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Ciblage d'inflation versus ciblage de niveau des prix : avantages comparés dans l'UMOA

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par Alain BABATONUDE
Université d'Abomey-Calvi - Diplome d'études approfondies 2009
  

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CHAPITRE I

CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE

1 Cette idée a été formulée lors d'un colloque sur les anticipations rationnelles tenu dans le Maine en 1979.

Les dimensions théoriques et méthodologiques de l'étude des avantages comparés des règles de ciblage dans l'UMOA sont explorées dans ce premier chapitre qui pose la problématique de recherche dans son contexte aussi bien général que spécifique. La revue de littérature tant théorique qu'empirique permet de situer le cadre méthodologique applicable aux économies étudiées, inspiré des travaux de Svensson (1999).

SECTION I : PROBLEMATIQUE, OBJECTIF ET HYPOTHESE

Depuis deux décennies avec les premières expériences de la Nouvelle Zélande ayant adopté la politique de ciblage de l'inflation dès 1990, le développement et l'approfondissement aussi bien théorique qu'empirique des règles de ciblage ont fait l'objet d'importantes études. Deux régimes ont émergé : la cible d'inflation et la cible de niveau des prix. Et la coexistence d'avantages et d'inconvénients certains qu'il s'agisse de l'un ou l'autre des régimes de ciblage pose le problème de l'opportunité, de la priorité et de l'efficacité au regard de l'objectif de stabilité des prix assigné à la Banque Centrale. Les spécificités et contraintes aussi bien internes qu'externes des économies de l'UMOA rappellent avec acuité cette problématique à développer dans cette section avant que ne soit exploré, l'essentiel des fondements théoriques des politiques de ciblage.

La politique monétaire contemporaine associe à la mise en oeuvre des règles monétaires optimales, l'objectif final de stabilité des prix, donc la prévision et la réalisation d'une inflation optimale pour l'économie. En effet, l'instabilité des prix est source d'incertitude, parce qu'elle fausse le processus de décision économique et entrave la croissance. L'objectif de stabilité des prix s'accompagne de la définition explicite ou implicite, par l'autorité monétaire, d'une cible d'inflation compatible avec les fondamentaux de l'économie, le volume de production notamment. Ainsi définie, la stabilité des prix s'interprète de deux façons : littéralement, elle peut se comprendre comme la stabilité du niveau de prix, c'est-à-dire, un niveau de prix stationnaire avec une faible variance ; en pratique, elle se caractérise par une faible et stable inflation. La première acception fait référence à une politique de ciblage du niveau de prix, la seconde à une politique de ciblage de l'inflation. Les études développées montrent que le choix de la définition de la stabilité

des prix n'est pas sans conséquence sur l'évolution de l''economie notamment sur la détermination de la production et de l'inflation d'équilibre (Aubert & Adjemian, 2003).

En l'état actuel des développements théoriques et empiriques, la mise en oeuvre de l'objectif de stabilité des prix assigné aux Banques Centrales, appelle de leur part, quatre mesures de politique de ciblage : i) ne fixer aucune cible explicite; ii) adopter une fourchette cible de taux d'inflation ; iii) formuler une cible en fonction du niveau des prix; iv) s'engager pour une cible de taux d'inflation. Dans chacun des cas, la Banque Centrale s'engage officiellement à respecter la mesure, pendant une période déterminée ou non. Sur l'étude d'impact de l'adoption ou non de cible entre différents pays, Johnson (1999) montre que la formulation de cibles d'inflation semble bien aider à réduire l'inflation et à la maintenir à un niveau inférieur, et ce, en influant sur le taux d'inflation attendu. Il s'en dégage alors pour la BCEAO, que la réalisation de l'objectif de stabilité des prix implique la définition d'une cible ; outre l'argumentation empirique, la structure des économies et l'expérience de la Banque d'émission constituent d'importants justificatifs à une politique discrétionnaire « encadrée2 » (constrained discretion). Deux mesures se déduisent : la première fait référence à une politique de ciblage du niveau des prix (price level targeting) et la seconde, à une politique de ciblage de l'inflation (inflation targeting).

Alors que les règles3 de ciblage sont définies en rapport aux intentions déclarées des autorités monétaires, le ciblage d'un indicateur donné repose sur l'hypothèse qu'une cible exprimée en fonction de cet indicateur est un objectif à long terme absolument important des autorités monétaires. Désignant à cet effet les conséquences à long terme de la politique monétaire, le ciblage implique un cadre décisionnel stratégique à l'intérieur duquel la Banque Centrale s'engage explicitement à appliquer une politique qui permet d'atteindre une valeur cible annoncée publiquement et ce, dans un délai précis. Le ciblage du niveau des prix s'entend d'une politique qui réagit systématiquement aux écarts du niveau des prix par rapport au sentier visé, afin d'éviter une dérive à long terme du niveau des prix. De même, le ciblage de l'inflation s'entend d'une politique qui réagit systématiquement aux écarts du

2La combinaison d'une cible imposée en matière d'inflation avec une certaine latitude dans les moyens des banques centrales a été qualifiée par Lars Svensson (1999) de « pouvoir discrétionnaire encadré ».

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Dans la littérature moderne, dont le début remonte à Kydland et Prescott (1977), par règles, il faut entendre l'instauration de mesures optimales -- mais non cohérentes dans le temps -- et par approche discrétionnaire, l'optimisation des résultats de chaque période (cohérence dans le temps), le risque étant cependant d'obtenir un résultat sous-optimal.

taux d'inflation par rapport au taux cible, ce qui implique une possibilité de dérive à long terme du niveau des prix. Y a-t-il une différence significative de politique monétaire selon que l'objectif de stabilité des prix s'exprime sous la forme d'une trajectoire cible pour l'évolution du niveau des prix ou du taux d'inflation ?

La première contribution théorique est due à Svensson (1999). Il étudie formellement, sous une courbe d'offre de Lucas avec persistance, s'il est favorable pour la société, dont les préférences ont pour argument l'écart de production et l'inflation, que la Banque Centrale cible le niveau des prix plutôt que l'inflation. A partir de la dérivation des équilibres discrétionnaires sous les deux régimes de ciblage, Svensson montre que la cible de niveau de prix est préférable à la cible d'inflation si la production est suffisamment persistante. L'écart de production à l'équilibre est indépendant du choix de la cible alors que le comportement de l'inflation diffère selon que l'on cible l'inflation ou le niveau de prix. Les premières études empiriques établissent que le choix entre le ciblage du niveau des prix et le ciblage de l'inflation repose sur un arbitrage entre d'un côté, la variabilité du niveau de prix à long terme et d'un autre côté, la variabilité de l'inflation et de la production à court terme (Aubert & Adjemian, 2003). Dès lors, les politiques de ciblage ont émergé avec l'approfondissement théorique, le développement empirique et l'adoption généralisée - par les Banques Centrales - des règles monétaires optimales de type Taylor ou non.

L'impact des taux directeurs de la BCEAO sur les variables économiques (Nubukpo, 2002) et l'évaluation de la règle de Taylor fondée sur le ciblage de l'inflation dans l'UMOA (Ténou, 2002) corroborent cette tendance. Pour reprendre les termes de Svensson (1999), « le choix entre une cible basée sur le niveau des prix et une cible fondée sur l'inflation équivaut à un arbitrage entre la variabilité à faible fréquence du niveau des prix d'une part, et la variabilité à haute fréquence de l'inflation et de la production, d'autre part » [traduction]. A quelle stratégie de ciblage obéit la politique de stabilité des prix dans l'UMOA au regard des variables fondamentales et structurelles des économies de l'espace ? Svensson (1999) montre que, si la politique monétaire est endogène et que les attentes sont rationnelles, la formulation d'une cible basée sur le niveau des prix permet de réduire la variabilité du niveau des prix et de l'inflation par rapport à celle qui est observée quand la

cible est définie en fonction de l'inflation, sans faire augmenter la variabilité de la production » : il existerait donc un « avantage gratuit » (free lunch).

Cependant, les développements théoriques antérieurs sur la définition et

l'application de cibles relatives au niveau des prix suscitent généralement le scepticisme. L'argument habituellement invoqué en faveur de l'adoption d'une cible de niveau des prix est que celle-ci facilite la planification à long terme et la conclusion de contrats en termes nominaux dans une perspective de stabilité des prix. Du côté des coûts, le principal argument reste que la poursuite d'une cible basée sur le niveau des prix s'accompagne d'une variabilité de l'inflation et de la production plus élevée à court terme que si la cible est exprimée en fonction de l'inflation4. Les chocs qui font passer le niveau des prix au-dessus (au-dessous) du sentier visé amènent les autorités monétaires à prendre des mesures désinflationnistes (inflationnistes) en favorisant une inflation inférieure (supérieure) à la moyenne, de manière à ramener le niveau des prix au sentier cible. Cette évolution en dents de scie de l'inflation autour de sa courbe tendancielle accroît la variabilité à court terme de l'inflation par rapport à ce que l'on observe lorsque la cible admet une dérive du niveau des prix et que seul le taux d'inflation est visé. La variabilité supérieure de l'inflation s'accompagne d'une hausse de celle de la production le long de la courbe de Phillips à court terme. De plus, s'il existe des rigidités nominales, ce qui pourrait être le cas quand l'inflation avoisine zéro, il est probable qu'une politique susceptible de nécessiter le recours à la déflation entraîne une récession.

Dans cette étude, le propos est d'évaluer ces points de vue opposés dans un cadre théorique de type standard où la Banque Centrale minimise une fonction de perte quadratique, étant donné une courbe de Phillips log-linéaire. Dans la pratique, avec l'adoption du pacte de convergence dans l'UMOA, la BCEAO adopte une politique de ciblage d'inflation à l'instar de la Banque Centrale Européenne avec un objectif de 3%. Intuitivement, l'ancrage monétaire qui prévaut entre les deux aires ne saurait seul justifier une politique monétaire de calibration compte tenu des différences de variabilités des

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Svensson (1999) parle à ce propos d'idée reçue (conventional wisdom), citant Fischer (1994). Par ailleurs, Fillion et Tetlow (1994) concluent que le fait de viser le niveau des prix accroît la variabilité de la production mais diminue celle de l'inflation.

arguments de la fonction de réaction des deux instituts d'émission d'une part, mais aussi des différences dans les mécanismes de transmission des signaux monétaires. Cette stratégie reste-elle optimale pour assurer la stabilisation macroéconomique dans l'UMOA telle que fixée dans le cadre des critères de convergence ? Autrement, l'objectif cible de taux d'inflation ainsi affiché justifie-t-il une bonne conduite de la politique monétaire dans l'espace ?

La mise en oeuvre de la politique de ciblage touche en effet deux aspects principaux de la politique monétaire dans l'UMOA : l'un est relatif à la structure des prix et de l'inflation, l'autre étant lié à l'indépendance et à la crédibilité de la Banque Centrale comme institution d'émission. Au regard de l'importance des chocs exogènes touchant l'ensemble des pays, l'origine monétaire des variations de prix reste a priori marginale pour permettre l'efficacité de l'instrument monétaire dans la politique de stabilité des prix. La politique de ciblage vaut-elle dans l'espace étant donné la récurrence des chocs d'offre essentiellement exogènes, lesquels font de l'inflation importée et de l'inflation par les coûts, les principales composantes des variations des prix ? Par ailleurs, au plan des fondamentaux de la politique de ciblage comptent, l'indépendance, la réputation et la crédibilité de la Banque Centrale. Le statut de la BCEAO du point de vue de ces trois qualifications permet-il d'opérationnaliser avec succès la politique de ciblage dans l'union ?

En distinguant dans le cadre de l'UMOA, les deux régimes de ciblage, cette étude cherche à vérifier le principal résultat de Svensson « d'avantage gratuit » lié à la cible de niveau de prix, mis en évidence par ailleurs dans des modèles reposant sur des fondements microéconomiques de type classique ou keynésien (Dittmar & Gavin, 2000), (Aubert & Adjemian, 2003). L'objectif principal de cette étude consiste à évaluer l'efficacité comparée des politiques de ciblage du niveau des prix et de l'inflation dans la transmission des impulsions monétaires aux économies de l'espace UMOA, plus spécifiquement à ce stade, il est question de tester l'existence de l'«avantage gratuit» lié à la politique de ciblage du niveau des prix (Svensson, 1999). L'intérêt apparaît double. D'un point de vue théorique, l'étude aborde un cas pratique de mise en oeuvre des politiques de ciblage en économie moins ouverte et moins développée représentative de l'UMOA afin de renforcer le corpus théorique existant en la matière. D'un point de vue pratique, dans le prolongement des

résultats obtenus par Nubukpo (2002) et Ténou (2002) principalement, l'étude offre un cadre analytique, stratégique et opérationnel de mise en oeuvre de la politique monétaire : un choix optimal de l'objectif cible pour réaliser la stabilité des prix.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle