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La prolifération et la circulation illicite des armes légères et de petit calibre en Afrique Centrale: Etude du phénomène et analyse critique des mécanismes de contrôle de ces armes

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par Kisito Marie OWONA ALIMA
Université de Yaoundé 2 - Master en stratégie, défense, sécurité et gestion des conflits et catastrophes 2007
  

Disponible en mode multipage

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SOMMAIRE

AVANT-PROPOS XIII

INTRODUCTION GENERALE 14

PREMIERE PARTIE : ETUDE DU PHENOMENE 21

CHAPITRE 1ER : LES CARACTERISTIQUES ET LES FACTEURS DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION ILLICITES DES ARMES LEGERES ET DE PETIT CALIBRE EN AFRIQUE CENTRALE 22

CHAPITRE 2 : LES PROCESSUS DE PRODUCTION ET LES MODES D'ACQUISITION ILLICITES 33

CHAPITRE 3 : LES CONSEQUENCES DE LA PROLIFERATION ET DE LA CIRCULATION ILLICITES DES ALPC DANS LA SOUS-REGION 45

DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE CONTROLE DES ALPC 56

CHAPITRE 4: PRESENTATION DES MECANISMES DE CONTROLE DES ALPC 57

CHAPITRE 5 : APPRECIATION DES MECANISMES DE CONTROLE 69

CONCLUSION 79

DEDICACE

A

Mon père, le regretté ALIMA Etienne ;

Mon grand frère, le regretté OWONA Dieudonné ;

Mon petit frère, le regretté OTTOU ALIMA Casimir ;

Mes enfants, BILE OWONA Cathérine Thérèse et ELOUNDOU OWONA Benjamin Stéphane.

REMERCIEMENTS

A monsieur le ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense, Rémy ZE MEKA, pour avoir autorisé le déroulement de ce stage académique ;

Au général de division, René Claude MEKA, chef d'état major des armées, pour avoir diligenté le dossier de mise en stage ;

Au général de brigade, Esaie NGAMBOU, commandant le CSID, pour son accueil chaleureux ;

Au colonel Brunot MIGNOT, directeur de l'enseignement du CSID, pour ses bons conseils ;

Au lieutenant-colonel MVOM Jacques Didier Lavenir, chargé de l'enseignement au CSID, pour la qualité de son encadrement et ses conseils constructifs pour rendre ce travail acceptable ;

Au lieutenant-colonel MBALLA MBATSOGO Jean Louis, chargé d'études à l'Etat Major de l'armée de l'air/MINDEF, pour ses idées constructives ;

Au commandant ONANA MBARGA Oscar, Chef de service de la documentation du CSID, pour avoir mis à notre disposition la documentation nécessaire afin que nous puissions mener à bien ce travail ;

A tout le personnel du CSID, d'une manière générale, pour leur franche collaboration ;

Au docteur Michel KOUNOU, Chargé de Cours à l'université de Yaoundé II, pour sa disponibilité à superviser ce travail ;

A mes frères bien aimés, l'abbé Raphaël ONDIGI, NGANDI BINDZI Maurice, pour leur soutien multiforme ;

A ma belle-mère, madame NJOMBWE Catherine épouse BOYOMO, pour son appui matériel ;

A ma mère, OKOA Madeleine, pour sa prière ;

Enfin, et de manière tout à fait spéciale, mes remerciements à mon épouse, OWONA Elisabeth, pour avoir créé des conditions particulièrement favorables afin que ce travail puisse aboutir.

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Volume des principales armes classiques fournies par les pays du G8...........................................................................................................26

Tableau 2 : Valeur des exportations d'armes légères effectuées par les pays du G8 en 2001.........................................................................................................27

Tableau 3 : Livraisons d'armes à l'Afrique subsaharienne (en millions de dollars courants)...................................................................................................28

Tableau 4 : Répartition mondiale des sociétés fabriquant des armes légères dans le monde, 2002.........................................................................................................34

Tableau 5: Coups d'Etat et mutineries majeures en Afrique Centrale (1994 -2004).......................................................................................................48

Tableau 6 : Nombre de victimes dans les conflits en Afrique après 1980 (évaluation à fin 1995).......................................................................................................50

Tableau 7 : Calendrier de mise en oeuvre du programme des activités de la CEEAC dans le cadre de l'application du Programme d'Action des Nations Unies sur les armes légères......... ...............................................................................................................62

Tableau 8: Exportations françaises d'armes vers le Myanmar.....................................74

Tableau 9: Exportations françaises d'armes vers le Soudan........................................75

LISTE DES ABREVIATIONS

ALPC = Armes Légères et de Petit Calibre.

CCPAC = Comité des Chefs de Police d'Afrique Centrale.

CEDEAO = Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest.

CEEAC = Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

CEMAC = Commission Economique et Monétaire de l'Afrique Centre.

CEREBA = Centre d'Etudes et de Recherche en Education de Base pour le Développement Intégré.

COPAX = Conseil de Paix et de Sécurité en Afrique Centrale.

CRS = Congressional Research Service.

CSID = Cours Supérieur Interarmées de Défense.

FDLR = Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda.

FOMAC = Force Multinationale de l'Afrique Centrale.

GRIP = Groupe de Recherche et d'Information sur la Paix et la Sécurité.

HCR = Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés.

IANSA (RAIAL en français) = International Action Network on Small arms.

MARAC = Mécanisme d'Alerte Rapide de l'Afrique Centrale.

MINDEF = Ministère de la Défense.

MINUAR = Mission des Nations Unies au Rwanda.

MPLA = Mouvement Populaire pour la Libération de l'Angola.

OCH = Office de Coordination de l'Aide Humanitaire des Nations Unies.

ONG = Organisation Non Gouvernementale.

ONU = Organisation des Nations Unies.

ONUSOM = Mission de l'Organisation des Nations Unies en Somalie.

OSCE = Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe.

OTAN = Organisation du Traité de l'Atlantique Nord.

PNUD = Programme des Nations Unies pour le Développement.

RAIAL (IANSA en anglais) = Réseau d'Action Internationale pour les Armes Légères.

RCA = République Démocratique du Congo.

ROF = Royal Ordonnance Factories.

SAWL= Small Arms and light Weapons.

SIPRI = Institut International de Recherche sur la Paix de Stockholm.

UNICEF =United Nations Children's Fund.

UNITA = Union Nationale pour la Libération Totale de l'Angola.

URSS = Union des Républiques Socialistes Soviétiques.

USA = United State of America.

UY II= Université de Yaoundé II.

VDS = Vicker Défense System.

RESUME

Depuis la fin de la Guerre Froide, l'Afrique Centrale est fortement marquée par le phénomène de prolifération et de circulation illicites des armes légères et de petit calibre.


· Les raisons qui expliquent le phénomène

Plusieurs facteurs expliquent la prolifération et la circulation des armes dans la sous-région d'Afrique Centrale. Parmi lesquels, les facteurs socio-politiques, les conflits armés, les mouvements de réfugiés et le commerce international incontrôlé des armes.

Favorisent également la circulation illicite et anarchique des ALPC dans la sous-région : l'absence d'une norme internationale coercitive sur les ALPC, la réglementation mitigée de certaines armes telle que la kalachnikov (AK-47), l'absence d'un instrument fiable sur la traçabilité et le marquage des ALPC et enfin les caractéristiques physiques mêmes de ces armes.

D'énormes quantités d'armes légères et de munitions sont actuellement fabriquées dans de nombreuses usines disséminées à travers la planète, mais fortement concentrées dans les pays du Nord. Dans cette production sans cesse croissante et où les Etats-Unis figurent au peloton de tête à l'échelle mondiale, le continent africain occupe une place non négligeable avec ses industries naissantes, mais déjà très productives. L'Afrique excelle aussi dans la fabrication artisanale des armes. Cette fabrication locale est d'une importance mineure, mais aggrave considérablement le phénomène de la circulation des armes. Ces armes circulent abondamment et de façon incontrôlée dans le monde et en particulier dans la sous-région d'Afrique Centrale, grâce aux techniques de transfert mises en oeuvre par les trafiquants et à cause de la faiblesse des contrôles au niveau des frontières.


· Les conséquences du phénomène

La prolifération incontrôlée et la circulation anarchique des armes légères ne sont pas sans conséquences dévastatrices dans la sous-région. En plus de détruire de nombreuses vies humaines, les armes légères constituent une grave menace pour la paix, la sécurité et la stabilité ainsi que le développement durable au niveau individuel, local, national, régional et sous-régional. En Afrique Centrale, l'accumulation des armes légères prolonge les conflits, exacerbe la violence, contribue fortement au déplacement massif des civils et aux violations abusives des droits humains et du droit international humanitaire, en particulier au détriment des femmes et des enfants. Elle favorise également la recrudescence de la criminalité organisée nationale et transfrontalière ainsi que le développement des ramifications des liens existant entre le commerce illicite des armes légères, les trafics de drogues et de minéraux précieux. En outre, les armes légères constituent une grande entrave à la recherche d'une solution durable aux différents conflits qui déchirent le continent et en particulier l'Afrique Centrale.

Enfin, l'accumulation et la circulation excessives des ALPC entraînent des conséquences considérables sur le plan humanitaire : la difficulté d'agir de la communauté internationale dans les zones de conflits armés à cause des atrocités perpétrées à l'aide de ces armes, et les entraves à l'acheminement de l'aide humanitaire vers les populations civiles en proie aux souffrances multiples.


· Les mécanismes et les instruments de contrôle des ALPC dans la sous-région

Depuis quelques décennies, plusieurs mécanismes et instruments ont été mis en place, tant au niveau sous-régional qu'à l'échelle internationale, pour combattre le phénomène de prolifération et de circulation illicites des ALPC. Cependant, ces mécanismes et instruments comportent des lacunes importantes et ont montré leurs limites. Ce qui a contribué à aggraver considérablement le phénomène.


· Les approches de solutions

Pour mettre fin à la prolifération et à la circulation incontrôlées des armes légères, des efforts devraient être faits au niveau continental, au niveau sous-régional et à l'échelle internationale.

Au niveau continental, l'Union Africaine, en tant que système de sécurité collective, devrait pouvoir atteindre certains objectifs, notamment : négocier avec les pays la réduction des stocks d'armements ; créer des mécanismes ou des lieux de discussion afin de permettre le règlement pacifique des différends pour éviter que ceux-ci ne dégénèrent en conflits armés, sources d'accumulation des armes légères ; favoriser la coopération entre Etats en vue de faciliter le contrôle des frontières et la répression des trafics d'armes.

Au niveau sous-régional, la CEEAC devrait aussi atteindre certains objectifs: renforcer les mécanismes de contrôle qui ont montré les limites et créer d'autres mécanismes plus efficaces ; doter le COPAX d'un organe spécial de contrôle des armes légères ; renforcer les capacités des institutions de sécurité et impliquer les experts civils dans la lutte contre la circulation illicite des armes légères ; accélérer le processus d'harmonisation des législations nationales sur les armes et parvenir à un régime d'interdiction qui prévoit les autorisations et non un régime d'autorisation qui intègre les interdictions ; renforcer la coopération bilatérale et la coopération sous-régionale/sous-régionale pour permettre l'échange d'informations sur la circulation des armes ; créer un observatoire sous-régional des ALPC dont les missions seraient entre autres, collecter les informations sur les mouvements illicites des armes et des munitions afin de les mettre à la disposition des Etats, contrôler les frontières afin de prévenir et d'arrêter les mouvements illégaux des armes et des munitions, élaborer des stratégies, politiques et programmes de lutte contre la prolifération et la circulation illicites des armes.

Par ailleurs, la CEEAC devrait inciter les Etats à s'attaquer à la corruption, surtout à l'égard des forces de sécurité et du personnel des douanes chargés des contrôles au niveau des frontières. Les Etats membres devraient aussi mettre l'accent sur la lutte contre la pauvreté. Les gouvernements de la sous-région devraient surtout instaurer la démocratie et s'efforcer de pratiquer la bonne gouvernance afin d'éviter les tensions sociales, voire les conflits armés, sources d'accumulation des armes.

Pour ce qui est du cas spécifique du Cameroun, un module sur les armes légères devrait être ajouté dans le programme des enseignements du CSID.

Au niveau de l'ONU, des efforts doivent également être menés. L'article 51 de la Charte, qui accorde une liberté sans limite aux Etats d'accumuler ou de vendre des armes, doit être révisé. Le Registre des armes conventionnelles de 1991, qui exclut les armes légères de la liste des armes classiques faisant l'objet de déclaration, doit être complété pour intégrer ces armes ; les informations à communiquer par les Etats doivent inclure les stocks d'armements existants ; les déclarations des Etats membres doivent être obligatoires ; le Registre devrait pouvoir intégrer une disposition qui prévoit un office de contrôle international indépendant des Etats qui serait chargé d'opérer des vérifications. L'ONU doit également parvenir à un traité de non prolifération anarchique des ALPC et des munitions, et à la création d'une sorte d'agence internationale des armes légères et des munitions. La mission de l'agence serait d'inspecter dans des usines de production des ALPC pour voir si les Etats respectent les normes internationales et les quotas de production fixés.

ABSTRACT

Since the end of Cold War, Central Africa is greatly marked by illicit proliferation and circulation of small arms and light weapons (SALW) phenomenon.

· Causes of the phenomenon.

Many reasons can justify the proliferation and circulation of arms in Central Africa's sub-region, among them, socio-political factors, armed conflicts, movements of refugees and uncontrolled international business of arms.

Facilitate also the illicit and anarchic circulation of SALW in the sub-region: lack of coercive international legislation on SALW, ambiguous reglementation of certain arms like Kalachnikov (AK-47), lack of a credible instrument on the traçability and markage of SALW and last, physical characteristics of those arms.

Important quantities of small arms and munitions are now produced by many factories all over the planet, but they are more implanted in Northern countries. According that more and more increasing production where United States occupies the first position at world's level, african continent occupies an important ranking with its young factories but which are already very productive. Africa is also performant in local production of arms. That local production is less important, but increases considerably the circulation of arms phenomenon. Those arms circulate abundantly and the lack of control in the world, particularly in Central Africa's sub region, facilitated by techniques of transfer activated by traffickers and because of deficit of control at the frontiers.

· Consequences of the phenomenon

Uncontrolled proliferation and anarchic circulation of small arms have several negative consequences in the sub region. As well as destroying many human lifes, small arms constitute a great menace for peace, security and stability and also for durable development at the individual, local, national, sub regional and regional level. In Central Africa accumulation of small arms increases the duration of conflicts, violence and contributes strongly to massive migration of civilians, abusive violations of human rights and international humanitarian law, in particular unfavourably to women and children. It facilitates the increase of national and transborder organized criminality and also the development of ramifications of relationships between illicit commerce of small arms, traffic of drugs and precious minerals. In addition, small arms constitute a great obstacle to the scopes of finding a durable solution to multiple conflicts which affect the continent, particularly Central Africa.

At last, the excessive accumulation and circulation of SALW have important consequences on humanitarian order: difficulty for international community to act in armed conflicts areas because of the atrocities caused by those arms, and obstacles to send humanitarian help for civilian populations suffering.

· Mechanisms and instruments to control SALW in the subregion

Since several decades, many mechanisms and instruments have been put in place both at subregional and international levels, to combat illicit proliferation and circulation of SALW phenomenon. However, those mechanisms and instruments have important deficiencies and have shown their limits. That has contributed to increase considerably the phenomenon.

· Recommendations

To end uncontrolled proliferation and circulation of small arms, efforts must be done at continental, subregional and international levels.

In continental level, African Union, as collective security system has to attain certain goals, notably: to negociate with States the reduction of stocks armaments; to create mechanisms or instances of dialogue in order to permit pacific arrangement of conflicts so that to block those one to be transformed in armed conflicts, sources of small arms accumulation; to encourage cooperation between countries in order to facilitate control of frontiers and fight against traffics of arms.

In subregional level, the Central Africa's State Economic Community (CEEAC) has to initiate a certain number of actions: to reinforce mechanisms of control which have shown limits and create other mechanisms more efficient; to attribute to the COPAX special organ of control of small arms; to reinforce capacities of security's institutions and associate civilian experts in the fight against illicit circulation of small arms; to accelerate the process of harmonization of national legislations on arms and reach to an interdiction regime which includes authorizations and not an authorization regime which includes interdictions; to reinforce bilateral cooperation and sub regional / sub regional cooperation in order to open way to exchange of informations on arms circulation; to create a sub regional observatory on SALW that activities should be: to collect informations on illicit movements of arms and munitions in order to give these to governments, to control frontiers in order to prevent and stop illegal movements of arms and munitions, to elaborate strategies, policies and programs of fight against illicit proliferation and circulation of arms.

In the other way, the CEEAC must instigate governments to fight against corruption, particularly vis-à-vis security forces and custom personnel incharged of controls in the frontiers. States members must also emphasize on the fight against poverty. Government of the sub region should particularly establish democracy and make an effort to practise good governance in order to block social tensions, more over arms conflicts, sources of arms accumulation.

Concerning the specific case of Cameroon, a module should be added to the program of training of CSID.

At the level of United Nations, efforts must also be made. Article 51 of the Charte which accords implicitly to States a large licence to accumulate and exports arms, must be amended. The conventional arms Register of 1991 which excludes small arms from the list of classic arms submitted to declaration, must be completed by adding those arms; the informations to communicate by States must include present stocks of armaments; the declarations of states members must be obligatory; the Register should integrate one article which institutes an international independent office of control of States in charge of inspections. The United Nations must also reach to the treaty of non anarchic proliferation of SALW and munitions, and to the creation of a sort of international agency of small arms and munitions. The mission of the agency should be to inspect factories of SALW in order to see if States respect international legislations and quotas of production fixed.

AVANT-PROPOS

Dans le cadre de la professionnalisation des enseignements dispensés au Master en Stratégie, Défense, Sécurité et Gestion des Conflits et Catastrophes, les auditeurs sont appelés à effectuer un stage académique dans une structure appropriée pouvant leur apporter une vision pratique sur certaines questions intéressant tant l'auditeur que la structure qui l'encadre.

Ayant été désigné par le coordonnateur du Master pour suivre un stage au sein du Ministère de la Défense (MINDEF), par Message Porté, N°002314/MP/MINDEF/017 du 15 Octobre 2007, nous avons été orienté par le Ministre Délégué à la Présidence chargé de la Défense, vers le Cours Supérieur Interarmées de Défense (CSID).

Dans l'organigramme du MINDEF, défini par le décret N°2001/178 du 25 Juillet 2001 portant organisation générale de la Défense et des Etats Majors Centraux, le CSID est placé sous l'autorité du Chef d'Etat Major des Armées, responsable de la formation dans les forces de Défense. Sous cette autorité, se trouve le commandement des Ecoles et Centres d'Instruction Interarmées qui coiffe le Centre de l'Enseignement Militaire Supérieur divisé en école d'Etat Major et le CSID.

Au sein du CSID, il y a un commandement assuré actuellement par le Général de Brigade Esaie NGAMBOU. Trois groupements d'enseignement s'occupent de l'enseignement général, de l'enseignement opérationnel et du volet logistique. C'est au sein du groupement de l'enseignement général que le sujet traité a été encadré par le Lieutenant-colonel MVOM Jacques Didier Lavenir, Docteur de 3ème cycle en Relations Internationales et Breveté de l'Enseignement Militaire Supérieur. Ce groupement d'enseignement général est un lieu de grandes réflexions théoriques et stratégiques sur les grands problèmes de l'actualité internationale. Un intérêt tout particulier est manifesté par conséquent par le CSID sur le sujet que nous avons choisi de traiter, à savoir : La prolifération et la circulation illicites des armes légères et de petit calibre en Afrique Centrale : étude du phénomène et analyse critique des mécanismes de contrôle de ces armes.

Au moment où la conflictualité se modifie en Afrique, en général et en Afrique Centrale en particulier, le sujet présenté est d'un intérêt particulier pour la sous-région d'Afrique Centrale. Ce qui implique une importance avérée pour le CSID et le Ministère de la Défense. L'objet est en effet porteur de dangerosité pour les Etats et les modalités de minimisation du phénomène conduisent le Ministère de la Défense à nourrir la réflexion dans ce domaine.

INTRODUCTION GENERALE

Cette introduction comporte sept volets :

1. La définition des concepts de l'étude

Pour éviter la confusion dans la recherche, il est fait recourt d'abord à la définition des concepts. Selon Madeleine GRAWITZ : « Le concept n'est pas seulement une aide pour percevoir, mais une façon de concevoir. Il organise la réalité en retenant les caractères distinctifs, significatifs des phénomènes ».1(*)

Le concept est donc le guide du chercheur ; par conséquent son sens doit être bien précisé, au préalable, pour éviter l'utilisation du sens contraire ou approximatif des mots ou expressions souvent préjudiciable dans la recherche. Dans le présent travail, les concepts suivants sont fréquemment utilisés. Il s'agit de :

- Armes légères

- Armes de petit calibre

- Prolifération, circulation, commerce, transfert, exportation ou importation...illicites / illégaux.

- Transferts autorisés

- Transferts irresponsables

- Transferts secrets

· Armes légères et de petit calibre :

Il n' y a pas une définition unanimement acceptée ; il faut néanmoins retenir que les armes légères ou de petit calibre désignent, en général, toute arme qui peut être transportée et utilisée par un seul individu ainsi que les munitions qui leur sont associées. Pour Agnès Marcaillou2(*), la notion d'armes légères et de petit calibre renvoie tout simplement à toutes les armes que l'homme peut porter. Sont donc classés dans cette catégorie les lance-roquettes, les grenades, les pistolets automatiques et semi-automatiques, etc. Les militaires parleraient d'armes utilisées par un seul servant.

· Les transferts autorisés  sont ceux autorisés par au moins un gouvernement.

· Les transferts irresponsables

Egalement appelés transferts sur le marché gris, ce sont des transferts autorisés par un gouvernement, mais qui sont d'une légalité douteuse, du moins du point de vue du droit international (risque important d'utilisation abusive) ou irresponsables à tout autre égard (risque important de détournement vers des destinataires non autorisés).

· Transferts, prolifération, fabrication, circulation, ... illégaux renvoient au marché noir. Les deux expressions font référence à tout ce qui n'est autorisé par aucun gouvernement.

· Transferts, prolifération, fabrication, circulation, ... illicites englobent tout ce qui est irresponsable et illégal (marché gris /noir).

· Transferts secrets

Ce sont les transferts dans lesquels les gouvernements dissimulent leur participation souvent, mais pas toujours, parce qu'ils sont illicites.

La définition des concepts étant déjà faite, il y a lieu de préciser maintenant l'objectif et l'intérêt de l'étude.

2. L'objectif et l'intérêt de l'étude

L'objectif s'entend comme le but à atteindre. Par exemple, on dira atteindre l'objectif qu'on s'est fixé.

Quel est donc l'objectif poursuivi dans ce travail ? La prolifération et la circulation anarchiques des ALPC en Afrique Centrale sont un mal qui menace sérieusement la sécurité et la paix des populations, mais qui jusque là ne trouve pas de remède efficace. L'objectif dans ce travail est d'abord d'apporter une modeste contribution à la réflexion sur la question et de pouvoir ensuite trouver les vraies solutions pour atténuer les effets néfastes du fléau à défaut de l'éradiquer complètement. Enfin, au-delà de la lutte contre la prolifération et la circulation anarchiques des ALPC, la visée est surtout de pouvoir trouver une solution durable aux conflits qui déchirent actuellement l'Afrique Centrale.

Quant à l'intérêt, il faut retenir qu'en tant qu'expert en Stratégie, Défense, Sécurité et Gestion des Conflits et Catastrophes, cette étude devra enrichir les connaissances acquises pendant la formation, notamment en matière de sécurité ; cette étude est surtout l'occasion donnée pour se spécialiser sur les questions d'armements légers en Afrique Centrale.

3. La problématique de l'étude

La fin de la guerre froide entre le bloc occidental et le bloc oriental, consécutive aux changements révolutionnaires intervenus en Union Soviétique sous la direction du président Mikhaïl Gorbatchev, a donné l'espoir d'un monde paisible, totalement hors de la menace d'une guerre nucléaire accidentelle ou mûrement préparée, entre les Etats-Unis et l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) tout comme les autres sources de menace provenant des alliés satellites de ces deux super-puissances. Les mutations qui se sont produites à travers la planète au lendemain de la chute du mur de Berlin ont conforté cet espoir de paix : la plupart des foyers de tension, nés de la confrontation Est-Ouest, se sont progressivement éteints ; le dialogue entre Washington et Moscou a repris ; les relations diplomatiques entre pays capitalistes et pays communistes, longtemps restées refroidies, ont subitement connu un dégel décisif. Tous ces évènements « heureux » donnaient l'impression d'un monde qui va définitivement entrer dans une ère de paix et de sécurité.

Cependant, si la menace d'un conflit entre l'Est et l'Ouest s'est considérablement atténuée, les problèmes de sécurité n'ont pas disparu pour autant. L'invasion du Koweït par l'Irak le 2 août 1990 et les conséquences y relatives ont auguré un monde plus instable et fortement dangereux. Des foyers de tensions vont s'allumer un peu partout sur la planète ; des conflits sanglants vont surgir. C'est cette situation inattendue qui fait dire à Michael D. Intriligator qu' « il existe actuellement plusieurs situations, provoquées dans certains cas par la fin de la guerre froide, qui pourraient constituer une menace pour la sécurité. A certains égards, la fin de la guerre froide a rendu le monde plus dangereux. »3(*) Le continent africain, dans ce retour tragique au passé sanglant, ne fait pas exception. D'une manière particulière, l'Afrique Centrale est fortement touchée par ces nouvelles secousses. En effet, dans la sous-région, vont éclater des guerres d'une rare atrocité et extrêmement meurtrières. Il y a notamment le génocide rwandais et burundais, la guerre en RDC, le conflit du Congo- Brazzaville, la reprise des hostilités en Angola, sans oublier les escarmouches sanglantes en RCA. Naturellement, il y a lieu de s'interroger sur les causes de ce regain de violence qui plonge toute la sous-région dans un climat de totale insécurité. La raison principale facilement avancée est la mauvaise gouvernance : centralisation excessive du pouvoir, refus du dialogue par ceux qui sont au pouvoir, absence de transparence dans la gestion des ressources naturelles, surtout les hydrocarbures, etc. Autant de facteurs qui déclenchent les conflits armés sanglants en Afrique. Cependant, très souvent, les petits engins qui servent à faire la guerre ne sont pas pris en compte : les Armes Légères et de petit calibre (ALPC).

Dans les années 1990, sur 49 conflits, 47 furent menés au moyen d'armes légères. Aujourd'hui, l'attention de la communauté internationale est focalisée sur la Corée du Nord4(*) et l'Iran5(*), au prétexte qu'ils constituent de graves menaces en matière de prolifération nucléaire, donc un danger pour la sécurité mondiale. Dans le même temps, une véritable hécatombe se poursuit dans les zones de conflits ou non, en Afrique notamment, où sont déversées des quantités considérables d'ALPC, en toute impunité. Le véritable danger vient de ces petites armes dont le commerce et la circulation échappent à tout contrôle. Interviennent dans ce commerce dangereux plusieurs acteurs de différentes catégories aux intérêts plus ou moins divergents, mais eux tous formant la longue et complexe chaîne des armes légères. Il existe ainsi des Etats exportateurs/importateurs ; des entités ou organisations non étatiques (forces rebelles, groupes paramilitaires, milices) ; des négociants, des courtiers ; des transporteurs et autres facilitateurs. La confusion s'installe dans ce cas. Il devient difficile de faire la distinction entre le commerce licite et le commerce ou le trafic illicites. Sur le terrain sont déversées des quantités ahurissantes d'armes qui déstabilisent la paix et alimentent l'insécurité. Dans cette ambiance de grave insécurité causée par la prolifération et la circulation anarchiques des armes légères après la guerre froide, comment l'Afrique Centrale entend se prémunir pour maintenir la paix et la sécurité et quelle est la pertinence des moyens jusque là mis en oeuvre ?

4. La formulation des hypothèses

Pour répondre à la question principale, la méthode scientifique voudrait qu'il soit fait recourt à des hypothèses. D'après J. Louis LOUBET DELBAYLE « Les hypothèses sont à la fois des questions que l'on se pose à propos de l'objet de la recherche et des faits recueillis par l'observation et les propositions de réponses à ces questions »6(*).

L'hypothèse est donc finalement une proposition résultant d'une observation et soumise au contrôle de l'expérience et vérifiable par déduction. Dans le cadre de la présente étude, deux types d'hypothèses ont été retenus : l'hypothèse générale et les hypothèses de recherche.

a. L'hypothèse générale

Elle est énoncée de la manière suivante : l'insécurité observée aujourd'hui en Afrique Centrale résulte de la prolifération et de la circulation anarchiques des ALPC.

Cependant, l'hypothèse générale ne pouvant pas être vérifiée directement, il importe de formuler des hypothèses de recherche.

b. Les hypothèses de recherche

Plus précises que l'hypothèse générale, « leur rôle est de déclencher la recherche et de baliser le terrain sur lequel elle va s'exercer »7(*). Six hypothèses de recherche ont été retenues.

· Première hypothèse : les conflits armés internes et la commercialisation des ALPC favorisent la prolifération et la circulation illicites de ces armes.

· Deuxième hypothèse : les caractéristiques des ALPC rendent faciles la prolifération et la circulation anarchiques de ces armes.  

· Troisième hypothèse : la production incontrôlée des ALPC dans le monde entraîne la circulation anarchique des ces armes en Afrique Centrale.

· Quatrième hypothèse : les modes d'acquisition et les techniques de transfert facilitent la circulation illicite des ALPC en Afrique Centrale.

· Cinquième hypothèse : l'accumulation excessive et la circulation illicite des armes légères en Afrique Centrale entraînent de graves conséquences, humanitaires, politiques et sur la population civile.

· Sixième hypothèse : les mécanismes et les instruments de contrôle inappropriés des armes légères rendent difficile la lutte contre la prolifération anarchique et la circulation illicite de ces armes.

      

5. La méthode de recherche

C'est le moyen par lequel le chercheur accède à l'information. Il peut s'agir du questionnaire, de la recherche documentaire, de l'interview des personnes ressources, etc. Dans le présent travail, la recherche documentaire a été privilégiée. Car elle est moins coûteuse en termes de temps et de moyens financiers, comparativement aux autres méthodes qui auraient nécessité de multiples déplacements dans toute la sous-région d'Afrique Centrale. A la recherche documentaire a été associée la méthode d'entretien qui consiste à obtenir des informations tirées des causeries avec des personnes ressources.

6. La localisation de l'étude

Il y a souvent confusion entre délimitation de l'étude et localisation de l'étude. Alors que la délimitation de l'étude revient à situer la recherche dans son champ scientifique, la localisation de l'étude, en revanche, cherche à préciser les frontières géographiques du territoire dans lequel le chercheur entend mener sa recherche. C'est en quelque sorte faire la description des lieux, présenter la photo de son terrain de recherche.

La prolifération et la circulation illicites des ALPC et les conséquences dévastatrices qui s'ensuivent sont un fléau qui touche tout le continent africain et même toute la planète. Mais ce travail limite l'étude à la sous-région d'Afrique Centrale.

L'Afrique Centrale dont il est question dans cette étude ne se limite pas aux pays membres de la CEMAC9(*), au nombre de six, mais s'étend sur les onze Etats qui composent la CEEAC10(*). Créée en 1983, la CEEAC regroupe les pays suivants : Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, République Centrafricaine, Tchad, Angola, Burundi, République Démocratique du Congo, Rwanda, Sao Tomé et Principe. Elle est peuplée d'environ 120 millions d'habitants pour une superficie de 6 664 102 km².

Dénommée Centrale dans la terminologie de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) et de l'Organisation des Nations Unies (ONU), cette sous-région africaine est un ensemble géopolitique située au coeur du continent noir, entre l'Afrique Septentrionale et l'Afrique Australe, entre l'Afrique Occidentale et l'Afrique Orientale.

L'Afrique Centrale regorge de ressources naturelles de toutes sortes. Grâce à un climat tropical humide et équatorial ainsi qu'à la fertilité des sols, la région peut produire toutes sortes de denrées agricoles vivrières et industrielles. Sa faune et sa flore sont très diversifiées, surtout la flore qui possède de nombreuses essences très prisées sur le marché mondial des bois. L'hydrographie y est importante et recèle de très importantes ressources halieutiques.

L'Afrique Centrale, c'est également et surtout le domaine des sources d'énergie et de matières premières minérales. Le potentiel hydroélectrique est fabuleux avec notamment les cours d'eau angolais, camerounais, congolais et gabonais qui peuvent recevoir des barrages hydroélectriques en plusieurs endroits. La région dispose à elle seule du quart du potentiel hydroélectrique mondial. En ce qui concerne les hydrocarbures (en terre ferme et en mer), les côtes de l'Angola, du Cameroun, du Congo Brazzaville, de la RDC, du Gabon et de la Guinée Equatoriale sont très riches en pétrole et en gaz naturel. A cela, il faut ajouter le potentiel tchadien. Il s'y trouve également de l'uranium en quantités exploitables au Gabon, en RDC, en Angola. Quant aux matières premières minérales, la sous-région bat le record mondial : on y trouve l'or, l'argent, le platine, le phosphate, le fer, le cobalt, le cuivre, le zinc, le plomb, l'aluminium, le nickel, le tungstène, etc.

Toutes ces richesses et tous ces atouts économiques dont dispose la sous-région ont fait dire à Atsutsé Kokouvi Agbobli que « l'Afrique Centrale est bénie des dieux. »11(*) Mais il faut quand même préciser que dans le cadre de la présente étude, l'expérience d'autres pays pourrait être considérée puisque limitrophes de la sous-région. Il en est ainsi par exemple de l'Ouganda, de la Tanzanie, du Kenya, etc. Cette extension s'explique par le fait que les armes légères ainsi que leurs conséquences n'ont pas de frontières. Les effets produits par ces armes en Ouganda, au Soudan ou en Afrique Australe peuvent aussi être ressentis en Afrique Centrale.

7. Les difficultés rencontrées

Le présent travail comporte quelques limites dues aux difficultés rencontrées sur le terrain. Il y a lieu de relever ici la réticence des autorités administratives, de sécurité ou de défense, à donner certaines informations importantes qui auraient dû enrichir ce travail si elles avaient été livrées. Il y a même d'abord la difficulté à rencontrer ces autorités. Il a fallu ainsi prendre trois, quatre, voire cinq rendez-vous pour ne pas être finalement reçu, dans beaucoup de cas. Par ailleurs, le temps imparti pour mener cette recherche était court, ce qui n'a pas donné la possibilité de collecter toutes les informations nécessaires pour faire des analyses beaucoup plus approfondies.

Le présent travail est divisé en deux parties. La première traite du phénomène des ALPC. La seconde est consacrée à l'étude des mécanismes de contrôle de ces armes.

PREMIERE PARTIE : ETUDE DU PHENOMENE

Déchirée depuis longtemps par des conflits armés meurtriers, mettant face à face les forces irrégulières (bandes armées, milices, mouvements rebelles...) et les forces gouvernementales, l'Afrique Centrale est devenue le terrain de prédilection des trafiquants d'armes. L'estimation porte aujourd'hui à plus de 875 millions12(*) le nombre d'armes légères en circulation dans le monde, et de 8 à 10 millions d'armes s'ajoutent à cet arsenal chaque année. Ce qui veut dire que d'ici 2015, 869 millions à 975 millions d'armes légères seront en circulation à travers la planète. Environ 5 à 6% de cet arsenal dangereux se retrouveraient en Afrique Centrale13(*) et alimente les conflits armés tout en aggravant l'insécurité. Cette situation alarmiste est le résultat de la combinaison de plusieurs facteurs, allant de la production incontrôlée de ces armes jusqu'à leur exportation ou leur importation excessives en passant par la corruption d'Etat. Tous ces facteurs amènent à l'étude du phénomène de la circulation illicite des ALPC dans la sous-région.

Cette première partie est subdivisée en trois chapitres. Le premier étudie les facteurs et les caractéristiques de prolifération et de circulation illicites des ALPC en Afrique Centrale ; le deuxième traite des processus de production et des modes d'acquisition des armes légères ; le troisième chapitre enfin montre les conséquences liées à la circulation illicite des ALPC.

CHAPITRE 1ER : LES CARACTERISTIQUES ET LES FACTEURS DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION ILLICITES DES ARMES LEGERES ET DE PETIT CALIBRE EN AFRIQUE CENTRALE

Il y a 12 ans, les armes légères et de petit calibre étaient presque totalement absentes du champ de réflexion sur le contrôle des armes et le désarmement. C'est davantage les armes dites de destruction massive (armes nucléaires, armes biologiques, chimiques ou bactériologiques) qui faisaient l'objet d'une attention particulière de la part de la communauté internationale. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, le monde vit constamment sous la crainte de l'explosion d'une arme nucléaire. Inquiétude d'ailleurs fondée, car, la bombe atomique, arme nucléaire, a détruit en 1945 toute la population des villes de Hiroshima et de Nagasaki. Les effets de cette bombe se font encore sentir aujourd'hui et continueront sans doute à se faire sentir pendant des dizaines d'années, voire pendant des siècles, selon les experts.

Pourtant aujourd'hui, les armes légères et de petit calibre, le plus souvent oubliées, apparaissent plus dangereuses et plus meurtrières à cause de leur capacité de « destruction massive » lors des conflits armés. Ces armes ont tué plus de 3 500 000 personnes (près du triple de la population du Gabon) dans la seule République Démocratique du Congo entre 1990 et 2004 et fait plus de 3 000 000 de morts en Afrique de l'Ouest14(*). S'il est ajouté à ce bilan tragique les destructions causées par ces armes dans les autres zones de conflits armés (Soudan, Somalie, Rwanda, Libéria, Sierra Léone, etc.), la conclusion selon laquelle les ALPC causent autant de dégâts sinon plus que l'arme nucléaire pourrait se vérifier. Toutes choses qui font penser aux facteurs (section I) et caractéristiques (section II) de prolifération et de circulation des ALPC en Afrique Centrale.

SECTION I : LES FACTEURS DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION DES ALPC

Plusieurs facteurs favorisent la prolifération et la circulation illicites des armes en Afrique Centrale. Les facteurs historiques (I), les facteurs socio-politiques (II), les conflits armés comme facteurs (III), le rôle des réfugiés (IV), les facteurs liés à la commercialisation des ALPC (V) et les progrès technologiques (VI) seront successivement examinés.

I. Les facteurs historiques

En Afrique centrale, plusieurs facteurs historiques favorisent l'accumulation des armes, surtout au niveau des populations civiles. Il y a lieu de relever ici la tradition guerrière qui caractérise certains peuples, comme par exemple ceux du Cameroun Septentrional, du Tchad ou du Nord de la RCA. Les guerres de conquête ont fortement marqué ces peuples et ces zones durant le XVIIIe et le XIXe siècles. Habitués à faire la guerre, ces peuples ont appris à fabriquer les armes (arcs, flèches, couteaux, sabres, etc.) et surtout à les garder ou les porter pour préserver leur sécurité ou se défendre. Cet instinct guerrier n'a pas disparu, et aujourd'hui ces peuples ont toujours tendance à s'approvisionner en armes, soit en fabriquant les armes traditionnelles et archaïques, soit en acquérant les armes modernes.

Il y a aussi la tradition de la chasse qui explique la détention des armes par les populations civiles en Afrique Centrale. C'est le cas de certains peuples bantou qui vivent dans la partie sud du Cameroun, au Congo-Brazzaville, au Gabon, en RDC, etc. Ces peuples de la forêt ont aussi appris à fabriquer les armes rudimentaires comme l'arc, pour chasser le gibier, l'une de leurs principales nourritures. Cet instinct de chasse existe encore chez les Bantous et la modernisation fait qu'aujourd'hui l'arc disparaît progressivement pour laisser la place au fusil à canon.

II. Les facteurs socio-politiques

Les mouvements nationalistes, à partir des années 1950, ont profondément remis en cause la stabilité des Etats encore très fragiles sur le plan des institutions, qui se mettaient progressivement mais difficilement en place. Un peu partout sur le continent éclatent des conflits d'ordre ethnique, politique et même religieux. Animée par la passion de se hisser au sommet de l'Etat ou de se faire représenter dans les différentes institutions politiques, chaque ethnie n'hésite pas à utiliser des moyens illégaux, à recourir à la force.

Cette façon illégale et anti démocratique d'accéder au pouvoir, utilisée par certaines élites politiques africaines, crée des frustrations et de profonds mécontentements au sein des populations qui prennent les armes pour se révolter contre le régime anti démocratique mis en place. Les groupes de rébellion, avec le plus souvent l'aide des puissances occidentales complices, ont ainsi acquis des centaines de milliers d'armes et de munitions contre , parfois si non tout le temps, l'exploitation des ressources naturelles (or, diamant, etc.). Ces tonnes d'armes et de munitions, illégalement acquises à la faveur des guerres nationalistes, continuent de circuler à travers le continent et en particulier dans la sous-région d'Afrique Centrale.

III. Les conflits armés internes comme facteurs de prolifération des armes

Au début des indépendances ou des années qui les ont suivies et après la fin de la guerre froide, nombre de pays de l'Afrique Centrale ont connu des guerres civiles sanglantes ou se sont impliqués dans ces guerres. A titre d'illustration, la guerre incessante au Tchad dans les années 1970-1980, le conflit armé de longue date en Angola, le conflit sanglant ethnique au Rwanda en 1994, la guerre civile intermittente en République Démocratique du Congo à laquelle se sont impliqués neuf Etats de la sous-région. Beaucoup de ces armes, qui ont servi à faire ces guerres, circulent encore librement aujourd'hui dans la sous-région et alimentent indubitablement l'insécurité.

Deux types de conflits armés ont entraîné la prolifération des ALPC : les conflits de succession politique (ou de gouvernement) et les conflits de territoire. Pour Anatole Ayissi15(*), l'Afrique, comparativement aux autres continents, a connu relativement peu de conflits territoriaux. En revanche, l'Afrique bat le record en matière de conflits de succession politique. Ces conflits opposent plusieurs groupes sociaux dont l'un a le contrôle de l'appareil militaire. Le groupe contestataire du pouvoir en place va s'armer dans la mesure de ses moyens et se tourner inévitablement vers des armements bon marché et faciles à obtenir, par exemple les armes de fabrication locale. Le groupe politique au pouvoir réagira en mettant en place un réseau de défense civile lui permettant de faire face à la rébellion armée. D'où la création de groupes paramilitaires et de milices proches du pouvoir comme au Rwanda ou au Burundi, et l'achat d'importantes quantités d'armes légères par le gouvernement. Selon Bernard ADAM, directeur du GRIP, « cet enchaînement conduit inexorablement à une militarisation du pays et à l'installation d'une anarchie armée »16(*). Il y a finalement des distributions systématiques d'armes au sein de la population civile comme au Rwanda en 1993 et 1994, au Burundi en 1994 et 1995, etc. Cette dissémination anarchique des armements provoque inévitablement la multiplication de groupes armés échappant parfois au contrôle de ceux qui les ont armés17(*); elle accroît surtout l'insécurité.

En revanche, Michel KOUNOU voit une autre typologie des conflits en Afrique susceptibles d'entraîner l'accumulation des armes. Il affirme que « l'Afrique a connu au moins cinq [...] types principaux de conflits majeurs depuis les indépendances, à savoir, les mutineries ou les coups d'Etat ; les révoltes populaires ; les conflits frontaliers ou les guerres d'invasion ; les raids et interventions étrangers et les guerres civiles »18(*). Tous ces conflits, activés très souvent à l'extérieur, « permettent, sur le plan international, à quelques puissances, d'écouler une quincaillerie militaire obsolète »19(*), mais très nuisible, qui vient aggraver l'insécurité et les souffrances des populations.

Par ailleurs, il faut remarquer que la fin d'un conflit armé n'entraîne pas forcément la destruction des armes ayant servi pendant la guerre. Très souvent, les gouvernements éprouvent la difficulté à contrôler ou à récupérer ces armes qui peuvent malheureusement se retrouver très facilement entre les mains des populations civiles ou de quelques trafiquants très peu responsables. C'est ce que souligne Laurent Léger20(*) dans une interview accordée au magazine " Diplomatie " : « lorsque la situation se calme dans un pays en guerre, surgit une difficulté à gérer les armes utilisées pendant le conflit si elles ne sont pas détruites. C'est à ce moment qu'elles peuvent être revendues, comme c'est le cas souvent d'armes légères et de stocks importants, surtout en Afrique. Celles-ci peuvent ainsi passer de pays en pays... Voilà l'un des dangers en Afrique »21(*).

IV. Le rôle des réfugiés dans la circulation des armes.

Les guerres civiles en Afrique finissent toujours par produire un grand nombre de réfugiés qui, le plus souvent sinon tout le temps, emportent avec eux des armes légères facilement transportables et dissimulables à cause de leur légèreté. Ces armes, qui échappent aux contrôles douaniers et policiers, peuvent ainsi passer d'un pays à un autre selon les mouvements des réfugiés. Justement, l'Afrique Centrale compte aujourd'hui un grand nombre de réfugiés issus, soit des conflits armés de la sous-région, soit des guerres civiles hors de la sous-région (Soudan, Somalie, etc.). En 2006, le nombre de réfugiés en Afrique Centrale (pays des Grands Lacs inclus) est estimé à 135917522(*) . Il peut donc être imaginé, sans que cela soit exact, le nombre d'armes en circulation dans la sous-région si on admet que chaque réfugié détient une arme.

V. La commercialisation des ALPC

Le commerce d'armes tire sa légitimité de la Charte des Nations Unies elle-même en faisant valoir le droit des Nations à la légitime défense individuelle ou collective à tout Etat membre. Ce droit est reconnu par l'article 51 qui dispose : « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée ». Dès lors, les Etats ont le droit à l'utilisation et au commerce des moyens de défense que sont les armes.

Le commerce international des armes, qui ne fait pas l'objet de contrôles rigoureux et efficaces, est le principal facteur de prolifération et de circulation anarchiques et illicites des armes dans le monde et en particulier dans la sous-région d' Afrique Centrale. En dépit de leurs responsabilités et de leurs obligations légales, nombreux sont les pays qui continuent librement à fournir des armes et des munitions à des utilisateurs finaux irresponsables, notamment en Afrique. Les pays occidentaux, et en particulier ceux du G8 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-uni et Russie) jouent un rôle de premier plan dans ces transferts excessifs d'ALPC. Sur les huit pays qui composent le G8, six figurent parmi les 10 plus gros exportateurs d'armes à l'échelle mondiale. Les tableaux ci-dessous indiquent respectivement le volume des principales armes classiques fournies en 2003 et la valeur des exportations d'armes légères effectuées en 2001 par les pays du G8.

TABLEAU 1 : Volume des principales armes classiques fournies par les pays du G8 en 2003

Pays

Volume des exportations en millions de dollars américains

Russie

6980

Etats-Unis

4385

France

1753

Allemagne

1549

Canada

556

Royaume-Uni

525

Italie

277

Japon

 

Source: SIPRI Yearbook 2004 Armaments, Disarmament and International Security, Oxford University Press, 2004, Tableau 12A.2.

TABLEAU 2 : Valeur des exportations d'armes légères effectuées par les pays du G8 en 2001

Pays

Volume des exportations en millions de dollars américains

Etats-Unis

741,4

Italie

298,7

Allemagne

156,7

Japon

70,3

Canada

53,6

Royaume-Uni

44,8

Russie

42,2

France

33,7

Source: Small Arms Survey

Les tableaux ci-dessus laissent clairement voir que les pays du G8, sans pour autant négliger les autres pays, figurent au peleton de tête des fournisseurs d'armes à l'échelle mondiale, avec les Etats-Unis comme chef de peleton. Bien qu'il soit difficile, voire impossible de préciser le nombre d'armes exact exportées vers chaque pays, force est de relever qu'une part importante de ces armes est déversée sur le continent africain, en particulier dans les pays de l'Afrique Centrale.

Les importations d'armes des pays africains ont cependant sensiblement diminué entre les périodes 1978-1990 (13,7 milliards de dollars) et 1991-1994(2,3 milliards de dollars) soit une baisse de 83%. Ces chiffres montrent qu'entre 1987 et 1990 les transferts d'armes vers l'Afrique représentaient moins de 10% des livraisons aux pays du Tiers-Monde (1987-1990 :147 milliards de dollars ; 1991-1994 :72 milliards de dollars) alors qu'entre1991et 1994 cette part est tombée à un peu plus de 3%23(*) comme le témoigne le tableau ci-dessous :

TABLEAU 3: Livraisons d'armes à l'Afrique sub-saharienne (en millions de dollars courants)

Périodes

Pays

1987-1990

1991-1994

Etats-Unis

330

123

URSS /Russie

10 000

600

France

400

200

Royaume-Uni

300

300

Chine

400

200

Italie

300

100

Autres pays européens

700

300

Autres pays non européens

1300

500

TOTAUX

13 730

2 323

Source : Congressional Research Service

Faut-il donc conclure que durant ces périodes le phénomène de circulation illicite des armes a diminué en Afrique sub-saharienne et en particulier dans la sous-région d'Afrique centrale ? Ces deux périodes correspondent au moment où il existe de fortes tensions en Afrique (le conflit armé angolais est encore actif, le génocide rwandais commence en 1994, la guerre civile en RDC pointe à l'horizon ou a même déjà commencé, etc.). Forcément, les armes circulent pour alimenter ces foyers de tension. Ensuite, il est très difficile, voire impossible d'avoir des chiffres exacts en matière de vente d'armes, surtout en ce qui concerne les armes légères, en raison du flou qui caractérise les instruments juridiques réglementant l'exportation et les transferts de ces armes. Il est donc fort probable que les chiffres donnés par le Congressional Research Service (CRS) soient loin de la réalité. Enfin, le CRS n'a pas relativisé ses données statistiques en faisant cas du marché noir des armes qui est pourtant florissant.

En somme, la diminution des livraisons d'armes à l'Afrique subsaharienne, telle que présentée par CRS ne doit pas absolument amener à la conclusion selon laquelle la circulation des ALPC a diminué sur le continent du fait de la baisse des approvisionnements pendant les périodes 1987-1990 et 1991 -1994.

VI. Le cybertrafic d'armes légères

Une autre tendance aujourd'hui, favorisant considérablement la prolifération et l'accumulation faciles des ALPC, est le « mariage » entre les innovations technologiques, notamment les technologies de l'information, la mondialisation de l'économie de marché et la montée en puissance et en pouvoir des syndicats de crime organisé. Les activités criminelles de ces syndicats sont maintenant rendues faciles par Internet (International Network). Cette criminalité à partir de Internet est appelée cybercriminalité.

Dans le domaine des transferts d'armements de petit calibre, affirme Anatole Ayissi, « les progrès de l'informatique et des télécommunications permettent aujourd'hui de se livrer, souvent impunément et dans l'anonymat total, à l'abus, à la fois, des règles du droit, des exigences de l'économie de marché et des normes de la morale »24(*). Selon cet auteur, il suffit aujourd'hui d'un ordinateur portable, d'un téléphone/fax et de quelques papiers entête pour qu'à partir d'une chambre d'hôtel ou de son domicile, un trafiquant puisse commander, par exemple, des tonnes d'armes aux Etats-Unis, en Europe, en Asie, en Afrique du Sud, etc... pour les acheminer en Afrique ou ailleurs, sans se faire repérer. Il s'agit là du cybertrafic d'armes.

Après avoir examiné les facteurs de prolifération et de circulation des ALPC, il convient à présent d'en étudier les caractéristiques.

SECTION II : LES CARACTERISTIQUES DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION ILLICITES DES ALPC

Par rapport aux autres armes conventionnelles et les Armes de Destruction Massive (ADM), les ALPC ont ceci de particulier : l'absence d'instruments juridiques rigoureux au niveau international réglementant leur production et leur exportation (I) ; ou quand ils existent, ces instruments comportent beaucoup de vides juridiques (II) sur certains aspects du problème, notamment le transfert et le transport des armes, les courtiers et autres intermédiaires lors des ventes de ces armes ; en outre il est aussi regrettable de constater qu'il n'existe pas un système de traçabilité et de marquage (III) fiable permettant de maîtriser la mobilité des ALPC. Enfin, les armes légères ont des caractéristiques physiques (IV) qui rendent facile leur accumulation.

I. L'absence d'une norme internationale coercitive sur les ALPC

Jusqu'en 1990, il n'existe pas un instrument juridique international réglementant la production et la commercialisation des armes conventionnelles. Ce n'est qu'en 1991 que les Nations Unies créent le Registre des armes conventionnelles, dont le but est de garantir la transparence sur les transferts d'armes. Le Registre établit sept catégories d'armes devant être déclarées en cas de transfert ou de vente. Il s'agit de : chars d'assaut, véhicules blindés de combat, hélicoptères d'attaque, missiles, lance-missiles et bâtiments de guerre. Se trouvent donc exclues les armes légères et de petit calibre ainsi que les munitions. Les trafiquants profitent de ce vide juridique pour se livrer à toutes sortes de transfert. D'où la circulation excessive des ALPC à travers le monde.

II. La réglementation mitigée de certaines armes : le cas de l'AK-47

L'AK-4725(*), plus connu sous le nom de Kalachnikov (voir annexe), est un fusil d'assaut inventé en 1945 et fabriqué en 1947 par le général soviétique Mikhaïl Kalachnikov. Elle reste l'arme la plus utilisée dans les zones de conflits armés, surtout en Afrique, car faisant l'objet d'une piètre réglementation.

Selon un rapport de la campagne « contrôlez les armes » menée par Amnesty International, Oxfam International et le Réseau d'Action International sur les Armes Légères (RAIAL) et publié en juin 2006 à l'occasion de l'ouverture, à New York, de la conférence mondiale des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre, depuis son invention la Kalachnikov n'a jamais été fabriquée dans autant de pays qu'à l'heure actuelle : l' estimation porte à 14 le nombre de pays producteurs de cette arme dans le monde. A ce nombre, il faut ajouter le Venezuela, qui a récemment signé un contrat aux termes duquel des kalachnikov seront assemblées sur place. Ce qui, naturellement, va accroître la production et donc l'insécurité. Les auteurs du rapport estiment d'ailleurs qu'il existe aujourd'hui environ 100 millions d'AK-47 et de modèles dérivés à travers le monde, donc une quantité considérable en Afrique Centrale.

Selon le rapport, intitulé AK-47 : The World's Favorite Killing Machine26(*), cette prolifération s'explique par le fait que la production, la commercialisation et l'utilisation de Kalachnikov ne sont presque pas contrôlées au niveau international.

L'absence de normes internationales rigoureuses réglementant le transfert et la commercialisation de l' AK-47 est l'une des raisons fondamentales qui font que ces armes tombent facilement entre les mains de courtiers très peu responsables, de braqueurs, de milices armées et autres bandes criminelles. L'inventeur même de l'AK-47 s'en est inquiété et exige aujourd'hui le renforcement des contrôles de cette arme. Dans une déclaration envoyée à la campagne «  contrôlez les armes » menée par un groupe d'ONG27(*), il affirme : «  En l'absence de contrôles internationaux suffisants sur les ventes d'armes, des armes légères aboutissent aisément dans des endroits du monde où elles sont utilisées non seulement pour la défense nationale, mais aussi par des agresseurs, des terroristes et toutes sortes de criminels [...]. Quand je regarde la télévision et que je vois des armes légères du genre des AK entre les mains de bandits, je me demande toujours comment ils ont bien pu se les procurer. » (Montréal, le 26 juin 2006)28(*).

III. L'absence d'un instrument fiable sur la traçabilité et le marquage

Le traçage permet de contrôler les différents circuits qu'emprunte l'arme, de l'usine de fabrication jusqu'à l'utilisation finale, en passant par les intermédiaires et autres transferts. Le marquage quant à lui aide à retrouver l'arme dans un registre et est donc précieux pour le traçage et la détermination de l'origine.

En application de la recommandation contenue dans le Programme d'Action des Nations Unies de 1991 en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, l'Assemblée Générale de l'Organisation Mondiale a adopté, en décembre 2005, l'Instrument international sur la traçabilité des ALPC. Le mérite de cet instrument est d'exister. Il contient cependant un certain nombre de lacunes importantes (voir, IV, p 71, infra). Toutes choses qui rendent difficiles les contrôles et favorisent la prolifération et la circulation rapides et aisées des ALPC.

IV. Les caractéristiques physiques des armes légères

La circulation des ALPC est rendue bien plus facile encore par leurs caractéristiques physiques. Les armes légères et portatives, comme le nom l'indique, sont très légères, faciles à transporter par une seule personne. Une Kalachnikov, version 195929(*), par exemple, non chargée, pèse 3,14kg et mesure 870 millimètres. Elle suffit bien dans un sac de voyage et un enfant de 7 ans peut aisément la transporter. Le Pistolet Automatique (PA) est trop petit et entre facilement dans une poche sans que cela attire l'attention des curieux. Les munitions (voir annexe) aussi sont tellement minuscules au point qu'elles s'apparentent à des stylos qu'on mettrait dans une trousse d'écolier sans éveiller la curiosité de certains individus.

Certaines armes légères sont très performantes : c'est le cas de l'AK-47. Sa cadence de tir est de 600 coups par minute, sa vélocité 710 mètres par seconde et sa portée maximale 1500 mètres. Ces caractéristiques font de la Kalachnikov le fusil d'assaut le plus vendu dans le monde et le plus utilisé dans les conflits armés.

Autre caractéristique des ALPC favorisant leur circulation : leur longue durée de vie. Les armes légères ne se détruisent pas vite et sont faciles à entretenir : elles peuvent résister pendant plusieurs dizaines d'années. Ainsi, les experts affirment que les armes qui ont servi à la seconde guerre mondiale existent encore et sont aujourd'hui utilisées par certaines bandes criminelles, voire certaines forces armées régulières en Afrique. De même, les armes qui ont été utilisées pendant la guerre froide continuent aujourd'hui de circuler d'un conflit armé à un autre, surtout en Afrique où ces surplus nuisibles ont été déversés.

En définitive, l'Afrique Centrale est, depuis quelques années, fortement secouée par les guerres civiles sanglantes qui créent un grand besoin en ALPC. Elle est devenue par conséquent une sous-région où le commerce des armes est important et où ces armes circulent très facilement à cause de leurs caractéristiques. Ce qui confirme donc les deux premières hypothèses.

CHAPITRE 2 : LES PROCESSUS DE PRODUCTION ET LES MODES D'ACQUISITION ILLICITES

La fin de la Guerre Froide a donné l'espoir d'un monde en paix. Mais cet espoir a été vite déçu par l'insécurité qui règne actuellement sur la planète et en particulier dans la sous- région d'Afrique Centrale, à cause de la prolifération et de la circulation vertigineuses des ALPC qui alimentent les conflits armés et détruisent tant de vies humaines, notamment en Afrique. Des estimations portent à environ 300 000 le nombre de décès causés par ces petites armes chaque année dans les zones de conflits armés, soit plus de la moitié dans les conflits africains. Ces armes tuent 200 000 personnes de plus par an dans les pays en paix par homicides, suicides, tirs accidentels et tirs de la police. Selon le Réseau d'Action Internationale sur les Armes Légères (RAIAL / IANSA)30(*), le stock mondial d'armes légères est estimé à environ 639 millions d'armes, soit une arme pour dix habitants sur la planète. Environ 59% de cet arsenal destructeur est aux mains des civils, soit plus de 377 millions d'armes. La situation est catastrophique pour le continent africain où près de 40% de ces machines de la mort sont en circulation. Ce constat alarmant a une explication pertinente : la production anarchique et incontrôlée des ALPC. Les développements qui suivent font la distinction entre la production industrielle (section I) et la production artisanale (section II), d'une part, les modes d'acquisition et les techniques de transfert (section III), d'autre part.

SECTION I : LA PRODUCTION INDUSTRIELLE DES ALPC DANS LE MONDE

En 1960, moins de 50 pays sont producteurs d'armes légères dans le monde et près de 208 sociétés fabriquant les armes légères et les munitions. Selon Steve WRIGHT31(*), entre 1960 et 1999, le nombre de pays producteurs a doublé et celui des sociétés productrices d'armes légères a été multiplié par six. Concrètement, il existe aujourd'hui à peu près 1249 sociétés réparties inégalement dans environ 98 pays producteurs d'armes légères et de munitions. Naturellement, il existe une forte concentration des industries d'armements dans les pays industrialisés du Nord, sans pour autant négliger les industries du Sud et notamment africaines comme le montre le tableau ci-dessous.

TABLEAU 4 : Répartition mondiale des sociétés fabriquant des armes légères dans le monde, 2002.

Région

Nombre (2002)

Pourcentage

Europe /CEI

500

44

Amérique du Nord / Centrale

407

36

Amérique du Sud

38

3

Asie-Pacifique

96

9

Moyen-Orient

59

5

Afrique Subsaharienne

34

3

TOTAL

1134

100

Source : Fondation Oméga (2002)

L'analyse ci-dessous fait ressortir la production des pays industrialisés du Nord d'un côté et la production des pays africains d'un autre côté.

I. La production des pays industrialisés du Nord

L'examen porte en premier lieu sur la production en Europe et en second lieu, la production dans le continent américain.

A. Les pays et les industries d'armes européens

Il y a actuellement 41 pays européens qui produisent les armes légères. Parmi eux cinq ont particulièrement attiré l'attention à cause de leur volume de production. Il s'agit de la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie et la Russie.

1. La production et les industries françaises d'armes légères

Selon Richard F. Grimmett32(*), la France a été le troisième fournisseur d'armes classiques, en termes de valeur, en 2003. Elle est à la fois un producteur et un exportateur important des principales armes classiques, et un producteur moyen d'armes légères et de petit calibre. En 2001, la France a exporté des armes légères pour un montant évalué à 33,7 millions de dollars américains. Elle dispose de plusieurs industries d'armements. Trois de ces industries sont spécialisées dans la fabrication des armes légères et de petit calibre, à savoir :

· La manufacture d'armes de Saint - Etienne : produit les armes de petit calibre.

· La manufacture d'armes et Tulle : fabrique les armes de moyen calibre.

· Les ateliers de Toulouse, de Mars et de Rennes, spécialisés dans la fabrication des munitions de petit et moyen calibre.

2- La Grande-Bretagne

D'après Richard F. Grimmett33(*), la Grande-Bretagne est le deuxième plus gros exportateur d'armes à l'échelle mondiale en termes de valeur avec des ventes annuelles s'élevant à 4,3 milliards de dollars américains. En 2001, par exemple, elle a exporté des armes légères pour un montant de 44,8 millions de dollars américains. Cette importante production tient à l'existence de nombreuses industries, notamment :

· La Royal Ordonnance Factories (ROF) ;

· La Vicker Défense System (VDS)

Ces deux industries produisent à la fois des armes et des munitions.

3- La production de l'Allemagne

L'Allemagne est un géant en matière de production d'armes. Elle dispose d'au moins 279 entreprises qui produisent ou vendent des biens et services dans les domaines militaire, de sécurité et de police34(*). Parmi ces entreprises, il y a :

· Heckler et Kock : cette entreprise a passé plusieurs accords de production sous licence avec certains pays, notamment la Turquie. En effet, selon le rapport de Amnesty International, Oxfam International et le Réseau d'Action International sur les Armes Légères, rendu public le 22 juin 2005, le gouvernement allemand a autorisé que les fusils d'assaut HK33 de calibre 5,56 mm (fabriqués par l'entreprise) soient produits sous licence dans ce pays à la fin de années 90.

· Fritz Werner : cette entreprise est le chef de file des entreprises européennes35(*) qui ont signé le 23 Août 2000 un accord de production sous licence avec le gouvernement turc, d'une valeur comprise entre 40 et 45 millions d'euros (soit 35,9 à 40,4 millions de dollars américains ou 26 milliards 360 millions à 29 milliards 655 millions de FCFA). Cet accord permet à la société turque MKEK (qui produit les fusils G3 d'origine allemande) de fabriquer des munitions de calibre 5,56 mm pour fusils d'assaut.

4. La production et les sociétés italiennes d'armes

L'Italie figure aussi parmi les plus gros producteurs d'ALPC. Entre 1996 et 2003, elle a figuré au dixième rang des plus gros exportateurs d'armes à l'échelle mondiale. En 2001, ces exportations d'armes légères ont représenté une valeur de 298,7 millions de dollars américains36(*). De même en 2004, Finmeccanica, Fincantieri et Avio, trois grosses entreprises italiennes, ont vendu des armes pour une valeur de 6,6 milliards de dollars américains37(*). Les plus importantes autres industries sont les suivantes :

· Le groupe Aéritalia ;

· La société Agusta qui produit à la fois les armes et les munitions ;

· La société OTO MELARA de la SPEZIA, spécialisée dans la fabrication des blindés, des canons et des obusiers ;

· La société BERRETTA de Gardone, spécialisée dans la production d'armes légères.

5. La fabrication des armes en Russie

La Russie joue un rôle considérable en matière de production d'ALPC à l'échelle mondiale avec ses usines de fabrication d'AK-47 (ou Kalachnikov), l'arme la plus meurtrière dans le monde. Actuellement, 15 pays ont obtenu une licence du gouvernement russe pour fabriquer cette arme. Environ 100 millions d'AK-47 et modèles dérivés circulent actuellement à travers la planète.

En dehors des usines de fabrication de Kalachnikov, d'autres industries d'armements légers non moins importantes sont implantées en Russie, entre autres : Sukhoi, Almaz-Antei, Irkut, Aerokosmicheskoe.

B. Les industries d'armes américaines

Le continent américain abrite plusieurs sociétés de production et de fabrication des armes, parmi lesquelles les plus géantes du monde. Selon le rapport de Small Arms Survey, publié en 2002, 16% des pays producteurs d'armes, à l'échelle mondiale, se trouvent en Amérique, avec plus d'une centaine de sociétés. Il convient maintenant d'étudier les industries d'armement aux Etats-Unis, au Canada.

1. Les industries d'armement aux Etats-Unis

Les Etats-Unis, dominent le marché international de l'armement (que ce soit les armes lourdes ou légères) aussi bien en termes de production qu'en termes d'exportation. Ils se sont classés au premier rang mondial des pays fournisseurs d'armes classiques entre 1996 et 2003, avec des livraisons s'élevant à un total de 151,9 milliards de dollars américains38(*), soit une moyenne annuelle de près de 19 milliards de dollars. Ils abritent les plus grandes régions de production, à savoir : Massachusetts, Connecticut, New York, Californie et Texas où sont implantées quelques sociétés de fabrication d'ALPC. Parmi ces sociétés, il y a notamment : Boeing, Lockheed Martin, Hugles, IBYI, Collins, ITT, Honeywell, Général Hetors.

Ces sociétés fabriquent des milliers de tonnes d'armes qui sont déversées dans le monde et en particulier dans le continent africain.

2. La production des armes au Canada

Le Canada est également un important producteur d'armes légères et de petit calibre, ainsi que des munitions. En 2001, le montant de ses exportations d'armes de petit calibre s'est élevé à 53,6 millions de dollars américains39(*). Il a été classé cinquième pays exportateur d'armes à l'échelle du G840(*). En 2003, le volume des exportations canadiennes des principales armes classiques s'est élevé à 556 millions de dollars américains41(*).

Le Canada réalise plus de la moitié de ses ventes d'armes aux Etats-Unis, mais les lacunes de sa réglementation, combinées au laxisme étasunien (voir p.76, infra) permettent que des équipements militaires et des armes, ainsi que des munitions soient réexportés, sans son consentement, vers des destinations sensibles, comme par exemple les zones de conflits armés en Afrique.

II. La fabrication des armes en Afrique

L'Afrique compte quelques pays qui fabriquent aussi de façon industrielle les armes légères. Parmi les producteurs africains, il y a notamment : l'Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Nigeria, la Namibie, l'Ouganda, le Kenya, la Tanzanie, l'Egypte, le Ghana. Un examen particulier porte sur les cas de l'Afrique du Sud, de l'Ouganda et du Nigeria.

A. Les industries sud-africaines d'armement

L'Afrique du Sud est le plus grand producteur d'armes légères en Afrique avec près de 700 usines de fabrication et 22 500 employés.

Parmi les plus grandes industries, il y a lieu de citer :

· VEKTER qui fabrique des revolvers, des fusils d'assaut, des mitrailleuses, des mortiers, des canons automatiques de 20mm ;

· MGL MILKER MARKETING, spécialisée dans la fabrication des lance-grenades automatiques ;

· MECHEM : fabrique les fusils anti matériels de 12,7 et 20mm ;

· ARAM, New Generation Ammunition, Truvela Armourg Division ;

· Pretoria Metal Pressing : produit les mitrailleuses lourdes, les revolvers, les fusils et pièces d'armes légères ainsi que des munitions de gros, moyen et petit calibres.

La production sud-africaine d'armes est vendue dans une soixantaine de pays et dont en particulier les pays africains.

B. Les industries de l'Ouganda

L'Ouganda possède une petite industrie et au moins trois usines de fabrication d'armes. La plus importante est Nakasongola Arms Factory. Elle produit des armes légères, des munitions et des mines terrestres. Elle appartient à des intérêts chinois. Les deux autres usines sont : Saracen , appartenant au Trust Strategic Ressources Corporation, liée à Executive Outcomes, et Ottoman Engineering Ltd, une firme privée autorisée à vendre des armes à feu dans le pays.

C- Les industries nigérianes

Parmi les industries productrices d'armes légères, il y a lieu de citer :

· La Défense Industries Corporation ;

· La Défense Industries Corporation of Nigeria Act ;

· L'Usine de Bauchi qui produit des véhicules blindés.

Toutes ces usines fabriquent les ALPC exportées dans la plupart des pays africains.

En somme, compte tenu des développements qui précèdent, la conclusion est que la planète abrite un nombre excessif d'industries d'armements. La conséquence est la production exagérée et anarchique d'importantes quantités d'armes. Naturellement, ces engins de la mort ne sont pas fabriqués pour être stockés dans les magasins des usines de production. Ces armes doivent être vendues pour que les producteurs en tirent les bénéfices. Ce qui favorise indubitablement la prolifération et la circulation illicites et anarchiques des ALPC dans le monde, en général, et dans la sous-région d'Afrique Centrale, en particulier.

La production industrielle des armes légères est au premier chef responsable du phénomène sans cesse grandissant de la prolifération et de la circulation anarchiques des ALPC. La production artisanale en Afrique, non moins importante, contribue à aggraver le phénomène.

SECTION II : LA FABRICATION ARTISANALE DES ARMES ET DES MUNITIONS

La fabrication artisanale ou "fabrication-maison" illégale d'armes légères existe dans de nombreux pays à travers le monde. Même si elle représente un segment mineur dans la production des armes légères face à la production industrielle plus importante, la fabrication artisanale n'en reste pas moins significative. Elle se fait sur une petite échelle, crée une activité économique parallèle et illégale, qui est réalisée dans de petits ateliers privés clandestins. Les armes sont de fabrication rudimentaire.

La production artisanale illégale constitue une source d'approvisionnement d'armes importante pour tous les acheteurs géographiquement isolés, économiquement pauvres ou sous embargo. Dans cette partie, l'étude porte sur la production artisanale dans les pays de l'Afrique Centrale d' une part, et dans les pays africains hors de la sous-région d'Afrique Centrale d'autre part.

I. La production dans les pays de la sous-région d'Afrique Centrale

La fabrication artisanale d'armes n'est pas une activité très développée en Afrique Centrale. Il existe certes des petits fabricants clandestins dans tous les pays de la sous-région, mais dont la production est insignifiante. L'Afrique Centrale est cependant fort malheureusement entourée de pays où cette activité illégale est dynamique. Il en est ainsi, par exemple, de l'Afrique du Sud, des pays de l'Afrique de l'ouest42(*). Les Etats de la sous-région reçoivent cependant une bonne partie de ces armes fabriquées localement dans ces pays, à cause de la perméabilité des frontières qui caractérise les Etats africains.

II. La fabrication dans les pays africains hors de la sous-région

Les pays de l'Afrique de l'Ouest ont particulièrement retenu notre attention. Depuis plus d'une quinzaine d'années, cette région de l'Afrique est le théâtre de conflits armés sanglants (Libéria, Sierra Léone, Côte d'Ivoire) qui sont venus aggraver le phénomène de fabrication artisanale des armes. Cinq pays s'intéressent particulièrement à cette fabrication locale illégale : Mali, Niger, Nigeria, Bénin et Ghana.

Le Mali et le Niger occupent une place non moins négligeable en matière de fabrication artisanale d'armes. Selon Mamadou Sékouba KANTE, cité par Chabi Dramane Bouko43(*), auteur de l'ouvrage « De la fabrication locale d'armes au Mali » : « ...Plus de 50% des armes qui échappent au contrôle des Etats... sont des armes de fabrication locale ».

D'après KANTE, en 1996,1997 et 1998, un recensement fait état respectivement de 2538,3149 et 3176 armes de fabrication locale dans cette partie de l'Afrique de l'Ouest.

La production artisanale des armes est aussi excessive au Bénin, au Ghana et au Nigeria. Selon Chabi Dramane Bouko, précité, il existe une forte concentration de producteurs locaux d'armes légères dans le Nord du Bénin, notamment à Parakou et dans certaines villes du Ghana comme Koumassi et Accra. Au Nigeria, la fabrication locale des armes légères est très développée à cause de la recherche du profit facile.

Comme il est aisé de le constater, le phénomène de fabrication artisanale des armes est très bien enraciné en Afrique de l'Ouest. Ce qui, à coup sûr, contribue forcément à la prolifération anarchique des armes. Bien évidemment, ces armes artisanales produites en Afrique de l'Ouest ne restent pas sur place. A cause de la porosité des frontières et de la faiblesse des législations nationales en matière de transfert d'armes, ces petits engins de la mort atteignent facilement l'Afrique Centrale.

SECTION III : LES MODES D'ACQUISITION ET LES TECHNIQUES DE TRANSFERT

L'accumulation excessive des armes légères est rendue facile par divers modes d'acquisition et des techniques de transfert multiples.

I. Les modes d'acquisition des ALPC

Il y a lieu de distinguer : les modes d'acquisition officiels et les modes d'acquisition illicites.

A. Les acquisitions par voie officielle

Ce sont les approvisionnements effectués par les gouvernements internationalement reconnus. Les acquisitions de l'Etat peuvent être légales ou illégales.

1. Les acquisitions légales

L'Etat achète les armes en quantité raisonnable, pour assurer sa défense et sa sécurité en respectant les normes internationales. Ces acquisitions ne posent pas de problèmes majeurs.

Cependant l'Etat peut effectuer des achats irresponsables ou achats sur le « marché gris »44(*). Il s'agit des achats autorisés par les Nations Unies, mais qui sont d'une légalité douteuse, du moins du point de vue du droit international (risque important d'utilisations abusives, répression des populations par exemple) ou irresponsables à tout autre égard (risque important de détournement vers des destinataires non autorisés). En Afrique, il est fréquent de voir que l'Etat importe des quantités importantes d'armes, mais n'a finalement pas les moyens adéquats pour contrôler ou garder les stocks. De grandes quantités de ces armes disparaissent pour se retrouver entre les mains des bandes criminelles qui causent les souffrances aux populations. Les cas d'approvisionnements irresponsables sont nombreux en Afrique, surtout dans les pays affectés par un conflit armé.

2. Les acquisitions illégales

Ce sont les achats d'armes effectués par l'Etat, mais totalement non conformes à la législation internationale ou au mépris des mesures restrictives (embargo par exemple) imposées par les Nations Unies. En d'autres termes, il s'agit de l'approvisionnement dans le marché noir. Les exemples d'acquisitions illégales abondent aussi dans le continent africain, en particulier dans la sous-région d'Afrique Centrale. Il en est ainsi du Soudan. Ce pays, qui est déchiré par un conflit armé sanglant, a été frappé par l'embargo de l'Union Européenne le 16 mars 1994 ; mais entre 2001 et 2004, il a importé illégalement des quantités considérables d'armes de la France45(*), bien sûr avec la complicité du gouvernement français.

B. Les acquisitions illicites

Les acquisitions illicites d'armes sont le propre des structures non étatiques (milices, bandes armées, rebellions, insurgés, etc.) ou de simples particuliers non autorisés. Ces trafiquants et bandes criminelles passent par divers moyens pour obtenir les armes. Ainsi, ils peuvent détourner les armes légalement achetées par l'Etat. Plusieurs fois les rebelles ont détourné du matériel militaire destiné aux forces armées de RDC. Au début du conflit congolais, affirme Georges Berghezan46(*), « 315 tonnes d'armes légères, explosifs et munitions commandées par Kinshasa à la Chine sont arrivées dans le port tanzanien de Dar-es-Salaam, puis ont été dirigées sur l'Ouganda et expédiées à Goma, sous contrôle rebelle »47(*). De même, en septembre 2000, le MLC48(*) se serait emparé d'importants stocks d'armes légères des forces gouvernementales.

Parfois, les brigands lancent un assaut-surprise dans les commissariats, les postes de gendarmerie ou tout autre endroit où sont gardées les armes (armureries) et récupèrent tout l'arsenal y compris les munitions. Plusieurs fois au Cameroun, les postes de police ou de gendarmerie ont été cambriolés par des bandes de criminels fortement armés. Les armes et les munitions volées par ces bandits ne sont pas souvent toutes récupérées par les autorités locales. Ces armes, emportées par les malfrats, ont certainement déjà servi à beaucoup de braquages perpétrés dans le pays ces dernières années.

A défaut de casser les magasins d'armes, les brigands peuvent directement agresser les forces de l'ordre dans les taxis ou dans leurs domiciles. Les armes49(*) de celles-ci sont par la suite arrachées et emportées pour alimenter la criminalité.

Ces bandes peuvent se ravitailler directement chez les fabricants locaux dont la production est en nette croissance et répond parfaitement à la forte demande.

Au total, tous ces modes d'acquisition contribuent fortement à l'accumulation excessive des armes et des munitions en Afrique Centrale.

II. Les techniques de transfert des armes

Les trafiquants d'armes ont l'imagination fertile. D'après les informations recueillies auprès de certains individus50(*), ces trafiquants possèdent plusieurs techniques pour faire voyager leurs marchandises destructrices. Sont présentées ci-dessous quelques unes de ces techniques.

1. La technique de décomposition

Elle consiste à décomposer l'arme. Les composants sont par la suite remis à des amis ou collaborateurs du trafic criminel qui effectuent un voyage, en dissimulant ces pièces dans les bagages. A destination les composants sont rassemblés et l'arme est reconstituée et peut maintenant servir à braquer ou à tuer.

2. Les techniques de dissimulation

Les armes et les munitions sont cachées dans la marchandise destinée à être vendue aux populations, par exemple des pistolets dans les sacs de farine ou de riz ou des munitions dans les boîtes de conserve.

3. La technique des faux convois d'aide humanitaire 

Elle est très pratiquée dans les zones de conflits armés où justement les populations, victimes des violences, ont un besoin urgent de l'aide pour alléger leurs souffrances. Les trafiquants chargent, en quantités considérables, les camions, et au-dessus posent quelques sacs de riz ou de cartons de boîtes de conserve pour couvrir la marchandise macabre. Avec de faux papiers, qu'ils prennent soin de se fabriquer à l'avance et où il peut, par exemple, être lu : "Aide humanitaire de ... à destination de ... ; ou ... Secours humanitaire...Laissez-passer, etc", les trafiquants voyagent tranquillement et arrivent à destination sans être inquiétés.

4. La technique des faux véhicules administratifs

En Afrique, les véhicules administratifs (pour autorités civiles, militaires ou de police) ont généralement un laissez-passer d'office et ne sont presque jamais interpellés par les forces de l'ordre. Profitant de cette faille béante, les trafiquants d'armes se font fabriquer de fausses plaques d'immatriculation administrative qu'ils collent ensuite devant et derrière les véhicules qui peuvent ainsi passer librement avec les armes devant tous les postes de contrôles de police, de gendarmerie ou de douane sans le moindre soupçon de la part de ces forces de l'ordre, encore moins de la population civile.

5. La technique du faux policier ou du faux gendarme 

Elle est proche de la précédente et parfois même les deux vont ensemble ou l'une complète l'autre. Le faux policier ou le faux gendarme, souvent haut gradé, s'asseoit à bord du véhicule en uniforme acquise à l'avance grâce, naturellement, à une agression ou à un simple vol. Par solidarité de corps, les vrais gendarmes au contrôle laissent passer le véhicule suspect sans savoir que celui-ci transporte une marchandise létale et qu'à bord se trouve un criminel dangereux.

6. La technique des convois funèbres et des cercueils

En vertu du respect dû aux morts, les convois funèbres passent en priorité et librement devant les postes de contrôle de police ou de gendarmerie. Les corbillards et les cercueils ne font l'objet d'aucune vérification ; c'est davantage la pitié qui se lit sur le visage du gendarme ou du policier à l'approche du corbillard. Malheureusement, ce corbillard ne porte pas toujours le cadavre ; très souvent à l'intérieur du cercueil transporté se trouvent, à la place du cadavre, des armes et des munitions, soigneusement emballées dans un linceul approprié. C'est une technique macabre très efficace qui permet aux trafiquants de faire voyager d'énormes quantités d'armes et de munitions.

7. La technique d'utilisation des personnes vulnérables

Les personnes vulnérables tel que définies par les Nations Unies, bénéficient d'un traitement particulièrement favorable de la part de la société. Elles sont généralement considérées comme les populations inoffensives et innocentes, donc très loin de commettre un crime ou de participer à des actes criminels. Ces personnes traversent à cet effet les contrôles de police et de gendarmerie sans présenter leurs cartes nationales d'identité. Pourtant, c'est parfois avec ces personnes vulnérables que les trafiquants d'armes opèrent. Ainsi, des pistolets et munitions peuvent facilement être emballés avec les couches d'un bébé et passer inaperçus aux contrôles de douane ou de police ; des armes peuvent être confiées aux enfants, aux femmes enceintes, aux handicapés, etc., qui ne font presque jamais l'objet de fouilles systématiques.

Au total, la production des ALPC dans le monde aujourd'hui est extrêmement abondante, ce qui explique donc aussi leur circulation excessive. Par ailleurs, il y a une infinité de techniques de transfert d'armes qu'utilisent les trafiquants, mêmes techniques mises en oeuvre pour le trafic des drogues. Ces techniques réussissent presque à 100% en Afrique à cause de la perméabilité des frontières, de la corruption des forces de police ou du personnel des douanes chargés des contrôles aux frontières et à l'intérieur des Etats. A cela, il faut ajouter le manque de matériel adéquat (outils de détection et autres) pour effectuer des contrôles efficaces. Toutes choses qui contribuent dangereusement à l'accumulation excessive et rapide d'armes et de munitions dans la sous-région. La troisième et la quatrième hypothèse se trouvent ainsi confirmées.

CHAPITRE 3 : LES CONSEQUENCES DE LA PROLIFERATION ET DE LA CIRCULATION ILLICITES DES ALPC DANS LA SOUS-REGION

Les deux précédents chapitres démontrent indéniablement que des millions d'armes légères existent et sont en circulation à travers la planète, et principalement dans la sous-région d'Afrique Centrale touchée par les conflits armés plus ou moins éteints. Des milliers d'autres armes légères sont fabriquées quotidiennement, aussi bien dans les pays industrialisés que dans les pays en voie de développement. Des quantités importantes de ces armes sont exportées de façon excessive et anarchique vers plusieurs pays, surtout les pays africains affectés ou non par un conflit armé, parfois au mépris des traités internationaux ou régionaux ou alors en violation des législations nationales. Les trafics illicites et les marchés noirs des ALPC sont nombreux et se multiplient en Afrique comme partout d'ailleurs dans le monde. Naturellement, cette accumulation excessive et déstabilisante ainsi que cette circulation illicite et incontrôlée des armes légères entraînent de graves conséquences dévastatrices, aussi bien et principalement dans la sous-région d'Afrique Centrale que partout sur la planète. Dans les développements ci-dessous, ces conséquences, tirées de cette situation, sont classées en trois catégories : les conséquences politiques (section I) ; les conséquences sur la population civile (section II) et les conséquences humanitaires (section III).

SECTION I : LES CONSEQUENCES POLITIQUES

La circulation illicite et anarchique des armes légères s'accompagne toujours de graves conséquences sur le plan politique. Elle entraîne la militarisation de la population et bloque le dialogue ; elle est le catalyseur des conflits armés ; elle est enfin source d'instabilité politique.

I. La militarisation de la population civile et l'impossible dialogue

Le processus de militarisation de la population civile signifie que les groupes en présence ont décidé de créer entre eux un rapport de forces au moyen des armements et d'abandonner systématiquement le terrain de la discussion politique et de la négociation. La logique armée est rigoureusement opposée à la logique de la négociation ou de la discussion politique et dans la plupart des situations concrètes, il y a incompatibilité entre ces deux processus. Dans plusieurs cas, bien qu'un accord négocié entre les parties ait pu aboutir à une solution politique, celle-ci, surtout quand elle ne satisfait pas les intérêts des uns et des autres, n'a pu être appliquée, à cause de la persistance de groupes armés qui ont fait tout pour relancer les troubles ou les combats.

En Afrique, les exemples d'accords avortés sont nombreux. En 1991, en Angola, pour ne citer que cet exemple, les accords de Bicesse n'ont pu aboutir à un cessez-le-feu entre les forces gouvernementales du MPLA51(*) de Eduardo Dos Santos et les troupes rebelles de l'UNITA52(*) de Jonas Savimbi, fortement armées par certaines puissances étrangères53(*). Au Rwanda en 1993, les accords d'Arusha ont échoué ; ils ont plutôt abouti au génocide sanglant de 1994. Dans chacun de ces cas, on a sous-estimé l'importance des armes légères qui ont pu être utilisées par les factions d'irréductibles, refusant les accords. Aujourd'hui en RDC, à cause de l'accumulation excessive des armes, il est difficile de convaincre le mouvement rebelle de Laurent Nkunda de s'asseoir sur la table de négociation avec le gouvernement de Kinshasa. Les combats sanglants qui ont repris à l'Est du pays ce mois de décembre 2007 ne sont que le résultat de la possession illégale des armes à feu.

De manière plus générale, la militarisation d'une partie de la société civile fragilise toute tentative de règlement des différends de manière pacifique. Chaque incident peut être l'étincelle qui met le feu aux poudres. Le scénario est classique : « un fait isolé entraîne des règlements de compte qui provoquent à leur tour des actes de vengeance aboutissant finalement à des massacres »54(*). Dans un tel climat, il est difficile, voire impossible de raisonner ceux qui détiennent des armes. Les mécanismes de dialogue et de négociation sont rejetés puis qu'il est plus facile d'atteindre ses objectifs en faisant parler les armes.

II. Les risques de conflits armés par la prolifération des armes.

Même si elles ne constituent pas la cause directe des conflits armés sanglants qui déchirent l'Afrique et d'autres régions du monde, les ALPC en sont au moins l'élément catalyseur. Lorsque les populations civiles ou les groupes rebelles se sentent lésés dans leurs droits et qu'ils possèdent des armes, ils penchent beaucoup plus à les utiliser pour faire entendre leur voix qu'à s'asseoir sur la table de discussion. Autrement dit, si en soi ce n'est pas l'accumulation des armes qui déclenche les guerres civiles, il n'en demeure pas moins que leur propagation anarchique encourage le recours à la violence, laquelle est perçue comme une solution aux différends et tend à envenimer les conflits et à les rendre plus meurtriers. Le génocide du Rwanda en 1994, par exemple, aurait pu être évité si les armes n'étaient pas distribuées à l'avance aux populations55(*). De même, la rébellion du Nord-est du Tchad contre le pouvoir de Ndjamena ou celle du Nord Kivu en RDC contre le gouvernement de Kinshasa n'auraient pu être constituées si les rebelles n'avaient pas reçu d'importantes quantités d'armes au préalable. Ces rebellions imposent aujourd'hui aux forces gouvernementales des combats violents qui se soldent toujours par de nombreuses destructions de vies humaines parmi lesquelles un grand nombre de civils innocents. D'une manière générale, toutes les guerres civiles en Afrique, et en particulier dans la sous-région d'Afrique Centrale, sont le fait d'une propagation incontrôlée des armes légères. Et comme le fait remarquer Sayidiman Suryohadiprojo, la sécurité / l'insécurité a un lien étroit avec la prolifération des armes : « les problèmes de sécurité ont toujours été étroitement liés aux armes. Il y a des nations et des dirigeants qui croient en le vieil adage romain "si vis pacem, para bellum" (si tu veux la paix, prépare la guerre). Toutefois, posséder des arsenaux importants c'est posséder en quelque sorte une épée à double tranchant. Ces armes peuvent assurer une défense adéquate mais inciter aussi à recourir plus facilement à la violence. Un pays doté d'armes peut devenir agressif, en particulier si ses dirigeants se sont fixés des objectifs nationaux très ambitieux. On ne peut donc que conclure que les problèmes de sécurité sont susceptibles de dégénérer en guerres ou au recours à la violence lorsque de grandes quantités d'armes sont disponibles »56(*)

III. L'instabilité politique : la fréquence des coups d'Etat.

L'Afrique est un continent caractérisé par une grande instabilité politique à cause de nombreux coups d'Etat dont il fait l'objet depuis les indépendances jusqu'à nos jours. Au total, fait observer Michel KOUNOU, « entre 1963 et 2003, l'Afrique aura enregistré une centaine de coups d'Etat militaires ou de rebellions sanglantes d'une grave importance, dont pas moins de quatre-vingt sept réussis. »57(*)

Généralement, les experts en polémologie s'attachent aux causes directes58(*) pour expliquer ces coups de force, en laissant de côté les facteurs indirects (qui influent aussi et peut-être même plus fortement) que sont, par exemple, l'accumulation et la circulation des armes. Entre1994 et 2004, l'Afrique Centrale a été fortement secouée par les coups d'Etat ratés ou réussis ou des mutineries majeures, en nombre et en fréquence, comme le montre le tableau ci-dessous :

TABLEAU 5 : Coups d'Etat et mutineries majeures en Afrique Centrale (1994-2004)

Années

pays

1994

Rwanda

1995

Centrafrique, SaoTome et Principe

1996

Burundi, Centrafrique

1997

Burundi, Centrafrique**, Zaïre, Congo-Brazaville

1998

--------

1999

-------

2000

RDC

2001

RDC, Burundi*, Centrafrique

2002

Centrafrique

2003

Centrafrique, Sao Tome et Principe

2004

RCA, Tchad ; RDC

* doublé au cours de la même année

**triplé au cours de la même année

Source : Extrait du tableau élaboré par Michel KOUNOU dans l'ouvrage précité, P.22.

Ces coups de force sont, certes, la réaction violente des populations ou des groupes rebelles face aux frustrations, injustices et à la mauvaise gouvernance des dirigeants africains ; mais ils sont aussi, et peut-être surtout dus au fait que les armes circulent librement au sein des populations.

Il faut d'ailleurs remarquer que 1994-2004 est une période où presque tous les rapports des Nations Unies (que ce soit ceux du Secrétaire Général ou ceux des organismes spécialisés comme l'UNICEF, le HCR, le PNUD, etc.) ou des ONG59(*) qui oeuvrent dans les droits de l'homme, sont unanimes à l'idée que les armes légères circulent de manière anarchique et incontrôlée en Afrique et principalement dans la sous-région d'Afrique Centrale. Par conséquent, il faut arriver à la conclusion selon laquelle l'accumulation et la circulation illicites des ALPC est une source permanente d'instabilité politique en Afrique Centrale.

SECTION II : LES CONSEQUENCES SUR LA POPULATION CIVILE

L'accumulation excessive des armements a également des conséquences dévastatrices sur le plan individuel. Elle aggrave l'insécurité, accroît le nombre de victimes ; elle augmente aussi le nombre de réfugiés et de déplacés. Elle constitue par ailleurs un frein pour le développement.

I. L'accroissement du nombre de victimes civiles

Les conséquences des armes légères au niveau de la population sont incalculables et dévastatrices, surtout en Afrique Centrale. La dizaine de conflits armés majeurs, qui se sont déroulés en Afrique depuis le début des années 1980, ont été extrêmement meurtriers et sanglants. Il s'agissait à chaque fois de guerres civiles violentes et sanglantes impliquant de nombreux groupes armés, dotés dans la plupart des cas essentiellement d'armes légères. Dans ces conflits, les civils, qui sont pris pour cible délibérée au mépris du droit international humanitaire60(*) et des droits de l'homme, représentent une proportion élevée de victimes. On estime à environ 90% de civils, non impliqués dans la guerre et non armés, tués dans les conflits armés ces dernières années. Parmi eux, les femmes et les enfants sont les plus nombreux. Plus de deux millions d'enfants ont été tués ces dix dernières années au cours de conflits où des armes légères ont été abondamment utilisées, près de 5 millions sont handicapés et beaucoup ont été enrôlés de force parmi les combattants et contraints de participer aux hostilités.

S'agissant particulièrement du génocide rwandais, il semble que les massacres qui ont débuté au lendemain du 6 Avril 199461(*) avaient été soigneusement préparés. Des listes de personnes à abattre auraient été établies et des armes légères auraient été distribuées aux milices proches du pouvoir en place. Ces groupes armés, soigneusement protégés par les forces armées rwandaises, ont commencé à tuer sauvagement les civils. Ensuite, ces éléments armés ont mobilisé une partie de la population et l'ont forcée à continuer les massacres qui se sont déroulés au moyen d'armes légères et d'armes blanches, notamment les lances et les machettes. Selon Bernard ADAM, « la population dotée d'armes blanches n'a pu réaliser ces tueries que grâce à l'encadrement des milices armées qui soit les obligeaient à perpétrer les massacres, soit ont créé un sentiment d'impunité en les protégeant. »62(*) Bien qu'il soit difficile de déterminer avec précision le nombre de personnes tuées par balles dans cette guerre d'une extrême atrocité, il y a lieu cependant de dire que le nombre de victimes aurait été considérablement moins important si les milices n'avaient pas été équipées d'armes à feu. Au Burundi, en Ouganda, en RDC, en Angola, etc., qui ont connu aussi des guerres atroces, les conséquences au niveau de la population ont été aussi dévastatrices à cause des armes légères comme le montre le tableau ci-dessous.

TABLEAU 6: Nombre de victimes dans les conflits en Afrique après 1980 (évaluation à fin 1995)

Pays

Population (1995)

Durée

Estimation des victimes

Soudan

28 millions

1983-

500 000 à 1 million

Ethiopie

54 millions

1970-1991

450 000 à 1 million

Mozambique

15 millions

1979-1992

450 000 à 1 million

Angola*

10 millions

1975-1991

1992-1994

300 000 à 500 000

500 000

Ouganda*

20 millions

1980-1987

100 000 à 500 000

Somalie

9 millions

1982-

400 000 à 500 000

Rwanda*

7millions

1994

500 000 à 1 million

Burundi*

6 millions

1972

1988

100 000 à 300 000

250 000

Libéria

3 millions

1987-

200 000

Sierra Léone

3 millions

1991

50 000

* Pays de la sous-région d'Afrique Centrale.

Source : Documents du GRIP, 1997.

II. L'accroissement de l'insécurité

La propagation et le commerce illicites des armes légères constituent une grave menace pour la paix et la sécurité en Afrique Centrale. Tous les pays de la sous-région, sans exception, sont durement affectés aujourd'hui par le phénomène du grand banditisme, urbain et rural, à cause de la circulation anarchique des armes. Les braquages à mains armées sont devenus monnaie courante. Presque chaque jour, quelque part en Afrique Centrale, une personne est agressée par des bandes de malfrats fortement armés, ou tombe sous les balles d'une arme à feu. Le phénomène des « coupeurs de route »monte en puissance dans tous les pays. A cause de la circulation anarchique des armes, s'observe de plus en plus une insécurité transfrontalière.

Au Cameroun par exemple, Samuel Mvondo Ayolo63(*) fait remarquer que les armes légères « sont la source du grand banditisme et de l'insécurité qui règnent dans toute la région d'Afrique Centrale »64(*). Il fait savoir que dans la région du Nord Cameroun la trop grande circulation de ces armes favorise certainement le phénomène des coupeurs de route qui y sévit. Il affirme que des bandits, avec une ou deux armes légères, barrent pendant quelques minutes une route bien fréquentée et dépouillent tous les véhicules et les voyageurs qui passent sur cette route à cet instant précis. Ils vont parfois même jusqu'à violer des femmes et tuer les conducteurs qui leur tiennent tête. Le 03 septembre 2007, par exemple, dans le village Babororo, dans l'Extrême- nord du Cameroun, des bandits armés avaient pris en otage un éleveur de boeufs, exigeant, pour le libérer, une rançon de cinq millions de francs CFA (environ 12000 dollars US ou 7587,254 euros). Au cours du violent accrochage qui a eu lieu par la suite entre les éléments du Bataillon d'Intervention Rapide et les bandits, le berger a reçu dans sa jambe droite une balle tirée par les malfrats. Dépassés par la riposte des militaires, les bandits ont abandonné une impressionnante armada militaire qui laisse penser à l'armement d'un bataillon militaire en déplacement.

Ce Kidnapping de l'éleveur Camerounais rappelle un peu les prises d'otages spectaculaires qui se produisent en Occident ou dans les régions traditionnelles pour ce genre de criminalité : Afghanistan, Irak par exemple. Il s'agit là des signes annonciateurs du terrorisme international qui, si rien n'est fait d'ici là en matière de lutte contre la circulation anarchique des ALPC, va se propager dans la sous-région pour le grand malheur des populations. D'ailleurs, ce cas précité n'est pas l'unique exemple au Cameroun. D'autres cas similaires se sont produits dans le passé, notamment dans la province orientale du Cameroun.

Le Cameroun n'est pas le seul à connaître ce genre de fait, d'autres pays de la sous-région en sont tous les jours victimes, surtout les pays touchés par les affrontements armés (Tchad, RDC).

III. Le problème de réfugiés et de déplacés

Les armes légères entraînent un autre problème tout aussi grave : la prolifération des réfugiés et des personnes déplacées. L'atrocité et la violence des combats à l'arme légère dans les pays touchés par la guerre font fuir les populations civiles. A la recherche d'un abri, ces populations, affamées et souffrant de blessures profondes ou légères ou d'autres maladies chroniques, se déplacent en masse. Elles s'installent à l'intérieur du pays, dans des endroits qui connaissent un calme relatif, ou alors elles traversent les frontières. Quelque soit le lieu où ces populations élisent domicile, la situation n'est guère différente, les conséquences sont les mêmes : décès en masse à cause de la famine, des maladies difficiles à soigner faute de médicaments.

Les réfugiés constituent un gros fardeau et un grand danger pour la sécurité dans les pays d'accueil. Très souvent, ces réfugiés sont d'anciens combattants qui ont réussi à conserver leurs armes. A la recherche des moyens de subsistance, ils quittent les camps avec leurs armes et se transforment en agresseurs sanguinaires. A défaut d'agir seul, le réfugié armé intègre les bandes de malfrats locales. Au Cameroun, par exemple, la situation est très préoccupante ; les agressions à mains armées sont récurrentes, surtout dans la partie septentrionale. Dans plus de 50% de braquages perpétrés dans cette partie du pays, les auteurs sont les étrangers ou les réfugiés en provenance du Tchad ou de la RCAou même du Darfour (Soudan). La situation qui s'aggrave de jour en jour inquiète les autorités locales. C'est d'autant plus inquiétant parce que les femmes sont parfois parmi les assassins.

SECTION III : LES CONSEQUENCES HUMANITAIRES LIEES A LA CIRCULATION DES ARMES LEGERES

Les ALPC entraînent deux types de conséquences sur le plan humanitaire : la difficile action de la communauté internationale d'une part, et le blocage pour secourir les victimes des armes légères d'autre part.

I. La difficulté d'agir de la communauté internationale

Face aux conséquences dévastatrices de la guerre, la communauté internationale a souvent été sollicitée pour opérer des médiations afin d'arrêter les conflits armés en Afrique, notamment en déployant les forces de maintien de la paix. Cependant, face aux groupes armés, à l'escalade de la violence et aux atrocités observées dans les conflits africains, tous les responsables militaires de ces opérations sont unanimes pour souligner la difficulté de leur mission. Cette déshumanisation croissante des conflits a semblé aboutir au découragement et au désengagement des Nations Unies dans leur action de rétablissement de la paix et de la sécurité dans les années 1990.

L'échec des opérations des Nations Unies ONUSOM65(*) en Somalie et MINUAR66(*) au Rwanda est entièrement imputable au fait qu'il n'a pas été possible de désarmer les milices régulièrement et abondamment approvisionnées en petits engins de la mort.

S'agissant particulièrement de la Somalie, après l'échec de l'opération ONUSOM I au cours de laquelle, faute de moyens suffisants, il ne fut pas possible de désarmer les combattants, le gouvernement américain a lancé l'opération Restore Hope. Mais, contre toute attente, les dirigeants américains se sont opposés à ce projet de désarmement qui a finalement été confié aux casques bleus de l'ONUSOM II à partir de mai 1993. Pourtant, les Américains, à ce moment, avaient suffisamment les moyens ; certainement ils ont dû renoncer à cause de la cruauté des combats sur le terrain. L'ONUSOM II fut à nouveau un échec total : le désarmement ne put avoir lieu et l'ONU dut se désengager face à la violence sanguinaire des combats et contrainte « d'abandonner la Somalie à ses propres démons »67(*), pour reprendre Anatole Ayissi.

De même au Rwanda, le conseil de sécurité, constatant l'incapacité des parties au conflit à respecter les clauses de l'Accord de paix d'Arusha, relatives au cessez-le-feu et surtout la montée de la violence des armes, prit la décision de réduire la force de Maintien de la paix. De 2545 hommes, cette force ne devait rester qu'un petit groupe restreint. En Angola, où la violence des armes s'est aussi amplifiée, l'Organisation Mondiale prit la même décision. Au Libéria, en Sierra Léone, en RDC ou au Burundi, l'action de l'ONU en faveur de la paix s'est également estompée à cause de la violence, alimentée par les armes légères.

La conséquence de ce « désengagement » de la communauté internationale en Afrique est dramatique : le prolongement des combats dans certains de ces pays (Soudan, Somalie) ou la reprise des hostilités dans d'autres (RDC), et donc le prolongement et la reprise des souffrances de la population civile.

En somme, l'accumulation excessive des armes légères empêche la communauté internationale à rétablir la paix et à limiter les souffrances des populations.

II. Les entraves à l'acheminement de l'aide humanitaire

Les conflits armés, conséquence de l'abus d'armes, multiplient le nombre de personnes qui ont de plus en plus besoin de l'assistance et de l'aide humanitaires. Face aux souffrances des populations, la communauté internationale est toujours prête à se mobiliser pour secourir les nécessiteux. Malheureusement et très souvent, l'aide humanitaire ne parvient pas toujours à ces derniers à cause des groupes paramilitaires et autres milices armées qui empêchent la circulation des convois humanitaires ou détournent l'aide, dans le meilleur des cas. De tels actes inhumains et de tels agissements, contraires au Droit International Humanitaire, sont très fréquents en RDC. Caritas Congo, une association humanitaire basée dans ce pays en guerre, raconte ce qui suit : « Il a ainsi été difficile de distribuer normalement de l'aide humanitaire dans le district de l'Ituri, en province orientale : l'équipe a dû parfois distribuer cette aide "sous les crépitements des balles". Au Nord-Kivu, une autre équipe n'a pu organiser ni la foire aux semences d'août - septembre 2005, ni une distribution humanitaire à Luofu, à cause de la présence des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) et des Interhamwe. Après les affrontements entre soldats loyalistes et militaires d'origine rwandophone, autour de la localité de Kanyabayounga (au Nord-Kivu), Caritas Butembo a accompagné une mission de l'office de coordination de l'aide humanitaire des Nations Unies (OCHA) à Miriki pour secourir les réfugiés : au retour, l'équipe est tombée sur des hommes armés qui ont ravi tous les biens personnels de l'équipe. De tels exemples sont nombreux. »68(*)

Le pire des cas se produit lorsque les milices se mettent à massacrer les équipes de secours. CEREBA69(*), une autre ONG basée en RDC, apporte le témoignage suivant : « Le travail de terrain est devenu très difficile, car les animateurs peuvent être attaqués à tout moment par les hommes en uniforme. Des précautions insuffisantes peuvent être lourdes de conséquences. Les animatrices qui s'occupent de l'identification et du soutien psychologique aux femmes victimes de violences sexuelles, se rendent de moins en moins dans les villages, craignant d'être violées par les hommes en armes : cela s'est produit à Nyamilima, Rutshuru, où une de nos animatrices a été violée en 2003. Les centres d'alphabétisation à Binza sont fermés depuis 2003, du fait de la présence d'hommes armés dans le secteur. On enregistre des attentats sporadiques qui provoquent la suspension des travaux dans les villages riverains du parc national des Virunga. Il y a cinq mois, un de nos animateurs de développement a été abattu par les hommes armés non identifiés. Les activités de terrain ont été réduites de plus de 60% dans les zones rurales. »70(*)

Ces tristes exemples de la RDC se produisent fréquemment ailleurs dans d'autres zones de conflits armés où circulent abondamment les armes légères.

Au total, les ALPC qui affluent de façon incontrôlée dans les zones de conflits armés constituent un obstacle majeur pour l'acheminement des secours et de l'aide humanitaires. Il faut ajouter aussi que la circulation des ALPC a un impact négatif sur les activités économiques dans la sous-région : désinvestissements massifs, hésitation des hommes d'affaires à investir à cause de l'insécurité créée par les armes, surtout dans les zones d'hostilités. D'où l'accroissement de la pauvreté, autre insécurité majeure qui menace les populations.

En définitive, les conséquences liées à la prolifération et à la circulation illicites des ALPC sont extrêmement dévastatrices au sein des populations civiles dans la sous-région. Dès lors, est ainsi vérifiée la cinquième hypothèse de recherche, à savoir : l'accumulation excessive et la circulation illicite des armes légères en Afrique Centrale entraînent de graves conséquences humanitaires, politiques et sur la population civile. D'où l'urgence de réduire considérablement le flux de ces armes et de trouver des solutions adéquates pour limiter les souffrances humaines.

DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE CONTROLE DES ALPC

La prolifération et la circulation illicites des ALPC sont un fléau aux conséquences désastreuses en Afrique Centrale comme il a été démontré plus haut. D'où la nécessité de le combattre d'une manière décisive en mettant en place des mécanismes de contrôle efficaces de ces armes. Les Etats de la sous-région et la communauté internationale, conscients des effets destructeurs de ces petites armes, s'activent depuis des années pour lutter contre ce mal, mais sans parvenir aux résultats escomptés. Jusqu'aujourd'hui, les armes continuent de circuler abondamment en Afrique Centrale et à faire de nombreuses victimes. Il faut donc examiner ces mécanismes pour comprendre les raisons de leur inefficacité. Ainsi, dans cette deuxième partie, l'étude se penche sur les mécanismes de contrôle des ALPC en deux chapitres. L'un est consacré à la présentation de ces mécanismes (chapitre 4) ; l'autre fait une analyse critique desdits mécanismes (chapitre 5).

CHAPITRE 4: PRESENTATION DES MECANISMES DE CONTROLE DES ALPC

Les précédents chapitres ont permis de mesurer l'ampleur du phénomène de la prolifération et de la circulation illicite des ALPC à travers le monde et principalement dans la sous-région d'Afrique Centrale. Il est apparu que la propagation et le commerce illicites en sont anarchiques, avec des conséquences incalculables sur tous les plans. Des initiatives visant à combattre et à éradiquer ce fléau ont été prises, tant au niveau international (section I) qu'au niveau de la sous-région même (section II), ainsi que dans d'autres régions (section III) du monde.

SECTION I : LES MECANISMES DE LUTTE AU NIVEAU INTERNATIONAL

L'ancien secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, assimile les armes légères aux « armes de destruction massive », au vue d'importantes pertes en vies humaines causées par ces petits engins de la mort. Pourtant, contrairement à ce qui a été fait pour les armes chimiques, biologiques, bactériologiques et nucléaires, aucun régime de non-prolifération de ces armes n'a encore été mis en place, certains Etats, qui tirent grand profit de la vente des armes, s'opposant à un tel régime.

Néanmoins, depuis le milieu des années 90, l'Assemblée Générale des Nations Unies a inscrit la question des ALPC parmi les priorités internationales, dans un souci d'éradiquer le fléau du trafic illicite des armes légères. Au niveau des Nations Unies, plusieurs initiatives contre les ALPC ont été prises ces dernières années.

I. Le Protocole des Nations Unies contre la fabrication et le trafic illicite d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions

Il est adopté par l'Assemblée Générale des Nations Unies le 31 Mai 2001. L'objet de ce protocole est de promouvoir, de faciliter et de renforcer la coopération entre les Etats parties en vue de prévenir, combattre et d'éradiquer la fabrication et le trafic illicites des armes à feu.

Le protocole demande aux Etats parties d'adopter, dans le respect de leurs systèmes juridiques nationaux, les mesures nécessaires pour empêcher le trafic illicite par des personnes non autorisées et d'établir un système de réglementation concernant les courtiers et leurs activités, notamment en leur exigeant les licences et autorisations pour pratiquer le courtage.

Le protocole appelle les Etats à mettre en place des législations et réglementations garantissant l'efficacité des systèmes de licences ou d'autorisations d'exportation, d'importation et de transit. Avant chaque octroi des licences et d'autorisations d'exportation, les Etats doivent s'assurer que les importateurs ont délivré des licences ou autorisations d'exportation où figurent certaines informations : dates de délivrance et d'expiration, exportateur et importateur, destinataire final, désignation et quantité des cargaisons, etc. Il est aussi demandé aux Etats de prendre les mesures permettant de fournir et de conserver les informations nécessaires (marquages, dates de délivrance et d'expiration des licences ou autorisations établies lors des transactions internationales, les pays d'exportation, d'importation et de transit) pour permettre le traçage et l'identification des armes et d'en vérifier l'authenticité.

Le Protocole incite enfin les Etats parties à exiger un marquage des armes lors de leur fabrication ou importation, d'appliquer certains principes quant à la neutralisation des armes illicites saisies et de prévenir et d'éliminer les vols, pertes, détournements, fabrications et trafics illicites, notamment par un contrôle efficace des importations, exportations et une coopération transfrontalière entre services de police et douaniers et l'échange d'informations concernant les groupes criminels participant au trafic d'armes, leurs méthodes, etc. Par rapport aux instruments antérieurs, cette disposition est un progrès significatif, car dans le passé, les informations concernant les origines, les destinataires finaux des cargaisons d'armes illicites, étaient aux mains des Etats, capables de recueillir ces données, elles restaient presque exclusivement connues par les organismes nationaux, régionaux et internationaux chargés du respect des lois et de la prévention de la criminalité71(*). Le protocole favorise maintenant la coopération transfrontalière entre services de police et de douane.

II. Le Programme d'Action des Nations Unies sur les ALPC

La première conférence de l'ONU sur les armes légères, en Juillet 2001, a eu pour objectif de s'accorder sur un programme d'action en vue de prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects. Au terme des négociations, l'Assemblée Générale a adopté ce Programme d'Action en décembre 2001.

Le Programme d'Action est le prolongement du protocole de mai 2001 engageant les Etats qui y souscrivent à adopter les règles concrètes de contrôle des exportations, importations, de traçage, de coopération à tous les niveaux. Ce Programme incite les Etats à partager entre eux les informations exigées dans le Protocole. Un organisme national unique chargé d'assurer la liaison avec d'autres Etats parties pour les questions relatives au protocole doit être désigné à cet effet.

En outre, le Programme appelle à une assistance entre Etats en matière de gestion et sécurité des stocks, de destruction d'armes légères, de formation des personnels de sécurité, d'entraide judiciaire et de désarmement.

Enfin, le Programme appelle également les Etats à coopérer en matière de traçage des armes. Ces coopérations des Etats parties entre eux, mais aussi avec les organisations internationales, les fabricants, négociants, importateurs, exportateurs, courtiers et transporteurs d'armes, peuvent se faire au niveau bilatéral, régional et international.

III. L'instrument de l'ONU sur la traçabilité des ALPC

En décembre 2005, l'Assemblée Générale de l'ONU a adopté l'instrument international sur la traçabilité des ALPC, en application de la recommandation contenue dans le Programme d'Action de juillet 2001. Cet instrument est un pas important dans le cadre des mesures visant à combattre la prolifération des ALPC. Il renforce les normes internationales en matière de marquage et d'enregistrement et établit pour la première fois un mécanisme de traçage au niveau global.

L'instrument international donne une définition claire des ALPC. Cette définition est importante, car elle distingue nettement les armes de petit calibre des armes légères72(*) et ce pour la première fois dans un instrument international comme le fait remarquer Ilhan Berkol73(*), chargé de recherche au GRIP.

L'instrument comporte d'autres définitions, notamment celles relatives au traçage, marquage, à l'enregistrement. L'enregistrement contient l'information sur le marquage de l'arme avec son historique depuis la fabrication. Il permet de suivre l'arme à tout instant. Par ailleurs, l'instrument donne la définition d'ALPC illicites dans son paragraphe 6 (a).

L'instrument de l'ONU sur la traçabilité des ALPC est un progrès considérable dans la lutte contre la prolifération des armes légères. Il améliore les normes existantes, principalement en matière de définitions, la coopération entre les Etats et le marquage.

SECTION II : LES INITIATIVES SOUS-REGIONALES CONTRE LA PROLIFERATION DES ALPC

Au niveau de la Sous-région, beaucoup d'initiatives contre la prolifération illicite des ALPC ont été engagées au début des années 1990, soit en application des normes internationales ou des recommandations des Nations Unies ou des résolutions prises à l'échelle continentale, soit en application des dispositions spécifiques des accords sous -régionaux.

I. Le conseil de paix et de Sécurité de l'Afrique Centrale.

Les pays de la CEEAC, conscients des conséquences dévastatrices causées par les armes légères sur tous les plans et profondément préoccupés par la prolifération et la persistance des crises politiques et des conflits armés qui constituent une menace contre la paix et la sécurité dans la sous-région, ont créé, le 25 février 1999, le Conseil de Paix et de Sécurité de l'Afrique Centrale (COPAX).

Le COPAX a pour objectifs, entre autres, oeuvrer au renforcement de la paix et de la sécurité sous-régionale ; développer et intensifier la coopération sous-régionale en matière de défense et de sécurité. A ce titre, le COPAX, comme dispose l'article 6 (a), veille au renforcement de la coopération dans les secteurs de la prévention des conflits, de l'alerte rapide, des opérations de maintien de la paix, de la lutte contre les crimes transfrontaliers, le terrorisme international, la prolifération anarchique et le trafic illicite des armes, des munitions, des explosifs et de tous les autres éléments connexes.

Parmi les instances dirigeantes du COPAX, il y a la commission de défense et de sécurité (article 7). C'est un organe consultatif composé des représentants74(*) des Etats membres. La commission est chargée, entre autres, de l'examen de la stratégie de lutte contre la criminalité sous toutes ses formes à l'échelon sous-régional (article 16). Dans le cadre de la mise en oeuvre des objectifs sus-évoqués, les moyens suivants ont été créés au sein du COPAX :

· Le Mécanisme d'Alerte Rapide de l'Afrique Centrale (MARAC) ;

· La Force Multinationale de l'Afrique Centrale (FOMAC).

Le MARAC est un mécanisme d'observation, de surveillance, de prévention des crises et conflits. Il est chargé de la collecte et de l'analyse des données aux fins de la prévention des crises et des conflits (article 21), ce qui sous-entend donc la collecte des données sur la circulation illicite des ALPC, cause plus ou moins directe des guerres en Afrique Centrale.

La FOMAC, quant à elle, est une force constituée par des contingents nationaux interarmées et police et des modules civils des Etats membres de la CEEAC en vue d'accomplir des missions de paix, de sécurité et d'assistance humanitaire. Elle est chargée, entre autres, des missions suivantes : observation et surveillance ; développement de la paix, désarmement et démobilisation ; activités de maintien de l'ordre, y compris la lutte contre la fraude et le crime organisé ; activités de police, y compris la lutte contre la fraude et la criminalité (article 24  ou article 2 du règlement intérieur de la FOMAC).

Au vue de ce qui précède, il est donc aisé de voir que la FOMAC poursuit des missions qui visent à combattre le fléau de la circulation illicite des armes légères. Car, en luttant contre le crime organisé et la criminalité, la FOMAC cherche à éradiquer le trafic illicite des ALPC, considéré effectivement comme la grande criminalité.

II. La mise en oeuvre du Programme d'Action des Nations Unies par les pays de la CEEAC

Les Nations Unies ont élaboré un Programme d'Action sur les armes légères en juillet 2001. Les Etats membres de la CEEAC se sont engagés depuis cette date à développer un programme d'activités de mise en oeuvre de ce Programme d'Action des Nations Unies. Le programme d'activités de la sous-région prend en considération sept domaines d'activités prioritaires. Il s'agit de :

1- la mise en place d'une commission nationale/structure nationale de coordination des politiques de lutte contre la prolifération des armes légères ;

2- la collecte et la destruction des armes ;

3- la mise à jour, le renforcement et l'harmonisation des législations, réglementations et procédures administratives nationales sur le port, l'utilisation, la fabrication et la vente des armes légères et munitions ;

4- le renforcement des capacités des institutions de sécurité dans le contrôle des armes légères ;

5- la promotion de la transparence dans le contrôle des armes légères par l'établissement d'un registre des armes et d'une banque de données ;

6- la promotion du rôle de la société civile dans la lutte contre la prolifération et la circulation illicites des armes légères ;

7- le renforcement de la coopération transfrontalière dans le domaine du contrôle de la circulation illicite des armes légères.

Pour rendre opérationnelles ces activités, le calendrier ci-dessous a été élaboré :

TABLEAU 7. : Calendrier de mise en oeuvre du programme des activités de la CEEAC dans le cadre de l'application du Programme d'Action des Nations Unies sur les armes légères

Activités

Institutions / agences/

Organismes d'exécution

Périodicité

1- la mise en place d'une commission nationale /Structure nationale de coordination des politiques de lutte contre la prolifération des armes légères

Etats membres,

Secrétariat Général de la CEEAC

Action immédiate Mai 2003 -

Novembre 2003

2- la collecte et la destruction des armes

Commissions / Structures nationales, Société Civile

Mai 2003 -

Juillet 2005

3- la mise à jour, le renforcement et l'harmonisation des législations, réglementations et procédures administratives nationales sur le port, l'utilisation, la fabrication et la vente des armes légères

Etats membres,

Commissions nationales, Secrétariat Général de la CEEAC, Société Civile

Mai 2003 -

Juillet 2005

4- le renforcement des capacités des institutions de sécurité dans le contrôle des armes légères

Etats membres,

Secrétariat Général de la CEEAC

Mai 2003 -

Juillet 2005

5- la promotion de la transparence dans le contrôle des armes légères par l'établissement d'un registre des armes et d'une banque de données

Etats membres,

Commissions nationales, Secrétariat Général de la CEEAC

Mai 2003 -

Novembre 2004

6- la promotion du rôle de la société civile dans la lutte contre les armes légères ;

Société Civile,

Commissions nationales,

Mai 2003 -

Juillet 2005

7- le renforcement de la coopération transfrontalière dans le domaine du contrôle de la circulation illicite des armes légères

Etats membres,

Secrétariat Général de la CEEAC, Société Civile

Mai 2003 -

Juillet 2005

Source : Document de base de la 20e réunion ministérielle du Comité Consultatif Permanent des Nations Unies sur les questions de Sécurité en Afrique Centrale, tenu à Malabo, (Guinée Equatoriale), 27-31 octobre 2003.

III. L'accord de coopération en matière de Police Criminelle en Afrique Centrale

La maîtrise du flux des armes légères et des minutions est rendue difficile par la facilité de leur dissimulation, par la porosité des frontières et l'insuffisance des moyens des Etats. Une coopération renforcée entre les services de sécurité des pays de la sous-région s'avère nécessaire dans ce cas, de même que l'échange d'informations permanent entre ces services. C'est la raison pour laquelle les pays de l'Afrique Centrale ont pris des initiatives allant dans le sens du renforcement de la coopération en matière de sécurité ces dernières années. Un accord de coopération en matière de police criminelle a donc été signé à Yaoundé en Avril 1999. Cet accord est une action concrète menée par le Comité des Chefs de Police d'Afrique Centrale (CCPAC) qui a pour objectif essentiel de promouvoir l'échange d'informations policières permettant de réduire les activités criminelles menées par les bandes armées et les coupeurs de route, acteurs de la circulation illicite des armes et des munitions.

IV. La Déclaration de Nairobi sur le problème de la prolifération des armes légères illicite dans la région des Grands Lacs et la Corne de l'Afrique.

Elle est signée en mars 2000 et met en place une stratégie à la fois globale et diversifiée entre dix pays de la sous-région75(*). Cette stratégie vise aussi bien l'amélioration des lois et réglementations nationales concernant la fabrication, le commerce, l'acquisition, la possession et l'usage d'armes légères, que la réalisation de programmes de collecte et de destruction d'armes, ou encore une coopération renforcée entre les services de police, de renseignement, des douanes et des contrôles aux frontières. Cette déclaration envisage un large partenariat entre gouvernements, organisations multilatérales et représentations de la société civile. Il faut préciser qu'en avril 2004, les ministres des Etats signataires ont adopté le Protocole de Nairobi, juridiquement contraignant.

La Déclaration et le Protocole de Nairobi méritent d'être soulignés ici comme faisant parties des éléments de stratégie sous-régionale contre les ALPC. Car en réalité, les actes de criminalité ou les conflits armés en Afrique Orientale peuvent toucher ou touchent directement ou indirectement les pays76(*) de l'Afrique Centrale. Les décisions ou les mesures qui peuvent être prises dans cette sous-région sensible du continent concernant la lutte contre la circulation illicite des armes, intéressent l'Afrique Centrale. La CEEAC doit prendre ces décisions et ces mesures au sérieux, au besoin, envoyer un observateur ou un représentant chaque fois qu'il est question d'un débat sur les ALPC dans cette partie de l'Afrique.

V. Le Programme d'Action coordonné sur la prolifération des armes légères illicites dans la région des Grands Lacs et la Corne de l'Afrique

Adopté en Novembre 2000, ce programme vise à établir un cadre, institutionnel et opérationnel, pour mener des actions durables. Il prévoit également des mesures législatives minimales à prendre dans chaque Etat, des efforts de collecte et de destruction d'armes, l'enregistrement et le contrôle de toutes les armes (appartenant à l'Etat, aux civils ou aux sociétés de sécurité), et enfin une coopération avec l'ONU, les organisations régionales, sous-régionales et la société civile.

Ce Programme intéresse aussi au plus haut point les pays de l'Afrique Centrale dans la lutte contre le trafic des armes, tout comme les initiatives ci-après.

VI. Le protocole sur le contrôle des armes à feu, des munitions et des autres matériels connexes de l'Afrique Australe

Cette initiative a été signée, en août 2001, par 16 pays d'Afrique Australe, dont la RDC. Il s'agit d'un engagement à caractère juridiquement contraignant, qui porte sur la détention d'armes par les civils. Ce Protocole prévoit une série de mesures renforçant les législations. Il constitue un engagement légal de coopérer dans la lutte contre le trafic d'armes dans la région et d'établir de bonnes pratiques pour le traçage et la gestion des armes, tout comme la destruction de réserves.

VII. Les initiatives de l'Afrique de l'Ouest : le Moratoire sur les armes légères.

Conscients que l'accumulation et la prolifération des armes légères constituent une menace sérieuse à la sécurité de la sous-région, les chefs d'Etat de la CEDEAO77(*) ont signé, le 30 octobre 1998 (à Abuja au Nigeria), un Moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes légères en Afrique de l'Ouest, à compter du 1er Novembre 1998 pour une période renouvelable78(*) de 3 ans. Dans le cadre du Moratoire, les Etats membres79(*) s'abstiennent d'importer, d'exporter ou de fabriquer des armes. Le Programme de Coordination et d'Assistance pour la Sécurité et le Développement (PCASED) est le mécanisme de mise en oeuvre pour ce Moratoire. Le PCASED devra soutenir, sur une période initiale de cinq ans, une série d'activités prioritaires relatives à la sécurité. Le 6 Juin 2006, le PCASCED a été remplacé par le projet ECOSAP (Projet de contrôle des armes légères de la CEDEAO).Ce projet, portant sur la mise en oeuvre du Moratoire, est chargé de contrôler la vente et le trafic d'armes de petit calibre, de renforcer les capacités des commissions nationales sur les armes légères et de fournir une aide technique au Secrétariat de la CEDEAO en la matière. Par ailleurs, un code de conduite pour l'application du Moratoire a été adopté par les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Organisation sous-régionale le 10 décembre 1999 à Lomé. De plus, le champ d'application a été élargi aux munitions et pièces de rechange pour ALPC.

SECTION III : LES AUTRES INITIATIVES

Ces développements portent sur l'Union Européenne et les Etats-Unis, sans pour autant sous-estimer les autres régions comme l'Amérique du Sud, l'Asie, etc. Ce choix se justifie par le fait que les Etats-Unis et les pays de l'Union Européenne constituent les principaux fournisseurs d'armes à l'Afrique et particulièrement l'Afrique Centrale. Les mesures qu'ils peuvent prendre sur les ALPC ont, à coup sûr, un impact direct dans la sous-région. Par exemple, une politique visant à baisser la production ou à réduire leurs exportations vers l'Afrique va certainement diminuer le phénomène de la circulation des ALPC et donc renforcer la sécurité.

I. La politique de l'Union Européenne contre la circulation illicite des ALPC.

Depuis la fin des années 1990, l'Union Européenne se mobilise contre la prolifération et le trafic illicites des ALPC. Elle a pris un certain nombre de mesures visant à éradiquer le phénomène. Il peut notamment être fait référence à son code de conduite en matière d'exportation d'armements. Adopté en mai 1998, ce code fixe certaines règles communes pour les exportations d'armes de la part des Etats membres, et prévoit que ces derniers ne peuvent autoriser une exportation que si le pays de destination satisfait à huit critères. Le premier critère a trait au respect des engagements internationaux : une autorisation d'exportation doit être refusée si elle est incompatible avec les obligations internationales des Etats membres et les engagements qu'ils ont pris d'appliquer les embargos sur les armes décrétés par l'ONU, l'OSCE et l'Union Européenne ou au titre d'armes spécifiques telles que les missiles ou sur l'interdiction totale d'armes spécifiques telles que les mines terrestres antipersonnel. Le deuxième critère est relatif aux droits de l'homme : les Etats membres ne délivreront pas l'autorisation d'exportation s'il existe un risque manifeste que le bien dont l'exportation est envisagée serve à la répression interne ; ils prendront en compte la nature de l'équipement en question afin d'assurer le respect des droits humains. Le troisième et le quatrième critère visent à limiter les conflits internes et régionaux. Le cinquième critère porte sur la nécessité de limiter les exportations à un cadre qui respecte les intérêts des Etats membres et de leurs alliés en matière de sécurité et de défense. Le sixième critère a trait aux engagements du pays destinataire des exportations à ne pas contribuer au terrorisme ni à la criminalité internationale. Le septième critère impose aux Etats membres de s'assurer que les armes ne sont pas détournées compte tenu de la capacité du pays à réaliser un contrôle effectif. Le dernier critère, enfin, porte sur le développement durable.

Il faut préciser qu'en 2006 la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, le Canada, la Croatie, l'ancienne République yougoslave de Macédoine, l'Islande, la Norvège et la Roumanie se sont officiellement ralliées aux critères et aux principes énoncés dans le code de conduite européen.

Le code de conduite n'est pas la seule initiative européenne visant à contrôler les risques liés aux armes. D'autres résolutions ont été prises dont certaines visent spécifiquement les armes légères et de petit calibre. Il y a notamment :

1. le Traité des forces conventionnelles en Europe : signé en 1990, ce traité limite cinq catégories d'équipements militaires et apporte des dispositions pour l'inspection des stocks d'armes.

2. L'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) : elle regroupe tous les Etats membres de l'Union Européenne. L'OSCE a adopté en Novembre 2000 un document sur les ALPC marquant l'engagement politique des Etats membres à accepter et à appliquer des mesures nationales de contrôle de fabrication, du transfert, du courtage des opérations de marquage et des mesures de gestion, de destruction, de sécurité des stocks. Elle définit pour ce cadre les exportations et vise l'amélioration de la coopération policière et judicaire ainsi que l'échange d'informations.

3. L'action commune des membres de l'Union Européenne de 2002 : elle vise la réduction des stocks de munitions, la lutte contre l'accumulation excessive et incontrôlée et la dissémination des armes légères, le combat contre les trafics illicites, le renforcement des contrôles du commerce légal des armes légères80(*), et la gestion des situations post-conflit. L'Action commune recommande aux Etats parties de soutenir des mesures de retenue et de transparence dans les différentes enceintes internationales, et prévoit également l'octroi d'une assistance financière et technique en faveur des pays affectés par les conséquences des armes légères.

4. Position commune sur le courtage : elle est adoptée le 23 juin 2003 par l'Union Européenne et exige des Etats membres à tenir compte des principes directeurs dans leur législation, afin d'exercer un contrôle efficace sur les activités de courtage.

En plus de ces initiatives, il faut noter que le conseil de partenariat euro-atlantique de l'OTAN a ajouté les armes légères à ses 22 domaines de coopération, en vue d'aider les pays (qui en font la demande) à ramener le volume des armes légères à un niveau adapté aux stricts besoins de défense et de sécurité interne, tout en améliorant la gestion et la sécurité des stocks, afin de prévenir le trafic illicite.

II. La stratégie des Etats-Unis contre la circulation illicite des ALPC

Les Etats-Unis sont à la pointe des efforts déployés sur la scène internationale pour enrayer le trafic illicite et l'accumulation destabilisatrice des ALPC. Ils ont conçu leur politique de façon à renforcer la répression et les moyens juridiques, à décourager les exportations irresponsables, à renforcer les sanctions contre ceux qui enfreignent les embargos, etc. Plusieurs lois américaines régissent la production, l'exportation et l'importation des armes.

C'est ainsi que les dispositions de la loi américaine sur le contrôle des exportations d'armes (US Arms Export Control Act, ou AECA) régissent les exportations commerciales de tous les matériels et services militaires américains ainsi que les transferts opérés par l'Etat dans le cadre du Programme sur les ventes de matériel militaire à l'étranger. En vertu de cette réglementation, l'approbation du gouvernement américain est exigée pour toute transaction relative à du matériel ou à des services militaires. Les utilisateurs de ces armes font l'objet de contrôles stricts pour s'assurer qu'ils ne violent aucun des principes de la directive de 1995 sur les transferts d'armes classiques81(*). Toutes les exportations commerciales et tous les transferts non commerciaux d'armes doivent tenir compte des critères rigoureux suivants : les besoins des Etats-Unis et du pays bénéficiaire en matière de sécurité ; les objectifs de politique étrangère des Etats-Unis ; les risques de conséquences préjudiciables pour le pays ou la région bénéficiaire ; les antécédents du pays bénéficiaire sur le plan des droits de l'homme, du terrorisme et de la prolifération, et les risques d'usage abusif ; et les possibilités de détournement ou d'utilisation non autorisée des armes en question. Les violations de la réglementation sur les exportations mènent au refus et à la suspension de licences d'exportation, à des poursuites judiciaires et à la suppression de toutes exportations de matériel militaire vers certains pays. Les personnes poursuivies en vertu de cette réglementation peuvent encourir des amendes et des peines de prison.

Le gouvernement américain considère que les réexpéditions non autorisées sont une source importante de prolifération d'armes légères et de petit calibre. En raison du laxisme de certains règlements sur la réexpédition, les armes initialement acquises légalement peuvent se retrouver dans le circuit illicite. Les Etats-Unis sont l'un des rares pays du monde à soumettre toutes les ventes commerciales et tous les transferts gouvernementaux de matériel militaire à des certificats d'utilisateur final, à des mesures adéquates de sécurité pour empêcher un détournement illicite et à des autorisations de réexpédition. La législation américaine interdit aux pays importateurs de réexpédier les armes et munitions en provenance des Etats-Unis sans approbation préalable des autorités américaines. Les violations présumées font l'objet d'enquêtes sur l'utilisation finale qui peuvent mener à des sanctions pénales contre les personnes ou entités concernées et à l'interdiction des exportations à destination du pays coupable de ces infractions. La loi américaine exige que toutes les armes légères et de petit calibre américaines soient marquées au moment de leur fabrication et de leur exportation pour faciliter le traçage en cas de détournement illicite.

Le gouvernement américain pense également que les courtiers en armes, qui opèrent impunément de façon illicite, en raison de l'absence de réglementation, sont l'une des sources principales du trafic illicite des ALPC à travers le monde. Les Etats-Unis possèdent un régime de surveillance du courtage international des armes assez complet. Une loi américaine adoptée en 1996, en tant qu'amendement à l'AECA précitée, exige que les courtiers, impliqués dans le commerce de matériel militaire américain, se fassent enregistrer auprès du Bureau de Contrôle des ventes de matériel militaire du département d'Etat. Chaque transaction doit ensuite être pleinement autorisée et agréée par ce bureau. Cette juridiction s'étend non seulement aux ressortissants américains et aux étrangers opérant aux Etats-Unis, mais à tous les Américains résidant à l'étranger. Enfin, les courtiers doivent soumettre des rapports annuels énumérant et décrivant toutes leurs activités autorisées.

CHAPITRE 5 : APPRECIATION DES MECANISMES DE CONTROLE

Le précédent chapitre a permis de voir qu'il existe actuellement dans le monde, et particulièrement en Afrique Centrale, plusieurs instruments et mécanismes de lutte contre la prolifération et la circulation illicites des ALPC. Cependant, il est aisé de constater que ces mécanismes et instruments comportent des limites avérées. Beaucoup de facteurs concourent à l'inefficacité et à l'échec de nombreuses initiatives prises à différents niveaux. Le contrôle des armes légères et des munitions est rendu difficile par les intérêts industriels et politiques des Etats producteurs. Comme le fait remarquer Benjamin Valverde à propos du code de conduite de l'Union Européenne, « la signature, l'adhésion ou la ratification d'un traité par un Etat n'empêche pas ce même Etat d'agir dans la logique inverse du traité qu'il a signé. »82(*) Cela est rendu possible, poursuit Valverde, par la déficience d'organes internes83(*) chargés de vérifier que les Etats respectent leurs engagements par rapport aux attentes internationales. De tels agissements, contraires aux engagements pris ou aux normes internationales, s'observent dans d'autres sous-régions ou regroupements d'Etats.

Dans ce chapitre, sont présentées les limites des instruments des Nations Unies (section I), ensuite les faiblesses des mécanismes sous-régionaux (section II) et enfin les lacunes de la stratégie de l'Union Européenne et des Etats-Unis (section III) en matière de lutte contre le trafic illicite des ALPC.

SECTION I : LES LIMITES DES INSTRUMENTS DES NATIONS UNIES

Tous les instruments des Nations unies présentés au chapitre 4 comportent des limites.

I. Le Registre des armes conventionnelles : une législation restrictive

Le registre des Nations Unies, créé en 1991, a pour mandat de relever les défis liés à la prolifération des armes conventionnelles. Malheureusement, la portée du registre est limitée aux armes lourdes, parce que se trouvent exclues les armes légères et de petit calibre. Il devient difficile dans ce cas de mesurer l'ampleur, la source et la destination de ces petites armes. Par ailleurs, la portée du Registre de 1991 ne bénéficie pas de la participation d'un nombre assez important de pays, notamment ceux d'Afrique, à l'exception de l'Afrique du Sud. La liberté est donc laissée à ces pays hors de la norme internationale de continuer à faire le trafic des armes. En outre, les informations à communiquer par les Etats n'incluent pas les stocks d'armements existants. Cette faille laisse la possibilité aux Etats de pouvoir accumuler d'importantes quantités d'armes qui échappent ainsi au contrôle international. Enfin, l'autre faiblesse du Registre, c'est qu'il ne rend pas obligatoires les déclarations des Etats, ce qui vide totalement la substance de cet instrument des Nations Unies.

II. La portée limitée du protocole des Nations Unies contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu et munitions.

Depuis d'adoption en 2001 du protocole, des progrès sensibles ont été réalisés dans le cadre de la lutte contre le trafic illicite des ALPC. Certains Etats ont pris des mesures rigoureuses pour collecter des armes et les détruire, d'autres ont adopté des lois sur le contrôle des exportations et des importations. La portée du protocole est cependant limitée par le fait qu'il ne concerne que les aspects illicites, et ce dans un cadre bien précis qui est celui de la lutte contre la criminalité transnationale organisée. Le protocole laisse de côté le trafic licite, ce qui est une grave faille, surtout quand on sait que la frontière entre le trafic illicite et le trafic licite n'est pas précise ou même n'existe pas du tout dans la pratique. Car les armes, qui au départ empruntent le chemin légal, peuvent très facilement se retrouver dans le circuit illicite, à cause des failles qui existent dans les instruments internationaux de contrôle de ces armes.

III. Le Programme d'Action des Nations Unies et ses limites

La première conférence de l'ONU sur les armes légères en juillet 2001 a eu pour objectif de s'accorder sur un Programme d'Action en vue de prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes sous tous ses aspects. L'adoption de ce Programme représente en elle-même un grand succès. Cependant, le texte adopté est faible, à cause de la pression exercée par certains Etats84(*), grands producteurs d'armes légères. L'application de ses paragraphes dépend de la volonté des Etats membres. Le Programme d'action ne prévoit aucune sanction en cas de non respect ou de passivité ni de mécanisme de contrôle pour mesurer le niveau d'application. Ensuite, le Programme ne traite pas de certains points sensibles, comme par exemple les mines terrestres ; il se focalise plutôt sur la sphère civile, laissant totalement de côté le domaine militaire. Enfin, un écueil non moins important existe: les Etats parties à la convention mettant en place ce programme peuvent rejeter la coopération avec les autres Etats parties et se retirer à tout moment, s'ils le désirent. C'est dire que le Programme d'Action des Nations Unies reste soumis au bon vouloir des Etats.

IV. Le caractère minimaliste de l'instrument de l'ONU sur la traçabilité des ALPC

L'instrument de l'ONU représente un pas modeste, mais important, dans le cadre des mesures visant à combattre la prolifération des ALPC, dans la mesure où il renforce les normes internationales en matière de marquage et d'enregistrement au niveau international. Cet instrument comporte cependant des lacunes importantes qu'il convient de relever. D'abord les munitions sont exclues de son champ d'application, ce qui vide l'ensemble de sa substance. Les munitions conditionnent l'existence des ALPC. En effet, une arme ne peut pas fonctionner sans munitions. Ensuite, l'instrument de 2005 n'est pas légalement contraignant, ce qui laisse la possibilité à certains de se dispenser de se conformer aux exigences en évoquant la « sécurité nationale » sans aucune autre explication et de continuer leur trafic illégal. Ainsi, le mécanisme de traçage prévoit un système volontaire et bilatéral, alors qu'il est nécessaire d'avoir un système obligatoire et multilatéral pour aboutir aux résultats escomptés.

Autre lacune de l'instrument : la mise à l'écart de la possibilité de conduire des opérations de traçage via les forces de maintien de la paix. Enfin, dans le document aucune mesure préventive de vérification physique des transferts n'y figure ; et concernant le transport des armes, aucune vérification proactive de l'itinéraire ni des transporteurs n'existe dans le document de 2005. Toute initiative, obligeant les Etats à procéder à des contrôles sur le circuit licite dans le but de prévenir la déviation vers le circuit illicite, a été rejetée par un noyau d'Etats (dont les Etats-Unis), réfractaires à toute mesure contraignante en la matière.

SECTION II : LES FAIBLESSES DES MECANISMES SOUS-REGIONAUX

Dans la présente section, l'analyse porte sur le Protocole sur le COPAX, la mise en oeuvre par la CEEAC du programme d'Action de l'ONU sur les ALPC ainsi que certains autres instruments du continent qui, d'une manière ou d'une autre, intéressent la sous-région.

I. Les lacunes du protocole sur le COPAX

En signant le 24 février 2000 le protocole sur le COPAX, les pays de la CEEAC ont marqué un pas positif en matière de préservation et de renforcement de la paix et de la sécurité. Toutefois, cet instrument présente des insuffisances très importantes. D'abord le problème de prolifération et de circulation illicites des ALPC (qui menacent pourtant la sécurité sous-régionale) y occupe très peu de place ou du moins y est abordé avec beaucoup de discrétion, presque de façon implicite, alors qu'on aurait dû prévoir dans le texte un organe spécialement chargé de la question des armes légères. Par exemple, un organe du type observatoire sous-régional des Armes Légères et de Petit calibre.

En outre, le Protocole est un instrument légalement non contraignant, ce qui laisse la possibilité aux Etats signataires de se dispenser de se conformer à certaines dispositions, surtout quand celles-ci sont incompatibles avec leurs intérêts, alors qu'on se serait attendu à un Protocole qui prévoit des sanctions à l'encontre de tout membre qui ne respecte pas ses engagements. La conséquence de cette lacune est que les Etats ne versent pas à temps ou ne donnent pas du tout leurs contributions exigibles en vue du fonctionnement du COPAX : une autre difficulté qui concourt inéluctablement à l'inefficacité ou à l'affaiblissement du mécanisme.

II. Les difficultés dans la mise en oeuvre du programme d'Action des Nations Unies

Les 20 et 21 septembre 2005 à Kigali au Rwanda, s'est tenu un atelier sur la « Revue du progrès des Etats membres de la CEEAC dans la mise en application du Programme des Nations Unies sur les ALPC ». Cet atelier avait pour objectif, de promouvoir les efforts des Etats membres de la CEEAC dans la mise en application du programme d'activités prioritaires de l'Afrique Centrale, pour la mise en oeuvre du Programme d'Action des Nations Unies sur le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects. Il était surtout l'occasion de voir les progrès réalisés par les Etats de la sous-région dans la mise en application du Calendrier85(*) de mise en oeuvre du Programme d'activités prioritaires.

Les rapports présentés par les représentants des Etats lors dudit atelier ont permis de voir que, d'une manière globale, les efforts louables ont été accomplis dans le cadre de la mise en application du Programme d'Action des Nations Unies. Des résultats positifs ont été atteints. En Angola 75 323 armes de différents calibres et 3126 mines ont été récupérées entre 2000 et 200586(*). De même en RDC, plus de 4000 ALPC87(*) ont été saisies et détruites. Au Rwanda aussi 6000 ALPC et 261 tonnes de munitions88(*) ont été collectées et détruites. Ces exemples montrent l'engagement des Etats de la sous-région à combattre la circulation des armes à feu et à mettre en application les recommandations de l'ONU inscrites dans le programme d'Action.

Cependant, il y a lieu de constater que si certains Etats89(*) se sont investis à mettre en application le Programme d'activités prioritaires, d'autres, par contre, ont mené des activités timides. Il faut remarquer que seuls les pays touchés par la guerre ont réellement posé des actes concrets en matière de lutte contre la circulation des ALPC. En revanche, les autres, qui connaissent une stabilité relative, n'ont fait aucun effort. Il n'y a pas eu d'avancées significatives quant à l'harmonisation des législations nationales dans le domaine des armes à feu. Seuls la RDC, le Rwanda et le Burundi ont travaillé dans ce sens. Cette attitude peut s'expliquer par le fait que ni le Programme d'activités prioritaires de l'Afrique Centrale ni le Programme d'Action des Nations Unies ne sont pas accompagnés d'un texte juridique qui oblige les Etats à les appliquer. A cela, il faut ajouter le manque de moyens : les Etats n'ont pas assez de moyens pour mettre en oeuvre ces programmes.

Il apparaît donc que le Programme d'Action des Nations unies n'a pas été totalement appliqué par les pays de l'Afrique Centrale.

III. Les insuffisances dans le protocole de Nairobi

Le protocole de Nairobi, adopté le 21 avril 2004 en vue de prévenir, contrôler et réduire les ALPC dans la région des Grands Lacs et la Corne de l'Afrique  et auquel ont adhéré certains Etats90(*) de la CEEAC, a le mérite d'être un instrument juridiquement contraignant. Le protocole a cependant une grande insuffisance : les données sur le marquage et l'enregistrement ainsi que le mécanisme de traçage que prévoit l'instrument de l'ONU sur la traçabilité des ALPC91(*) y sont très peu développés, d'autant que le marquage se fait en amont, donc chez les producteurs. Cependant, le marquage par les industries sous-régionales devrait être effectué, l'instrument étant contraignant.

SECTION III : LA POLITIQUE AMBIGUË DE L'UNION EUROPEENNE ET DES ETATS-UNIS SUR LES ARMES LEGERES.

Les pays de l'Union Européenne et les Etats-Unis, principaux fournisseurs d'armes à l'Afrique, ont mis en place des instruments et mécanismes92(*) pour lutter contre la circulation et le trafic illicites des ALPC. Ces instruments et mécanismes comportent malheureusement des failles et des faiblesses qu'il convient de relever.

I. Les failles du code de conduite de l'Union Européenne

Le code comporte de nombreuses failles, la plus importante étant la liberté laissée à l'Etat membre de prendre la décision d'exporter ou non les armes. Une autre faille, c'est que le code est un instrument juridiquement non contraignant. L'Etat est donc libre de sa décision et aucune sanction pratique n'est prévue en cas de non respect du code de bonne conduite. Le traité apparaît comme une simple déclaration de principe et n'offre aucune garantie légale face à des activités informelles ou illégales menées plus ou moins directement par des Etats. Profitant de ces failles et autres flous législatifs, ces Etats ont toujours la possibilité de s'adonner officieusement à des trafics d'armes, voire même de s'impliquer plus ou moins directement dans le trafic illicite d'armes en évitant tous les embargos. Ce manque de rigueur du code de conduite européen explique le comportement de certains Etats qui continuent à vendre des armes à de nombreux pays frappés par le double embargo des Nations Unies et de l'Union Européenne. Il en est ainsi, par exemple, de la France qui a continué à livrer des armes93(*) au Soudan, et au Myanmar (ex-Birmanie) en violation manifeste des embargos94(*)imposés par l'Union Européenne, comme l'indiquent les tableaux ci-dessous :

TABLEAU 8 : Exportations françaises d'armes vers le Myanmar

 

AnnéesVolume des exportations en dollars américains199818 3441999133 895200016 854

 
 
 
 
 
 
 
 

Source : Amnesty international, Oxfam, Réseau d'Action international sur les Armes Légères, "les pays exportateurs d'armes du G8 et les transferts d'armes irresponsables", Document Public, 2005.

TABLEAU 9 : Exportations françaises d'armes vers le Soudan

Années

Volume des exportations en dollars américains

2001

447 687

2002

24 546

2003

124 493

2004

465 451

Source : Amnesty international, Oxfam, RAIAL :"les pays exportateurs d'armes du G8 et les transferts d'armes irresponsables", Document Public, 2005

Par ailleurs, d'après Benjamin Valverde95(*), la France a soutenu le régime d'Habyarimana contre l'offensive du Front Patriotique Rwandais de Paul Kagamé, de 1988 à 1994, notamment en envoyant officiellement un million d'euros d'armes en 1991, trois millions en 1992 et plus d'un million d'euros en 1993.

La France n'est pas le seul pays de l'Union Européenne à violer le code de conduite et à faire contourner l'embargo. D'autres pays peuvent être indexés. Par exemple, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni. En 2003, l'Allemagne a autorisé des exportations d'armes légères vers de nombreux pays sans véritablement respecter le code de conduite et violant son propre système qui comporte une faille béante. En effet, bien que l'Allemagne ait, en théorie, une politique restrictive en matière d'exportation d'armements, les pièces fabriquées sur son territoire sont parfois intégrées dans des équipements militaires qui pourraient facilement être utilisés pour contribuer à un conflit ou alimenter la violence. Selon le rapport du Berlin Information Center for Transatlantic Security et Oxfam Allemagne de mars 2005, le gouvernement allemand applique deux poids deux mesures. Ce rapport indique qu'il est plus facile d'obtenir une licence d'exportation pour des composants que pour des armes complètes. Cette situation est due avant tout à l'incohérence du système allemand d'autorisation des exportations d'armements qui repose sur un double axe juridique : la Loi relative au contrôle des armes de guerre, qui est restrictive, et la Loi relative au commerce extérieur et aux paiements, qui facilite les exportations d'armes.

Entre1996 et 2003, l'Italie a figuré au dixième rang des plus gros exportateurs96(*) d'armes. Elle a transféré, ces dernières années, des armes légères vers un certain nombre de pays97(*)qui sont le théâtre de violents conflits ou de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Ces transferts internationaux violent à la fois le code de conduite européen et la Loi italienne 185/90, qui interdit les exportations à destination de pays dont le gouvernement est responsable de violations flagrantes et avérées des droits de l'homme, ou de pays qui sont en proie à un conflit et soumis à un embargo sur les armes, ou qui reçoivent de l'Italie une aide au développement et dont les dépenses militaires excèdent les besoins en matière de défense.

Le Royaume-Uni a aussi violé le code de bonne conduite en vendant des armes à des pays98(*) où les forces armées et la police commettent des violations des droits humains de manière persistante. Le Royaume-Uni dispose pourtant d'un des meilleurs systèmes de contrôle d'exportation d'armes, mais figure toujours parmi les cinq premiers gros exportateurs à l'échelle mondiale. Il faut relever que l'un des principaux problèmes qui affectent le système britannique de contrôle des exportations d'armes réside dans le fait que le gouvernement du Royaume-Uni recourt de manière croissante et tout le temps aux licences ouvertes99(*), notamment en ce qui concerne le transfert de technologies militaires, et encourage les entreprises exportatrices à les utiliser chaque fois qu'elles le peuvent. Les licences ouvertes permettent aux entreprises de faire plusieurs livraisons vers des destinations précises. Lorsqu'une telle licence est accordée, aucune autre autorisation préalable ou vérification n'est nécessaire avant la livraison des biens. Cette grande ouverture, laissée par le système britannique, explique donc les exportations anarchiques du Royaume-Uni vers de nombreux pays notamment ceux de l'Afrique Centrale.

Au total, il y a lieu de dire que le code de conduite de l'Union Européenne cherche davantage à protéger les intérêts économiques et stratégiques des Etats membres en consolidant un système qui assure la libre exportation des armes. Ce code n'inquiète pas du tout les trafiquants d'armes ; il s'apparente beaucoup plus à une simple déclaration politique non juridiquement contraignante.

II. Les Etats-Unis : entre respect de la loi et sauvegarde des intérêts

Les Etats-Unis sont le pays le plus transparent à l'échelle mondiale en matière d'exportation d'armes, au vue de leur législation100(*). Mais dans la pratique, ce pays a souvent tendance à privilégier ses intérêts qu'à respecter ses propres lois.

L'ampleur des intérêts économiques, politiques, géopolitiques et stratégiques place souvent les USA dans une position où leur politique de vente d'armes devient « beaucoup moins scrupuleuse et respectueuse »101(*) des lois en vigueur ou des critères éthiques. Il n'est pas rare de voir que le gouvernement américain soit impliqué, directement ou indirectement, dans des transferts illicites d'armes légères. Exploitant les lacunes au sein des législations nationales ou internationales et violant systématiquement les embargos, il n'hésite pas à recourir aux certificats erronés de destinataire final ou aux transactions occultes ou frauduleuses. Ainsi, les USA transfèrent des armes vers des pays condamnés pour le non respect des droits humains, en dépit du Conventional Arms Transfer Policy précité (p.67,supra). Dans cette optique, Washington n'a défini aucun embargo sur les ventes d'armes vers le Zimbabwe102(*) qui appartient pourtant à l' « axe du mal », mais qui certainement est d'un grand intérêt économique pour les USA.

D'après Amnesty International, Oxfam International et RAIAL103(*), les USA réalisent d'importants transferts d'armes vers des pays dont la situation des droits humains continue de susciter de vives inquiétudes. Au nombre de ces Etats, se trouvent le Nigeria, l'Egypte, l'Arabie Saoudite, Israël, etc. En Août 2003, selon ces ONG, le gouvernement américain a levé l'interdiction de l'assistance militaire au gouvernement rwandais dont les violations des droits de l'homme sont avérées.

De même en 2004, il a conclu un accord de coopération militaire avec ce pays dont les forces armées et les responsables ont été accusés, à l'issue d'enquêtes menées par les Nations unies, de soutenir des groupes armés dans l'est de la RDC.

Aux USA, il n'est pas nécessaire pour les détenteurs d'armes légères de se soumettre à des licences ou des enregistrements. Ce laxisme américain vis-à-vis des armes ne se restreint pas seulement à l'intérieur des frontières américaines. Selon Benjamin Valverde104(*), plus de 80% des armes légères confisquées au Mexique à la suite de crimes et pratiquement toutes les armes légères récupérées en Jamaïque, trouvent leur origine aux Etats-Unis.

En somme, le gouvernement américain viole de façon flagrante les lois qu'il s'est lui- même volontairement imposées et garde toujours une marge de manoeuvre suffisante sur les opérations clandestines dès lors que ses intérêts économiques, politiques, géopolitiques ou stratégiques sont en jeu.

En définitive, de nombreux mécanismes et instruments sur les ALPC existent tant au niveau sous-régional qu'à l'échelon mondial. Mais, ces mécanismes et instruments comportent des faiblesses importantes qui font que la lutte contre la prolifération et la circulation illicite de ces armes devient inefficace et demeure sans résultat concret. La sixième hypothèse est ainsi vérifiée, à savoir : les mécanismes et les instruments de contrôle inappropriés des armes légères rendent difficile la lutte contre la prolifération anarchique et la circulation illicite de ces armes.

CONCLUSION

Au terme de la présente étude qui consistait à examiner, d'une part, le phénomène de prolifération et de circulation illicites des armes légères et de petit calibre en Afrique Centrale, et d'autre part, à faire une analyse critique des mécanismes de contrôle de ces armes, il y a lieu d'affirmer que toutes les hypothèses de recherche, énoncées au départ, ont été confirmées. Ce qui confirme donc aussi l'hypothèse générale, à savoir : l'insécurité observée aujourd'hui en Afrique Centrale résulte de la prolifération et de la circulation anarchiques des ALPC.

Dès lors, comment mieux contrôler les transferts d'armes ? Quelles stratégies faut-il aujourd'hui pour limiter la prolifération et la circulation illicites des armes légères et des munitions dans la sous-région et peut-être même aussi dans le monde ? Une stratégie qui s'applique au niveau continental, sous-régional et à l'échelle internationale, serait efficace pour mettre fin à la circulation incontrôlée des armes légères.

1- Le rôle de l'Union Africaine

En tant que système de sécurité collective, l'Union Africaine doit pleinement jouer son rôle ; elle doit pouvoir atteindre certains objectifs, notamment :

· Négocier avec les pays concernés la réduction des stocks d'armements hérités de la guerre froide (ou de toute autre guerre de quelque nature que ce soit) et qui risquent de s'étendre ou s'étendent même déjà vers des zones en crise ou de conflit armé ;

· Créer des mécanismes qui favorisent le règlement pacifique des différends, pour éviter que ceux-ci ne dégénèrent en conflits armés, sources d'accumulation des armes légères ;

· Encourager la coopération entre Etats afin de faciliter le contrôle des frontières et la répression des trafics d'armes ;

· OEuvrer pour mettre rapidement fin aux conflits armés, car lorsqu'un conflit dure longtemps, il y a un besoin croissant en armement.

En plus de ces objectifs, l'Union Africaine devrait parvenir à la création d'un traité régional de non prolifération anarchique des armes légères et des munitions.

2- Les mesures au niveau sous-régional

La CEEAC devrait sérieusement s'investir dans la lutte contre la circulation anarchique des ALPC. Sa tâche devrait consister maintenant à renforcer les mécanismes de contrôle des armes qui présentent des faiblesses et qui ont montré des limites, et créer d'autres mécanismes plus efficaces, le cas échéant, au sein de son Département chargé de l'Intégration Humaine, de la Paix, Sécurité et Stabilité, créer un organe spécialement en charge des questions liées à la circulation des armes légères.

· Doter le COPAX d'un organe spécial de contrôle des armes légères 

L'une des lacunes du COPAX vient du fait que la question des armes légères, l'une des causes principales de l'insécurité, a été abordée presque de manière implicite, ce qui le rend moins crédible. Il est donc bénéfique qu'au sein du COPAX il y ait un organe spécialement chargé du contrôle des ALPC doté d'un pouvoir contraignant.

· Renforcer les capacités des institutions de sécurité et impliquer les experts civils 

La lutte contre la prolifération des armes légères requiert le renforcement des structures et l'amélioration des compétences des forces armées et de sécurité ainsi que des techniques modernes de maîtrise du flux des armes et l'application des lois. Le « renforcement des capacités » est une composante essentielle dans la stratégie de lutte contre les armes légères. Son absence est un blocage à la réussite des politiques nationales de lutte contre les ALPC. Le renforcement des capacités est également une des conditions de réussite des programmes de collecte des armes, car ce n'est que lorsque les forces de sécurité et les forces armées seront en mesure d'assurer efficacement la sécurité des populations que la tentation de celles-ci d'avoir recours aux armes pour se défendre va diminuer et de ce fait auront des raisons légitimes de remettre volontairement les armes. Les Etats membres de la CEEAC, avec l'appui des organisations internationales, devraient donc oeuvrer pour assurer la formation de leurs forces armées, de sécurité et de police aux techniques modernes de maîtrise du flux d'armes et de munitions, à l'application des lois, à la gestion et à la sécurisation des stocks d'armements.

· Harmoniser les législations nationales 

L'une des causes majeures qui font échouer la lutte contre la circulation illicite des ALPC est la différence des législations nationales. Il serait donc souhaitable que les pays de la sous-région procèdent à une harmonisation des législations. Une harmonisation à deux ou à trois, comme semble être la tendance aujourd'hui, est faible et laisse des failles que pourraient exploiter les trafiquants. Par contre, une harmonisation qui regroupe, autour d'une même table, tous les Etats de la sous-région, est efficace. Il revient par conséquent à la CEEAC d'organiser une conférence sous-régionale sur l'harmonisation des législations nationales.

· Renforcer la coopération bilatérale et la coopération sous-régionale/ sous-régionale 

Le trafic illicite d'armes légères ne peut être bien contrôlé par des pays agissant seuls, car le commerce illicite profite de la perméabilité des frontières. Les trafiquants savent vite trouver les filières où les contrôles nationaux sont faibles et profitent d'une coopération insuffisante entre les autorités chargées du contrôle aux frontières ou de différences entre réglementations nationales. Les Etats de la sous-région gagneraient donc à renfoncer la coopération bilatérale, notamment en mettant l'accent sur l'échange d'informations sur la circulation des armes entre les forces de sécurité et le personnel des douanes. Le Cameroun, par exemple, devrait particulièrement consolider cette coopération vis-à-vis du Tchad et de la RCA, pays partageant leurs frontières à l'Est avec le Soudan (d'où viendraient les armes à cause de la guerre) et fortement instables ces derniers temps ; il devrait également le faire avec le Nigeria d'où se développeraient de nombreuses activités de contre bande.

La coopération sous-régionale / sous -régionale doit aussi être renforcée. Car, les armes sont très têtues ; elles ne respectent pas les frontières. Si elles ne peuvent pas passer par le Sud, elles entreront forcément par le Nord, l'Est ou l'Ouest. Par conséquent, dans sa lutte contre la prolifération et la circulation illicites des ALPC, la CEEAC devrait collaborer avec les autres organisations sous-régionales du continent : la CEDEAO, la SADC et les autres. Elle devrait adhérer à tous les mécanismes et instruments de contrôle des ALPC créés au sein de ces organisations, à l'instar du Protocole de Nairobi ou du Protocole sur le contrôle des armes à feu des pays d'Afrique Australe, et oeuvrer pour la bonne marche des activités relatives à la lutte contre les armes légères, entreprises dans ces espaces géographiques.

· Créer un observatoire sous-régional des ALPC 

Placé sous l'autorité de la CEEAC, il devra avoir pour missions :

- collecter les informations sur les mouvements illicites des armes légères et des munitions et mettre ces informations à la disposition des Etats membres.

- Contrôler les frontières afin de prévenir et d'arrêter les mouvements illégaux des armes et des munitions.

- Elaborer des stratégies, politiques et programmes de lutte contre la prolifération des armes légères.

- Faire des rapports (annuels ou périodiques) sur les armes légères et les munitions.


· S'attaquer aux causes profondes du fléau

En plus de ces actions, les Etats de la sous-région devraient aussi mettre l'accent sur la lutte contre la corruption, surtout en ce qui concerne les forces de sécurité et le personnel des douanes chargés des contrôles au niveau des frontières. Parallèlement, il faudrait combattre la pauvreté. Car en réalité, ce qui pousse les individus à posséder les armes, c'est l'accroissement excessif des besoins face à la modicité des moyens. Les populations affamées n'hésitent donc pas à chercher les armes pour braquer ou tuer pour survivre. Il suffit donc de leur assurer le minimum vital pour que disparaisse la tentation de recourir aux armes comme moyen de survie. C'est donc dire que, combattre la corruption et la pauvreté, c'est combattre la circulation illicite des armes légères.


·Tendre vers l'approche de solutions démocratiques dans les Etats

Cette approche, qui semble réaliste, a l' avantage de permettre d' aller à la source des problèmes et de comprendre aujourd'hui que le déficit démocratique dans un pays est l' une des causes principales des tensions sociales et des conflits armés, sources d' accumulation des armes légères. Le Kenya, affecté ces derniers jours par des tensions sociales meurtrières105(*) (qui laissent d'ailleurs augurer une guerre civile sanglante de longue durée), est un exemple qui confirme parfaitement ce qui précède. Pour amoindrir les causes des conflits armés, les Etats de la sous-région devraient donc opter pour la démocratisation des institutions. Cette démocratisation doit être de nature à garantir la transparence dans les différentes consultations électorales et à permettre l'alternance au pouvoir.

Combattre efficacement la circulation anarchique des armes légères revient donc à renforcer la démocratie dans les Etats, et c'est à cette oeuvre que devrait s'atteler la CEEAC aujourd'hui.

3. Les mesures à l'échelle nationale

Les Etats de la sous-région doivent continuer à mettre en oeuvre leurs stratégies de lutte contre la circulation illicite des ALPC ; mais ils doivent aussi innover. Le Cameroun, par exemple, a franchi un grand pas en matière de renforcement des capacités de ses forces de défense, en créant le CSID. Au vue des enseignements qui y sont dispensés, l'officier camerounais (mais aussi les officiers des autres pays de la sous-région et même des pays hors de la sous-région) a maintenant une large connaissance sur les problèmes de sécurité, de défense, de droit humanitaire. Mais le Cameroun gagnerait encore davantage si, dans le programme des enseignements du CSID, il y est introduit un module spécial sur la maîtrise des armes légères. Ce module pourrait comporter, par exemple, trois créneaux (ou Unités de Valeur). Un premier créneau intitulé : « Droit des armes légères », viserait à donner aux officiers stagiaires une large connaissance des textes (nationaux, sous-régionaux, régionaux et internationaux) relatif aux armes légères et munitions (traités, conventions, accords, protocoles, etc....). Un deuxième créneau intitulé « Economie des armes légères », aura pour but de permettre aux apprenants de maîtriser le fonctionnement du marché des armes légères et des munitions. Un troisième créneau ayant pour titre : « Initiation aux techniques de contrôle des armes légères », permettrait aux officiers stagiaires de renforcer leurs capacités techniques en matière de lutte contre la circulation illicite des ALPC. Cela suppose donc qu'il peut être envisagé au sein du CSID la formation des officiers spécialisés dans la lutte contre le trafic illicite des armes légères.

4. les mesures au niveau de l'ONU

Des efforts doivent également être faits au niveau des Nations Unies.

· Améliorer les instruments sur les armes légères 

Les Nations Unies ont franchi un pas très important dans le cadre de la lutte contre les armes légères en créant en 1991 le Registre des armes conventionnelles, afin d'améliorer la transparence. Cet outil, qui a déjà permis de diffuser des informations sur les transferts de 1992, 1993 et 1994, est important mais devrait être amélioré. Trois modifications devraient pouvoir lui être apportées. D'abord les armes légères devraient pouvoir y être inclues. Ensuite les informations à communiquer par les Etats devraient également inclure les stocks d'armements existants ; actuellement seuls sont répertoriés les flux des importations et des exportations. Enfin, il s'agirait de rendre obligatoires les déclarations des Etats membres. Si de plus un office de contrôle international indépendant des Etats pouvait opérer des vérifications, un pas considérable serait franchi.

En ce qui concerne l'instrument international sur la traçabilité des ALPC, des améliorations devraient aussi être faites. D'abord les munitions, exclues de son champ d'application, devraient être inclues. Ensuite, il faudrait donner la possibilité aux forces de maintien de la paix pour pouvoir conduire les opérations de traçage. En outre, il faudrait faire figurer sur le document des mesures préventives de vérification physique des transferts ainsi que les mesures de vérification proactive de l'itinéraire des transporteurs. Enfin, il faudrait rendre l'instrument légalement contraignant.

· Mettre au point un traité de non prolifération anarchique des ALPC et des munitions 

Tout comme elle l'a fait avec les armes nucléaires, qui font aujourd'hui l'objet d'une stricte interdiction, la communauté internationale devrait parvenir à un traité de non prolifération anarchique des ALPC et des munitions. Ce traité devrait déclarer la production ou la commercialisation illicite comme un crime contre l'humanité. Il devrait interdire l'exportation des ALPC et des munitions vers les pays qui violent les droits humains ou qui sont en conflit armé. De telles livraisons d'armes devraient également être considérées comme un crime contre l'humanité et des sanctions sévères (embargo, interdiction de fabrication, etc) devraient être prises à l'encontre des pays contrevenants ou des trafiquants qui se livrent au commerce illicite. Les trafiquants qui ne se conforment pas à la réglementation devraient être poursuivis et traduits devant la cour Pénal International.

5- La responsabilité de l'Union Européenne

Le code de conduite de l'Union Européenne doit être profondément amélioré pour devenir un véritable instrument de limitation des armes légères. En plus de rendre cet instrument juridiquement contraignant, la liberté ne devrait plus être laissée à l'Etat membre de prendre la décision d'exporter ou non les armes. Les livraisons d'armes devraient être conditionnées par le respect des huit critères définis dans le code de conduite. Le non respect de ces critères devrait entraîner des sanctions.

Par ailleurs, les pays comme le Royaume-Uni devraient rompre avec le système de licences ouvertes, lesquelles favorisent une prolifération et une circulation accrues des armes. Ils devraient plutôt opter pour un système fermé qui freine, à coup sûr, la production incontrôlée des armes légères.

En définitive, la prolifération et la circulation illicites des ALPC sont un problème qu'il faut attaquer à la base. Jusqu'à présent, la communauté internationale applique une politique de réaction alors qu'il faut prendre des mesures préventives. En effet, c'est en amont que la communauté internationale devrait agir et non en aval. Pour que la circulation des armes s'amenuise, il faut absolument diminuer la production. Il revient donc à l'ONU de prendre des mesures rigoureuses en imposant des quotas de production aux Etats. Elle devrait déclarer les ALPC armes de destruction massive, au même titre que les armes nucléaires, et créer aussi une sorte d'agence internationale des armes légères et des munitions, qui serait l'équivalente de l'Agence Internationale de l'Energie Atomique. L'agence internationale des armes légères aura pour mission d'inspecter dans les usines de production des ALPC pour voir si les Etats respectent les normes internationales et les quotas fixés. C'est par ce chemin qu'il est possible de parvenir à lutter contre la prolifération et la circulation illicites des ALPC. La paix et la sécurité mondiales en dépendent.

BIBLIOGRAPHIE

A. OUVRAGES GENERAUX

1- GRAWITZ, Madeleine, Méthodes des Sciences sociales, Paris, Dalloz, 7e édition 1990, 1104 pages.

2- LOUBET DELBAYE, J. Louis, Introduction aux méthodes de sciences sociales, Privat, 1989, 189 Pages.

B. MEMOIRES

1- Chabi Dramane Bouko, La circulation des armes légères et de petit calibre en Afrique de l'ouest, contribution à une étude au programme de désarmement, Université d'Abomey- Calvi, www.memoireonline.com

2- Valverde, Benjamin, Le trafic illicite d'armes légères, DESS de géopolitique, Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, Septembre 2004, www.memoireonline.com

C. ARTICLES

1- ADAM Bernard, «  Les transferts d'armes vers les pays africains », in Document du GRIP, G1610, Bruxelles, 20/10/97

2- Atsutsé Kokouvi Agbobli : « l'Afrique Centrale : enjeux et rivalités des grandes puissances », in Prévention des conflits en Afrique Centrale : prospective pour une culture de la paix, Ed. Karthala, Paris, 2001

3- AYISSI, Anatole, « La prolifération des armes légères et de petit calibre : un défit majeur de paix et de sécurité », in Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N° 1 Université de Yaoundé II, FSJP, Yaoundé, 2001.

4- AYISSI, Anatole, « Le défi de la sécurité régionale en Afrique après la guerre froide : vers la diplomatie préventive et la sécurité collective », in travaux de recherche, UNIDIR, 1994.

5- AYISSI, Anatole, « Paix générale et sécurité fragmentée : l'Afrique dans / et le nouvel ordre sécuritaire mondial », in www.africaaction.org/rtable/ayiooo3f.htm

6- Berghezan, Georges, « Transferts d'armes vers l'Afrique Centrale et leurs conséquences géopolitiques », in La crise congolaise : enjeux et reconstruction nationale, GRAPPE-Congo, sous la direction de Jeannot MOLOLI DANGA KASSA, l' Harmattan, Université libre de Bruxelles, 16-17 mars 2001.

7- CEREBA et Caritas Congo : « L'impact sur le développement de la prolifération d'armes légères en République Démocratique du Congo », in Haut Conseil de la Coopération Internationale, Paris, janvier 2006.

8- Grimmett, Richard, «Conventional Arms Transfer to Developing Nations 1987 1994», in Congressional Research Service, Washington, 4/08/96

9- Ilhan Berkol : « L'instrument international de l'ONU sur la traçabilité des armes légères et de petit calibre », in Notes d'Analyse du GRIP, 23 mars 2007.

10- Intriligator Michael D. « Les défis que présente la définition de la sécurité, la définition de la à l'échelle mondiale », in, Revue périodique des Nations Unies sur le Désarmement, vol. XIV, N°4, New York, 1991

11- KOUNOU, Michel, « les conflits armés post guerre froide en Afrique au sud du Sahara : un essai de caractérisation », in Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N° 1 Université de Yaoundé II, FSJP, Yaoundé, 2001.

12- Sayidiman Surohadiprojo : « Les Systèmes de sécurité visant à prévenir les guerres », in Revue périodique des Nations Unies sur le désarmement, volume XIV, N°4, New York, 1991

13- WRIGHT, Steve, « Ce trafic `'légal'' des armes légères », in Le Monde Diplomatique, Paris, janvier 2001.

D. RAPPORTS

1- Rapport 2007 du Graduate Institute Studies de Genève sur les armes légères

2- RACKLEY, Edward B., Burundi-Armes légères et violence armée : quel impact pour les femmes, Document du GRIP, 27 pages

3- Ilhan Berkol, Marquage et traçage des armes légères, Document du GRIP, 72 pages.

4- RENAULD, Anne, RDC-Ressources naturelles et transfert d'armes, Document GRIP, 33 pages.

E. REVUES

1- Revue périodique des Nations Unies sur le Désarmement, vol. XIV, N°4, New York, 1991

2- Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N° 1 Université de Yaoundé II, FSJP, Yaoundé, 2001.

3- Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N° 3 Université de Yaoundé II, FSJP, Yaoundé, 2006.

F. JOURNAUX ET MAGAZINES

1- Le Monde Diplomatique, N° 564, Paris, Mars 2001.

2- Diplomatie, N° 26, Paris, mai-juin 2007.

G. TEXTES OFFICIELS

1- Charte des Nations Unies

H. DICTIONNAIRES

1- Dictionnaire Encyclopédique Petit Larousse illustré, 1993.

2- Dictionnaire Encyclopédique Petit Larousse illustré, Ed. 1975

I. WEBOGRAPHIE

1- www.grip.org

2-www.oxfam.org

3- www.iansa.org

4- www.armyrecognition.com

5- www.ctcmr.org

6- www.google.fr

7- www.memoireonline.com

TABLES DES MATIERES

SOMMAIRE I

DEDICACE II

REMERCIEMENTS III

LISTE DES TABLEAUX IV

LISTE DES ABREVIATIONS V

RESUME VII

ABSTRACT X

AVANT-PROPOS XIII

INTRODUCTION GENERALE 14

1. La définition des concepts de l'étude 14

2. L'objectif et l'intérêt de l'étude 15

3. La problématique de l'étude 15

4. La formulation des hypothèses 17

a. L'hypothèse générale 17

b. Les hypothèses de recherche 18

6. La localisation de l'étude 18

7. Les difficultés rencontrées 20

PREMIERE PARTIE : ETUDE DU PHENOMENE 21

CHAPITRE 1ER : LES CARACTERISTIQUES ET LES FACTEURS DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION ILLICITES DES ARMES LEGERES ET DE PETIT CALIBRE EN AFRIQUE CENTRALE 22

SECTION I : LES FACTEURS DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION DES ALPC 22

I. Les facteurs historiques 23

II. Les facteurs socio-politiques 23

III. Les conflits armés internes comme facteurs de prolifération des armes 24

IV. Le rôle des réfugiés dans la circulation des armes. 25

V. La commercialisation des ALPC 26

SECTION II : LES CARACTERISTIQUES DE PROLIFERATION ET DE CIRCULATION ILLICITES DES ALPC 29

I. L'absence d'une norme internationale coercitive sur les ALPC 30

II. La réglementation mitigée de certaines armes : le cas de l'AK-47 30

III.L' absence d'un instrument fiable sur la traçabilité et le marquage 31

IV. Les caractéristiques physiques des armes légères 31

CHAPITRE 2 : LES PROCESSUS DE PRODUCTION ET LES MODES D'ACQUISITION ILLICITES 33

SECTION I : LA PRODUCTION INDUSTRIELLE DES ALPC DANS LE MONDE 33

I. La production des pays industrialisés du Nord 34

A. Les pays et les industries d'armes européens 34

1. La production et les industries françaises d'armes légères 34

2- La Grande-Bretagne 35

3- La production de l'Allemagne 35

4. La production et les sociétés italiennes d'armes 36

5. La fabrication des armes en Russie 36

B. Les industries d'armes américaines 36

1. Les industries d'armement aux Etats-Unis 37

2. La production des armes au Canada 37

II. La fabrication des armes en Afrique 37

A. Les industries sud-africaines d'armement 38

B. Les industries de l'Ouganda 38

C- Les industries nigérianes 38

SECTION II : LA FABRICATION ARTISANALE DES ARMES ET DES MUNITIONS 39

I. La production dans les pays de la sous-région d'Afrique Centrale 39

II. La fabrication dans les pays africains hors de la sous-région 39

SECTION III : LES MODES D'ACQUISITION ET LES TECHNIQUES DE TRANSFERT 40

I. Les modes d'acquisition des ALPC 40

A. Les acquisitions par voie officielle 41

1. Les acquisitions légales 41

2. Les acquisitions illégales 41

B. Les acquisitions illicites 41

II. Les techniques de transfert des armes 42

1. La technique de décomposition 42

2. Les techniques de dissimulation 43

3. La technique des faux convois d'aide humanitaire 43

4. La technique des faux véhicules administratifs 43

5. La technique du faux policier ou du faux gendarme 43

6. La technique des convois funèbres et des cercueils 44

7. La technique d'utilisation des personnes vulnérables 44

CHAPITRE 3 : LES CONSEQUENCES DE LA PROLIFERATION ET DE LA CIRCULATION ILLICITES DES ALPC DANS LA SOUS-REGION 45

SECTION I : LES CONSEQUENCES POLITIQUES 45

I. La militarisation de la population civile et l'impossible dialogue 45

II. Les risques de conflits armés par la prolifération des armes. 46

III. L'instabilité politique : la fréquence des coups d'Etat. 47

SECTION II : LES CONSEQUENCES SUR LA POPULATION CIVILE 49

I. L'accroissement du nombre de victimes civiles 49

II. L'accroissement de l'insécurité 50

III. Le problème de réfugiés et de déplacés 52

SECTION III : LES CONSEQUENCES HUMANITAIRES LIEES A LA CIRCULATION DES ARMES LEGERES 52

I. La difficulté d'agir de la communauté internationale 52

II. Les entraves à l'acheminement de l'aide humanitaire 54

DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE CONTROLE DES ALPC 56

CHAPITRE 4: PRESENTATION DES MECANISMES DE CONTROLE DES ALPC 57

SECTION I : LES MECANISMES DE LUTTE AU NIVEAU INTERNATIONAL 57

I. Le Protocole des Nations Unies contre la fabrication et le trafic illicite d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions 57

II. Le Programme d'Action des Nations Unies sur les ALPC 58

III. L'instrument de l'ONU sur la traçabilité des ALPC 59

SECTION II : LES INITIATIVES SOUS-REGIONALES CONTRE LA PROLIFERATION DES ALPC 60

I. Le conseil de paix et de Sécurité de l'Afrique Centrale. 60

II. La mise en oeuvre du Programme d'Action des Nations Unies par les pays de la CEEAC 61

III. L'accord de coopération en matière de Police Criminelle en Afrique Centrale 63

IV. La Déclaration de Nairobi sur le problème de la prolifération des armes légères illicite dans la région des Grands Lacs et la Corne de l'Afrique. 63

V. Le Programme d'Action coordonné sur la prolifération des armes légères illicites dans la région des Grands Lacs et la Corne de l'Afrique 64

VI. Le protocole sur le contrôle des armes à feu, des munitions et des autres matériels connexes de l'Afrique Australe 64

VII. Les initiatives de l'Afrique de l'Ouest : le Moratoire sur les armes légères. 64

SECTION III : LES AUTRES INITIATIVES 65

I. La politique de l'Union Européenne contre la circulation illicite des ALPC. 65

II. La stratégie des Etats-Unis contre la circulation illicite des ALPC 67

CHAPITRE 5 : APPRECIATION DES MECANISMES DE CONTROLE 69

SECTION I : LES LIMITES DES INSTRUMENTS DES NATIONS UNIES 69

I. Le Registre des armes conventionnelles : une législation restrictive 69

II. La portée limitée du protocole des Nations Unies contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu et munitions. 70

III. Le Programme d'Action des Nations Unies et ses limites 70

IV. Le caractère minimaliste de l'instrument de l'ONU sur la traçabilité des ALPC 71

SECTION II : LES FAIBLESSES DES MECANISMES SOUS-REGIONAUX 71

I. Les lacunes du protocole sur le COPAX 72

II. Les difficultés dans la mise en oeuvre du programme d'Action des Nations Unies 72

III. Les insuffisances dans le protocole de Nairobi 73

SECTION III : LA POLITIQUE AMBIGUË DE L'UNION EUROPEENNE ET DES ETATS-UNIS SUR LES ARMES LEGERES. 74

I. Les failles du code de conduite de l'Union Européenne 74

II. Les Etats-Unis : entre respect de la loi et sauvegarde des intérêts 77

CONCLUSION 79

1- Le rôle de l'Union Africaine 79

2- Les mesures au niveau sous-régional 80

3. Les mesures à l'échelle nationale 82

4. les mesures au niveau de l'ONU 83

5- La responsabilité de l'Union Européenne 84

BIBLIOGRAPHIE 86

ANNEXES

ANNEXE 1

Fusil d'assaut AK-47 (kalachnikov)

L'arme la moins réglementée, la plus meurtrière et la plus vendue dans le monde

Caractéristiques :

§ Poids : 3,8 kg (vide) ; 4,3 kg (chargé)

§ Longueur : 870mm

§ Capacité du tir : 600 coups/min

§ Vélocité : 710m/s

§ Portée maximale : 1500 m

Source : www.google.fr

ANNEXE 2

MP5A3

Le Pistolet Mitrailleur le plus répandu dans le monde

Caractéristiques :

§ Longueur : 680 mm

§ Poids : 2,970 kg

§ Longueur du canon : 225 mm

§ Chargeur : de 15ou 30 coups

§ Cadence de tir : 800 coups/min

Source : www.armyrecognition.com/forum

ANNEXE 3 :

Quelques armes de poing

Bersa Thunder 22 Taurus P22

Calibre 22LR Calibre 22LR

10 coups 9+1 coups

Crosse polymère Double action

Finition bronzée, bi-colore ou argentée Bronzée

Longueur 168 mm 3''

Poids 535 g 1 ère catégorie

4éme catégorie

SIG P226 Taurus 44CP

· Calibre 9mm PARA

· Construloc

· 15 coups

Calibre 9 mm PARA Finition bronzée ou Inox Matte

Construction tout acier Calibre 44Mag

Culasse monobloc Capacité 6 coups

15 coups Poids 1,5 kg

Visée fixe Crosse synthétique

1ère catégorie 4éme catégorie

Source : www.google.fr

ANNEXE 4

Quelques exemples de munitions

Source : www. ctcmr.org/debut/munition.html

ANNEXE 2

MP5A3

Le Pistolet Mitrailleur le plus répandu dans le monde

Caractéristiques :

§ Longueur : 680 mm

§ Poids : 2,970 kg

§ Longueur du canon : 225 mm

§ Chargeur : de 15ou 30 coups

§ Cadence de tir : 800 coups/min

Source : www.armyrecognition.com/forum

ANNEXE 3 :

Quelques armes de poing

Bersa Thunder 22 Taurus P22

Calibre 22LR Calibre 22LR

10 coups 9+1 coups

Crosse polymère Double action

Finition bronzée, bi-colore ou argentée Bronzée

Longueur 168 mm 3''

Poids 535 g 1 ère catégorie

4éme catégorie

SIG P226 Taurus 44CP

· Calibre 9mm PARA

· Construloc

· 15 coups

Calibre 9 mm PARA Finition bronzée ou Inox Matte

Construction tout acier Calibre 44Mag

Culasse monobloc Capacité 6 coups

15 coups Poids 1,5 kg

Visée fixe Crosse synthétique

1ère catégorie 4éme catégorie

Source : www.google.fr

ANNEXE 4

Quelques exemples de munitions

Source : www. ctcmr.org/debut/munition.html

* 1 Madeleine GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 1990, P.425

* 2 Directrice du Bureau des affaires de désarmement de l'ONU.

* 3 Michael D. Intriligator : « Les défis que présente la définition de la sécurité. La définition de la sécurité à l'échelle mondiale », in Revue périodique des Nations Unies sur Désarmement, volume XIV, N°4, 1991, p.64

* 4 La Corée du Nord a déjà l'arme nucléaire

* 5 L'Iran cherche peut-être encore à se doter de l'arme nucléaire

* 6 J. Louis LOUBET DELBAYLE, Introduction aux méthodes des sciences sociales, Privat, 1989, P. 158

* 7 8 J. Louis LOUBET DELBAYLE, Op. Cit. P. 160.

* 9 Commission Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, RCA et Tchad).

* 10 Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

* 11 Atsutsé kokouvi Agbobli : « l'Afrique Centrale : enjeux et rivalités des grandes puissances », in la prévention des conflits en Afrique Centrale : prospective pour une culture de la paix, Ed. Karthala, Paris, 2001, P.40

* 12 Selon la rapport 2007 sur le armes légères émanant du Graduate Institute Studies de Genève ; il y a 5 ans, ce même rapport répertoriait 640 millions d'armes dans le monde.

* 13 Selon certaines sources non officielles.

* 14 Chabi Dramane BOUKO, La circulation des armes légères et de petit calibre en Afrique de l'Ouest : contribution à une étude au programme de désarmement, Université d'Abomey-calavi, P.3, www. mémoire online.com

* 15 Anatole Ayissi, « Le défi de la sécurité régionale en Afrique après la guerre froide : vers la diplomatie préventive et la sécurité collective », travaux de recherche, UNIDIR, 1994.

* 16Bernard ADAM, « Les transferts d'armes vers les pays africains- Quels contrôles ? », in Document du GRIP, G1610, 20/10/97.

* 17 Bernard ADAM, idem.

* 18 Michel KOUNOU, « Les conflits armés post guerre froide en Afrique au Sud du Sahara : un essai de caractérisation », in Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N° 1, Université de Yaoundé II, FSJP, Yaoundé, 2001, P. 232.

* 19 Michel KOUNOU, idem.

* 20 Auteur de Trafics d'armes : enquête sur les marchands de mort, Paris, Flammarion, 2006.

* 21 Diplomatie N°26, Mai-Juin 2007, P.76.

* 22Selon l'information recueillie au site web : www.wikipedia.org

* 23 Richard Grimmett, «Conventional Arms Transfers to Developing Nations, 1987-1994», Congressional Research Service, Washington, 4/08/95.

* 24 Anatole Ayissi, « La prolifération des armes légères et de petit calibre : un défis majeur de paix et de sécurité », in Revue Africaine d'Etudes Politiques et Stratégiques, N° 1, Université de Yaoundé II, FSJP, Yaoundé, 2001, P. 174.

* 25 Avtomat Kalachnikova modèle 1947.

* 26 Cité par Oxfam International, in Communiqué de presse Oxfam, 26 juin 2006.

* 27 Amnesty Intrenational, Oxfam International et le Réseau d'Action International sur les Armes Légères

* 28 Cité dans Diplomatie, N° 26, Mai-Juin 2007, p 75.

* 29 Généralement appelée AKM ou Kalachnikov Economique en raison de son coût de production réduit.

* 30 Un mouvement mondial qui lutte contre la violence armée. Il rassemble plus de 500 organisations de la société civile qui travaillent dans 100 pays pour mettre un terme à la prolifération et à l'utilisation abusive des armes légères et de petit calibre.

* 31 Steve WRIGHT : « ce trafic"légal" des armes légères », in Le Monde Diplomatique, Paris, janvier 2001, P.12 et 13.

* 32 Richard F. Grimmett, conventional Arms Transfers to Developing Nations, 1996-2003, Congressional Research Service Report for Congress, 26 Août 2004.

* 33 Richard F. Grimmett,op. cit.

* 34 Base de données de la Fondation Omega sur les entreprises du secteur militaire, de sécurité et de police.

* 35 Fritz Werner (Allemagne), New Lachausée (Belgique), Santa Barbara (Espagne) et Manurhin (France).

* 36 Annuaire sur les armes légères 2004 : droits en péril, projet de l'Institut Universitaire des Hautes Etudes Internationales, Genève, 2004, P.100.

* 37 SIPRI, Year book 2005.

* 38 Richard F. Grimmett, op. cit.

* 39 Amnesty International, RAIAL et Oxfam International, « les pays exportateurs d'armes du G8 et les transferts d'armes irresponsables », in Document Public, index AI : POL 30/007/2005, 22 juin 2005.

* 40 Le groupe des huit pays les plus industrialisés du monde.

* 41 Informations tirées du SIPRI Yearbook 2004 Armaments, Disarmement and International Security, Oxford University Press, 2004, tableau 12A.2

* 42 Voir P.40, infra.

* 43 Chabi Dramane Bouko, « La circulation des armes légères et de petit calibre en Afrique de l'Ouest : Contribution à une étude au programme de désarmement », Université d'Abomey-Calvi, www.mémoireonline.com

* 44 Voir la définition des concepts.

* 45 Voir tableau 8 et 9, pp. 74 et 75, infra.

* 46 Chercheur au GRIP.

* 47 Georges Berghezan : « Transferts d'armes vers l'Afrique Centrale et leurs conséquences géopolitiques », in La crise Congolaise : enjeux et reconstruction nationale, GRAPPE-Congo, sous la direction de Jeannot MOLOLI DANGA KASSA, L'Harmattan, Université libre de Bruxelles, 16-17 Mars 2001, P.63.

* 48 Mouvement de Libération du Congo.

* 49 Surtout les armes de poing comme les Pistolets Automatiques.

* 50 Ces personnes ont requis l'anonymat.

* 51 Mouvement Populaire pour la Libération de l'Angola.

* 52 Union Nationale pour la Libération Totale de l'Angola.

* 53 Surtout les Etats -unis.

* 54 Bernard ADAM : « Les transferts d'armes vers les pays africains », in Documents du GRIP, Bruxelles, 1997, P.3.

* 55 Précisément aux deux principales ethnies que sont les Hutu et les Tutsi.

* 56 Sayidiman Suryohadiprojo : «  les systèmes de sécurité visant à prévenir les guerres », in Revue périodique des Nations Unies sur le désarmement, volume XIV, N°4, New York, 1991, PP.78 et 79.

* 57 Michel KOUNOU : problème de sécurité en Afrique, cours de DESS Stratégie, Défense, Sécurité et Gestion des conflits, université de Yaoundé II, FSJP, année académique 2005-2006, P.22, inédit.

* 58 Par exemple mauvaise gestion des recettes pétrolières, détournements des fonds publics par les dirigeants, personnalisation du pouvoir, baisse du pouvoir d'achat des populations, etc.

* 59 Amnesty International, Oxfam International, RAIAL / IANSA, GRIP, etc.

* 60 Notamment la convention IV de Genève de 1949sur la protection des personnes civiles.

* 61 Date de décès par accident d'avion du président rwandais Abyarimana et son homologue burundais.

* 62 Bernard ADAM : « les transferts d'armes vers les pays africains », in Document du GRIP, Bruxelles, 1997, P.4.

* 63 Il est directeur des Nations Unies et de la coopération décentralisée au ministère camerounais des Relations Extérieures.

* 64 Cité par Raphaël Mvogo, « Développement-Afique Centrale : casse-tête pour arrêter la circulation de sept millions d'armes légères », in www.ipsinternational.org/fr

* 65 Mission de l'Organisation des Nations Unies en Somalie.

* 66 Mission des Nations Unies au Rwanda.

* 67 Anatole Ayissi : « paix générale et sécurité fragmentée : l'Afrique dans / et le nouvel ordre sécuritaire. mondial », in www.africa action. Org/rtable/ayi0003f.htm

* 68 CEREBA : « L'impact sur le développement de la prolifération d'armes légères en République Démocratique du Congo », in Haut Conseil de la Coopération Internationale, Paris, janvier 2006, P.4.

* 69 Centre d'Etudes et de Recherche en Education de Base pour le Développement Intégré.

* 70 Caritas Congo : « L'impact sur le développement de la prolifération d'armes légères en République Démocratique du Congo », in Haut Conseil de la Coopération Internationale, Paris, janvier 2006, P.4.

* 71 Benjamin Valverde, «  Le trafic illicite d'armes légères », DESS de géopolitique, université Paris I Panthéon - Sorbonne, Septembre 2004, www.memoireonline.com

* 72 Pargraphes 4 a et 4 b de l'Instrument International.

* 73 Ilhan Berkol, «  L'instrument international de l'ONU sur la traçabilité des armes légères et de petit calibre », in Notes d'Analyse du GRIP, 23 mars 2007.

* 74 Chefs d'Etat-Major des forces armées ou leurs représentants ; chefs de police ; experts des ministères des Affaires étrangères / Relations extérieures ; expert des ministères de la Défense / Forces armées ; experts des ministères de l'intérieur / Sécurité ; experts d'autres départements ministériels invités en fonction de l'ordre du jour de la commission.

* 75 Burundi, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Kenya, Ouganda, Rwanda, Soudan, Somalie et Tanzanie.

* 76 Le Tchad, la RCA, la RDC partagent la frontière avec le Soudan ; la RDC est limitrophe avec la Tanzanie, etc.

* 77 Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest.

* 78 Le Moratoire a été renouvelé en Juillet 2001 pour une autre période de 3 ans.

* 79 Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée- Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Togo.

* 80 Notamment par un renforcement des cadres législatifs nationaux, la transparence, et l'amélioration de la gestion et de la sécurité des stocks.

* 81 Il s'agit de l'US Conventional Arms Transfer Policy, ou CAT.

* 82 Benjamin Valverde,op.cit, p.35.

* 83 Parlements nationaux.

* 84 Les Etats-Unis et la Chine notamment.

* 85 Le Calendrier de mise en oeuvre du programme d'activités prioritaires a été élaboré en 2003 (voir Tableau 7, p. 62, supra).

* 86 Rapport final de l'atelier, P.3

* 87 Ibid P.8

* 88 Ibidem P.10

* 89 Notamment l'Angola, la RDC, le Burundi.

* 90 Notamment la RDC.

* 91 Voir IV, Section I, chapitre 4, p. 63, supra.

* 92 Voir I et II, Section III, chapitre 4, pp. 65et 67, supra.

* 93 Bombes, grenades, munitions, mines et autres.

* 94 L'union Européenne a décrété l'embargo contre le Soudan le 16 Mars 1994et contre le Myanmar en 1996.

* 95 Benjamin Valverde Op. Cit. P. 14.

* 96 En 2001, les exportations d'armes légères italiennes ont représenté une valeur de 298,7 millions de dollars américains selon l'Annuaire sur les armes légères 2004 : droits en péril, projet de l'Institut universitaire des hautes études internationales, Genève.

* 97 Algérie, Colombie, Erythrée, Inde, Indonésie, Israël, Kazakhstan, Nigeria, Pakistan et Sierra Léone.

* 98 Notamment l'Algérie, l'Arabie Saoudite, le Maroc, le Pakistan, la Syrie et la Turquie.

* 99 Il y a des licences d'exportations individuelles ouvertes (Open Individual Export Licences) et des licences d'exportation générales ouvertes (Open General Export Licences).

* 100 Voir II, section III, chapitre 4, Supra.

* 101 Benjamin valverde, op. cit. P. 58.

* 102 Sophie Clairet, «  Commerce des armes, l'impossible contrôle », in Diplomatie, N°26 Paris mi-juin 2007, P. 65.

* 103Amnesty International, Oxfam International et RAIAL, « Les pays exportateurs d'armes du G8 et les transferts d'armes irresponsables », in Document Public, 22 juin 2005, P.10.

* 104 Benjamin Valverde, op.cit. P. 46.

* 105 A la date du 18 janvier 2008 ces tensions sociales auraient déjà fait plus de 700 morts parmi les civils.






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