si la notion d'harmonisation en tant qu'édification de règles communautaires s'est imposée en matière de fiscalité indirecte (T.V.A, droits d'accises), il en est autrement en matière de fiscalité directe, plus particulièrement celle concernant les revenus d'épargne dans l'espace européen, qui renvoie à une politique de coordination des moyens fiscaux. Ceci s'explique par le fait que, si l'harmonisation des impositions indirectes était une condition indispensable à la réalisation d'un marché unique entre les Etats, le rapprochement des fiscalités directes repose sur une exigence de cohérence économique et de transparence, mais ne constitue pas un préalable à la réalisation des objectifs du traité instituant l'Union européenne. D'où l'interprétation logique du traité selon laquelle les Etats membres demeurent souverains dans l'exercice de leur compétence en matière d'impôts directs.

    Par ailleurs l'imposition des revenus de l'épargne constitue un des moyens, entre les mains des pouvoirs publics, leur permettant d'orienter les économies des ménages, soit vers l'investissement soit vers la consommation, ceci conformément aux priorités et à la conjoncture économiques.

    L'épargne se définit comme le processus par lequel une personne ou une collectivité renonce à une dépense immédiate pour conserver un revenu courant en vue d'un usage futur. En théorie économique, l'épargne est soit un phénomène passif2(*), « un excès du revenu sur la dépense du consommateur » (Keynes), soit un acte volontaire, car l'épargne est constituée pour des motifs de précaution ou de consommation différée (Fisher). Elle peut aussi être synonyme d'accumulation de richesses.

    L'objet de notre étude sera l'épargne des personnes physiques, et plus particulièrement les revenus de l'épargne sous forme d'intérêts, conformément à la directive épargne. Elle ne touche pas par conséquent les revenus d'épargne sous forme de dividendes ou des revenus d'autre nature tels que les produits des contrats d'assurance ou bon de capitalisation par exemple, ou l'épargne constituée par des personnes morales.

    Dans ce cadre, chaque Etat a ses règles qui lui sont spécifiques selon ses priorités. Ainsi l'épargne constituée dans un Etat peut être investie dans un autre. Elle pourrait ainsi se confronter aux problèmes liés à la disparité des législations fiscales en la matière. D'où la problématique principale de l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne est liée donc à des raisons profondes.

    Jusqu'à une époque récente, la concurrence entre les Etats pour attirer le plus d'investisseurs sur leur territoire était le principe et l'harmonisation des législations en la matière était l'exception.

    En effet, les autorités communautaires européennes s'étaient lancées, vers la fin des années 80, dans un projet d'harmonisation de la fiscalité relative aux revenus de l'épargne, qui avait presque les mêmes objectifs que la directive épargne3(*). Face aux difficultés liées aux réticences de certains Etats membres et à une forte complexité de la matière, le projet avait été mis dans les tiroirs. Ce projet a fait peau neuve et une directive a été adoptée le 3 juin 2003 (Directive 2003/48/CE).

    Cette directive vise essentiellement à permettre que les revenus de l'épargne, sous forme de paiement d'intérêts effectué dans un Etat membre en faveur de « bénéficiaires effectifs », qui sont des personnes physiques ayant leur résidence dans un autre Etat membre, soient effectivement imposés conformément aux dispositions législatives de ce dernier Etat membre.

    Le moyen retenu pour garantir l'imposition effective des paiements d'intérêts dans l'Etat membre où le bénéficiaire effectif a sa résidence fiscale est l'échange automatique d'informations entre les Etats membres concernant ces paiements d'intérêts. Selon la directive, les Etats doivent faciliter cet échange entre les « agents payeurs » établis sur leur territoire et les administrations fiscales des autres Etats membres.

    Un deuxième moyen retenu, est la retenue à la source, qui consiste en une disposition transitoire pour certains Etats membres, qui n'appliqueront pas, pendant une période l'échange automatique d'informations ; une retenue à la source sur les revenus concernés au profit de l'Etat de résidence de la personne physique «  bénéficiaire effectif ».

    Si cette directive constitue un des pas important de l'Europe dans la fiscalité directe de ses Etats membres, cet état de fait est dû à des raisons profondes.

    En effet, avec la mise en oeuvre effective des libertés consacrant un véritable marché intérieur entre les Etats membres, il était plus que nécessaire pour ces Etats de coordonner, voire harmoniser leurs dispositifs fiscaux pour répondre aux effets négatifs pour leur système respectif. Ceci est d'autant plus important que le traité n'a pas prévu le rapprochement de ces moyens fiscaux (impôts directs) comme étant un préalable à la réalisation de ses objectifs.

    Pour cela, l'Union a adopté une démarche atypique.

    L'étude de cette démarche, comporte donc au plan scientifique un double objectif :

    - en premier lieu, elle vise à comprendre les raisons profondes de la démarche, les mécanismes qu'elle utilise et ses effets éventuels. Il s'agit donc de décrypter l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne à travers la Directive épargne, avec un accent particulier sur les notions utilisées qui pourraient poser des difficultés d'interprétation entre les Etats membres ;

    - en second lieu, cette étude se veut de participer aux débats, aujourd'hui, sur le rapprochement des fiscalités directes des Etats et les raisons profondes qui le suscitent ce débat.

    C'est donc une recherche qui se veut théorique, un essai à la compréhension de phénomènes économiques ayant un retentissement fiscal assez important.

    Poursuivant une imposition effective des revenus d'intérêts versés à des personnes physiques, pour rappel, la directive soulève une question qui dépasse le seul cadre de l'Union Européenne, du fait de la forte mobilité des revenus d'épargne. Ce qui explique la démarche de l'Union à aller vers des accords avec des pays tiers et des territoires dépendants de certains Etats membres.

    Cette mobilité de l'épargne, ajoutée à d'autres questions notamment relatives à la divergence de vues des Etats membres sur la notion du « secret bancaire » entre autres, constituent, ensemble des limites voire des obstacles quant à la réalisation effective des objectifs de la directive. Il conviendra de relever ces questions et les parades susceptibles d'être utilisés. Elles posent également la question de savoir s'il faut aller ou pas vers une véritable édification de règles communautaires en matière d'imposition des revenus de l'épargne.

    Par ailleurs, tout travail universitaire demande une démarche méthodologique, qui est une stratégie de recherche. Comme telle, elle est spécifique à chaque contexte, et aux objectifs poursuivis.

    Ainsi, à la question de savoir comment sera menée cette étude, il sera fait appel à une démarche de recherche documentaire, particulièrement une méthode juridique descriptive ou exégétique, pour expliquer et analyser le pourquoi et le comment de l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne ; avec un recours quasi-exclusif aux sources écrites.

    L'approche sera donc une approche globale, pouvant dépasser le seul cadre de la fiscalité de l'épargne, pour toucher un cadre plus global, celui de l'influence de l'Europe sur la fiscalité directe.

    Dans cette approche globale, il ressort que des facteurs liés à la construction du marché intérieur ont favorisé la nécessité d'une harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne, telle que décrite dans la directive épargne (première partie) ; harmonisation, qui dans ces mécanismes, comporte des limites, voire des obstacles quant à sa mise en oeuvre effective, car elle appelle une réflexion dans un cadre plus large. (deuxième partie).

    1ère Partie :

    Nécessité d'une harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne dans l'espace européen

    La construction d'un marché commun entre Etats nécessite obligatoirement que ces Etats mettent en harmonie leur arsenal juridique et fiscal afin de répondre aux besoins économiques et sociaux de cette construction. Cette nécessité s'agrandit au fur et à mesure de l'évolution de la construction du marché. Et elle touche presque tous les domaines.

    Le cas spécifique de l'épargne est d'une importance sans ambiguïté, car comme le dit l'adage « l'argent est le nerf de la guerre ».

    Conscients de la nécessité d'une démarche d'ensemble, du fait des facteurs économiques et juridiques issus de l'évolution vers un marché intérieur (Chapitre1), les Etats membres, après de nombreuses tentatives, se sont mis d'accord sur un instrument devant assurer l'imposition effective de l'épargne dans l'espace communautaire européen (Chapitre2).

    Chapitre 1 : Les facteurs économiques et juridiques 

    Répondant à la logique de la construction telle que décrite par le traité (Section 1), ces facteurs tiennent toute leur consécration tant dans les termes du traité que dans le cadre de la construction effective de ce marché (Section 2).

    Section 1 : Les facteurs économiques : la construction du marché intérieur 

    Ils sont soutenus par le souci d'intégration économique effective (paragraphe 1) et consacrés par l'affirmation et la protection de grandes libertés (Paragraphe 2)

    Paragraphe 1 : Un souci d'intégration économique effective...

    L'économie mondiale se globalisant, il ne fait l'ombre d'aucun doute que le pari économique à l'échelle planétaire s'effectue entre des grands ensembles économiques constitués entre Etats. La construction de ces ensembles suit des phases de plus en plus importantes au fur et à mesure de son évolution, ce qui ne manque pas d'avoir des conséquences sur les flux financiers entre ces Etats et donc sur l'imposition de l'épargne.

    I- L'évolution vers un marché intérieur

    Comme toute construction d'ensemble économique entre Etats, celle de l'Union Européenne suit des phases inhérentes à son évolution. L'une des phases, la plus essentielle de cette construction, est celle de la consécration d'un marché intérieur entre ces Etats. Cette phase étant considérée comme la plus importante de la construction communautaire. En effet, à la différence du marché commun qui ne trouve aucune définition dans les versions successives du traité de Rome, le marché intérieur trouve une définition dans l'Acte unique européen qui précise qu'il « comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée... »4(*)

    Les « quatre libertés »5(*) de circulation figurant parmi les fondements de la Communauté depuis sa création, donc relevant du marché commun, l'opinion pourrait être défendue que ce dernier visait à promouvoir la libre circulation tout en s'accommodant momentanément du maintien des frontières intérieures entre Etats, tandis que le marché intérieur correspondrait à un stade supérieur marqué par la disparition de celles-ci. En réalité, dès avant l'Acte unique européen, la Cour de Justice des Communautés Européennes avait adopté une conception extensive du marché commun en posant que celui-ci visait « à l'élimination de toutes entraves aux échanges intercommunautaires en vue de la fusion des marchés nationaux dans un marché unique réalisant des conditions aussi proches que possible de celles d'un véritable marché intérieur »6(*)

    La réalisation effective de ce marché, sur le plan économique et financier, passe par la libéralisation des mouvements de capitaux à l'intérieur de ce marché. Celle-ci a été rendue effective par la directive de 1990. Cette libéralisation effective des mouvements de capitaux a entraîné une réflexion sur l'harmonisation communautaire de la fiscalité de l'épargne. En raison de la forte disparité des régimes fiscaux nationaux, la directive du 24 juin 1988 prévoyait de mettre en place des mécanismes fiscaux propres à atténuer le risque de délocalisation de l'épargne. Les réflexions au sein de la communauté européenne en vue d'une action en matière de fiscalité de l'épargne sont apparues récemment en relation avec la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale internationale ainsi que la concurrence fiscale dommageable en Europe.

    Ainsi la libéralisation des mouvements de capitaux, issue de l'évolution vers le marché intérieur ne manque pas d'avoir des conséquences sur le mouvement des flux financiers et leur imposition.

    II- Les conséquences sur les flux financiers et sur l'imposition de l'épargne 

    La directive sur la libéralisation des mouvements de capitaux a ouvert de nouveaux débouchés aux établissements financiers. Elle a aussi permis d'élargir le choix des épargnants et des investisseurs européens, tant s'agissant des établissements financiers que des produits financiers.

    Mais dans le même temps, le fait pour les Etats de ne plus pouvoir maîtriser les flux de capitaux n'a pas été sans poser de problèmes, en particulier au regard de la conduite de leur politique économique.

    Ce phénomène est d'autant plus sensible que les pays européens présentent une grande diversité de régimes fiscaux, notamment en matière d'épargne, et que la mise en place de la monnaie unique en 2002, en supprimant la barrière des changes entre devises, accroît la fluidité des mouvements de capitaux. L'avènement de la monnaie unique dans la zone Euro est perçu par de nombreux auteurs comme une étape décisive et irréversible de la construction européenne.7(*)

    Cette situation ne manque pas d'avoir des conséquences. L'une des plus importantes, sur le plan économique, est la perte de recettes pour la plupart des Etats.

    En effet, un marché de capitaux libre, qui ne ferait l'objet d'aucune harmonisation fiscale, les capitaux auraient tendance à se diriger vers les pays dont la fiscalité est la plus favorable. D'où une concurrence fiscale entre Etats assez « dommageable » aux conséquences économiques et fiscales d'une importance connue et reconnue par l'ensemble des auteurs.8(*)

    Ceci étant, la concurrence saine en tant que telle n'est pas interdite entre les Etats. Ce qui est interdit, c'est le fait pour certains Etats de baisser de manière artificielle leur régime d'imposition afin d'attirer les investissements sur leur territoire. Ce qui aboutira à l'apparition de régimes fiscaux au rabais, au mieux disant en termes d'abaissement des taux d'imposition. Ce qui constitue un des facteurs les plus importants de baisse de recettes fiscales des Etats.

    La démarche de la communauté a été de mettre en place un groupe ad hoc9(*) chargé de l'identification, du gel et du démantèlement de mesures fiscales jugées constitutives de « concurrence fiscale dommageable » en application d'un code de conduite, qui est un engagement politique des Etats10(*).

    C'est vrai pour les investissements, même si d'autres paramètres peuvent intervenir, tels que l'environnement économique, la sécurité juridique, les perspectives de développement ou la situation politique. C'est encore plus vrai pour l'épargne, dont le rendement dépend essentiellement, en dehors du montant des intérêts servis, des taux et des modalités d'imposition11(*).

    Par ailleurs la libéralisation des marchés de capitaux est l'un des éléments qui ont alimenté la mondialisation au cours des dix dernières années, et cette tendance a été favorisée par l'OCDE. Bien que la libéralisation des mouvements de capitaux ait facilité la croissance économique, elle a par ailleurs renforcé la possibilité d'inobservation des règles fiscales. A partir du moment où la plupart des obstacles non fiscaux à l'intégration des marchés de capitaux et des marchés financiers ont été supprimés, les personnes physiques et les personnes morales ont obtenu l'accès, à un coût faible ou nul, au système bancaire du monde entier, ce qui leur a permis d'effectuer des transactions à la fois légitimes et illégitimes. Cet accès permet de bénéficier des avantages offerts par les juridictions qui limitent l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales.

    Pour répondre mieux aux effets pervers de cette intégration économique effective, il est plus que nécessaire de coordonner voire d'harmoniser les arsenaux juridiques et fiscaux. Il en va de la stabilité et de la sécurité de ces ensembles, et au delà de leur capacité à tenir la concurrence économique au-delà de l'Union. Cette question est d'autant plus importante, que les nouveaux membres, ayant fait passer l'Europe de 15 à 2512(*), ont des systèmes fiscaux des plus attrayants dans ce domaine.

    Cette volonté d'intégration économique effective, aux conséquences économiques ci-dessus évoquées, trouve son fondement dans la consécration de certaines grandes libertés.

    Paragraphe 2 :... Par la consécration de grandes libertés :

    I- Les libertés protégées et l'approche utilisée 

    La liberté de circulation des travailleurs, la liberté d'établissement, la libre prestation de services et la liberté de circulation des capitaux ont une incidence sur la fiscalité directe, laquelle est actuellement peu harmonisée. Le contrôle de compatibilité communautaire consistera donc à confronter des règles fiscales nationales, non pas avec des directives précises (du moins dans certains cas), mais avec des textes de principe affirmant et protégeant une liberté communautaire.

    L'approche est la suivante :

    - c'est d'une part apprécier une éventuelle violation des différentes libertés au regard des principes de non discrimination et d'égalité ;

    - d'autre part vérifier si une atteinte est justifiée.

    Ceci étant, il convient de relever que ces libertés ont pour seul but la réalisation du marché intérieur entre les Etats membres. Ce sont donc des libertés purement économiques, qui ne sont pas assimilables aux grandes libertés publiques (pensée, expression...). Elles sont donc destinées à faire échec aux restrictions opposées par un Etat à des agents économiques étrangers (de l'Union bien entendu). La notion précisée, il convient de voir leur rapport avec la fiscalité.

    II- La fiscalité à l'épreuve de ces libertés

    Pour le cas spécifique de l'épargne, si plusieurs questions non fiscales soulevées devant les juridictions communautaires touchaient la libre circulation des capitaux13(*), il faut reconnaître que c'est l'arrêt « Verkooïjen »14(*) qui confirme et parachève la pleine reconnaissance de celle-ci en tant que liberté fondamentale (après l'adoption de la directive sur la libre circulation des capitaux).

    En effet, antérieurement à l'entrée en vigueur du traité de Maastricht, la libéralisation des mouvements de capitaux était prévue de façon progressive et conditionnelle par le traité de Rome. Selon l'article 67, il appartenait aux Etats membres de supprimer « progressivement entre eux, pendant la période de transition et dans la mesure nécessaire au fonctionnement du marché commun, les restrictions aux mouvements de capitaux appartenant à des personnes résidant dans les Etats membres, ainsi que les discriminations de traitement fondées sur la nationalité et la résidence des parties, ou sur la localisation du placement ».

    A raison précisément de cette conditionnalité, l'article 67, à l'inverse des articles 52 et 59 relatifs à la liberté d'établissement et à la liberté de prestation de services, n'a pas été reconnu d'effet direct par la Cour de Justice15(*).

    Pour mettre effectivement en oeuvre la libre circulation des capitaux dans ce cadre, le conseil, par application de l'article 69 du traité, a adopté une succession de directives jusqu'à la Directive 88/361 du 24 juin 1988 dont l'article premier a obligé les Etats membres, d'une manière générale et définitive, à supprimer « les restrictions aux mouvements de capitaux entre les personnes résidant dans les Etats membres ».

    Cette obligation ainsi reconnue, a conduit la Cour de Justice à reconnaître à la liberté de circulation des capitaux un effet direct16(*).

    Mais vue la relation des différentes libertés avec les mouvements de capitaux et leur corrélation entre elles, il s'est posé la question (du moins théoriquement) de savoir si une mesure ou une pratique nationale peut ou non tomber cumulativement sous le coup de la liberté de circulation des capitaux et d'une autre liberté fondamentale.

    Les textes du traité relatifs à ces différentes libertés établissent, en effet, des règles régissant leurs interrelations. Les rapports entre les différentes libertés ont été bien résumés par un auteur17(*) dans les termes suivants :

    « - en présence d'une atteinte directe à la libre circulation des capitaux qui n'entraîne qu'indirectement un obstacle pour l'établissement ou la prestation de services, seules les dispositions relatives aux mouvements de capitaux sont applicables ;

    - en présence d'une atteinte directe à la liberté d'établissement ou à la libre prestation de services, qui entraîne indirectement une réduction des flux de capitaux entre Etats membres, seules les dispositions relatives à la liberté d'établissement ou à la liberté de prestation de services sont applicables.

    - en présence d'une atteinte directe à la fois à la liberté de circulation des capitaux et à une des autres libertés fondamentales, la mesure où la pratique nationale doit respecter les conditions énoncées pour ces deux libertés. »

    En absence d'une certitude de la jurisprudence de la Cour de Justice, on s'accorde à convenir en pratique, que lorsqu'une mesure ou une pratique nationale affecte l'exercice d'une activité économique dans tel ou tel Etat membre, soit dans le cadre d'un établissement, soit par la réalisation d'une prestation de services, et qu'apparaît corrélativement une entrave à un mouvement de capitaux, il est prudent d'invoquer devant le juge l'existence d'une atteinte à la fois à la liberté de circulation des capitaux et, selon le cas, à la liberté d'établissement ou à la liberté de prestation de services.

    Pour finir sur ce point, on pourrait se poser la question de savoir en quoi les libertés d'établissement et de prestation concernent la circulation des capitaux dans l'Union Européenne ? Il en a été surtout question dans la jurisprudence non fiscale de la Cour de Justice relative à la libre circulation des capitaux.

    Ainsi, dans l'arrêt Ambry18(*), la Cour avait à examiner la compatibilité au principe de libre prestation de services et de liberté de circulation des capitaux du dispositif français de garantie des agences de voyages, qui exige, lorsque la garantie financière émane d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'assurance situé dans un Etat membre autre que la France, que l'établissement ou la compagnie conclue un accord de mobilisation avec un établissement de crédit ou une entreprise d'assurance situé en France. La Cour a jugé que ce dispositif était contraire à la libre prestation de services, à laquelle il apporte une restriction non justifiée par la protection des consommateurs, et précisé qu'il n'était dès lors pas nécessaire d'apprécier si une telle réglementation était contraire à la libre circulation des capitaux.

    Pour ce qui est de la liberté d'établissement, elle peut être illustrée par l'arrêt Konle19(*). Dans cette affaire, la Cour avait à se prononcer sur la compatibilité aux principes communautaires de la loi tyrolienne relative à l'acquisition de biens fonciers. En effet, l'acquisition d'un terrain à bâtir au Tyrol est normalement soumise à la condition que l'acquéreur démontre que son acquisition n'est pas destinée à la construction d'une résidence secondaire, mais cette condition n'est plus exigée des autrichiens et ne concerne plus que les étrangers. Etant donné que le droit d'acquérir un bien mobilier constitue, outre un complément nécessaire de la liberté d'établissement, un élément de la liberté de circulation des capitaux puisque les mouvements de capitaux comprennent les opérations par lesquelles des non résidents effectuent des investissements immobiliers sur le territoire d'un autre Etat membre, la Cour a jugé la législation autrichienne contraire à l'article 56 du traité instituant la communauté européenne (traité CE) (ex article 73) relatif à la libre circulation des capitaux.

    Constat est donc fait d'une certaine volonté d'aller vers une coordination voire une harmonisation avec un accroissement du rôle des institutions communautaires, d'où des facteurs juridiques et institutionnels.

    Section 2 : Les facteurs juridiques et institutionnels :

    Les facteurs ci-dessus évoqués ont ainsi développé chez les Etats membres un souci d'aller vers une coordination des politiques et moyens fiscaux (paragraphe 1) ; souci de plus en plus pris en compte par les institutions communautaires, qui ont ainsi vu un certain accroissement de leur rôle (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Un souci de coordination des politiques et des moyens fiscaux 

    Pour répondre aux effets pervers des libertés consacrées pour la réalisation du marché intérieur, les autorités communautaires ont adopté une démarche très atypique pour un domaine comme celui des impôts directs.

    I- Pour répondre aux effets de la consécration des libertés communautaires

    Si la soumission de la fiscalité indirecte (notamment la TVA et les droits d'accises) à des règles communautaires supranationales est presque un acquis, il en est tout autrement pour la fiscalité directe. Dans ce dernier cadre, à part quelques domaines, la démarche semble être une coordination des politiques fiscales, voire des moyens fiscaux.

    En effet, bien que la fiscalité directe relève de la compétence des Etats membres, il n'en reste pas moins, comme le martèle la CJCE, « que ces derniers doivent l'exercer dans le respect du droit communautaire ».20(*)

    Aussi, les années qui ont précédé la naissance de la monnaie unique ont vu se multiplier les questions incidentes sur le devenir de l'Europe fiscale. Elles se sont évidemment posées avec plus d'acuité depuis l'adoption de l'Euro. Pour reprendre les termes d'un auteur21(*), les débats se résument en ces termes : « peut on concevoir un ensemble économique disposant d'une même monnaie, dont le territoire peut être considéré comme un marché unique où les frontières intérieures ainsi que les obstacles à la circulation des marchandises, des capitaux et des personnes ont disparu, et au sein duquel demeureraient des fiscalités profondément divergentes ? ».

    L'absence d'harmonisation en matière de fiscalité de l'épargne poserait un problème particulier au regard de la libre circulation des capitaux, puisqu'en cas de disparités notables des fiscalités, les capitaux devraient se placer là où les revenus qu'ils engendrent seront les moins taxés. Dans la perspective d'un espace financier européen, les différences notables d'imposition des revenus, notamment de l'épargne, auraient donc sans aucun doute une influence décisive sur la localisation des épargnes nationales.

    Aussi l'absence de coordination des moyens fiscaux pouvait faire en sorte que l'épargne investie par un non résident d'un Etat membre puisse échapper à tout pouvoir d'imposition de l'Etat membre de résidence de la personne.

    Face à ces problèmes, les Etats membres ont choisi de prendre le problème sous l'angle de la coordination des moyens fiscaux afin d'assurer une imposition effective des revenus de l'épargne dans l'espace européen.

    II- La démarche ou l'approche suivie 

    Ainsi, on a pu noter avec le conseil de Vérone en 1996 qu'un glissement sémantique harmonisation versus coordination, s'est peu à peu opéré, traduisant en fait un changement d'objectifs. Ou plus exactement les Etats membres se sont saisis de la thématique de l'harmonisation, terme à connotation positive et rassembleur (qui peut se prononcer pour la disharmonie ?), pour promouvoir non pas une convergence des systèmes fiscaux, ce qui était le point de vue du comité Ruding22(*) et de la commission, mais pour mettre fin aux effets les plus néfastes de la concurrence sur les budgets nationaux.

    Changement concrétisé dans la politique d'harmonisation de la fiscalité de l'épargne, qui en tant que telle se trouve dans une politique plus globale, celle du « paquet fiscal », ensemble de mesures fiscales touchant essentiellement des impositions directes.

    Si certains Etats membres (notamment la France et l'Allemagne) veulent aller au-delà de cette politique de coordination pour aller vers une véritable harmonisation, il convient de relever le fait que des Etats souverains ont progressivement « perdu » (sinon abandonné) leur marge de manoeuvre monétaire et budgétaire (Euro et critères de Maastricht obligent), il apparaît difficile pour ces mêmes Etats d'abandonner complètement leur souveraineté fiscale, leur politique fiscale devenant donc une variable déterminante de leur politique économique.

    Le rôle des institutions communautaires est de plus en plus croissant dans la détermination de ce choix de politique fiscale communautaire.

    Paragraphe 2 : ...Par l'accroissement du rôle des institutions communautaires 

    Les deux grands acteurs du rapprochement des législations fiscales dans l'Union Européenne sont la Commission et la CJCE. Dans le cadre de leur rôle respectif, la démarche des deux institutions divergent.

    I- Le rôle de la commission : incitation à une autodiscipline des Etats membres

    La Commission a depuis longtemps compris que la divergence des législations fiscales peut constituer un frein à l'investissement transfrontalier ainsi qu'un coût important pour les entreprises et le budget des Etats membres.

    Stratégiquement, la démarche de la commission est fort astucieuse : elle consiste à convaincre les Etats membres que, sans abandonner leur souveraineté, ils ont bien un intérêt compris à supprimer les régimes manifestement les plus dérogatoires à la logique de leurs propres systèmes. En montrant du doigt, non pas la concurrence fiscale en tant que telle, mais la concurrence « dommageable », les niches fiscales qui attirent de façon plus ou moins artificielle les investissements, la commission incite les membres de l'Union à une forme d'autodiscipline dans laquelle chacun pourrait in fine trouver son compte.

    Pour ce qui est du cas spécifique de la fiscalité des revenus de l'épargne, la commission a, face aux besoins croissants de coopération entre Etats et pour contourner les difficultés d'adoption des règles fiscales, adopté une démarche, que certains ont à juste titre qualifiée de « démarche globale »23(*) : celle que l'on a appelé la stratégie de Vérone.

    Elle a consisté à mettre l'harmonisation de différentes législations relatives à des impôts directs dans l'Union dans une stratégie globale, du fait des liens entre les différents impôts concernés et la flexibilité quant à l'adoption par les organes communautaires.

    Cette démarche est justifiée par : la nécessité d'une action coordonnée au niveau européen pour lutter contre la concurrence fiscale dommageable en vue de contribuer à la réduction des distorsions existant encore au sein du marché unique, l'évitement de pertes trop importantes de recettes fiscales ou l'orientation des structures fiscales dans un sens plus favorable à l'emploi.

    Ces objectifs étaient liés dans la pratique, la plupart des Etats membres n'étant pas prêts à s'engager dans une action visant à réduire les distorsions fiscales au sein du marché intérieur et à orienter leur politique fiscale dans un sens favorable à l'emploi sans de sérieuses garanties de maintien des recettes fiscales.

    Bien que n'ayant pas abouti à une véritable harmonisation des règles de fond, ce qui n'était d'ailleurs pas son objectif, il faut quand même relever que cette démarche a permis l'adoption de règles qui pourront faire en sorte que l'épargne investie dans un Etat membre par une personne non résidente n'échappe plus à l'imposition de l'Etat membre de résidence de cette personne. Proposition qui n'avait pas obtenu l'adhésion de tous les Etats membres à la fin des années 80.

    Il est vrai que le mérite de l'approche « globale » développée à Vérone ainsi que l'adoption du « paquet fiscal » a été de reconnaître ce problème intrinsèque à la politique fiscale européenne et d'envisager de lier différents sujets qui, pris séparément, entraînent un gain pour l'Union Européenne, sans pour autant bénéficier à chacun des Etats membres.

    Cependant, nous convenons avec certains auteurs25(*) que « si la globalisation des dossiers permet, en théorie, de faciliter les arbitrages et d'atteindre une situation préférable pour tous les Etats participant à une négociation, il n'est pas aisé, en pratique, de déterminer les gains ou les pertes de chaque Etat dans le cadre d'un ensemble complexe de dossiers. »

    Cette démarche peu contraignante et tendant vers une certaine forme de consensus contraste avec celle de la CJCE.

    II- Rôle de la CJCE : Une convergence par le démantèlement des régimes jugés contraires aux principes du marché commun

    La CJCE, à la base, n'a pas un rôle normatif de rapprochement des législations nationales des Etats membres. Mais du fait de son rôle juridictionnel, elle procède, sur le fondement des libertés ci-dessus évoquées et du principe de non discrimination dans l'espace européen, au rapprochement des législations par le démantèlement des dispositifs fiscaux contraires à ces libertés et principe. Ce rôle du juge communautaire est parfaitement bien résumé dans une formule faussement interrogative du Professeur Patrick Dibout « la construction d'une fiscalité à l'échelle communautaire ne se fait elle pas davantage à Luxembourg qu'à Bruxelles »26(*).

    Pour rappel, la principale illustration reste la décision de la CJCE du 6 juin 2000, « Verkooïjen », rendue sur un point inédit, à savoir la compatibilité d'une fiscalité de l'épargne discriminatoire par rapport au principe de libre circulation des capitaux inscrit à l'article 58 du traité CE (ex article 73 D).

    Avant cette décision, la CJCE ne s'était en effet prononcée en ce domaine dans le cadre d'une jurisprudence non fiscale.

    Au regard des arrêts ci-dessus évoqués27(*), nous voyons que la jurisprudence « Verkooïjen » parachève une démarche amorcée par la CJCE dans le cadre de la construction d'une fiscalité « européenne » en matière d'impôts directs. Démarche que l'on pourrait qualifier de construction par un « démantèlement », que certains auteurs ont qualifié de construction par la « loi du désordre ».28(*)

    Pour conclure sur ce point relatif aux facteurs économiques et juridiques de l'harmonisation, il convient de noter, qu'au-delà de leur caractère indirect et lointain, ces facteurs ont beaucoup contribué à pousser les Etats membres à mener la réflexion sur une harmonisation, sinon une coordination des moyens fiscaux en matière d'impôts directs, plus particulièrement l'imposition qui nous concerne, celle des revenus de l'épargne.

    Il en est de même, sinon plus, de ce qui est des facteurs que l'on pourra qualifier de facteurs directs : les facteurs purement fiscaux.

    Chapitre 2 : L'instrument juridique utilisé : la directive épargne, une gestation difficile mais nécessaire

    Pour faire face aux effets de la construction du marché intérieur sur la circulation des revenus de l'épargne, un dispositif a été réfléchi et adopté : la Directive épargne.

    Cette directive prévoit un champ d'application (Section 1) et des mécanismes pour assurer l'imposition effective des revenus de l'épargne (Section 2).

    Section 1 : Le champ d'application de la Directive épargne

    Comme dispositif essentiellement fiscal, il s'applique à des revenus (paragraphe 1), et à des personnes (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Le champ d'application matériel 

    I- Les produits dans le champ de la directive 

    Le champ d'application matériel de la directive « épargne » est limité aux revenus de l'épargne sous forme d'intérêts. Les autres produits financiers, tels que les dividendes ou profits afférents à des opérations sur les marchés à terme d'instruments financiers en sont donc exclus.

    Le régime fiscal de droit interne applicable à chaque catégorie de revenus est sans incidence. En effet, le principe de la directive « épargne »est de pratiquer un échange automatique d'informations sur les revenus qualifiés d'intérêts, quelque soit leur traitement fiscal dans l'Etat de source, qui ne se trouve donc en aucun cas remis en cause du fait de ses dispositions.

    En outre, le fait que le paiement des intérêts intervienne directement ou par le biais d'intermédiaire n'influe pas sur la qualification juridique et la nature des intérêts qui doivent être déclarés par les agents payeurs.

    Aux termes de la Directive, dont la loi française de transposition a repris les termes, les intérêts concernés par l'obligation déclarative de la directive « épargne » sont :

    - les produits des placements à revenu fixe conférant à leur détenteur un droit de créance, ainsi que les produits de cessions ou de rachats et les primes de remboursement attachés à ces placements ;

    - les revenus réalisés lors de la cession, du remboursement ou du rachat de parts ou actions de certains organismes de placements collectifs de valeurs mobilières (OPCVM) et assimilés, qui remplissent des conditions particulières d'investissements de leur actif.

    Il convient de préciser que la nationalité de l'émetteur ou du débiteur n'entre pas en compte dans la qualification des intérêts.

    Etudions individuellement les revenus concernés :

    Les produits de placements à revenu fixe :

    Ces produits se rapportent à des créances de toute nature, assorties ou non de garanties hypothécaires ou d'une clause de participation aux bénéfices du débiteur, et notamment les revenus des fonds publics et des obligations d'emprunts, y compris les primes et les lots attachés à ceux-ci à l'exclusion des pénalisations pour paiement tardif.

    Il s'agit notamment :

    Ø des revenus des titres d'emprunts négociables ;

    Ø des revenus de créances, dépôts, cautionnements et comptes courants

    Ø des produits de bons ou de contrats de capitalisation nominatifs.

    Ces produits s'analysent comme des produits financiers et non comme des produits d'assurance. Ils entrent dans le champ d'application de la Directive « épargne », dès lors qu'ils ne reposent pas sur la couverture d'un risque.

    En revanche, les prestations d'assurance et notamment les produits d'assurance vie qui comportent une garantie en cas de vie sont exclus du champ de cette directive.

    Ø des produits d'épargne réglementée.

    Il s'agit notamment des intérêts générés par les comptes d'épargne logement (CEL), compte pour le développement industriel (CODEVI), livrets d'épargne populaire (LEP), livrets jeunes, plans d'épargne logement (PEL), plan d'épargne populaire (PEP) donnant lieu à ouverture d'un compte de dépôt en numéraire et livrets d'épargne entreprise (LEE) qui en droit interne bénéficient d'un régime fiscal favorable. Ces intérêts sont compris dans le champ d'application de la directive « épargne », nonobstant leur régime fiscal.

    Il en est de même de l'épargne « salariale » lorsque les intérêts qui s'y rapportent rentrent dans la définition des intérêts au sens de la directive « épargne ».

    La prime d'Etat versée sur les PEL ou les CEL n'est pas considérée comme un intérêt pour l'application de la directive « épargne ».

    Les modalités de déclaration

    La déclaration des intérêts s'effectue :

    - lors du dénouement du plan pour les PEL

    - lors de l'inscription en compte pour les autres produits de l'épargne réglementée.

    Les revenus réalisés lors de la cession, du remboursement ou du rachat de parts et d'actions de certains OPCVM :

    Sont concernés les revenus réalisés lors de la cession, du remboursement ou du rachat de parts ou d'actions d'organismes ou entités suivants qui investissent directement ou indirectement par l'intermédiaire d'autres organismes ou entités de même nature, plus de 40% de leur actif en créances et produits assimilés :

    - les OPCVM « coordonnés » ;

    - les organismes ou entités ayant opté pour la déclaration des intérêts au paiement ;

    Par « entités » au sens de la Directive « épargne », on entend des organismes ou structures qui cumulativement :

    - n'ont pas de personnalité morale,

    - ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent,

    - ne sont pas des organismes de placements collectif en valeurs mobilières(OPCVM) bénéficiant de la procédure de reconnaissance mutuelle des agréments prévue par la Directive 85/611/CE du 20 décembre 1985 (OPCVM dits « coordonnés).29(*)

    - les organismes de placement collectif (OPC) établis hors de l'Union Européenne.

    A compter du 1er janvier 2011, le pourcentage d'investissement en créances sera ramené à 25%.

    Des règles d'appréciation et de calcul du quota de soumission à la Directive sont prévues.

    Pour l'appréciation du quota de 40%, l'organisme est tenu de vérifier régulièrement sa situation au regard du quota de 40%, et ce n'est que lors d'un changement de situation de l'organisme ou entité par rapport à ce même quota qu'une information doit être transmise aux établissements payeurs.

    Si au cours de la période de détention des parts ou actions de l'organisme ou entité par le bénéficiaire effectif, le quota d'investissement en créances ou produits assimilés a été déclaré au moins une fois supérieur à 40%, les revenus en question sont qualifiés d'intérêts au sens de la directive « épargne » lors de la cession, du rachat ou du remboursement, même si au jour de l'opération le quota d'investissement est inférieur à 40%.

    A défaut d'information sur la période de détention, les revenus sont qualifiés d'intérêts lorsque le quota d'investissement de 40% a été dépassé au moins une fois depuis la création de l'organisme ou de l'entité ou, pour les organismes ou entités existants, à la date d'entrée en vigueur de la directive depuis la première communication de leur situation au regard du quota.

    Si aucune information sur la situation de l'organisme n'est connue de l'établissement payeur, les revenus sont qualifiés d'intérêts.

    Pour le calcul, le quota de 40% est exprimé par le rapport suivant :

    Investissements directs et indirects en créances et produits assimilés/Actif total (valeur liquidative des investissements).

    Les modalités de perception

    Pour les modalités de perception, sont concernées toutes les formes de perception de revenus, notamment :

    - les intérêts payés ou inscrits en compte au profit du bénéficiaire effectif ;

    - les intérêts courus ou capitalisés obtenus lors de la cession, du remboursement ou du rachat des mêmes créances ;

    - les revenus réalisés lors de la cession, du remboursement ou du rachat de parts ou actions d'OPCVM et assimilés investis à plus de 40%en créances et produits assimilés ;

    - les revenus distribués par l'intermédiaire d'OPCVM ou d'entités assimilées.

    II- Les produits exclus du champ de la directive « épargne » dans le but de répondre à des objectifs de politiques économiques et financières de certains Etats

    Au regard de la doctrine sur l'évolution du processus ayant abouti à l'adoption de la directive « épargne »30(*), il s'avère que l'exclusion de certains revenus de l'épargne répond à des objectifs de politiques économiques et financières soulevés par certains Etats31(*), mais aussi la crainte de la commission de ne pas trop retarder l'adoption du texte. Il s'agit toujours de limiter la portée des mesures adoptées aux intérêts versés à un bénéficiaire effectif établi dans un Etat membre mais en provenance d'un autre Etat membre. Le système devrait donc permettre de donner à l'Etat de résidence les moyens d'imposer intégralement les revenus d'épargne de personnes résidentes ayant une épargne investie dans un autre Etat membre.Il peut paraître singulier que les oppositions à de telles mesures soient aussi fortes.

    Au départ il a été rappelé que le système envisagé reposait sur l'idée d'une retenue à la source minimum de 25% puis de 20%. Ce système consistant à prévoir un seuil minimum d'imposition général, dans l'Etat de source, provenait de l'initiative de pays à forte pression fiscale32(*), cherchant à limiter la fuite des capitaux vers les pays où ladite épargne était moins imposée.

    Cette harmonisation a maxima rencontra toutefois une vive opposition de la part du Royaume Uni, qui trouva dans le Luxembourg un soutien opportun. En l'espèce, le Royaume Uni, comme d'ailleurs le Luxembourg, avait un motif particulier de s'opposer à ce projet, dans la mesure où il mettait directement en danger le système des Euro-obligations (Euro bonds) qui contribuait au succès de la place financière de Londres. C'est la raison pour laquelle le Royaume Uni chercha par tous les moyens à les faire sortir du champ d'application de la directive « épargne ».

    D'autres revenus d'épargne ont été exclus, soit qu'ils relèvent d'une autre fiscalité, soit temporairement pour faciliter l'adoption des textes.

    Il en est ainsi :

    - des produits d'assurance ;

    - des pensions.

    Temporairement, il en est également ainsi des obligations domestiques, internationales et autres titres de créances négociables : « clause grand père ».

    La Directive « épargne » exclut temporairement de son champ d'application certains intérêts de ces produits afin de ne pas perturber les marchés financiers. En effet, les contrats d'émission de tels titres d'emprunt négociables peuvent comporter une clause de montant brut (dite « gross up ») par laquelle l'émetteur s'engage auprès des investisseurs à leur servir un intérêt net d'impôt en prenant à sa charge les conséquences d'un éventuel changement de législation fiscale. Ces clauses de montant brut sont assorties d'une clause de remboursement afin de permettre à l'émetteur de rembourser l'emprunt par anticipation pour éviter le déclenchement par les émetteurs de la clause en question.

    La loi prévoit une  clause de « grand père » qui a pour conséquence d'exclure du champ d'application de la directive « épargne » les intérêts des obligations domestiques et internationales et des autres titres de créances négociables lorsque leur émission d'origine est antérieure au 1er mars 2001 ou lorsque leur prospectus d'émission d'origine a été visé avant cette date par les autorités compétentes et à condition qu'aucune nouvelle émission de ces titres n'ait été réalisée à compter du 1er mars 2002.

    Cette exclusion cessera, en principe, de s'appliquer le 31 décembre 2010.

    La directive « épargne » prévoit néanmoins une possibilité de prolongement de l'exclusion dans l'hypothèse où la période de transition prévue à l'article 10 de la directive s'achèverait après le 31 décembre 2010.

    Ces exclusions comportent néanmoins des inconvénients, qu'il convient de mettre en exergue, inconvénients d'ailleurs soulevés par le législateur français dans son rapport sur le projet de Directive33(*).

    D'abord, il n'est pas logique, du point de vue juridique, que la directive ne concerne pas tous les produits de l'épargne.

    Deuxièmement, ces dérogations devraient entraîner en pratique des discriminations entre épargnants, en fonction de la composition de leur portefeuille, de même qu'entre certains établissements, en fonction de leur spécialité.

    Des inconvénients économiques existent également. Cette différence de traitement entre les produits de l'épargne est de nature à favoriser ceux qui ne sont pas couverts par la directive aux dépens des autres. Une telle position peut être un choix s'il s'agit de favoriser les placements directs en actions par rapport aux produits financiers. Mais, pour ces derniers, il vaut mieux que l'orientation de l'épargne résulte, comme c'est économiquement souhaitable, des besoins du marché, plutôt que d'être conditionnée par ces différences de régimes fiscaux.

    En tout état de cause, assurer une imposition effective des revenus de l'épargne, tel que défini comme l'objectif principal de la directive, implique des acteurs pour l'exécution du mécanisme mis en place.

    Paragraphe 2 : Champ d'application personnel 

    Il est important de préciser que la directive laisse de côté l'émetteur de la créance génératrice d'intérêts. En d'autres termes le débiteur de cette créance et donc des intérêts n'intervient pas dans le système mis en place. Il suffit de considérer que ce débiteur peut être par exemple la société émettrice d'un emprunt obligataire, pour affirmer que le lieu d'établissement de cette société émettrice importe peu. Le système mis en place par la directive gravite autour du couple « agent payeur » « bénéficiaire effectif », tous deux devant être établis sur le territoire communautaire. De surcroît et ainsi qu'il est facile de le constater, le texte n'impose d'obligations qu'au seul agent payeur.

    I- L'agent payeur 

    La directive impose des obligations à l'agent payeur et non au contribuable final qui demeure soumis aux obligations fiscales de son Etat de résidence.

    L'agent payeur est défini à l'article 4 comme « tout opérateur économique qui paie des intérêts au bénéficiaire effectif, ou attribue le paiement d'intérêts au profit immédiat du, bénéficiaire effectif, qu'il s'agisse du débiteur de la créance produisant les intérêts ou de l'opérateur chargé par le débiteur ou le bénéficiaire effectif de payer les intérêts ou d'en attribuer le paiement ».

    En clair, l'agent payeur est un opérateur économique qui paie ou attribue des intérêts, (tels que définis plus haut), au profit immédiat du bénéficiaire effectif. La plupart du temps, il s'agira d'un établissement bancaire, et non du débiteur des intérêts comme la société émettrice, même si, comme le précise le texte seul le dernier établissement bancaire sera considéré comme tel.

    En effet il est possible, pour ne pas dire fréquent, que plusieurs établissements bancaires s'interposent entre l'émetteur de l'obligation et les souscripteurs, bénéficiaires effectifs du versement des intérêts. Ce n'est que le dernier intermédiaire dans cette chaîne qui sera considéré comme agent payeur. Il doit, en outre, agir à titre professionnel. Exerçant l'activité à titre professionnel, l'agent payeur sera le plus souvent un établissement financier (gestionnaire de compte financier ou un établissement qui effectue des opérations de paiement au guichet) ou un établissement de crédit

    II- Le bénéficiaire effectif et les obligations de l'agent payeur qui s'y appliquent 

    Quant au bénéficiaire effectif, il est défini positivement comme « toute personne physique ou morale qui reçoit un paiement d'intérêts ou toute personne physique à laquelle un paiement d'intérêts est attribué, sauf si elle peut fournir la preuve que ce paiement n'a pas été pour son propre compte » article 2 paragraphe 1.

    Cependant cette définition est loin de régler tous les problèmes, dans la mesure où la difficulté dans ce domaine est précisément d'identifier le bénéficiaire effectif, tant individuellement que géographiquement. Dans des hypothèses comparables, il est délicat d'identifier par exemple l'actionnaire de société cotée lorsqu'il s'agit de savoir sur qui reposent les obligations déclaratives de franchissement de seuil.

    A cet égard, la directive établit un ensemble de règles qu'elle présente elle-même comme des règles minimales.

    S'agissant de l'identification du bénéficiaire effectif lui-même, la directive distingue selon la date à laquelle les relations contractuelles ont été établies : si cette date est antérieure à celle de la transposition de la directive, l'agent payeur peut se contenter du nom et de l'adresse du bénéficiaire effectif qu'il établira sur la base des informations à sa possession à raison des règles en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux (directive 97/308/CEE du 10 juin 1997) ; si cette date est postérieure, la directive exige que l'agent payeur ne se contente pas du nom et de l'adresse du client, mais aille rechercher « son numéro d'identification ou, à défaut d'un tel numéro, la date et le lieu de naissance » article 3 paragraphe 2-b de la directive.

    Il s'agit d'une exigence assez lourde qui place la lutte contre l'évasion fiscale un cran au dessus de la lutte contre le blanchiment de capitaux, en termes de renseignements demandés aux intermédiaires.

    Quant à la résidence du bénéficiaire effectif, les règles de détermination diffèrent également selon la date des relations contractuelles. Si celle-ci est antérieure à la date de transposition de la directive, l'agent payeur disposera de l'information sur la base des règles en matière de blanchiment de capitaux. Si la date est postérieure, les règles vont différer selon que le client possède un passeport ou tout autre document officiel communautaire ou tout autre document officiel d'un Etat tiers. Dans la première hypothèse, la résidence communautaire sera présumée ; l'agent payeur devra ainsi vérifier simplement le domicile permanent, selon les règles qu'il appartiendra à chaque membre de fixer. Et si le client se prétend résident d'Etat tiers, il devra fournir un certificat de résidence de cet Etat tiers. Dans la seconde hypothèse, que le client se déclare résident d'un Etat tiers ou d'un Etat de la communauté, l'agent payeur devra également vérifier le domicile permanent de l'intéressé sans exiger forcement un certificat de résidence. Ce n'est que finalement dans le cas suspecté de fraude, à l'encontre de l'administration fiscale d'un Etat membre de la communauté, que l'on met à la charge du client l'obligation d'apporter la preuve de ce qu'il avance. Compte tenu de la lourdeur de cette charge pour le client et du caractère dissuasif de celle-ci, dans tous les autres cas, c'est l'agent payeur qui devra faire diligence pour confirmer les assertions du client.

    Quant à l'individualisation des intérêts (en France par exemple), c'est sur la base de cette individualisation que les établissements payeurs établissent ce que l'on nomme l'état « directive » qui est joint à la déclaration d'Imprimé Fiscal Unique (IFU).

    Cet état comporte deux zones à compléter :

    - une zone regroupant l'ensemble des intérêts payés ou inscrits en compte à compter du 1er juillet 2005. Le montant à déclarer est le montant « net » c'est-à-dire après application, le cas échéant, du prélèvement obligatoire prévu, pour le cas français, au III de l'article 125-A du Code Général des Impôts (CGI).

    Si la distribution à destination du bénéficiaire effectif comporte d'autres revenus, tels que des dividendes, seule la partie intérêts au sens de la directive « épargne » est à déclarer dans l'état « Directive ».

    - une zone relative aux montants de cessions, remboursement ou rachat de créances ou de parts et actions de certains OPCVM et assimilé investis à plus de 40% en créances et produits assimilés réalisés à compter du 1er juillet 2005. Le montant à déclarer est le montant « brut », c'est-à-dire sans déduction du montant des frais de cession.

    Les sanctions pesant sur l'agent payeur :

    Les infractions à l'obligation de déclaration entraînent l'application d'une amende prévue par la législation nationale de chaque Etat.

    Il convient de préciser que dans les pays où la retenue à la source est appliquée, aucune sanction à l'encontre des agents payeurs n'est prévue.

    Les établissements payeurs qui ne respectent pas l'obligation d'individualisation des intérêts « directive »ou qui font une déclaration insuffisante des sommes en cause sont sanctionnés par une amende fiscale forfaitaire de 150Euros par information omise ou erronée, dans la limite de 500 Euros par déclaration.

    Les établissements payeurs qui omettent des renseignements ou portent des éléments inexacts sur l'état « directive » annexé à l'imprimé fiscal unique (IFU) sont sanctionnés par une amende de 15 Euros par omission ou inexactitude, avec un minimum de 150 Euros pour chaque déclaration concernée. Cette amende minimum de 150 Euros s'applique de manière globale (IFU et état annexé).

    Ces obligations imposées à l'agent payeur et les sanctions prévues sont ainsi établies pour la mise en oeuvre de mécanismes assurant l'imposition effective des revenus d'intérêts dans l'Union Européenne.

    Section 2 : Les mécanismes prévus pour assurer une imposition effective des revenus de l'épargne et les divergences suscitées 

    Si tous les Etats membres sont presque unanimes quant à la nécessité d'assurer une imposition effective des revenus de l'épargne dans l'Union Européenne, il convient de relever des divergences non moins importantes quant au mécanisme à mettre en oeuvre pour atteindre ce but. D'un côté, un groupe d'Etats, à la tête duquel se trouve le Royaume uni34(*), qui est hostile par principe à toute harmonisation fiscale qu'il considère, d'une part, comme source de lourdeur administrative « supranationale » inutile, et d'autre part comme contraire aux intérêts de ces pays dans la mesure où cette harmonisation s'établit à un niveau plus élevé que celui de la fiscalité nationale. En effet pour ces pays la levée du secret bancaire induite par le système d'échange d'information, outre qu'elle heurtait une solide tradition en la matière, présentait le risque certain d'une fuite de capitaux et ne pouvait se concevoir que si des Etats concurrents, et voisins bien que non communautaires (la Suisse par exemple) acceptaient de s'aligner sur le régime communautaire.

    De l'autre côté, un autre groupe d'Etats35(*), considéré comme étant des pays de forte fiscalité, cherchant à limiter la fuite de capitaux, favorisée par la libre circulation des capitaux vers les pays où ladite épargne était moins imposée. Pour ces Etats, la retenue à la source serait un système opaque contrairement à celui d'échange d'information qui emporte pleine transparence dans le dispositif.

    Le projet de directive proposait en fait trois mécanismes : la retenue à la source, la fourniture d'information et le certificat de déclaration, par lequel le contribuable pouvait empêcher l'application de la retenue à la source en prouvant que les intérêts en question avaient déjà été déclarés aux autorités fiscales appropriées.

    Au final un compromis a été trouvé sur la coexistence des deux mécanismes, avec une certaine prééminence du système d'échange d'information et un dispositif transitoire de retenue à la source au profit de certains Etats avec une affirmation d'une nécessité d'avoir des accords avec des Etats tiers pour l'application des mêmes dispositions.

    Paragraphe 1 : L'échange automatique d'informations : un mécanisme idéal non exclusif

    Le caractère central de ce dispositif montre bien le souci de la majeure partie des Etats à aller vers plus de transparence dans le mouvement des flux financiers, en même temps que leur imposition. Mais face à la réticence de certains Etats, ce dispositif n'a pas été adopté de manière exclusive.

    I- Un dispositif central 

    Le mécanisme d'échange de renseignements crée des obligations dont on sait qu'elles sont devenues l'objet principal du texte communautaire. Ces obligations font l'objet du titre II de la directive. Pour l'essentiel, l'article 8 fait obligation à l'agent payeur de communiquer un certain nombre de renseignements à l'autorité compétente de l'Etat où il est établi.

    La notion d' « autorité compétente » est « définie » à l'article 5 de la directive comme celle qui sera notifiée à la Commission par l'Etat membre. S'il s'agit de l'autorité compétente d'un Etat tiers, référence sera faite à l'autorité compétente « aux fins de conventions bilatérales ou multilatérales en matière de fiscalité ». Cette dernière autorité devant, selon l'article 9, communiquer automatiquement36(*)ces informations à l'autorité compétente de l'Etat membre où réside le bénéficiaire effectif. L'article 9 paragraphe 2, précise bien que cette information devra avoir lieu au moins une fois par an, dans les six mois qui suivent la fin de l'exercice fiscal de l'Etat membre de l'agent payeur.

    Il est donc clair que cet échange présentera un caractère d'automaticité très contraignant et qui empêchera tout Etat membre de prétendre échapper à ces obligations sous prétexte de non réciprocité.

    Quant aux informations à fournir et à transmettre, elles ne sont pas légères. L'agent payeur tout d'abord doit fournir à son autorité compétente, l'identité et la résidence du bénéficiaire effectif, sa propre dénomination (ou identité) et adresse bien entendu, mais également le numéro de compte du bénéficiaire effectif ou à défaut l'identification de sa créance génératrice d'intérêts. Mais précisément, s'agissant des intérêts, l'information devra couvrir leur montant payé ou crédité. Dans le cas des intérêts courus ou capitalisés, elle devra porter sur le montant total de la cession du rachat ou du remboursement37(*).

    Lorsque les intérêts seront distribués par des O.P.C.V.M, l'information portera sur le paiement de ceux-ci ou sur le montant total de la distribution qui évidemment pourra inclure autre chose que des intérêts.

    Enfin lorsque les intérêts seront payés à une entité considérée comme agent payeur par extension38(*)et qui n'aurait pas exercé l'option d'être traitée comme un O.P.C.V.M., l'information devra porter sur le montant des intérêts qui reviennent à chacun des membres, pour autant qu'ils soient des bénéficiaires effectifs résidents d'un Etat membre autre que celui où ladite entité est établie. Et si un Etat membre a opté pour l'annualisation des produits de capitalisation, ce sont les montants des intérêts annualisés qui seront fournis. Ces informations seront ensuite transmises aux autorités compétentes de l'Etat membre de résidence de chaque bénéficiaire effectif.

    Il s'agit d'une procédure assez lourde de mise sous surveillance à l'échelle européenne de transactions relatives aux versements ou attributions d'intérêts. Cette procédure ainsi décrite est non exclusive.

    II- Dispositif non exclusif 

    Presque européenne parce que la procédure d'échange automatique d'information que nous venons de décrire brièvement, n'est pas envisagé à titre exclusif. Elle n'est pas exclusive dans la mesure où de manière un peu curieuse, l'article 16 de la directive prévoit que « la présente directive ne fait pas obstacle à ce que les Etats membres prélèvent des retenues à la source dans le cadre de leurs dispositions nationales ou conventionnelles relatives à la double imposition ».

    Si juridiquement cette disposition peut parfaitement s'expliquer, il n'en reste pas moins que le cumul qu'elle autorise entre un système d'échange de renseignements et un dispositif national ou conventionnel de retenue à la source brouille quelque peu le message que le texte entendait faire passer quant à l'imposition de ces revenus par l'Etat de résidence du bénéficiaire effectif et risque de rendre dissuasif le territoire européen.

    Mais le système envisagé par la directive ne prétendait pas non plus à la généralisation, non par manque d'ambition, mais par réalisme. En effet, au regard de la réticence de certains Etats, plus haut évoquée, quant à la levée du secret bancaire qu'emporte ce système, la Commission était consciente de faire venir ces Etats sur cet aspect très important du dispositif. Elle était aussi consciente déjà qu'il serait long de faire venir des Etats tiers sur ce principe du secret bancaire. Elle a donc prévu (article 10 de la directive) que pendant une période transitoire de sept ans, trois Etats membres (Belgique Luxembourg Autriche) seront dispensés de mettre en oeuvre l'échange automatique de renseignements. Ils mettront en oeuvre un dispositif de retenue à la source pendant cette période transitoire.

    Paragraphe 2 : La retenue à la source : un dispositif transitoire fruit d'un compromis

    Face à l'opposition des trois Etats pour des raisons touchant à la cohérence de leur système respectif invoquée, il a été admis, pour permettre un accord sur le dispositif dans sa globalité, que ces trois Etats seront dispensés pour une période transitoire, d'effectuer l'échange automatique de renseignements avec les autres Etats membres. Du moins, sont ils dispensés de fournir des informations, mais ils peuvent recevoir celles que les autres Etats auront été tenus de leur fournir.

    Pour la retenue à la source ainsi prévue, les textes ont prévu des taux qui évoluent avec le dispositif et une assiette sur laquelle s'appliquera la retenue. Toutefois, pour une effectivité du dispositif, le compromis prévoit la nécessité d'accord avec des pays tiers.

    I- Mécanisme et taux de la retenue à la source :

    Durant cette période de transition39(*), les Etats en question ont la faculté de substituer au système prévu un mécanisme de retenue à la source40(*) dont le taux est de 15% pendant les trois premières années de la période de transition, de 20% pendant les trois années suivantes et de 35% par la suite. Les Etats pouvant à tout moment revenir au système d'échange d'informations, ils ne sont pas tenus d'aller jusqu'à la septième année. Toutefois ils sont tenus de prévoir dans leur législation l'une des deux procédures mentionnées à l'article 13 de la directive épargne, permettant au bénéficiaire effectif d'échapper de sa propre volonté au paiement de la retenue : soit autoriser le bénéficiaire à demander à l'agent payeur de communiquer les informations prévues par la directive41(*), de sorte que le système de transmission des informations reprendra son cours, soit permettre au bénéficiaire effectif de remettre à son agent payeur un certificat établi par l'autorité compétente de son Etat de résidence42(*) et comprenant son nom, adresse et son numéro d'identification fiscale, ou à défaut sa date et son lieu de naissance, le nom et l'adresse de l'agent payeur ainsi que le numéro de compte du bénéficiaire effectif ou à défaut l'identification du titre de créance .

    Cette retenue à la source effectuée par l'Etat membre de l'agent payeur n'empêche pas l'Etat membre de résidence du bénéficiaire effectif d'imposer le revenu conformément à son droit interne, dans le respect du traité43(*).

    Toutefois l'article 14 paragraphe 1er, lui fait obligation d'éliminer la double imposition qui pourrait résulter du cumul de retenue à la source et d'imposition dans l'Etat de résidence. Le paragraphe 2 du même article détaille la procédure selon laquelle l'Etat de résidence est tenu d'accorder un crédit d'impôt égal au montant de retenue à la source, à concurrence de l'impôt dû pour de tels intérêts sur son territoire. Lorsque le montant de cette retenue est supérieur à l'impôt normalement dû, l'Etat doit rembourser l'excédent au bénéficiaire.

    Ce mécanisme de retenue à la source ci-dessus décrit s'applique sur une assiette et les recettes font l'objet d'un partage, ce dernier aspect étant toute la spécificité du dispositif.

    II- Assiette de la retenue à la source et le partage des recettes :

    La retenue à la source ainsi prévue a pour assiette, d'une manière générale, le montant des intérêts payés et crédités. Dans le cas des revenus distribués par un OPCVM de capitalisation ayant investi plus de 40% de ses actifs en créances, ou d'intérêts courus ou capitalisés, l'assiette de la retenue à la source sera le montant des intérêts ou par des prélèvements d'effet équivalent sur le montant total de la cession, du rachat ou du remboursement. S'agissant des intérêts payés à des entités, agents payeurs par extension mais n'ayant pas opté pour le régime des OPCVM coordonnés, la retenue à la source est prélevée sur le montant des intérêts revenant à chaque membre de l'entité, personne physique dans un Etat membre. Dans les deux premières hypothèses la retenue est prévue au prorata de la période de détention par le bénéficiaire effectif ; cependant, s'il est impossible à l'agent payeur de déterminer cette période de détention, il devra considérer, sauf preuve contraire apportée par le bénéficiaire effectif, que ce dernier a détenu la créance pendant toute sa durée d'existence. Ensuite, pour éviter une perturbation du marché pendant la période de transition44(*), le texte45(*) prévoit que les obligations domestiques et internationales et autres titres de créances négociables dont l'origine était antérieure au 1er Mars 2001 ou pour lesquels les prospectus ont été visés avant cette date par les autorités compétentes (...) ne sont pas considérés comme des créances pour l'application du texte et leur situation juridique antérieure sera prolongée à des conditions énumérées à l'article 15, d'où l'expression clause de « grand père ».

    Précisons que si la législation de l'Etat en question prévoit une annualisation des intérêts courus ou crédités ou produits de capitalisation, la retenue à la source est assise sur le montant des intérêts annualisés.

    Quand au second point, l'article 12 de la directive épargne indique très clairement que si les trois Etats cités ont la faculté de prélever une retenue à la source durant la période transitoire, cette retenue doit être considérée comme une garantie contre la fraude ou l'évasion fiscale dans la mesure où l'Etat de l'agent payeur ne la conserve pas intégralement. Il ne conserve que 25% de la recette et verse les 75% restants à l'Etat de résidence du bénéficiaire effectif, montrant bien par là que ce dernier est celui qui doit imposer ce type de revenus.

    Cependant toute cette mécanique, enfin bien huilée repose sur un fragile pari, celui de l'acceptation par les Etats tiers d'une extension à leur égard des mécanismes prévus par la directive.

    La nécessaire extension territoriale du dispositif prévu par la directive 

    La Directive couvre exclusivement les intérêts payés à l'intérieur du territoire de l'Union européenne, mais dans un Etat membre différent de celui où le bénéficiaire réside fiscalement. Le lieu d'établissement du débiteur des revenus est sans incidence.

    Il était évident que cette limitation du champ territorial représentait la grande faiblesse46(*) de la Directive. Son application aux seuls Etats membres aurait entraîné rapidement une fuite des capitaux hors de l'Union.

    C'est la raison pour laquelle les considérants insistaient déjà en 1998 sur l'importance d'introduire des dispositions équivalentes dans un certain nombre d'Etats tiers et de territoires dépendants ou associés.

    Les négociations furent longues et difficiles, mais des accords ont finalement été signés.

    Ainsi, des dispositions de la Directive ont été étendues à certains Etats tiers : Suisse, Liechtenstein, Saint Marin, Monaco et Andorre.

    Dix territoires associés ou dépendants sont également concernés. Les territoires associés anglais : Anguilla, Montserrat, Les Iles Cayman, Guernesey, Jersey, Ile de Man, les Iles Vierges britanniques, les Iles Turks et Caïcos.

    Les territoires associés néerlandais : les Antilles néerlandaises (Curaçao) et Aruba.

    Cependant, à l'issu des négociations, le dispositif ne s'applique pas uniformément à ces Etats tiers, territoires associés ou dépendants.

    Ø Le système d'échange de renseignements est prévu pour 22 Etats membres, et pour Anguilla, Montserrat, Aruba et Iles Cayman ;

    Ø La retenue à la source est prévue, en plus des trois Etats membres bénéficiant de la mesure transitoire, pour la Suisse, Andorre, Monaco, Saint-Marin et Liechtenstein, c'est-à-dire tous les Etats tiers, Guernesey, Jersey, Ile de Man, Iles Vierges britanniques, Curaçao et Iles Turks et Caïcos ;

    Ø Un système de réciprocité est prévu entre tous les Etats membres de l'Union, avec les territoires associés, sauf les Iles Cayman, Anguilla, les Iles Vierges britanniques et les Iles Turks et Caïcos. Enfin pas tous les Etats tiers.

    En définitive, on pourrait noter, que face à la libéralisation des mouvements de capitaux, imposée par la construction communautaire, les Etats membres ont voulu se mettre d'accord sur un dispositif pour assurer l'imposition effective de l'épargne dans leur espace commun. Dispositif, qui, de par la très forte influence des revenus qu'il touche sur les flux financiers entre les Etats membres, avait suscité des débats et des réticences quant à une éventuelle fuite de ces capitaux vers des pays hors de l'Union. En dépit de l'extension territoriale convenue entre les Etats membres et certains Etats tiers, territoires dépendants ou associés, il convient de relever que du fait de la nature très mobile des revenus en cause, la Directive pourrait comporter encore des faiblesses, qui appellent une évolution.

    2ème Partie :

    Les limites de l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne au sein de l'Union Européenne et les perspectives d'évolution

    L'imposition des revenus de l'épargne dépasse le seul débat d'assurer un minimum d'imposition de ces revenus dans l'espace européen et touche la question générale des liens que les systèmes d'imposition directe peuvent avoir entre eux. Il ne fait l'objet d'aucun doute que ce débat, qui est d'une actualité brûlante, a encore de beaux jours devant lui au regard de l'environnement juridique communautaire, caractérisé par une reconnaissance des compétences des Etats en matière d'imposition directe. Ce qui aboutit à une divergence de vue des Etats, ceux-ci n'ayant pas forcement les mêmes réalités économiques ou niveau de développement économique.

    Au-delà du caractère purement européen, il convient de relever que cette question, avec son poids économique (l'importance des places financières dans l'économie mondiale) dépasse ce seul cadre et devient de plus en plus universelle. Les européens ne peuvent pas réfléchir sur cette question dans le cadre de leur seul espace financier, au risque de porter atteinte à la compétitivité de leur espace.

    Au regard de ce qui précède, on peut ainsi dire, que l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne, telle que réfléchie et adoptée par la directive européenne comporte, sans faire preuve d'exhaustivité, deux grandes limites, qui risquent soit de freiner l'avancée soit de rendre l'espace européen moins attractif : d'une part des limites internes au système européen à savoir les mécanismes prévus par les textes communautaires et la disparité, quelque peu entretenue, des systèmes d'imposition directe ; d'autre part des limites externes ou internationales, comportant essentiellement une question de politique fiscale internationale (la question des paradis fiscaux) et tenant à la forte mobilité des revenus de l'épargne et les conséquences qui s'y rattachent. Il convient de penser qu'une avancée est nécessaire, au-delà du dispositif réfléchi. D'où des perspectives dans des cadres plus élargis et mieux adaptés.

    Chapitre 1 - Les Limites internes: l'environnement juridique communautaire et ses conséquences sur le processus 

    Comme précédemment évoqué, le débat sur la fiscalité des revenus de l'épargne est inclus dans le débat global sur la fiscalité directe, et son rôle dans le cadre de la construction d'un espace financier européen est de plus en plus important.

    Absente au départ dans le débat sur l'harmonisation fiscale dans la communauté, pour manque d'impact important sur la formation et le fonctionnement du marché commun, la fiscalité directe y prend de plus en plus une place importante par son rôle d'efficacité et de cohérence économiques47(*). Nous verrons qu'elle constitue une vraie problématique dans la construction communautaire dont la conséquences est sans conteste quant la disparité des systèmes d'imposition.

    Section 1 : La problématique de la fiscalité directe dans la construction communautaire

    La problématique de la fiscalité directe dans l'Union Européenne se résume en cette formule constamment rappelée par la Cour de Justice des Communautés Européenne : « si, en l'état actuel du droit communautaire, la matière des impôts directs ne relève pas en tant que telle du domaine de la compétence de la communauté, il n'en reste pas moins que les Etats membres doivent exercer leurs compétences retenues dans le respect du droit communautaire »48(*). Cette formule soutient et entretient un paradoxe de cette branche de la fiscalité dont la fiscalité des revenus de l'épargne est une partie assez importante, vu son poids économique.

    A cela s'ajoute le processus décisionnel dans les instances de l'Union Européenne en matière fiscale d'une manière générale, qui handicape largement le processus à prendre de l'avancée.

    Paragraphe 1 : Le paradoxe de la fiscalité directe et ses conséquences sur le processus

    Se manifestant par une absence d'objectifs en termes d'harmonisation dans cette branche de la fiscalité, il a eu pour conséquence une harmonisation « à minima » pour ce qui concerne l'imposition des revenus de l'épargne.

    I- Manifestation de ce paradoxe : absence d'objectifs en termes d'harmonisation

    Il n'existe pas de disposition précise du traité de Rome relative à l'harmonisation de la fiscalité directe, contrairement à la fiscalité indirecte. Sauf le cas de l'article 220, comme le suggère le Professeur Dibout, que l'on pourrait objecter, mais ce texte prévoit simplement l'engagement des Etats membres, en tant que de besoin, des négociations en vue de l'élimination de la double imposition à l'intérieur de la Communauté. A cet état de fait, différentes raisons ont été avancées par les auteurs.

    D'abord avec l'harmonisation de la fiscalité indirecte et l'instauration d'une monnaie unique, les Etats ont abandonné une partie de leur souveraineté fiscale et monétaire au profit de la Communauté. Le seul moyen qui leur reste pour une orientation souveraine de leur politique économique reste la fiscalité directe. Ce qui explique selon ces auteurs la réticence des Etats à abandonner ou transférer celle-ci à la compétence de la Communauté.

    Ensuite, le respect des critères de Maastricht a été aussi une raison avancée. En effet, avec la mise en oeuvre de la monnaie unique, ont été prévus des critères de convergence pour assurer la stabilité et la croissance économiques dans les Etats membres.49(*)Pour assurer une réduction du déficit public, a été prévu le critère selon lequel, le rapport entre celui-ci et le PIB d'un Etats ne dépasse pas une valeur de référence fixée à 3%50(*).

    Pour le respect de ce critère, les Etats pensent que le seul moyen pour eux, c'est d'avoir une certaine liberté quant à leur choix de politique fiscale, et par là les objectifs sociaux et économiques qu'ils entendent poursuivre.

    Ce paradoxe pourrait donc se résumer dans cette assertion du professeur Montagnier : « en croyant défendre leur souveraineté fiscale, les Etats l'ont en réalité abandonnée au jeu des forces du marché, par exemple, en l'absence d'une politique fiscale coordonnée à l'égard des matières imposables mobiles. Les Etats ont dû, pour éviter des fuites de capitaux, baisser leur fiscalité sur les revenus mobiliers des entreprises dans le cadre d'une concurrence « sauvage », et maintenir ou renforcer par compensation l'imposition assise sur les salaires. »51(*)

    En matière de fiscalité de l'épargne, l'on se pose donc la question de savoir si la mise place d'un mécanisme assurant une imposition effective des revenus de l'épargne pourra t-elle résoudre les problèmes liés au déplacement des flux financiers, eu égard à l'existence de régimes privilégiés, s'il n'y a pas une véritable politique fiscale globale dans ce domaine.

    Cette situation a poussé les autorités communautaires, notamment la Commission, à adopter une démarche teintée de souplesse, qui manque de rigidité comme dans le domaine de l'harmonisation de la fiscalité indirecte.

    II- Les conséquences sur le processus d'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne : une harmonisation à minima 

    A l'analyse de l'environnement juridique ci-dessus effectuée, nous pouvons affirmer, sans crainte de nous tromper, qu'il explique un peu la démarche communautaire sur la question de la fiscalité des revenus de l'épargne. En effet, face à la réticence des Etats, qui tiennent de plus en plus à leur souveraineté fiscale, pour des raisons ci-dessus évoquées, la démarche adoptée est atypique et teintée d'une ambition à minima. Le texte adopté concerne spécifiquement les situations « transfrontalières » entre Etats membres, c'est-à-dire les intérêts versés à un bénéficiaire établi dans un Etat membre mais en provenance d'un autre Etat membre. Il ne s'agit point d'établir des règles communes de taxation, mais de mettre en place un système permettant de « garantir un minimum d'imposition effective des intérêts ». On est donc loin d'une véritable harmonisation des législations internes relatives à la fiscalité de l'épargne d'une manière générale. Il ne s'agit pas non plus de faire en sorte que tous les Etats aient un seuil d'imposition minimum pour les revenus de l'épargne sous forme d'intérêts, mais de permettre à l'Etat de résidence du bénéficiaire d'avoir les moyens d'imposer intégralement les revenus de ce dernier.

    Certes issue d'un état de fait et de droit dans la communauté, cette démarche a une portée très limitée. En effet, en absence d'une véritable politique fiscale globale dans le cadre de la communauté, l'on pourrait se poser la question de savoir si le dispositif ainsi mis en place permet de répondre effectivement à toutes les questions relatives à l'imposition des revenus de l'épargne entre Etats membres. Quels peuvent être ses effets sur la compétitivité du marché financier européen ?pourrait il résister aux lois du marché ? Ces questions, parmi tant d'autres permettent d'appréhender la portée d'un tel dispositif.

    Cette ambition à minima pourrait trouver son origine aussi dans le processus décisionnel en matière fiscale dans la Communauté.

    Paragraphe 2 : Le processus décisionnel en matière fiscale: la règle de l'unanimité profondément décriée 

    L'histoire récente met clairement en évidence que les Etats membres de l'Union Européenne ne sont pas prêts à abandonner leur souveraineté dans le domaine de la fiscalité et à accepter une harmonisation dans des domaines majeurs tels que l'imposition directe des revenus. Et cet état de fait est conforté par l'existence d'une règle d'unanimité pour l'adoption des mesures fiscales sur le plan communautaire. Ayant des fondements théoriques avancés par les auteurs, cette règle a pour conséquence de transformer les processus en de véritable séance de marchandage entre les Etats.

    I- Les fondements théoriques : le respect de l'autonomie fiscale des Etats membres

    Textuellement fondée sur des dispositions du traité52(*), cette règle est théoriquement justifiée par la persistance de la logique Etat-nation en Europe53(*).

    Le premier argument avancé, qui sous tend les autres (qui vont suivre), est le respect de la souveraineté fiscale des Etats. La souveraineté fiscale, c'est tout d'abord le droit de l'Etat de ne devoir d'impôts à aucune institution supérieure à lui. C'est aussi le droit pour les nations de choisir librement leur politique fiscale, en fonction des objectifs sociaux et économiques qu'elles entendent poursuivre. En effet, la fiscalité est un véritable moyen d'orientation de politique économique et sociale, comme on le verra plus tard. Et dans ce domaine, chaque Etat membre a des réalités et un niveau de développement qui sont différents les uns aux autres.

    Second argument avancé, et qui pourrait même militer au maintien de cette règle d'unanimité, c'est la volonté des parlements nationaux des Etats membres de sauvegarder leur pouvoir de contrôle sur le budget et son exécution dans leur Etat respectif. En effet, avec une avancée vers un système de plus en plus harmonisé, avec à la clé un rôle central dédié aux institutions communautaires, les parlements nationaux verront leur pouvoir progressivement réduit en termes d'adoption de mesures fiscales. Ce qui porte, indéniablement, atteinte à leur pouvoir de contrôle des budgets nationaux.

    Un autre argument a été avancé, c'est celui de la « neutralité » de l'Europe sur les systèmes d'imposition respectifs des Etats. Cet argument prend la forme du principe de « subsidiarité ». Invoqué régulièrement par la Commission dans ses différentes communications, cet argument repose sur l'idée « qu'il vaut mieux prendre des décisions à un niveau de gouvernement inférieur, car les décisions reflètent alors mieux les préférences de la population, en ce sens qu'elles sont prises de façon plus démocratique ». Ainsi en est il de la notion de « consentement » à l'impôt pour les personnes sur lesquels s'appliquent les systèmes d'imposition.

    Le dernier argument avancé est celui qui plaide l'obligation pour les Etats de se concurrencer les uns les autres. Celle-ci pousserait ceux dont le niveau d'imposition est le plus élevé à revoir leur copie, à réduire en conséquence leurs dépenses publiques et à faire preuve d'une efficacité accrue dans la gestion de leurs administrations.

    Malgré la nécessité d'une harmonisation fiscale reconnue par tous les Etats membres, les différents débats institutionnels ont toujours débouché sur le maintien de l'unanimité. Ainsi, l'extension de la majorité qualifiée à la fiscalité indirecte a fait l'objet d'un débat important à la Convention sur l'avenir de l'Europe54(*), en préparatif du projet de constitution européenne, qui s'est soldé par le statu quo en raison de l'opposition, renouvelée lors de la Conférence Inter Gouvernemental (CIG), de certains Etats membres (Royaume Uni, Suède, Irlande notamment). Même un compromis sous forme de clause passerelle spécifique permettant au conseil de décider, à l'unanimité, de statuer désormais à la majorité qualifiée lorsque les mesures proposées concernent la coopération administrative ou la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale illégale, n'a pu aboutir.

    Cependant le processus d'intégration continentale en Europe permet une mobilité croissante des bases d'imposition, de sorte que les Etats membres sont confrontés à une perte d'autonomie de fait en matière d'imposition. Ce qui pousse les Etats membres dans le sens de la détermination d'une politique fiscale globale, y compris en termes d'impositions directes. En attendant, le système actuel a des conséquences sur la tenue des négociations entre les Etats membres.

    II- Conséquences sur la négociation et l'adoption des textes fiscaux :

    L'une des conséquences les plus importantes est l'influence sur la durée des négociations des mesures communautaires comportant des dispositions fiscales. Le processus qui a abouti à l'adoption de la Directive épargne illustre cet aspect dans la négociation.

    Initié depuis les années 80, le processus n'a réellement abouti qu'en 200555(*), nécessitant près d'une vingtaine d'année, du fait de sa forte sensibilité et de son lien étroit avec les politiques économiques des Etats. Chacun des Etats membres, par souci de préservation de ses propres intérêts « fiscaux » ou « économiques » propres, utilise ce droit de « veto » et peut prendre tout le système en otage. Le processus de prise de décisions consiste donc actuellement en des rounds successifs de marchandage et de pression dans lesquels les Etats membres les plus puissants usent de la résistance des autres, jusqu'à ce que ces derniers finissent par donner leur accord sous la pression économique et politique.

    Une autre conséquence est l'influence sur le contenu des mesures adoptées, leur champ d'application réduit. Comme on le verra plus tard, l'utilisation de cette règle d'unanimité a permis aussi à certains Etats d'imposer l'exclusion de certains produits d'épargne du champ d'application du dispositif, par souci de préservation de leur place financière.

    Certes il n'est pas nécessaire, comme l'a souligné la commission sur la fiscalité directe, d'harmoniser tous les systèmes fiscaux. Ceux-ci étant le reflet des réalités socio économiques de chaque Etat.

    Cependant, pour une meilleure efficacité et efficience d'un espace financier comme celui de l'Europe, une politique de cohérence semble s'imposer pour tenir tête dans la concurrence mondiale. Ce qui ne semble pas être forcément de l'avis de certains Etats, qui en bloquant le système, par application de cette règle d'unanimité, sous prétexte de préserver leur système interne, remettent en cause des intérêts communautaires. Ce qui, à notre avis, semble être un paradoxe : d'une part le sentiment d'appartenir à un ensemble économique et financier, d'autre part celui de vouloir préserver ses intérêts purement nationaux au détriment des intérêts de l'ensemble de la communauté. Le processus d'adoption de la Directive épargne est le reflet de la faiblesse politique de l'Europe face aux financiers de l'Union. Car, il ne fait l'objet d'aucun doute que la position des Etats (notamment le Royaume Uni et le Luxembourg) est déterminée sous la pression des financiers et des places financières, qui brandissent le plus souvent l'argument de fuite de capitaux et donc de « chaos » financier comme conséquence d'une telle mesure.

    Il est indéniable, que pour une réelle avancée vers une Europe financière et fiscale plus forte, au regard de la mise en oeuvre des libertés de circulation, cette règle d'unanimité, à défaut d'être remplacée par une règle de majorité (qualifiée ou non) soit mieux encadrée, en mettant au dessus des intérêts fiscaux propres à chaque Etat, l'intérêt politique et financier de l'ensemble de l'Europe, afin de pouvoir tenir la concurrence financière internationale.

    Ce qui semble être difficile, tant les Etats ne voient dans la définition d'une politique fiscale, un moyen d'orientation de leur politique économique interne. Ceci aboutit à une profonde divergence des politiques d'imposition de l'épargne, une autre limite pour une Europe financière.

    Section 2 : La profonde divergence des politiques d'imposition de l'épargne en Europe 

    A l'analyse des différentes études menées sur la fiscalité de l'épargne en Europe56(*), il ressort une profonde divergence entre les politiques d'imposition. Celle-ci dépend de la place de l'Etat dans le financement des dépenses publiques d'une part, et d'autre part des régimes de financement des retraites dans ces pays. Ce qui s'explique par le fait que la fiscalité de l'épargne est un véritable moyen de politique économique et se manifeste par une disparité des régimes d'imposition de l'épargne.

    Paragraphe 1 : La fiscalité de l'épargne, un moyen de politique économique

    Théoriquement, la fiscalité, c'est à dire le système d'imposition d'un pays, a comme principal objectif le financement des dépenses publiques. Mais au-delà, la fiscalité de l'épargne est aussi un moyen entre les mains des Etats pour atteindre des objectifs économiques et sociaux. Les réalités économiques et sociales des Etats n'étant pas forcement les mêmes, il en résulte une forte disparité entre les régimes d'imposition prévus dans les différents systèmes.

    I- Les débats théoriques : l'utilisation de la fiscalité de l'épargne à des fins économiques et sociales 

    En matière d'épargne, la fiscalité répond à deux objectifs principaux :

    - D'une part, elle permet aux ménages, mais également aux pouvoirs politiques, d'arbitrer entre « consommation » et « épargne ». Ainsi, plus l'épargne est fiscalisée plus les ménages auront tendance à consommer et inversement.

    - D'autre part, elle constitue un outil d'orientation de l'épargne :

    § soit à des fins sociales : favoriser la constitution d'une épargne populaire, totalement défiscalisée, à destination des personnes aux revenus les plus modestes ;

    § soit à des fins économiques : la fiscalité de l'épargne vise aussi à remplir plusieurs objectifs économiques, parfois contradictoires. Elle peut favoriser le financement des entreprises, notamment à travers les placements en actions ; le financement de certains secteurs économiques, soit par des mécanismes d'exonération pour l'investissement dans certains secteurs, soit par la transformation en prêts de longue durée à des taux privilégiés à destination des secteurs sociaux comme les logements sociaux ou les petites et moyennes entreprises.

    Enfin, avec la fiscalité de l'épargne, les pouvoirs politiques peuvent aussi engager des actions pour le financement des déficits publics de l'Etat, par une politique favorable aux placements obligataires. Au delà de la simple imposition de l'épargne, ces questions posent l'épineux problème des liens entre le niveau des prélèvements obligatoires et les dépenses publiques de protection sociale et aussi les questions de financement des retraites.

    En absence d'une compétence européenne sur ces questions, il va de soi qu'elles ont une forte influence sur les systèmes d'imposition, même celle de l'épargne des non résidents dont il est question dans notre étude.

    Par ailleurs, dans le droit interne des Etats, la pratique veut que toute modification de la fiscalité de l'épargne doit être la plus neutre possible pour le budget de l'Etat et pour les budgets sociaux. Au delà de cette neutralité budgétaire, la fiscalité de l'épargne doit assurer une neutralité technique sur le plan macroéconomique. En effet, elle doit assurer une certaine neutralité entre les différents produits de l'épargne. La fiscalité de l'épargne ne doit pas favoriser une allocation inefficace de l'épargne entre les différents produits existants, sauf lorsque cette différence est justifiée par la volonté des pouvoirs publics d'orienter l'épargne vers un produit particulier, au regard des priorités sociales.

    On voit, au regard de ce qui précède, que vu le poids de la fiscalité de l'épargne dans l'orientation de la politique économique d'un Etat, l'enjeu est énorme quant à une question d'harmonisation de cette branche de la fiscalité. Il explique donc la réticence des Etats membres sur la question, vue la sensibilité économique de la question. Cette sensibilité touche la capacité des Etats dans le financement de leurs besoins sociaux (sécurité sociale, retraite....). Et en absence d'une compétence de la communauté dans ces domaines, on en tire une disparité entre les régimes d'imposition de l'épargne.

    II- Les aspects pratiques : une forte disparité entre les régimes d'imposition de l'épargne dans l'Union Européenne 

    Au delà de la seule imposition de l'épargne, cette question pose la véritable problématique de la place de l'Etat dans le financement des dépenses d'infrastructures publiques et dans le financement des retraites. En la matière, les Etats n'ont pas forcement la même politique.

    D'une part, nous avons des Etats providence, qui ont un degré d'intervention assez fort dans le financement des dépenses sociales, donc qui ont un besoin de financement plus élevé. Dans ces Etats, nous avons des niveaux de pression fiscale assez élevée, dont l'imposition de l'épargne. Ces Etats seraient plus favorables à un système, transparent selon eux, basé sur l'échange de renseignements, qui pour eux, assurerait une meilleure rentrée fiscale pour financer leur besoin.

    D'autre part, nous avons des Etats qui ont un niveau d'intervention dans les dépenses sociales, plus bas, donc un besoin de financement moins élevé. Ces Etats, même s'ils ne le disent pas clairement, sont plus favorables au système de retenue à la source, système qui paraît être opaque pour les premiers.

    Outre le financement des dépenses sociales, qui joue forcément sur le besoin de financement public, le système de financement des retraite a des conséquences sur le système d'imposition de l'épargne.

    En effet, deux systèmes s'opposent : d'une part le financement de la retraite par capitalisation et le financement par répartition. Cette opposition a des conséquences tant sur l'épargne publique (financement des dépenses publiques) que sur l'épargne privée (le système des assurances).

    Dans le premier cas, il est indéniable que l'imposition de l'épargne a une forte influence, la retraite étant constituée par une sorte d'assurance vie. Dans le second, l'imposition de l'épargne a moins d'influence, les non actifs étant pris en charge par les actifs d'aujourd'hui. Dans l'ensemble de l'Europe, les réformes des retraites ont un point commun : elles rendent moins généreux les régimes de répartition, menacés par le vieillissement de la population, et tentent de mettre en place de nouveaux mécanismes de capitalisation, qui font appel à l'épargne privée par le biais des plans professionnels et individuels57(*)

    En dépit de l'absence de règles de fond dans le dispositif adopté, cette disparité des systèmes d'imposition de l'épargne, a sans aucun doute, favorisé la limitation du texte adopté quant à son domaine matériel et personnel notamment.

    Paragraphe 2 : les conséquences sur le dispositif enfin adopté : les limitations du texte de la Directive épargne

    I- Les limitations matérielle et personnelle 

    - Limitation matérielle et ses conséquences 

    Deux formes d'épargne importantes sont exclues de cette directive : les pensions et prestations d'assurance autrement dit l'assurance vie et les dividendes d'actions qui, pour ces derniers, constituent environ 40% de l'épargne intra européenne.58(*)

    Si l'on peut comprendre la démarche de la Commission, consistant à se limiter, dans un premier temps, aux principaux revenus de l'épargne sous forme d'intérêts, dans la mesure où les autres produits donnent généralement lieu à une imposition et pour ne pas trop retarder l'adoption du texte, ces exceptions soulèvent des inconvénients.59(*)

    D'un point de vue purement juridique, il apparaît moins logique, que la directive ne concerne pas tous les produits de l'épargne.

    D'un point de vue pratique, ces dérogations devraient entraîner des discriminations entre les épargnants, en fonction de la composition de leur portefeuille, de même qu'entre certains établissements, en fonction de leur spécialité.

    Economiquement, cette différence de traitement entre les produits de l'épargne est de nature à favoriser ceux qui ne sont pas couverts par la directive aux dépens des autres. Une telle position peut être un choix s'il s'agit de favoriser les placements directs en actions par rapport aux autres produits financiers. Mais, pour ces derniers, il vaut mieux que l'orientation de l'épargne résulte, comme c'est économiquement souhaitable, des besoins du marché, plutôt d'être conditionnée par des différences de régimes fiscaux.

    En définitive, il faudrait donc s'attendre, de la part de certains investisseurs professionnels de l'UNION Européenne, à des transferts d'investissements de produits porteurs d'intérêts vers des produits non porteurs d'intérêts comme les actions, les produits dérivés, ou les produits d'assurance vie. Cependant, pour les investisseurs individuels, c'est à dire ceux là qui investissent sans intention de fraude avérée, le risque de transfert paraîtrait moins fort. La limitation du champ personnel pourrait avoir aussi des conséquences économiques.

    - Limitation personnelle et ses conséquences

    Comme vu plus haut, la Directive épargne se limite aux personnes physiques que les banques doivent identifier comme bénéficiaires effectifs. Par suite, les personnes morales, en particulier les structures off-shore ou les trusts, sont exclues de son champ d'application. Ainsi, pour les investisseurs ayant placé leurs avoirs dans des trusts anglo-saxons où l'identité des bénéficiaires effectifs est quasi confidentielle, il est, donc, possible d'échapper à l'échange automatique d'informations.

    Par ailleurs, l'absence d'une définition de statut de résident communautaire, que la Directive n'a pas comblé, pourrait poser des difficultés d'interprétation dans le cadre de sa mise en oeuvre. En effet, aujourd'hui, chaque Etat a sa propre conception de la notion de résident. Il en résulte que les textes fiscaux communautaires ne s'appliquent pas exactement aux mêmes personnes d'un pays à l'autre, ce qui constitue une source d'inégalités de traitement et de distorsions de concurrence.

    En définitive, la gestion de son épargne à partir d'un véhicule sociétaire peut faire en sorte que l'on échappe à l'application de la directive.

    II- La limitation géographique et ses conséquences :

    C'est un des aspects internationaux de la question de l'imposition des revenus d'épargne des non résidents, aspects que nous aborderons plus en détail plus loin.

    En effet, l'entrée en vigueur de la Directive épargne était subordonnée à l'adoption des mesures analogues par certains Etats tiers, territoire associé ou dépendant, comme vu ci dessus.

    Dans la mesure où les dispositions de la Directive ne concernent que les revenus payés à des personnes physiques résidentes de l'Union Européenne par des agents payeurs qui sont établis sur son territoire ou sur celui d'Etats liés à elle par un accord prévoyant des mesures analogues à celles appliquées dans les Etats membres, il sera possible, pour une banque dans l'un de ces Etats tiers, de délocaliser le compte d'un client résident d'un Etat membre vers l'une de ses filiales établies dans un Etat qui n'est pas lié à l'Union par un tel accord. Dans ce cas, l'établissement payeur se trouvera, de fait, hors du champ d'application de la Directive et des accords prévoyant une retenue à la source. Les négociations sur un échange de renseignements sur demande lorsque l'administration soupçonne un cas de fraude ou une infraction équivalente, ayant échoué, il y a lieu donc, de penser que les principales places financières asiatiques et américaines resteront très attractives pour les résidents de l'Union qui cherchent à échapper à l'application de la Directive sur les revenus de l'épargne. D'où une dimension universelle de la question de l'imposition de l'épargne s'avère de plus en plus affirmée.

    Chapitre 2 : Les limites externes de l'harmonisation de la fiscalité de l'épargne et les perspectives d'évolution : nécessité d'un cadre multilatéral

    Initialement, la politique fiscale répondait essentiellement à des préoccupations économiques et sociales nationales. Le niveau et les modalités de l'impôt étaient déterminés en fonction des biens et transferts collectifs souhaités, compte tenu des objectifs de répartition, de stabilisation et de redistribution jugés adéquats par chaque pays. Les systèmes fiscaux nationaux, dans le contexte d'économies essentiellement fermées, avaient certes une incidence internationale, étant donné qu'ils pouvaient influer sur l'imposition des revenus de source étrangère perçus par les résidents du pays et qu'ils prenaient généralement en compte dans la base d'imposition les revenus de source nationale perçus par des non résidents, mais l'interaction des systèmes fiscaux nationaux était relativement peu importante du fait de la mobilité limitée du capital60(*).

    Depuis peu, la mondialisation, alimentée par la révolution technologique de la dernière décennie, a favorisé l'explosion des transactions transfrontières. Les progrès technologiques, en particulier dans le domaine du commerce électronique et des activités bancaires, ont rendu les opérations bancaires internationales directement accessibles à un grand nombre de contribuables et non plus seulement aux grandes entreprises multinationales et aux particuliers fortunés. Cette nouvelle ère de « banque sans frontière » a favorisé les transactions internationales et offert de nouvelles possibilités de croissance économique et d'amélioration du niveau de vie dans le monde entier, mais elle a aussi entraîné de nouveaux défis pour les administrations fiscales du monde.

    Ceci étant, si la réponse à ces défis est de plus en plus dans des regroupements économiques régionaux ou sous régionaux, il faut reconnaître que certaines questions dépassent le seul cadre de ces regroupements et montrent leur caractère plus universel, notamment la question de l'imposition de l'épargne du fait de sa forte mobilité dans cette économie mondialisée (Section I), d'où une limite externe au dispositif prévu pour assurer l'imposition effective de l'épargne en Europe. L'enjeu est l'accès des administrations fiscales aux renseignements bancaires transfrontières pour l'établissement de l'assiette de l'impôt de leurs résidents. Il dépasse le seul cadre européen et devient une question purement mondiale. Cependant, des perspectives se dessinent dans le cadre de l'OCDE (Organisation pour la Coopération et le Développement Economique) permettant de penser qu'une réponse adéquate à la question de l'imposition des revenus de l'épargne pourrait être trouvée(Section II).

    Section 1 : Les limites externes à la Communauté : l'imposition de l'épargne, une question de concurrence fiscale mondiale

    Dans une économie mondialisée, la question de l'imposition de l'épargne est une forte préoccupation des administrations fiscales, du fait de sa forte mobilité

    Paragraphe 1 : Causes : La forte mobilité de l'épargne dans l'économie contemporaine

    Cette forte mobilité de l'épargne s'explique par le vent de libéralisation des capitaux qui caractérise l'économie mondialisée et est accélérée par les progrès technologiques.

    I- La Mondialisation et la libéralisation des marchés de capitaux et leurs conséquences sur la circulation des flux financiers

    La libéralisation des marchés de capitaux est l'un des éléments qui ont alimenté la mondialisation au cours des dix dernières années, et cette tendance est de plus en plus favorisée par la mise en place des organisations sous régionales ou régionales économiques. Cette libéralisation a constitué une réponse à la menace que faisaient peser sur les marchés de capitaux les centres financiers extraterritoriaux dans les années 60 et 70. A mesure que les flux de capitaux vers les centres financiers extraterritoriaux menaçaient de saper les marchés de capitaux traditionnels, un certain nombre de réformes réglementaires ont été entreprises par certains Etats pour instaurer des règles du jeu plus équitables entre les opérations bancaires nationales et extraterritoriales61(*). Les contrôles des changes sont progressivement supprimés dans le cadre des regroupements économiques et monétaires comme l'Europe.

    La libéralisation et l`harmonisation qui en a résulté, a grandement facilité la libre circulation des capitaux à travers les frontières nationales, ce qui a amélioré la répartition du capital et réduit son coût. Elle a également encouragé le développement des intermédiaires financiers non bancaires (par exemple, les fonds d'investissement, les fonds de pensions et les entreprises d'assurance).

    Bien qu'ayant facilité la croissance économique mondiale, la libéralisation des marchés financiers a par ailleurs renforcé les possibilités d'inobservation des législations fiscales. En effet, à partir du moment où la plupart des obstacles non fiscaux ont été supprimés, les personnes physiques et surtout morales ont obtenu l'accès à un coût faible ou nul, aux systèmes bancaires du monde entier, ce qui leur a permis d'effectuer des transactions légitimes et illégitimes. Cela a également compliqué, pour les administrations fiscales, la détection de l'évasion et de la fraude fiscales, en absence de systèmes d'échange fiable de renseignement bancaires entre les Etats.

    En définitive, on pourrait dire que la mondialisation, avec son lot de libéralisation des flux financiers lance des défis aux administrations fiscales sur le plan mondial. Défis qui ne vont pas en diminuant avec les progrès technologiques et leurs effets sur la fréquence et la vitesse de circulation des capitaux dans le monde.

    II- Commerce et monnaie électroniques

    La mondialisation et la libéralisation des marchés financiers ont peut être ouvert la voie à un accès accru aux transactions bancaires transfrontières, mais les progrès significatifs en électronique ont accéléré l'accès aux transactions bancaires transfrontières anonymes et instantanées. Même en l'absence de libéralisation des marchés financiers, les nouvelles technologies l'auraient permis, selon le Comité des affaires fiscales de l'OCDE dans ses analyses62(*). Et cet état de fait crée d'énormes difficultés aux administrations fiscales dans le cadre des recherches d'information pour établir l'assiette de l'impôt d'un contribuable qui dispose des avoirs à l'étranger.

    L'une des difficultés rencontrées concerne le domaine des systèmes de paiement électronique destinés à faciliter le commerce électronique par internet. Ces systèmes de paiement, en particulier lorsqu'ils sont combinés avec des techniques de chiffrement, risquent de rendre encore plus difficile, pour les administrations fiscales, la recherche de traces des opérations effectuées en vue de contrôler l'évasion et la fraude fiscales. Dans le cadre de ses analyses, le Comité des affaires fiscales de l'OCDE réfléchit à favoriser le commerce électronique sans pour autant faciliter le non respect des obligations fiscales.

    Cependant le progrès électronique en tant que tel ne constitue pas un obstacle d'accès des administrations aux renseignements bancaires. C'est combiné avec des dispositifs de secret bancaire qu'il constitue une difficulté majeure pour les administrations. En effet, pour les administrations fiscales, il ne servira à rien que des systèmes d'identification et autres soient développés en vue d'accroître la transparence du commerce électronique (y compris des opérations bancaires) si le secret bancaire ou d'autres législations empêchent d'accéder à ces informations à des fins fiscales. Etant donné le potentiel considérable d'une augmentation des opérations bancaires transfrontières par voie électronique, l'existence de mesures de secret bancaire restrictives dans les juridictions étrangères risque fort de contribuer un obstacle plus important que par le passé à l'administration de l'impôt.

    Paragraphe 2 - Conséquences : les questions d'administration de l'impôt, l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales

    Au regard de ce qui précède, l'enjeu, comme évoqué ci-dessus, est l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales pour les administrations. Il est encore rendu difficile par l'absence d'un consensus sur la question et ses conséquences sur la pratique des Etats dans le domaine. Ce qui ne manque pas d'avoir des conséquences dommageables sur le système fiscal des Etats et sur les recettes qu'ils peuvent en tirer.

    I- Absence de consensus international sur la question du « secret bancaire »

    Les banquiers dans leur profession sont tenus à un secret professionnel sous peine de sanctions, dont l'importance varie d'une législation à une autre. Ce principe est très utile car il répond à un besoin de sécurité des clients (personnes morales ou personnes physiques). En effet, il est important pour un client, que son banquier, qui par sa profession, est souvent détenteur d'informations confidentielles sur ses clients, ne divulgue pas celles-ci. L'objectif premier, est le respect de la vie privée et des libertés individuelles des clients.

    Cependant, l'enjeu, dans le cadre de notre étude, est l'accès de l'administration fiscale à ses informations pour l'établissement de l'assiette de l'impôt. Cet enjeu diffère selon que l'on est en relation purement interne à un Etat ou que l'on est dans une situation incluant une opération transfrontière. Dans ce dernier cas, il implique l'échange de renseignements entre administrations fiscales. En effet, dans le cadre d'une telle opération, l'administration fiscale de l'Etat de résidence du contribuable s'adresse à l'administration fiscale de l'Etat de source des revenus en cause. S'il s'avère que selon la législation interne de cette dernière, elle n'a pas accès à ces renseignements, ceci constitue un véritable obstacle. En la matière la pratique des Etats est très variée. Elle peut prendre plusieurs formes.

    Ainsi, une large majorité des pays membres de l'OCDE sont en mesure d'obtenir des informations sur le compte d'un contribuable en demandant des renseignements à la banque, directement ou indirectement par la mise en oeuvre d'une procédure judiciaire ou administrative. Dans d'autres pays, les administrations fiscales peuvent accéder aux renseignements bancaires au moyen de bases de données centralisées ( la France, la Hongrie, la Corée, la Norvège et l'Espagne). D'autres administrations fiscales ont quelquefois un accès moins direct et peuvent être obligées d'utiliser une procédure formelle (par exemple injonction administrative, mise en demeure, décision de justice) pour obtenir de tels renseignements : en Suisse par exemple, le secret bancaire ne peut être levée qu'en cas de fraude fiscale aux termes de la loi suisse ; aux Etats-Unis, il faut une injonction administrative prévue par l'article 7609 de l'Internal Revenue Code.

    Beaucoup d'administrations fiscales reçoivent aussi automatiquement des banques certains types d'informations (par exemple, en ce qui concerne le montant des intérêts versés et leur bénéficiaire) : c'est le cas notamment en Australie, au Canada, au Danemark, en Finlande, en France, en Irlande, au Japon, en Corée. Cela facilite beaucoup l'administration de l'impôt au niveau national et peut permettre d'élargir l'éventail des renseignements susceptibles d'être échangés de manière automatique avec d'autres parties à des conventions fiscales63(*).

    Ces exemples64(*), de par leur diversité, et dans certains cas de par les restrictions portées même à cet accès, illustrent que cet accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales est souvent difficile voire impossible dans certains cas. Ce qui ne manque pas d'avoir des conséquences tant au niveau national sur le système fiscal des Etats, qu'au niveau international dans le cadre des échanges de renseignements entre administrations fiscales.

    II- Conséquences dommageables sur le système fiscal et dans le cadre des échanges de renseignements

    Les restrictions apportées au dispositif d'accès des administrations fiscales aux renseignements bancaires s'expliquent généralement par le respect de la confidentialité de ces renseignements. Alors que les autorités fiscales sont elles aussi soumises à des contrôles très stricts quant à la manière dont elles utilisent les informations concernant les contribuables et notamment les informations bancaires. Des sanctions très sévères sont prévues en cas de violation de ces règles de confidentialité, dans presque tous les pays. Sur le plan conventionnel, l'article 26 du modèle de convention fiscale de l'OCDE, qui sert de base à la plupart des dispositions des conventions fiscales bilatérales concernant les échanges de renseignements, contient aussi des dispositions permettant de préserver la confidentialité des renseignements échangés par les autorités fiscales dans le cadre des conventions.

    Cependant, la mise en oeuvre des restrictions apportées à l'accès aux renseignements bancaires des administrations fiscales, prévues par les législations elles mêmes, aboutit à un accès difficile, voire un refus d'accès à ces informations. Ce qui peut avoir des conséquences aussi bien au niveau national, sur le système fiscal des Etats, qu'au niveau international, dans le cadre des échanges avec d'autres administrations fiscales.

    Sur le plan interne, cela peut empêcher les autorités fiscales de déterminer et de recouvrer le montant exact de l'impôt qui est dû. Ce qui peut créer des injustices parmi les contribuables. Certains d'entre eux mettront à profit des moyens technologiques et financiers pour échapper à l'impôt en utilisant des institutions financières établies dans des pays qui s'opposent à la communication des renseignements bancaires aux autorités fiscales. Cela fausse la répartition de la charge fiscale et peut susciter des désillusions quant à l'équité du système fiscal. L'absence d'accès aux renseignements bancaires crée aussi une injustice quant aux différentes catégories de revenus. Le capital mobile peut obtenir des avantages injustifiés par rapport aux revenus tirés du travail ou de la propriété immobilière. De plus, elle peut accroître le coût de l'administration de l'impôt et le coût de respect des obligations fiscales par le contribuable.

    Sur le plan international, un accès insuffisant aux renseignements bancaires à des fins fiscales peut constituer un obstacle à une coopération fiscale internationale efficace en empêchant les autorités fiscales d'aider leurs partenaires conventionnels. Il peut aussi fausser les flux financiers et les flux de capitaux en les orientant vers les pays qui limitent l'accès des autorités fiscales aux renseignements bancaires, d'où des transferts illégitimes de recettes fiscales des Etats. Face à cette problématique fiscale mondiale, le Comité des affaires fiscales de l'OCDE a entrepris depuis environ une décennie, des études et initié des négociations entre les Etats ou groupements d'Etats, afin de répondre aux défis ainsi posés aux administrations fiscales. Ces initiatives constituent des perspectives d'évolution quant à une imposition effective des revenus de l'épargne, question mondiale qui demande des négociations dans un cadre approprié.

    Section 2 - Les perspectives d'évolution : un cadre de négociation plus large 

    Au vu de ce qui précède, la question d'imposition des revenus de l'épargne, de par le caractère très mobile dans une économie ouverte et mondialisée, devient une question universelle à traiter dans un cadre approprié. Pour cela, l'initiative de l'OCDE en la matière paraît très salutaire, car elle concerne un cadre englobant plusieurs regroupements économiques régionaux ou sous régionaux.

    Cette initiative vise essentiellement à améliorer l'accès des administrations fiscales aux renseignements bancaires à des fins fiscales. Car l'enjeu de l'imposition des revenus de l'épargne est, plus que jamais, au-delà de la question de coordination des politiques fiscales pour lutter contre les distorsions, l'accès des administrations aux informations bancaires pour établir l'imposition des contribuables qui ont des avoirs à l'étranger.

    Paragraphe 1 : Une coopération multilatérale englobant plusieurs regroupements économiques régionaux...

    I- Une réponse à la mondialisation et à la libéralisation des capitaux

    En outre des effets ci-dessus évoqués de la mondialisation et de la libéralisation des capitaux, il faut savoir que face à cette situation, des Etats se sont lancés dans des opérations d'établissement de systèmes fiscaux attractifs, en baissant artificiellement des taux d'imposition ou en instaurant des systèmes non coopératifs en termes d'échange de renseignements. Ce qui a créé une concurrence fiscale à l'échelle planétaire, avec à la clé le moins disant en termes de taux d'imposition des revenus les plus mobiles.

    Aussi, comme on l'a noté ci-dessus, la mondialisation et la libéralisation des mouvements de capitaux ont ouvert de vastes possibilités de transactions commerciales. Ces possibilités sont plus directement ouvertes à un éventail plus large de la population. Les contribuables sont aussi plus nombreux que jamais à avoir plus facilement accès aux différents moyens d'échapper à l'impôt dû en tirant parti des dispositifs des pays les plus protecteurs en matière de secret bancaire. Ces pratiques s'effectuent généralement à destination de ce qu'on appelle les « paradis fiscaux » ou vers des pays à « régimes fiscaux préférentiels dommageables ».

    Les « paradis fiscaux » offrent généralement à l'investisseur étranger un environnement où une imposition nulle ou minime se double fréquemment d'un allègement des contraintes réglementaires ou administratives. Souvent, les activités en cause ne donnent pas lieu à un échange de renseignements avec d'autres pays en raison, par exemple, de dispositions strictes en matière de secret bancaire. Ils s'appuient généralement sur les infrastructures financières mondiales existantes et ont traditionnellement facilité les mouvements de capitaux et amélioré la liquidité des marchés de capitaux. Les pays qui ne sont pas des « paradis fiscaux », qui ont libéralisé et déréglementé leurs marchés de capitaux, les avantages potentiels fiscaux accordés aux contribuables à cet égard, sont largement compensés par les effets fiscaux défavorables pour les Etats de résidence de ces contribuables.

    Quand aux « régimes fiscaux préférentiels dommageables », ils sont mis en place par des Etats, souvent à système fiscal « classique », pour attirer des activités financières et d'autres prestations de services très mobiles. Ils permettent en général de localiser dans des conditions très favorables des investissements passifs et d'attribuer des bénéfices « purement comptables ». Ils sont, très souvent, conçus spécialement pour servir de relais à l'acheminement des capitaux à travers les frontières. Ces régimes peuvent résulter du Code général des impôts, des pratiques administratives ou encore des lois spéciales, fiscales ou non fiscales, se situant en dehors du système fiscal général.

    La recherche d'une réponse efficace à ces défis se résume dans le communiqué des pays du G7, lors du sommet de Lyon en 1996  en ces termes : « Enfin, la mondialisation crée de nouveaux défis dans le domaine de la fiscalité. Le développement des `'niches fiscales'' destinées à attirer des activités financières et d'autres activités géographiquement mobiles peut produire une concurrence fiscale néfaste entre les Etats, en entraînant un risque de distorsion des échanges et des investissements et, à terme, d'effritement des assiettes fiscales nationales. Nous encourageons l'OCDE à poursuivre avec détermination ses travaux dans ce domaine, en vue de mettre en place un cadre multilatéral dans lequel les pays pourront agir individuellement et collectivement  afin de limiter la portée de ces pratiques..... ».65(*) Nous voyons donc, que le système financier actuel, dans une économie mondialisée, a des effets pervers. Ces effets appelle donc une concertation multilatérale entre les Etats. En la matière, des progrès ont été effectués par l'OCDE.

    II- Les progrès effectués dans la négociation multilatérale sur la question de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales 

    Différentes initiatives ont été prises par le Comité des affaires fiscales de l'OCDE afin notamment d'améliorer la collaboration des pays non membres. Car l'enjeu étant mondial, le seul cadre des pays membres de l'OCDE ne suffisait plus. Ce qui semble être à la portée d'une organisation comme l'OCDE, qui au-delà des objectifs économiques de ses Etats membres, poursuit des objectifs d'expansion économique au niveau mondial.

    Au vu de ce qui précède, la question de l'imposition des revenus de l'épargne étant une question très sensible dans une économie mondialisée, le Comité a donc pris des initiatives à l'égard des organisations régionales et internationales. C'est ainsi qu'il a noué des relations de travail avec des organisations régionales telles que le Centre Interaméricain d'administrateurs fiscaux (CIAT), la Commonwealth Association of Taxation and Administrations (CATA), l'Organisation intereuropéenne d'administrations fiscales (IOTA) ou encore le Groupe ad hoc d'experts en questions fiscales internationales des Nations Unies, et il a engagé avec les pays non membres des efforts de coopération dans le cadre desquels il les a encouragé à autoriser l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales. Par ailleurs, le Forum pour les économies de marchés émergentes (FEME) de l'OCDE pourra également continuer à servir d'instrument pour la promotion de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales. Le Comité encourage aussi les pays membres de s'efforcer de souligner l'importance de la question dans leurs discussions bilatérales avec les pays non membres.

    Toutes ces démarches visent à améliorer l'accès des administrations fiscales à des renseignements bancaires.

    Paragraphe 2 - Pour l'amélioration de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales et la lutte contre le blanchiment d'argent

    Des recommandations techniques ont été faites par l'OCDE pour améliorer l'échange de renseignements. Les liens avec la lutte contre le blanchiment d'argent font que la question a toute son importance dans l'évolution du système financier mondial.

    I- Les recommandations techniques de l'OCDE pour l'amélioration de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales 

    Les problèmes liés à l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales sont mondiaux par nature, en conséquence, difficiles à traiter efficacement de manière unilatérale. Les pays ont essayé de prendre individuellement des mesures afin de s'y attaquer, mais avec un succès limité à ce jour. Les recommandations de l'OCDE, par le canal de son Comité des affaires fiscales, vont dans le sens d'un traitement multilatéral de la question. Ces recommandations sont contenues dans les différents rapports sur la question de la circulation des flux financiers entre les Etats et de leur imposition66(*). L'une de ces recommandations est l'encouragement des Etats à assouplir leur dispositif législatif, réglementaire et leur pratique administrative en matière de secret bancaire. En effet, le secret bancaire est profondément enraciné dans la culture et l'arsenal juridique de certains Etats. Et la démarche de l'OCDE impose forcement que ces Etats revoient leur dispositif juridique en la matière. Pour cela, l'OCDE recommande à ces Etats de s'appuyer, en vue de cette libéralisation, sur l'assouplissement croissant dans les autres pays et sur les recommandations d'organisations internationales telles que le Conseil de l'Europe.

    Une autre recommandation est de promouvoir dans le cadre des relations conventionnelles fiscales, l'usage de l'article 2667(*) de la convention modèle OCDE sur l'échange de renseignements ou communiquer unilatéralement des renseignements aux autres parties à des conventions dans des cas appropriés.

    Des progrès ont été réalisés, mais des améliorations restent nécessaires. En effet, certains pays émettent toujours des réserves68(*) sur les différents rapports établis allant dans le sens de l'amélioration de l'échange de renseignements entre les Etats pour faciliter aux administrations fiscales de ces Etats l'établissement efficace des impôts sur des revenus détenus à l'étranger. Le Comité des affaires fiscales vient d'approuver 69(*)un Manuel sur l'échange de renseignements entre les administrations fiscales. Ce Manuel traite du cadre général et juridique des échanges, les différentes formes d'échange pouvant exister entre les Etats et les instruments et modèle d'échange. Il vise à donner aux responsables, chargés de l'échange de renseignements à des fins fiscales, une vue d'ensemble du fonctionnement des dispositions applicables aux échanges, ainsi qu'un certain nombre d'indication d'ordre technique et pratique, afin d'améliorer l'efficacité de ces échanges. Il sert également dans le cadre de programme de formation et donner des orientations utiles aux administrations fiscales s'agissant de la rédaction ou de la révision de leurs propres manuels. La question prend toute son importance dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d'argent.

    II- Les liens avec la lutte contre le blanchiment d'argent

    Au-delà de la forte possibilité pour les contribuables d'échapper à l'imposition en utilisant le système financier mondial actuel (qui peut être purement légale pour les raisons ci dessus évoquées), la question de l'absence ou de l'insuffisance d'échange de renseignements entre les administrations à des fins fiscales, pose l'épineux problème du blanchiment d'argent. En effet, l'absence d'accès aux renseignements bancaires contribue pour une large part à la réussite des techniques qui sont utilisées pour dissimuler l'origine illégale des sommes obtenues à l'occasion d'activités criminelles. Ces techniques sont également utilisées pour dissimuler des revenus du travail obtenus de manière illégale ou légale, ce qui constitue un délit dans un grand nombre de pays. Le blanchiment d'argent est un phénomène qui mine toute l'économie mondiale. Si des mesures ont été prises par les Etats de manière individuelle pour lutter contre ces pratiques, il faut reconnaître que seules celles prises dans des cadres multilatéraux ont des chances d'aboutir à des résultats probants. En la matière, nous pouvons utiliser les travaux du GAFI70(*). Ne faisant initialement le lien qu'entre blanchiment d'argent et trafic de drogue, le GAFI a fini par étendre le champ d'application des délits de blanchiment d'argent au-delà du trafic de drogue, car ses membres ont reconnu que le blanchiment d'argent, indépendamment du trafic de drogue constituait une « source de plus en plus importante d'enrichissement illégal utilisant les procédures légales ». Pour cela il a fait des recommandations71(*) dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d'argent (au-delà du trafic de drogue). Sans rentrer dans les détails, l'essentiel de ces recommandations portent sur les techniques d'identification à utiliser par les institutions financières et la forte recommandation à ne pas tenir de comptes anonymes ou de comptes sous des noms manifestement fictifs ainsi que l'obligation de dénoncer des opérations que ces institutions suspecteraient de criminel. Pour cela il propose que ces recommandations soient introduites dans l'arsenal juridique des Etats sous forme de lois, de règlements, des accords d'autodiscipline entre institutions financières.

    Renforçant les obligations qui incombent aux institutions financières concernant l'identification des clients pour prévenir le blanchiment d'argent, les informations ainsi obtenues peuvent être utilisées à d'autres fins notamment en matière d'établissement de l'impôt.

    Cependant, ces informations doivent être fiables pour atteindre ce double objectif. Ces recommandations représentent un progrès important dans le traitement des difficultés rencontrées par les administrations fiscales, chargées de l'application de la loi fiscale, du fait du blanchiment d'argent et de l'absence d'accès aux renseignements bancaires.

    Conclusion

    En conclusion à cette étude, nous pouvons relever que la construction d'ensemble économique regroupant des Etats souverains impose des contraintes à ceux-ci, contraintes qu'ils sont obligés de tenir compte dans la définition de leur politique économique. L'imposition de l'épargne nous a permis donc de déterminer jusqu'où l'Europe peut intervenir dans les systèmes d'imposition directe de ses Etats membres. En absence de compétence expresse prévue par les textes fondamentaux, l'intervention de l'Europe dans cette branche de la fiscalité prend une autre forme, une autre démarche, teintée de souplesse et manquant de rigidité. Cependant, cette intervention est de plus en plus perceptible.

    Certes il n'est pas nécessaire, sinon impossible d'aller vers une détermination de règles communautaires d'impositions directes, au regard du caractère très économiquement sensible dans les Etats membres. Mais pour une certaine efficience et efficacité du marché intérieur, il est plus que nécessaire d'aller vers une politique de coordination des dispositifs. L'imposition de l'épargne nous a permis de mesurer celle nécessité.

    En effet, la construction d'un marché intérieur avec son cortège de libéralisation des échanges, notamment de capitaux, impose, de par ses effets pervers, une démarche de coordination des politiques ou des moyens fiscaux. Les libertés qui soutiennent cette construction ne sont pas sans effet sur la forte mobilité des revenus de l'épargne, mobilité accrue avec l'utilisation des nouvelles technologies. Des défis se posent donc aux administrations fiscales par l'établissement de l'impôt de certains contribuables.

    Ceci étant, un grand marché intérieur exige une politique de limitation des distorsions des coûts de production et de rentabilité des capitaux investis, ainsi qu'une politique d'élimination des disparités et de discrimination de toute nature, susceptibles d'avoir une influence sur la liberté de circulation des capitaux. Les Etats européens ont voulu chercher la réponse dans la Directive épargne qu'ils ont adoptée après plusieurs années de négociations jalonnées d'obstacles liés soit au système de prise de décision ou à la forte sensibilité de la question.

    Cependant, du fait de cette même mobilité de l'épargne, la question de son imposition dépasse le seul cadre de l'Europe. Ceci s'explique par l'évolution actuelle du système financier mondial, caractérisée essentiellement par la mondialisation et la forte libéralisation des flux.

    Au vu de ce qui précède, il convient donc d'aller vers des négociations multilatérales, incluant d'autres places financières, qui jusqu'à présent se tiennent à l'écart du processus. Mais vu le caractère très économiquement sensible de la question, on pourrait se poser la question de savoir si certains Etats vont accepter de rentrer dans le processus ? Sinon quels sont les moyens pour leur y faire adhérer ?

    Telle semble être la tâche qui revient à une organisation multilatérale comme l'OCDE, qui au-delà de ses objectifs de développement économique de ses Etats membres, promeut l'expansion d'une économie mondiale.

    Au-delà de l'aspect multilatéral que cette question impose, sur le plan pratique, elle appelle aussi une approche pluridisciplinaire. En effet, la capacité des Etats à financer leurs dépenses publiques est l'une des grandes problématiques de la fiscalité internationale et de l'interaction que les systèmes fiscaux des Etats peuvent avoir entre eux. L'imposition de l'épargne et surtout de l'épargne transfrontière entre les Etats nous a permis d'appréhender la portée de cette interaction et de faire ressortir son impact sur l'évolution de l'économie mondiale.

    Cependant, la question suscite aussi des réformes dans certains Etats, Etats qui ont une culture juridique profondément enracinée et fondée sur le « secret bancaire ». L'intégrité des établissements financiers et le respect d'une réglementation propre qui leur sont imposé dans ces Etats, peuvent l'emporter largement sur les considérations fiscales, si les épargnants ont beaucoup d'averse pour le risque que la réforme pourrait engendrer. Par ailleurs les effets sur les établissements financiers nationaux varient selon leur degré d'intervention dans l'économie mondiale.

    Bibliographie

    - Ouvrages généraux :

    Ø Bernard Castagnède : Précis de fiscalité internationale, Ed. PUF 2002

    Ø Jean Marc Favret : Manuel de Droit et pratique de l'Union européenne, 5ème édition Gualino, 2005

    Ø Joël Molinier : Droit du marché intérieur, Ed. LGDJ avril 1995

    - Ouvrages spécialisés :

    Ø Elli Assimacoupoulou : « L'harmonisation de la fiscalité de l'épargne dans les pays de la communauté » Thèse publiée aux éditions LGDJ, Bibliothèque de science financière 1999

    Ø -Le Cacheux (J), Sterdyniak (H) : « Vers une fiscalité européenne » Collection Economica 1991

    - Articles de doctrine

    Ø -Christian Lopez, Maître de conférences Université Cergy-Pontoise : « L'harmonisation fiscale : un élan ou une limite à la construction européenne », Les Petites Affiches du 27 Mars 2000, n°61, P.5

    Ø -Daniel Gutman, Professeur à l'université Paris1 : « Les lois de la construction communautaire : l'exemple de la fiscalité directe » Les Petites Affiches, 06 oct. 2004 n°200, P.31

    Ø Dominique Berlin, Professeur à l'Université Paris 1 : « La fiscalité de l'épargne dans l'Union européenne : histoire d'une harmonisation en voie de disparition » Journal des tribunaux de droit européen 2003, P.162 et suivantes ;

    Ø Frédéric Dieu, Commissaire du Gouvernement près le Tribunal administratif de Nice : « La Directive épargne : présentation critique » 2ème Partie, Revue Lexbase n°194 du 15 déc. 2005 éd. Fiscale.

    Ø Hervé KRUGER, Directeur « Banque, Finance, Assurance » HSD : « Fiscalité de l'épargne et principe communautaire de libre circulation des capitaux : la législation française doit évoluer  (à propos de l'arrêt Verkooijen de la CJCE du 6 juin 2000) », Les Petites Affiches du 19 février 2001, n°35, P.6

    Ø Mario Monti, Commissaire européen chargé du marché et de la fiscalité : « Il faut mettre fin à la concurrence fiscale déloyale », entretien accordé aux Petites Affiches, Les Petites Affiches du 23 déc.1998 n°153, P.4 ;

    Ø Michel Aujean, Directeur de la politique fiscale à la Commission Européenne « Une politique fiscale pour la Communauté européenne : le programme de la Commission », Gazette du Palais du 18 déce.2003 n°352 P.6.

    Ø Mirko Hayat, Responsable du département fiscal de la chambre de commerce et d'industrie de Paris : « Où en est l'harmonisation dans l'Union européenne », Gazette du Palais, 08 juin 2000, n°160, P.10

    Ø Nguyen Van Tuong, ancien Professeur associé des facultés de droit : « Le troisième bilan de convergence économique dans l'Union européenne et la réduction du déficit public », Les Petites Affiches de Sept 1996 n°112, P.9

    Ø Patrick Dibout, Professeur à l'Université Paris2, avocat à la Cour : « L'Europe et la fiscalité directe », Les Petites Affiches, 23 déc.1998, n°153, P.8

    Ø Patrick Dibout, professeur à l'Université Paris2, avocat à la Cour : « La fiscalité à l'épreuve de la liberté de circulation des capitaux (à propos de l'arrêt CJCE du 6 juin 2000, aff.C-35/98, Verkooijen) », Revue de droit fiscal de l'année 2000 n°42, P.1365 et suivantes

    Ø Patrick Philip, Ludovic Vanhove, avocats : « Le droit face aux libertés fondamentales du Traité de l'Union européenne » Les Petites Affiches, 09 Jan. 2004 n°7, P.4

    Ø Philip MARTIN, Conseiller d'Etat, Professeur à l'Université de Paris 12 : « La portée fiscale des libertés communautaires de circulation (travailleurs, établissement, prestations de services, capitaux) : réflexions au regard du droit interne » Revue de droit fiscal n°44 de l'année 2000, P.1444 et suivantes

    Ø Philipe CATOIR et Mathias MORS, Direction générale Fiscalité de la Commission européenne : « Une chronique du paquet fiscal, les fondements et les enjeux de la démarche communautaire » Revue de droit fiscal, n°5 Année 2005, P.240

    - Rapports et documents :

    Ø Rapport d'information sur la Proposition de Directive du Conseil visant à garantir un minimum d'imposition effective des revenus de l'épargne sous forme d'intérêts à l'intérieur de la Communauté, communication 1998-295 finale déposée par la Délégation de l'Assemblée Nationale pour l'Union européenne et présentée par Gérard Fuchs, 1999 ;

    Ø Rapport du Comité des affaires fiscales de l'OCDE : « concurrence fiscale dommageable : un phénomène mondial » OCDE 1998 ;

    Ø Rapport du Comité des affaires fiscales de l'OCDE : « Améliorer l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales », OCDE 2000.

    - Séminaire

    -Séminaire du 26 Janvier 2006, organisé par l'EFE (Edition Formation Entreprise) sur « la fiscalité de l'épargne », Communication de Mme Françoise Fontaneau Vandoren (Cabinet Fontaneau) intitulée : « la Directive sur la fiscalité de l'épargne : six mois après son entrée en vigueur, quelles perspectives ?»

    - Sites Internet

    www.ec.europa.eu

    www.oecd.org

    www.fatf.gafi.org

    Tables des matières

    Introduction 2

    1ère Partie : 8

    Nécessité d'une harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne dans l'espace européen 8

    Chapitre 1 : Les facteurs économiques et juridiques 9

    Section 1 : Les facteurs économiques : la construction du marché intérieur 9

    Paragraphe 1 : Un souci d'intégration économique effective 10

    I- L'évolution vers un marché intérieur 10

    II- Les conséquences sur les flux financiers et sur l'imposition de l'épargne 11

    Paragraphe 2 : Par la consécration de grandes libertés : 14

    I- Les libertés protégées et l'approche utilisée : 14

    II- La fiscalité à l'épreuve de ces libertés 14

    Section 2 : Les facteurs juridiques et institutionnels : 18

    Paragraphe 1 : Un souci de coordination des politiques et des moyens fiscaux : 18

    I- Pour répondre aux effets de la consécration des libertés communautaires 18

    II- La démarche ou l'approche suivie : 19

    Paragraphe 2 : ...Par l'accroissement du rôle des institutions communautaires : 20

    I- Le rôle de la commission : incitation à une autodiscipline des Etats membres 20

    II- Rôle de la CJCE : Une convergence par le démantèlement des régimes jugés contraires aux principes du marché commun 22

    Chapitre 2 : L'instrument juridique utilisé : la Directive « épargne », une gestation difficile mais nécessaire 24

    Section 1 : Le champ d'application de la Directive épargne 24

    Paragraphe 1 : Le champ d'application matériel : 24

    Les produits dans le champ de la directive : 24

    II- Les produits exclus du champ de la directive « épargne » : répondre à des objectifs de politiques économiques et financières de certains Etats 29

    Paragraphe 2 : Champ d'application personnel : 31

    I- L'agent payeur : 32

    II- Le bénéficiaire effectif et les obligations de l'agent payeur qui s'y appliquent : 32

    Section 2 : Les mécanismes prévus pour assurer une imposition effective des revenus de l'épargne et les divergences suscitées 36

    Paragraphe 1 : L'échange automatique d'informations : un mécanisme idéal non exclusif 37

    I- Un dispositif central 37

    II- Dispositif non exclusif 39

    Paragraphe 2 : La retenue à la source : un dispositif transitoire fruit d'un compromis 40

    I- Mécanisme et taux de la retenue à la source : 40

    II- Assiette de la retenue à la source et le partage des recettes : 41

    2ème Partie : 45

    Les limites de l'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne au sein de l'Union Européenne et les perspectives d'évolution 45

    Chapitre 1 : Les Limites internes: l'environnement juridique communautaire et ses conséquences sur le processus : 47

    Section 1 : La problématique de la fiscalité directe dans la construction communautaire 47

    Paragraphe 1 : Le paradoxe de la fiscalité directe et ses conséquences sur le processus 48

    I- Manifestation de ce paradoxe : absence d'objectifs en termes d'harmonisation 48

    II- Les conséquences sur le processus d'harmonisation de la fiscalité des revenus de l'épargne : une harmonisation à minima 50

    Paragraphe 2 : Le processus décisionnel en matière fiscale: la règle de l'unanimité profondément décriée : 51

    I- Les fondements théoriques : le respect de l'autonomie fiscale des Etats membres 51

    II- Conséquences sur la négociation et l'adoption des textes fiscaux : 53

    Section 2 : La profonde divergence des politiques d'imposition de l'épargne en Europe 55

    Paragraphe 1 : La fiscalité de l'épargne, un moyen de politique économique 55

    I- Les débats théoriques : l'utilisation de la fiscalité de l'épargne à des fins économiques et sociales : 55

    II- Les Aspects pratiques : une forte disparité entre les régimes d'imposition de l'épargne dans l'Union Européenne 57

    Paragraphe 2 : les conséquences sur le dispositif enfin adopté : les limitations du texte de la Directive épargne 58

    I- La limitation matérielle et personnelle : 58

    II- La limitation géographique et ses conséquences : 60

    Chapitre 2 : Les limites externes de l'harmonisation de la fiscalité de l'épargne et les perspectives d'évolution : nécessité d'un cadre multilatéral 62

    Section 1 : Les limites externes à la Communauté : l'imposition de l'épargne, une question de concurrence fiscale mondiale 64

    Paragraphe 1 : Causes : La forte mobilité de l'épargne dans l'économie contemporaine 64

    I- La Mondialisation et la libéralisation des marchés de capitaux et leurs conséquences sur la circulation des flux financiers 64

    II- Commerce et monnaie électroniques 65

    Paragraphe 2 : Conséquences : Les questions d'administration de l'impôt, l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales 66

    I- Absence de consensus international sur la question du « secret bancaire » 67

    II- Conséquences dommageables sur le système fiscal et dans le cadre des échanges de renseignements 68

    Section 2 : Les perspectives d'évolution : un cadre de négociation plus large 70

    Paragraphe 1 : Une coopération multilatérale englobant plusieurs regroupements économiques régionaux..... 71

    I- Une réponse à la mondialisation et à la libéralisation des capitaux 71

    II- Les progrès effectués dans la négociation multilatérale sur la question de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales 73

    Paragraphe 2 : Pour l'amélioration de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales et la lutte contre le blanchiment d'argent 74

    I- Les recommandations techniques de l'OCDE pour l'amélioration de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales 74

    II- Les liens avec la lutte contre le blanchiment d'argent 76

    Conclusion 78

    Bibliographie 81

    * 1 Bernard CASTAGNEDE, Précis de Fiscalité Internationale, Paris, PUF, 2002.

    * 2 Cette épithète fait, depuis quelques années, son apparition dans le corpus des règles fiscales domestiques et internationales.

    * 3 Projet de directive qui mettait l'accent sur une option des Etats entre le modèle d'échange des informations et celui de retenue à la source

    * 4 A. Mattera, Un espace sans frontières intérieures : le défi de l' « Europe 1993 », RMUE, 1992, n°1, p.5

    * 5 Que nous verrons en détail plus tard

    * 6 CJCE 5 mai 1982, Schul, Affaire 15/81, Recueil p.1409, formule reprise à l'identique, pour des faits cette fois postérieurs à l'entrée en vigueur de l'Acte unique : CJCE 17 mai 1994, France/Commission, aff. 41/93, Recueil p.1829.

    * 7 C. de Boissieu : « Les deux faces de l'Euro : la transition et le régime permanent », Petites Affiches n°76 du 25 juin 1997, P.22, Y.Th. de Silguy, Revue Banque n°581 (Supplément), mai 1997

    * 8 Notamment Christian Lopez : « l'harmonisation fiscale : un élan ou une limite à la construction Européenne ? » Les Petites Affiches, Mars 2000, n°61, P.5

    * 9 Groupe du nom de sa présidente : Mme Primarolo qui a remis son rapport final le 29 novembre 1999

    * 10 Bernard Castagnède : « Précis de fiscalité internationale »éd. PUF janvier 2002 p.34

    * 11 « Vers une fiscalité communautaire de l'épargne : la première pierre », rapport d'information n°1537, Délégation de l'Assemblée Nationale pour l'Union Européenne, Gérard Fuchs (député)

    * 12 Depuis le 1er mai 2004

    * 13 Par exemple CJCE 14 novembre 1995 aff. C-484/93, Svensson et Gustavsson

    * 14 Arrêt du 6 juin 2000, aff. C-35/98, Verkooijen

    * 15 CJCE, 11 novembre 1981, aff. 203/80, Casati

    * 16 Par exemple aff. C-416/93, Bordessa, CJCE 23 février 1995

    * 17 Patrick Dibout : « la fiscalité à l'épreuve de la liberté de circulation des capitaux (à propos de l'arrêt Verkooijen) » revue de droit fiscal n°42 Année 2000.

    * 18 Ambry, C410/96 du 1er décembre 1998, Recueil page I-7875

    * 19 Arrêt C-302/97, Klaus Konle et Republik Österreich, 1er juin 1999.

    * 20 Par exemple CJCE 4 octobre 1991, affaire C-246/89 commission c/Royaume Uni

    * 21 Mirko Hayat, Responsable du département fiscal de la chambre de commerce et d'industrie de Paris : « Où en est l'harmonisation fiscale dans l'Union Européenne ? » Gazette du Palais, 08 juin 2000, n°160, P.10

    * 22 Du nom de Mr Ruding, Président du comité ad hoc mis en place par la commission pour réfléchir la fiscalité directe et la conduite des politiques fiscales en Europe.

    * 23 24 Philippe Cattoir et Mathias Mors : « Chronique du paquet fiscal, les fondements et les enjeux de la démarche communautaire » Revue de droit fiscal n°5 de l'année 2005, P.240 et suivantes

    * 25 Philippe Cattoir et Mathias Mors : « Chronique du paquet fiscal, les fondements et les enjeux de la démarche communautaire » Revue de droit fiscal n°5 de l'année 2005, P.240 et suivantes

    * 26 Patrick Dibout : « La fiscalité à l'épreuve de la liberté de circulation des capitaux (à propos de l'arrêt CJCE, 6 juin 2000, Aff. C-35/98, Verkooijen) »Revue de droit fiscal n°42 de l'année 2000, P.1365 et suivantes.

    * 27 Les arrêts Ambry et Konle

    * 28 Daniel Gutman : « Les lois de la construction communautaire : l'exemple de la fiscalité directe », les Petites Affiches du 06 octobre 2004, n°200, p.31

    * 29 Instruction 5 I-3-05 n°12

    * 30 Dominique Berlin : « La fiscalité de l'épargne dans l'Union européenne ; histoire d'une harmonisation en voie de disparition » Journal des tribunaux de droit européen, Mai 2003 P.162 à 168

    * 31 Notamment le Royaume uni.

    * 32 Au premier rang desquels on retrouvait la France, l'Allemagne et l'Italie

    * 33 « Vers une fiscalité communautaire de l'épargne : la première pierre », rapport d'information n°1537, Délégation de l'Assemblée Nationale pour l'Union Européenne, Gérard Fuchs (député)

    * 34 Outre le Royaume Uni nous avons la Belgique, le Luxembourg et l'Autriche

    * 35 Aux premiers rangs desquels on retrouve la France, l'Allemagne et l'Italie

    * 36 Le texte prévoit opportunément que la directive 77/799/C.E.E en matière d'échange d'informations ne s'appliquera pas aux procédures couvertes par celui-ci.

    * 37 Il en ira également ainsi des revenus réalisés lors de la cession du remboursement ou du rachat de parts ou d'unités dans les organismes (OPCVM principalement) ayant investi plus de 40% de leurs actifs en créances.

    * 38 Comme l'explique la Commission dans sa présentation du projet, cette disposition vise une catégorie résiduelle d'entités « faisant l'objet d'une surveillance peut être moins étroites des autorités fiscales » comme par exemple les trusts.

    * 39 Article 10 de la directive épargne

    * 40 Article 11 de la directive

    * 41 Cette demande/autorisation sera valable trois ans et vaudra pour tous les paiements d'intérêts effectués par cet agent payeur à ce bénéficiaire effectif

    * 42 Certificat qui devra être délivré à la demande dans un délai de deux mois, vaudra aussi pour trois ans sauf modification des éléments qui y ont été transmis comme information.

    * 43 Article 11 §4 de la directive épargne

    * 44 Notamment du fait que les émissions internationales obligataires (et particulièrement les euro bonds) contiennent souvent des clauses par lesquelles l'émetteur s'engage à dédommager le souscripteur de toute retenue prélevée par l'Etat d'établissement de l'émetteur (clause de « gross up ») ou sur la base desquelles l'émetteur est en droit, dans de telles situations, de racheter le titre au pair.

    * 45 Article 15 de la directive épargne

    * 46 Faiblesse qui pourrait perdurer, car au-delà des négociations avec des Etats tiers et des territoires dépendants ou associés, la question s'avère universelle et nécessite des négociations dans des cadres appropriés : question que nous aborderons dans la deuxième partie de notre travail.

    * 47 Mirko Hayat : « Où en est l'harmonisation fiscale dans l'Union Européenne », Gazette du palais 8 juin 2000, n°160 P.10

    * 48 CJCE 16 juillet 1998, Imperial Chemical Industries, C-264/96

    * 49 A l'exception de la Grande Bretagne et du Danemark

    * 50 A moins que le rapport n'ait diminué de manière substantielle et constante et atteint un niveau proche de la valeur de référence ; ou que le dépassement de la valeur de référence ne soit qu'exceptionnel et temporaire et le rapport ne reste proche de la valeur de référence. (article 104 C du traité de Maastricht).

    * 51 G. Montagnier : « Harmonisation fiscale européenne », Chronique RTDE 1997, P. 368

    * 52 Article 100 du traité de Rome

    * 53 Daniel Gutman : « Les lois de la construction communautaire : l'exemple de la fiscalité directe » Les Petites Affiches, octobre 2004 n°200, p.31

    * 54 chargée, en 2002, d'engager un débat sur l'avenir de l'Union européenne, dans la perspective d'une convocation d'une conférence intergouvernementale.

    * 55 Année de son entrée en vigueur après une adoption effectuée depuis 2003

    * 56 Par exemple l'excellente étude de l'OCDE : « L'efficacité des incitations pour remédier l'insuffisance de l'épargne retraite en Europe » OCDE 2005

    * 57 Revue économique de l'OCDE n°39, 2004/2 P.122 et suivantes

    * 58 ATTAC France : article publié le 22/10/2003 : « le ratage d'une réforme de la fiscalité de l'épargne en Europe », Jean Boulnois ATTAC Sud Luberon- groupe « paradis fiscaux ». Site Internet d'ATTAC France

    * 59 Entre autres soulevés par Frédéric Dieu Commissaire du Gouvernement près le Tribunal administratif de Nice, dans son article : « La directive épargne : présentation critique (2ème partie) LEXBASE Hebdo n°194 du Jeudi 15 décembre 2005- édition fiscale

    * 60 OCDE 1998 : « Concurrence fiscale : un phénomène mondial », Rapport du Comité des Affaires Fiscales

    * 61 C'est-à-dire l'activité d'une banque qui accepte des dépôts et/ou gère des actifs libellés dans une monnaie étrangère pour le compte d'un client dans un autre pays.

    * 62 OCDE 2000 : « Améliorer l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales » Rapport du Comité des affaires fiscales.

    * 63 Données tirées de l'étude du Comité des affaires fiscales de l'OCDE sur « l'amélioration de l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales ». P.9 et suivantes

    * 64 Loin d'être exhaustifs, car l'étude est très riches d'exemples variés et d'enseignements quant à l'accès des administrations fiscales aux renseignements bancaires. Nous avons jugé nécessaire d'en prendre quelques un pour asseoir notre étude. La question pourrait être abordée dans le cadre d'une étude à part.

    * 65 OCDE 1998 : « Concurrence fiscale, un phénomène mondial » Rapport sur la concurrence fiscale dommageable. P. 7, 24 et 28

    * 66 Les rapports suivants de l'OCDE ont fait des recommandations dans le sens de l'amélioration des échanges de renseignements entre les Etats : « Globalisation des marchés financiers et traitement fiscal du revenu et du capital », « Concurrence fiscale dommageable : un phénomène mondial » 1998, « Améliorer l'accès aux renseignements bancaires à des fins fiscales » 2000

    * 67 Intitulé « échange de renseignements », l'article 26 de la convention modèle OOCDE dispose que « Les autorités compétentes des Etats contractants échangent les renseignements nécessaires pour appliquer les dispositions de la présente convention ou celles de la législation interne relative aux impôts de toute nature ou dénomination perçus pour le compte des Etats contractants, de leurs subdivisions politiques ou de leurs collectivités locales dans la mesure où l'imposition qu'elle prévoit n'est pas contraire à la Convention. .... »

    * 68 Par exemple la Suisse et le Luxembourg

    * 69 Mai 2006, www.ocde.org

    * 70 Le Groupe d'Action Financière (GAFI) est un organisme intergouvernemental dont le but est de développer et promouvoir des politiques nationales et internationales visant à lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

    * 71 Les documents du GAFI sur les quatre recommandations à destination des institutions financières pour lutter contre le blanchiment d'argent. www.fatf.gafi.org






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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry